Compte rendu

Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi portant lutte
contre le dérèglement climatique
et renforcement de la résilience
face à ses effets

– Suite de l’examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (n° 3875 rect.) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, M. Damien Adam, M. Erwan Balanant, Mme Aurore Bergé, M. Lionel Causse, Mme Célia de Lavergne, Mme Cendra Motin, M. Mickaël Nogal et M. Jean-Marc Zulesi, rapporteurs)              2


Mardi
9 mars 2021

Séance de 21 heures

Compte rendu n° 17

session ordinaire de 2020-2021

Présidence de
Mme Laurence Maillart‑Méhaignerie,
Présidente

 


  1 

La commission spéciale poursuit l’examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (n° 3875 rect.) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, M. Damien Adam, M. Erwan Balanant, Mme Aurore Bergé, M. Lionel Causse, Mme Célia de Lavergne, Mme Cendra Motin, M. Mickaël Nogal et M. Jean-Marc Zulesi, rapporteurs).

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Mes chers collègues, nous poursuivons l’examen des articles du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

Article 1er (suite) (article 15 de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire) : Affichage informant le consommateur sur les caractéristiques environnementales, ou environnementales et sociales, de biens ou de services

Amendement CS4148 de M. Pacôme Rupin.

M. Guillaume Gouffier-Cha. Compte tenu de l’empreinte carbone des produits alimentaires et de ceux du secteur du textile et de l’habillement et de la place qu’ils occupent dans le budget des ménages, nous proposons qu’indépendamment des résultats de l’expérimentation, l’affichage environnemental soit rendu obligatoire pour l’ensemble de ces produits.

Mme Aurore Bergé, rapporteure pour le titre Ier. C’est l’expérimentation qui doit permettre de décider si l’affichage mérite d’être rendu obligatoire ou non. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique. Avis défavorable, pour les raisons exposées précédemment.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS5013 de M. Jean-Marie Sermier.

M. Jean-Marie Sermier. Parce qu’il importe que les entreprises françaises ne soient pas soumises à des exigences plus fortes que les autres entreprises européennes, nous proposons de préciser que le décret fixant la liste des catégories de biens et services pour lesquelles l’affichage sera rendu obligatoire doit être conforme au droit européen. Nous sommes tous favorables à un affichage environnemental, pourvu qu’il repose sur des fondements juridiques et scientifiques robustes et qu’il soit compatible avec les politiques européennes.

Mme Aurore Bergé, rapporteur. L’affichage environnemental devra bien entendu être harmonisé au plan européen pour produire tous ses effets, mais cela n’empêche pas la France d’expérimenter ce dispositif dès maintenant. Avis défavorable.

M. André Chassaigne. Les acteurs économiques risquent d’être contraints de changer de méthode à brève échéance si l’affichage environnemental auquel l’Union européenne est à deux doigts d’aboutir est différent de l’affichage français. À moins que l’on ne fasse semblant de mettre en œuvre cette mesure en sachant pertinemment que le résultat de l’expérimentation interviendra après la décision qui sera prise au niveau européen…

Au demeurant, l’étude d’impact souligne bien que l’adoption d’un tel dispositif suppose une évolution du droit européen. En effet, actuellement, toute expérimentation en la matière est soumise à autorisation car elle peut être en contradiction avec le droit européen de la concurrence. Très peu d’expérimentations sont validées ; celles qui le sont portent essentiellement sur l’affichage de l’origine de produits alimentaires, elles le sont pour une durée limitée et doivent être régulièrement reconduites.

M. Thibault Bazin. Cette mesure risque de créer une inégalité entre nos producteurs et les producteurs de pays étrangers. La question de sa robustesse juridique, soulevée par notre collègue Sermier, est donc très sérieuse.

M. Jean-Marie Sermier. L’expérimentation porte-t-elle sur l’affichage lui-même ou sur la méthodologie employée ? Nous n’avons pas compris. Autant on peut aboutir à un consensus sur l’affichage, autant la méthodologie peut faire l’objet de discussions complexes. Nous souhaiterions donc savoir quels seront les critères retenus car, on le sent bien, les produits agricoles français pourraient être mis en difficulté. Ne revient-il pas à des centres de recherche tels que l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE) d’élaborer des propositions en la matière ? À ce stade, nous ne connaissons ni les tenants ni les aboutissants de l’expérimentation.

M. Loïc Prud’homme. La question soulevée par M. Sermier est celle du dumping environnemental en cours au sein de l’Union européenne, qui inquiète les défenseurs de l’environnement et tous ceux qui veillent à ce que notre industrie et notre agriculture ne subissent pas les effets de distorsions dans le domaine environnemental ou social.

Par ailleurs, je m’étonne de la réponse de Mme la rapporteure, car on m’a opposé des arguments parfaitement contraires à ceux qu’elle vient de présenter lorsque j’ai défendu, notamment lors de l’examen du projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire (ÉGALIM), l’affichage du Nutri-score : toute expérimentation, me disait-on, est impossible.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Rien ne nous empêche de mener une expérimentation afin de vérifier quels sont les critères pertinents et de permettre une certaine souplesse. Si cette expérimentation n’est pas concluante, l’affichage environnemental ne sera pas rendu obligatoire.

Monsieur Prud’homme, j’ai répondu à tous les députés qui ont déposé des amendements sur le sujet que nous pouvions, dès maintenant, lancer une telle expérimentation et travailler à l’élaboration d’une méthodologie : ce n’est pas contradictoire avec l’objectif de parvenir, à terme, à un affichage européen.

Mme Barbara Pompili, ministre. Monsieur Chassaigne, si l’Union européenne est à deux doigts d’adopter un affichage environnemental, ce sont tout de même deux très gros doigts…

Il existe principalement trois initiatives européennes en la matière.

La première vise à instaurer un dispositif communautaire d’encadrement des allégations environnementales sur les produits afin de renforcer la fiabilité et la qualité de l’information environnementale fournie aux consommateurs et de lutter contre l’éco‑blanchiment, c’est-à-dire le greenwashing. Il est proposé que le dispositif utilise les méthodes PEF (Product Environmental Footprint). Dans le cadre de la consultation publique organisée par la Commission européenne, la France s’est prononcée en faveur de cette initiative tout en demandant un renforcement du caractère opérationnel des méthodes PEF, une amélioration de leur gouvernance ainsi que la mise en œuvre progressive d’un affichage environnemental obligatoire – dans le langage de l’Union européenne, ces mots ont un certain poids. Après la clôture de la consultation publique, l’initiative de la Commission est au stade de l’étude d’impact et pourrait être publiée d’ici à l’été, avant de donner éventuellement lieu à une réflexion sur l’affichage environnemental.

La deuxième initiative, intitulée « Produits durables », a pour objectif de faire en sorte qu’à terme, tous les produits placés sur le marché européen répondent à des principes ou à des critères de soutenabilité : durabilité, réparabilité, recyclabilité, teneur en matériaux recyclés, réduction de l’empreinte environnementale carbone, etc. Elle consisterait en une extension de la directive « Éco-conception ». En novembre 2020, la France a accueilli favorablement l’initiative de la Commission, dont la publication est prévue pour la fin de l’année 2021, en soulignant l’importance de l’éco-conception des produits.

La troisième initiative, intitulée « Agenda du consommateur », a été lancée le 16 novembre 2020. Le nouvel agenda du consommateur a pour objet de donner aux consommateurs européens les moyens de jouer un rôle actif dans la transition écologique et numérique. En 2021, la Commission présentera ainsi une proposition visant à mieux informer les consommateurs sur la durabilité des produits, à lutter contre des pratiques telles que l’éco‑blanchiment et l’obsolescence prématurée, à favoriser la réparation des produits et à encourager les produits circulaires et plus durables. Cela passera sans doute par la révision d’une ou de plusieurs des directives suivantes : la directive 2005/29 relative à la lutte contre les pratiques commerciales déloyales, la directive 2019/771 sur la vente de biens et la directive 2011/83 relative aux droits des consommateurs. À la différence du projet de loi, cette initiative, dont la publication est attendue pour la fin de l’année, porte davantage sur les caractéristiques environnementales des produits – durabilité, réparabilité, recyclabilité – que sur leur impact.

Nous avons tout intérêt à avancer de notre côté et à affiner la méthodologie pour parvenir le plus tôt possible à un affichage environnemental. Dans la mesure où nous participons aux initiatives européennes, celui-ci pourra servir de modèle aux travaux de l’Union européenne.

Monsieur Bazin, je veux apaiser vos inquiétudes : contrairement à ce que vous redoutez, si les produits venant de France présentent un affichage environnemental, ils seront mieux notés que ceux venant de l’étranger. Ils bénéficieront d’une discrimination positive !

Enfin, je précise que l’expérimentation sera pilotée par un conseil scientifique, présidé par un directeur scientifique de l’INRAE.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS527 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. L’article 1er prévoit que la liste des catégories de biens et services pour lesquels l’affichage environnemental sera rendu obligatoire sera déterminée au terme de l’expérimentation, dont la durée maximale est fixée à cinq ans – contre dix-huit mois dans la proposition C1.1 de la Convention citoyenne. Nous proposons quant à nous de ne pas attendre la fin de l’expérimentation pour rendre cet affichage obligatoire.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Quelle serait la pertinence d’une expérimentation dont on n’attendrait pas les résultats ? Votre amendement remet en cause le principe même de l’expérimentation. Avis défavorable.

Mme Delphine Batho. Je vous le confirme, madame la rapporteure : je remets bien en cause la technique qui consiste à multiplier, depuis douze ans, les expérimentations dans ce domaine, dans la perspective d’informer, un jour, les consommateurs de l’empreinte de ce qu’ils consomment sur la biodiversité !

M. Jean-Marie Sermier. Le véritable problème tient au fait que nous sommes en train de donner carte blanche, non pas au Gouvernement, mais à un certain nombre d’administrations pour élaborer l’affichage environnemental, puisque nous n’en connaissons ni les tenants ni les aboutissants. Cet affichage tiendra compte de la nature des produits, de leur transport, de leur mode de fabrication et d’importation, mais on est dans l’incapacité de vérifier que tout cela est faisable dans les pays tiers et de s’assurer de leur honnêteté ! Cette mesure me paraît particulièrement fragile.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS1432 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. Si je vous ai bien compris, madame la ministre, l’initiative de l’Union européenne devrait déboucher sur des propositions dans le courant de l’année 2021.

La loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire conditionne le caractère obligatoire de l’affichage à « l’entrée en vigueur d’une disposition adoptée par l’Union européenne poursuivant le même objectif ». Cette condition essentielle n’apparaît pas dans la rédaction que vous nous proposez. De ce fait, on risque d’introduire une inégalité entre les producteurs français et étrangers sur le marché unique européen. Cet amendement tend donc à renforcer la robustesse de votre dispositif en réintroduisant la condition prévue par la loi du 10 février 2020 : il y va de l’avenir de nos producteurs.

