Compte rendu

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

 

 

 

  communication sur le suivi des conclusions du rapport de la mission d’information relative à l’évasion fiscale internationale des entreprises (Mme Bénédicte Peyrol, rapporteure)              2

  communication de M. Julien Aubert, rapporteur spécial Énergie de la mission Écologie, développement et mobilité durables, sur des travaux de contrôle sur pièces et sur place              13

 

 

 

 

 

 


Mercredi
7 avril 2021

Séance de 11 heures 

Compte rendu n° 64

session ordinaire de 2020-2021

 

 

Présidence de

 

M. Éric Woerth,

Président

 


  1 

La commission entend une communication sur le suivi des conclusions du rapport de la mission d’information relative à l’évasion fiscale internationale des entreprises (Mme Bénédicte Peyrol, rapporteure).

M. le président Éric Woerth. Les travaux de la mission d’information sur l’évasion fiscale, présidée par Jean-François Parigi, nous avaient été présentés le 12 septembre 2018 par notre collègue rapporteure Bénédicte Peyrol. Allant au delà d’un suivi succinct de la mise en œuvre des trente-huit recommandations de la mission, vous avez, chère collègue, poursuivi un travail approfondi sur un certain nombre de thématiques : la diplomatie fiscale, les enjeux fiscaux de la numérisation de l’économie, les outils anti-abus, la lutte contre les paradis fiscaux, la modernisation de l’administration... Vous souhaitez également aborder la négociation entreprise sous l’égide de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en vue d’une réforme. Les choses bougent ; à la suite des travaux du G20, nous constatons ainsi que les États-Unis ont décidé, après la baisse massive intervenue sous le président Trump, de réaugmenter le taux de l’impôt sur les sociétés et, dans la droite ligne des propositions de l’OCDE, de plaider, sur le plan international, pour une hausse du taux minimal d’imposition sur les sociétés.

Mme Bénédicte Peyrol, rapporteure. Je n’avais pas prévu que le calendrier de cette communication soit aussi bien articulé avec les dernières annonces américaines, notamment celles faites par Mme Yellen, secrétaire au trésor des États-Unis, mais celles-ci tombent effectivement à pic.

Au début de l’année 2020, notre collègue M. Parigi, qui était toujours membre de notre commission, et moi-même avons entamé des travaux de suivi, que nous avons interrompu en raison de la crise. Je les ai repris à la fin de l’année. Je reviendrai rapidement sur la mise en œuvre des recommandations de la mission d’information, m’arrêterai sur quelques propositions appelant des précisions complémentaires, puis reviendrai sur le contenu de la réforme menée sous l’égide de l’OCDE en présentant quelques points sur lesquels nous devons être vigilants ainsi que des évaluations chiffrées.

Nous avions formulé trente-huit recommandations. Les trois quarts d’entre elles ont été mises en œuvre, ce qui est plutôt un motif de satisfaction, notamment huit des quatorze recommandations législatives, parmi lesquelles la création du « mini abus de droit », l’extension de la notion de pays à régime fiscal privilégié – pour ne pas dire « paradis fiscal »  , le renforcement de la transparence par l’élargissement de l’accès au registre des trusts et la réforme du régime des brevets, dont il fut beaucoup question lors de l’examen de la loi de finances pour 2019.

L’intégralité des recommandations relevant du Gouvernement ont été mises en œuvre totalement ou partiellement, dont une meilleure évaluation de l’évasion fiscale, une amélioration des relations entre administration et entreprises ou encore une refonte des outils de contrôle. Au niveau international, notamment dans le cadre de l’OCDE, cinq des six recommandations ont été totalement ou partiellement mises en œuvre ; je reviendrai sur la réforme en cours de négociation.

Je m’attarderai sur quelques recommandations, en me demandant s’il faut aller plus loin ou si elles sont satisfaites.

L’évaluation de l’impact de l’évasion fiscale avait fait l’objet d’une attention particulière dans nos travaux. Nous n’avons pas, en France, de chiffres reposant sur une méthodologie qui fasse consensus. Nous proposions donc la constitution d’un groupe de travail composé d’économistes, de fonctionnaires, d’experts de la statistique, d’élus, d’universitaires de différentes disciplines pour mettre en place une méthodologie et assurer un suivi annuel de ce phénomène qu’il est difficile d’évaluer. Formellement, aucun groupe de travail n’a été constitué. Cependant, à la suite du mouvement des « gilets jaunes », le Premier ministre de l’époque avait fait appel à la Cour des comptes pour qu’elle réalise un chiffrage et fasse des propositions pour lutter contre la fraude, l’optimisation et l’évasion fiscales. La Cour et l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) ont conclu que le chiffrage était très compliqué et encouragé à des réflexions. L’INSEE a d’ailleurs lui-même mené un important travail de chiffrage. Une évaluation de la fraude à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) a été faite, car c’est aujourd’hui l’impôt pour lequel il est le plus facile d’évaluer l’évitement fiscal, et le rapport de la Cour des comptes sur la fraude aux prélèvements obligatoires nous invite à regarder ce qui se passe à l’étranger.

Depuis ce rapport, des structures se sont mises en place au sein de l’administration fiscale, pour mener de nouvelles formes de contrôles, notamment les contrôles aléatoires, qui visent à produire des données statistiques fiables et évaluer l’évasion fiscale. Ainsi la mission interministérielle de coordination anti-fraude (MICAF) a-t-elle été créée – mais n’oublions pas que ses missions vont au delà de ce que je viens d’évoquer. De même, un observatoire européen de la fiscalité a été créé, dont la direction a été confiée à Gabriel Zucman, qui examine notamment la question de la lutte contre l’évasion fiscale.

Ce sont là des progrès mais je reste convaincue de la nécessité de mettre en place un groupe de travail afin de disposer d’une évaluation annuelle reposant sur une méthodologie qui fasse consensus. Il ne s’agit pas simplement de produire de la donnée, il s’agit d’éclairer nos choix politiques. Il s’agit aussi de mesurer l’impact de nos réformes en matière de fiscalité internationale et de mieux évaluer l’impact des conventions internationales passées en la matière ; nous pouvons à cet égard constater une amélioration de la donnée produite par la France. Il est nécessaire de systématiser l’évaluation des conséquences des choix que nous faisons en la matière ; c’est aussi dans l’intérêt des entreprises françaises.

Je ne vous rappelle pas l’existence de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales, qui vise à sanctionner les montages à visée exclusivement fiscale. Par la loi de finances pour 2019, nous avons créé le « mini-abus de droit », règle d’assiette qui permet de tenir en échec les montages abusifs dont la motivation fiscale revêt une dimension principale et non plus exclusive. Cette nuance avait fait et continue de faire débat, même si l’ensemble des outils internationaux et européens retiennent effectivement la notion de visée principale.

