Compte rendu

Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi portant lutte
contre le dérèglement climatique
et renforcement de la résilience
face à ses effets

– Suite de l’examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (n° 3875 rect.) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, M. Damien Adam, M. Erwan Balanant, Mme Aurore Bergé, M. Lionel Causse, Mme Célia de Lavergne, Mme Cendra Motin, M. Mickaël Nogal et M. Jean-Marc Zulesi, rapporteurs)              2


Mercredi
10 mars 2021

Séance de 14 heures 30

Compte rendu n° 18

session ordinaire de 2020-2021

Présidence de
Mme Laurence Maillart‑Méhaignerie,
Présidente

 


  1 

La commission spéciale poursuit l’examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (n° 3875 rect.) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, M. Damien Adam, M. Erwan Balanant, Mme Aurore Bergé, M. Lionel Causse, Mme Célia de Lavergne, Mme Cendra Motin, M. Mickaël Nogal et M. Jean-Marc Zulesi, rapporteurs).

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Mes chers collègues, nous reprenons l’examen des articles du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

 

Article 2 (suite) (articles L. 121-8 [nouveau] et L. 312-9 du code de l’éducation) : Éducation à l’environnement et au développement durable

 

Amendements CS240 et CS249 de Mme Claire Pitollat (discussion commune).

Mme Claire Pitollat. Nous proposons que l’éducation à l’environnement et au développement durable concerne également la santé environnementale. Cette notion est importante, comme le montre l’ampleur du quatrième plan national santé environnement (PNSE4) – ce n’est pas notre collègue Élisabeth Toutut-Picard, présidente du groupe santé environnement (GSE), qui me contredira. C’est parce que nous donnerons à nos enfants les clés de lecture sur les risques environnementaux qui pèsent sur leur santé qu’ils pourront demain faire le choix de préserver l’environnement, et leur santé.

Mme Aurore Bergé, rapporteure pour le titre Ier. Comme je l’ai précisé hier, l’éducation à la santé fait partie intégrante des missions fondamentales de service public. Les amendements étant satisfaits, j’en demande le retrait.

Mme Claire Pitollat. L’éducation à la santé, que nous appelons régulièrement à renforcer en commission des affaires sociales, est une chose ; l’éducation à la santé environnementale en est une autre. Selon l’organisation mondiale de la santé (OMS), notre santé dépend à 70 % de l’environnement. Il est indispensable d’éveiller nos enfants aux impacts de l’environnement sur notre santé – c’est l’un des objectifs du PNSE4.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements CS530 de Mme Delphine Batho et CS610 de M. Bertrand Bouyx (discussion commune).

Mme Delphine Batho. Cet amendement s’inspire des termes de la proposition de loi que j’ai déposée et qui a été cosignée par des collègues de tous bords – notamment Cédric Villani et Matthieu Orphelin – relative à la généralisation de l’enseignement des enjeux liés à la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et aux changements climatiques dans le cadre des limites planétaires.

La notion d’« éducation au développement durable » est inappropriée. Sur le fond, la notion de développement durable ne correspond plus à l’état des connaissances scientifiques sur les limites planétaires, qui sont au nombre de neuf. Je rappelle que la France en dépasse six : concentration de CO2 dans l’atmosphère ; érosion de la biodiversité ; perturbation du cycle de l’azote et du phosphore ; changement d’utilisation des sols ; acidification des océans et utilisation de l’eau potable.

Il est essentiel que les termes de « diversité biologique », de « changement climatique » et de « limites planétaires » figurent dans cet article du code de l’éducation.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Le code de l’éducation prévoira désormais la possibilité de dispenser une éducation à l’environnement et au développement durable. Il est précisé que les élèves pourront ainsi maîtriser les enjeux, notamment ceux portant sur le changement climatique et la préservation de la biodiversité.

Je considère que ces amendements sont satisfaits par cette nouvelle opportunité et qu’en ajoutant de nouveaux objectifs, ils feraient perdre sa lisibilité à l’article. Il en va de même pour les suivants. Aussi serai-je cohérente et émettrai par la suite une demande de retrait ou un avis systématiquement défavorable – à de très rares exceptions près – aux amendements de même nature.

Mme Delphine Batho. Là encore, nous sommes en désaccord. La notion de développement durable, outre qu’elle est ancienne et dépassée par les connaissances scientifiques sur les limites planétaires, intègre l’économie, le social et l’environnemental. Or il s’agit ici de renforcer l’éducation aux enjeux écologiques du siècle que sont le changement climatique, l’effondrement de la biodiversité, la raréfaction des ressources et la santé environnementale ! Votre position est purement idéologique et anachronique : vous choisissez de ne pas vouloir nommer les choses, de ne pas les inscrire dans le code de l’environnement, en restant arrimée au mythe de la croissance.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements identiques CS270 de M. Martial Saddier, CS272 de Mme Souad Zitouni, CS1380 de M. Mohamed Laqhila, CS1719 de M. Gérard Leseul, CS1903 de M. Dominique Potier, CS2144 de Mme Laurence Trastour-Isnart, CS2486 de M. Pierre Venteau, CS3589 de Mme Sylvie Charrière, et amendement CS3687 de Mme Fabienne Colboc (discussion commune).

M. Martial Saddier. Cet amendement offre à la rapporteure l’occasion de déroger au principe qu’elle s’est fixé… Nous proposons en effet d’intégrer un objectif de sensibilisation et d’éducation à la consommation responsable et équitable, dans l’esprit voulu par Mme Bergé et la majorité.

Mme Souad Zitouni. Il est important de prévoir une éducation à la consommation responsable et équitable. Cet amendement a été discuté avec Commerce Équitable France.

M. Dominique Potier. Cet appel à l’éducation à une consommation responsable et équitable est le pendant de la régulation sur la publicité. Il faut faire émerger des citoyens consommateurs libres, épargnants et peut-être collaborateurs d’entreprises de commerce équitable.

M. Pierre Vatin. Il s’agit de sensibiliser les élèves et d’apprendre à ces futurs consommateurs le libre arbitre, la possibilité d’évaluer par soi-même.

Mme Sylvie Charrière. Oui, il convient de placer les enjeux de la consommation responsable et équitable au cœur des valeurs que l’école doit transmettre. L’amendement CS3687 de Mme Colboc ne retient que l’éducation à une consommation responsable.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Ces amendements sont satisfaits puisqu’il est précisé à l’article 2 que cette éducation vise à permettre aux élèves de comprendre les enjeux économiques du développement durable. J’en demande le retrait.

Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique. La consommation responsable et équitable, un enjeu essentiel, est déjà intégrée à l’éducation au développement durable. Je rappelle aussi que dans l’agenda 2030 adopté en 2015 par les États membres de l’ONU, elle fait l’objet de l’ODD 12 (objectif de développement durable) – consommation et production responsable – et de l’ODD 8 – travail décent et croissance économique. Ces amendements étant satisfaits, j’en demande le retrait.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement CS3050 de Mme Catherine Osson.

Mme Véronique Riotton. Notre collègue Catherine Osson, qui a remis avec André Chassaigne un rapport d’information sur la sécurité alimentaire dans l’Union européenne, propose que l’éducation à l’alimentation soit une composante de l’éducation à l’environnement et qu’elle soit ainsi inscrite dans le code de l’éducation.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’éducation à l’environnement et au développement durable comprend évidemment l’éducation à l’alimentation. Retrait.

L’amendement est retiré.

 

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette l’amendement CS505 de M. Jacques Marilossian.

 

Amendement CS213 de Mme Souad Zitouni.

Mme Souad Zitouni. Je propose de substituer aux mots « permet aux élèves de comprendre » les mots : « inculque aux élèves ». Inculquer, c’est enseigner de façon durable. La loi ne doit pas seulement permettre la compréhension des enjeux environnementaux mais aussi en rappeler les enjeux, l’urgence et les moyens d’agir. L’école est à la fois un pilier et un moteur ; il s’agit de consolider cet enseignement.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Nous avons évoqué le libre arbitre ; il est préférable que l’école permette aux élèves de faire leurs choix de façon éclairée. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Je comprends ce que vous voulez dire, mais « inculquer » suppose une vision descendante, alors que les enfants ont besoin de s’approprier les connaissances. Retrait.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CS4423 de M. Gabriel Serville.

M. Hubert Wulfranc. Nos collègues Gabriel Serville et Moetai Brotherson proposent de préciser que les enjeux environnementaux sont territoriaux. Ils entendent ainsi souligner que la transmission des connaissances, certes à l’échelle planétaire, se décline selon le territoire où l’on vit. Les approches sont différentes selon que l’on habite en ville, à la campagne ou aux abords de la forêt primaire ; les élèves ont besoin de partir du réel.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’éducation aux enjeux environnementaux, économiques et sociaux et à la préservation de la biodiversité ne peut que prendre en compte les réalités territoriales. Retrait.

Mme Barbara Pompili, ministre. L’environnement sans les territoires, cela n’a aucun sens. Vous proposez d’inscrire dans la loi une forme de pléonasme... Même avis.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS1096 de Mme Élisabeth Toutut-Picard.

Mme Élisabeth Toutut-Picard. Cet amendement rédactionnel vise à insérer le mot « sanitaires » après le mot « environnementaux ». Les liens entre santé et environnement sont confirmés, il ne s’agit plus de simples hypothèses scientifiques, et la question de la santé environnementale est devenue un enjeu sanitaire planétaire.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. C’est plus qu’un amendement rédactionnel !

Mme Élisabeth Toutut-Picard. Dieu sait que les occasions de parler de santé environnementale se font rares, Madame la présidente !

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je connais votre engagement et je comprends que vous ayez déposé des amendements pour rappeler l’importance de la santé environnementale. Je considère néanmoins que cet amendement est satisfait et qu’il est inutile d’enrichir encore cet article. Inscrire l’éducation à l’environnement et au développement durable dans le code de l’éducation constitue déjà une grande avancée, que nous pouvons saluer.

Mme Barbara Pompili, ministre. La santé environnementale est l’un des sujets des années à venir et la pandémie de covid montre malheureusement à quel point santé et environnement sont liés. Paradoxalement, en insérant le terme « sanitaires », vous le déconnectez du reste. Ce que je souhaite, c’est que l’on ne fasse plus la différence et que lorsque l’on parle de développement durable, cela comprenne la santé. Retrait.

Mme Élisabeth Toutut-Picard. C’est effectivement un paradoxe, mais pouvons-nous être certains que cet enseignement fera le lien entre environnement et santé ? L’une des difficultés mises en lumière par le PNSE4 tient au fait que ces deux domaines ne dialoguent guère. Je retire l’amendement, mais je veillerai à ce que la santé environnementale soit mentionnée ailleurs.

