Compte rendu

Commission spéciale
chargée d’examiner
le projet de loi relatif
à la bioéthique

– Suite de l’examen, en nouvelle lecture, du projet de loi, modifié par le Sénat, en deuxième lecture, relatif à la bioéthique (n° 3833) (M. Philippe Berta, Mme Coralie Dubost, M. Jean-François Eliaou, M. Gérard Leseul, Mme Laetitia Romeiro Dias et M. Jean-Louis Touraine, rapporteurs)              2

 Présences en réunion.......................................54

 

 


Jeudi
3 juin 2021

Séance de 15 heures

Compte rendu n° 6

session ordinaire de 2020-2021

Présidence de
Mme Agnès Firmin Le Bodo, présidente


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COMMISSION SPÉCIALE CHARGÉE D’EXAMINER
LE PROJET DE LOI RELATIF À LA BIOÉTHIQUE

Jeudi 3 juin 2021

La réunion est ouverte à quinze heures.

(Présidence de Mme Agnès Firmin Le Bodo, présidente)

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La commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la bioéthique procède à la suite de l’examen, en nouvelle lecture, du projet de loi, modifié par le Sénat, en deuxième lecture, relatif à la bioéthique (n° 3833) (M. Philippe Berta, Mme Coralie Dubost, M. Jean-François Eliaou, M. Gérard Leseul, Mme Laetitia Romeiro Dias et M. Jean-Louis Touraine, rapporteurs).

Mme la présidente Agnès Firmin Le Bodo. Mes chers collègues, nous poursuivons l’examen du projet de loi relatif à la bioéthique.

Chapitre Ier
Encadrer les recherches sur l’embryon, les cellules souches embryonnaires et les cellules souches pluripotentes induites

Article 14 (suite) : Différenciation des régimes juridiques d’autorisation s’appliquant à l’embryon et aux cellules souches embryonnaires

Amendements identiques CS72 de Mme Emmanuelle Ménard et CS221 de M. Thibault Bazin.

Mme Emmanuelle Ménard. Puisqu’un embryon humain ne peut être utilisé à des fins commerciales ou industrielles en application de l’article L. 2141-8 du code de la santé publique, il devrait en être de même pour ses cellules souches. Il convient donc de faire référence à cette interdiction relative aux cellules souches embryonnaires humaines.

M. Philippe Berta, rapporteur. Je suis défavorable à ces amendements.

La commission rejette les amendements.

Amendement CS223 de M. Thibault Bazin.

M. Patrick Hetzel. Il s’agit de substituer, à l’alinéa 20, au mot « peut » celui de « doit ». Dès lors que les cellules souches embryonnaires sont issues d’un embryon humain, il convient que le régime qui les encadre ne fasse pas échec à l’article L. 2151-5 du code de la santé publique relatif à la recherche sur l’embryon humain, en le privant de sa portée.

M. Philippe Berta, rapporteur. L’emploi du verbe « pouvoir » convient à l’encadrement des recherches prévu par cet alinéa. La rédaction actuelle semble d’ailleurs plus appropriée en ce qu’elle ne pose pas seulement une règle de principe mais bien un principe et son application opérationnelle. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS224 de M. Thibault Bazin.

Mme Annie Genevard. Il semble possible de résoudre une partie du conflit éthique et de satisfaire les besoins des chercheurs en prévoyant que la recherche porte uniquement sur les lignées de cellules souches existantes en France ou à l’étranger, à partir de la promulgation de la nouvelle loi de bioéthique. C’est d’ailleurs ce que préconisaient le Conseil d’État, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) et la mission d’information parlementaire.

M. Philippe Berta, rapporteur. L’importation des cellules souches est encadrée par l’article L. 2151-6 du code de la santé publique qui dispose que l’importation de cellules souches embryonnaires aux fins de recherche est soumise à l’autorisation préalable de l’Agence de la biomédecine. Cette autorisation ne peut être accordée que si ces cellules souches ont été obtenues dans le respect des principes fondamentaux prévus par les articles 16 à 16-8 du code civil.

La recherche, surtout quand elle reste au stade fondamental, prend rapidement une dimension internationale, du fait des nombreuses collaborations internationales qu’elle suscite. C’est en permettant l’accès à des lignées cellulaires entre des laboratoires français et étrangers que nous réduirons l’utilisation d’embryons destinés à la recherche. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS73 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. L’importation de cellules souches embryonnaires humaines est, en effet, soumise à autorisation préalable de l’ABM mais la législation des pays d’où sont importées les lignées de cellules souches embryonnaires est souvent beaucoup plus permissive que la législation française. Pour cette raison, il nous semble opportun d’interdire l’importation de ces lignées, sauf à prendre le risque de contrevenir aux principes éthiques posés par le législateur français.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Amendements identiques CS185 de M. Patrick Hetzel, CS317 de M. Xavier Breton, CS735 de Mme Anne-Laure Blin, et amendement CS226 de M. Thibault Bazin (discussion commune).

M. Patrick Hetzel. Un des problèmes éthiques de la recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines réside dans la destruction de l’embryon humain dont elles sont extraites. Ce problème éthique peut être résolu en partie par la possibilité de rechercher exclusivement sur les lignées de cellules souches existantes.

Il semble possible de résoudre une partie de ce conflit éthique et de satisfaire les besoins des chercheurs en prévoyant que la recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines porte uniquement sur les lignées de cellules souches existantes en France ou à l’étranger, à partir de la promulgation de la nouvelle loi de bioéthique. C’est d’ailleurs ce que préconisaient le Conseil d’État, l’OPECST et la mission d’information parlementaire dans leurs rapports préparatoires.

L’amendement tend, par conséquent, à réécrire l’alinéa 22.

Mme Annie Genevard. Si vous avez bien pris toutes les précautions nécessaires, monsieur le rapporteur, pourquoi ces organismes se montrent-ils encore si réservés ? Quelles garanties prévoyez-vous ?

M. Philippe Berta, rapporteur. Nous souhaitons tous réduire au maximum l’utilisation de cellules souches embryonnaires humaines. Hélas, les cellules souches perdent une partie de leurs propriétés tout au long de leur existence, aussi ne faut-il pas interdire la conduite de recherches sur des cellules nouvellement dérivées. D’ailleurs, nous avons aussi besoin d’un étalon de référence en se réservant la possibilité d’effectuer une comparaison à partir de cellules souches nouvellement dérivées.

Le dispositif prévu à l’article 14 me semble équilibré. Surtout, rappelons que la communauté scientifique française est responsable. Faisons lui confiance, d’autant plus que les divers comités d’éthique contrôlent leur travail. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CS227 de M. Thibault Bazin.

M. Patrick Hetzel. Il s’agit d’insérer l’alinéa suivant après l’alinéa 22 : « La dérivation de nouvelles lignées de cellules souches embryonnaires est interdite. »

Que répondez-vous, monsieur le rapporteur, à ces organismes qui estiment que les chercheurs ont déjà de quoi faire avec les lignées dont ils disposent ? Pourquoi ne pas l’écrire clairement dans la loi, dès lors que le principe de la révision des lois de bioéthique nous offrira la possibilité de modifier cette disposition, le cas échéant.

M. Philippe Berta, rapporteur. J’espère que, lors de la prochaine révision de la loi de bioéthique, nous aurons découvert des cellules souches induites à phénotype équivalent aux cellules souches embryonnaires. Hélas, pour l’heure, je ne saurais en interdire le recours pour la recherche française, au service de la santé de demain. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques CS187 de M. Patrick Hetzel, CS319 de M. Xavier Breton, CS737 de Mme Anne-Laure Blin, et amendement CS225 de M. Thibault Bazin (discussion commune).

M. Patrick Hetzel. La recherche sur des cellules souches embryonnaires humaines peut se concentrer exclusivement sur les lignées existantes et déjà établies en France ou à l’étranger. Je vous propose par conséquent d’insérer, après l’alinéa 22, l’alinéa suivant : « La liste des lignées de cellules souches embryonnaires humaines dérivées en France ou susceptibles d’être importées de l’étranger, existantes au jour de la promulgation de la loi relative à la bioéthique, et sur lesquelles des recherches peuvent être menées en France, dans le respect des principes éthiques des articles 16 à 16-8 du code civil, est établie par décret du ministère de la recherche. » Cette rédaction, en impliquant l’exécutif, permettrait d’accélérer la procédure.

M. Philippe Berta, rapporteur. C’est toujours possible mais cela n’est pas utile et nous devrons tout de même conserver la possibilité d’un étalon de référence à partir de cellules souches nouvellement dérivées. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements identiques CS188 de M. Patrick Hetzel, CS320 de M. Xavier Breton et CS738 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. Il s’agit de compléter l’alinéa 23 par les deux phrases suivantes : « Le produit d’obtention de l’agrégation de cellules souches embryonnaires avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires sur lesquels une recherche a été conduite ne peuvent être transférés à des fins de gestation. Il est mis fin à leur développement au plus tard le septième jour après leur constitution. »

Dès lors que les cellules souches sont issues d’un embryon humain, il convient d’appliquer le régime commun de sept jours pour la durée de conservation.

M. Philippe Berta, rapporteur. Il n’a jamais été question de créer des embryons de novo. Cette méthode permet uniquement d’obtenir des modèles cellulaires dits embryoïdes qui permettent d’étudier in vitro les mécanismes du développement embryonnaire précoce. Ces modèles embryoïdes ne sont pas des embryons ! Ils servent à fabriquer des organoïdes, à constituer des morceaux d’intestins ou de poumons. Ils se sont révélés très utiles durant la pandémie pour comprendre la stratégie virale.

Par ailleurs, il est rigoureusement interdit de créer des embryons à des fins de recherche. Avis défavorable à ces amendements inutiles.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS164 de M. Patrick Hetzel, CS296 de M. Xavier Breton et CS685 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. À partir de cellules souches embryonnaires ou de la dérivation de cellules somatiques dites IPS, il serait possible de fabriquer de manière artificielle in vitro des gamètes.

L’exposé des motifs précise que la recherche sur les cellules souches n’est pas exempte d’interrogations éthiques lorsqu’il s’agit d’envisager de les différencier en gamètes.

L’article 16-4 du code civil dispose que nul ne peut porter atteinte à l’intégrité de l’espèce humaine. L’article 16-2 rappelle que le juge peut prescrire toutes mesures propres à empêcher ou faire cesser des agissements illicites portant sur des éléments ou des produits du corps humain.

Or, les gamètes sont des cellules particulières, obtenues après un long processus dans les gonades, permettant la réalisation, à partir de cellules précurseurs, du phénomène de méiose, permettant un brassage génétique favorable à l’espèce humaine ainsi que le passage de quarante-six à vingt-trois chromosomes.

Il convient donc de rappeler l’interdiction d’un processus qui intègre une maturation et une méiose artificielles aboutissant à la création artificielle de gamètes.

Je vous propose d’ajouter l’alinéa suivant après l’alinéa 23 : « La création de gamète à partir de cellules souches embryonnaires ou à partir de la dérivation de cellules somatiques est interdite. »

Mme Annie Genevard. Le développement des recherches sur les cellules souches pluripotentes induites fait courir le risque de la fabrication de gamètes ou d’embryons artificiels. Selon une étude publiée le 11 juin 2020 dans la prestigieuse revue Nature, la fabrication de gastruloïdes humains, des embryons synthétiques ou artificiels, conçus à partir de cellules IPS, est possible. De telles perspectives conduisent à remettre profondément en cause la nature de l’espèce humaine. En effet, elles ouvriraient la voie à l’autoreproduction, à la fabrication d’enfants sans gamètes. Le principe de la protection de l’intégrité de l’espèce humaine, posé au premier alinéa de l’article 16-4 du code civil et la nécessité de conserver à l’espèce humaine le caractère sexué de sa reproduction, imposent d’interdire ce type de pratique en insérant un nouvel alinéa à ces dispositions.

Vous nous répondrez, monsieur le rapporteur, que la recherche française, consciente de ces risques, ne s’aventurera jamais dans ces voies périlleuses. Pourquoi ne pas l’écrire, dans ce cas ?

M. Philippe Berta, rapporteur. Ces amendements sont incohérents à la fois avec le texte et avec les modifications adoptées par les membres du groupe Les Républicains au Sénat.

Ils poseraient problème dans les recherches portant sur la gamétogénèse et nuiraient à la compréhension des mécanismes qui peuvent bloquer la méiose. Or, Mme Ménard l’a rappelé, les phénomènes d’infertilité concernent un couple sur six. Il ne faudrait pas entraver la possibilité de mener in vitro les principales étapes de la spermatogénèse et de l’ovogénèse, et ainsi comprendre l’infertilité. Je pense que vous approuverez cet argument.

Toutefois, vous avez raison, des questions éthiques se posent et c’est pour cette raison que, aussi bien pour les cellules souches embryonnaires, visées à l’article 14 que pour les cellules souches pluripotentes induites, à l’article 15, la différenciation en gamètes est soumise à un régime d’encadrement spécial, à savoir une déclaration obligatoire à l’Agence de la biomédecine et un système de contrôle, notamment par l’avis public du conseil d’orientation de l’Agence. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS184 de M. Patrick Hetzel, CS316 de M. Xavier Breton et CS734 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. Récemment, en Grande-Bretagne, des chercheurs n’ont pas nommé « embryons » les structures qu’ils avaient obtenues afin d’échapper au cadre légal de la recherche sur l’embryon humain. Dans la revue Cell Stem Cell, ces chercheurs britanniques ont annoncé, en 2021, être parvenus à créer des embryons humains à partir de cellules souches embryonnaires humaines. Dans leur laboratoire d’Exeter, ils ont mis en culture ces cellules souches par grappe et introduit deux molécules pour influencer leur développement. En trois jours, les cellules souches étaient organisées en blastocyste, stade atteint par un embryon humain environ six jours après la fécondation. L’embryon créé en laboratoire « possédait les mêmes gènes actifs qu’un embryon naturel, ce qui laisse supposer que la poursuite de son évolution serait possible », estiment les chercheurs.

Il y a un mois, la même équipe publiait un article décrivant la flexibilité du développement embryonnaire, les chercheurs étant parvenus à observer la régénération de certains tissus au sein d’un embryon humain.

Monsieur le rapporteur, ces recherches respectent-elles les principes éthiques de la loi ? La rédaction actuelle du texte n’autoriserait-elle pas de telles dérives si nos chercheurs procédaient comme les chercheurs britanniques ?

M. Philippe Berta, rapporteur. Je ne cautionne pas ces pratiques. Je connais bien la perfide Albion pour y avoir poursuivi mes études quelques années : les chercheurs échappent partiellement à nos règles éthiques, notamment parce que l’essentiel de leurs recherches sur la reproduction reçoivent des financements privés. Les Anglais ne se gênent pas pour mener, au sein de cliniques privées, des recherches qui seraient interdites en France. Si le financement avait été public, celles-ci n’auraient sans doute pas été autorisées.

Cependant, vos amendements ne sont pas compatibles avec le texte. Surtout, ils entrent en contradiction avec ceux que les collègues sénateurs de votre groupe ont votés.

Enfin, le pas est grand entre l’expérience que vous avez citée – au passage la revue Cell Stem Cell ne saurait être comparée à Nature – et nos études portant sur la compréhension de la gamétogénèse et des mécanismes qui peuvent bloquer la fertilité. Il est indispensable de pouvoir continuer à mener in vitro les principales étapes de la spermatogénèse et de l’ovogénèse pour comprendre les causes de l’infertilité. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS409 de M. Patrick Hetzel, CS414 de M. Xavier Breton, CS421 de Mme Emmanuelle Ménard, CS512 de M. Thibault Bazin, CS740 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. Il s’agit de supprimer les mots « ou ne vise pas à améliorer la connaissance de la biologie humaine », à l’alinéa 24.

Il n’est pas nécessaire de modifier pour la quatrième fois en dix ans la recherche sur l’embryon humain et les cellules souches embryonnaires humaines. Cet ajout effectué en deuxième lecture au Sénat consiste à rendre possible la recherche fondamentale sur l’embryon humain et ses cellules souches pour la pure connaissance, sans finalité thérapeutique, et donc à priver l’embryon humain de la protection adéquate exigée par la convention d’Oviedo.

Mme Emmanuelle Ménard. Par l’alinéa 24, vous confirmez la possibilité d’utiliser des embryons humains ou des cellules souches embryonnaires pour améliorer la connaissance de la biologie humaine, ce qui pose des questions éthiques. Cet alinéa est contraire à la convention d’Oviedo.

M. Philippe Berta, rapporteur. Nous avons déjà évoqué ce sujet à l'alinéa 7. Cet ajout a été fait par le Sénat à l’initiative de la rapporteure du groupe Les Républicains, Corinne Imbert.

Je l’avais d’abord supprimé en commission en deuxième lecture, mais cela a de nouveau été ajouté et il me semble finalement que nous pouvons intégrer ce critère sans prendre de risques particuliers. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

(Présidence de Mme Monique Limon, vice-présidente de la commission spéciale.)

Amendements identiques CS228 de M. Thibault Bazin, CS189 de M. Patrick Hetzel, CS321 de M. Xavier Breton, CS739 de Mme Anne-Laure Blin et amendement CS229 de M. Thibault Bazin (discussion commune).

M. Patrick Hetzel. Actuellement, les recherches sur les cellules souches embryonnaires humaines sont soumises au respect de quatre conditions. L’alinéa 26 relatif exclusivement à la recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines en rappelle trois d’entre elles et fait l’impasse sur la quatrième, celle qui subordonne l’utilisation des cellules souches embryonnaires humaines à l’absence d’alternative scientifique. Aucune raison éthique ou juridique ne peut justifier d’exempter la recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines de la condition protectrice primordiale qui consiste à privilégier les autres moyens de recherche existants avant d’utiliser l’embryon humain et ses cellules souches.