La mise en œuvre de ce nouvel outil avait été décalée d’un an par l’adoption d’un sous-amendement du rapporteur général d’alors, Joël Giraud, afin que les uns et les autres puissent s’approprier la notion : le « mini abus de droit » n’est en vigueur que depuis le début de cette année. Ainsi nous n’avons pas le recul suffisant pour apprécier sa mise en œuvre concrète. Cependant, si j’en crois mes interlocuteurs, les critiques se font beaucoup moins vives qu’il y a deux ans, notamment parmi les notaires, qui craignaient que ne soient remises en cause différentes modalités de gestion du patrimoine. À l’époque, le ministre Gérald Darmanin avait d’ailleurs publié différentes instructions de nature à les rassurer.

Je regrette toutefois que les instructions fiscales prises par Bercy excluent du champ d’application du mini-abus de droit l’impôt sur les sociétés (IS). Il est vrai qu’en même temps que nous introduisions cet outil dans notre droit, nous transposions en droit français une directive européenne prévoyant une clause générale anti-abus en matière d’impôt sur les sociétés. Nous nous retrouvons donc avec deux outils parallèles, au même objet et aux procédures différentes, ce qui peut être source de confusion. Par exemple, l’intervention du comité de l’abus de droit est prévue dans le cadre du mini-abus de droit alors que la clause générale anti-abus issue du droit européen l’exclut.

Je propose donc de fusionner les deux outils qui, tous deux, visent à lutter contre les montages à but « principalement » fiscal. Ainsi, nous unifierons les procédures et simplifierons notre droit, dans l’intérêt des contribuables, en même temps que nous faciliterons la tâche des juges et des avocats. La coexistence de ces deux dispositifs ne se justifie pas. Il ressort cependant des échanges que j’ai pu avoir avec des juristes, notamment des membres du Conseil d’État, que la notion de visée « principalement » fiscale continue de faire débat ; la notion de motif « essentiellement » fiscal, retenue par la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, pourrait être préférable. À mon sens, cela mérite un débat approfondi au sein de notre commission, le code général des impôts comportant plusieurs références à la notion de but principalement fiscal, de même que plusieurs directives européennes ou encore la clause anti-abus de la convention multilatérale de l’OCDE signée en juin 2017. Il faudrait du moins une harmonisation, et savoir ce qui est précisément visé.

En 2018, la mission avait suggéré d’élargir la notion de « régime fiscal privilégié ». Avant l’adoption d’un amendement que j’avais déposé dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude, un régime fiscal était considéré comme privilégié si l’imposition dans l’autre pays était inférieure d’au moins 50 % à l’imposition française. Désormais, le caractère privilégié est acquis si l’imposition étrangère est inférieure à 40 % ou plus de l’imposition française. La rapporteure de ce projet de loi, Émilie Cariou, et moi-même avions plaidé en faveur d’une telle évolution.

L’application de la notion de régime fiscal privilégié emporte certaines conséquences, comme le refus de déduction de certaines charges ou revenus passifs, lorsque les paiements sont dirigés vers un pays ayant un tel régime, prévu à l’article 238 A du CGI, l’extension de l’application du régime des sociétés étrangères contrôlées de l’article  209 B du CGI, en vertu duquel les bénéfices étrangers insuffisamment imposés de filiales de société françaises sont soumis à l’IS français. Je salue donc cette avancée qu’est la mise en œuvre de notre recommandation.

Le Parlement européen, le parlement français et les autres parlements européens ont pris à bras-le-corps le sujet de la lutte contre les paradis fiscaux. Une résolution du Parlement européen du 21 janvier 2021 traduit bien la volonté d’aller plus loin dans le traitement, au sein de l’Union européenne, de cette question qui demeure d’actualité.

Nous nous étions également penchés sur la question de la publicité de la déclaration pays par pays, le fameux « CbCR » (Country by Country Reporting) – la déclaration, elle, existe bel et bien dans notre droit. Les multinationales doivent déclarer où sont leurs filiales et leurs actifs, ainsi que ce qu’elles paient comme impôts dans d’autres États. Faut-il ou non rendre public cet outil actuellement uniquement à la disposition de l’administration fiscale ? Le président Parigi et moi ne pensions pas qu’une publicité généralisée serait une bonne solution ; nous proposions plutôt que des organisations non gouvernementales ou des journalistes accrédités puissent y accéder et l’exploiter pour l’information des citoyens que nous sommes.

Depuis lors, le Conseil de l’Union européenne a adopté une position allant dans le sens d’une publicité encadrée du CbCR. Attention, toutefois : à vouloir être trop « bon élève », ne risquons-nous pas de faire de nos entreprises les dindons de la farce face aux entreprises américaines ou chinoises ? Il convient donc d’accorder une attention particulière aux conditions de la publicité et aux intérêts économiques européens. Pour ma part, je m’en tiens à la proposition, à mon sens équilibrée, que nous avions faite en 2018.

En ce qui concerne les relations entre les entreprises et l’administration fiscale, la « nouvelle relation de confiance » instaurée par la loi du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance, dite ESSOC, est accueillie très favorablement par les entreprises de taille intermédiaire, les petites et moyennes entreprises et les grandes entreprises. Elle offre plus de sécurité juridique, permet des rectifications spontanées et améliore les rescrits et accords préalables en matière de prix de transfert.

Néanmoins, nous avons été alertés sur la nécessité de maintenir la pression politique en la matière, ainsi que sur celle de préserver les effectifs qui, au sein de l’administration fiscale, sont chargés de cette mission d’accompagnement des entreprises – un agent peut en venir à consacrer tout son temps de travail à une entreprise pendant des mois. Des travaux complémentaires paraissent en outre nécessaires en ce qui concerne la labellisation des entreprises vertueuses afin de parvenir à un véritable retour sur investissement.

La mission d’information avait – comment faire autrement ? – consacré une part substantielle de ses travaux à l’adaptation de la fiscalité nationale et internationale à la numérisation de l’économie.

Rappelons le contexte. Au mois de septembre 2018, lors de la présentation du rapport, un paquet fiscal européen était en discussion, tandis que le projet d’assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés (ACCIS) demeurait un objectif très concret. Hélas, ce projet est, à ce stade, enlisé, tandis que le paquet fiscal numérique n’a pas été adopté en raison de l’opposition de quelques pays.

Il n’en faut pas moins reconnaître de nombreuses avancées, telles la mise en place de notre taxe sur les services numériques (TSN) et sa mise en œuvre, malgré des débuts compliqués, marqués par l’ombre de mesures de rétorsion américaines. Saluons aussi la prise en compte de la nécessité de ressources propres dans le cadre du plan européen. Une solution est en cours d’élaboration et devrait être mise en place au cours de cette année.

Je mentionnerai également la décision Conversant rendue par le Conseil d’État le 11 décembre 2020, qui permet d’appréhender certaines opérations des géants du numérique au travers d’une assiette fiscale fondée sur l’activité plutôt que sur l’établissement physique sur le territoire national. Cet arrêt consacre pleinement l’approche consistant à privilégier la substance et la réalité économique plutôt que le simple formalisme juridique, et permet de qualifier d’établissement stable les entités qui, en France, travaillent pour des sociétés étrangères, en particulier pour fournir des prestations de marketing digital.

Il ne s’agit cependant pas d’un bouleversement de la jurisprudence – le cas d’espèce était très particulier –, mais le Conseil d’État semble évoluer dans sa conception de l’établissement stable. Cela se confirmera-t-il ? Il me paraissait important, du moins, de vous signaler cela.