L’amendement est retiré.

 

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette l’amendement CS4117 de Mme Béatrice Piron.

 

Amendement CS539 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Il convient de substituer aux mots « développement durable » les mots « transition écologique », sans quoi nous resterons dans une forme d’ignorance. L’éducation nationale doit déployer des contenus qui correspondent aux connaissances scientifiques actuelles.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Amendement satisfait. Avis défavorable.

Mme Delphine Batho. Pardon, il n’est pas satisfait ! Je ne comprends pas pourquoi vous refusez d’inscrire dans la loi les termes « transition écologique », qui figurent pourtant à de très nombreuses reprises dans le code de l’environnement. Pourquoi êtes-vous arc-boutés sur la notion de « développement durable » ? Que cela signifie-t-il ?

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS3686 de Mme Fabienne Colboc.

Mme Sylvie Charrière. Il est important que l’éducation à l’environnement et au développement durable s’appuie sur les 17 ODD adoptés par les Nations unies en 2015.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. La France était signataire de l’agenda 2030 et les ODD seront pleinement inclus dans cet enseignement. Retrait.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS216 de Mme Souad Zitouni.

Mme Souad Zitouni. L’enseignement relatif aux enjeux environnementaux doit tenir compte de la capacité de l’enfant à comprendre, à intégrer progressivement ces enjeux afin qu’il puisse à terme, de façon éclairée et consentie, déterminer sa propre opinion. Nous proposons de préciser que l’enseignement se poursuit dans le secondaire.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Vous avez raison, il faut une continuité pédagogique. Je vous demande de retirer votre amendement dans la mesure où l’article 2 prévoit que l’éducation à l’environnement et au développement durable « est dispensée tout au long de la formation scolaire, d’une façon adaptée à chaque niveau et à chaque spécialisation ».

L’amendement est retiré.

 

Amendement CS3781 de Mme Valérie Petit.

M. Antoine Herth. Je le retire au profit de l’amendement suivant.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CS3778 de Mme Valérie Petit.

M. Antoine Herth. Il s’agit d’ajouter une dimension particulière à l’éducation à l’environnement et au développement durable en prévoyant que les élèves seront sensibilisés à la préservation et à la restauration de la biodiversité.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’article 2 mentionne les enjeux portant sur la préservation de la biodiversité. Je considère cet amendement comme satisfait. Retrait.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS3661 de Mme Yolaine de Courson.

Mme Frédérique Tuffnell. L’éducation à l’environnement et au développement durable doit permettre aux élèves – les décideurs de demain – de s’initier à l’étude systémique de l’interdépendance entre santé humaine, animale et environnementale à travers la sensibilisation à l’approche pluridisciplinaire « une seule santé ».

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’article L.121-4-1 du code de l’éducation porte sur les questions de santé. Retrait.

Mme Barbara Pompili, ministre. Cette demande a aussi été formulée par Mme Toutut-Picard, elle est satisfaite. Les détails figureront dans les textes réglementaires. Je vous assure, Madame la députée, que l’approche « une seule santé » irriguera ce texte.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS3685 de Mme Fabienne Colboc.

Mme Sylvie Charrière. Il est proposé d’étendre la portée de cet article à la première année d’enseignement supérieur.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Comme je l’ai précisé à Souad Zitouni, il est prévu que l’éducation à l’environnement et au développement durable soit dispensée tout au long de la scolarité. Retrait.

L’amendement est retiré.

 

Amendements CS4806 et CS5042 de Mme Sira Sylla.

Mme Huguette Tiegna. L’éducation à l’environnement et au développement durable nécessite une mobilisation renforcée des équipes pédagogiques des écoles et des établissements. Elle doit être inclusive et prendre en compte les spécificités des élèves, notamment ceux en situation de handicap. Elle doit également être adaptée aux enjeux de l’éducation prioritaire.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Il va de soi que l’éducation doit être inclusive – nous n’avons eu de cesse de renforcer cette dimension depuis 2017. Par ailleurs, l’article couvre l’ensemble du champ de l’éducation nationale ; évoquer l’éducation prioritaire laisserait penser qu’elle pourrait ne pas être concernée. Je suggère le retrait de ces amendements.

Mme Barbara Pompili, ministre. Lorsque j’étais députée, j’ai remis un rapport sur l’école inclusive – autant vous dire que ce sujet me tient à cœur. Préciser que l’éducation à l’environnement et au développement durable est inclusive serait une erreur puisque cela donnerait l’impression que seul cet enseignement est concerné. Je partage l’avis de la rapporteure sur le second amendement.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette l’amendement CS4424 de M. Gabriel Serville.

 

Amendement CS529 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Nous avons en France une conception de l’enseignement très académique, théorique. Or l’éducation à l’environnement doit passer par la pratique, les sensations, les émotions, la conscience de notre interdépendance. Elle doit transmettre les connaissances scientifiques, mais aussi s’appuyer sur la relation à la nature, dont beaucoup d’enfants sont privés.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je partage votre point de vue mais je ne pense pas nécessaire de préciser à la communauté enseignante comment organiser cette éducation. Les enseignants, qui tiennent à leur liberté pédagogique, s’appuient déjà sur la pratique. Retrait.

Mme Barbara Pompili, ministre. Lorsque l’on se rend dans les écoles qui dispensent déjà l’éducation au développement durable, on voit bien que cela passe par la pratique, le terrain – il est fort rare que les enfants restent assis devant le tableau noir ! Votre amendement, de portée générale, est satisfait. Néanmoins, je serai favorable à un amendement ultérieur de Mme Charrière qui apporte une précision utile.

Mme Delphine Batho. Le propos n’est pas de dire que les enseignants transmettent les connaissances de façon théorique ; au contraire, ils ont besoin que leurs pratiques pédagogiques, fondées sur l’expérimentation, soient reconnues et encouragées par l’éducation nationale. Je présenterai un autre amendement sur ce sujet.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS3044 de M. Fabien Lainé.

M. Bruno Duvergé. L’éducation à l’environnement et au développement durable doit inclure l’apprentissage de compétences techniques. Celles-ci sont essentielles pour mener un mode de vie plus respectueux de l’environnement. L’apprentissage de la cuisine, de la réparation, de la saisonnalité des aliments ou encore l’éducation physique en pleine nature seront ainsi encouragés.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je vous suggère de retirer cet amendement au profit de l’amendement C4710 de Mme Charrière, qui vise à préciser que les élèves devront maîtriser des savoir-faire.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS1024 de M. Loïc Dombreval.

Mme Sandrine Le Feur. Il est proposé de qualifier ces enjeux d’« éthiques ».

Mme Aurore Bergé, rapporteure. La dimension éthique est naturellement présente dans l’éducation à l’environnement et au développement durable. Retrait.

Mme Barbara Pompili, ministre. Le respect du vivant est une notion abordée dans le cadre de l’éducation morale et civique. Par ailleurs, l’éducation nationale est en train de nouer plusieurs partenariats, avec la Société protectrice des animaux (SPA) et le ministère de l’alimentation et de l’agriculture notamment. Cet objectif est donc déjà mis en œuvre.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CS4710 de Mme Sylvie Charrière.

Mme Sylvie Charrière. Depuis le 1er janvier 2021, les fabricants de lave-linge, de smartphones, d’ordinateurs portables et de téléviseurs doivent calculer l’indice de réparabilité et le communiquer aux distributeurs afin qu’il figure sur le produit, en magasin ou en ligne.

Cet amendement du groupe LaREM vise à sensibiliser les jeunes à cet indice. Surtout, ils doivent acquérir des compétences et des habiletés manuelles pour réparer certains objets grâce à des savoir-faire spécifiques, développés tout au long du parcours éducatif.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’amendement permet de répondre aux précédents qui portaient sur les savoir-faire et la pratique. Il va dans le sens de la revalorisation des filières professionnelles d’apprentissage. Avis favorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Il permet de dépasser la question des compétences théoriques et pratiques en insérant la notion de savoir-faire, absente de l’article. Cet enrichissement est bienvenu.

Mme Delphine Batho. Chacun aura compris que lorsque la majorité propose un amendement, il a vocation à enrichir le texte… Je partage l’intention mais la rédaction me semble poser un problème légistique. Aux termes de l’article, les élèves devront « maîtriser ces enjeux et ces savoir-faire ». Autant on sait que ce que sont les enjeux – environnementaux, sociaux et économiques – autant on ignore ce que sont, au juste, ces savoir-faire.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CS4225 de la rapporteure.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Amendement rédactionnel.

Mme Barbara Pompili, ministre. Ce n’est pas tout à fait un amendement rédactionnel, Madame la rapporteure. Vous proposez de remplacer la notion de « changement climatique » par celle de « dérèglement climatique » qui, même si elle suppose l’existence d’un impact de l’activité humaine sur le climat, diffère quelque peu. L’éducation au développement durable s’appuie sur les ODD de l’agenda 2030, dont le treizième s’intitule « lutte contre les changements climatiques ». Par parallélisme, le Gouvernement préfère user de la même notion. Je m’en remets à la sagesse de votre assemblée.

Mme Delphine Batho. Je suis radicalement opposée à cet amendement, tout comme je suis opposée à ce que la notion de « dérèglement climatique » figure dans le titre du projet de loi – ce que le Haut Conseil pour le climat a dénoncé dans son avis. Je rappelle que le climat n’a jamais été réglé ! Les notions utilisées aujourd’hui par la communauté scientifique internationale, dans tous les documents internationaux et dans l’accord de Paris, sont « changement climatique » ou « réchauffement climatique ». Je ne comprends pas le sens de cet amendement ! C’est un débat que nous aurons de nouveau lors de l’examen du titre.

La commission rejette l’amendement.

 

M. Bruno Millienne. Madame la présidente, vous nous avez demandé de voter à trois reprises. L’avis de la ministre était pourtant clair, nous avons été cohérents et nous avons rejeté l’amendement. Je demande que l’on ne refasse pas systématiquement les votes lorsque leur résultat n’arrange pas la majorité – à laquelle j’appartiens pourtant.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Je n’ai pas refait le vote, je n’ai simplement pas pu compter les voix.

 

Amendements CS2309 de M. Gérard Leseul, CS532 de Mme Delphine Batho, CS2956 de M. Éric Alauzet et CS2524 de M. Jean-François Mbaye (discussion commune).