Vous avez voulu me rassurer en affirmant que l’affichage environnemental serait favorable aux produits français. Mais cela dépend des critères qui seront retenus ! Pouvez‑vous nous donner des garanties à ce sujet ?

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Encore une fois, les programmes en cours au niveau européen, dans lesquels la France est engagée, ne nous empêchent pas de les devancer dans le cadre d’une expérimentation. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. La suppression de la condition mentionnée dans la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (AGEC) marque une avancée dans la mesure où elle nous permet précisément de devancer l’Union européenne. Avis défavorable.

M. Thibault Bazin. Je souhaite répondre, madame la présidente.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Vous aurez le loisir d’y revenir : le sujet n’est pas clos, loin de là.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS1582 de M. Stéphane Travert.

M. Stéphane Travert. Pour que l’expérimentation soit pleinement efficace, nous proposons qu’un bilan économique et environnemental et une étude de faisabilité soient réalisés. Ainsi les acteurs économiques pourront-ils bien mesurer le travail qu’il leur reste à accomplir pour que cet affichage soit réussi.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Votre amendement est satisfait par la rédaction de l’article 1er : l’expérimentation n’impose pas mais ouvre la voie à un affichage environnemental par catégorie de biens et de services. Celui-ci ne sera donc pas systématiquement déployé. Demande de retrait.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS534 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Il paraît utile de préciser que la liste des catégories de biens et de services pour lesquelles l’affichage environnemental est obligatoire est fondée sur l’impact de ces biens et services sur les émissions de gaz à effet de serre afin que l’affichage contribue au respect des budgets carbone et de la stratégie bas-carbone.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’amendement est satisfait : l’impact sur les émissions de gaz à effet de serre sera l’un des principaux critères qui seront retenus pour l’affichage environnemental. Demande de retrait, sinon défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. L’affichage environnemental a vocation à être multicritères. Si on le réduisait à un indicateur carbone, il s’agirait d’un score carbone, lequel sera mis en valeur distinctement. Avis défavorable.

Mme Delphine Batho. Dans son avis, le Haut Conseil pour le climat souligne que de très nombreuses mesures ne font aucunement référence à leur efficacité réelle au regard des engagements de la France en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre et qu’aucune précision n’est apportée sur les critères en vertu desquels certains produits ou services seront assujettis à l’affichage et d’autres non. Il me paraît nécessaire que soient inscrits dans la loi des critères dont la prise en compte est susceptible de marquer une rupture avec le consumérisme de produits notoirement nocifs.

M. Martial Saddier. La mission d’information a souligné l’importance d’une harmonisation européenne, et Bruno Le Maire a confirmé ce point.

Lorsque la France a mentionné, dans le Grenelle 1, l’affichage environnemental, l’Europe a lancé une expérimentation de trois ans. Or, à l’époque, s’opposait déjà une vision anglo-saxonne, fondée sur la norme ISO 14025, qui comporte une vingtaine de critères, et une vision française, fondée sur la norme ISO 14067, centrée sur l’empreinte carbone. Si nous nous accordons sur la nécessité d’une harmonisation européenne, il nous paraît nécessaire que le Gouvernement nous éclaire sur les points de convergence qui pourraient aboutir à cette vision européenne commune.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS5014 de M. Jean-Marie Sermier.

M. Jean-Marie Sermier. Les méthodes en vigueur dans cette commission spéciale sont tout de même particulières : M. Saddier vient de poser une question précise qui aurait mérité une réponse avant que nous votions et il n’en a pas eu ; M. Thibault Bazin a souhaité reprendre la parole et vous ne la lui avez pas donnée ; qui plus est, nous avons commencé nos travaux avec trente minutes de retard et ce n’est pas de notre fait. Nous en venons donc à nous demander si vous ne voulez pas bâillonner les oppositions ! Ce texte est important et nous voulons travailler en toute clarté pour que chacun comprenne bien ce dont il est question.

Amendement après amendement, nous essayons de vous sensibiliser à un problème que vous ne résolvez pas. Tout le monde est favorable à l’affichage environnemental, mais selon quelles méthodes ? Nous considérons qu’il n’est pas possible de passer outre le droit européen. Si vous souhaitez peser sur lui, faites des propositions au sein du Conseil européen et de la Commission européenne ! Je ne doute pas, madame la ministre, que vous serez le phare de l’Europe, mais ne le soyez pas au détriment de nos produits agricoles, industriels, et de nos entreprises !

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Votre amendement dispose que l’affichage est rendu obligatoire « s’il présente un bilan d’évaluation positif », ce qui est précisément la raison d’être des expérimentations. Je vous prie de bien vouloir le retirer, à défaut, avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Le bon sens, en effet, suffit parfois !

Malgré toute la bonne volonté du Gouvernement et de votre serviteur, nous n’obtiendrons pas de réponses exhaustives aux questions que vous posez sur l’avancement des trois dispositifs européens que j’ai évoqués. La France y est très investie, d’autant plus qu’elle exercera la présidence de l’Union européenne à partir de l’année prochaine et qu’elle compte bien évidemment, elle aussi, être un phare de l’Europe !

Non seulement nous devons trouver un accord avec nos collègues des États membres sur les critères mais également sur le principe d’un affichage environnemental obligatoire ou non. Les discussions seront vraisemblablement encore longues. Pendant ce temps, nous proposons de l’instaurer dans notre pays afin que les consommateurs puissent choisir et, de surcroît, favoriser de facto les produits locaux, dont le bilan carbone sera nécessairement moins important.

Avis défavorable à votre amendement, qui n’évoque d’ailleurs pas la question européenne.

M. Martial Saddier. Je souhaite, madame la ministre, que nous puissions avoir un état des lieux des divergences entre les différents États membres.

M. André Chassaigne. Nous ne sommes pas certains que les décisions qui seront prises iront dans notre sens tant la transposition des directives européennes suppose un long et difficile travail en amont, notamment pour tenir compte des législations et des réglementations nationales.

L’alinéa 2 précise bien que l’affichage vise notamment à faire « ressortir (…) l’impact en termes d’émissions de gaz à effet de serre ». Or, selon l'étude d’impact, « imposer dans l’immédiat une nouvelle méthode d’information des consommateurs qui ne concernerait que l’impact carbone serait porteur d’un double risque : que les acteurs économiques soient contraints de changer de méthode à brève échéance et que ce nouvel affichage crée de la confusion pour les consommateurs, d’autant plus que la méthode développée au niveau européen repose sur une analyse environnementale multicritères, similaire sur ce point aux méthodes françaises portées par l’ADEME », l’Agence de la transition écologique.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Nous allons être obligés d’imposer des temps de parole très stricts…

M. Jean-Marie Sermier. Précisément, la discussion de chaque amendement nécessite du temps. Comme il nous a été accordé et que la ministre a pu nous donner les explications qui s’imposaient, je retire le mien. J’entends M. Chassaigne : il est en effet nécessaire de préciser les choses mais, en l’occurrence, je vous fais confiance, comme le groupe LR, qui témoigne ainsi de sa bonne volonté pour faire avancer la cause écologique !

L’amendement est retiré.

Amendement CS1534 de M. Dominique Potier.

M. Dominique Potier. La chaîne franco-allemande diffuse en ce moment même un reportage sur les dessous de la mode. Aujourd’hui, à Leicester, au Royaume-Uni, en Europe, pas à Dhaka au Bangladesh ou ailleurs en Asie, des gens travaillent dans des conditions proches de l’esclavage pour l’équivalent de moins de trois euros de l’heure.

Un dispositif d’affichage environnemental et social doit donc être rendu obligatoire, pour le secteur du textile, comme en disposait la loi AGEC : il représente en effet 10 % des émissions de gaz à effet de serre de la planète, 23 % de l’utilisation des pesticides et constitue le principal vivier pour faire travailler les enfants – je ne reviens pas sur l’effondrement de l’usine du Rana Plaza au Bangladesh. Il faut aller vite, si nous ne voulons pas d’un amendement « Saint Glinglin ».

Vos tergiversations sur le rythme de déploiement de l’affichage et sur l’inclusion ou non de l’affichage social reviennent à dire, in fine, que c’est Bercy et non le Parlement qui décidera. Si nous voulons être crédibles, nous devons affirmer que la deuxième industrie du monde la plus polluante et qui attente le plus gravement aux droits humains se verra imposer un affichage social et environnemental rapidement, en six, dix-huit ou vingt-quatre mois.

Je rappelle qu’à Biarritz, si le Président de la République a évoqué les pesticides et les gaz à effet de serre, il n’a pas dit un mot sur les droits humains. Les grands opérateurs se sont modestement investis, sans engagements quantitatifs et contraignants. Il est de notre devoir de passer à la vitesse supérieure.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Nous avons déjà débattu de cette question plus globalement.

Les critères sociaux pourront être précisés lorsque cela sera utile et cela pourra être le cas dans le secteur du textile. De plus, une accélération du déploiement de cet affichage est possible, les représentants de la filière nous ayant fait savoir qu’ils y sont prêts. Nous considérons quant à nous que nous pouvons faire confiance à nos entreprises. Nous avons besoin d’alliés et nous allons au-devant de sérieux problèmes si nous considérons toutes les entreprises comme des ennemies de l’environnement. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Sans doute un affichage social s’impose-t-il dans ce secteur mais votre amendement propose une obligation d’affichage dès le 1er janvier 2022 alors que la plateforme nationale d'actions globales pour la responsabilité sociétale des entreprises doit me rendre ses conclusions en décembre.

J’ajoute que rien, dans le texte, n’empêche d’accélérer le déploiement de l’affichage dans le secteur du textile et d’y inclure le volet social.

Avis défavorable.

M. Dominique Potier. Cinq ans pour parvenir à un affichage social et cinq ans pour que la loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et entreprises donneuses d’ordre débouche sur une directive européenne ! Vous n’êtes décidément pas dans le rythme de l’Histoire !

Si vous voulez sous-amender notre amendement en portant cette obligation à 2023, nous le voterons à l’unanimité. Toutes les normes existent. Les mentionner n’est qu’une question de volonté. Ce serait à l’honneur de la France.

Mme Delphine Batho. Je soutiens cet amendement.

Mon amendement CS963 concerne d’ailleurs aussi le secteur du textile, dont je rappelle qu’il représente 6,7 % de l’empreinte carbone de notre pays. La loi AGEC dispose que l’affichage environnemental « est rendu obligatoire, prioritairement pour le secteur du textile » mais, conformément au greenwashing habituel, avec l’astuce suivante : (…) après l'entrée en vigueur d'une disposition adoptée par l'Union européenne poursuivant le même objectif ».

En l’occurrence, l’adoption de cet article 1er reviendrait à faire disparaître des écrans radars la priorité votée par le législateur.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS1700 de Mme Chantal Jourdan.