Je ne vous détaillerai pas la réforme négociée sous l’égide de l’OCDE ; le projet de communication qui vous a été transmis, chers collègues, comporte de nombreux éléments. Le contexte politique semble extrêmement favorable, si l’on en croit la détermination affichée par la nouvelle administration américaine. Alors qu’il faut habituellement plusieurs mois pour qu’un nouveau négociateur soit nommé par les États-Unis, ce fut fait dès l’élection du président Biden ; c’est, en soi, un signe extrêmement positif, que confirme également la suite des négociations, très techniques. Il appartient à l’Europe de faire le maximum pour que les travaux progressent.

Cette réforme ambitieuse est articulée autour de deux piliers.

Le premier pilier, ou pilier 1, consacre la reconnaissance aux juridictions de marché d’un nouveau droit d’imposition des bénéfices, le « nexus » ; cela répond en partie à la volonté que nous exprimons collectivement, lors de l’examen des projets de lois de finances, de parvenir à une définition de l’établissement stable virtuel. Ce pilier prévoit les modalités de répartition entre ces juridictions d’une fraction du bénéfice d’un groupe dont l’activité se manifesterait par la présence de consommateurs ou d’utilisateurs sur un marché.

Le deuxième pilier, ou pilier 2, quant à lui, consiste à garantir que tous les bénéfices fassent l’objet d’une imposition minimale. C’est là une arme puissante dans la lutte contre les paradis fiscaux. Le taux minimum pourrait être de 12,5 %. L’OCDE anticipe la possibilité que les paradis fiscaux se dotent eux-mêmes, ensuite, d’un taux d’imposition minimal.

Concrètement, en ce qui concerne le pilier 1, les groupes dont le chiffre d’affaires excède 750 millions d’euros verraient une partie de leur bénéfice excédant un seuil de rentabilité donné, qui pourrait être de 10 %, attribuée aux juridictions de marché. Pour une entreprise du numérique, la France est un marché. Pour une entreprise française du luxe, par exemple, la Chine est un marché, et une partie de son bénéfice serait taxée sur le territoire chinois. L’un des points durs de la négociation sur le pilier 1 est précisément celui de son champ d’application : ne doit-il inclure que des entreprises du numérique ? ou devons-nous considérer toutes les entreprises ? Le caractère immatériel de l’activité – qui va croissant – doit être considéré. Il semblerait que les États-Unis préfèrent cette seconde option, au contraire des États européens. Sans doute cela sera-t-il une pierre d’achoppement des négociations.

Quant au pilier 2, l’imposition minimale s’appliquerait aux groupes dont le chiffre d’affaires excède 750 millions d’euros. Il s’agirait, pour chaque pays, de faire la différence entre un taux minimum, qui – en l’état des discussions – pourrait être de 12,5 %, et le taux effectif d’imposition de l’État concerné. Si le taux effectif d’imposition est inférieur au taux minimum fixé, le groupe sera redevable d’un impôt supplémentaire à hauteur de la différence entre les deux taux.

Combien les deux piliers de cette réforme, tels qu’ils ressortent du dernier état des négociations, rapporteraient-ils, au niveau mondial et à la France ? Au niveau mondial, le pilier 1 pourrait conduire à une hausse des recettes fiscales d’un montant compris entre 50 et 80 milliards de dollars. Pour la France, avec 0,1 % de recettes supplémentaires, le pilier 1 entraînerait un jeu à somme presque nulle.

Les effets du pilier 2 seraient plus importants : des effets directs de l’ordre de 40 milliards de dollars ; des effets indirects, de l’ordre de 30 milliards de dollars, qui résulteraient de l’évolution des pratiques des paradis fiscaux, conduits à relever leurs propres taux d’imposition. Pour la France, le montant des effets directs et indirects serait, selon le conseil d’analyse économique et le conseil des prélèvements obligatoires (CPO), qui avait présenté à notre commission le rapport que celle-ci lui avait commandé sur l’évolution de la fiscalité des multinationales, de 4 à 7,5 milliards d’euros.

Il conviendra d’être vigilant, en ce qui concerne le pilier 1, sur l’identification des entités payeuses. En ce qui concerne le pilier 2, il conviendra d’être attentif aux modalités de calcul du taux effectif d’imposition – le champ des impôts couverts et la question du traitement des dépenses fiscales devront être considérés. Les questions du report des déficits et du niveau du taux minimum doivent également être prises en compte. N’oublions pas nos propres taux réduits, notamment en matière de redevance de brevets.

Plus généralement, une approche globale est nécessaire ; il ne s’agit pas de n’adopter que l’un des deux piliers de la réforme. La réforme est en outre complexe, comme les règles concernées ; la question de la simplification se posera d’ailleurs au cours des prochains mois. Et quel outil retenir pour la mise en œuvre de la réforme, et selon quelle temporalité ? Faut-il une nouvelle convention multilatérale, ou renégocier séparément les conventions existantes ? La mise en œuvre d’une telle réforme pourrait prendre cinq à dix ans – ayons en tête que cela ne sera pas réglé en deux ans. Ce n’en sera pas moins, si la négociation aboutit, la plus importante réforme fiscale internationale depuis des décennies.

M. le président Éric Woerth. En ce qui concerne le mini abus de droit, il faut sans doute, effectivement, une simplification.

Quant au pilier 1, nous en mesurons mal l’impact pour la France, même s’il semble neutre. Je ne sais pas si les calculs sont publics ; nous manquons d’informations sur une question fondamentale. En effet, en appliquant les normes de l’OCDE, nous basculerions vers un régime fiscal très différent sans que l’impact pour notre pays soit clair. Le champ d’application, que nous tendons à restreindre aux « GAFA » (Google, Apple, Facebook, Amazon), alors que toutes les sociétés recourent au numérique, est évidemment un sujet fondamental.

Nous changeons d’avis sur le pilier 2 en fonction des États-Unis, qui veulent maintenant relever leur propre taux d’impôt sur les sociétés et voudraient éviter une compétition anormale et un dumping fiscal. Pourtant, cela dépend surtout du taux effectif d’IS. Il faut aussi s’entendre sur le calcul des bases, ce dont l’OCDE est parfaitement consciente. L’applicabilité de cette mesure mérite donc d’être améliorée.

En tout cas, je vous remercie, chère collègue, pour ce travail de suivi extrêmement précis.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général. Je remercie à mon tour la rapporteure pour son excellent travail, sur un sujet crucial. Non seulement l’évasion fiscale prive les politiques publiques de ressources mais elle sape le consentement à l’impôt et fragilise notre pacte démocratique.

J’observe avec satisfaction que les trois quarts des recommandations ont été mises en œuvre ; cela montre que la majorité agit sans concession contre l’évasion fiscale, même si c’est un sujet complexe et que le travail de fond est peu médiatisé. Je remercie aussi la rapporteure pour les développements approfondis qu’elle a consacrés à certains sujets, notamment la réforme entreprise dans le cadre de l’OCDE, qu’il était opportun de présenter aujourd’hui. Notre rapporteure partage-t-elle l’optimisme de notre ministre de l’économie, qui disait hier que nous étions tout proches d’une possibilité d’accord ?