Mme Chantal Jourdan. Nous proposons d’intégrer dans l’éducation à l’environnement l’étude des limites planétaires, une notion particulièrement structurante.

Mme Delphine Batho. En cohérence avec l’amendement CS530, je propose que les élèves puissent maîtriser les enjeux portant sur le changement climatique, la préservation de la biodiversité et la sobriété dans l’usage des ressources dans le cadre des limites planétaires.

Mme Véronique Riotton. L’amendement CS2956 vise à introduire dans l’article 2 la préservation de la biodiversité, des ressources et de la santé.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Les amendements sont satisfaits par l’article 2 tel qu’il est rédigé. Demande de retrait ou avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette successivement les amendements CS451 de M. Pierre Vatin et CS1032 de M. Loïc Dombreval.

 

Amendements identiques CS275 de M. Martial Saddier, CS460 de M. Pierre Vatin et CS1583 de Mme Paula Forteza.

M. Vincent Descoeur. Il s’agit de promouvoir l’éducation aux pratiques de sobriété numérique, ce qui nous semble important pour nos élèves.

M. Pierre Vatin. J’ajoute que l’éducation à la sobriété numérique permet de limiter l’impact carbone.

Mme Delphine Batho. Ces amendements permettent de revenir sur plusieurs aspects évoqués précédemment, notamment la santé environnementale et la formation pratique. Compte tenu du développement des usages du numérique dans l’éducation, il nous semble essentiel d’assurer une transmission des connaissances de base en matière de sobriété numérique.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Ces amendements visent à introduire dans le texte un élément qui ne figure pas dans la rédaction initiale de l’article 2. Je suggère leur retrait au profit de l’amendement CS2817, que nous examinerons ultérieurement. Issu d’une préconisation du Parlement des enfants, à laquelle il ne me semble pas aberrant de faire droit, il reprend ces enjeux en leur donnant une portée plus large et en les décrivant plus précisément.

Mme Barbara Pompili, ministre. Le sujet abordé par ces amendements est important. Toutefois, il ne semble pas opportun de citer nommément tous les enjeux liés à l’environnement et au développement durable, car cela aurait pour effet d’établir une hiérarchie malvenue. Avis défavorable.

M. Jean-Marie Sermier. La question des pollutions numériques n’est quasiment pas abordée dans ce texte de loi. Ces amendements offrent l’occasion de le faire d’une façon formelle. Par ailleurs, ils sont bien placés dans le texte : les jeunes générations sont en effet plus consommatrices de numérique que les autres, et elles nous demandent, à raison, de prendre les mesures qui s’imposent pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Les dispositions proposées permettent aux jeunes générations, qui sont ouvertes aux technologies et sensibles à la cause environnementale, de faire le lien entre les deux.

Madame la rapporteure, vous affirmez qu’ils sont mal placés, et suggérez leur retrait au profit d’un autre dont nul ne doute qu’il est issu de vos rangs. Donnez à l’opposition constructive que nous sommes la satisfaction de voir ses arguments retenus dès lors qu’ils sont identiques aux vôtres !

La commission rejette les amendements.

 

L’amendement CS3590 de Mme Sylvie Charrière est retiré.

 

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette l’amendement CS4916 de Mme Sira Sylla.

 

Amendements identiques CS1250 de Mme Maina Sage et CS3529 de M. Jimmy Pahun.

M. Antoine Herth. Mme la ministre a rappelé que le concept de biodiversité figure dans le texte proposé par le Gouvernement. Notre amendement vise à en préciser les contours, en accolant au mot « biodiversité » les mots « terrestre et marine ». Si la superficie terrestre de la France est inférieure à 1 million de kilomètres carrés, notre pays se classe deuxième pour la surface maritime, avec plus de 10 millions de kilomètres carrés. Il nous semble important de rappeler que la France héberge davantage de biodiversité en mer que sur terre.

M. Jimmy Pahun. Il s’agit de favoriser l’appropriation des notions relatives au développement durable que Mme la ministre appelle de ses vœux. Il ne faut pas oublier le rôle des océans dans le changement climatique, comme en témoignent les difficultés induites par la modification du Gulf Stream et l’importance du plancton dans le maintien de la biodiversité. Si le mot « marine » ne figure pas dans le texte, cette dimension sera laissée de côté. Je suis très heureux de présenter un amendement identique à celui déposé par notre collègue d’outre-mer.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. En raison de l’importance qu’attachent nos collègues ultramarins à ces amendements, j’émets un avis de sagesse.

Mme Barbara Pompili, ministre. Il est clair que la préservation de la biodiversité prévue à l’article 2 englobe la biodiversité terrestre et marine. Ces amendements tendent donc à alourdir le texte du point de vue légistique. Toutefois, consciente de leur portée symbolique pour les élus ultramarins, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

La commission adopte les amendements.

 

Amendements CS2951 de M. Serge Letchimy et CS2381 de Mme Justine Benin (discussion commune).

M. Jean-Louis Bricout. Il s’agit de porter une attention particulière aux territoires ultramarins en adoptant une approche territoriale. L’objectif est de réserver une place importante aux enjeux ultramarins dans l’éducation à l’environnement et au développement durable. Je rappelle que les territoires d’outre-mer représentent 80 % de la biodiversité française, et qu’ils abritent une faune et une flore au caractère exceptionnel.

M. Bruno Millienne. L’amendement CS2381 vise le même objectif que les amendements identiques adoptés précédemment et l’amendement défendu par M. Jean-Louis Bricout. Nous sommes conscients que l’amendement est satisfait par le texte, mais il serait bon d’y insister aux yeux de nos collègues ultramarins.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Puisque cette précision, qui est redondante avec le texte, est importante aux yeux de nos collègues ultramarins, j’émets un avis de sagesse sur l’amendement CS2381, dont la rédaction permet d’éviter la répétition de l’adverbe « notamment ». Je suggère le retrait de l’amendement CS2951 et émets à défaut un avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Même avis. Notre préférence pour l’amendement CS2381 découle exclusivement d’une raison de forme, indépendante de leurs auteurs respectifs, tous deux admirables et respectables.

La commission rejette l’amendement CS2951 et adopte l’amendement CS2381.

 

Amendement CS3086 de M. Philippe Naillet.

M. Jean-Louis Bricout. Il vise à préciser que l’éducation à l’environnement et au développement durable inclut la sensibilisation aux impacts de la consommation des Français sur les enfants des autres pays. Certains produits destinés à la consommation des enfants sont conçus à l’étranger ou à partir de ressources issues de l’étranger, ce qui n’est pas sans conséquences sur l’environnement des pays concernés et sur la scolarisation des enfants.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Cette précision est incluse dans l’apprentissage des enjeux sociaux du développement durable, qui figurent à l’article 2. L’amendement est satisfait. J’en suggère le retrait et émets à défaut un avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Je rappelle que l’éducation à l’environnement et au développement durable est fondée sur les objectifs de développement durable (ODD), notamment l’ODD 1 « Pas de pauvreté », l’ODD 2 « Faim "zéro" », l’ODD 4 « Éducation de qualité », l’ODD 8 « Travail décent et croissance économique », l’ODD 10 « Inégalités réduites » et l’ODD 12 « Consommation et production responsables ». L’amendement est donc satisfait. Par ailleurs, je ne suis pas certaine qu’une pédagogie reposant sur la culpabilisation des élèves soit une bonne façon de poser le problème de la surconsommation, mais nous pourrons en débattre ultérieurement.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS1364 de M. Sylvain Templier.

M. Sylvain Templier. Cet amendement vise à préciser les responsabilités de citoyen auxquelles il s’agit de préparer les élèves. Il semble intéressant d’indiquer qu’elles incluent, en matière de protection de l’environnement, des droits et des devoirs. La Charte de l’environnement comporte plusieurs articles en ce sens. L’article 2 dispose : « Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement ». L’article 4 dispose : « Toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à l’environnement, dans les conditions définies par la loi ». L’article 8 dispose : « L’éducation et la formation à l’environnement doivent contribuer à l’exercice des droits et devoirs définis par la présente Charte ». Il paraît donc cohérent de relier la notion de responsabilité de citoyen aux dispositions du bloc constitutionnel, tout en consacrant dans la loi l’importance éducative de la Charte de l’environnement.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Tel qu’il est rédigé, l’article prévoit d’éduquer les élèves à la préservation de la biodiversité. Il répond donc à votre légitime préoccupation. Sa rédaction, volontairement générale et globale, ne peut tout préciser. Je suggère le retrait de l’amendement et émets à défaut un avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. L’amendement part d’une bonne intention. Il est fondé sur la Charte de l’environnement et vise à substituer aux mots « et de les préparer à l’exercice de leurs responsabilités de citoyen » les mots « et vise à enseigner aux élèves leurs droits et devoirs en matière de protection de l’environnement, notamment ceux mentionnés par la Charte de l’environnement ». Si une telle précision semble utile, elle fait disparaître les notions de responsabilité et de citoyenneté, ce qui est dommage. En outre, elle ne porte que sur la protection de l’environnement, qui n’est pas le seul enjeu du développement durable. Je suggère le retrait de l’amendement et émets à défaut un avis défavorable.

L’amendement est retiré.

 

Amendements identiques CS436 de M. Pierre Vatin, CS3576 de Mme Nadia Ramassamy et CS3786 de Mme Valérie Petit, et amendement CS 914 de M. Paul-André Colombani (discussion commune).

M. Pierre Vatin. Il s’agit de favoriser la végétalisation du bâti dans les écoles, notamment en milieu urbain, et le contact quotidien des enfants avec la nature. Une classe de ma circonscription, dont les élèves ont participé au Parlement des enfants, a rédigé une proposition de loi en ce sens, sans avoir connaissance de ce dont nous parlons aujourd’hui.