Cette condition découle de l’article 16 du code civil, d’ordre public, qui dispose que la loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de la vie.

Ce principe de base oblige à privilégier les alternatives à la manipulation et la destruction d’embryons humains.

Nous vous proposons donc d’insérer à l’alinéa 24, après le mot « établie », les mots « si, en l’état des connaissances scientifiques, cette recherche ne peut être menée sans recourir à des cellules souches embryonnaires humaines. »

M. Philippe Berta, rapporteur. Vos amendements visent à réintroduire dans le nouveau régime de déclaration des protocoles de recherche sur des cellules souches embryonnaires la condition tenant à l'absence de solution alternative, alors que l'article 14 adapte justement le régime juridique des recherches sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires selon leurs différences de nature et d'enjeux éthiques respectifs que ces recherches impliquent.

Je ne vais pas le répéter mais il ne s'agit pas des mêmes enjeux, les cellules souches embryonnaires ne constituant pas un organisme en développement.

Par ailleurs, les cellules souches embryonnaires et les cellules souches pluripotentes induites ne sont pas considérées comme alternatives mais bien comme complémentaires. Nous ne pouvons pas aujourd'hui faire les mêmes recherches avec ces deux types de cellules souches.

Pour ces différentes raisons, juridiques, éthiques et pragmatiques, ces amendements sont inopérants puisque coexistent deux régimes juridiques de recherche, l’un relatif à l’embryon et l’autre à la cellule souche. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CS74 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. La France recourt plus souvent aux cellules souches embryonnaires qu’aux cellules souches pluripotentes induites. Or une dépêche de l’Agence France Presse annonçait, en mars 2021, que des scientifiques avaient généré des structures embryonnaires humaines à un stade précoce afin de faire progresser la recherche sur les fausses couches et la malformation physique des fœtus. C’est extrêmement intéressant. Ces travaux ont été menés par deux équipes différentes de chercheurs, au Texas et en Australie. Les chercheurs ne sont pas passés par la fusion des gamètes. L’équipe de Jun Wu, chercheur à l’université du Texas, a utilisé des cellules souches dérivées d’embryons humains et des cellules pluripotentes induites tandis que l’équipe australienne a eu recours à des cellules de peau adultes. Ces deux équipes sont arrivées au même résultat : les cellules se sont progressivement organisées pour reproduire les trois structures composant les blastocystes humains.

Si on utilise des cellules qui ne seraient pas des cellules embryonnaires humaines, parviendra-t-on au même résultat ? Dans ce cas, ne pourrait-on privilégier le recours à des cellules IPS, voire des cellules de peau adultes ?

M. Philippe Berta, rapporteur. Je n’ai pas lu cette publication, madame Ménard – je dois reconnaître que cela n’a jamais été mon champ d’activité principal. Mais c’est vrai que c’est très intéressant.

Il reste qu’il s’agit une publication princeps et il faudra encore des années avant qu’on aboutisse à des conclusions définitives. J’espère que celles-ci iront dans le sens que nous souhaitons tous deux, à savoir qu’on arrivera un jour à remplacer les cellules souches embryonnaires humaines par les cellules IPS.

Le problème, c’est qu’on ne maîtrise pas encore l’innocuité de ces dernières. C’est pourquoi il faut accumuler les travaux afin d’établir un comparatif moléculaire et être certain qu’on obtiendra, dans les deux cas, exactement la même chose. Attendons donc la suite – mais je peux vous garantir, pour avoir été scientifique dans une vie antérieure, que cela prendra des années. C’est dommage, mais c’est ainsi !

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS230 de M. Thibault Bazin.

M. Patrick Hetzel. Monsieur le rapporteur, vous dites qu’il est hors de question de créer des embryons humains en laboratoire. Dont acte. Néanmoins, on crée déjà des entités embryonnaires en laboratoire sans passer par la fusion de gamètes : c’est notamment le cas de ces chercheurs qui viennent de créer des blastoïdes ou de ceux qui, en Grande-Bretagne, travaillent à partir de cellules souches embryonnaires humaines. Les entités obtenues ne sont plus distinguables des embryons humains au stade du blastocyste, c’est-à-dire au bout de six jours.

Dès lors que ces entités ont un développement identique à celui de l’embryon humain, ne faudrait-il pas qu’elles bénéficient de la même protection que celui-ci ? La jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, à laquelle faisait référence Annie Genevard ce matin, semble aller dans ce sens, à travers l’arrêt Brüstle contre Greenpeace. Il y a là, nous semble-t-il, un véritable enjeu éthique.

M. Philippe Berta, rapporteur. Je suis un peu perdu… N’examinons-nous pas l’amendement CS230 qui porte sur la modélisation de pathologies et le criblage de molécules ?

Je suis néanmoins prêt à répondre à la question posée. L’objectif des recherches que vous évoquez sur les gastruloïdes est la production d’organoïdes, et certainement pas celle d’embryons. Il s’agit d’un outil qui va probablement s’avérer fondamental dans les mois et les années à venir, et je pense que l’on peut s’en réjouir, car cela permettra d’éviter des expérimentations animales. On est à des années-lumière de l’embryon.

Avis défavorable sur l’amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques CS78 de Mme Emmanuelle Ménard et CS233 de M. Thibault Bazin.

Mme Emmanuelle Ménard. Ces amendements tendent à supprimer l’alinéa 25, qui autorise, d’une part, la différenciation de cellules souches embryonnaires en gamètes, c’est-à-dire la création de gamètes artificiels, d’autre part, l’agrégation de cellules souches embryonnaires avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires, ce qui permet la création d’un ensemble qui ressemble à un embryon. Cela est contraire à l’article 18 de la convention d’Oviedo,

M. Patrick Hetzel. Voici ce que dit la Cour de justice de l’Union européenne dans l’arrêt Brüstle contre Greenpeace, auquel nous sommes plusieurs à avoir fait référence : « La notion d’“embryon humain” […] doit être comprise largement. Dans ce sens, tout ovule humain doit, dès le stade de sa fécondation, être considéré comme un “embryon humain” […] dès lors que cette fécondation est de nature à déclencher le processus de développement d’un être humain. »

Il s’agit là d’une décision de nature juridique. Or, à travers ce projet de loi relatif à la bioéthique, nous sommes en train de créer du droit. Ne devrions-nous pas tirer les conclusions de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne ?

M. Philippe Berta, rapporteur. Je ne fais pas la même lecture que vous de cet alinéa. Actuellement, rien dans la loi n’empêche d’effectuer n’importe quel type de recherche sur les cellules souches, qu’elles soient embryonnaires ou IPS, y compris la constitution de gamètes. L’objectif de la présente disposition est de doter l’Agence de la biomédecine d’outils lui permettant d’exercer une faculté d’opposition afin qu’elle puisse mieux encadrer ces recherches. On va donc vers plus d’éthique.

Cela ne remet pas en cause, bien au contraire, le principe d’interdiction de création d’embryons à des fins de recherche, et cela quel qu’en soit le moyen.

Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendement CS75 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. Je propose une nouvelle rédaction de l’alinéa 25.

La création de gamètes et d’embryons synthétiques doit être interdite, tout comme l’insertion de cellules souches embryonnaires ou de cellules IPS dans un embryon animal. Il s’agit de respecter la dignité humaine, et aussi celle des animaux.

Parce que cette autorisation ouvre une boîte de Pandore dont nous ne connaissons pas les conséquences, il convient d’empêcher que de telles recherches aient lieu sur le sol français.

M. Philippe Berta, rapporteur. Avis défavorable. Je le répète : de grands principes éthiques encadrent ces différents types de recherches. Il est interdit de créer un embryon à des fins de recherche ; il est interdit de transférer un embryon humain à des fins de gestation ; la limite du développement est fixée à quatorze jours.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques CS77 de Mme Emmanuelle Ménard, CS410 de M. Patrick Hetzel, CS415 de M. Xavier Breton, CS513 de M. Thibault Bazin et CS770 de Mme Anne-Laure Blin.

Mme Emmanuelle Ménard. L’agrégation de cellules souches embryonnaires avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires permet la création d’un ensemble qui ressemble à un embryon. Cela revient à créer un embryon à des fins de recherche, ce qui est interdit par l’article 18 de la convention d’Oviedo.

J’entends ce que vous dites sur l’interdiction de créer de tels embryons, monsieur le rapporteur, mais les deux équipes que je mentionnais tout à l’heure, l’une du Texas, l’autre d’Australie, sont arrivées, en utilisant des procédés différents, au même résultat : les cellules se sont progressivement organisées pour reproduire les trois structures composant les blastocystes humains. Autrement dit, par l’agrégation de cellules embryonnaires, IPS ou adultes, et de cellules souches extra-embryonnaires, les scientifiques arrivent aujourd’hui à créer des embryons humains qui se développent jusqu’au dixième, voire jusqu’au quatorzième jour. Il s’agit bien là de création d’embryons humains pour la recherche.

Je ne dis pas que c’est le cas en France, mais je pense qu’on est à la limite de l’interdit. Ce qui m’inquiète, c’est que pour expliquer la limite du développement au quatorzième jour, vous avez dit : « Puisqu’on sait aller jusque-là, autant en profiter pour étudier au maximum ». Si l’objectif peut être louable, je crains qu’à force de repousser les limites, on ne repousse aussi les règles éthiques, qui ne sont pas toujours négociables.

M. Patrick Hetzel. Sur les questions de bioéthique, nécessairement, on se pose des questions et l’on doute. Dans des travaux récents, certains juristes ont abordé la question des embryoïdes – sous un angle juridique, bien entendu. Et ils nous mettent en garde, en disant que nous risquons d’aller non pas vers un mieux-disant éthique, comme vous l’affirmez, monsieur le rapporteur, mais vers un moins-disant, dans la mesure où le développement des embryoïdes va précisément permettre de contourner l’interdit de créer des embryons à des fins de recherche. Pouvez-vous, monsieur le rapporteur, lever ces doutes ?

Mme Annie Genevard. La tâche que nous avons à accomplir est de rechercher sans cesse l’équilibre entre les avantages d’une recherche la plus fructueuse possible sur le plan thérapeutique et le respect des bornes qu’il convient de poser. Les interrogations soulevées à travers ces amendements n’appellent pas qu’une réponse scientifique ; elles attendent aussi une réponse éthique.

M. Philippe Berta, rapporteur. Vous allez un peu vite en besogne… Les gastruloïdes – ou les embryoïdes, peu importe le nom qu’on leur donne – sont loin d’être des embryons ! Il s’agit de modèles qui n’ont aucune possibilité évolutive, qui restent difficiles à comprendre – des études récentes montrent qu’on y trouve des cellules dont on ne sait pas très bien d’où elles viennent – et qui permettent d’acquérir de nouvelles connaissances sur les processus biophysiques, sur les processus d’auto-organisation de la gastrulation dans les premières étapes de la vie. Il serait dommageable de se passer de telles sources de progrès scientifiques et médicaux. Nous devrions plutôt soutenir collectivement ce type de recherches qui permettent de ne plus travailler sur de vrais embryons, en étudiant des phases très importantes sur des structures qui, je le répète, n’ont aucune capacité à devenir des embryons. Avis défavorable.

Mme Annie Genevard. Et la Cour de justice, alors ? Elle ne comprend rien ?

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS1021 du rapporteur et CS1014 de M. Marc Delatte.

M. Philippe Berta, rapporteur. Mon amendement vise un double objectif.

D’une part, il rétablit l’avis obligatoire du conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine en cas d’opposition aux recherches nécessitant l’adjonction de cellules souches embryonnaires dans un embryon animal, dans la logique de l’amendement proposé à l’article 17 et afin de donner la possibilité de réaliser ce type de recherche – ce que le Sénat avait supprimé.

D’autre part, il élargit le champ de la disposition en vue de soumettre aussi à l’avis du conseil d’orientation de l’Agence toute opposition à un projet de modélisation du développement embryonnaire, quelle que soit la technique utilisée. Cela permettra d’encadrer la création de modèles embryoïdes non seulement par l’agrégation de cellules pluripotentes avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires, mais aussi par de nouvelles techniques apparues tout récemment – notamment celles dont il vient d’être question.

Pourquoi modifier l’article dans ce sens ?

D’abord, ces deux types de recherches ouvrent des voies très prometteuses ; les interdire aux chercheurs français reviendrait à exclure toute possibilité d’avancée dans ce domaine.

Ensuite, ne pas les mentionner dans cet alinéa conduirait non pas à interdire quoi que ce soit, mais à ne plus leur appliquer l’encadrement renforcé prévu pour les recherches hautement sensibles. Ce serait moins-disant sur le plan éthique, ce qui ne me semble pas souhaitable.

M. Marc Delatte. Nous comprenons les inquiétudes que soulève la recherche sur l’embryon et c’est pourquoi mon amendement tend à restaurer le régime déclaratif renforcé incluant un avis du conseil d’orientation de l’Agence de la biomédecine. Il faut le rappeler, il n’est pas question d’autoriser la création d’embryons de novo ; c’est un interdit éthique. La France a ratifié la convention d’Oviedo et son article 18. Mais réimplanter un embryon qui était destiné à la recherche est un autre interdit éthique.

Mme Annie Genevard. Nous traitons bien là de ce que le commun des mortels appelle des « chimères », monsieur le rapporteur ?

M. Philippe Berta, rapporteur. Ça, c’est un terme pour ceux qui croient aux sirènes et aux centaures. Vous pouvez l’utiliser, mais il n’est pas très approprié.

Mme Annie Genevard. Le terme n’est peut-être pas très approprié, mais il est parlant. Je pense que chacun aura compris de quoi il retourne, sans qu’il soit besoin de se référer à la mythologie grecque : il s’agit de mêler des cellules humaines et des cellules animales. Pardonnez-moi si les termes que j’utilise ne sont pas scientifiques, mais ils expriment l’effroi que j’éprouve à la perspective de tels dispositifs, et cela quelle que soit leur utilité. La fin ne justifie pas toujours les moyens.

Il a été dit par des scientifiques – notamment, je crois, lors des auditions – qu’on n’était pas sûr que si l’on implante plus de 30 % de cellules humaines, il ne se développe pas une conscience humaine. On franchit là la barrière des espèces ! Cela vous fait sourire, chers collègues, mais je vous assure que vous êtes bien les seuls, car l’opinion publique – qui n’a certes pas l’esprit aussi scientifique que vous – comprend bien ce qui est en jeu.

De surcroît, il a été dit aussi qu’on ne savait pas maîtriser la migration de cellules. Il me semble que dans le doute, mieux vaut s’abstenir de prendre de telles dispositions, qui sont potentiellement porteuses de dérives éthiques gravissimes.

M. Patrick Hetzel. Si le Sénat a décidé de supprimer cette disposition, c’est en raison de considérations juridiques et bioéthiques. N’êtes-vous pas effrayés par les perspectives vertigineuses ouvertes par de telles manipulations du vivant, que l’on engage sans savoir si l’on pourra ensuite y mettre un terme ? Je me demande si le rôle d’une loi de bioéthique n’est pas précisément de se doter de garde-fous et de faire valoir, en la matière, le principe de précaution. Les répercussions potentielles d’une telle disposition ne sont pas minces ; elle peut avoir des conséquences y compris sur le patrimoine génétique de l’humanité. Il serait plus prudent d’en rester à la rédaction du Sénat – à moins que vous ne nous convainquiez que votre rédaction comporte des garde-fous.

M. Pascal Brindeau. Tout l’enjeu de ce débat sur le « mélange » de cellules souches humaines et de cellules animales est de trouver le point d’équilibre entre, d’une part, les grandes avancées qu’engendre potentiellement la recherche scientifique, notamment en matière thérapeutique et médicale – certaines grandes découvertes ont été permises par la transgression des principes établis, que l’on a su dépasser pour le meilleur –, et, d’autre part, les barrières éthiques qui doivent rester infranchissables car elles engagent la conception que nous avons de notre propre civilisation et de notre rapport à la nature. Les débats toujours plus intenses que nous avons sur la condition animale, sur la protection de l’environnement, sur la sauvegarde de la planète etc. nous amènent à nous demander quelle est la place de l’homme dans tout cela – l’environnement, l’écosystème, la planète – et quel est notre rapport à l’animal.

On voit bien qu’il y a là un point de rupture. Certains estiment qu’on est en train d’aller au-delà de la transgression nécessaire aux progrès de la médecine. D’autres, dont vous êtes, monsieur le rapporteur, considèrent qu’il ne s’agit que d’une étape, qui est encadrée et maîtrisée – de fait, il y a des garde-fous. Cela nous ramène au débat que nous avions ce matin sur une autre question : si nous sommes capables en France de garantir un certain nombre de garde-fous, parce que la recherche est publique, nous ignorons ce que peuvent faire les autres.

Mme Emmanuelle Ménard. Quand on parle du présent projet de loi avec nos concitoyens, trois sujets reviennent systématiquement – beaucoup d’autres étant jugés trop compliqués. Il s’agit de l’ouverture de la PMA aux couples de femmes et aux femmes célibataires, qui soulève la question de la place du père ; de l’établissement du lien de filiation et de la levée de l’anonymat ; des chimères animal-homme. Dans l’esprit des Français, la possibilité d’introduire une part de cellules humaines dans un embryon animal fait problème ; cela renvoie vraiment à la figure de l’apprenti sorcier.

On ne peut pas balayer d’un revers de la main ces réticences. Il faut en la matière légiférer « avec une main tremblante », pour reprendre une expression en vogue dans l’hémicycle – je préfère pour ma part parler de principe de précaution. Sur ce sujet éthique par excellence, celui-ci doit être la règle. Les protocoles de recherche doivent être rigoureusement contrôlés, et pas seulement par des instances scientifiques. C’est pourquoi j’ai déposé un amendement visant à ce qu’une information soit publiée au Journal officiel. Il importe que le grand public soit pleinement rassuré.