En ce qui concerne la diplomatie fiscale, je regrette qu’il ait fallu attendre un an pour que des recommandations parlementaires, reprises par la Cour des comptes, suscitent ainsi une réaction.

J’en viens à mes questions. L’administration a-t-elle réalisé, ou prévoit-elle de réaliser, ses propres estimations de l’impact économique des deux piliers ? En ce qui concerne particulièrement le pilier 2, le taux de 12,5 % est-il pertinent à ce stade, du point de vue du réalisme politique mais aussi de celui de l’effectivité ?

Mme Dominique David. Je m’associe aux félicitations du rapporteur général au nom du groupe La République en Marche, et salue l’assiduité et la ténacité de la rapporteure sur ce sujet cardinal, d’autant que son travail porte ses fruits. Je salue les avancées réalisées, notamment la création du mini abus de droit, l’élargissement de la notion de pays à régime fiscal privilégié dans le cadre de la lutte contre les paradis fiscaux, le renforcement de la transparence par l’élargissement de l’accès au registre des trusts, ainsi que la mise en œuvre partielle d’autres recommandations importantes.

Je souhaite revenir sur les négociations internationales concernant le taux minimal d’imposition des entreprises où qu’elles soient installées, ce qui inclut les entreprises du numérique. Avant la réunion des ministres des finances du G20 prévue aujourd’hui, les ÉtatsUnis ont fait des propositions pour pousser leurs partenaires à trouver un accord sur ce sujet. L’objectif est de mettre fin à une course vers le bas entre les pays qui souhaitent attirer les entreprises sur leur territoire. Bruno Le Maire souligne l’opportunité historique qu’offre le G20, avec les États-Unis, de faire avancer l’idée d’une taxation des services numériques, pour parvenir à un accord global à l’OCDE à l’été prochain. L’OCDE souhaite en effet aboutir les 9 et 10 juillet prochains. En parallèle, dans le cadre de la création de nouvelles ressources propres pour le financement du plan de relance, l’Union européenne travaille également à une taxation de l’économie numérique. Si plusieurs pistes sont envisagées, c’est une version améliorée de la TSN française qui semble privilégiée. Le calendrier des négociations de l’Union européenne prévoit une proposition de la Commission en juin 2021. Madame la rapporteure, quelle est votre appréciation sur l’accélération de ces négociations ? Et quel impact les négociations européennes pourraient-elles avoir sur le calendrier de l’OCDE, et vice versa ?

Mme Véronique Louwagie. Je remercie la rapporteure de son travail. En matière de mini abus de droit, je comprends que la volonté du législateur n’a pas été fidèlement appliquée, ce qu’on peut regretter. Il faut donc y revenir.

Je n’ai pas bien compris si les contrôles aléatoires étaient déjà pratiqués ou non – s’ils ne le sont pas, quel serait le calendrier de leur mise en œuvre.

Je trouve très intéressant qu’un grand nombre de pays aient adhéré à l’idée d’une taxe sur le numérique, mais qu’en estil de la taxe sur les transactions financières, sur laquelle des promesses d’harmonisation nous ont été faites ?

M. Mohamed Laqhila. Pourquoi, dans une économie mondialisée, les entreprises recherchent-elles la meilleure option pour implanter leur siège ou leurs filiales ? En dehors d’une fiscalité avantageuse, elles recherchent avant tout la sécurité et la stabilité juridiques et fiscales et ne veulent pas subir de changements de règles en cours de match. Nous leur avons apporté une réponse avec la loi du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance (ESSOC). À l’issue d’une large consultation publique, M. Gérald Darmanin, alors ministre de l’action et des comptes publics, avait présenté, le 14 mars 2019, une nouvelle offre de services visant à renforcer la sécurité juridique de nos entreprises et à construire ainsi une nouvelle relation de confiance entre l’administration fiscale et les entreprises. Cette offre comportait sept dispositifs : l’accompagnement fiscal personnalisé pour les PME, le partenariat fiscal pour les entreprises de taille intermédiaire et les grandes entreprises, le guichet unique, la possibilité d’obtenir un certificat de conformité fiscale d’un tiers de confiance, l’amélioration du dialogue et des recours en cas de contrôle fiscal, l’amélioration de la procédure de délivrance des rescrits et l’appui au règlement des difficultés fiscales des entreprises à l’international. J’avais moi-même rendu un rapport dans le cadre d’une mission temporaire confiée par le Premier ministre relative au bilan et au suivi de ces mesures. La France se dote d’outils de fiscalité stables et sécurisés afin d’être attractive et d’éviter que nos entreprises aillent chercher de la sécurité juridique ailleurs. À titre personnel, je ne crois absolument pas à l’harmonisation fiscale dans une économie mondialisée. Comment notre pays doit-il donc se positionner dans cette concurrence mondiale, dans cette guerre, pour être un peu plus attractif que les autres ?

Mme Christine Pires Beaune. À mon tour, je remercie très sincèrement la rapporteure pour la qualité de ses travaux. Je ne peux que regretter, dans la mesure où les Panama papers ont fêté samedi leur cinquième anniversaire, que l’évasion fiscale des particuliers soit hors du champ de votre rapport.

Vous plaidez pour une certaine flexibilité vis-à-vis de pays exécutant imparfaitement les conventions fiscales pour ne pas les brusquer, comme le Brésil. Vous allez même jusqu’à remettre en cause votre recommandation de 2018 qui visait à informer régulièrement le Parlement sur les négociations de conventions fiscales en cours. Nous pensons, au contraire, utile que le Parlement en soit régulièrement informé.

Quant à la numérisation de l’économie, le rapport note l’échec du paquet fiscal numérique de la Commission européenne en raison de l’opposition de quatre États membres ; nous ne pouvons évidemment que le regretter. À l’image d’autres États, la France a mis en place la TSN, qui touche vingt-six entreprises dont une seule française. J’avoue ne pas comprendre la dénonciation de la double imposition entre IS et TSN puisque l’objet de la TSN est précisément de compenser le peu d’IS payé par les entreprises en question.

Votre rapport évoque le projet de taxe européenne qui fait l’objet d’une consultation publique qui n’est pas terminée. Pouvez-vous détailler les arguments qui vous font pencher pour une taxation sur le chiffre d’affaires de ces entreprises du numérique ?

Concernant les paradis fiscaux, je regrette comme vous que la loi ne soit pas appliquée et que le Gouvernement n’informe pas les commissions des finances et des affaires étrangères. Monsieur le président, peut-être pourriez-vous y remédier.

À l’heure où le Président Biden propose un impôt minimal international sur les bénéfices des sociétés à 21 %, le taux de 12,5 % envisagé par l’OCDE peut paraître « en retard sur son temps ». Qu’en pensez-vous ?