Mme Jennifer De Temmerman. Je soutiens totalement l’article 2, d’autant plus que je travaille sur la question de l’éducation à l’environnement et au développement durable depuis 2017, avec Mme la ministre comme avec ses prédécesseurs. Toutefois, la question du financement me semble laissée de côté. Quiconque a été gestionnaire d’un établissement scolaire sait qu’on ne dispose pas de beaucoup d’argent en matière de pédagogie. Dans cet article, l’État ne s’engage guère à la financer. En fin de compte, ce sont les collectivités locales, une fois encore, qui la financeront. Il me semble donc important d’inscrire dans la loi la végétalisation du bâti scolaire. Même si son financement est à la charge des collectivités locales, cela obligera l’État à prendre sa part au financement de ces activités nécessaires. J’ai d’ailleurs déposé un amendement à ce sujet, dont je regrette qu’il ait été déclaré irrecevable.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. La disposition proposée constitue l’une des déclinaisons possibles de l’engagement pris à l’article 2. Elle n’est pas la seule. Par ailleurs, il ne me semble pas nécessaire de l’inscrire dans la loi. De nombreuses collectivités locales sont d’ores et déjà engagées sur les enjeux de végétalisation du bâti scolaire. Il ne nous incombe pas de leur dire ce qu’elles doivent faire, d’autant moins que nous appelons souvent au respect du principe de libre administration des collectivités territoriales. Au demeurant, elles jouent souvent un rôle précurseur. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Il s’agit d’un exemple parmi d’autres de réalisation susceptible de favoriser l’obtention du label « École/Établissement en démarche de développement durable » (E3D). Même s’il s’agit de projets formidables, réalisés par des équipes très volontaires, je ne suis pas certaine qu’inscrire dans la loi tel ou tel type de projet, ou en mettre en valeur certains et pas d’autres, rende service à l’éducation à l’environnement et au développement durable. En outre, la végétalisation du bâti ne doit pas être limitée aux écoles, mais s’étendre aux collectivités locales et à d’autres acteurs. Demande de retrait ou avis défavorable.

M. Pierre Vatin. En l’espèce, il est évident que l’État doit prendre sa part en matière de financement. S’agissant des collectivités locales, il existe de nombreuses lois leur imposant des dépenses dans les écoles. Celle que nous proposons me semble particulièrement pertinente.

M. Hubert Wulfranc. Il me semble que nous nous engageons dans des débats complètement théoriques. Mme la rapporteure et Mme la ministre ont raison de dire qu’il s’agit d’une déclinaison de l’éducation à l’environnement et au développement durable parmi d’autres.

Surtout, comme le rappelait un élu local ce midi à la télévision, les programmes de sécurisation de nos établissements scolaires, qui sont particulièrement d’actualité compte tenu de la situation prévalant dans certaines communes, ne sont pas achevés, tant s’en faut, parce que les subventions de l’État manquent, comme elles ont manqué à l’association pour l’insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées (LADAPT) pour faire en sorte que la fameuse école inclusive devienne une réalité à temps dans nos établissements scolaires, et comme tant de programmes annoncés à grands frais à l’échelle nationale ne se concrétisent pas en raison du manque de moyens de nos communes ! Cet exemple ne constitue ni un reproche ni un jugement de valeur, il a vocation à donner le ton.

Faisons preuve de réalisme et de pragmatisme sur nos capacités d’incitation des interlocuteurs de terrain qui, malheureusement, sont souvent privés des moyens de mettre en œuvre des préconisations comme celles qui sont proposées ici. Si les gamins arrivent à faire un petit jardin autour du seul arbre qu’ils ont dans leur cour et à y planter deux ou trois poireaux dans l’année, ce sera déjà bien !

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements CS1717 de Mme Chantal Jourdan et CS2817 de M. Pierre-Alain Raphan (discussion commune).

Mme Chantal Jourdan. Il s’agit de préciser que l’éducation à l’environnement et au développement durable inclut l’apprentissage des gestes d’écocitoyenneté, y compris en matière de sobriété numérique. Je rappelle que l’intensité énergétique de l’industrie numérique augmente, à l’échelle mondiale, de 4 % par an, et que l’utilisation massive des outils numériques n’est soumise à aucune approche critique.

Mme Claire Pitollat. Il s’agit de sensibiliser les enfants, dès l’école primaire, à un usage écoresponsable du numérique, en enrichissant la formation aux outils et ressources numériques dispensée dans les écoles d’une sensibilisation à l’impact environnemental du numérique, et à la sobriété numérique. L’amendement CS2817 est le fruit d’un travail mené par des enfants : il reprend l’article 2 de la proposition de loi lauréate du Parlement des enfants en 2019.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je suis favorable à l’introduction des enjeux de sobriété numérique dans l’article 2. L’ajout d’un alinéa prévoyant une formation spécifique, issu d’une recommandation du Parlement des enfants qui plus est, me semble de bon aloi. Je suggère donc le retrait de l’amendement CS1717 au profit de l’amendement CS2817, sur lequel je donne un avis favorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Même avis. Introduire la sensibilisation à la sobriété numérique dans un article relatif à la formation à l’utilisation des outils et des ressources numériques est une démarche qui présente du sens et de la cohérence.

L’amendement CS1717 est retiré.

 

La commission adopte l’amendement CS2817.

 

Amendement CS4929 de Mme Annie Vidal.

M. Stéphane Travert. Nous souhaitons introduire dans l’article 2 la sensibilisation des élèves aux modes de production et de consommation favorisant le développement durable, notamment le commerce équitable.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’amendement est satisfait. Les questions relatives aux modes de consommation et aux modèles de production sont incluses dans les enjeux économiques du développement durable, qui figurent dans l’article. Demande de retrait ou avis défavorable.

L’amendement est retiré.

 

Amendements CS5212 de la rapporteure et CS2427 de M. Raphaël Schellenberger (discussion commune).

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Il s’agit de préciser le cadre dans lequel seront organisés les contenus enseignés à nos élèves. Même si cela va sans dire, cela va mieux en le disant ! L’amendement vise à compléter l’alinéa 2 par la phrase suivante : « Le ministère en charge de l’éducation nationale garantit les contenus, les modalités et la cohérence du déploiement de l’éducation à l’environnement et au développement durable dans le cadre scolaire ». Plusieurs de nos collègues se demandent comment les enseignements concernés seront déployés. Cette clarification est donc bienvenue. Je suggère le retrait de l’amendement CS2427 au profit du mien.

Mme Barbara Pompili, ministre. Madame la rapporteure, cela va certainement mieux en le disant ! Je suis favorable à votre amendement et suggère le retrait de l’amendement CS2427, sur lequel j’émets à défaut un avis défavorable.

M. Vincent Descoeur. S’inquiéter de la capacité de l’éducation nationale à garantir les contenus enseignés me semble être une excellente idée. Chaque texte que nous examinons ou presque confie une nouvelle mission aux enseignants. Ils doivent sensibiliser les enfants à la lutte contre le gaspillage et aux gestes de tri sélectif, mais aussi à la laïcité.

Si tout cela doit être fait sans réviser les programmes, ou bien nous nous en tenons à un vœu pieux, ou bien nous manquons de respect aux enseignants, dont le temps de travail disponible est d’ores et déjà occupé. Il faut non seulement introduire dans le texte la notion de garantie, afin que l’éducation nationale s’assure que les programmes permettent aux enseignants, qui sont d’ailleurs très impliqués, à tous les niveaux, en matière d’éducation à l’environnement, d’appliquer les dispositions proposées, mais aussi faire en sorte qu’ils aient le temps nécessaire pour ce faire. À défaut, ou bien on leur manque de respect, ou bien on laisse penser que tout se décide entre deux réunions de cette assemblée.

Quand on prend ce genre de décision, il faut penser à ceux qui sont sur le terrain. Garantir les contenus est une bonne chose, s’assurer que les enseignants auront le temps de les dispenser est encore mieux.

L’amendement CS2427 est retiré.

 

La commission adopte l’amendement CS5212.

 

Amendement CS2659 de M. Sylvain Templier.

M. Sylvain Templier. Dans nos sociétés de plus en plus urbaines, il arrive que les jeunes générations n’aient plus aucun contact avec la nature. Cela provoque un mal-être, qui a été conceptualisé sous l’appellation de « syndrome du manque de nature », et que les dispositions sanitaires en vigueur accentuent fortement.

De nombreuses initiatives locales visent à reconnecter les enfants et les jeunes à la nature : classes de nature, colos, stages proposés par des structures très diverses et reconnus pour la qualité de l’immersion dans la nature proposée aux enfants. Tout au long de son parcours de formation, en complément des modules d’éducation à l’environnement et au développement durable, chaque enfant pourrait valider une expérience de trente jours en immersion dans la nature, ce qui lui permettrait d’être outillé pour mieux comprendre les défis du changement climatique. Cette durée est celle retenue dans la mesure 12 de la stratégie nationale des aires protégées 2030. Un tel « passeport nature » pourrait être valorisé et conférer des points supplémentaires, par exemple pour l’obtention d’un diplôme.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je comprends très bien l’initiative, semblable à d’autres prises dans certains territoires. Comme des initiatives connexes, telles que le passeport de la citoyenneté, elle ne relève pas cependant du domaine de la loi. Demande de retrait ou avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. L’idée d’un « passeport nature » est intéressante. Elle s’inspire d’expériences en cours. Au demeurant, les outils de l’éducation nationale, notamment le vade-mecum pour l’éducation au développement durable (EDD), permettent de procéder à un suivi du parcours de l’élève en matière d’éducation à l’environnement et au développement durable.

Plusieurs problèmes d’application se posent. Il faudrait disposer d’un outil de suivi sur plusieurs années. Cela posera certainement un problème d’équité sociale, car les élèves n’ont pas tous le même accès à des classes vertes et à des stages nature, et alourdira la charge financière de l’éducation nationale. Nous pouvons réfléchir aux dispositions proposées, mais hors du cadre de la loi. Je suggère le retrait de l’amendement et émets à défaut un avis défavorable.

M. Vincent Descoeur. L’intention de notre collègue est bonne, mais l’instauration d’un « passeport nature » obtenu en trente jours au cours d’une scolarité suppose de réviser les programmes, ou de scolariser ses enfants dans le Cantal afin qu’ils soient immergés dans la nature toute l’année. (Sourires.)