La commission adopte les amendements.

Amendements identiques CS190 de M. Patrick Hetzel, CS232 de M. Thibault Bazin, CS322 de M. Xavier Breton et CS742 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. L’alinéa 25 revient à autoriser la création sans conditions de gamètes artificiels à partir de cellules souches embryonnaires humaines. Nous souhaiterions que ce soit davantage encadré.

M. Philippe Berta, rapporteur. Avis défavorable : je considère au contraire que l’alinéa 25 crée le cadre juridique qui faisait jusqu’alors défaut.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS191 de M. Patrick Hetzel, CS231 de M. Thibault Bazin, CS323 de M. Xavier Breton, CS769 de Mme Anne-Laure Blin et CS987 de M. Philippe Gosselin.

M. Patrick Hetzel. L’alinéa 25 tend en réalité à soustraire au contrôle de l’Agence de la biomédecine les recherches visant à différencier les cellules souches embryonnaires en gamètes, l’agrégation de ces cellules avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires ou leur insertion dans un embryon animal dans le but de son transfert chez la femelle. Nous considérons qu’il convient de rétablir le pouvoir de décision et de contrôle de l’Agence sur les recherches de ce type, car elles portent sur des questions extrêmement sensibles du point de vue éthique.

M. Philippe Berta, rapporteur. Avec ces « chimères », on a un peu l’impression d’ouvrir la boîte à fantasmes ! Pourtant – le professeur Eliaou pourra vous le confirmer –, ce n’est pas nouveau. De quoi s’agit-il ? D’introduire dans des tissus extra-embryonnaires animaux des cellules souches humaines, et cela pour deux raisons. D’abord, et ce sont mes collègues chercheurs qui travaillent dessus qui me l’ont dit, on a besoin de cet environnement extra-embryonnaire pour nourrir les cellules souches et tester leur qualité. Ensuite, l’une des finalités de ces recherches est la production d’organes pour l’homme. On utilise pour cela des miniporcs humanisés ; en effet, le porc a un système immunitaire remarquablement proche du nôtre, et c’est très probablement pour cette raison que dans certaines religions, il est interdit d’en manger : les virus passent très facilement du porc à l’homme. L’objectif est en particulier de produire des cœurs : il y a une longue liste de personnes en attente de transplantation – il serait bon de penser un peu à elles. Une autre approche très prometteuse, c’est la production d’îlots de Langerhans, voire, à terme, de pancréas, pour les personnes qui souffrent de diabète de type 1 et qui sont au quotidien « sous perfusion » d’insuline – ce qui, comme chacun le sait, n’est pas de nature à leur assurer une grande longévité. Ces recherches, cela fait des décennies qu’on en parle et nous pouvons tous, je crois, en souhaiter le succès. Ce que nous souhaitons faire ici, c’est précisément fournir le cadre juridique qui leur manquait.

Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendement CS79 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. Hasard du calendrier ? Deux équipes, l’une française, conduite par le professeur Savatier, l’autre sino-américaine, ont cultivé durant trois à dix-neuf jours des embryons de macaques dans lesquels ils avaient ajouté des cellules humaines. Les résultats de leurs travaux ont été publiés en début d’année : le 12 janvier pour l’équipe française et le 15 avril pour l’équipe sino-américaine. Des chercheurs ont donc introduit des cellules IPS, des cellules adultes reprogrammées, dans des embryons de macaques. C’est une réalité, et non de la science-fiction.

Je souhaiterais que l’on revienne sur le plan juridique, et rappeler les craintes du Conseil d’État sur les chimères animal-homme : une nouvelle zoonose ; une migration de cellules humaines vers le cerveau de l’animal ; une éventuelle apparence humaine.

Les chimères issues de deux espèces animales apparemment ne fonctionnent pas. Les chimères porc-singe, par exemple, ont échoué. Pourquoi vouloir rendre possible des chimères animal-homme ? Vous dites que c’est pour produire des cœurs, mais ne peut-on pas faire ces recherches sur l’animal ? Il me semble que les êtres humains et les cellules souches embryonnaires n’ont pas à être utilisés pour des expérimentations qui relèvent, je le répète, du domaine de l’apprenti sorcier.

M. Philippe Berta, rapporteur. Vous avez raison, il n’y a pas d’angoisse à avoir car la barrière d’espèce est infranchissable. Ne mélangeons pas les chimères homme-animal et animal-homme. Il n’a jamais été question et il ne sera jamais question de mettre des cellules animales dans un fonds embryonnaire humain. Je n’en vois pas l’intérêt.

J’ai précisé les objectifs auxquels se limite le souhait de chimérisme. Il y a eu des exemples de succès : l’une des plus brillantes chercheuses des dernières décennies, le professeur Nicole Le Douarin, membre de l’Académie des sciences, est parvenue à créer des hybrides caille-poulet. Je vous rassure, cela n’est jamais allé beaucoup plus loin.

Quant à l’amendement, je lui donne un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette l’amendement CS76 de Mme Emmanuelle Ménard.

Amendement CS80 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. En séance publique, le Sénat a adopté l’amendement n° 135 rectifié quater de M. de Legge, visant à préciser que les gamètes dérivés de cellules souches embryonnaires ne peuvent servir à féconder un autre gamète issu du même procédé ou obtenu par don. Rappeler cet interdit dans la nouvelle rédaction de l’article L. 2151-6 du code de la santé publique n’est pas superfétatoire, bien au contraire.

M. Philippe Berta, rapporteur. L’amendement est satisfait par l’alinéa 23, qui a été ajouté par le Sénat et que nous entendons conserver dans le texte. Je vous suggère donc de le retirer. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Amendement CS676 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. Il vise à supprimer l’alinéa 26. L’Agence de la biomédecine doit se prononcer sur tous les protocoles de recherche. Il est difficilement compréhensible que son silence implique autorisation à l’expiration d’un certain délai. Il est ici question de toutes les recherches sur les cellules souches embryonnaires, qui concernent notamment la possibilité de créer des gamètes artificiels via la différenciation de cellules souches embryonnaires en gamètes ou, en procédant à l’agrégation des cellules souches embryonnaires avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires, de créer des ensembles qui ressemblent à des embryons. Compte tenu des enjeux éthiques de ces recherches, l’Agence de la biomédecine doit se prononcer sur l’ensemble des projets de recherche, non se taire, silence valant acceptation.

M. Philippe Berta, rapporteur. Vous êtes en train de remettre en cause nos débats des heures précédentes, entre le régime déclaratif et le régime d’autorisation. Il n’y a pas de logique d’autorisation pour ces recherches. C’est le sens même de l’article 14. En revanche, il y a une obligation de déclaration auprès de l’agence. Le dispositif nous paraît équilibré et pertinent. Nous ne souhaitons pas le remettre en cause.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS1023 du rapporteur.

Amendement CS235 de M. Thibault Bazin.

M. Xavier Breton. Il vise à supprimer l’alinéa 29. Depuis 2004, il revient à l’Agence de la biomédecine d’autoriser les importations de lignées de cellules souches embryonnaires sur lesquelles une recherche sera menée en France. L’alinéa 29 prévoit que, lors d’une demande d’importation, l’ABM n’ait plus à vérifier elle-même que les cellules souches embryonnaires aient été obtenues dans le respect des principes éthiques exigés par la France. Il prévoit que seule la présentation d’une attestation par le demandeur de l’autorisation d’importation fasse foi et conduise à une autorisation de l’ABM. L’assouplissement supprime un garde-fou dans les importations de cellules souches embryonnaires. C’est pourquoi nous en proposons la suppression.

M. Philippe Berta, rapporteur. Nous n’avons pas la même interprétation. L’alinéa 29 modifie le régime de contrôle des importations de cellules souches embryonnaires humaines. Le principe de l’autorisation par l’Agence de la biomédecine demeure cependant. Avec l’alinéa, une attestation de l’obtention de ces cellules souches, conformément aux principes fondamentaux du code civil, pourra être exigée. L’Agence disposera ainsi d’un document opposable, qui lui permettra d’améliorer sa capacité de contrôle.

Demande de retrait. À défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS497 de Mme Agnès Thill.

M. Pascal Brindeau. Le présent amendement vise à maintenir le régime actuel d’autorisation de l’Agence de la biomédecine, par opposition à une simple déclaration, pour l’importation et l’exportation de cellules souches embryonnaires aux fins de recherche. Il complète le dispositif en subordonnant à la condition de la participation d’un organisme de recherche français au programme de recherche international quand il s’agit d’exportation desdites cellules souches.

M. Philippe Berta, rapporteur. Votre dispositif semble ne pas correspondre à l’exposé des motifs. Sur le fond, s’agissant de l’application d’un régime d’autorisation, ma réponse n’a pas varié. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS498 de Mme Agnès Thill.

M. Pascal Brindeau. Dans le même esprit, l’amendement vise à maintenir un système d’autorisation, non de déclaration, pour l’importation de cellules souches aux fins de recherche. C’est une forme d’amendement de repli.

M. Philippe Berta, rapporteur. Pour les mêmes raisons que précédemment, je donne un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques CS192 de M. Patrick Hetzel, CS234 de M. Thibault Bazin, CS324 de M. Xavier Breton, CS771 de Mme Anne-Laure Blin et CS989 de M. Philippe Gosselin.

M. Patrick Hetzel. Il est étonnant de voir que de nombreuses autorisations d’importation délivrées par l’Agence de la biomédecine portent sur des lignées de cellules souches qui proviennent des États-Unis, d’Israël ou d’Angleterre. Ces pays, qui ont refusé de signer la convention d’Oviedo, ont une législation relative aux recherches sur les cellules souches embryonnaires humaines et sur l’embryon moins-disante en termes d’éthique que le nôtre. Ils ne présentent pas le même niveau de garantie que la France, signataire de la convention d’Oviedo. Ils ne sont pas en mesure de garantir la protection adéquate, l’interdiction de constitution d’embryons aux fins de recherche ou le consentement du couple géniteur, des éléments qu’exigent les articles 13 et 18 de la convention. Pour le permettre, la France doit autoriser des implantations de lignées en provenance de pays qui ont les mêmes exigences qu’elle, non de pays qui ont des législations permissives en la matière.

C’est pourquoi il faut limiter l’importation de cellules souches embryonnaires en provenance de pays qui ne sont pas signataires de la convention d’Oviedo, sans quoi, il y aurait une forme d’asymétrie.

M. Xavier Breton. Dans la lignée de l’amendement CS192, les amendements CS234, CS324, CS771 et CS989 alertent sur le risque de moins-disant ou de dumping éthique entre les États. La France ne doit pas s’inscrire dans une baisse de l’exigence éthique. Il existait une exception française en matière de bioéthique. Elle se traduisait par la convention d’Oviedo, qui avait pour exigence d’être partagée entre les États. Nous ne devons pas entrer dans la logique de certains pays comme les États-Unis, Israël, l’Angleterre, où il existe d’importants intérêts privés dans le domaine de la recherche. C’est pourquoi nous proposons d’interdire l’importation de cellules souches embryonnaires, issues de pays n’ayant pas signé la convention d’Oviedo, qui est protectrice en matière d’éthique.

M. Philippe Berta, rapporteur. Ma réponse avait déjà été donnée en première et deuxième lecture : on peut être signataire de la convention d’Oviedo, et ne pas produire de cellules souches dans le respect des principes éthiques du droit français. Inversement, on peut être issu d’un pays qui n’a pas signé la convention, et respecter les principes éthiques du droit français. La rédaction du projet de loi est la plus appropriée car elle fixe des critères bien identifiés. Je vous propose de retirer vos amendements. À défaut, j’y serai défavorable.

La commission rejette les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette l’amendement CS677 de Mme Emmanuelle Ménard.

Amendement CS81 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. L’amendement CS81 vise à supprimer les alinéas 32 à 37, qui sont contraires à la convention d’Oviedo.

M. Philippe Berta, rapporteur. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette l’amendement CS5 de Mme Marie-France Lorho.

Amendement CS236 de M. Thibault Bazin.

M. Patrick Hetzel. Le projet de loi prévoyait initialement de conditionner la conservation des embryons et des cellules souches embryonnaires humaines à la délivrance d’une autorisation de l’Agence de la biomédecine. Prétextant une instabilité juridique, des chercheurs auditionnés par la commission spéciale ont demandé que ces autorisations ne soient plus soumises à la délivrance d’une autorisation préalable de l’agence. L’alinéa 36, issu d’un amendement adopté en commission, a pour objet de soumettre la conservation des embryons et des cellules souches embryonnaires à une simple déclaration à l’Agence de la biomédecine. Il n’existe pourtant aucune instabilité juridique pour ceux qui respectent la loi.

En conséquence, il convient de supprimer l’alinéa 36 et de soumettre les décisions de conservation des embryons et des cellules souches embryonnaires humaines à la procédure d’autorisation de l’Agence de la biomédecine, telle qu’elle est prévue aujourd’hui par le code de la santé publique.

M. Philippe Berta, rapporteur. L’amendement viendrait rétablir le mécanisme d’autorisation pour la conservation des cellules souches embryonnaires, alors que la commission spéciale avait adopté cette modification en première lecture. Le dispositif n’a posé aucune difficulté en séance à l’Assemblée ainsi qu’en commission et en séance au Sénat. Nous resterons donc sur les positions que nous avions alors établies. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS500 de Mme Agnès Thill.

M. Pascal Brindeau. Plutôt qu’un régime d’autorisation, il convient d’établir un régime de déclaration auprès de l’Agence de la biomédecine pour les organismes qui souhaitent assurer, à des fins de recherche, la conservation de cellules souches embryonnaires. Je souhaiterais aussi m’assurer que les organismes dont il est question pourraient être à la fois publics et privés.

M. Philippe Berta, rapporteur. Dans notre pays, il y a une loi et une seule. Elle s’applique à tous, que l’organisme soit public ou privé. L’amendement entraînerait un retour au système d’autorisation, alors que l’article 14 instaure un régime déclaratif. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS501 de Mme Agnès Thill.

M. Pascal Brindeau. Je suis d’accord avec vous, monsieur le rapporteur : la loi est la même pour tous les organismes, qu’ils soient publics ou privés. Nous le rappelons souvent, la recherche française est publique. Toutefois, des opérateurs privés interviennent dans l’environnement. C’est la raison pour laquelle, dans ce cas, le régime d’autorisation est plus protecteur, afin d’éviter certaines dérives, car ces organismes privés peuvent être à capitaux français, mixtes ou internationaux. Un tel pare-feu supplémentaire est souhaitable : c’est l’objet de l’amendement.

M. Philippe Berta, rapporteur. Je ne connais pas d’acteurs privés dans le secteur. Je maintiens l’avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte les amendements rédactionnels CS1024 et CS1025 du rapporteur.

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette l’amendement CS502 de Mme Agnès Thill.

Amendement CS237 de M. Thibault Bazin.

M. Xavier Breton. La recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines pose des questions éthiques. Il est donc nécessaire que l’Agence de la biomédecine fasse une instruction en amont sur les protocoles de recherche portant sur ces cellules. Ces autorisations sont des actes administratifs, qui seraient publiés au Journal officiel, comme c’est le cas pour les recherches sur l’embryon humain.

M. Philippe Berta, rapporteur. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 14 modifié.

Article 15 : Régulation, en recherche fondamentale, de certaines utilisations des cellules souches pluripotentes induites

Amendement de suppression CS239 de M. Thibault Bazin.

M. Patrick Hetzel. L’article 15 est relatif aux cellules souches pluripotentes induites, dites IPS, qui sont une solution de remplacement éthique efficace des cellules souches embryonnaires humaines. Il est regrettable que, dans le projet de loi, leur utilisation soit uniquement envisagée pour une manipulation qui n’est pas éthique, à savoir la création de gamètes artificiels. La technique, une fois éprouvée, pourrait permettre de créer des spermatozoïdes et des ovules à partir de cellules de peau. Certaines personnes pourraient même devenir parents sans le savoir, selon l’exposé des motifs de M. Bazin. Il convient donc d’interdire la création de gamètes artificiels à partir de cellules IPS.

M. Philippe Berta, rapporteur. Nous avons rappelé ce matin la nature et l’origine des cellules souches pluripotentes induites. À ce jour, aucun texte n’encadre les recherches réalisées sur ces cellules, qui peuvent aussi soulever des enjeux éthiques. C’est pourquoi, à l'heure actuelle, il n'est pas possible de supprimer l’article 15, qui vise à appliquer le même régime de déclaration à l’Agence de la biomédecine que celui instauré pour la recherche sur les cellules souches embryonnaires, en espérant qu’un type cellulaire permette un jour d’effacer l’autre. Il semble important que ces deux types de cellules bénéficient de la même couverture juridique. J’émettrai donc un avis défavorable sur l’amendement de suppression.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette les amendements identiques CS194 de M. Patrick Hetzel, CS326 de M. Xavier Breton et CS787 de Mme Anne-Laure Blin.

Amendement CS82 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. Vous voulez traiter dans un même chapitre la recherche sur l’embryon humain et les cellules souches embryonnaires humaines, et la recherche sur les cellules souches pluripotentes induites, les fameuses cellules IPS. Or ces deux recherches n’ont pas le même enjeu éthique. Dans le premier cas, il s’agit de manipuler la forme la plus jeune de l’être humain. Dans l’autre, ce sont des cellules souches pluripotentes induites dont l’obtention ne pose aucun problème éthique. Elles sont obtenues par reprogrammation génétique de cellules somatiques adultes différenciées – cellules de peau, d’œil, notamment. Placer ces deux types de recherches dans un même titre entraîne une confusion. Créer un titre spécifique pour les cellules IPS serait souhaitable.