Enfin, s’agissant des moyens humains consacrés à la lutte contre l’évasion fiscale, vous saluez la possibilité d’un recours accru à des contractuels, qui permettrait la mobilisation de compétences externes et la facilitation de la mobilité sortante des agents. Ce schéma ressemble quand même dangereusement aux revolving doors, ces environnements où des personnels jouent alternativement les rôles respectifs des contrôleurs et des contrôlés, ce qui crée des conflits d’intérêts potentiels. Plutôt que de contribuer à la fonte des effectifs, ne faudrait-il pas au contraire muscler nos services de contrôle, accélérer la formation des inspecteurs et, pourquoi pas, améliorer la grille des salaires, afin de conserver ces compétences qui sont en concurrence avec de gros cabinets ?

Mme Sabine Rubin. En matière de paradis fiscaux, je note le souci d’une harmonisation, mais aussi qu’il n’est pas question de revenir sur l’élaboration des listes de paradis fiscaux à l’échelle européenne. Or quelle crédibilité peut avoir une liste sur laquelle nous nous interdisons de faire figurer un État membre de l’Union européenne ? Je pense à l’Irlande ou au Luxembourg. Même après le scandale OpenLux, il n’a pas été question de modifier cette liste. Je voudrais ainsi revenir sur une proposition de mon collègue Ugo Bernalicis, mais aussi d’un sénateur en 2013 : pourquoi nous interdisons-nous d’établir nousmêmes, de manière souveraine, une liste exhaustive des paradis fiscaux ? Par ailleurs, je veux rappeler qu’il avait été dit que les parlementaires pouvaient être associés à l’élaboration de ces listes, or il n’en est rien.

M. Jean-Paul Dufrègne. Je ne doute pas de la sincérité et de l’engagement de la rapporteure sur ce sujet mais j’entends beaucoup d’autosatisfaction ; or, même si on peut noter certaines avancées, l’une des premières propositions du rapport, consistant à mettre en place un groupe de travail, a échoué. Ce groupe de travail, réunissant des économistes et des universitaires, devait nous éclairer sur la dimension de l’évasion fiscale, objet d’une bataille de chiffres. Ce préalable important n’a pas été mis en œuvre. La volonté politique existe-t-elle toujours, ou bien les freins sont-ils trop forts ?

Fabien Roussel avait proposé de travailler à une liste française des paradis fiscaux mais vous, chers collègues de la majorité, n’avez pas voté sa proposition de loi ; il y a là une contradiction. Certes, l’OCDE avance, mais les perspectives demeurent lointaines. Le calendrier auquel vous avez fait allusion – au moins cinq ans – pourrait-il être resserré s’il y avait une volonté plus forte au niveau international ? J’entends qu’il serait possible pour la France de récupérer 4 à 7 milliards d’euros : nous sommes très loin des chiffres avancés en matière d’évasion fiscale ! Nous sommes encore dans l’incantation et peinons à avancer de manière pratique sur ces questions.

M. Michel Castellani. Je remercie la rapporteure pour la clarté de sa présentation et ne reviens pas sur l’importance de la normalisation dans le domaine de la fiscalité – ou, pour mieux dire, de la non-fiscalité – internationale. Nous attendons avec intérêt les avancées qui pourraient intervenir dans le cadre de l’OCDE, avec un éventuel accord en juillet prochain.

Madame la rapporteure, confirmez-vous que l’on peut spécifiquement viser les GAFA aujourd’hui ? En 2018, vous appeliez à faire preuve de prudence et craigniez qu’une telle imposition ne puisse être perçue par les États-Unis comme une attaque indirecte. Les choses ont évolué depuis l’élection de M. Joe Biden.

Quelles seraient les règles nécessaires pour garantir la pertinence d’une telle réforme ? Faut-il un impôt minimum englobant l’ensemble des prélèvements – ils sont nombreux − depuis la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et la cotisation foncière des entreprises (CFE) jusqu’à la TVA ? Surtout, comment surmonter les difficultés techniques dans la définition d’un pareil prélèvement global ?

M. Charles de Courson. Je félicite la rapporteure.

L’on parle beaucoup d’harmonisation des taux et plus exactement de leur pourcentage minimum, avec le débat sur les 12,5 % ou 21 % pour l’IS, mais moins de celle des assiettes. Il y a bien quelques bribes, par exemple sur les charges financières et les amortissements, qui s’apparentent à du bricolage. Par rapport à quelle assiette harmonisée l’ensemble des taux dits effectifs est-il calculé ? Des travaux de la direction générale du trésor ont pris le flux de trésorerie pour référence ; cela n’a pourtant pas de sens, tant sont grandes les différences entre une entreprise très capitalistique et une autre qui l’est moins. Où en est-on ? Le président Sarkozy avait, il y a bien longtemps, lancé l’idée d’une harmonisation des assiettes fiscales française et allemande. La Cour des comptes a produit un excellent rapport, et les choses en sont restées là.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je salue moi aussi le travail de la rapporteure.

S’agissant du régime fiscal privilégié, quel serait l’effet financier du fait de passer de 50 % à 40 % dans la comparaison avec la fiscalité française et avons-nous une idée précise des pays qui se verraient, de ce fait, appliquer cette connotation de paradis fiscaux ?

J’ai compris que la mise en œuvre des négociations de l’OCDE sera compliquée et demanderait entre cinq et dix ans, mais à quelle échéance est-il prévu de terminer les négociations et de parvenir à un document finalisé ?

Mme Bénédicte Peyrol, rapporteure. Le quatrième rapport particulier annexé au rapport du CPO publié fin 2020 précise les calculs faits concernant l’effet des nouveaux modèles et des nouvelles règles sur le système fiscal.

L’OCDE procède à des évaluations pays par pays mais ses données ne sont pas publiques – et sa méthodologie encore moins. Je n’ai donc pas eu accès à ses modalités d’évaluation et je ne vous cache pas avoir eu quelques difficultés à lire le quatrième rapport particulier du CPO – il faut tout de même des compétences statistiques.

Faut-il de la volonté politique quant à ce fameux groupe de travail ? À l’occasion de l’examen du dernier projet de loi de finances, je suis repartie au front en déposant un amendement tendant à créer un observatoire français en plus de celui qui vient de se mettre en place à l’échelon européen. Je continuerai, en tant que députée de la majorité, à dire au Gouvernement que cet outil est indispensable et qu’il continuera à l’être pour les prochaines majorités parlementaires. Aujourd’hui, l’on me répond que l’INSEE et la MICAF y travaillent. Ceux qui veulent m’accompagner dans ce combat sont les bienvenus.

Les contrôles aléatoires ont commencé depuis peu. Je n’ai pas en tête leur nombre à ce stade, mais l’idée est de produire des données fiables sur l’évasion fiscale.

Au sujet de la volonté politique nationale sur les paradis fiscaux – celle de l’Union européenne relève davantage du Parlement européen et des États membres −, il faut savoir que la France, outre la liste des États et territoires non coopératifs, s’appuie sur la notion de pays à régime fiscal privilégié. Ma proposition d’abaisser le seuil de 50 % à 40 % avait été acceptée par la rapporteure du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude Émilie Cariou. La notion s’apprécie outil par outil, au regard du taux effectif d’imposition. L’on peut toujours faire plus et mieux : la France a commencé.