Mme Chantal Jourdan. Il convient de rendre disponible, dès le 1er janvier 2022, un affichage par voie numérique de l’empreinte carbone de certains produits et services pour lesquels cette information est déjà disponible afin de favoriser la généralisation de l’affichage environnemental et social. L’ADEME disposant d’une information calculée sur l’ensemble de leur cycle de vie, il convient de la rendre obligatoire.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Dès lors que les émissions de gaz à effet de serre figurent dans les critères de l’affichage environnemental, votre amendement est en grande partie satisfait.

De plus, l’obligation de l’affichage lors de l’acte d’achat conforte son déploiement.

Enfin, une communication avant la fin de l’expérimentation sera possible mais encore faudra-t-il en attendre les résultats pour que ce déploiement soit obligatoire.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS3808 de la rapporteure.

Amendements identiques CS2549 de M. Charles de Courson et CS4681 de Mme Sylvie Bouchet-Bellecourt.

M. Charles de Courson. Cet article 1er réécrit l’article 15 de la loi AGEC du 10 février 2020 disposant que le caractère obligatoire d’un affichage est conditionné à « l’entrée en vigueur d’une disposition adoptée par l’Union européenne poursuivant le même objectif », disposition qui a ici disparu.

Or, il est essentiel de prendre en compte les travaux que mène l’Union européenne à propos de l’information du consommateur avec le projet d’empreinte environnementale des produits ou PEF.

La phase pilote, qui s’est déroulée entre 2013 et 2016, visait à élaborer des méthodes spécifiques de calcul aux produits et aux secteurs et à tester des outils de communication sur les performances environnementales du cycle de vie pour les partenaires commerciaux, les consommateurs et les autres parties prenantes de l’entreprise. Plus d’une vingtaine de produits a été concernée : piles, peintures, cuir, chaussures, t-shirt etc.

La phase de transition engagée en 2019 a concerné des produits supplémentaires –  vêtements, fleurs coupées, emballages flexibles… –  et devrait prendre fin en 2022 puis déboucher sur des propositions politiques de la part de l’Union européenne en 2023.

Ainsi, dans un souci de cohérence juridique au sein du marché unique européen et d’égalité entre les producteurs français et leurs concurrents étrangers, il convient de réintroduire la condition prévue par la loi AGEC.

Enfin, madame la ministre, êtes-vous sûre que cet alinéa 5 n’est pas anticonstitutionnel et ne relève pas de l’incompétence négative, comme l’a rappelé le Conseil d’État ?

Mme Sylvie Bouchet-Bellecourt. Il convient de compléter cet alinéa par les mots : « et à l’entrée en vigueur d’une disposition adoptée par l’Union européenne poursuivant le même objectif ».

Cet amendement vise en effet à rétablir une cohérence juridique au sein du marché unique européen et une égalité entre les producteurs français et leurs concurrents étrangers en réintroduisant la condition prévue par la loi du 10 février 2020 : le caractère obligatoire d’un affichage ne peut être effectif avant l’entrée en vigueur d’une disposition européenne ayant le même objectif.

Comme Valérie Beauvais l’a rappelé, nous sommes en train de revenir sur une disposition votée voilà moins d’un an ; or, il importe de tenir compte de nos travaux et de ceux de l’Union européenne.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Il n’est pas question de mettre en concurrence les droits national et communautaire mais de permettre des expérimentations en amont du droit communautaire, sur lequel la France est largement engagée.

Il n’est pas non plus question de rendre les affichages obligatoires sans que ces expérimentations aient été probantes. Leurs évaluations seront rendues publiques, transmises au Parlement, et permettront nous l’espérons d’instaurer un affichage environnemental.

Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. J’ajoute, monsieur de Courson, que le Conseil d’État n’a fait état d’aucune remarque concernant la rédaction de cet alinéa. J’espère que vous êtes rassuré et que vous retirerez donc votre amendement.

Avis défavorable.

M. Charles de Courson. Vous ne répondez pas à ma question concernant l’anti‑constitutionnalité de cette disposition. Ce n’est pas le Conseil d’État qui définit la jurisprudence du Conseil constitutionnel !

La définition de la nature des articles soumis à étiquetage obligatoire relève du domaine législatif. Nous ne vous abandonnerons pas cette prérogative parlementaire !

De plus, l’expérimentation doit durer cinq ans au maximum, soit, jusqu’en 2025, mais les propositions de l’Union européenne seront connues en 2023 puisque la phase de transition doit prendre fin en 2022. Votre texte, en quelque sorte, se télescope avec les échéances européennes.

La commission rejette les amendements.

Amendement CS2485 de M. Pierre Venteau.

M. Pierre Venteau. Les biens et services qui font l’objet d’une démarche d’affichage environnemental engagée ou aboutie à l’échelle européenne sont exclus du décret.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Encore une fois, il n’est pas question de mettre en concurrence les droits national et européen et les expérimentations doivent avoir lieu. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS2550 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. J’ai déjà commencé à exposer les trois arguments justifiant la suppression de l’alinéa 6.

Vous n’avez toujours pas répondu à propos des compétences respectives de la loi et du règlement. Je persiste quant à moi à considérer que la définition de la nature des biens qui devront faire l’objet d’un étiquetage obligatoire revient à la première.

L’alinéa 6 ajoute une information à celle de l’affichage sur les caractéristiques environnementales et le respect des critères sociaux : la mise en évidence du caractère excessif d’émission de GES. Cela doit être mis en perspective avec les informations dont le consommateur disposera grâce à l’article 13 de la loi AGEC : qualités et caractéristiques environnementales des produits comme l’incorporation de matière recyclée, l’emploi de ressources renouvelables, la durabilité, la compostabilité, la réparabilité, les possibilités de réemploi, la recyclabilité, etc. Une telle surinformation nuirait à la compréhension des enjeux.

Enfin, cet alinéa stigmatise en quelque sorte certains types de biens ou services car si l’affichage des alinéas précédents est objectif et fondé sur une expérimentation, un bilan puis le développement d’une méthodologie, cette information supplémentaire constitue une mesure punitive pour le producteur.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Cet alinéa est essentiel puisqu’il concerne les biens et services « présentant l’impact le plus important de leur catégorie en termes d’émissions de gaz à effet de serre ». L’expérimentation permettra de les définir, sauf si vous souhaitez que nous réengagions un parcours législatif à l’issue de chacune des expérimentations.

Nous avons en effet choisi que ces catégories de biens et de services seront encadrées et précisées par voie réglementaire, ce qui permet d’être plus souple et réactif pour des raisons évidentes.

Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Cette information ne constitue en rien une mesure punitive mais une aide apportée au consommateur pour connaître les produits dont l’impact carbone est élevé afin qu’il puisse orienter ses choix.

Par ailleurs, l’application de l’article 13 de la loi AGEC permettra de donner au consommateur des informations sur les qualités et caractéristiques environnementales des produits mais l’information carbone n’y figurant pas, il convient de la prévoir.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements CS1712 de M. Gérard Leseul, CS1328 de M. Thierry Michels et CS1897 de M. Gérard Leseul (discussion commune).

M. Guillaume Garot. L’alinéa 6 prévoit des conditions très restrictives en ce qui concerne l’affichage environnemental. Il y aurait une notation, un score par catégorie de biens ou de services émettant des gaz à effet de serre. Or si on veut donner un vrai choix au consommateur, il faut aller au-delà des catégories. Est-il préférable de savoir, par exemple, si un véhicule très lourd, un SUV (Sport Utility Vehicle), est plus ou moins polluant par rapport à d’autres SUV ou s’il est plus ou moins polluant par rapport à l’ensemble des véhicules actuellement sur le marché ? C’est cette dernière information qu’il faut donner au consommateur, et tel est l’objet de l’amendement CS1712. Sinon, je pense qu’on sera déçu par l’affichage environnemental : cela ne permettra pas de choisir le véhicule le moins polluant.

M. Thierry Michels. L’amendement CS1328 est de cohérence avec un amendement de la rapporteure que nous avons adopté hier. L’indicateur environnemental ne se limite plus à l’impact carbone : il concerne un ensemble d’impacts environnementaux. Il convient de modifier en conséquence les termes utilisés.

Mme Chantal Jourdan. L’amendement CS1897 vise à préciser la nature des informations qui doivent être communiquées au consommateur. Chaque bien ou service peut avoir des conséquences sur la qualité de l’environnement au-delà des émissions de gaz à effet de serre. Il paraît donc important de ne pas se limiter à cet indicateur.

Selon la définition donnée par l’ADEME, le concept d’impact environnemental désigne l’ensemble des modifications qualitatives, quantitatives et fonctionnelles de l’environnement, négatives ou positives, qui sont engendrées par un projet, un processus, un procédé, un ou des organismes ou un ou des produits, de leur conception à leur fin de vie.

Pour chaque catégorie de biens ou de services, différents éléments de l’environnement peuvent être affectés, comme la qualité de l’eau, des sols et de l’air ou les ressources terrestres ou aquatiques. L’impact environnemental doit être lu d’une manière globale, sans être atrophié par un indicateur unique qui supplanterait les autres. On pourrait retenir des indicateurs concernant des effets tels que l’eutrophisation, pour la qualité de l’eau, et tout ce qui contribue à l’effet de serre en ce qui concerne la qualité de l’air.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je crois que vous avez raison s’agissant de la nécessité de préciser l’alinéa 6. C’est l’amendement CS1328 qui permettrait d’aboutir à la rédaction la plus générale, puisqu’il serait question de l’impact « sur l’environnement ». Je vous propose de retirer les deux autres amendements au profit de celui-ci, sans quoi j’émettrai à leur égard un avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Ce sont des amendements intéressants qui tendent à supprimer la mise en avant de l’impact carbone des produits au profit de leur impact climatique et environnemental. Je partage évidemment l’idée que l’impact des produits ne se limite pas à la question du climat. J’émets un avis favorable à l’amendement CS1328, dont la rédaction est plus précise, et je propose aux auteurs des autres amendements de les retirer.

M. Jean-Marie Sermier. On assiste à un basculement : alors que l’affichage devait concerner l’impact en matière d’émissions de gaz à effet de serre, vous voulez inclure tout ce qui peut avoir un effet environnemental. Nous ne sommes pas nécessairement contre, mais il est difficile de préciser ce qui est environnemental.

On parlait d’éléments connus mais qui posaient déjà des difficultés d’application sur le plan méthodologique. Et là, vous ajoutez du flou au flou. Dans l’environnement, il y a l’eau, la forêt, les paysages : tout est environnemental. Comment pourra-t-on tout traduire dans un sigle, d’une manière très résumée, en faisant en sorte de ne pas duper les consommateurs ?

L’affichage doit permettre à chacun de choisir en toute conscience. Il faut bien reconnaître que la technologie nous dépasse : on n’y arrive pas, et les propositions que vous faites ne sont pas très précises.

M. Guillaume Garot. J’ajoute que ce ne sont pas les mêmes amendements. D’un côté, on veut un affichage environnemental, allant au-delà des émissions de gaz à effet de serre. De l’autre, l’amendement CS1712 vise à aller au-delà d’une présentation par catégorie, pour raisonner par rapport à l’ensemble des biens que le consommateur peut choisir.