M. Philippe Berta, rapporteur. L’origine des cellules n’est en effet pas comparable. On peut qualifier les cellules IPS du terme fourre-tout d’organisme génétiquement modifié (OGM), d’autant qu’elles sont modifiées notamment avec un oncogène de type c-myc, ce qui n’est pas anodin. Il est question non des origines mais d’encadrer les applications de la même façon. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques CS195 de M. Patrick Hetzel, CS240 de M. Thibault Bazin, CS327 de M. Xavier Breton, CS520 de Mme Annie Genevard, CS790 de Mme Anne-Laure Blin et CS993 de M. Philippe Gosselin.

M. Patrick Hetzel. L’article 15 a été partiellement réécrit par le Sénat, qui a procédé à la suppression de toute référence à des recherches consistant à insérer des cellules souches pluripotentes induites humaines dans un embryon animal, en cohérence avec l’article 17, qui interdit désormais la création d’embryons chimériques.

Les amendements visent à compléter son alinéa 3, en y ajoutant la phrase suivante : « Les cellules souches pluripotentes induites sont utilisées pour la recherche pharmacologique. » La recherche pharmacologique a en effet pour principal objectif la mise au point de médicaments. Elle consiste notamment à cribler des molécules, à modéliser des pathologies et à tester la toxicité des médicaments. Il est acté de façon consensuelle que, pour la recherche de l’industrie pharmaceutique, les cellules souches embryonnaires humaines peuvent être remplacées. Selon l’Académie nationale de médecine, l’Agence de la biomédecine et l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), les cellules IPS sont utilisées dans la recherche pharmacologique avec la même efficacité que les cellules souches embryonnaires humaines. Elles peuvent même présenter des avantages dans certains cas, comme l’explique l’Agence de la biomédecine. Si elles peuvent remplacer les cellules souches embryonnaires pour la recherche pharmacologique, pourquoi ne pas les privilégier ?

M. Philippe Berta, rapporteur. J’ignore ce qu’est une « recherche pharmacologique » – le terme englobe tellement de choses ! Vous faites sûrement allusion à des screenings de molécules. En tout état de cause, ces amendements sont satisfaits par le droit actuel. Il ne semble pas utile de mentionner de nouveaux éléments. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

(Présidence de Mme Agnès Firmin Le Bodo, présidente de la commission spéciale.)

Amendements identiques CS196 de M. Patrick Hetzel, CS328 de M. Xavier Breton et CS791 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. Les présents amendements visent également à compléter l’article 15, après l’alinéa 3, car la recherche sur les cellules souches n’est pas exempte d’interrogations éthiques lorsqu’il s’agit de différencier ces cellules en gamètes. Ils entendent soumettre les recherches à une autorisation préalable de l’Agence de la biomédecine.

M. Philippe Berta, rapporteur. L’interdiction que vous proposez semble aller un peu loin, et contribuerait à brider la recherche. Or il faut favoriser la recherche sur les gamètes en vue, par exemple, de restaurer la fertilité des couples. La création d’embryons à des fins de recherche est interdite, y compris à partir de gamètes artificiels ou non. Le transfert à des fins de gestation l’est aussi. Quant à la limite de développement de l’embryon, elle reste fixée à quatorze jours. J’émets donc un avis défavorable sur ces amendements.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS197 de M. Patrick Hetzel, CS329 de M. Xavier Breton et CS794 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. Les amendements ont pour objet d’ajouter, après l’alinéa 3, la phrase suivante : « En aucune façon, les gamètes dérivés de cellules souches pluripotentes induites ne peuvent être fécondés ou fécondables. » C’est une autre manière de traiter la question.

M. Philippe Berta, rapporteur. L’avis reste défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendement CS84 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. L’amendement vise à supprimer les alinéas 4 à 9. La différenciation des cellules souches en gamètes permet de créer des gamètes artificiels. Quant à l’agrégation de ces cellules avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires, ou modèles embryonnaires à usage scientifique (MEUS), elle permet la création d’un ensemble qui ressemble à un embryon. Cela pourrait engendrer un changement de civilisation et de mode de conception des animaux, comme des enfants.

M. Philippe Berta, rapporteur. Ce que vous proposez reviendrait à supprimer l’encadrement de la recherche sur les cellules souches pluripotentes induites. On viderait ainsi l’article 15 de sa substance. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS85 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. Cet amendement de repli vise à substituer aux alinéas 4 à 9 une nouvelle rédaction, qui tend au même but.

M. Philippe Berta, rapporteur. L’avis reste défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette l’amendement CS524 de Mme Annie Genevard.

Amendements identiques CS198 de M. Patrick Hetzel, CS330 de M. Xavier Breton et CS795 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. L’alinéa 4 revient à autoriser la création de gamètes artificiels à partir de cellules souches pluripotentes induites. Une telle création n’a jamais été autorisée en France. Elle a des conséquences qui peuvent être vertigineuses d’un point de vue éthique, entraînant notamment dans certains cas la création d’embryons pour la recherche. Vous direz que c’est interdit, mais cela va parfois mieux en l’écrivant précisément. Pour cette raison, les amendements visent à supprimer les alinéas 4 à 7.

Par ailleurs, M. le rapporteur a mentionné que des perspectives de production d’organes pourraient être ouvertes. Le chercheur Pierre Savatier ne voit pas comment cela pourrait déboucher. Certes, une chose qui n'est pas possible aujourd’hui pourra l’être demain, mais, si les chercheurs qui ont travaillé sur ces questions sont à ce point dubitatifs, on peut s’interroger sur votre volonté de persévérer dans cette direction.

M. Philippe Berta, rapporteur. Je n’ouvrirai pas un débat scientifique. J’en serais incapable sur ces thématiques. Vous donnez l’avis d’un de mes collègues ; je pourrais trouver des avis contraires. Encore une fois, l’article 15 n’a d’autre but que d’encadrer l’utilisation des cellules pluripotentes induites. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette les amendements identiques CS241 de M. Thibault Bazin et CS353 de Mme Emmanuelle Ménard.

Amendements CS199 de M. Patrick Hetzel, CS331 de M. Xavier Breton et CS798 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. Les présents amendements visent à substituer à l’alinéa 4 les mots « :  les protocoles de recherche conduits sur des cellules souches pluripotentes induites humaines ayant pour objet » les mots « ce protocole ne peut être entrepris sans autorisation de l’Agence de la biomédecine. Ce protocole ne peut être autorisé que s’il a pour objet : ».

L’alinéa 4 revient à autoriser la création sans condition, à partir de cellules souches pluripotentes induites, de gamètes artificiels. Ces manipulations contournent l’interdit de créer des embryons pour la recherche. Certains juristes spécialistes du droit de la bioéthique nous alertent sur le risque de moins-disant éthique, puisqu’il y a contournement des règles éditées par la convention d’Oviedo. On procédera autrement mais pour le même résultat. Surtout, à partir du sixième jour, ces embryoïdes seront de même nature.

M. Philippe Berta, rapporteur. Vous proposez de dissocier les régimes qui s’appliqueraient aux cellules souches, d’un côté, aux cellules IPS, de l’autre. Or elles doivent être soumises, l’une et l’autre, à la même réglementation, au même régime qui est celui de la déclaration. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS422 de M. Patrick Hetzel, CS423 de M. Xavier Breton, CS514 de M. Thibault Bazin, CS679 de Mme Emmanuelle Ménard, CS802 de Mme Anne-Laure Blin et CS995 de M. Philippe Gosselin.

M. Patrick Hetzel. Je n’arrive pas à avoir une réponse à la question du moins-disant éthique.

M. Philippe Berta, rapporteur. Je me suis déjà beaucoup exprimé sur l’intérêt de créer ce type de modèles. Faute d’argument supplémentaire, j’émets un avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendement CS1028 du rapporteur.

M. Philippe Berta, rapporteur. Cet amendement poursuit un double objectif. D’une part, il rétablit l’obligation de déclaration auprès de l’Agence de la biomédecine pour les recherches visant à l’adjonction de cellules souches pluripotentes induites humaines dans un embryon animal, dans la logique de l’amendement que je proposerai à l’article 17. D’autre part, il soumet à cette obligation de déclaration les recherches ayant pour objet un projet de modélisation du développement embryonnaire, quelle que soit la technique utilisée.

Il y a deux raisons à cela. D’abord, ces deux types de recherches ouvrent des voies très prometteuses, et les interdire aux chercheurs français reviendrait à exclure toute avancée dans ce domaine. Ensuite, supprimer la mention de ces recherches dans cet alinéa ne conduit pas à interdire quoi que ce soit, mais simplement à écarter l’encadrement renforcé qui est prévu pour les recherches hautement sensibles, ce qui serait un recul et ne me semble pas souhaitable.

M. Xavier Breton. Nous nous opposerons à cet amendement car nous condamnons ces recherches dont on ne connaît pas bien les conséquences. Beaucoup de questions sont soulevées, qui ont été évoquées tout à l’heure et qui reçoivent peu de réponses.

La commission adopte l’amendement.

Amendements CS242 de M. Thibault Bazin et CS83 de Mme Emmanuelle Ménard (discussion commune).

M. Xavier Breton. L’alinéa 4 de l’article 15 revient à autoriser la création sans condition, à partir de cellules souches pluripotentes induites, de gamètes artificiels. L’amendement CS242 vous propose de circonscrire la recherche et de revenir au principe d’autorisation plutôt que de déclaration.

Mme Emmanuelle Ménard. Il est vraiment indispensable de revenir au régime d’autorisation.

M. Philippe Berta, rapporteur. Même réponse que précédemment : notre souci est de maintenir un régime identique pour les deux types cellulaires. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements identiques CS200 de M. Patrick Hetzel, CS243 de M. Thibault Bazin, CS332 de M. Xavier Breton, CS521 de Mme Annie Genevard, CS800 de Mme Anne-Laure Blin, CS994 de M. Philippe Gosselin et CS1019 de M. Julien Aubert.

M. Patrick Hetzel. L’article 15 entend renforcer l’encadrement de certaines recherches conduites sur des cellules souches pluripotentes induites. Ces cellules, issues d’une découverte scientifique réalisée en 2007, sont « fabriquées » en laboratoire à partir de cellules adultes reprogrammées par le biais de l’injection de gènes spécifiques.

Le caractère pluripotent de ces cellules soulève toutefois des questions éthiques délicates, en particulier si les recherches conduisent à différencier ces cellules en gamètes et à les agréger avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires, de manière à constituer des organismes dont la structure se rapproche de celle d’un embryon ou à les insérer dans un embryon. Si de telles recherches ne sont pas encore techniquement réalisables aujourd’hui, il apparaît vraisemblable qu’elles le soient dans un avenir proche.

Au regard des enjeux que cela soulève, en termes de risques de création d’embryons hybrides « humain-animal » mais aussi de bien-être animal, il est nécessaire que l’Agence de la biomédecine, garante des principes éthiques des activités médicales et de recherche, instruise en amont les protocoles de recherche portant sur les cellules souches pluripotentes induites et autorise expressément leur mise en œuvre.

Nous souhaitons donc soumettre ces recherches à une autorisation préalable de l’Agence de la biomédecine. Je ne vois pas quel problème cela poserait à une équipe de chercheurs. Il s’agit simplement d’une garantie : pourquoi vous y opposeriez-vous, si ce n’est pour aller vers un moins-disant éthique ?

M. Philippe Berta, rapporteur. Encore une fois, nous souhaitons des régimes identiques. Le régime d’autorisation que vous défendez risquerait de freiner toute la recherche sur les cellules IPS, ce qui me semble en contradiction avec ce que nous souhaitons tous. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS1026 du rapporteur.

Amendements identiques CS803 de Mme Anne-Laure Blin, CS424 de M. Patrick Hetzel, CS425 de M. Xavier Breton et CS479 de M. Thibault Bazin, et amendement CS354 de Mme Emmanuelle Ménard (discussion commune).

M. Patrick Hetzel. En quoi un régime d’autorisation serait-il de nature à retarder les recherches ? Cela ne retarde rien du tout. Certes cela crée un plus grand formalisme, mais ce formalisme est une garantie pour la collectivité. Nous, le législateur, nous exprimons au nom de la collectivité ; nous voulons faire au mieux, dans l’intérêt général. On est allé jusqu’à constitutionnaliser le principe de précaution : pourquoi, sur des sujets si sensibles, en faites-vous fi aussi aisément ? Je reste persuadé que si nous n’infléchissons pas les choses, nous allons vers une moins-value éthique évidente.

M. Xavier Breton. Nos amendements identiques visent à compléter l’alinéa 4 par la phrase suivante : « Les gamètes obtenus à partir de cellules souches pluripotentes induites ne peuvent en aucune façon servir à féconder un autre gamète, issu du même procédé ou recueilli par don, pour concevoir un embryon ».

Il est effectivement possible de créer des gamètes artificiels à partir de cellules IPS. Ces cellules ne sont pas des cellules embryonnaires, mais des cellules adultes somatiques. Cette recherche nouvelle n’est pas interdite mais soumise à déclaration à l’Agence de la biomédecine – et non pas à autorisation.

La méiose naturelle est un phénomène lent et complexe. Une « méiose » induite pourrait introduire des remaniements génétiques anormaux, difficiles à anticiper et impossibles à vérifier si le gamète doit être utilisé en fécondation.

Il est donc essentiel de préciser qu’en aucune façon, les gamètes dérivés de cellules souches pluripotentes induites ne peuvent être fécondés pour concevoir un embryon.

Mme Emmanuelle Ménard. Mon amendement en discussion commune vise à compléter l’alinéa 4 par une phrase qui avait été retenue par le Sénat, selon laquelle les gamètes dérivés de cellules souches pluripotentes induites ne peuvent servir à féconder un autre gamète, issu du même procédé ou obtenu par don.

Si cette précision paraît redondante à la majorité de la commission spéciale, il ne me semble pour ma part pas superfétatoire de rappeler qu’il est interdit de créer des embryons pour la recherche.

M. Philippe Berta, rapporteur. Je ne vois aucune raison scientifique, en tout cas à ce stade, pour différencier les régimes applicables aux deux types de cellules. Par ailleurs, l’interdiction de création d’embryons humains est rigoureuse et définitive. Ce qui vous fait peur, ce sont les éventuels gamètes qui pourraient être produits à partir de ces cellules IPS, mais ils ne pourront certes pas être utilisés pour créer un embryon. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements CS352 et CS356 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. Puisqu’un embryon humain ne peut être utilisé à des fins commerciales ou industrielles en application de l’article L. 2141‑8 du code de la santé publique, il doit en être de même pour ses cellules souches. Il convient de faire figurer cette interdiction noir sur blanc.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements.

Amendements CS519 et CS525 de Mme Annie Genevard.

M. Xavier Breton. Le premier de ces amendements tend à préciser explicitement qu’en aucune façon, les gamètes dérivés de cellules souches pluripotentes induites ne peuvent être fécondés ou fécondables.

M. Patrick Hetzel. Le second vise à rappeler l’interdiction d’un processus intégrant une maturation et une méiose artificielles aboutissant à la création artificielle de gamètes.

M. Philippe Berta, rapporteur. Ces deux amendements ont été déjà discutés sous une autre forme. Je reste sur mes positions : avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle rejette également l’amendement CS357 de Mme Emmanuelle Ménard.

Amendements CS1029 du rapporteur et CS358 de Mme Emmanuelle Ménard (discussion commune).

M. Philippe Berta, rapporteur. Mon amendement propose de rétablir le texte voté par l’Assemblée nationale en deuxième lecture s’agissant des peines encourues en cas de manquement aux règles régissant la recherche sur les cellules souches embryonnaires ou sur les cellules IPS. En effet les peines initialement prévues, de deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende, apparaissent équilibrées et suffisamment dissuasives. La peine de quatre ans d’emprisonnement votée par le Sénat, elle, ne figure pas dans l’échelle des peines délictuelles prévues par l’article 131‑4 du code pénal.

Mme Emmanuelle Ménard. Au contraire du rapporteur, je propose d’augmenter les sanctions. Que les recherches menées en dehors du cadre légal sur des cellules souches embryonnaires soient punies de la même façon que des recherches illégales sur des cellules IPS est tout de même surprenant. En effet, la fabrication de cellules souches embryonnaires humaines nécessite une destruction d’embryon. Ce n’est donc pas le même enjeu.

M. Philippe Berta, rapporteur. Avis défavorable. Mes collègues ne sont pas des délinquants, il n’y a jamais eu de problèmes de ce type dans notre métier. Pour en avoir discuté, les peines proposées sont déjà très lourdes à leurs yeux.

La commission adopte l’amendement CS1029.

En conséquence, l’amendement CS358 tombe.

La commission adopte l’article 15 modifié.

 

Chapitre II
Favoriser une recherche responsable en lien avec la médecine génomique

Article 17 : Utilisation des outils de modification ciblée du génome en recherche fondamentale

Amendements de suppression CS201 de M. Patrick Hetzel, CS333 de M. Xavier Breton, CS816 de Mme Anne-Laure Blin et CS999 de M. Philippe Gosselin.

M. Patrick Hetzel. L’article 17 soulève la question très sensible de la modification du génome d’embryons. Nous proposons de le supprimer.

Dans son étude de 2018 sur la révision de la loi de bioéthique, le Conseil d’État identifie dans ce domaine trois risques importants. Le premier est le risque de susciter une nouvelle zoonose. Alors que nous sommes encore en pleine pandémie, on peut s’interroger sérieusement sur cette question des infections qui se transmettraient des animaux vertébrés à l’homme et éventuellement inversement. Le deuxième est le risque de représentation humaine chez l’animal si ce dernier devait acquérir des aspects visibles ou des attributs propres à l’humain. Le dernier est le risque de conscience humaine chez l’animal, si l’injection de cellules pluripotentes humaines produisait des résultats collatéraux induisant des modifications chez l’animal dans le sens d’une conscience ayant des caractéristiques humaines.