Il y a des avancées, avec l’engagement fort du Parlement européen, qui a adopté une résolution au mois de janvier dernier, qui traite aussi du sujet des paradis fiscaux au sein de l’Union européenne. Ce n’est pas un sujet simple, car cette qualification a des conséquences en matière de sanctions potentielles en matière de fiscalité des entreprises, ainsi qu’au plan politique. Nous verrons la suite que la Commission européenne entend donner à la résolution des députés européens.

Je n’ai pas mentionné une difficulté actuelle, que nous anticipions déjà en 2018 et qui tient à ce qu’il y a une démultiplication des TSN, rien qu’au sein de l’Union européenne. Mon rapport les énumère.

La question de la double imposition sur une même activité va se poser, parce que les TSN recouvrent des champs d’application parfois différents. Le principe de la fiscalité internationale et des conventions est pourtant d’éviter ce problème.

La solution européenne reste la meilleure à ce stade. Mes échanges avec la Commission européenne me font comprendre que l’option d’une harmonisation est privilégiée, ce qui signifie aussi que la France ne revient pas sur la taxe qu’elle a déjà introduite dans son droit interne. Je préfère la TSN à une taxation additionnelle du numérique au titre de l’IS. Je ne dénonce pas la double imposition entre l’IS et la TSN et rappelle que nous avions pris le parti de l’assumer ; elle concerne certaines entreprises françaises.

La confrontation des calendriers est une vraie question politique. L’objectif du directeur du centre de politique et d’administration fiscale de l’OCDE, Pascal Saint-Amans, est que les négociations sur les premier et second piliers aboutissent ce mois de juillet 2021. La proposition de la Commission européenne sur les ressources propres de l’Union européenne, en ligne avec le plan de relance européen, pourrait être publiée au même moment ou un peu avant. Attention à ce qu’elle ne constitue pas un obstacle et ne soit pas mal prise par nos partenaires de l’OCDE.

De même, à propos du champ d’application du premier pilier, il ne faut pas que la TSN française ou bien les pas en avant effectués par les États-Unis ou l’Union européenne compromettent les négociations au sein de l’OCDE. L’Europe a ce point de vigilance en tête.

Je vous ai donné, pour la mise en œuvre, un horizon peut-être lointain. S’il y a une véritable volonté politique, il est d’autant plus possible d’aboutir qu’existe aujourd’hui un outil dont nous ne disposions pas il y a quelques années, à savoir la convention multilatérale de l’OCDE, lequel instrument vient modifier d’un coup les conventions fiscales bilatérales. La France éviterait de renégocier toutes ses conventions bilatérales en cas d’instauration d’une nouvelle imposition – cela prend des années.

Si l’on peut être optimiste, je reste prudente : si Barack Obama était président des États-Unis lors des travaux sur l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices (BEPS), cela n’a pas empêché son pays de quitter la table des négociations au dernier moment. Il faut toujours se préparer à des retournements de veste.

Le calcul de l’assiette soulève une question évidente et fait partie de mes points de vigilance sur le taux effectif d’imposition : des négociations sont encore en cours sur l’éventuelle prise en compte des dépenses fiscales ou encore des reports de déficit. La référence est celle du résultat comptable consolidé au sens des International financial reporting standards (IFRS), dont nous avions beaucoup parlé à l’occasion des auditions de M. Patrick de Cambourg, président de l’Autorité des normes comptables (ANC). Le sujet technique reste majeur.

J’ai cru comprendre qu’au niveau européen, le projet d’assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés (ACCIS) n’était plus vraiment d’actualité.

M. le président Éric Woerth. L’ACCIS semble en effet totalement oubliée. Merci encore pour ce travail remarquable, qui connaîtra certainement des prolongements.

La commission autorise la publication du rapport présenté en application de l’article 145-8 du règlement de l’Assemblée nationale sur le suivi des conclusions de la mission d’information sur l’optimisation et l’évasion fiscales.

Puis la commission entend une communication de M. Julien Aubert, rapporteur spécial Énergie de la mission Écologie, développement et mobilité durables, sur des travaux de contrôle sur pièces et sur place

M. le président Éric Woerth. Notre collègue Julien Aubert a mené hier, en sa qualité de rapporteur spécial, un contrôle sur pièces et sur place au ministère de la transition écologique sur les certificats d’énergie pour obtenir un rapport de l’inspection des finances qui n’avait pas été publié. Il voulait nous en rendre compte immédiatement, et c’est bien volontiers que je lui laisse la parole.

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. J’ai effectué hier matin, en ma qualité de rapporteur spécial des crédits de l’énergie, dans les locaux du ministère de la transition écologique, un contrôle sur pièces et sur place en vue de récupérer deux documents dont j’avais demandé, sans succès, la communication à Mme le ministre de la transition écologique depuis plusieurs semaines.

Ces deux documents sont des rapports établis par des corps d’inspection et portent, l’un, sur le dispositif des certificats d’économie d’énergie et, l’autre, sur la nature des perturbations causées par des éoliennes sur l’activité de deux élevages situés en Loire-Atlantique. Le premier document n’avait fait l’objet d’aucune publication. Le second avait fait l’objet d’une publication partielle au mois de février dernier.

Avant de revenir sur le contenu de ces documents, je rappelle que les rapporteurs spéciaux bénéficient, en application de l’article 57 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), de la capacité de procéder à de telles investigations pour exercer leur mission de contrôle. Au cours de cette législature, Joël Giraud a par exemple utilisé cette faculté en 2020. Je l’avais moi-même fait également une première fois en 2019, c’est donc la seconde fois que j’y recours.

Il s’agissait, en l’occurrence, d’obtenir ces documents dont j’attendais vainement la communication depuis le 22 février.

J’ai écrit à Madame le ministre en vue de recevoir ces deux rapports le 10 mars 2021. Rien ne m’a été transmis. Une première relance est intervenue le 17 mars, sans résultat. Le 25 mars, j’ai donc réécrit à Madame le ministre pour lui redemander ces documents, toujours aucun résultat. Lundi soir, j’ai donc informé le ministère que je me rendrai le lendemain matin dans ses locaux.

Naturellement, à ce stade, je ne peux que déplorer l’absence de communication spontanée de ces documents. Il m’a été indiqué que ce retard s’expliquait par les lourds travaux relatifs au projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, une explication qui n’est pas tout à fait satisfaisante. Effectivement, le ministère connaît une période d’intense activité mais si l’intense activité suffisait à retarder la communication de documents, le rapporteur général aurait des difficultés à obtenir des informations de Bercy entre le mois d’octobre et le mois de décembre pendant l’examen du projet de loi de finances. Il me semble que, le contrôle parlementaire n’étant pas un contrôle à éclipses, les rapporteurs spéciaux doivent pouvoir obtenir les informations dont ils ont besoin.

Cela dit, j’en viens au contenu de ces deux rapports. Comme je le disais, l’un des deux documents est un rapport établi par deux corps d’inspection sur l’état des élevages situés à proximité du parc éolien des Quatre Seigneurs en Loire-Atlantique, dont seule une version partielle avait été publiée en février. Je serai succinct à ce sujet. Les éléments qui avaient été masqués lors de la publication du rapport étaient la lettre de commande du rapport, une note d’étape et la saisine de l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail. La consultation de ces pièces ne change pas les conclusions du rapport et présente un intérêt limité. Je pense que le ministère aurait pu, éventuellement en caviardant les données nominatives, le publier dans son intégralité.