La commission rejette l’amendement CS1712.

Elle adopte l’amendement CS1328.

En conséquence, l’amendement CS1897 tombe.

Amendement CS3670 de Mme Yolaine de Courson.

M. Nicolas Turquois. Cet amendement vise à ne pas tenir compte uniquement des émissions de gaz à effet de serre, en intégrant la notion de biodiversité, mais je le retire car l’amendement qui vient d’être adopté va dans le même sens.

L’amendement est retiré.

Amendement CS4183 de M. Pacôme Rupin.

M. Guillaume Gouffier-Cha. Le IV de l’article 1er prévoit un affichage particulier pour les biens ou les services présentant le pire impact en matière d’émissions de gaz à effet de serre au sein de chaque catégorie, selon des critères et des modalités définis par décret. Le présent amendement renforcera cette disposition : nous proposons que la vente de ces produits et la fourniture de ces services puissent être interdites dans un délai de cinq ans après la publication du décret.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Nous avons déjà abordé cette question. L’objet d’un affichage environnemental est d’éclairer les consommateurs et non d’élargir des interdictions concernant des produits ou des biens. Avis, donc, défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Nous parlons d’un affichage visant à induire un choix. Interdire la vente de produits relève d’une autre philosophie. On peut en discuter mais ce n’est pas du tout l’objet de l’article 1er. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS4243 de Mme Carole Bureau-Bonnard.

Mme Véronique Riotton. Le transport représente au moins 15 % de l’impact climatique des produits et des services consommés par les Français. L’amendement tend à identifier spécifiquement cet impact au sein de l’affichage environnemental.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. La question du cycle de vie inclut déjà celle du transport. Je vous demande de retirer l’amendement ; sinon, j’émettrai un avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS504 de M. Jacques Marilossian.

Mme Cendra Motin. L’amendement reprend la 20e recommandation du rapport de mars 2019 du Conseil économique, social et environnemental (CESE), intitulé « L’affichage environnemental, levier pour la mise en œuvre de l’économie circulaire ». Il faut créer un dispositif unique, et obligatoire, en la matière.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Ne tirons pas de conclusions avant que les expérimentations aient lieu. Je vous demande de retirer l’amendement, sans quoi j’émettrai un avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Amendements CS963 de Mme Delphine Batho, CS1023 de M. Loïc Dombreval, CS2368, CS2369 et CS2372 de Mme Nathalie Sarles (discussion commune).

Mme Delphine Batho. Nous sommes en train de relégiférer alors qu’une disposition est déjà entrée en vigueur il y a un an. Elle prévoyait une expérimentation de dix-huit mois qui devrait aboutir en août ou septembre, en vue de rendre obligatoire, d’une manière floue dans le temps, un affichage environnemental pour le textile. Les enjeux sociaux et environnementaux ont été rappelés tout à l’heure. La quantité de vêtements achetés dans l’Union européenne a augmenté de 40 % en quinze ans : chacun et chacune doivent connaître l’envers du décor de la fast fashion.

Mme Sandrine Le Feur. L’amendement CS1023 tend à ajouter un alinéa ainsi rédigé : « Le dispositif prévu au I est rendu obligatoire, prioritairement pour le secteur du textile d’habillement et le secteur de la production agricole, dans des conditions relatives à la nature des produits et à la taille de l’entreprise définies par décret, après l’entrée en vigueur d’une disposition adoptée par l’Union européenne poursuivant le même objectif. »

Mme Nathalie Sarles. Je vais défendre en même temps mes amendements, les deux derniers étant de repli. Je trouve d’ailleurs que la discussion commune aurait pu être plus large : on a un peu de mal à s’y retrouver.

Si nous revenons si souvent sur la question du textile, c’est parce qu’on voit bien qu’elle est cruciale. Depuis l’adoption de la loi AGEC, ce secteur travaille main dans la main avec l’ADEME pour élaborer un affichage environnemental, et le niveau de maturité des travaux est reconnu par la filière. Je vous propose de rendre obligatoire cet affichage pour le textile, sur la base de ce que nous avons prévu dans le cadre de la loi AGEC.

Je travaille moi aussi main dans la main avec des dirigeants de PME du textile dans ma circonscription. Il est important d’être en avance par rapport aux travaux menés au plan européen, et il faut que l’affichage environnemental soit accessible aux très petites entreprises et aux PME. Compte tenu du travail qui a été effectué, c’est le cas et l’affichage est mûr. Il est lisible et différenciant. C’est ce qui importe.

Il faut être ambitieux : nous pouvons inscrire dans le texte une belle mesure qui fera de ces produits de consommation courante un fer de lance en matière d’affichage environnemental.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Faut-il prévoir, en ce qui concerne l’affichage environnemental, une sorte de priorité pour le secteur du textile, comme la loi AGEC l’a demandé ? Nous pourrions envisager d’ici à la séance une coordination avec ce texte, dans une rédaction évitant de donner l’impression qu’on reviendrait sur les engagements précédents. Je vous propose de retirer les amendements pour retravailler sur cette question à propos du textile – et non du secteur de la production agricole qui est aussi évoqué par un des amendements.

Mme Barbara Pompili, ministre. La durée de cinq ans, je l’ai dit, est un maximum. S’agissant des expérimentations qui ont déjà commencé et qui, même, sont presque finies, on peut aller plus vite. Si vous voulez montrer, afin de rassurer, qu’on le fait dans les deux secteurs, le textile et l’alimentation, pour lesquels on a déjà avancé, dans le cadre d’expérimentations qui ne concernent pas uniquement la sortie du carbone, mais plus généralement les externalités environnementales, on peut essayer de trouver un terrain d’atterrissage, cela ne me pose aucun problème – je sais qu’il y aura de toute façon un affichage plus tôt dans ces secteurs. En attendant, je vous propose de retirer les amendements.

M. Dominique Potier. Il a fallu que des collègues fassent des ouvertures pour que vous entendiez, peut-être, cet appel récurrent…

Nous avons, au-delà des auditions, qui ont duré des dizaines d’heures, une expertise sur ce sujet depuis des années. Un accord a été conclu entre l’opposition, la majorité, les Constructifs et Brune Poirson, qui est allée un peu plus loin dans l’hémicycle sur le volet social. Il faut tout simplement tenir parole et respecter le Parlement.

Je propose que tous ceux qui se sont exprimés à ce sujet se mettent autour d’une même table avec votre cabinet, madame la ministre, pour rédiger d’ici à la séance un amendement prévoyant un calendrier qui permet de tenir la promesse initiale et qui intègre – nous pourrons en discuter – le volet social. Je suis sûr que vous n’y êtes pas personnellement opposée, madame la ministre.

M. Bruno Millienne. J’irai dans le même sens. Ce n’est pas parce que nous travaillons sur un texte issu de la Convention citoyenne que ce que nous avons voté dans le cadre de la loi AGEC doit souffrir d’un retard. C’est une question de respect pour le Parlement. Nous acceptons nous aussi, avec joie, de faire partie d’un groupe de travail visant à fixer des dates pour les deux secteurs évoqués par Mme la ministre, notamment le textile, car il y a un vrai problème, et à établir définitivement les modalités. Nous prouverons ainsi aux Français que ce texte n’a pas pour but de retarder ce que nous avons précédemment prévu.

Mme Nathalie Sarles. Je vais retirer mes amendements : je suis tout à fait pour un travail commun.

J’ajoute que nous avons un allié de taille au Parlement européen en la personne de Pascal Canfin. Il pourra se servir de nos travaux pour pousser à avancer au sein de la commission qu’il préside.

Par ailleurs, je crois que vous avez dit, madame la ministre, que vous attendiez des députés qu’ils enrichissent le texte. Nous avons, en la matière, la possibilité de le faire.

Mme Valérie Petit. Le groupe Agir Ensemble salue l’ouverture de Mme la ministre et se tient prêt à travailler à un renforcement des ambitions.

Mme Sandrine Le Feur. Je vais aussi retirer l’amendement CS1023 en vue du travail qui aura lieu d’ici à la séance.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Maintenez-vous votre amendement, madame Batho ?

Mme Delphine Batho. Je le maintiens car il est important. Et vu le nombre d’amendements qui sont déclarés irrecevables, je ne vais pas retirer ceux que j’ai déposés…

Je souhaite d’autant plus que mon amendement soit soumis au vote de la commission spéciale que beaucoup de collègues y sont favorables et que la décision a été prise ce matin de me priver d’un droit de parole dans le débat qui aura lieu en séance.

Les amendements CS1023, CS2368, CS2369 et CS2372 sont retirés.

La commission rejette l’amendement CS963.

Amendement CS4176 de M. Pacôme Rupin.

M. Guillaume Gouffier-Cha. Nous proposons qu’une mention soit visible dans tous les messages publicitaires ou promotionnels, quel que soit le canal de communication utilisé, pour les biens et les services ayant l’impact le plus important, dans leur catégorie, en matière d’émissions de gaz à effet de serre. Ce serait un levier majeur pour sensibiliser les consommateurs et leur faire prendre conscience des produits qui sont les plus polluants.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je crois qu’un lien entre l’affichage environnemental et la publicité est effectivement utile. Nous pourrons y veiller lorsque nous examinerons l’article 5, qui donnera au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) un outil permettant un contrôle renforcé en la matière. Il convient sans doute d’aller plus loin, mais je vous propose de retirer l’amendement : il ne peut pas être adopté en l’état, pour des raisons rédactionnelles. Je souhaite néanmoins qu’un lien soit clairement établi, dans ce texte, entre l’affichage environnemental et la publicité, afin d’éclairer les consommateurs.

Mme Barbara Pompili, ministre. C’est une proposition intéressante pour garantir la bonne information du consommateur et l’inciter à se tourner vers les produits ayant le moins d’impact pour l’environnement. Une mission portant sur les engagements volontaires du secteur de la publicité a été confiée, comme vous le savez, à Agathe Bousquet, présidente du groupe Publicis en France, et à Arnaud Leroy, président de l’ADEME. Je vous propose de retirer votre amendement et de revenir sur le sujet à la lumière des résultats de cette mission. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. Guillaume Gouffier-Cha. Je vais retirer l’amendement afin de reparler de cette question d’ici à la séance.

L’amendement est retiré.

Amendements CS2380 et CS2379 de Mme Justine Benin et CS3258 de M. Philippe Naillet (en discussion commune)

Mme Florence Lasserre. L’amendement CS2380 vise à exclure du dispositif, à ce stade, les territoires ultramarins. La création d’un dispositif concernant spécifiquement le bilan carbone des produits risque d’avoir des répercussions sur les prix.

L’amendement CS2379 demande une étude d’impact et de faisabilité sur l’application de l’article 1er dans les territoires ultramarins. Il faut s’assurer que cela ne conduit pas à une hausse de prix.