Mme Delphine Batho. Les propos de notre collègue sur le syndrome du manque de nature sont très justes. Être privé de toute relation à la nature, comme le sont de nombreux enfants, est une forme de déshumanisation, dont on sait qu’elle a des conséquences sanitaires graves. Je n’en citerai qu’une : l’augmentation spectaculaire, au cours des vingt dernières années, du nombre de cas de myopie, qui s’explique par une utilisation insuffisante de la vision de loin, et certainement aussi par l’exposition excessive aux écrans. Il en résulte des conséquences psychiques, s’agissant notamment des capacités de concentration. Je voterai l’amendement, non sans émettre une réserve : trente jours, à l’échelle d’une scolarité, ce n’est pas assez. Il faut que chaque enfant ait droit à une classe de nature par an.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS537 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Cet amendement vise à la reconnaissance des enseignements en plein air et sous forme de classe dehors comme partie intégrante de l’éducation à l’environnement et au développement durable. Il s’inspire d’un travail pédagogique mené notamment par Crystèle Ferjou, dans le département des Deux-Sèvres. Le contexte sanitaire provoqué par la pandémie lui a donné un écho accru. L’engouement qui en est résulté dans l’éducation nationale justifie la reconnaissance officielle de l’apport que constitue la possibilité de faire classe à l’extérieur, par exemple une fois par semaine. Bien entendu, des questions pratiques se posent, car il faut identifier les endroits propices, et des adaptations s’imposent.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Chère collègue, je vous renvoie à mes observations sur les enjeux théoriques et pratiques des connaissances qu’il s’agit de dispenser. Je considère que ce sujet relève de la liberté pédagogique des enseignants. Au demeurant, ils sont de plus en plus nombreux à tenter l’expérience. Il n’est pas nécessaire de la leur imposer. En outre, les dispositions proposées ne sont pas du domaine de la loi. Demande de retrait ou avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Les dispositions proposées sont des consignes pédagogiques, ce qui les exclut du domaine de la loi. Il s’agit d’une démarche qui se développe. Encouragée par l’institution, elle a même fait l’objet d’extensions hors temps scolaire à l’occasion des vacances apprenantes et de l’école ouverte buissonnière mises en œuvre l’été dernier. Nous avançons sur ces questions. Toutefois, elles doivent être traitées à un niveau infralégislatif, car elles dépendent aussi de la conception des séquences pédagogiques, en lien avec le contexte d’enseignement et les notions abordées par l’enseignant. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS4271 de Mme Barbara Bessot-Ballot.

Mme Nicole Le Peih. Il s’agit de compléter l’article 2 par un alinéa ainsi rédigé : « Sont notamment abordés les principes d’une alimentation durable et responsable, incluant la saisonnalité des produits consommés ». Il s’agit de rappeler explicitement qu’une alimentation durable, caractérisée notamment par la consommation de produits frais, locaux et de saison, est l’un des objets incontournables de l’éducation à l’environnement et au développement durable, en sus de l’éducation à la nutrition, abordée sous l’angle de l’éducation à la santé.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je vous sais très engagée sur les enjeux de l’alimentation. Ils font pleinement partie de l’article 2, où figurent les enjeux environnementaux, sociaux et économiques du développement durable. Je suggère le retrait de l’amendement, qui est satisfait.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CS909 de Mme Corinne Vignon.

M. Jean-Luc Fugit. Cet amendement vise à soutenir la sensibilisation des élèves à l’éthique animale. De nombreux experts – philosophes, chercheurs, juristes, vétérinaires, psychologues – soutiennent cette initiative.

Un tel enseignement permet d’apprendre aux enfants à considérer l’animal comme un individu doué de sensibilité, ayant des besoins biologiques et spécifiques. Il permet également de développer leur empathie à l’égard des animaux et de leurs pairs. De surcroît, les espèces animales, qu’elles soient terrestres ou aquatiques, sont des éléments essentiels de la biodiversité. Un tel enseignement a donc toute sa place dans la maîtrise des enjeux relatifs à la préservation de la biodiversité prévue à l’article 2. Par ailleurs, il offrirait l’occasion d’aborder la question du bien-être animal. Il faut soutenir et développer l’enseignement de l’éthique animale.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Vous connaissez ma sensibilité sur la question de la lutte contre la maltraitance animale, que je partage avec nos collègues Vignon, Rossi, Romeiro Dias, Cazebonne et O’Petit, cosignataires de l’amendement. Toutefois, je considère qu’il ne faut pas alourdir l’article 2. Les enjeux d’éthique animale trouveront leur place au sein de l’apprentissage de la biodiversité et de la lutte contre le changement climatique. Demande de retrait ou avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Je partage l’idée qu’il faut faire connaître la notion de bien-être animal et accompagner l’évolution des mentalités à ce sujet. J’ai pris plusieurs décisions à cette fin, il y a quelques mois. Toutefois, je considère, comme Mme la rapporteure, que l’article 2 répond à vos préoccupations, et que l’amendement est satisfait.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CS2952 de M. Serge Letchimy.

M. Jean-Louis Bricout. Il s’agit de porter une attention particulière aux territoires d’outre-mer, en réservant une place primordiale, dans l’éducation à l’environnement et au développement durable, aux enjeux locaux du changement climatique.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Nous avons adopté plusieurs amendements à l’article 2 visant à préciser le rôle essentiel des outre-mer dans l’éducation à l’environnement et au développement durable. Le présent amendement est satisfait par la rédaction qui en résulte. Demande de retrait ou avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Il était satisfait avant même l’adoption des amendements que vous évoquez, Madame la rapporteure. Il est donc doublement satisfait !

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS3950 de M. Alexandre Holroyd.

M. Alexandre Holroyd. Madame la ministre, la disposition proposée vous est familière : il s’agit de l’une des recommandations figurant dans le rapport intitulé « Choisir une finance verte au service de l’Accord de Paris », que je vous ai remis. Elle découle d’un constat partagé par la plupart des acteurs du secteur financier : les compétences permettant d’analyser les conséquences du changement climatique sur les activités financières manquent.

En gros, les gens qui collectent, agrègent et réinvestissent l’épargne présentent un défaut de formation. Ils échouent donc à faire en sorte que le secteur financier s’engage dans la transition écologique et la finance massivement. Or quel est le vivier au sein duquel recrute le secteur financier, qu’il soit privé ou public ? Les écoles de commerce et les écoles d’ingénieurs. L’amendement propose donc d’introduire dans leurs cursus la formation au financement de la transition écologique et aux enjeux liés à la finance durable.

Je suis conscient de ne pas vous soumettre, du point de vue légistique, le bateau ivre des amendements. Je m’attends à ce que vous m’expliquiez qu’il n’a pas sa place dans le texte. Toutefois, si vous me disiez que nous pouvons travailler ensemble sur ce sujet essentiel d’ici à l’examen du texte en séance publique, je vous en serais infiniment reconnaissant.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je vous invite à retirer l’amendement sinon j’émettrai un avis défavorable pour ne pas alourdir la rédaction du texte. Les établissements d’enseignement supérieur doivent conserver leur liberté pédagogique. Je suis certaine qu’ils ont lu votre excellent rapport et que vous saurez convaincre nos écoles de commerce de choisir une finance verte au service de l’Accord de Paris.

Mme Barbara Pompili, ministre. Votre excellent rapport traite d’un thème auquel je suis sensible. Le développement durable fait partie des objectifs et des missions du service public de l’enseignement supérieur. Ces enjeux mobilisent la jeunesse et il est important qu’ils aient toute leur place au sein des formations supérieures. C’est l’objet de la mission qui fut confiée au climatologue Jean Jouzel, l’année dernière. Cet amendement n’est pas le seul à concerner l’enseignement supérieur. Peut-être serait-il nécessaire d’y travailler ensemble avant la séance. Je vous invite à le retirer.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CS3087 de M. Philippe Naillet.

M. Guy Bricout. Cet amendement tend à ce que les conventions signées entre l’éducation nationale et les partenaires du monde professionnel soient rédigées en cohérence avec les objectifs de l’éducation à l’environnement.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Par essence, toutes les conventions doivent respecter la loi et s’y conformer. Retrait ou défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Qui plus est, l’adoption de l’amendement réduirait aux seules conventions qui y sont listées le respect de cette obligation, excluant ainsi toutes celles signées avec des associations, ou entre d’autres ministères et divers organismes d’expertise. Retrait ou défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS3702 de Mme Sophie Mette.

M. Bruno Duvergé. Cet amendement, travaillé avec l’association Climat’Optimistes, tend à apporter une reconnaissance à l’engagement des élèves et des étudiants. En effet, en 2019, plus de 200 000 jeunes ont manifesté en France leur volonté de répondre à l’urgence climatique, et nombre d’entre eux ont alors décidé de s’investir dans des mouvements ou des associations de jeunesse pour montrer qu’il est possible d’agir au quotidien pour un environnement sain. Toutefois, rares sont les universités qui considèrent l’engagement étudiant comme une partie structurante et intégrante de l’enseignement supérieur. Les dispositifs de reconnaissance de l’engagement étudiant gagneraient à être élargis à l’ensemble des universités, harmonisés à l’échelle nationale, et étendus aux écoles. La généralisation de l’attribution de points supplémentaires dans la moyenne générale des élèves et des étudiants inciterait davantage de jeunes Français à rejoindre des organisations engagées en faveur de l’environnement et du développement durable.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Autant je comprends la volonté d’inciter les jeunes à se mobiliser en faveur de l’environnement, autant cette reconnaissance ne saurait se traduire par l’attribution de points supplémentaires dans la moyenne. Il serait sans doute souhaitable de sensibiliser encore davantage les jeunes à cette cause dans l’enseignement supérieur mais je ne pense pas qu’il faille prendre des mesures aussi précises. Retrait ou défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Le sujet est intéressant et nous devons pouvoir proposer de nouvelles mesures. Des dispositifs existent mais ils diffèrent selon le public concerné. Un livret scolaire unique a été mis en place du primaire à la fin du collège. Le parcours citoyen s’adresse aux élèves du primaire au lycée. L’engagement des élèves est pris en compte par le jury lors de l’épreuve du baccalauréat. En revanche, il serait difficile d’appliquer les dispositions que vous proposez dans l’enseignement supérieur en raison de l’autonomie des établissements. Pour y parvenir, il faudrait en adapter les modalités aux différents cycles. Je vous invite par conséquent à retirer l’amendement.

L’amendement est retiré.

 

La commission adopte l’article 2 ainsi modifié.

 

Après l’article 2

 

Amendement CS336 de M. Guy Bricout.

M. Guy Bricout. Il s’agit de modifier le code de l’éducation pour insérer, après le mot « humains », à la deuxième phrase du deuxième alinéa de l’article L. 111-1, les mots « de l’environnement et des êtres vivants qui le composent ».

Nous voulons faire de la protection de l’environnement l’une des valeurs prioritaires à transmettre tout au long du parcours éducatif des élèves afin de les préparer aux problématiques auxquelles ils seront confrontés au cours de leur vie. Nous voulons également développer un nouveau rapport à l’environnement et enseigner la notion d’interdépendance entre les êtres humains et la biodiversité.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Votre préoccupation est satisfaite par l’article 2 que nous avons adopté. Je vous invite à le retirer sinon avis défavorable.

Mme Aude Luquet. Je voudrais élargir la proposition d’une formation au développement durable, de mon collègue Guy Bricout, à l’intégralité de la vie professionnelle sans la réserver au parcours éducatif des élèves. Nos modes de travail évoluent, comme en témoigne le développement du télétravail, la conception de nos bâtiments également. Nous avions déposé un amendement qui a été déclaré irrecevable. C’est pourquoi je me permets d’intervenir sur le sujet en vous proposant de modifier en ce sens l’article L 6111-2 du code du travail.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS938 de Mme Jennifer De Temmerman.