Je vais en revanche vous présenter plus longuement le second document qui est un rapport commun de l’Inspection générale des finances, du Conseil général de l’environnement et du développement durable, et du Conseil général de l’économie, de l’industrie, de l’énergie et des technologies sur la cinquième période du dispositif des certificats d’économies d’énergie, plus communément appelés « CEE ».

Les CEE soumettent les fournisseurs d’énergie, appelés « les obligés », à des obligations d’économies d’énergie qu’ils satisfont en réalisant ou en finançant des programmes d’économie d’énergie. C’est un dispositif extrabudgétaire. Le Parlement ne détermine pas le volume ni le montant maximum des CEE à attribuer et ne fixe pas non plus leur prix. Les règles du jeu sont totalement définies par le pouvoir réglementaire, ce que j’ai dénoncé dans un rapport publié en 2017 et de nouveau en 2019. La loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat a toutefois permis une première avancée en prévoyant, qu’à partir de 2023, le Parlement fixera les trajectoires au sein desquelles devront se placer les obligations annuelles des CEE. Cette avancée est cependant modeste au regard du volume financier de ces certificats. En 2020 le coût des CEE est estimé à 3,5 milliards d’euros et pèse sur les consommateurs finals d’énergie, principalement les ménages. Le dispositif des CEE coûte ainsi 100 euros par an à chaque foyer. C’est donc l’équivalent d’une quasi-taxe, qui a un poids dans le panier d’un ménage.

Le rapport obtenu fait le point sur l’exécution de la quatrième période des CEE, qui a débuté en 2018 et qui s’achèvera le 31 décembre 2021. Ce document de près de 500 pages comporte également 16 propositions destinées à préparer la cinquième période des CEE appelée à se dérouler du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2025. Il est donc évidemment intéressant pour la commission des finances de pouvoir avoir ces informations en pleine élaboration de cette cinquième période.

Le bilan de la quatrième période est assez critique. Si l’efficience du dispositif est jugée « élevée », les auteurs considèrent que « les CEE ont dérivé de leur cadre initial, ce qui contribue à réduire leur efficacité » – il y a dès lors une petite subtilité entre l’efficience et l’efficacité.

La mission dénonce plus particulièrement trois dérives. La première est la fixation d’obligations qui sont déconnectées de l’existence de gisements d’économies d’énergie économiquement accessibles. La deuxième est une intervention excessive de la puissance publique, qui modifie en permanence les règles de fonctionnement. La troisième consiste en un détournement du dispositif au profit d’objectifs nouveaux que les pouvoirs publics ne savent pas financer par ailleurs. Je précise que le mot « détournement » est celui employé par les auteurs du rapport, qui fustigent notamment l’emploi des CEE pour financer, par exemple, des abris à vélos.

Les seize propositions de la mission sont d’importance diverse et je me concentrerai sur deux d’entre elles. La plus importante vise à réduire d’une année la durée de la cinquième période des CEE, ce qui est essentiel. Comme je l’ai indiqué précédemment, cette cinquième période doit commencer au mois de janvier 2022 et s’achever au mois de décembre 2025 alors même que le Parlement déterminera, au plus tard en 2023, soit un an après le début de la cinquième période, les principales orientations à donner aux CEE. De ce fait, si le Parlement se prononce bien en 2023, les orientations qu’il définira pourront s’appliquer à compter du 1er janvier 2025 ; il y a donc un effet de latence. Si on raccourcit d’un an la cinquième période, les orientations fixées par le Parlement pourraient être suivies d’effet plus rapidement. Cela supposerait que cette cinquième période soit réduite de quatre à trois ans afin de s’arrêter à la fin de l’année 2024. Je souscris donc pleinement à la recommandation du rapport visant à amputer d’un an la durée de la cinquième période.

Le rapport formule également une deuxième recommandation importante qui vise, d’une part, à renforcer la transparence et le suivi de ces CEE. À l’heure actuelle, le pouvoir réglementaire agit de manière autonome et peu transparente. Les auteurs du rapport proposent de créer un comité d’experts indépendants chargé d’examiner les projets de fiches d’opération standardisées. Ces fiches font l’objet de critiques de la part de ceux qui réalisent les travaux car elles peuvent changer et conduisent parfois à des glissements substantiels dans leur modèle économique. Elle prévoit, d’autre part, de confier à un observatoire le suivi public annuel du dispositif. Autrement dit, le rapport préconise de réduire la liberté dont dispose le pouvoir réglementaire dans la gestion des CEE. Cette recommandation me paraît pertinente, même si je suis assez peu friand des mécanismes de comitologie et de multiples observatoires, dont les lunettes sont braquées sur l’État. Il commence en effet à y avoir une forêt d’observatoires à défricher ensuite.

Par ailleurs, en tant que commissaire aux finances, je souhaite revenir sur l’importance financière et la nature extrabudgétaire du dispositif des CEE. Dans son rapport, la mission estime qu’en 2020 les différents dispositifs d’aide à la rénovation énergétique des bâtiments ont coûté 5,5 milliards d’euros, dont 2,3 milliards d’euros de dépenses fiscales, 800 millions d’euros de dépenses budgétaires et 2,4 milliards d’euros de CEE. Autrement dit, les CEE sont bien le premier poste du budget de rénovation énergétique en France en 2020, et le Parlement ne le maîtrise pas. En matière de CEE, nous nous prononçons effectivement uniquement sur les crédits de contrôle des CEE, c’est-à-dire à peine 25 millions d’euros, à rapporter aux 2,4 milliards d’euros. Cela pose un problème : dépenser 2,4 milliards d’euros en 2020 sans autorisation budgétaire du Parlement pour la rénovation thermique, c’est déjà contestable, mais cela l’est encore plus lorsqu’on note les détournements auxquels se livre le pouvoir réglementaire. La lecture du rapport est très éclairante puisqu’il est écrit que, pour certaines actions, « rien ne distingue les actions financées par les CEE de celles financées par les crédits budgétaires classiques ». Je précise encore une fois que ce ne sont pas mes mots mais ceux des auteurs du rapport.

Ce dispositif extrabudgétaire ne peut nous laisser sans réaction. Nous devons renoncer à la passivité budgétaire et reprendre le contrôle des CEE. Est-il par exemple acceptable qu’un simple arrêté du ministre chargé de l’énergie mette en œuvre un programme de 200 millions d’euros en matière d’accompagnement des ménages à la rénovation énergétique sans que le Parlement ait son mot à dire ?

Je me souviens qu’au mois de novembre dernier, lors de l’examen des crédits de l’énergie, nous avons parfois discuté en séance publique d’amendements dont le montant était inférieur à 100 000 euros. Je ne comprends pas que nous passions du temps à discuter de 100 000 euros et que nous renoncions à contrôler les dépenses de CEE dont le montant est bien plus conséquent, avec des enjeux économiques très substantiels. La période du chèque en blanc doit donc s’interrompre le plus tôt possible.