Je ne fais là que citer le Conseil d’État, qui envoie donc des signaux d’alerte forts. Les questions qui en résultent sont les suivantes : Où doit se situer la frontière homme-animal ? Y a-t-il un seuil à partir duquel la nature de l’animal change ? Y a-t-il potentiellement violation de l’ordre de la nature lorsque l’on procède de cette sorte ? Il s’agit de véritables questions bioéthiques, et nous pensons que nous devons nous montrer d’une prudence extrême.

M. Xavier Breton. Nous sommes plusieurs à partager ces interrogations.

M. Philippe Berta, rapporteur. Avant tout, je dois redire que la communauté scientifique de ce pays ne joue pas aux apprentis sorciers. Son objet est de comprendre, pour ensuite soigner. Soyez aussi convaincus que mes collègues chercheurs n’ignorent rien des problèmes éthiques associés à leurs recherches, et qu’ils y portent toute l’attention nécessaire. Et si d’aventure ce n’était pas le cas, nombre d’institutions sont là pour surveiller leur activité – peut-être trop régulièrement d’ailleurs au vu de la paperasserie requise.

Supprimer l'article 17 conduirait à empêcher deux choses que je pense fondamentales.

La première est la possibilité d’adjoindre des cellules humaines à des embryons animaux. Ces recherches présentent un grand intérêt et font l'objet d'un flou juridique souligné tant dans l'étude du Conseil d'État que dans le rapport de la mission d'information sur la révision de la loi relative à la bioéthique. L'article 17, prenant en compte ces conclusions convergentes, vise à sécuriser les recherches portant sur l'embryon animal tout en maintenant l'interdit portant sur les chimères humain-animal.

Pourquoi avons-nous besoin de ces recherches ? L’idée est bien sûr de faire progresser le champ des connaissances et le champ des thérapies. Les recherches sur ce que l'on appelle les chimères animal-homme sont extrêmement prometteuses. Certaines expériences pourraient permettre d'importants progrès, s’agissant par exemple des cellules pancréatiques chez la souris ou encore des cœurs humanisés chez les porcs – et nous connaissons la pénurie de greffons dans notre pays.

Ce qui m’amène à une précision à propos du péril zoonotique dont fait mention M. Hetzel : n’imaginez pas que ce sont des mini-porcs élevés en plein milieu d’un champ breton ! Il s’agit bien d’animaux de laboratoire, de niveau P3, qui vivent dans des conditions complètement aseptiques et ne risquent pas grand-chose sur le plan bactérien ou viral.

La deuxième chose à ne pas empêcher est la possibilité de recourir aux techniques de modification ciblée du génome des embryons humains faisant l'objet d'une recherche. La rédaction de l'article 17 permet justement de sécuriser les recherches effectuées dans un cadre in vitro impliquant une modification du génome. Bien sûr, ces recherches demeurent rigoureusement interdites dans le cadre de procréation médicalement assistée.

Pourquoi avons-nous besoin de ces recherches ? Parce que l'édition du génome, et donc cette fameuse technique de CRISPR dont tout le monde a entendu parler, présente un intérêt scientifique majeur. Sont concernés bien sûr des embryons non implantables dans l'utérus et destinés à être détruits.

Cette évolution permettrait aux chercheurs français de prendre part au développement de nouvelles thérapies dans un contexte de forte concurrence mondiale – 3 millions d’individus sont concernés en France, 30 millions en Europe. Nous devons absolument revitaliser notre recherche dans ce secteur. Il est temps de reprendre notre place dans le concert mondial, puisque la France, qui était troisième puissance dans le secteur il y a encore une dizaine d’années, est aujourd’hui au huitième rang. Les compétences scientifiques amont existent, il faut les aider, les maintenir, les développer, et ensuite beaucoup travailler sur la chaîne de valorisation ultérieure, jusqu’aux essais cliniques.

Avis défavorable sur ces amendements de suppression.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Ces amendements de suppression sont motivés par des risques liés à des pratiques qui sont justement formellement interdites par l’article 17. On peut y lire textuellement l’interdiction de modifier le génome d’un embryon humain, et l’interdiction de création d’embryons chimériques lorsqu’elle résulte de la modification d’un embryon humain par adjonction de cellules provenant d’autres espèces, ou de la modification d’un embryon animal par adjonction de cellules souches embryonnaires humaines ou de cellules souches pluripotentes induites humaines. Je ne vois donc pas de raison de supprimer cet article.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS202 de M. Patrick Hetzel, CS334 de M. Xavier Breton et CS819 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. Monsieur le rapporteur, vous avez tenté de caricaturer mes propos en parlant des porcs dans les champs. Là n’est pas la question. Il est tout à fait normal qu’un chercheur veuille aller plus loin : c’est son métier, c’est son ADN que de repousser les limites et d’acquérir de nouvelles connaissances. Mais nous avons un équilibre à trouver : si le chercheur doit pouvoir chercher, le législateur, lui, doit se poser la question des lignes rouges. C’est d’ailleurs la raison d’être de tous les travaux en matière de bioéthique : trouver le bon emplacement des lignes rouges.

À cet égard, le travail envisagé par les chercheurs autour de l’utilisation d’éléments génétiques provenant à la fois de l’animal et de l’humain pose à l’évidence des questions en chaîne. Celles que j’ai citées sont formulées par le Conseil d’État, qui fait état de risques importants.

Nous devons veiller, et c’est l’objet des présents amendements, à nous montrer très précis, pour éviter les dérives. Il ne s’agit pas d’une logique de défiance vis-à-vis des chercheurs : on comprendra aisément que le législateur, même s’il fait confiance, prévoie des dispositifs de contrôle. La loi sert à cela, et l’Agence de la biomédecine aussi.

M. Xavier Breton. La réponse du rapporteur montre que nous avons des conceptions vraiment différentes de la façon dont la recherche doit être traitée et de ses liens avec la loi.

Il nous dit que la communauté scientifique ne joue pas les apprentis sorciers. Dont acte. Il n’est pas question pour nous d’accuser ou de faire un procès d’intention, mais d’établir une régulation. Il peut s’agit soit d’une autorégulation, qui se fait de manière un peu utilitariste – certains pays occidentaux sont dans cette logique – soit d’une régulation qui se fait par la loi, dans le cadre d’un dialogue entre scientifiques et non-scientifiques – car il est important de ne pas laisser les scientifiques définir seuls le cadre de leurs recherches.

Il faut avancer avec prudence sur ces questions, en permettant que ces recherches aient lieu, mais en réaffirmant aussi certains principes éthiques. On voit bien que la logique de votre texte consiste à assouplir les choses au maximum, à lever les barrières. Nos amendements ne doivent pas être vus comme des freins, mais comme une précaution qui doit être prise si l’on veut rester dans la logique d’exigence éthique qui fait l’honneur de notre pays.

M. Philippe Berta, rapporteur. Je n’enlèverais pas un mot de ce qui vient d’être dit : je suis entièrement d’accord. Mais il se trouve que les structures éthiques de notre pays ne sont pas aux mains des scientifiques. Ils y sont même ultra-minoritaires, et c’est bien qu’il en soit ainsi : on y trouve aussi des religieux, des juristes, des médecins…

Si je défends l’article 17 contre vos amendements, c’est justement pour que les cadres soient bien définis. Ne dites pas que je fais confiance aux seuls scientifiques pour tout décider, ce n’est pas vrai. Je fais aussi confiance aux agences de régulation – à l’Agence de la biomédecine, qui fait remarquablement son travail et qui à mon sens, depuis sa création, n’a jamais failli. Je reste donc sur ma position. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS400 de M. Patrick Hetzel, CS402 de M. Xavier Breton, CS480 de M. Thibault Bazin, CS680 de Mme Emmanuelle Ménard, CS763 de M. Julien Ravier et CS805 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. L’interdiction de créer des embryons pour la recherche doit concerner tous les embryons, quel que soit leur mode d’obtention. Certains travaux conduisent à l’obtention de modèles du type gastruloïde. Or ces modèles scientifiques, qui peuvent être constitués par l’agrégation de cellules pluripotentes humaines avec des cellules précurseurs de tissus extra‑embryonnaires, sont utilisés pour étudier les mécanismes de développement précoce. Préciser, comme le fait l’alinéa 2, que l’embryon doit résulter d’une fusion de gamètes permet de contourner l’interdiction posée par l’article L. 2151‑2 du code de la santé publique et par l’article 18 de la convention d’Oviedo. Il convient donc de supprimer cette disposition.

J’en profite pour répondre à Mme de Vaucouleurs, qui m’assure que l’article 17 présente toutes les garanties souhaitables : il se trouve que M. Berta lui-même va défendre d’ici peu un amendement qui va supprimer la moitié de l’article ! Peut-être eussiez-vous eu raison autrement, mais ce n’est plus le cas.

Mme Emmanuelle Ménard. Il est vrai que cet alinéa 2 pose problème.

L’actuel premier alinéa de l’article L. 2151‑2 du code de la santé publique dispose que « La conception in vitro d’embryon ou la constitution par clonage d’embryon humain à des fins de recherche est interdite. »

La modification que vous voulez introduire va relativiser cette interdiction absolue de créer des embryons pour la recherche : seuls les embryons humains par fusion de gamètes à des fins de recherche resteront interdits. Autrement dit, les embryons humains obtenus différemment pourraient être utilisés. Limiter le champ de l’interdiction démontre en réalité qu’on sait très bien créer des embryons pour la recherche autrement.

Avec cette modification, vous entendez contourner l’interdiction pourtant claire de l’article 18 de la convention d’Oviedo, qui dispose dans son alinéa 2 que « La constitution d’embryons humains aux fins de recherche est interdite. » L’interdit doit rester absolu en la matière.

M. Philippe Berta, rapporteur. La précision que vous voulez supprimer permet de rappeler que, par définition, un embryon humain est le résultat de la fusion de gamètes humains et que l’interdiction posée par l’article L. 2151-2 du code de la santé publique et par l’article 18 de la convention d’Oviedo ne vise nullement ces modèles.

Cette précision ayant été ajoutée à mon initiative en séance en deuxième lecture, je ne suis pas favorable à sa suppression. Il me semble en effet souhaitable qu’il n’y ait aucune confusion possible avec les travaux conduisant à l’obtention de modèles du type gastruloïde, lesquels permettent aux chercheurs d’étudier les mécanismes de développement précoce. Il n’y a pas matière à les confondre avec des embryons : ce ne sont pas des embryons, ce sont des modèles du niveau de la gastrula, une étape très précoce de la vie embryonnaire, qui finissent par s’effondrer sur eux-mêmes.

Ces recherches sur les gastruloïdes existent. Elles ont déjà largement montré leur utilité, et vont continuer. Il me paraît donc nécessaire de bien préciser notre droit afin qu’aucun doute ne subsiste.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS203 de M. Patrick Hetzel, CS335 de M. Xavier Breton, CS808 de Mme Anne-Laure Blin et CS996 de M. Philippe Gosselin.

M. Patrick Hetzel. Les alinéas 3 à 7 de l’article 17 emportent la suppression du second alinéa de l’article L. 2151‑2 du code de la santé publique, selon lequel « La création d’embryons transgéniques ou chimériques est interdite ». La fin de cette interdiction signifie a contrario que les chercheurs pourront créer en laboratoire des embryons transgéniques et chimériques.

Il convient de s’interroger sur les motivations de la suppression de cet interdit fondateur du droit français de la bioéthique. Comme l’a souligné le Conseil d’État, l’interdiction de créer des embryons transgéniques « se heurte désormais à l’évolution des techniques ». On en revient toujours au même débat : tout ce qui est possible techniquement doit-il juridiquement être rendu possible ? Dès lors qu’on assignerait pour seule fonction aux lois de bioéthique de mettre le droit en conformité avec les techniques, on enlèverait tout intérêt à leur existence. Ce serait une vision intégralement scientiste des choses. C’est justement ce que nous devons éviter pour garder un certain recul. Je sais que toute la pensée du chercheur est fondée sur un tel recul face à ses travaux, mais le juriste, et notamment le législateur, doit aussi savoir placer des garde-fous. Et il n’est pas possible que les garde-fous soient constitués uniquement de ce que la technique rend possible.

M. Philippe Berta, rapporteur. Encore une fois, je ne peux être que d’accord : il faut articuler le binôme complexe entre scientifiques et juristes, il faut contrôler l’activité scientifique, il ne faut pas se contenter de dire que puisque cela existe, on laisse faire. C’est pour cela que j’insiste sur l’importance de l’article 17 pour maintenir un cadre bien précis. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS1027 du rapporteur et CS1015 de M. Marc Delatte, et sous-amendements CS1217, CS1218, CS1219 et CS1216 de Mme Emmanuelle Ménard.

M. Philippe Berta, rapporteur. Je me réjouis que la deuxième lecture ait permis à l’Assemblée et au Sénat de se mettre d’accord sur la rédaction du 1° du I de l’article, et sur le II. Toutefois, un désaccord important demeure quant au 2° du I, portant sur l’interdiction des chimères.

Les sénateurs ont souhaité interdire toute création d’embryons chimériques. Cela me semble disproportionné, et en inadéquation avec les réalités de la recherche aujourd’hui. C’est pourquoi je propose de rétablir la rédaction adoptée par la commission spéciale et par l’Assemblée en deuxième lecture.

Cette rédaction pose l’interdiction des chimères homme-animal et permet, pour des activités de recherche encadrées par les articles 14 et 15, de modifier le génome d’un embryon humain non destiné à être transféré et d’expérimenter l’adjonction de cellules humaines à un embryon animal.

Dans les deux cas, il s’agit de recherches extrêmement prometteuses qui nous permettront de mieux comprendre le développement embryonnaire précoce et l’origine de certaines maladies génétiques, et ainsi d’envisager de nouveaux traitements. Dans les deux cas aussi, des questions éthiques se posent. C’est pour cela que nous sommes là – pour poser des limites, pour prévoir un encadrement, pour protéger la société tout en préservant notre recherche. Et c’est ce que propose ce projet de loi, puisque ces recherches seront encadrées par les mécanismes prévus aux articles 14 et 15.

En cohérence avec le dispositif d’ensemble, je vous propose donc de rétablir la rédaction que nous avions votée en deuxième lecture.

Mme Emmanuelle Ménard. Le sous-amendement CS1217 vise à insérer la précision suivante après l’alinéa 2 : « toute intervention ayant pour objet de modifier le génome d’un embryon humain est interdite ». Même si elle s’opère dans le silence d’un laboratoire, il s’agit d’une manipulation extrêmement grave de l’humain, qui peut aboutir à modifier le patrimoine génétique de l’humanité, même sans implantation. La responsabilité des chercheurs est immense : accepter les manipulations génétiques en recherche fondamentale revient à cautionner les mêmes pratiques pour la recherche clinique de demain.

Le sous-amendement CS1218 vise à maintenir l’interdiction de créer des chimères animal-homme et homme-animal. Un embryon animal modifié par l’adjonction de cellules humaines pourrait éventuellement donner naissance à un animal chimère. Cette manipulation brouille la frontière entre l’espèce humaine et l’espèce animale. Elle pose la question de la manipulation du vivant et de l’apparition d’une conscience humaine chez l’animal. Ce dernier risque a été identifié par le Conseil d’État dans son rapport rédigé à l’occasion de cette révision de la loi de bioéthique.

Le sous-amendement CS1219 vise à supprimer le mot « humain » afin de rétablir l’interdiction des chimères animal-homme.

Le sous-amendement CS1216 vise à compléter l’alinéa 3 par la phrase suivante : « L’implantation d’embryons transgéniques ou d’embryons génétiquement modifiés ou de chimères animal-homme ou homme-animal est interdite. »

M. Philippe Berta, rapporteur. Je suis favorable à l’amendement de M. Delatte, identique au mien.

Madame Ménard, votre sous-amendement CS1217 vise à interdire la modification du génome d’un embryon humain. Or l’édition du génome présente un intérêt scientifique majeur, celui de reproduire des pathologies. En outre, cela concerne les embryons non implantables dans l’utérus et destinés à être détruits.

Le sous-amendement CS1218 précise que l’implantation des embryons modifiés est interdite. C’est déjà le cas et votre rédaction ne s’insère pas correctement dans la phrase.

Avec le sous-amendement CS1219, vous voulez interdire les chimères animal-homme, quand l’objectif de mon amendement est de les autoriser compte tenu de leur intérêt pour les recherches scientifiques et médicales.

Le sous-amendement CS1216 précise que l’implantation d’embryons transgéniques ou chimériques est interdite. C’est déjà le cas. En outre, votre amendement est contradictoire avec le reste du projet de loi.

La commission rejette successivement les sous-amendements.

Elle adopte les amendements.

En conséquence, l’amendement CS682 de Mme Emmanuelle Ménard, les amendements identiques CS166 de M. Patrick Hetzel, CS298 de M. Xavier Breton, CS691 de Mme Anne-Laure Blin et CS981 de M. Philippe Gosselin, ainsi que l’amendement CS684 de Mme Emmanuelle Ménard tombent.

Amendements identiques CS112 de M. Thibault Bazin, CS206 de M. Patrick Hetzel, CS338 de M. Xavier Breton, CS812 de Mme Anne-Laure Blin et CS997 de M. Philipe Gosselin.

M. Patrick Hetzel. L’alinéa 1er de l’article L. 2151-2 du code de la santé publique et l’alinéa 2 de l’article 18 de la Convention pour la protection des droits de l’Homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine, dite Convention d’Oviedo, interdisent la création d’embryons pour la recherche. Dans le cadre des États généraux de la bioéthique, la quasi-totalité des citoyens se sont également exprimés contre et leur position est exposée dans le rapport du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE).