Mme Jennifer De Temmerman. Il s’agit d’afficher les objectifs de développement durable dans les établissements scolaires. Je vous invite à visiter le collège Vincent Van Gogh, à Blénod-lès-Pont-à-Mousson, très engagé en faveur du développement durable, et qui a affiché ces objectifs sur tous ses murs, ce qui marque fortement les élèves.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Il est encore plus important d’intégrer les enjeux de développement durable dans les contenus enseignés, ce qui est prévu par l’article 2 que nous venons d’adopter. Cela étant, de nombreux établissements et de nombreux enseignants sont suffisamment engagés pour décider de les afficher, s’ils le souhaitent. Je vous invite à le retirer sinon avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Le choix d’une affiche dans les écoles ne relève pas du domaine de la loi. Cela étant, l’idée d’afficher ces objectifs, comme le sont la charte de la laïcité ou les paroles de La Marseillaise, est plutôt bonne et serait, paraît-il, à l’étude au sein de l’éducation nationale.

Mme Jennifer De Temmerman. Dès lors qu’on a pu voter pour l’affichage des paroles de La Marseillaise ou la présence du drapeau français dans les écoles, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas voter pour l’affichage des objectifs de développement durable, qui sont tout aussi importants.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS259 de Mme Corinne Vignon.

M. Yannick Kerlogot. Il s’agit d’afficher dans les écoles une charte sur la préservation de la biodiversité, sur le modèle de la charte de la laïcité de 2013, afin d’apprendre aux enfants, dès leur plus jeune âge, les bons gestes. Cette charte, qui viserait à rappeler les règles pour préserver notre faune et notre flore, serait rédigée avec les acteurs compétents, les associations concernées, le ministère de l’éducation nationale et celui de la transition écologique et solidaire.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’amendement, là encore, est satisfait par l’article 2. Je vous invite à le retirer sinon avis défavorable.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CS936 de Mme Jennifer De Temmerman.

Mme Jennifer De Temmerman. Cet amendement découle de mon travail sur l’éducation au développement durable. Je vous propose, par ce nouvel article, d’entériner la présence de l’éducation à l’environnement et au développement durable dans le code de l’éducation.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Votre amendement est satisfait par l’adoption de l’article 2 qui prévoit de déployer l’éducation au développement durable tout au long de la scolarité, quels que soient le niveau ou les spécialités. Je vous invite à le retirer sinon avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Concernant l’enseignement secondaire et supérieur, nous y reviendrons pour la séance, comme je l’ai précisé à l’occasion d’autres amendements. Quant à votre souhait de sensibiliser les élèves au développement durable dès la maternelle, en cohérence avec l’instruction obligatoire dès 3 ans, je vous propose d’y travailler ensemble d’ici à la séance. En attendant, je vous invite à retirer l’amendement.

L’amendement est retiré.

 

Amendements identiques CS1741 de M. Gérard Leseul et CS3835 de M. Pierre Venteau.

Mme Chantal Jourdan. L’amendement vise à ajouter dans les principes généraux du code de l’éducation une mission de formation à la prise d’initiative et à la coconstruction de projets innovants en réponse aux grands enjeux de développement durable. Une telle mission aurait vocation à encourager les jeunes à coopérer avec une variété d’acteurs pour trouver et appliquer des solutions d’intérêt général, notamment en matière d’environnement.

M. Pierre Venteau. L’amendement a été élaboré en relation avec le collectif Nous sommes demain.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Les actions menées pour favoriser l’esprit d’équipe, notamment par l’activité physique et sportive, ou la prise d’initiatives, relèvent de la liberté pédagogique de nos enseignants. En revanche, il est important de faire référence, dans les programmes, aux enjeux d’éducation à l’environnement et au développement durable. Je vous invite à le retirer sinon avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

 

Amendement CS3663 de Mme Yolaine de Courson.

Mme Frédérique Tuffnell. Il s’agit d’adapter les formations à l’enjeu crucial du XXIe siècle que représente le rééquilibrage entre les protéines animales et les protéines végétales.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Cette disposition relève du domaine réglementaire. Je vous invite à le retirer sinon avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Cette thématique assez pointue est déjà intégrée dans l’éducation à la santé, en particulier l’éducation à l’alimentation. Elle est importante mais pas assez générale pour faire l’objet d’un article spécifique dans la partie législative du code. Je vous invite à retirer l’amendement.

La commission rejette l’amendement.

 

Suivant l’avis de la rapporteure, elle rejette l’amendement CS3664 de Mme Yolaine de Courson.

 

Amendements CS528 de Mme Delphine Batho, CS3943 de M. Alexandre Holroyd, CS335 de M. Guy Bricout, CS3817 de M. Damien Pichereau et CS3501 de M. Matthieu Orphelin (discussion commune).

M. Matthieu Orphelin. Je présenterai l’amendement de Mme Batho et le mien. Il s’agit d’ajouter dans les missions de l’enseignement supérieur l’apprentissage des enjeux liés à la préservation de l’environnement et de la biodiversité, aux changements climatiques et à la sobriété de consommation. Alors que l’amendement de Mme Batho vise à remplacer le terme de croissance par celui de sobriété dans le cadre des missions dévolues au service public de l’enseignement supérieur, parallèlement à la compétitivité de l’économie, j’intègre directement la notion de sobriété dans l’intitulé des missions.

L’enseignement supérieur évolue mais pas suffisamment. Selon l’enquête réalisée par le collectif Pour un réveil écologique, seules 11 % des formations du supérieur abordent les enjeux climatiques, 26 % des écoles d’ingénieurs ne proposent ni spécialisation ni master en lien avec la transition écologique, une université sur sept déclare avoir imposé un cours à tous les étudiants sur les crises écologiques, un tiers forme les professeurs aux enjeux de la transition.

Sans porter atteinte à la liberté académique, nous vous proposons simplement de donner un cadre aux missions de service public de l’enseignement supérieur, comme cela s’est déjà fait pour le développement de la recherche ou l’égalité entre les femmes et les hommes.

M. Alexandre Holroyd. Cet amendement de précision tend à introduire la thématique du financement de la transition écologique dans les objectifs et missions de l’enseignement supérieur. En effet, le financement de la transition nécessitera des capitaux énormes.

M. Thierry Benoit. L’amendement CS335 tend à ce que le service public de l’enseignement supérieur contribue à la protection de l’environnement et des limites planétaires. À cette fin, chaque formation devra aborder les enjeux environnementaux relatifs aux limites planétaires propres au domaine d’étude, notamment les impacts du secteur sur l’environnement et les opportunités d’évolution, afin de préparer les futurs professionnels à la transition écologique en leur donnant les outils et les connaissances nécessaires à l’évolution du domaine étudié.

J’en profite pour vous faire une remarque concernant le déroulement de nos travaux, que je suis parfois obligé de suivre depuis mon bureau. Vous nous avez demandés, Madame la présidente, hier soir, en salle Lamartine qui compte une cinquantaine de places pour les soixante-dix députés de cette commission spéciale, de laisser libre un siège sur deux. Or, cet après-midi, nous sommes assis en rang d’oignon dans cette nouvelle salle, sans que cela semble poser la moindre difficulté par rapport aux règles fixées la veille.

Je sais que vous êtes consciente de nos conditions de travail, Madame la présidente, mais je voulais en informer ceux qui nous écoutent. Le groupe UDI et Indépendants compte deux parlementaires dans cette commission spéciale et nous ne pouvons être présents qu’en alternance, Guy Bricout et moi, ce qui nous pose problème car nous avons des amendements à défendre.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je suis clairement opposée au premier amendement présenté car, si l’on remplace le terme de croissance par celui de sobriété, on transforme la manière d’enseigner. Par ailleurs, je vous renvoie à l’article L. 123-2 du code de l’éducation que vous comptez ainsi modifier : je ne suis pas certaine que la sobriété assure la compétitivité de l’économie et la réalisation d’une politique de l’emploi qui prenne en compte les besoins économiques, sociaux, environnementaux et culturels. En tout cas, ce changement idéologique ne correspond ni à l’esprit du texte ni à la manière dont nous souhaitons voir l’éducation nationale s’adapter aux enjeux de la lutte contre le dérèglement climatique.

Concernant l’amendement de M. Holroyd, il est aujourd’hui fait mention des enjeux généraux de la transition écologique et du développement durable, et nous sommes convenus de renvoyer à la séance l’examen des dispositions relatives à l’enseignement supérieur.

Quant à l’amendement de M. Bricout est satisfait par l’article 2 qui concerne tous les niveaux de l’enseignement.

Avis défavorable à tous ces amendements.

Mme Barbara Pompili, ministre. Nous sommes convenus de travailler ensemble, avant la séance, à une rédaction plus satisfaisante pour généraliser les enjeux de la préservation de l’environnement, de la diversité biologique et du changement climatique, dans l’enseignement supérieur. Surtout, la loi de programmation de la recherche, promulguée il y a à peine plus de deux mois, prévoit déjà que l’enseignement supérieur contribue à la sensibilisation et à la formation aux enjeux de la transition écologique et du développement durable, ce qui comprend les grands débats autour de la croissance ou de la sobriété. Nous avons déjà une base mais il nous reste à réfléchir à la manière d’intégrer les différents souhaits que vous avez exprimés au travers de vos amendements. Je vous invite à les retirer.

M. Matthieu Orphelin. Je ne comprends pas les avis négatifs sur l’amendement CS3501, qui vise à reprendre une recommandation de Jean Jouzel, à qui la ministre a elle-même fait référence puisqu’il a remis un rapport au Gouvernement, à la suite de la proposition de loi de Mme Batho, M. Villani, M. Orphelin, cosignée par quatre-vingts parlementaires, dont Mme Pompili. Mme Vidal elle-même a largement approuvé cette recommandation.

M. Loïc Prud’homme. Un gouffre idéologique sépare la réponse qui nous est apportée du fond de ces amendements. Une nouvelle fois, vous nous ressassez la vieille lune libérale selon laquelle la croissance apporterait l’emploi, ce qui est formellement démenti par l’histoire longue. Malgré une croissance ininterrompue, le chômage de masse n’a cessé d’augmenter, en effet.

Faut-il continuer à courir derrière une croissance infinie, dans un monde aux ressources finies ? Un élève de CE2 pourrait lui-même répondre que ce problème arithmétique est impossible à résoudre. C’est la quadrature du cercle.