Ces amendements reprennent des propositions de la Convention citoyenne. Il est important de veiller à ce que les mesures adoptées ne soient pas propices à l’inflation dans des territoires où le coût de la vie est déjà 10 ou 40 % plus élevé que dans l’hexagone et où la pauvreté est plus importante.

Mme Chantal Jourdan. L’amendement CS3258 demande que « l’ensemble des dispositions prévues par cet article tiennent compte des spécificités des territoires ultramarins en favorisant le soutien et le développement des productions locales ».

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je ne vois pas pourquoi on exclurait les territoires ultramarins de l’affichage environnemental : pour moi, ce dispositif doit s’appliquer sur l’ensemble du territoire national. Je suis donc défavorable à l’amendement CS2380.

Par ailleurs, l’expérimentation prendra en compte l’ensemble des caractéristiques, y compris les spécificités éventuelles de certains territoires, ultramarins ou non. Tout ce qui a trait aux spécificités est déjà satisfait. Je suis donc défavorable aux deux autres amendements.

Mme Barbara Pompili, ministre. Comme je l’ai déjà indiqué, l’affichage environnemental concerne les produits et non les territoires. La question de l’exclusion des territoires ultramarins ne se pose donc pas. J’émets un avis défavorable à l’amendement CS2380.

Regarder l’impact ou la faisabilité du dispositif dans les outre-mer, c’est autre chose. Néanmoins, l’expérimentation étudiera évidemment les spécificités de ces territoires : c’est déjà prévu. Les amendements CS2379 et CS3258 étant satisfaits, je vous demande de les retirer.

M. Bruno Millienne. Les collectivités d’outre-mer présentent des spécificités que l’on oublie trop souvent. Vous dites qu’elles sont prises en compte à l’article 1er, mais j’aimerais qu’il soit écrit noir sur blanc qu’une attention toute particulière sera portée à ces territoires.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CS3999 de M. Fabien Lainé.

M. Bruno Millienne. Chacun souhaite intégrer de nombreux critères sur l’étiquette des produits, si bien qu’il faudrait quasiment un bottin par article pour satisfaire tout le monde ! Nous proposons donc d’expérimenter la mise en place d’une plateforme numérique qui permettrait à nos concitoyens de consulter, via un QR code, toutes les informations qui ne pourront figurer sur les étiquettes.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’article 1er n’est pas seulement applicable dans les lieux physiques de vente : il s’appliquera partout. Nous avons d’ailleurs adopté un amendement imposant la présence du marquage au moment de l’acte d’achat, qu’il soit physique ou dématérialisé. Il n’est donc pas nécessaire d’engager une expérimentation parallèle ; au contraire, c’est dans le cadre des expérimentations prévues à l’article 1er que la question de la dématérialisation devra être traitée. L’amendement étant satisfait, j’en demande le retrait.

L’amendement est retiré.

Amendements CS3671 et CS3704 de Mme Yolaine de Courson (discussion commune).

M. Nicolas Turquois. L’affichage prévu à l’article 1er ne peut être efficace que s’il s’accompagne d’un important travail de récolte, d’analyse et même d’expertise des données, en toute transparence. Il serait logique que cette tâche soit confiée à l’ADEME.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’ADEME est déjà chargée de ce travail de récolte des données en continu. Nous sommes convenus avec Mme de Courson de retravailler, en vue de la séance, sur la question de l’open data et de la transparence, d’autant que ces amendements ne sont plus cohérents avec les nouveaux critères que nous avons adoptés en matière d’affichage environnemental. Demande de retrait.

Les amendements sont retirés.

La commission adopte l’article 1er ainsi modifié.

 

Après l’article 1er

Amendements CS1869 de Mme Paula Forteza, CS1899 de M. Dominique Potier et CS899 de M. Julien Aubert (discussion commune).

Mme Delphine Batho. L’amendement CS1869 vise à imposer aux professionnels, dans le cas d’un contrat de vente de biens ou de fourniture de services concernés par l’article 1er, de communiquer aux consommateurs l’ensemble des informations relevant du futur affichage environnemental. Cette obligation engagerait la responsabilité précontractuelle du vendeur à l’égard du consommateur.

M. Dominique Potier. L’amendement CS1899, suggéré par l’éco-organisme Éco‑mobilier, vise à mieux articuler les dispositions relatives à l’affichage environnemental que nous venons d’adopter avec la loi AGEC, qui impose déjà aux éco-organismes de donner aux consommateurs des informations relatives aux caractéristiques environnementales des produits, s’agissant notamment de leur fin de vie et de leur phase de recyclage. Ainsi, nous proposons d’étendre l’obligation générale précontractuelle aux caractéristiques environnementales des produits.

M. Jean-Marie Sermier. Madame la présidente, lorsque vous avez mis aux voix l’article 1er, j’ai levé la main pour demander la parole car il me semble tout à fait légitime que les groupes parlementaires aient la possibilité d’expliquer leur vote sur un article.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Ce n’est pas toujours le cas en commission.

M. Jean-Marie Sermier. Qu’il n’y ait pas de confusion : nous avons voté contre l’article 1er. En sept heures de discussions, vous n’avez accepté aucune proposition émanant des oppositions. Nous ne connaissons toujours pas les modalités de l’expérimentation. L’affichage ne prendra pas en compte les questions sociales et ne sera pas cohérent avec ce qui se pratique à l’échelle européenne. Surtout, cet article ne garantit pas que les agriculteurs et les entreprises de notre pays puissent valoriser le travail accompli depuis plusieurs décennies afin que leurs produits soient significativement différents des produits importés.

L’amendement CS899 vise à renforcer l’information du consommateur. Il est important de différencier les produits de bonne qualité environnementale de ceux qui le sont moins. Pour ce faire, nous devons introduire dans le code de la consommation une disposition imposant aux commerçants d’apposer sur leurs produits un visuel, qui pourrait prendre la forme d’un triangle, « contenant des informations synthétiques sur l’empreinte carbone du produit, le pourcentage de ce produit réalisé en France et l’impact environnemental de ce produit, autre que les émissions de gaz à effet de serre ». On nous a beaucoup reproché, lors de l’examen de l’article 1er, de rester dans le domaine du concept et de ne rien proposer de précis ; or la proposition que nous mettons ici sur la table a le mérite d’être technique et précise.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Les expérimentations prévues à l’article 1er permettront justement de définir les modalités précises de l’affichage environnemental. L’amendement CS1869 risquerait d’entrer en concurrence avec l’article 1er : j’y suis donc défavorable.

Nous avons déjà adopté un amendement prévoyant que l’affichage serait visible au moment de l’acte d’achat : je considère donc que l’amendement CS1899 est satisfait.

L’amendement CS899 est certes précis, mais il est difficile de garantir que le visuel proposé puisse correspondre à toutes les catégories de biens. Si l’on ne peut pas tester d’autres approches, à quoi servent les expérimentations ? Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. L’amendement CS1869 risque fortement de noyer dans un trop grand nombre d’informations les éléments de synthèse et de simplification que sont la note et le CO2-Score. Or la première vertu d’un dispositif d’affichage environnemental est sa lisibilité et sa bonne compréhension par le consommateur. Par ailleurs, l’article 13 de la loi AGEC prévoit déjà d’informer le consommateur sur les qualités et caractéristiques environnementales des produits. Avis défavorable, donc.

Il en est de même pour l’amendement CS1899 : l’obligation d’information du consommateur qu’il prévoit figure déjà à l’article 13 de la loi AGEC, dont le décret d’application est en cours d’élaboration. L’amendement étant satisfait, j’en demande le retrait.

Il est prévu que les modalités d’affichage soient précisées par voie réglementaire. Je veillerai à ce que les différentes expérimentations soient cohérentes entre elles, s’agissant notamment de la forme sous laquelle les informations seront mises à la disposition du consommateur. Il ne me paraît pas opportun, à ce stade, de figer le visuel dans la loi. Je suis donc défavorable à l’amendement CS899.

M. Dominique Potier. Les éco-organismes souhaitent que le décret d’application de l’article 13 de la loi AGEC soit publié rapidement. Ils ont besoin de cette réglementation environnementale pour soutenir leur filière.

L’amendement CS1899 est retiré.

La commission rejette successivement les amendements CS1869 et CS899.

 

Amendement CS2552 de M. Philippe Bolo.

Mme Marguerite Deprez-Audebert. Nous proposons qu’une mention visible « Relargue des microfibres dans l’environnement » soit affichée lors de la vente de produits textiles à base de fibres synthétiques. Ces dernières représentent deux tiers des fibres textiles. Le lavage des produits qui en contiennent provoque une libération de ces fibres dans l’environnement, à hauteur de 46 000 tonnes par an au niveau européen, ce qui est tout à fait préjudiciable. Il convient donc d’inciter les consommateurs à réduire leur consommation de produits à base de fibres synthétiques, tout en incitant les producteurs à utiliser des procédés évitant ces conséquences environnementales.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Cet amendement vise à ajouter une mention spécifique pour un seul impact environnemental. Imaginez que nous fassions la même chose pour chaque impact potentiel ! Je crains, là encore, que nous nous éloignions du caractère simple, lisible et synthétique que devrait présenter l’affichage environnemental. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Le sujet est préoccupant : ces fibres synthétiques ont même été retrouvées dans des glaciers par une équipe de chercheurs italiens. En la matière, l’information du consommateur me paraît donc essentielle. Cependant, les dispositions de l’article 13 de la loi AGEC adoptée l’année dernière suffisent pour définir un cadre réglementaire permettant de communiquer cette information au consommateur. Nous étudierons la possibilité d’ajouter cette mention dans le projet de décret dont je vous ai déjà parlé. L’amendement étant satisfait, j’en demande le retrait.

L’amendement est retiré.

Amendements identiques CS399 de Mme Valérie Beauvais, CS457 de M. Pierre Vatin et CS2831 de M. Matthieu Orphelin.

Mme Valérie Beauvais. Les émissions de gaz à effet de serre provenant de la production des biens de consommation finaux représentent à elles seules 35 % des émissions françaises. Afin de réduire les émissions tout au long de la chaîne de valeur, il est indispensable de les quantifier.

La création d’un label « faible intensité carbone » (FIC) permettrait aux entreprises qui l’auraient obtenu de valoriser leurs performances auprès des consommateurs, ce qui leur procurerait un avantage commercial. Pour l’attribution de ce label, nous proposons de retenir le plafond de 100 grammes de CO2 émis pour 100 grammes de produits – en tenant compte de toutes les émissions de l’aval agricole à la transformation, au transport, au stockage et à l’emballage – qui, selon l’ADEME, est représentatif de produits alimentaires bruts ou peu transformés. Ce label orienterait les consommateurs vers des produits d’origine locale, de saison ou sans emballage superflu.

Pour anticiper les avis défavorables de Mme la rapporteure et Mme la ministre, je précise que la Commission européenne vient d’annoncer la mise en œuvre de la démarche « Accompagner la transition de l’Europe vers une économie à faible intensité de carbone ».