Créer des embryons pour la recherche finaliserait la transformation de l’embryon en matériau de laboratoire, stade ultime de la chosification de l’embryon. Comme le souligne le constitutionnaliste Bertrand Mathieu, cela « conduit à passer d’une conception opportuniste – il existe des embryons surnuméraires que l’on utilise au lieu de les détruire – à un niveau supérieur : celui d’une conception utilitariste qui conduit à considérer l’embryon comme une chose ».

Même si aucune instance française ne recommande de lever l’interdit de créer des embryons pour la recherche, une infime partie de la communauté scientifique souhaite contourner cet interdit en créant des modèles embryonnaires, par l’agrégation de cellules souches embryonnaires humaines ou de cellules souches pluripotentes induites avec des cellules précurseurs de tissus extra-embryonnaires. Puisqu’ils ont un développement cellulaire identique à celui des embryons humains, ces modèles doivent être considérés comme des embryons. C’est d’ailleurs la position de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). Il convient d’interdire leur création dès lors qu’une telle manipulation aboutit indirectement à violer l’interdit de créer des embryons pour la recherche.

M. Philippe Berta, rapporteur. Avis défavorable. Les gastruloïdes constituent un type d’organoïdes cultivés à partir de cellules souches pluripotentes humaines, qui récapitulent les premiers stades du développement embryonnaire. Il s’agit en quelque sorte d’artefacts qui n’ont pas les mêmes caractéristiques que celles des embryons, n’ont pas la capacité de devenir un embryon et ne sont donc pas concernés par les mêmes enjeux éthiques.

Ce sont simplement des pseudo-embryons non viables : les structures finissent par s’écrouler sur elles-mêmes, et mourir, au bout de quelques jours. Une analyse génétique de ces gastruloïdes a révélé que les cellules qui les constituent auraient fini par se différencier pour former les muscles du torse et du cœur, entre autres, mais pas de système nerveux ou de cerveau.

Vous pouvez donc être rassurés quant à l’utilisation de ces types de modèles scientifiques, particulièrement utiles à la recherche et dont la création et l’utilisation sont désormais encadrées par la loi.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS111 de M. Thibault Bazin, CS204 de M. Patrick Hetzel, CS336 de M. Xavier Breton et CS809 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. Après l’alinéa 7, l’amendement CS204 vise à préciser que la différenciation de cellules souches embryonnaires humaines ou de cellules souches pluripotentes induites en gamètes est interdite, afin d’éviter les risques de contournements opportunistes de la législation.

M. Philippe Berta, rapporteur. Nous sommes d’accord, monsieur Hetzel, et c’est pourquoi, tant pour les cellules souches embryonnaires à l’article 14 que pour les cellules souches pluripotentes induites à l’article 15, la différenciation en gamètes fait l’objet d’un régime d’encadrement spécial avec une déclaration obligatoire à l’Agence de la biomédecine, l’ABM, et un système de contrôle, notamment par l’avis public du conseil d’orientation de l’Agence. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS205 de M. Patrick Hetzel, CS337 de M. Xavier Breton et CS810 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. Il s’agit d’interdire toute pratique eugénique, en apportant des garanties.

M. Philippe Berta, rapporteur. Encore une fois, nous sommes d’accord. Le principe d’interdiction de création d’un embryon par fusion de gamètes est général, quelle que soit l’origine des gamètes. La précision que vous proposez est donc inutile.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS207 de M. Patrick Hetzel, CS339 de M. Xavier Breton, CS813 de Mme Anne-Laure Blin et CS998 de M. Philippe Gosselin.

M. Patrick Hetzel. L’autorisation de recherches sur les caractères génétiques d’une personne contredit l’interdiction des pratiques eugéniques posée à l’article 16-4 du code civil.

M. Philippe Berta, rapporteur. Votre amendement est satisfait par l’alinéa 2 de l’article 16-4 du code civil qui dispose que « toute pratique eugénique tendant à l’organisation de la sélection des personnes est interdite ». En outre, le dernier alinéa de l’article 16-4 dispose que « sans préjudice des recherches tendant à la prévention et au traitement des maladies génétiques, aucune transformation ne peut être apportée aux caractères génétiques dans le but de modifier la descendance de la personne ».

Enfin, votre amendement me semble dangereux car il nous prive de la possibilité de bénéficier de la thérapie génique. Pour vous convaincre, je peux vous présenter les vertus de cette dernière sur l’amyotrophie spinale par exemple.

La commission rejette les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette les amendements identiques CS208 de M. Patrick Hetzel, CS340 de M. Xavier Breton, CS359 de Mme Emmanuelle Ménard et CS815 de Mme Anne-Laure Blin.

Elle adopte l’article 17 modifié.

(Suspension de la réunion de dix-sept heures trente-cinq à dix-sept heures quarante-cinq.)

TITRE V
POURSUIVRE L’AMÉLIORATION DE LA QUALITÉ ET DE LA SÉCURITÉ DES PRATIQUES DU DOMAINE BIOÉTHIQUE

Chapitre Ier
Renforcer la qualité et la sécurité des pratiques

Article 19 : Rénovation du régime du diagnostic prénatal permettant de reconnaître la médecine fœtale et de renforcer l’information de la femme enceinte et du couple et prévoyant des recommandations de bonnes pratiques

Amendement CS244 de M. Thibault Bazin.

M. Patrick Hetzel. Aucun acte médical ni traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne. Cet amendement prévoit qu’une information doit être donnée tout au long des différentes étapes du dépistage prénatal afin que la femme enceinte y consente en toute connaissance de cause.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Votre demande est satisfaite par les dispositions prévues au II de l’article L. 2131-1 et par l’article L. 1110-4 du code de la santé publique.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques CS14 de Mme Marie-France Lorho, CS360 de Mme Emmanuelle Ménard, CS452 de M. Patrick Hetzel, CS467 de M. Xavier Breton et CS822 de Mme Anne-Laure Blin.

Mme Emmanuelle Ménard. L’enfant à naître concerne ses deux parents. Je ne comprends donc pas pourquoi le projet de loi dispose que la mère choisit, ou non, d’informer l’autre membre du couple à la suite d’un diagnostic prénatal qui établirait que l’embryon ou le fœtus présente une affection susceptible de modifier le déroulement ou le suivi de sa grossesse. Les deux parents sont en droit de connaitre les résultats de ces examens.

M. Patrick Hetzel. Il s’agit d’un sujet d’une extrême sensibilité. Alors que nous avons longuement débattu du projet parental, je trouve assez paradoxal d’en faire fi en l’espèce, en présumant que le sujet ne concerne que la femme qui porte l’enfant, alors qu’il concerne clairement les deux membres du couple, s’il y a couple.

M. Xavier Breton. L’état de santé du fœtus concerne les deux parents. Il est normal qu’ils reçoivent, tous les deux, l’information et qu’elle ne soit pas réservée à mère enceinte.

M. Jean-François Eliaou. À la suite de nos débats de première lecture, la commission a fait ce choix, sur la proposition de M. Bazin et la mienne. Mon avis est donc défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS15 de Mme Marie-France Lorho, CS362 de Mme Emmanuelle Ménard, CS453 de M. Patrick Hetzel, CS468 de M. Xavier Breton et CS824 de Mme Anne-Laure Blin.

Mme Emmanuelle Ménard. J’avoue que je ne comprends pas : vous évoquez à longueur de temps le parent d’intention et, là, il n’a plus son mot à dire, seule la mère qui porte l’enfant étant décisionnaire des éventuelles suites à donner. Pourtant, le deuxième parent, quel qu’il soit, est concerné par cette grossesse et doit être informé.

M. Patrick Hetzel. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec le précédent. À partir du moment où il y a couple, il est incompréhensible de créer une telle asymétrie, d’autant que beaucoup ici revendiquent l’institutionnalisation de ce couple.

M. Xavier Breton. Monsieur le rapporteur, nous avons besoin d’une réponse de fond. Pourquoi octroyer un tel « privilège » à la mère enceinte ?

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Je rappelle qu’il s’agit d’une rédaction issue de la première lecture, à l’initiative de monsieur Bazin et de moi-même, qui visait certaines situations dans lesquelles la mère se retrouve seule à décider. La modification proposée par vos amendements risquerait de paralyser toute décision de l’équipe médicale.

Il ne s’agit pas de remettre en cause la notion de couple ou de projet parental puisque nous précisons que le conjoint est informé si la mère le souhaite, ce qui est très souvent le cas, mais de permettre à la mère d’être prise en charge dans des situations difficiles. Disons-le franchement, bien souvent, à l’annonce de pathologies, l’homme – extrêmement courageux – s’en va, incapable d’assumer et la femme se retrouve seule.

Il s’agit d’une demande des associations et des professionnels de santé. Ils ne veulent pas exclure le père, mais simplement pouvoir prendre en charge la femme quand le conjoint a disparu.

La commission rejette les amendements.

Amendements CS17 de Mme Marie-France Lorho et CS686 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. Monsieur le rapporteur, vous dites que la femme est bien souvent seule à décider. Mais en supprimant l’obligation d’informer le conjoint, vous faites peser la responsabilité de la décision sur ses épaules. Parfois, vous avez raison, cela peut être plus facile pour la femme mais, parfois, c’est aussi difficile…

L’amendement CS686 vise à remplacer « fœtus » par « enfant à naître » afin d’ajouter un peu d’humanité à ce texte.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Certes, cela fait peser une responsabilité sur la femme mais, d’une part, ces situations sont rares, d’autre part, il faut éviter de paralyser le système – il s’agit d’expériences vécues. Je suis défavorable à ces deux amendements car il est important d’informer les parents des possibilités de soin sur le fœtus. C’est l’objet de la médecine fœtale, par définition.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS1055 du rapporteur.

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette l’amendement CS245 de M. Thibault Bazin.

Amendement CS361 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. La suspicion d’un handicap est douloureuse et anxiogène pour des parents. Il convient de les entourer non pas seulement en leur proposant une liste, parfois impersonnelle, d’associations spécialisées et agréées dans l’accompagnement des patients et de leur famille, mais aussi les guides d’accompagnement préparés par ces associations.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Avis défavorable pour des raisons déjà évoquées en deuxième lecture. En outre, la finalité de cet article n’est pas d’aboutir à la naissance d’enfants atteints de pathologies, la médecine fœtale s’attachant à les traiter avant leur éventuelle apparition à la naissance.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques CS209 de M. Patrick Hetzel, CS246 de M. Thibault Bazin, CS341 de M. Xavier Breton, CS542 de Mme Annie Genevard, CS825 de Mme Anne-Laure Blin et CS1000 de M. Philippe Gosselin.

M. Patrick Hetzel. Pour les parents, l’annonce que la fin de la grossesse peut se terminer par la naissance d’un enfant en situation de handicap entraîne certaines questions ainsi qu’une grande détresse. Bien souvent, ils ne savent pas comment réagir. Pour qu’ils puissent envisager le handicap autrement que comme une « anomalie » pour l’enfant et un « poids » pour la famille, il faut des moyens et des personnes qui leur permettront d’obtenir des réponses à leurs questions pour les aider à former un choix éclairé. C’est pourquoi nous souhaitons compléter l’alinéa 7 par un nouvel alinéa.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Je partage votre volonté d’une société inclusive. Il faut que les parents, dans la peine, puissent recevoir des informations sur les caractéristiques de la maladie suspectée, sa prise en charge, son évolution, etc. Toutefois, ce n’est pas le rôle des médecins mais des associations. C’est pourquoi je suis défavorable à vos amendements.

La commission rejette les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette l’amendement CS18 de Mme Marie-France Lorho.

Amendements identiques CS19 de Mme Marie-France Lorho, CS403 de Mme Emmanuelle Ménard, CS454 de M. Patrick Hetzel, CS469 de M. Xavier Breton et CS829 de Mme Anne-Laure Blin.

Mme Emmanuelle Ménard. Il est indispensable que les deux parents, et non la seule mère, soient informés des découvertes génétiques incidentes dans le cadre du diagnostic prénatal.

M. Xavier Breton. Monsieur le rapporteur, vous plaidez pour que les associations informent les parents, mais l’information ne serait-elle pas plus systématique si elle était réalisée par le médecin ? Quelles sont les associations concernées ? Enfin, comment diffuseront-elles cette information ?

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Monsieur Breton, l’article dispose qu’une liste des associations spécialisées agréées dans l’accompagnement des patients atteints de l’affection suspectée est proposée aux parents. Certes, il ne s’agit que d’une proposition, mais on ne peut obliger ces derniers à être pris en charge contre leur volonté.

S’agissant des amendements, la situation est simple puisqu’on est dans le cadre du diagnostic prénatal, processus médical comportant des prélèvements, des examens d’imagerie et génétiques. À l’occasion de ces examens, il arrive que l’on découvre une autre pathologie, ce qu’on appelle découverte incidente. Bien sûr, le couple, ou la femme seule, a le droit de s’opposer à ces investigations. Mais, si ce n’est pas le cas et qu’on fait des découvertes incidentes à cette occasion, on doit pouvoir l’annoncer à la femme.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS211 de M. Patrick Hetzel, CS247 de M. Thibault Bazin, CS343 de M. Xavier Breton, CS827 de Mme Anne-Laure Blin et CS1001 de M. Philippe Gosselin.

M. Patrick Hetzel. Après l’annonce des résultats du diagnostic prénatal, il est nécessaire de laisser un temps de réflexion à la femme enceinte. C’est pourquoi je propose de compléter l’alinéa 10 pour prévoir un délai d’une semaine avant qu’elle ne décide d’interrompre ou de poursuivre sa grossesse. Cela me semble plus protecteur et de nature à permettre un meilleur accompagnement, même si je sais que certains ont développé des arguments contraires.

M. Xavier Breton. Je partage les interrogations de notre collègue Patrick Hetzel, et ce quel que soit le choix fait ensuite de poursuivre ou d’interrompre la grossesse : l’annonce produit souvent un effet de sidération ou de déni, et certaines décisions peuvent être prises sous le coup de l’émotion. Des risques de pression de la part de l’entourage existent également, y compris au cours de la semaine de réflexion. Le temps permet néanmoins de s’organiser et de trouver, s’il y a vraiment des pressions fortes, une écoute attentive afin d’opérer ensuite un choix de la manière la plus réfléchie possible.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Je souhaite que nous ayons ce débat à l’article 20. Pourquoi ? Parce qu’il ne faut pas mélanger la médecine fœtale, qui a un but réparateur, et la finalité, qui semble inéluctable dans vos – ou dans nos – esprits et qui ne doit pas l’être, à savoir l’interruption médicale de grossesse (IMG). Tout ne finit par celle-ci. Il est très important que l’article 19 concerne les aspects préventif et curatif, et pas l’avortement : c’est symbolique, peut-être philosophique, mais surtout très important pour l’économie générale du texte. Je souhaite donc le retrait des amendements. À défaut, mon avis serait défavorable.

M. Patrick Hetzel. Cet argument peut être entendu, ce qui justifie le retrait des amendements.

Les amendements sont retirés.

Amendements identiques CS210 de M. Patrick Hetzel, CS342 de M. Xavier Breton et CS831 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. Selon l’alinéa 3 de l’article L. 1111‑4 du code de la santé publique, « Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne. » L’amendement prévoit donc qu’une information soit donnée tout au long du processus, de telle sorte que la femme enceinte puisse y consentir en toute connaissance de cause : il vise à préserver et à garantir en quelque sorte son information, faute de quoi on court le risque que son consentement ne soit pas libre et éclairé.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Votre proposition est doublement satisfaite aux articles L. 2131-1, qui prévoit de façon expresse qu’« une information loyale, claire et adaptée » doit être fournie, et L. 1110-4. Il ne semble donc pas utile de le rappeler ici : avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CS1056 du rapporteur.

Amendements identiques CS20 de Mme Marie-France Lorho, CS363 de Mme Emmanuelle Ménard, CS455 de M. Patrick Hetzel, CS470 de M. Xavier Breton et CS832 de Mme Anne-Laure Blin.

Mme Emmanuelle Ménard. L’amendement vise à supprimer les alinéas 13 et 14 : les modalités d’information de l’autre membre du couple n’ont aucune raison d’être fixées par décret en Conseil d’État.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette les amendements.

Amendement CS368 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. Il tend à supprimer les alinéas 15 à 20, qui confient au ministre chargé de la santé la détermination par arrêté des recommandations supplémentaires en matière de bonnes pratiques relatives au diagnostic préimplantatoires ainsi que les critères médicaux justifiant la communication à la femme enceinte des caractéristiques génétiques fœtales, celles relatives aux modalités de prescription, de réalisation et de communication des résultats des examens de biologie médicale et celles relatives aux modalités de réalisation des examens d’imagerie concourant au diagnostic prénatal. Les parlementaires seraient ainsi dépossédés d’une question très importante puisque, si le diagnostic prénatal peut être l’occasion de soutenir des parents attendant un enfant atteint d’un handicap, il peut aussi permettre une politique eugénique. Pour l’éviter, il faut évidemment que le Parlement puisse s’exprimer.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Avis défavorable car cette disposition est bien d’ordre réglementaire. Nous cadrons dans la loi les grandes orientations, et il revient ensuite au Conseil d’État de prendre de telles décisions. Enfin, le contrôle parlementaire est assuré par la révision périodique des lois de bioéthique.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CS1043 du rapporteur.