Qui plus est, vous faites un raccourci sémantique en voulant nous convaincre que l’opposé de la croissance serait la sobriété : non, ce serait la récession, dont il n’est pas question ici. Quel que soit le nom qu’on lui donne, « décroissance » ou « a-croissance », la sobriété permet une transition porteuse de millions d’emplois, ce que le système libéral que vous défendez n’est pas capable de préserver ni de créer.

Mme Delphine Batho. Merci, Madame la rapporteure, d’assumer le clivage qui nous oppose. Soit on se fixe comme objectif de tendre vers le respect des limites planétaires, soit on favorise la croissance, mais il n’est pas possible de lutter contre le changement climatique, de préserver la biodiversité, de combattre la prédation et l’effondrement des ressources naturelles en poursuivant une politique de croissance économique assise sur la consommation d’énergies fossiles. C’est le cœur de notre clivage et la raison pour laquelle vous écartez délibérément toutes les propositions de la Convention citoyenne pour le climat qui rompent avec la société d’hyperconsommation.

À la rigueur, cependant, je peux comprendre les raisons idéologiques qui vous conduisent à écarter mon amendement, mais pourquoi réservez-vous le même sort aux autres amendements ? Que faites-vous du manifeste des étudiants pour un réveil écologique, de l’appel des présidents d’universités, des chercheurs, de la mobilisation de la jeunesse pour le climat, pour que l’enseignement supérieur évolue et soit concerné par les dispositions que nous venons d’adopter dans les autres niveaux ? À chaque fois que les membres de la commission spéciale s’accordent sur la nécessité d’adopter certaines mesures, vous nous renvoyez à la séance publique ! Je ne suis pas d’accord ! Nous pouvons d’ores et déjà adopter l’amendement CS3501, quitte à l’améliorer en séance publique, pour que l’enseignement supérieur s’engage dans la lutte contre le changement climatique.

M. Alexandre Holroyd. Un fossé idéologique se dessine clairement. Mon amendement semble un bateau ivre, perdu dans une discussion commune qui tiendrait d’une anthologie de Beckett. Par conséquent, je le retire pour le retravailler d’ici à la séance avec la rapporteure et la ministre.

M. Guillaume Kasbarian. Passons sur la remarque méprisante de M. Prud’homme qui pense que nous n’aurions pas le niveau d’un élève de CE2. Nous devrions être capables de surmonter nos divergences idéologiques sans nous invectiver. Je n’ai pas signé, pour ma part, pour la théorie de la décroissance et je ne souhaite pas que l’on remplace le terme « croissance » par celui de « sobriété » ou de « décroissance ». Je crois à la croissance. Ce n’est pas d’un coup de baguette magique que nous produirons le véhicule, l’avion, le train, l’électricité, l’hydrogène de demain, mais par la croissance.

Ce n’est pas par la décroissance que nous redistribuerons les richesses ou lutterons contre la pauvreté et les inégalités.

Mme Barbara Pompili, ministre. Je prie les représentants du Parlement de m’excuser car, manifestement, mon avis n’a pas été compris. Je suis d’accord pour que l’on intègre dans la loi ces enjeux au niveau de l’enseignement supérieur mais, dès lors que de nombreux amendements ont été déposés à ce sujet, la moindre des choses est de travailler avec leurs auteurs pour aboutir à la meilleure rédaction possible.

Par ailleurs, l’article 41 de la loi de programmation de la recherche dispose qu’il est inséré à l’article L. 123-2 du code de l’éducation nationale un 4° bis ainsi rédigé : « À la sensibilisation et à la formation aux enjeux de la transition écologique et du développement durable ». La disposition existe déjà, voyons simplement comment mieux l’exprimer.

La transition écologique meurt de ces débats par invectives. Il n’y a pas d’un côté les vilains croissants et de l’autre les gentils décroissants. Personne, aujourd’hui, en dehors des plus fous furieux d’entre nous, ne prétend qu’une croissance absolue, qui ne tiendrait pas compte des limites de notre planète, serait durable. Ce n’est pas la position du Gouvernement, en tout cas. Au contraire, il agit pour que nos sociétés adaptent leur économie afin de limiter le réchauffement climatique et la perte de la biodiversité. Nous développons ainsi des métiers qui préservent l’environnement et nous accompagnons la transition ou la fermeture des filières qui ne respectent pas ces principes, comme les centrales à charbon. Essayons de mettre fin aux anathèmes.

M. Matthieu Orphelin. Compte tenu des explications de la ministre, je retire mon amendement.

Les amendements CS3943 et CS3501 sont retirés.

 

La commission rejette successivement les autres amendements.

 

Amendement CS538 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Notre collègue a tenu ces propos très intéressants : « Je crois à la croissance ». En effet, c’est une croyance. Depuis des décennies, la croissance économique se traduit par une augmentation des inégalités et, en aucun cas, leur résorption. D’ailleurs, à l’échelle internationale, 10 % des plus riches sont à l’origine de 50 % des émissions de gaz à effet de serre. L’image d’Épinal que vous conservez des Trente Glorieuses est largement dépassée. Les réalités scientifiques sont toujours bonnes à rappeler même si elles sont difficiles à entendre pour certains.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Par cohérence avec l’amendement que nous avons précédemment rejeté, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis de la rapporteure, la commission rejette l’amendement CS453 de M. Pierre Vatin.

 

Amendement CS1817 de M. François-Michel Lambert.

Mme Jennifer De Temmerman. L’amendement vise à inscrire la sensibilisation à l’économie circulaire dans le parcours scolaire des jeunes élèves.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Les enjeux de l’économie circulaire sont déjà prévus à l’article 2 qui vise les enjeux environnementaux, sociaux et économiques du développement durable. Je vous invite à le retirer sinon avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS1969 de M. Dominique Potier.

M. Jean-Louis Bricout. Cet amendement vise à faire évoluer les programmes des enseignements technologiques et professionnels pour qu’ils prennent mieux en compte les enjeux du développement durable, étant entendu que ces filières peuvent jouer un rôle essentiel dans l’évolution du monde du travail.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Même avis que pour les amendements précédents : je considère que la demande est pleinement satisfaite par l’article 2. Je demande donc le retrait de l’amendement.

Mme Barbara Pompili, ministre. Nous sommes d’accord, Monsieur Bricout : les enseignements technologiques et professionnels doivent intégrer le développement durable. Cela dit, l’amendement me paraît satisfait. J’en demande le retrait.

M. Jean-Louis Bricout. À quel endroit précis du texte est-il satisfait ?

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’article L. 335-8 du code de l’éducation, que vous proposez de modifier, comporte déjà une référence à « l’évolution de la société », ce qui permet de couvrir un champ très large, y compris les enjeux du développement durable. Par ailleurs, nous venons d’ajouter au code de l’éducation un article qui renforce ce dispositif.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS3498 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Il s’agit de généraliser les enseignements relatifs à la consommation durable, à la préservation de ressources ou encore à la sobriété de la consommation dans toutes les études supérieures de communication, de marketing et de publicité. Ce sont des notions importantes et, nous l’avons vu ici même, certains confondent sobriété et décroissance, même si l’une et l’autre n’ont rien à voir. Certaines personnes aiment également à créer des clivages en opposant décroissance et croissance, alors que le débat devrait porter plutôt sur la post-croissance. J’invite ceux de nos collègues que ce terme fait rire à consulter les travaux de certains scientifiques français, notamment ceux de Dominique Méda.

Lors des travaux préparatoires autour de la proposition de loi visant à réguler la publicité, mes collègues et moi-même avions mené une enquête auprès de trente formations supérieures dans les domaines de la publicité et du marketing. Il apparaissait que 70 % des étudiants concernés n’avaient reçu aucun enseignement consacré à la transition écologique, à la sobriété ou à la consommation durable. Tous les acteurs que nous avions auditionnés à l’époque, y compris des représentants des écoles et des professionnels de la publicité, avaient trouvé notre proposition très intéressante : celle-ci faisait consensus. Nous la soumettons donc à votre vote.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je vous ferai la même réponse qu’à M. Holroyd, qui demandait que les écoles de commerce proposent des enseignements relatifs à la transition écologique et à la finance verte. S’agissant de l’enseignement supérieur, il est préférable de renvoyer la discussion à la séance. Par ailleurs, il importe de respecter la liberté pédagogique des établissements, d’autant que ces derniers sont privés et que les étudiants font le choix de les rejoindre au travers de concours ou d’examens. Il ne me paraît pas souhaitable de leur imposer, à travers le code de l’éducation, la manière dont ils doivent organiser leurs enseignements. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. On en revient effectivement à la place que doit avoir la sensibilisation aux enjeux environnementaux dans l’enseignement supérieur en général. Il faut travailler à intégrer cette dimension comme étant un objectif de la formation supérieure, qui sera ensuite décliné selon les formations, en laissant le choix des modalités aux établissements. Je demande le retrait de cet amendement.

M. Thierry Benoit. Cet amendement m’interpelle. En effet, je mène actuellement, à la demande du président de la commission des affaires économiques, un travail d’évaluation faisant suite à la commission d’enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements – en particulier les centrales d’achat internationales – dans leurs relations avec leurs fournisseurs, dont le rapport, rédigé par Grégory Besson-Moreau, a été adopté à l’unanimité. L’enjeu est de faire remonter de la valeur vers les producteurs. Si les commerciaux des centrales d’achat internationales étaient sensibilisés aux enjeux environnementaux, ce ne serait pas une mauvaise chose. Cela irait dans le sens des propositions de Grégory Besson-Moreau, qui préconisait notamment d’édicter une charte des bons comportements pour les commerciaux du secteur de la grande distribution et des centrales internationales. Cet amendement me paraît donc intéressant et je souhaite que mon groupe le vote.

M. Matthieu Orphelin. Merci pour votre soutien, Monsieur Benoit.

Madame la rapporteure, je ne partage en rien votre argumentaire : l’amendement ne porte absolument pas atteinte à la liberté pédagogique. C’est comme si vous disiez que le fait d’inscrire l’égalité entre les femmes et les hommes parmi les missions de l’enseignement supérieur entravait la liberté pédagogique. Cela n’a pas de sens. Tous les directeurs d’établissement, y compris de l’enseignement privé – car vous avez raison sur ce point : bon nombre de ces écoles sont privées –, sont favorables à cette modification, de même que les enseignants et les élèves. C’est un amendement qui ferait du bien à tout le monde, qui donnerait une impulsion positive. Je n’arrive pas à comprendre pourquoi vous le refusez. J’espère donc que votre avis ne sera pas suivi.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS1859 de Mme Paula Forteza.