M. Pierre Vatin. Non seulement le label « faible intensité carbone » certifierait aux consommateurs que leur achat ne dépasse pas un certain plafond d’émissions, mais il favoriserait également le localisme. Il faut soutenir ce comportement, d’autant que l’Union européenne s’engage, elle aussi, dans cette voie.

Mme Delphine Batho. Nous proposons également la création de ce label très lisible octroyé aux produits vertueux au regard de leur empreinte carbone. Cela encouragerait les entreprises qui s’engagent dans cette voie et leur procurerait un avantage concurrentiel par rapport à celles qui continuent de faire comme s’il n’y avait aucun problème de changement climatique.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Vous avez évidemment raison, l’impact carbone doit être pris en considération. Je n’exprime pas ici un désaccord sur le fond – l’expérimentation que nous allons mener conclura peut-être que l’affichage environnemental pourra se matérialiser de cette manière –, mais encore une fois, je ne voudrais pas que nous ajoutions un nouveau label qui se superposerait à l’affichage environnemental. Les députés du groupe Les Républicains ont dit eux-mêmes que cet affichage devait être synthétique : comment pourra-t-il être lisible si les labels se multiplient sur l’emballage d’un produit ? Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Ces trois amendements ne sont pas cohérents avec l’article 1er, qui prévoit de définir, pour chaque catégorie de biens ou de produits, la méthodologie à utiliser. Imposer dans la loi un plafond unique pour tous les produits me paraît contre-productif. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

Amendement CS4092 de Mme Sandrine Josso.

M. Bruno Duvergé. Cet amendement vise à rendre obligatoire, pour tous les produits de consommation, l’affichage d’un score indiquant leur contenance en produits reprotoxiques, cancérogènes ou en perturbateurs endocriniens. À l’heure actuelle, l’information concerne seulement l’apport nutritionnel des aliments consommés, et non plus largement les produits de consommation, dont la toxicité peut présenter de nombreux risques. Afin de mesurer l’impact des produits de consommation sur la santé des individus et de garantir une alimentation saine et durable, il est essentiel d’indiquer la dangerosité des composants avec plus de rigueur et de rendre cette information visible de tous.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Mêmes arguments que pour les amendements précédents. Ne multiplions pas les critères à prendre en considération dans l’affichage environnemental : c’est l’expérimentation qui nous permettra de déterminer ceux qui méritent d’être retenus. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. L’information du consommateur sur la présence de substances dangereuses dans les produits mis sur le marché constitue déjà une obligation prévue à l’article 13 de la loi AGEC. Les projets de décrets sont en cours de finalisation. L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) a été saisie par le ministère des solidarités et de la santé et par le ministère de la transition écologique ; elle a d’ores et déjà recommandé que le consommateur soit informé de la présence de ces substances dans les produits qu’il consomme. L’amendement étant satisfait, j’en demande le retrait.

L’amendement est retiré.

Amendement CS2475 de Mme Claire Pitollat.

Mme Claire Pitollat. Vous ne serez pas surpris par cet amendement, que j’avais déjà déposé lors de l’examen de la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ÉLAN), tant la question de la qualité de l’air intérieur me tient à cœur.

Une loi de 2010 prévoit un étiquetage obligatoire pour les polluants volatils issus des produits d’ameublement ; or, dix ans après la promulgation de cette loi, le décret d’application n’a toujours pas été publié. Je propose ici de préciser qu’il devra l’être « au plus tard le 1er janvier 2022 ».

Alors que nous passons 80 % de notre temps à l’intérieur, il convient de diminuer la quantité de polluants présents dans l’air intérieur. Je m’en remets à vous, madame la ministre, car je sais que vous êtes sensible à ce sujet, dont nous avons déjà débattu dans le cadre de la commission d’enquête sur l’évaluation des politiques publiques de santé environnementale.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Vous l’avez dit vous-même, un décret est en attente de publication. Vous conviendrez donc qu’il n’est pas utile d’apporter cette précision dans la loi ; c’est pourquoi je donne à votre amendement un avis défavorable. Vous attendez sans doute un engagement sur la date à laquelle le décret sera publié ; peut-être Mme la ministre pourra-t-elle nous donner quelques informations à ce sujet.

Mme Barbara Pompili, ministre. Je partage votre préoccupation, madame Pitollat : la qualité de l’air intérieur est un sujet important. Deux textes – un projet de décret en Conseil d’État et un projet d’arrêté – ont été soumis à consultation. Cependant, dans le cadre du règlement européen REACH relatif à l’enregistrement, l’évaluation, l’autorisation et la restriction des substances chimiques, un projet de restriction du formaldéhyde dans les meubles est en cours de discussion. Nous attendons donc de connaître la décision de la Commission européenne s’agissant des niveaux autorisés d’émission pour les retranscrire dans le décret et déterminer ainsi les valeurs qui donneront lieu à affichage. Dans cette attente, je vous demande de retirer votre amendement. Si j’obtiens, d’ici à la séance publique, une indication plus précise sur la date à laquelle la Commission prendra sa décision, je vous la communiquerai bien évidemment.

Mme Claire Pitollat. La modification du règlement REACH prendra du temps. Or les travaux de l’ANSES sont déjà publiés depuis longtemps, et nous savons d’ores et déjà quels plafonds nous voulons déterminer. Peut-être pourrons-nous, en séance publique, prendre des engagements pour la France et fixer une date butoir pour la publication d’une telle réglementation dans notre pays. Nous serons alors précurseurs dans ce domaine, ce qui incitera encore plus les institutions européennes à modifier le règlement REACH.

L’amendement est retiré.

Amendement CS1928 de M. Dominique Potier.

M. Dominique Potier. Nous reprenons un fil que nous avions commencé à tirer en 2015, lors de l’examen de la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Il s’agissait alors de mettre en place des expérimentations visant à mieux informer les consommateurs sur la durée de vie des produits et à lutter contre l’obsolescence programmée. Ce débat remonte en réalité à la loi Hamon de 2014 relative à la consommation ; nous l’avions eu à nouveau dans le cadre de la loi AGEC.

J’ai l’intime conviction que l’information des consommateurs sera un levier d’action important dans la lutte contre l’obsolescence programmée. Nous proposons ici que soit publiée une liste très précise de produits dont les fabricants devront afficher la durée de vie. Cette disposition est tout à fait concevable d’un point de vue technique. Nous prévoyons de commencer de façon prudente, en établissant une première liste de produits correspondant aux filières dans lesquelles la question de l’obsolescence est un élément important de compétitivité pour les PME, ETI et multinationales de notre pays. Nous demandons également au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur la possibilité d’étendre cette liste à d’autres produits, dans un second temps.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. J’ai déjà souligné le risque que comporterait la multiplication des labels ou des affichages sur les produits – le consommateur s’y perdrait ! Le titre II du présent projet de loi prévoit des avancées, s’agissant en particulier de la question des pièces détachées, qui pourraient répondre en partie aux questions que vous soulevez. Pour des raisons tenant à la clarté de l’affichage, avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. À mon sens, ce sujet relève plus des enjeux de réparabilité et de durabilité des produits que de l’affichage environnemental en tant que tel. La loi AGEC a déjà prévu la transformation de l’indice de réparabilité, dont l’affichage est obligatoire depuis le début de l’année, en un indice de durabilité, qui verra le jour en 2024 et inclura de nouveaux critères tels que la fiabilité et la robustesse du produit. L’amendement étant déjà satisfait, j’émets un avis défavorable.

M. Dominique Potier. Dans certaines filières, le sujet de la réparabilité est un argument commercial complémentaire à celui de la protection de l’environnement.

Comment la notion de durabilité d’un produit est-elle prise en compte dans le calcul de son impact carbone ? Il faut bien estimer la durée de vie d’une cafetière, d’une machine à laver ou de tout autre appareil électroménager afin de diviser le coût carbone lié à sa fabrication par le nombre de ses usages futurs ! Un coût carbone plus important au départ peut se justifier par une durée de vie du produit plus longue. Cette question technique n’a rien de polémique.

Mme Barbara Pompili, ministre. C’est le principe même de l’analyse du cycle de vie, qui vise à déterminer l’impact carbone d’un produit de sa fabrication jusqu’à sa mise au rebut.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS549 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Lorsqu’un produit fait l’objet d’un affichage environnemental obligatoire en vertu des dispositions de l’article 1er, l’amendement vise à ce que cette évaluation apparaisse obligatoirement dans la publicité. Si un produit a une très mauvaise évaluation environnementale, c’est pour que les consommateurs en soient informés et sachent que ce produit est peu recommandé en raison de son empreinte environnementale.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Cet amendement est assez proche de celui que nous a présenté notre collègue Guillaume Gouffier-Cha. J’ai pris l’engagement que nous y réfléchirons pour la séance, afin d’envisager comment consacrer l’affichage environnemental dans les publicités. J’ai une réserve concernant la publicité à la radio, le volume extraordinairement important des mentions obligatoires ne concourant pas au caractère « audible » de ces publicités, puisque c’est le qualificatif que vous employez dans le dispositif de votre amendement. Sur d’autres supports – en ligne, papier ou télévisuel –, cela aurait évidemment du sens. À ce stade, je suis défavorable à votre amendement.

Mme Barbara Pompili, ministre. L’idée est assez logique, et intéressante, puisque cela permettrait au consommateur d’être mieux informé. Une mission a été lancée et doit analyser les engagements volontaires du secteur de la publicité. À l’aune de ses conclusions, et des évolutions rédactionnelles, nous pourrions éventuellement intégrer une telle mesure lors de la séance publique. Dans l’attente, je vous propose de retirer votre amendement.

Mme Delphine Batho. Je ne partage pas forcément toutes les propositions du rapport de Thierry Libaert et Géraud Guibert sur la publicité et la transition écologique mais, en tout état de cause, le rapport existe – ce n’est pas la peine d’en commander un nouveau ! Mon amendement ne fait que reprendre sa proposition n° 6.

On veut inciter les consommateurs à faire des choix éclairés grâce aux bonnes informations, mais aussi orienter la production. S’il est possible de continuer à faire de la publicité pour des produits qui ont une mauvaise évaluation environnementale, cela ne sert plus à rien ! Les messages publicitaires restent un vecteur majeur d’information des consommateurs. Si l’affichage environnemental n’y figure pas, on se pince ! C’est parfaitement incohérent ! C’est pourquoi je maintiens l’amendement.

M. Jean-Charles Colas-Roy. Je soutiens l’intention de mes collègues Batho et Gouffier-Cha. J’ai déposé un amendement similaire concernant la publicité pour les véhicules à l’article 4 et j’ai donc noté avec intérêt la proposition de Mme la rapporteure et de Mme la ministre d’un travail commun en vue de la séance, et les en remercie.

L’affichage environnemental est une avancée majeure. Il convient désormais de le faire figurer dans les publicités afin d’informer le consommateur. Cela fait partie des préconisations du rapport Libaert et le Haut Conseil pour le climat, ainsi que la Convention citoyenne, nous y incitent.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS2464 de M. Éric Bothorel.