Amendements identiques CS411 de M. Patrick Hetzel, CS416 de M. Xavier Breton, CS515 de M. Thibault Bazin, CS572 de Mme Annie Genevard, CS687 de Mme Emmanuelle Ménard et CS834 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. L’article L. 2131‑1 du code de la santé publique concernant exclusivement le diagnostic prénatal, il vous est proposé de supprimer ici la référence au diagnostic préimplantatoire, qui ne présente aucune nécessité et avait été supprimée en première lecture à l’Assemblée nationale, de mémoire à l’initiative du rapporteur. Cela rendrait le texte plus lisible.

M. Xavier Breton. Effectivement, cela serait plus lisible : l’article 19 bis A traitant du diagnostic préimplantatoire, le faire figurer ici entraînerait plus de confusion qu’autre chose.

Mme Emmanuelle Ménard. Effectivement, le diagnostic préimplantatoire n’a absolument rien à faire dans un chapitre qui traite du diagnostic prénatal.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Je suis d’accord, mais je me suis renseigné : en fait, un centre de diagnostic préimplantatoire est toujours adossé à un centre de diagnostic prénatal et les deux sont liés. Il existe donc une vraie cohérence, les recommandations d’un centre pratiquant les deux activités devant également être prises dans leur ensemble. J’émets donc un avis de sagesse car, même si cette mention ne semble pas cohérente, elle traduit sans doute le souci de précision juridique de nos collègues sénateurs.

La commission adopte les amendements.

Amendements identiques CS212 de M. Patrick Hetzel, CS248 de M. Thibault Bazin, CS344 de M. Xavier Breton, CS546 de Mme Annie Genevard, CS835 de Mme Anne-Laure Blin et CS1002 de M. Philippe Gosselin.

M. Patrick Hetzel. Il s’agit d’insérer l’alinéa suivant après l’alinéa 19 : « Toute nouvelle technique d’examen de biologie médicale en vue d’établir un diagnostic prénatal fait l’objet d’une autorisation législative. » En effet, la responsabilité de la mise en place des techniques de diagnostic en population générale ne peut être laissée à la seule appréciation des autorités administratives.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Les amendements soulèvent une difficulté : on l’a vu avec la pandémie de coronavirus, on ne peut pas réunir le Parlement à chaque fois que sont mis en circulation des tests génétiques ou biologiques. Je fais confiance à la grande rigueur de nos autorités sanitaires. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l’article 19 modifié.

Article 19 quater : Réalisation en première intention d’un examen des caractéristiques génétiques chez le nouveau-né dans le cadre du dépistage néonatal pour la recherche d’anomalies génétiques

Amendements de suppression CS213 de M. Patrick Hetzel, CS249 de M. Thibault Bazin, CS345 de M. Xavier Breton, CS371 de Mme Emmanuelle Ménard, CS573 de Mme Annie Genevard et CS837 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. L’article ouvre la possibilité de tests génétiques en première intention dans le cadre du dépistage néonatal. Ces tests ne peuvent être prescrits que lorsqu’ils ont une utilité clinique et le seul fait qu’ils soient disponibles et réalisables ne justifie ni leur prescription ni leur réalisation. Il est fondamental de maintenir la souplesse du dispositif actuel, qui peut évoluer en fonction des avancées scientifiques et des possibilités thérapeutiques.

M. Xavier Breton. Beaucoup de questions se posent, notamment à propos de l’utilisation des données issues de ces tests, des conditions de leur utilisation, de leur stockage et de leur diffusion. Nous avons besoin d’un système beaucoup plus encadré que celui qui est prévu : c’est pourquoi nous proposons la suppression de l’article.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Je suis défavorable aux amendements. Le dépistage néonatal existe déjà et nous avons tous, députés, sénateurs et Gouvernement, beaucoup travaillé à une rédaction qui me semble équilibrée et à laquelle il ne faut pas toucher.

Les alinéas 2 et 3 opèrent un assouplissement, au premier chef parce que le dispositif ne prend pas en compte la technique biologique, qui peut être enzymatique pour la mucoviscidose, et qui pourra être demain génétique, donc moins onéreuse, ce qui irait dans le sens d’une facilitation du dépistage. Certaines pathologies sont et seront systématiquement dépistées dans ce cadre, en particulier la drépanocytose, grâce à des techniques génétiques.

L’article encadre également la possibilité de dépister des maladies à venir, comme l’amyotrophie spinale, sur laquelle une expérimentation est menée.

La commission rejette les amendements.

Amendement CS417 de M. Cyrille Isaac-Sibille.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Il s’agit de prévoir la révision périodique de la liste des maladies donnant lieu à un dépistage néonatal.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Avis défavorable, toujours afin de conserver la rédaction très équilibrée de l’article. La Haute Autorité de santé (HAS) expérimente actuellement dans l’ouest de la France le dépistage néonatal de l’amyotrophie spinale qui sera vraisemblablement inscrite sur la liste des pathologies que l’on pourra ainsi détecter si les parents le demandent ou en raison d’un risque populationnel.

La commission rejette l’amendement.

Amendement rédactionnel CS1044 du rapporteur.

M. Jean-Louis Touraine. Même s’il est rédactionnel, cet amendement mérite réflexion. Dans un très respectable souci littéraire, notre rapporteur fait à raison la chasse aux adverbes superfétatoires, toutefois la suppression de « systématiquement » est significative.

Cet adverbe visait à indiquer que tous les examens néonataux – ils ne sont pas très nombreux, la France étant un des pays développés qui en fait le moins – portant sur toutes les maladies dont la liste était établie devaient être pratiqués sur tous les nouveau-nés. Il n’est donc pas redondant mais destiné à signifier que ne pas les pratiquer est une erreur.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Mon cher collègue, il est proposé de supprimer « systématiquement » car il est un peu redondant d’écrire que « Le dépistage néonatal est systématiquement proposé aux titulaires de l’autorité parentale de tous les nouveau-nés […] ». Je suis néanmoins d’accord : d’un point de vue médical, parler d’examen « systématique » n’a pas la même signification que dans le langage courant.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’amendement de précision CS1046 du rapporteur.

Amendement rédactionnel CS1045 du rapporteur, faisant l’objet du sous-amendement CS1658 de M. Jean-Louis Touraine.

M. Jean-Louis Touraine. L’expression « fixées par » paraît préférable à « énumérées dans », puisque les autorités « fixent » la liste des maladies concernées.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la commission adopte le sous-amendement.

Puis elle adopte l’amendement sous-amendé.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS1047 du rapporteur.

Elle adopte l’article 19 quater modifié.

Article 20 : Suppression de l’obligation de proposer un délai de réflexion prévue dans le cadre de l’interruption médicale de grossesse et encadrement de la réduction embryonnaire

Amendements de suppression CS21 de Mme Marie-France Lorho, CS214 de M. Patrick Hetzel, CS346 de M. Xavier Breton, CS377 de Mme Emmanuelle Ménard, CS842 de Mme Anne-Laure Blin et CS1004 de M. Philippe Gosselin.

M. Xavier Breton. Il est essentiel de maintenir la proposition d’un délai de réflexion d’une semaine avant la pratique d’une IMG et de supprimer la possibilité d’une réduction embryonnaire dans la mesure où l’IVG est autorisée.

Mme Emmanuelle Ménard. L’avortement restant un choix difficile pour la plupart des femmes, je ne pense pas utile d’en créer un nouveau type appelé « interruption volontaire partielle d’une grossesse multiple ». Par ailleurs, il est essentiel de maintenir le délai de réflexion d’une semaine avant la pratique de l’IMG : nous allons en débattre, le rapporteur l’a indiqué.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Je suis défavorable aux amendements car la suppression de l’article, qui porte sur le délai de réflexion et sur l’interruption volontaire partielle d’une grossesse multiple, que l’on appelait avant réduction embryonnaire, ne me paraît pas du tout opportune. Grâce à une rédaction intelligible, cet article encadre, de façon extrêmement précise et avec des délais clairs, tous les cas dans lesquels intervient une interruption volontaire de grossesse médicale en raison d’un risque soit pour la mère, soit pour l’enfant, ou pour une réduction.

La commission rejette les amendements.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS1051 du rapporteur.

Amendement CS372 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. L’interruption volontaire de grossesse serait autorisée s’« il existe une forte probabilité que l’enfant à naître soit atteint d’une affection d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic […] ».

Cette formulation, introduite depuis maintenant vingt ans, me semble un peu maladroite et ouvre malheureusement la porte à des abus, puisque tout enfant à naître atteint d’une telle affection, par exemple de trisomie 21, pourrait être supprimé. Or nous avons tous en tête les fortes mobilisations de parents qui considèrent ce genre de disposition comme une insulte à la vie de leurs enfants et à eux-mêmes en tant que parents : la différence ne doit pas être considérée comme un danger.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Je suis défavorable à l’amendement. Vous souhaitez supprimer toute possibilité de réaliser une interruption médicale de grossesse en cas de pathologie fœtale et obliger les femmes concernées à aller au bout de leur grossesse et à accoucher d’un enfant qui ne sera pas forcément viable, car il n’y a pas que la trisomie 21. En outre, il est très important que ces femmes soient libres d’aller ou non jusqu’à ce terme. Il faut donc en rester à cette rédaction à laquelle nous avons tous participé.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques CS456 de M. Patrick Hetzel, CS471 de M. Xavier Breton et CS838 de Mme Anne-Laure Blin, et amendement CS373 de Mme Emmanuelle Ménard (discussion commune).

M. Patrick Hetzel. Emmanuel Sapin, professeur du centre hospitalier universitaire de Dijon, spécialiste de chirurgie fœtale, indiquait dans une tribune : « Pour prendre conscience de la réalité de la réalité de la vie humaine des tout-petits nés à l’âge de développement concerné par l’amendement, j’invite les députés à venir dans un service de réanimation néonatale. » Il cherchait à sensibiliser au fait que les médecins réanimateurs néonataux et les infirmières puéricultrices consacrent leur vie et leur attention à ces petits bébés qui peuvent être nés dans des conditions très difficiles.

La rédaction actuelle – « il existe une forte probabilité que l’enfant à naître soit » – est un peu troublante car le mot probabilité est ambigu. C’est pourquoi je propose qu’on lui substitue « [s’il] est avéré que l’enfant à naître est ». Il est en effet nécessaire que l’équipe soit assurée de l’existence d’une affection reconnue comme incurable au moment du diagnostic, sans quoi cette rédaction peut vouloir dire que le diagnostic n’est pas certain.

M. Xavier Breton. Effectivement, la « forte probabilité » laisse une marge d’appréciation alors qu’écrire « est avéré » éviterait certaines décisions, puisque des examens peuvent indiquer une forte probabilité et être par la suite démentis. Il faut que les bases de notre législation soient beaucoup plus solides.

Mme Emmanuelle Ménard. Employer les mots : « un risque avéré » serait plus judicieux pour préserver la vie d’embryons qui pourraient avoir été dépistés trop rapidement comme atteints d’une affection d’une particulière gravité.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Mon avis est défavorable car l’adjectif « avéré » impose une obligation de résultat, qui peut donner lieu à des contentieux, alors que l’un des principes de la médecine est l’obligation de moyens : tout mettre en œuvre pour aboutir au diagnostic, avec une forte probabilité. Nous sommes très forts, nous médecins, mais nous ne pouvons pas donner à chaque fois un diagnostic à 100 %, et tout acte médical, d’imagerie ou de diagnostic comporte une marge d’incertitude.

Encore une fois, c’est un colloque singulier entre la patiente, le couple et le médecin, sur la base de documents remis, de propositions d’actes, d’évaluation de la marge d’erreur et de la probabilité d’une pathologie sur la base de pourcentages. C’est ce que l’on fait depuis de nombreuses années en France et c’est beaucoup mieux adapté que la formulation que vous proposez.

La commission rejette les amendements.

Amendement CS730 de M. Bastien Lachaud.

Mme Danièle Obono. Il s’agit de rétablir la version initiale qui permet d'inclure la notion de détresse psychosociale, ce qui nous semble plus clair, et d'éviter des situations dramatiques.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Je suis favorable à la rédaction du Sénat, qui a supprimé cette mention. Selon le dernier rapport annuel des centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal, en 2018, les détresses psychologiques sans anomalie fœtale ont représenté 24,2 % des attestations de particulière gravité délivrées pour une IMG pour motif maternel, et les troubles psychiatriques 7 %.

Dans 30 % des cas donc, une telle détresse est déjà couverte, c’est-à-dire que l’on propose une IMG aux femmes qui présentent des troubles psychologiques ou psychiatriques. En outre, l’IMG d’indication maternelle implique une prise en compte des causes psychologiques et psychosociales.

S’il est vrai qu’il y a des disparités sur le territoire, cet amendement n’y changerait rien car c’est surtout un travail de formation qui doit être accompli afin de pas laisser sans solution des femmes en détresse psychologiques, que ce soit ou non pour des raisons sociales.

Enfin, pourquoi ne mentionner que ce seul motif d’IMG ? Comment définir exactement cette détresse psychosociale ? À l’opposé de l’objectif poursuivi, l’amendement réduirait les possibilités de proposer une IMG aux femmes présentant des problèmes psychologiques ou psychiatriques.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS1052 du rapporteur.

Amendement CS374 de Mme Emmanuelle Ménard, amendements identiques CS215 de M. Patrick Hetzel, CS347 de M. Xavier Breton, CS503 de Mme Agnès Thill, CS764 de M. Julien Ravier, CS839 de Mme Anne-Laure Blin et CS1003 de M. Philippe Gosselin, et amendement CS250 de M. Thibault Bazin (discussion commune).

Mme Emmanuelle Ménard. Le choix de la mère attendant un enfant potentiellement atteint d’un handicap doit évidemment être libre et sans contrainte : c’est pourquoi je propose de rétablir, hors urgence médicale, un délai d’au moins sept jours de réflexion avant qu’elle prenne la décision d’interrompre ou non sa grossesse, comme le prévoit l’actuel article L. 2213‑1 du code de la santé publique.

M. Xavier Breton. Les amendements CS347, CS839 et CS1003 ont pour objet de maintenir un délai de réflexion d’une semaine avant la pratique d’une IMG, afin d’éviter que des pressions et l’émotion prennent le dessus.

M. Pascal Brindeau. L’amendement CS503 poursuit le même objectif : permettre une décision libre et éclairée, accompagnée d’ailleurs par les équipes pluridisciplinaires. Cela suppose que toutes les informations nécessaires ont été fournies à la femme placée devant ce choix et qu’elle dispose du délai de réflexion nécessaire.

M. Xavier Breton. L’amendement CS250 vise à maintenir la proposition systématique d’un délai de réflexion d’une semaine.

Dans son avis du 18 juillet 2019 sur le projet de loi, le Conseil d’État « regrette la suppression de ces dispositions qui se bornaient à imposer au médecin de proposer à la femme enceinte un délai de réflexion que cette dernière n’était pas tenue d’observer. Il aurait préféré que la disposition législative maintienne l’obligation de proposer un délai de réflexion sans nécessairement fixer la durée minimale de celui-ci. »

Notre proposition est donc largement partagée.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Lorsqu’une IMG est envisagée, la prise en charge resserrée de la femme, et le cas échéant de son conjoint, conduit à organiser un colloque singulier qui n’est jamais une démarche la pressant de faire part de sa décision. Dans tous les cas de figure, il est toujours possible de demander un délai de réflexion ; et c’est la décision du patient qui s’impose, même en cas d’urgence vitale. Il s’agit d’une prise en charge, pas d’une prison.

Je vais retourner l’argument développé précédemment par M. Breton, sans esprit de provocation. D’une certaine manière, n’est-il pas infantilisant d’imposer un délai de réflexion, en sous-entendant que l’intéressée n’aurait pas consacré le temps nécessaire à une telle décision ?

Le délai de huit jours l’éloigne de la prise en charge médicale et permet l’exercice de pressions, pas forcément positives. Familiales, professionnelles ou sociétales, elles peuvent par exemple lui enjoindre de garder un enfant, alors qu’elle ne le veut pas. Je suis donc réticent à la laisser seule face à tout cela.

Enfin, dans la réalité les résultats d’analyses s’accumulent progressivement et ils ne sont de toute manière jamais donnés en bloc à la patiente, au risque de la déstabiliser. Le dialogue avec le médecin est par définition un processus évolutif, et il est donc difficile de déterminer le point de départ d’un délai.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements identiques CS375 de Mme Emmanuelle Ménard, CS 457 de M. Patrick Hetzel, CS472 de M. Xavier Breton et CS841 de Mme Anne-Laure Blin.

Mme Emmanuelle Ménard. Il est proposé de supprimer l’alinéa 5, qui crée en quelque sorte un nouveau type d’avortement : l’interruption volontaire partielle d’une grossesse multiple.

Ce dispositif porte le risque de dérives. Il est à craindre que le cadre légal ne soit pas respecté et qu’il y ait des avortements de confort – sans connotation péjorative – car une grossesse multiple peut effrayer.

D’un point de vue juridique, pourquoi faudrait-il créer un nouveau type d’avortement, alors que les conditions qui l’autorisent figurent déjà dans le code de la santé publique ?

Quid du ressenti des enfants issus des embryons survivants ? Quid du préjudice moral des parents ayant demandé cet avortement ? Ces questions demeurent sans réponse.

M. Xavier Breton. En réponse aux amendements précédents, le rapporteur a évoqué les pressions qui s’exercent sur la femme enceinte en choisissant – c’est révélateur – un exemple où on la pousse à garder l’enfant. L’on sait que des pressions peuvent aussi être exercées en sens inverse, pour inciter à avorter une femme qui désire garder son enfant. Tous les cas possibles doivent être mentionnés.

L’argument du caractère infantilisant d’un délai n’est pas recevable. Sans que la situation soit comparable, le droit fiscal et celui de consommation comprennent de nombreux délais, et l’on n’estime pas pour autant que le contribuable ou le consommateur sont de ce fait infantilisés.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Cet article ne crée pas un nouveau type d’avortement. Au contraire, il procède à l’encadrement d’une pratique médicale existante, appelée précédemment « réduction embryonnaire » et désormais « interruption volontaire partielle d’une grossesse multiple ».