Enfin, je souhaite profiter de cette allocution pour vous dire quelques mots sur les pouvoirs des rapporteurs spéciaux. Dans quelques semaines, sera sans doute discutée une proposition de loi réformant la loi organique relative aux lois de finances. En tant que rapporteur spécial, j’utilise fréquemment les pouvoirs qui me sont conférés par son article 57 mais je constate que leur usage se heurte à certaines limites. Je donnerai deux exemples.

Tout d’abord, je rappelle que notre commission n’est pas destinataire de la liste des contrôles effectués par les corps d’inspection de l’État. De ce fait, nous pouvons passer à côté de certaines informations utiles. Dans le cas présent, j’ai eu connaissance du rapport sur les CEE, au détour d’une conversation lorsque je participais à une séance du conseil supérieur de l’énergie.

À mon sens, il serait utile de prévoir, dans un décret ou dans la LOLF, que le gouvernement adresse chaque année à la commission des finances la liste complète des rapports établis par les corps d’inspection, afin que les rapporteurs spéciaux puissent demander communication des documents les intéressant.

Je crois également que des questions se posent en matière d’engagement et de publicité de ces travaux. En 2020, la mission d’information sur la concrétisation des lois, dont le rapporteur général et notre collègue Jean-Noël Barrot étaient rapporteurs, a proposé, d’instituer une « culture d’entraide » entre les parlementaires afin que les parlementaires dotés de pouvoirs de contrôle sur pièces et sur place puissent être sollicités par leurs collègues sur des difficultés d’application des lois. Cette idée doit à mon sens être creusée pour autoriser une utilisation des pouvoirs spéciaux sur délégation ou par procuration.

Nous verrons ces différents points dans quelques semaines mais je crois que nous aurions intérêt à modifier l’article 57 de la loi organique relative aux lois de finances pour muscler les pouvoirs de contrôle du Parlement, de telle sorte que si, dans quelques mois, je réalise un troisième contrôle sur pièces et sur place, je puisse vous en dire plus qu’aujourd’hui.

M. Charles de Courson. J’ai toujours été très dubitatif sur la question des CEE. Notre rapporteur spécial a raison : il n’est pas normal que ce soit un mécanisme extrabudgétaire qui échappe au vote du Parlement.

Est-il possible de les inclure à nouveau dans le budget de l’État ? Le cas échéant, sous quelle forme ?

Par ailleurs, un certain nombre de particuliers me signalent qu’ils n’ont jamais vu la couleur des CEE des travaux, par exemple d’isolation thermique, qu’ils ont faits. Est-ce vrai ? Ces montants de CEE sont-ils effectivement rétrocédés aux particuliers ou à l’entreprise bénéficiaire ?

M. le président Éric Woerth. À ma connaissance, ces certificats ne sont pas des crédits budgétaires. Ce sont bien des fonds dégagés par des entreprises du secteur de l’énergie en faveur de leurs clients pour leur permettre de faire des économies d’énergie. Ils doivent être incités puis financés en tout ou partie.

M. Charles de Courson. C’est une imposition de toute nature. M. Aubert a donc raison de soulever la question. C’est bien l’administration qui fixe le montant du quota annuel, alors qu’elle n’en a pas le pouvoir. Quel est le fondement juridique du dispositif, notamment au regard de la loi organique relative aux lois de finances ?

M. Julien Aubert, rapporteur spécial.  Ce qui est certain, c’est que Bercy ne souhaite pas inscrire les CEE dans le budget pour conserver leur côté « marché » et une certaine fluidité. Le dispositif est assez hybride puisque le ministre fixe des volumes, qui ont directement des répercussions sur le porte-monnaie des Français. À la pompe, une grande partie des CEE est financée, par exemple, par le carburant. Entre la TVA votée par le Parlement ou une autre taxe ou accise qui obéissent à des règles budgétaires et le CEE, qui se traduit très concrètement par un prélèvement dans la poche des consommateurs, il n’y a aucune différence pour le citoyen. En effet, les obligés répercutent sur les consommateurs le coût des CEE.

Pour la quatrième période, Mme Royal avait augmenté souverainement le volume des CEE, ce qui s’était traduit, au début de cette période, par de graves difficultés, avec une hausse substantielle des prélèvements. Il ne faut pas forcément réinscrire ces dépenses dans le budget de l’État. En revanche, que le ministre puisse, par simple arrêté, décider d’une dépense de 200 millions d’euros me semble profondément contrevenir à la loi organique relative aux lois de finances. Évidemment, ce qui pouvait passer inaperçu au départ, sur de petits montants, ne peut plus l’être aujourd’hui, à moins que l’on ne considère que la politique de rénovation énergétique échappe de facto aux pouvoirs du Parlement.

Par exemple, un arrêté ministériel du 5 septembre 2019 a créé le programme CEE de service d’accompagnement pour la rénovation énergétique, sans que le Parlement ait son mot à dire. On pourrait imaginer que le Parlement soit associé aux programmes CEE dont le coût prévisionnel est supérieur ou égal à 50 millions d’euros ou encore que le Parlement vote le volume prévisionnel pluriannuel des CEE de manière à ce que cela ne puisse pas se traduire par une augmentation décidée sur un coin de table. Je ne souhaite pas réintégrer totalement le dispositif au budget de l’État, afin de ne pas altérer la flexibilité de ce dispositif, mais il incombe au Parlement de fixer des plafonds.

Les cas de détournement concernent plutôt le financement de travaux mal faits que la non-réalisation de travaux. Des aigrefins proposent effectivement des rénovations à 1 euro, très mal réalisées. Les propriétaires n’ont ensuite que leurs yeux pour pleurer. Le détournement total financier est donc moins une réalité, même si, dans les faits, compte tenu des moyens alloués au dispositif de CEE, il peut y avoir des opérations fictives. Le contrôle TRACFIN a malgré tout plus mis en avant l’autre hypothèse de détournement.

M. Charles de Courson. Je pense que notre collègue Aubert devrait s’intéresser à la question de la détermination de la nature de ce prélèvement sur les entreprises du secteur de l’énergie. Pour moi, c’est une imposition de toute nature. Comment le pouvoir réglementaire peut-il imposer à des entreprises de verser un certain montant sans autorisation parlementaire ? Quelle est la nature juridique du CEE ?

M. Julien Aubert, rapporteur spécial. Dans le fameux rapport dont j’ai eu communication, les corps d’inspection de l’État expliquent le dispositif CEE constitue une forme hybride de taxe entre des formes pures d’instrument de marché et de réglementation. Du point de vue des consommateurs, il apparaît comme un dispositif hybride associant deux types d’incitation : une subvention à l’efficacité énergétique et une taxe sur l’énergie. En effet, les règles des CEE sont fixées en vertu de l’article L. 222-1 du code de l’énergie.

M. le président Éric Woerth. Nous pouvons remercier M. Aubert pour l’exercice de ses pouvoirs de contrôle sur cette question qui mérite d’être approfondie.

 

 

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