Mme Christine Hennion. Cet amendement vise à ce que les données des bilans des émissions de gaz à effet de serre (BEGES), que les entreprises sont légalement tenues de réaliser, soient rendues publiques et sous format de données ouvertes, afin de pouvoir être réutilisées.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Nous réfléchissons à la meilleure façon de déployer cette obligation de publication, sachant que la publication des bilans des émissions de gaz à effet de serre et du plan de transition est déjà obligatoire. Reste à voir comment répondre à vos exigences de transparence. Je souhaite que nous puissions aboutir pour la séance. D’ici là, je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement.

Mme Barbara Pompili, ministre. L’enjeu de transparence et de mise à disposition des données mérite notre attention. Je vous propose de réfléchir à une rédaction qui pourrait faire consensus.

L’amendement est retiré.

Amendement CS2332 de Mme Paula Forteza.

Mme Delphine Batho. En complément des dispositions prévues par l’article 1er, il s’agit d’améliorer l’information des consommateurs sur l’empreinte environnementale des réseaux de téléphonie mobile et d’internet. Nous proposons de confier à l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) un pouvoir de recueil des données auprès des opérateurs afin qu’elle puisse développer une approche de régulation par la donnée en matière environnementale. Cette proposition est issue de réflexions avec le collectif GreenIT.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Le Sénat a adopté une proposition de loi visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique en France, portée notamment par le sénateur Chaize. Nous souhaiterions savoir si le texte va être inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Si tel n’est pas le cas, nous intégrerons certains éléments dans le projet de loi d’ici la séance. Dans l’attente, je vous demanderai de bien vouloir retirer l’amendement.

Mme Barbara Pompili, ministre. Il faut effectivement analyser d’ici la séance comment coordonner toutes ces dispositions relatives au numérique et à l’environnement, fondamentales, d’autant que la proposition de loi Chaize a été adoptée par le Sénat en première lecture le 12 janvier dernier. Le 23 février, avec Cédric O, j’ai présenté la feuille de route du Gouvernement en la matière. Nous souhaitons développer les actions permettant de mieux appréhender l’empreinte environnementale du numérique, de développer la sobriété numérique et d’utiliser davantage le numérique au profit de la transition écologique.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS462 de M. Pierre Vatin, amendements identiques CS584 de Mme Delphine Batho et CS1330 de M. Thierry Michels, amendement CS1714 de Mme Chantal Jourdan (discussion commune).

M. Pierre Vatin. Il s’agit ici d’informer le consommateur de l’empreinte carbone du streaming, mode de consommation numérique en pleine expansion.

Mme Delphine Batho. Mon amendement vise le même objectif. L’empreinte carbone du numérique augmente très rapidement. La fuite en avant ne peut continuer… Lors d’un visionnage, il s’agit d’informer les internautes de la quantité de données associée à chaque niveau de résolution, et de leur équivalent en émissions de gaz à effet de serre. Ainsi, chacun pourra fait le choix d’une résolution inférieure, mais avec un moindre impact environnemental.

M. Thierry Michels. Les technologies numériques représentent environ 2 % des émissions de gaz à effet de serre en France. Cette proportion est appelée à augmenter avec la numérisation toujours croissante de nos modes de vie. Or beaucoup de nos concitoyens minimisent – voire ne connaissent pas – l’impact environnemental de leurs pratiques numériques. Loin de moi l’idée de diaboliser le numérique, bien au contraire : la crise du covid-19 a souligné l’importance de la télémédecine et du télétravail, rendus possibles par les outils numériques.

Pour autant, ces aspects bénéfiques ne doivent pas nous empêcher de réduire autant que possible l’impact environnemental de ces outils. C’est pourquoi il est important d’informer les consommateurs, en particulier concernant le streaming vidéo.

Mme Chantal Jourdan. Notre amendement vise le même objectif. Nous souhaitons créer un comité scientifique chargé d’étudier la possibilité de faire figurer l’évaluation environnementale de chaque vidéo proposée au visionnage sur le territoire français, afin de répondre à la croissance de l’utilisation du numérique par les consommateurs, qui n’en connaissent pas forcément les effets. L’objectif est d’informer et de sensibiliser. D’autres amendements suivront sur le même sujet.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Mes arguments seront les mêmes que pour le précédent amendement de Mme Batho, au regard notamment des dispositions contenues dans la proposition de loi sénatoriale.

Je suis favorable à des progrès en matière d’affichage environnemental dans le secteur du numérique. À titre de comparaison, une heure trente minutes d’écoute de la radio a le même impact environnemental qu’un seul titre en streaming. Les effets de ce mode d’écoute ou de visionnage sont donc réels et il faut éclairer le consommateur. Mais quels sont les bons critères et comment faire en sorte que l’affichage soit lisible ? Si la proposition de loi Chaize ne peut être examinée à l’Assemblée nationale, il faudra avancer en séance sur le sujet.

Mme Barbara Pompili, ministre. Nous sommes tous d’accord, l’impact écologique du numérique est non négligeable, même si la fabrication des différents terminaux en est responsable à environ 75 %.

Nous avons le sentiment d’un accès illimité au numérique. Il faut donc collectivement réfléchir aux usages et à leurs conséquences sur l’environnement, sur le modèle de ce que l’on a fait pour l’eau. Cela ne viendrait plus à l’idée de personne – enfin, je l’espère – de gaspiller de l’eau et nous savons tous qu’il faut fermer le robinet quand on se lave les dents.

Nous n’avons pas encore, ou pas assez, ces réflexes basiques en matière de numérique. Il faut donc mieux sensibiliser, je suis d’accord sur le fond. Sur la méthode, il faudra voir d’ici la séance si nous nous raccrochons à la proposition de loi Chaize ou au présent projet de loi.

Mme Delphine Batho. J’aimerais tant que nous soyons d’accord sur la sobriété numérique, mais ce n’est pas le cas ! Quand nous en parlons, quand la Convention citoyenne pour le climat fait des propositions fortes, et que nous plaidons pour un moratoire sur la 5G, on nous traite d’Amish !

Ce secteur ne fait l’objet d’aucune régulation. Nous assumons donc le combat pour la sobriété numérique, afin de lutter contre l’augmentation continue – de 8 % par an – de l’empreinte environnementale numérique, et celui pour la régulation du secteur, tant en termes de données, de droits civiques, de libertés, de sécurité que d’empreinte environnementale.

Si ces amendements ont survécu, c’est qu’ils concernent l’affichage environnemental. Nous avions beaucoup d’autres propositions concernant la sobriété numérique, mais elles ont été déclarées irrecevables…

Je ne crois ni aux rapports, ni aux promesses d’inscription à l’ordre du jour de la proposition de loi sénatoriale. Il faut prendre ces mesures élémentaires tout de suite : un internaute qui regarde une vidéo en ligne doit savoir quelle quantité de données il consomme et ce que cela représente en termes d’émissions de gaz à effet de serre !

M. Dominique Potier. Je me réjouis que nous progressions aussi rapidement ! Il y a un an et demi, lors des débats sur le projet de loi relatif à l’énergie et au climat, j’avais déposé un amendement visant à créer une feuille de route de la sobriété énergétique du numérique et le ministre m’avait répondu qu’il ne saisissait pas le rapport…

Vous prenez désormais en compte le sujet, madame la ministre, mais nous avons un problème de recevabilité. Matthieu Orphelin avait notamment déposé un amendement relatif à l’usage compulsif de vidéos publicitaires, déclenchées automatiquement sur certaines chaînes. Ces propositions commerciales récurrentes provoquent des addictions. En outre, ce modèle économique, financé par la publicité, ne prend pas en compte le coût de l’énergie - ma collègue Chantal Jourdan avait déposé de très nombreux amendements qui ne seront pas non plus examinés.

Je souhaiterais que vous nous expliquiez en séance où en est le Gouvernement sur la feuille de route de la sobriété énergétique du numérique. Ne peut-on rouvrir une porte pour que le premier pas ne soit pas que d’affichage ? À mon sens, nous ne pourrons échapper à une sorte de péage carbone sur le numérique, afin d’en civiliser et d’en réguler l’usage.

M. Mounir Mahjoubi. Chers collègues, j’entends votre plaisir à souligner les dangers du numérique sur l’environnement. Je veux, pour ma part, qu’on rappelle également tous les déplacements évités grâce au numérique – avec des véhicules consommant de l’essence. Télétravail, téléconsultations, nouvelles façons de voir les gens qu’on aime, tout cela a un impact positif.

Si vous souhaitez une évaluation des impacts négatifs du numérique sur l’environnement, je voudrais qu’elle soit complétée par un indicateur mesurant ses conséquences positives sur ce même environnement, mais aussi l’éducation, l’intelligence, les libertés, le partage des savoirs, etc.

Enfin, certains de nos collègues pourraient faire l’économie des vidéos « à buzz ». Beaucoup de celles tournées dans cette maison ont pour unique objectif d’être massivement visionnées et partagées. Si nous en produisions moins, les gens en regarderaient moins…

Mme Delphine Batho. Supprimer le temps programmé, il n’y aura plus de vidéos sur Twitter ! (Protestations)

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CS1709 de Mme Chantal Jourdan.

Mme Chantal Jourdan. Il s’agit d’instaurer un comité scientifique chargé d’évaluer l’impact énergétique et climatique du numérique, et notamment des infrastructures de réseau qui s’appuient essentiellement sur des solutions numériques – infrastructures énergétiques de mobilité, de télécoms, etc.

Bien entendu, nous avons tous pris conscience des usages positifs du numérique pendant la crise sanitaire. Mais, du fait de l’amplification de ces pratiques, c’est aussi le bon moment pour informer les consommateurs de l’impact de ces usages et leur permettre de devenir « consomacteurs ».

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’article 1er s’applique à l’ensemble du mode de commercialisation, y compris les biens et services numériques. Votre demande, légitime, est donc satisfaite. Il n’est pas nécessaire de créer un comité scientifique supplémentaire.

Mme Chantal Jourdan. Je maintiens mon amendement car il s’agit d’un point fondamental et je ne vois pas en quoi les dispositions satisfont notre demande. Nous souhaitons des avancées sur l’usage et la sobriété.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS521 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. Cet amendement constitue une forme de contre-proposition, à la suite de nos débats sur les achats en ligne. Il prévoit un affichage destiné à apporter aux consommateurs une information relative aux caractéristiques environnementales de leurs achats en ligne, par le biais de critères permettant de séparer les achats vertueux de ceux qui le seraient moins d’un point de vue environnemental.