La clarification et la sécurisation juridiques apportées par l’article 20 sont absolument fondamentales.

L’objectif médical de telles interventions n’est pas d’interrompre une grossesse gémellaire, Madame Ménard, mais bien de traiter des grossesses multiples présentant des risques, pour la mère, mais aussi pour la croissance fœtale. Bien entendu, on ne choisit pas le ou les embryons qui font l’objet de l’IMG. Avis défavorable.

Monsieur Breton, les pressions peuvent en effet s’exercer dans un sens comme dans l’autre. Et plutôt que d’évoquer une infantilisation, gardons à l’esprit que le dialogue entre le médecin et sa patiente est un processus progressif qui dure plusieurs jours.

La commission rejette les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement CS376 de Mme Emmanuelle Ménard.

La commission adopte l’article 20 modifié.

Article 22 : Autorisation de la greffe de tissu germinal pour le rétablissement d’une fonction hormonale et clarification du devenir des gamètes et tissus germinaux conservés

Amendements identiques CS33 de Mme Marie-France Lorho, CS216 de M. Patrick Hetzel, CS251 de M. Thibault Bazin, CS 348 de M. Xavier Breton, CS405 de Mme Emmanuelle Ménard et CS844 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Xavier Breton. Il n’est pas concevable que les gamètes antérieurement conservés puissent être utilisés après le changement de sexe d’une personne. Le permettre conduirait à des situations complètement ubuesques. Je fais allusion aux débats d’hier, où beaucoup d’entre nous étaient perdus entre les différentes combinaisons possibles.

Selon l’état civil, une personne est d’un sexe ou d’un autre. Il faut conserver des critères objectifs pour pouvoir continuer à parler un langage commun.

Mme Emmanuelle Ménard. Il paraît de bon sens qu’une personne qui décide de changer de sexe abandonne ses gamètes liés à son ancienne identité. Faute de quoi on entendra parler des pères qui accouchent et des spermatozoïdes de la mère, ce qui est un peu compliqué à concevoir.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Lors des deux premières lectures, le Gouvernement et moi-même avons expliqué que le changement de sexe n’empêchait pas de conserver ses gamètes. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement CS378 de Mme Emmanuelle Ménard.

Amendements identiques CS1053 du rapporteur, CS364 de M. Patrick Hetzel, CS365 de M. Xavier Breton, CS846 de Mme Anne-Laure Blin et CS1016 de M. Marc Delatte.

M. Patrick Hetzel. L’absence de réponse écrite qui vaut confirmation, ce n’est plus du consentement. Il convient de revenir à la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale lors des deux premières lectures.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Avis favorable, bien entendu.

La commission adopte les amendements.

Amendement CS379 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. Je propose qu’il soit mis fin à la conservation de ses gamètes ou de ses tissus germinaux en cas d’absence de réponse de la personne majeure durant cinq années consécutives, au lieu de dix.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

Amendements identiques CS1057 du rapporteur et CS1050 de M. Marc Delatte.

M. Marc Delatte. Cet amendement propose notamment de ramener le délai en cas d’absence de réponse à dix ans, au lieu de vingt, pour les personnes mineures au moment du prélèvement opéré dans le cadre d’une préservation de la fertilité.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Avis favorable.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte les amendements.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS1048 du rapporteur.

Amendement CS733 de M. Bastien Lachaud.

Mme Danièle Obono. Il vise à s’assurer que les personnes ayant modifié la mention de leur sexe à l’état civil ne seront pas empêchées par des comportements discriminatoires de réutiliser leurs gamètes.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. L’amendement est satisfait par l’alinéa 7 de cet article. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 22 modifié.

 

Chapitre II
Optimiser l’organisation des soins

Article 23 : Élargissement des missions des conseillers en génétique

Amendement CS381 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. Une prescription médicale est préférable pour des examens de caractéristiques génétiques. Les découvertes obtenues sans avoir été prescrites pourraient être psychologiquement difficiles à supporter. Les examens de caractéristiques génétiques ne doivent pas être banalisés.

Ces examens sans prescription médicale posent aussi la question de leur coût pour la sécurité sociale.

Vous allez sans doute objecter qu’ils sont tellement généralisés sans prescription médicale qu’il sera difficile de revenir en arrière.

M. Jean-François Eliaou, rapporteur. Les conseilleurs en génétique n’interviennent pas sans prescription médicale ; ils sont placés sous l’autorité d’un médecin généticien, dont les prescriptions sont remboursées.

Après avoir auditionné les représentants des généticiens et ceux des conseillers en génétique, je pense que la rédaction proposée par le Sénat est équilibrée et couvre l’ensemble des situations. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS1049 du rapporteur.

Elle adopte l’article 23 modifié.

 

TITRE VI
ASSURER UNE GOUVERNANCE BIOÉTHIQUE ADAPTÉE AU RYTHME DES AVANCÉES RAPIDES DES SCIENCES ET DES TECHNIQUES

Article 29 : Élargissement des missions du Comité consultatif national d’éthique des sciences de la vie et de la santé

Amendement CS389 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. Pour que le CCNE soit vraiment une institution indépendante, il faut que son président ne soit pas choisi par le Président de la République mais élu démocratiquement par le Parlement, ou par une commission de celui-ci.

Mme Laëtitia Romeiro Dias, rapporteure. Le rôle du Parlement est de voter la loi, de contrôler l’action du Gouvernement et d’évaluer les politiques publiques, mais pas d’élire les présidents d’autorités administratives indépendantes. D’ailleurs, personne ne remet en question l’indépendance de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) ou de l’Autorité des marchés financiers (AMF) au motif que leur président est nommé par le Président de la République. Ce n’est pas le mode de désignation de son président qui détermine le caractère indépendant de l’organe ; en l’occurrence, le CCNE tient son indépendance de l’article L. 1412-1 du code de la santé publique. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques CS872 de la rapporteure et CS736 de M. Bastien Lachaud.

Mme Laëtitia Romeiro Dias, rapporteure. L’amendement a pour objet de rétablir la version adoptée par l’Assemblée nationale en deuxième lecture s’agissant de la composition du CCNE.

Afin de remettre le patient au cœur du système de santé, il apparaît pleinement justifié que les représentants d’associations puissent siéger au sein du CCNE en leur qualité et non en tant que personnalités qualifiées choisies sur proposition des ministres. C’est pourquoi il est proposé d’inclure six représentants d’associations de personnes malades et d’usagers du système de santé, d’associations de personnes handicapées, d’associations familiales et d’associations œuvrant dans le domaine de la protection des droits des personnes. Le nombre de membres du comité serait ainsi porté de trente-neuf à quarante-cinq, sans compter son président.

Mme Danièle Obono. Les débats récents au sujet de la démocratie sanitaire, et de la démocratie tout court, montrent que les associations représentant les personnes malades, les usagers du système de santé et les personnes handicapées, ainsi que les associations familiales et celles œuvrant dans le domaine de la protection des droits des personnes ont toute leur place au sein du CCNE.

La commission adopte les amendements.

Amendements identiques CS218 de M. Patrick Hetzel, CS350 de M. Xavier Breton et CS849 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Patrick Hetzel. Afin de s’assurer de la pluralité des organismes représentés, il paraît légitime de préciser de nouveau dans le code de la santé publique la liste des quinze ministres chargés de nommer les personnalités qualifiées membres du CCNE.

Si je vous rejoins pleinement sur les rôles respectifs du Parlement et du pouvoir exécutif, je pense que nous sommes dans notre rôle en précisant quels sont les ministres qui procèdent aux désignations. L’inscription de cette liste dans la loi a contribué à l’indépendance et à la pluralité du comité, et elle est une forme de garde-fou.

Mme Laëtitia Romeiro Dias, rapporteure. Avis défavorable. Il convient de préserver une certaine souplesse. En outre, le nouveau dispositif fixant par décret la liste des ministres concernés permet de s’assurer du respect du principe de parité dans les nominations.

La commission rejette les amendements.

Amendements identiques CS743 de M. Philippe Berta, CS219 de M. Patrick Hetzel, CS351 de M. Xavier Breton et CS850 de Mme Anne-Laure Blin.

Mme Michèle de Vaucouleurs. La liste des organismes des secteurs de la recherche et de la santé représentés au sein du CCNE relevait jusqu’à présent du domaine de la loi.

L’amendement vise à conserver la possibilité pour le Parlement de se prononcer sur la composition de la liste des organismes représentés, afin d’assurer la représentation de la recherche française dans sa pluralité.

M. Patrick Hetzel. L’amendement prolonge celui que j’ai précédemment défendu.

Il s’agit cette fois d’inscrire dans la loi la liste des organismes représentés au CCNE – l’Académie des sciences, l’Académie nationale de médecine, le Collège de France et l’institut Pasteur –, ainsi que celle des organismes auxquels sont rattachés les chercheurs qui y sont nommés.

J’entends bien l’argument légitime de la parité, mais elle peut être atteinte tout en s’assurant du respect de l’objectif de diversité. Le nombre total de membres concernés le permet ; il suffit en pratique de recommander aux organismes concernés de désigner soit un homme, soit une femme, tout cela relevant d’un travail interministériel parfaitement réalisable.

Mme Laëtitia Romeiro Dias, rapporteure. Il faut préserver la souplesse nécessaire pour l’élaboration de cette liste, d’autant que la représentation d’un nouvel organisme pourrait être ultérieurement nécessaire. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Elle adopte l’article 29 modifié.

Article 30 : Évolution des compétences et de la composition des organes de l’Agence de la biomédecine

Amendement CS744 de M. Philippe Berta.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Cet amendement vise à placer l’ABM sous la double tutelle du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de la recherche. En effet, le champ de compétences de cet établissement public est directement lié aux prérogatives du ministre de la recherche. Il apparaît donc pertinent que celui-ci soit associé aux activités de contrôle réglementaire de l’agence.

La gestion interministérielle est un gage d’efficacité. Comme l’a démontré la crise du covid-19, chaque jour compte lorsqu’il s’agit de mettre en place des procédures.

Mme Laëtitia Romeiro Dias, rapporteure. L’ABM intervient principalement dans le domaine du prélèvement et de la greffe d’organes et de tissus, ainsi que dans celui de l’AMP. Pour cela, elle est en contact permanent avec les établissements de santé ; il est donc plus logique que sa tutelle soit assurée par le ministre de la santé. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques CS444 de M. Patrick Hetzel, CS459 de M. Xavier Breton, CS600 de Mme Anne-Laure Blin et CS955 de M. Philippe Gosselin.

M. Patrick Hetzel. L’évaluation réalisée par l’ABM doit prendre en compte les résultats des études et recherches médicales et scientifiques menées à l’étranger sur les risques spécifiques induits par l’utilisation des techniques d’AMP.

Mme Laëtitia Romeiro Dias, rapporteure. L’article L. 1418-1 du code de la santé publique dispose que l’ABM prévoit la publication régulière des résultats de chaque centre d’AMP, selon une méthodologie prenant en compte notamment les caractéristiques de la patientèle, en particulier l’âge des femmes.

Les travaux de l’ABM s’appuient bien entendu sur l’ensemble des données de recherches disponibles, mais la précision méthodologique que vous souhaitez ajouter n’est pas nécessaire pour ce rapport. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette les amendements identiques CS445 de M. Patrick Hetzel, CS460 de M. Xavier Breton, CS601 de Mme Anne-Laure Blin et CS956 de M. Philippe Gosselin, puis les amendements identiques CS446 de M. Patrick Hetzel et CS461 de M. Xavier Breton, ainsi que les amendements identiques CS602 de Mme Anne-Laure Blin et CS957 de M. Philippe Gosselin.

Amendement CS252 de M. Thibault Bazin.

M. Patrick Hetzel. L’entrée d’associations non agréées au sein des instances de gouvernance de l’ABM ne doit pas se faire au détriment de la représentation des usagers par les associations agréées. Afin de renforcer la démocratie sanitaire au sein de l’agence, il est proposé de préciser de manière explicite que les représentants des associations agréés d’usagers participent à l’ensemble de ses travaux.

Mme Laëtitia Romeiro Dias, rapporteure. Le projet de loi élargit en effet le spectre des associations représentées au sein des instances et travaux de l’ABM. L’objectif poursuivi est bien, en plus des associations agrées déjà présentes, d’assurer la représentation d’associations non agréés de malades, de promotion du don, de donneurs et d’associations œuvrant dans les champs de compétence de l’agence, afin d’enrichir la réflexion.

En revanche, imposer la participation des associations agréées à l’ensemble des travaux de l’ABM n’est ni justifié ni opérationnel, et cela présente le risque de la paralyser. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS1054 de la rapporteure.

Mme Laëtitia Romeiro Dias, rapporteure. Cet amendement a pour objet de rétablir la mission de l’ABM en matière d’information dans le domaine des neurosciences. Le Parlement a besoin de ces précieuses informations, car nous pourrions être amenés à légiférer sur ces questions dans les prochaines années.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS871 de la rapporteure

Mme Laëtitia Romeiro Dias, rapporteure. Il tend à supprimer la disposition réintroduite par le Sénat selon laquelle le rapport annuel de l’Agence de la biomédecine comporte une analyse des décisions d’opposition à certains protocoles de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines et les cellules souches pluripotentes induites. Il rétablit ainsi le texte issu de la deuxième lecture à l’Assemblée nationale.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CS254 de M. Thibault Bazin

M. Patrick Hetzel. Il s’agit d’étendre le champ des missions de l’Agence de la biomédecine en y incluant l’intelligence artificielle, puisque celle-ci contribue de plus en plus à la biomédecine.

Mme Laëtitia Romeiro Dias, rapporteure. Il est exact que nous avons besoin d’informations et d’expertises concernant l’intelligence artificielle. Mais l’ABM n’est pas le bon organisme pour les fournir, car elle ne dispose pas des compétences le lui permettant. La mesure étendrait excessivement son champ d’intervention, sans être fructueuse.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS253 de M. Thibault Bazin

M. Patrick Hetzel. Toujours afin de renforcer la démocratie sanitaire au sein de l’Agence, il est proposé de préciser explicitement que les représentants des associations agréées d’usagers participent à ses travaux.

Mme Laëtitia Romeiro Dias, rapporteure. Même avis défavorable qu’à l’amendement CS252, qui visait le même objectif.

La commission rejette l’amendement.

La commission adopte l’article 30 modifié.

TITRE VII
DISPOSITIONS FINALES

Article 31 : Habilitations à légiférer par voie d’ordonnance

Amendements identiques CS458 de M. Patrick Hetzel, CS473 de M. Xavier Breton, CS851 de Mme Anne-Laure Blin et CS1005 de M. Philippe Gosselin.

M. Patrick Hetzel. Le Gouvernement ne saurait ajouter par voie d’ordonnance des dispositions aux livres II à IV de la cinquième partie du code de la santé publique, car le Parlement est compétent pour procéder à ces modifications législatives. Il ne s’agit pas de refuser toute ordonnance, mais le Parlement ne doit pas se dessaisir de ses compétences s’agissant de questions comme celle-là. Tel est le sens de ces amendements.

Mme Laëtitia Romeiro Dias, rapporteure. Le sujet des ordonnances étant sensible au Parlement, je prendrai le temps d’expliciter mon avis défavorable.

Vous souhaitez supprimer l’article 31, qui vise à permettre au Gouvernement, grâce à quatre habilitations distinctes, de prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi afin d’adapter pour Saint-Pierre-et-Miquelon, Mayotte, Wallis-et-Futuna, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française les dispositions de la présente loi ainsi que celles des ordonnances destinées à mettre en conformité le code de la santé publique avec plusieurs règlements européens ; de modifier le code de la santé publique en vue de l’entrée en application des règlements européens relatifs aux dispositifs médicaux et aux dispositifs médicaux de diagnostic in vitro ; de rendre la législation en matière de médicaments cohérente avec le règlement européen sur les médicaments de thérapie innovante ; enfin, d’assurer la cohérence des textes issus de la présente loi. Chacune de ses ordonnances a son importance.

Pour vous rassurer, je vous rappelle que le législateur doit ensuite adopter une loi de ratification de l’ordonnance ; il n’est donc pas du tout dessaisi du sujet.

La commission rejette les amendements.

Amendement CS870 de la rapporteure

Mme Laëtitia Romeiro Dias, rapporteure. Il a pour objet de rétablir l’alinéa 8 dans sa version initiale, déjà confortée à deux reprises par notre assemblée. La disposition que nous voulons réintroduire est nécessaire, mais très technique ; elle est prévue par le droit européen. Je répète que la ratification de l’ordonnance dépend d’une loi, ce qui garantit que le législateur n’est pas dessaisi de la question.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 31 modifié.

Elle adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

La séance est levée à dix-neuf heures vingt.

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Membres présents ou excusés

Commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Réunion du jeudi 3 juin 2021 à 9 h 00

Présents. - Mme Aurore Bergé, M. Philippe Berta, M. Xavier Breton, M. Pascal Brindeau, Mme Anne-France Brunet, M. Francis Chouat, M. Marc Delatte, Mme Coralie Dubost, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Jean-François Eliaou, Mme Agnès Firmin Le Bodo, Mme Annie Genevard, M. Raphaël Gérard, M. Patrick Hetzel, Mme Anne-Christine Lang, Mme Monique Limon, M. Jacques Marilossian, M. Jean François Mbaye, Mme Emmanuelle Ménard, Mme Danièle Obono, Mme Natalia Pouzyreff, Mme Florence Provendier, Mme Laëtitia Romeiro Dias, M. Jean-Louis Touraine, Mme Laurence Vanceunebrock, Mme Michèle de Vaucouleurs