Avec la crise sanitaire, certains acteurs ont déployé la vente en ligne pour favoriser les circuits courts. Après une expérimentation, nous proposons que l’affichage prenne en compte le fait que l’opérateur réalise du click and collect, s’appuie principalement sur un réseau de points relais pour livrer les commandes aux clients, recoure à ses propres salariés pour effectuer des livraisons sans utiliser de main-d’œuvre externalisée ou détachée, utilise prioritairement des véhicules vertueux, vende essentiellement des produits responsables fabriqués en France, contribue, par le paiement proportionné de ses impôts et taxes, à l’économie nationale et au budget des collectivités locales – je le dis devant le président de la délégation puisque nous en avions déjà débattu à l’occasion du projet de loi de finances 2021.

Cet affichage vise à faire la différence entre ces modes de distribution, que l’on peut localement encourager, et d’autres, beaucoup plus éloignés de ce modèle.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. La proposition nous avait été soumise lors des auditions. Il s’agirait de créer un « numéri-score », sur le modèle du nutri-score. Sur le principe, l’idée d’éclairer le consommateur dans ses achats en ligne est séduisante. Mais, tel qu’il est rédigé, l’amendement pose des difficultés. Concerne-t-il toutes les plateformes qui commercialisent en ligne, y compris les TPE ? Ou y a-t-il un seuil lié au chiffre d’affaires ? Quelles caractéristiques retenir ? Doit-on en rester à l’affichage environnemental ou prendre en compte des critères sociaux et sociétaux – nous en avons longuement débattu à l’article 1er ? Faut-il se cantonner à quelques indicateurs pragmatiques, comme l’impact d’une livraison ?

Il faut progresser sur le commerce et l’achat en ligne, mais avec des outils ou des indicateurs plus concrets, car un affichage environnemental risque d’être long et complexe à déployer. Je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement. Sinon, j’y serai défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Le type d’affichage que vous proposez peut être inclus dans le dispositif de l’article 1er qui concerne les biens et services. En outre, certains des critères de la méthodologie que vous préconisez n’entrent pas dans l’analyse du cycle de vie, référence en la matière. Tout cela me paraît trop complexe. C’est pourquoi j’y suis défavorable.

M. Thibault Bazin. Je suis déçu de pas vous avoir convaincu, mais je préfère la réponse de la rapporteure !

Les Républicains se veulent force de proposition : je suis donc prêt à trouver une rédaction plus adéquate. Vous l’aurez compris, notre objectif est de soutenir le commerce physique, notamment le commerce de proximité et de centre-ville, en cohérence avec les autres politiques publiques. Il convient de réfléchir ensemble à cette approche environnementale, dans la proximité.

L’amendement est retiré.

Article 2 (articles L. 121-8 [nouveau] et L. 312-9 du code de l’éducation) : Éducation à l’environnement et au développement durable

Amendement de suppression CS394 de Mme Valérie Beauvais.

Mme Valérie Beauvais. Les dispositions de l’article 2 prévoient que l’éducation à l’environnement et au développement durable doit être dispensée tout au long de la formation scolaire. Le principe est évidemment louable, mais l’éducation nationale n’a pas vocation à dispenser des enseignements visant à répondre à des problématiques qui dépassent largement celles de l’acquisition des compétences fondamentales – français, mathématiques, etc.

En outre, l’éducation à l’environnement et au développement durable est déjà réalisée dans le cadre de l’enseignement des sciences de la vie et de la Terre (SVT).

L’amendement vise donc à supprimer l’article 2 afin de ne pas alourdir les programmes d’enseignement et maintenir l’objectif de la meilleure acquisition des enseignements fondamentaux pour tous les élèves. Dans le cadre de l’étude d’impact, avez‑vous d’ailleurs interrogé les enseignants et le ministère de l’éducation nationale afin de connaître leur avis ?

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Vous voulez supprimer l’article 2 alors qu’il est très important puisqu’il consacre l’éducation à l’environnement et au développement durable, déjà déployé dans certains établissements. Il s’agit ici de le reconnaître et de l’encadrer – nous y reviendrons dans la suite de la discussion. Je suis évidemment défavorable à votre amendement.

Mme Barbara Pompili, ministre. Nous souhaitons simplement mieux organiser les enseignements relatifs au développement durable, pour beaucoup déjà dispensés dans de nombreux établissements.

Je ne suis pas d’accord avec vous, l’éducation au développement durable ne se limite pas à la SVT, qui est une matière. C’est un enseignement transversal puisque le développement durable touche tous les aspects de la vie en société.

M. Jean-Marie Sermier. Mme la ministre n’a pas tort : l’éducation à l’environnement et au développement durable n’est pas forcément qu’une matière. Dès lors qu’il s’agit d’un enseignement transversal, qui touche l’ensemble des disciplines, il n’a pas à être précisé. Par définition, c’est un état d’esprit dont les enseignants doivent faire preuve lorsqu’ils enseignent d’autres matières, pour évoquer la sobriété, les limites des capacités de production de la Terre ou le réchauffement climatique.

L’amendement CS394 va donc dans le bon sens. Plus on spécialisera l’enseignement, moins on parviendra à une formation globale, à la vie. En supprimant l’article 2, on laisse libre cours aux enseignants pour enseigner les sciences de la vie, quelle que soit leur matière.

Mme Valérie Beauvais. Vous n’avez pas répondu à ma question sur l’étude d’impact auprès des enseignants. Que pense l’éducation nationale de l’article 2 ?

Mme Barbara Pompili, ministre. Nous posons des bases pour une meilleure organisation de l’enseignement à l’environnement et au développement durable, qui existe déjà. Pour nous y aider, nous avons missionné votre collègue Brune Poirson, en lien avec Jean-Michel Blanquer. Elle mènera des rencontres avec l’ensemble des acteurs, afin que l’application de la loi permette de dispenser cet enseignement le plus finement et le plus efficacement possible.

M. Vincent Descoeur. Nous avons déjà eu ce débat à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire. À chaque fois que l’on examine un texte, on a tendance à imaginer que les enseignements pourront éveiller les jeunes à ces problématiques. Ma collègue l’a dit, cela nécessite une relation étroite avec le ministère de l’éducation nationale. Au fil des textes, on confère de nouvelles obligations aux enseignants, sans s’inquiéter de savoir si l’éducation nationale s’intéresse à leur capacité d’accomplir la nouvelle mission que nous leur confions. Il faut considérer le principe de réalité : les enseignants ont déjà beaucoup à faire. Ils auront naturellement un rôle à jouer, mais cela passe par un débat approfondi avec le ministère de l’éducation nationale, pour s’assurer que les missions qu’ils ont à remplir sont compatibles avec la nouvelle mission que vous imaginez leur confier.

Mme Delphine Batho. Je ne comprends pas cet amendement de suppression. Beaucoup de choses sont faites ; de nombreux enseignants sont très mobilisés. Surtout, il y a une demande des élèves, de la jeunesse. Des lycéens, des étudiants « hallucinent » devant le caractère obsolète des programmes dispensés, qui n’accordent pas l’importance qu’il convient au changement climatique, ignorent les limites planétaires et vantent la croissance et la compétitivité économique, comme s’il n’y avait pas un envers du décor, pour ce qui concerne l’empreinte matières.

J’avais déposé une proposition de loi relative à la généralisation de l’enseignement des enjeux liés à la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et aux changements climatiques dans le cadre des limites planétaires. On peut ensuite faire confiance à la communauté enseignante sur la façon de déployer cet enseignement, mais sur le principe, il est nécessaire d’affirmer que la République française doit transmettre à tous les enfants non seulement la connaissance des valeurs de liberté, d’égalité, de fraternité, de laïcité, mais aussi des connaissances fondamentales sur les enjeux écologiques. Nous devrions au moins être tous d’accord sur ce point.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS209 de M. Richard Ramos.

M. Bruno Duvergé. L’amendement, inspiré par la Fédération des diabétiques du Loiret, vise à instituer une éducation à la santé, en complément de celle à l’environnement et au développement durable. L’éducation à la santé permettra aux élèves d’adopter des comportements vertueux, tant pour eux que pour la planète. Mettre en place une telle éducation contribuera à réduire l’impact des maladies chroniques, telles que le diabète, le type 2 étant lié aux comportements alimentaires et physiques, et le type 1 à la qualité de l’environnement. Les programmes scolaires doivent tenir compte de cette composante.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’amendement est satisfait car le code de l’éducation prévoit déjà l’enjeu de l’éducation à la santé. Il n’est pas utile de le préciser à nouveau. Demande de retrait.

Mme Barbara Pompili, ministre. L’article L. 541-1 du code de l’éducation précise en effet les enjeux de l’éducation à la santé auprès des élèves. Par ailleurs, il existe aussi un comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté, que le texte améliorera. Je vous suggère donc également de retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

Amendement CS4838 de Mme Sandrine Le Feur.

M. Yannick Kerlogot. Le présent amendement vise à spécifier l’objet de l’éducation à l’environnement et au développement durable. Il faut informer les citoyens sur les limites planétaires, et non pas, généralement, sur l’environnement, une discipline qui est intégrée depuis des années dans les programmes. La distinction est cruciale pour élaborer un contenu pédagogique adapté à l’état des connaissances scientifiques sur les dégradations environnementales et le dérèglement climatique. C’est également un préalable à la pleine compréhension de l’impact humain sur ces effets, et de l’ensemble de leurs implications sur la modification des modes de vie. L’expression « limites planétaires » a été largement discutée dans le cadre de la réforme constitutionnelle : si elle n’a pas sa place au sein de la Constitution, elle semble appropriée pour faire référence avec précision, indicateurs à la clé, à l’état des lieux environnemental et climatique.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Vous avez été nombreux à déposer des amendements à l’article 2 pour préciser la manière selon laquelle l’enseignement à l’environnement et au développement durable devrait être délivré. Bien que ces amendements fassent sens isolément, s’ils étaient tous adoptés, le texte ne gagnerait pas en clarté. Or ils sont satisfaits par le fait de créer une éducation à l’environnement et au développement durable dans le code de l’éducation, et de l’institutionnaliser. À de très rares exceptions près, je serai donc défavorable aux amendements, quel que soit le groupe auquel appartiennent leurs auteurs, car ces demandes d’ajouts ou de précisions nuisent à la clarté de la loi et qu’elles sont satisfaites par l’objet même de l’article 2. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Avis défavorable, pour les mêmes raisons. L’amendement alourdit la rédaction alors que, par essence, la protection de l’environnement intègre les limites que notre planète peut supporter. L’amendement est satisfait.

L’amendement est retiré.

Amendement CS1838 de M. Vincent Ledoux.

Mme Valérie Petit. L’amendement vise à ajouter les mots « à la consommation durable » à la première phrase de l’alinéa 2, après le mot « environnement ». Vous direz qu’il s’agit d’une précision inutile et que notre rôle n’est pas de définir le programme à la place des enseignants. Il importe toutefois d’éduquer à l’environnement et au développement durable, tout en faisant le lien avec les pratiques quotidiennes des élèves, notamment le fait de consommer.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Même remarque que précédemment. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Il est inutile d’ajouter ce point. Même avis.

La commission rejette l’amendement.

 

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