Mme Delphine Batho. Il s’agit de promouvoir la sobriété numérique dans les instituts de formation des enseignants et des professeurs.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Nous avons déjà intégré la question de la sobriété numérique à l’article 2, à travers un amendement adopté à l’unanimité. Pour le reste, les écogestes, par exemple, permettront aux enseignants de déployer l’éducation à l’environnement et au développement durable. Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. L’article L. 721-2 du code de l’éducation, mentionné dans l’amendement, prévoit déjà que les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (INSPE) « forment les étudiants et les enseignants à la maîtrise des outils et ressources numériques, à leur usage pédagogique ainsi qu’à la connaissance et à la compréhension des enjeux liés à l’écosystème numérique ». Il précise également qu’ils organisent des formations « au respect et à la protection de l’environnement et à la transition écologique ». Ces deux mentions intègrent implicitement les notions d’écogestes et de sobriété numérique. Votre amendement est donc satisfait, et j’en demande le retrait ; à défaut, avis défavorable.

Mme Delphine Batho. La notion de sobriété numérique n’est pas du tout incluse dans les dispositions de l’article que vous venez de citer. Jusqu’ici, les politiques publiques ont consisté à développer le numérique dans l’enseignement, à très juste titre, mais sans accorder une attention particulière ni à l’impact des écrans sur l’attention des enfants ni à la sobriété numérique. Il ne s’agit absolument pas d’interdire le numérique, contrairement à ce que certains ont prétendu hier pour caricaturer mes positions. Sensibiliser les enseignants à la notion de sobriété numérique au cours de leur formation permettra ensuite de toucher leurs élèves.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS531 de Mme Delphine Batho, amendement CS1739 de M. Guillaume Garot et amendement CS970 de M. Bertrand Pancher (discussion commune).

Mme Delphine Batho. L’amendement CS531 traduit une proposition défendue notamment par France Nature Environnement. Le processus de la Convention citoyenne pour le climat a montré que le fait de donner accès aux informations concernant le réchauffement climatique et l’effondrement de la biodiversité constituait une étape essentielle pour provoquer l’action. En effet, une fois que l’on est informé de l’ensemble des problèmes, au-delà de son expérience individuelle, on a envie d’agir. Or quel programme d’éducation populaire permet, à l’heure actuelle, de faire à grande échelle ce qui a été fait pour 150 citoyennes et citoyens tirés au sort dans le cadre de la Convention citoyenne pour le climat ? Il n’y en a pas. D’où notre proposition, qui consiste à élaborer un plan national d’éducation et de sensibilisation aux enjeux liés à la transition écologique, qui ne serait pas limité au cadre scolaire. J’indique d’emblée que cette proposition est certainement perfectible.

M. Guillaume Garot. Nous proposons nous aussi la création d’un plan national d’éducation à la transition écologique. Certes, le rôle de l’éducation nationale est central en la matière, mais il existe aussi beaucoup d’initiatives émanant des collectivités territoriales, d’associations et d’organisations œuvrant dans le domaine de l’éducation populaire. Il convient de mettre en cohérence l’ensemble de ces actions, dans le cadre d’une démarche pluriannuelle. D’abord, cela donnerait une colonne vertébrale à l’éducation à l’environnement. Ensuite, ce serait plus efficace : quand un même message est transmis par des canaux différents, il pénètre mieux. Un plan national d’éducation à la transition écologique serait donc un levier très fort permettant de concrétiser nos ambitions communes.

Mme Jennifer De Temmerman. Beaucoup d’initiatives ont déjà été lancées dans les territoires, mais de manière dispersée, sans que les différents acteurs aient une vision claire de ce qui se fait à côté. Certains écodélégués avec lesquels j’ai eu l’occasion d’échanger récemment m’ont ainsi fait part de leur souhait de voir se constituer une sorte d’inventaire des actions susceptibles d’être engagées. Un grand plan national permettrait d’introduire de la cohérence.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Vous proposez d’introduire ce plan dans le code de l’environnement, alors que nous venons d’adopter, à l’article 2, une modification substantielle du code de l’éducation. Inclure l’éducation aux enjeux du développement durable et de l’environnement à tous les niveaux de scolarité, et quelle que soit la filière, comme nous l’avons fait, me semble plus efficace. Nous avons élaboré un cadre solide pouvant servir de base aux déclinaisons que vous appelez de vos vœux, notamment en relation avec les associations d’éducation populaire. Ces amendements sont donc satisfaits, et j’en demande le retrait ; à défaut, avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Ces amendements me plongent dans les affres de l’indécision. Sur le fond, je suis favorable à la planification : elle est nécessaire, notamment pour mettre en cohérence un certain nombre des politiques que nous conduisons. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je souhaite que l’on planifie mieux, par exemple, le développement des énergies renouvelables dans le cadre de l’application de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) – il en sera question un peu plus loin dans le texte. Toutefois, la planification n’a de sens que lorsqu’il s’agit d’atteindre des objectifs chiffrés.

Je comprends le sens de ces amendements : vous souhaitez rassembler un certain nombre d’initiatives. Mais l’éducation à l’environnement ne me paraît pas relever de la planification. Il est plus intéressant de laisser vivre ces initiatives sans leur imposer un cadre trop strict. Du reste, les pays qui se sont essayés à des plans quinquennaux en matière d’éducation à l’environnement n’ont pas fait la preuve de l’efficacité de tels dispositifs.

En définitive, si vous adoptiez l’un de ces amendements, l’administration centrale devrait encore produire un document. Je crois davantage, en la matière, aux actions de terrain. Je vous demande donc de retirer ces amendements.

M. Hubert Wulfranc. Il y a un décalage majeur entre les réponses que vous venez de donner et la perspective du vaste débat national qui s’ouvrira autour des enjeux du développement durable si le Président de la République est autorisé à organiser un référendum.

Je n’ai pas d’avis particulier sur la forme que pourrait prendre un tel plan national d’éducation au développement durable – il pourrait être élaboré de manière descendante ou bien ascendante. Certes, l’éducation nationale serait intéressée à la question, mais les organisations d’éducation populaire auraient également un rôle à jouer ; elles trouveraient même là une thématique majeure, qui permettrait d’aborder, plus largement, la question du lien social et les enjeux de formation et d’accès à l’emploi. Quoi qu’il en soit, il y a là une idée que vous ne devriez pas évacuer comme vous l’avez fait : elle ne mérite pas des échanges politiciens.

M. Guillaume Garot. En somme, Madame la ministre, vous n’êtes « ni pour, ni contre, bien au contraire », comme disait Coluche… Cela ne fait pas avancer l’éducation à l’environnement.

Il n’est pas question d’imposer quelque planification que ce soit. Il s’agit simplement de mettre en cohérence les initiatives, dans une démarche pluriannuelle. Concrètement, cela voudrait dire que l’éducation nationale, à travers ses représentants, ouvrirait la porte au dialogue avec les collectivités territoriales, les grandes associations environnementalistes du pays et les organisations d’éducation populaire, de manière à avancer dans le même sens. Comme le dit le proverbe africain, il faut tout un village pour éduquer un enfant : le fait que des voix différentes transmettent le même message participe à l’efficacité pédagogique.

Mme Barbara Pompili, ministre. Monsieur Garot, vous ne voulez pas de planification, mais vous voulez faire un plan… La nuance est subtile !

M. Guillaume Garot. Cela n’a rien à voir !

Mme Delphine Batho. Nous entrons dans une décennie décisive : c’est maintenant qu’il faut agir. Or 50 millions de Français au moins ne sont pas en âge scolaire. Il faut leur donner accès à un certain nombre d’informations de base concernant le dérèglement climatique, car le changement dépend non seulement des politiques publiques et de l’action des entreprises, mais aussi de la mobilisation citoyenne.

Si nous proposons d’inscrire ces dispositions dans le code de l’environnement, c’est parce que le titre II de son livre Ier est intitulé « Information et participation des citoyens ». La Charte de l’environnement, quant à elle, dispose : « Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation de l’environnement. » Encore faut-il pour cela être informé. Or il n’y a pas de grande campagne de sensibilisation ; quant aux moyens donnés aux forces de la société civile pour faire du bottom-up, ils sont très limités. Certes, des actions sont menées, mais elles ne sont pas assez puissantes.

D’où nos propositions, dont les modalités peuvent être discutées. Mme la ministre a raison : ce plan ne doit pas prendre la forme d’un document officiel qui finirait dans un placard. Si vous considérez que la disposition doit être rédigée différemment, nous sommes prêts à la réécrire, mais vous devriez entendre la demande. Celle-ci est d’ailleurs défendue par la Convention citoyenne : ce qui a été fait pour 150 personnes doit désormais être fait pour tout le monde. Tous les Français doivent avoir accès à ces informations.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CS220 de Mme Souad Zitouni.

M. Jean-Luc Fugit. Il s’agit de demander une évaluation des enseignements de la spécialité biologie-écologie, qui ne sont dispensés pour l’instant que dans les lycées agricoles. L’idée est aussi de voir dans quelles conditions cette spécialité pourrait être proposée dans le parcours de formation de tous les lycéens, quelle que soit la filière. Cela permettrait de mieux former l’esprit critique des élèves. Il importe en effet de sensibiliser les citoyens à l’environnement et au développement durable en se fondant sur des connaissances scientifiques et non sur des croyances.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je ne peux qu’approuver votre conclusion : il faut s’appuyer sur la science et non sur les croyances. Je sais que c’est un combat que vous menez ; nous le partageons. Toutefois, je suis réservée en ce qui concerne les demandes de rapport. Qui plus est, celui-ci porterait sur une seule spécialité, déployée seulement dans les lycées agricoles. Nous pourrions plutôt travailler avec le ministère concerné pour avoir des éléments concrets. Je demande donc le retrait de l’amendement.

Mme Barbara Pompili, ministre. La mise en place des enseignements de spécialité au sein du programme de formation des lycées, agricoles ou autres, relève du domaine réglementaire. Par ailleurs, la réforme du lycée offre à tous les élèves de la voie générale un large choix de spécialités. En outre, généraliser une spécialité donnée pour tous les lycéens de la voie générale serait contraire au cadre de cette réforme, qui consiste dans la construction progressive des choix d’approfondissement, avec trois spécialités en première puis deux en terminale. Je vous propose donc de retirer votre amendement ; à défaut, avis défavorable.

M. Jean-Luc Fugit. La spécialité biologie-écologie n’est pas proposée dans les lycées généraux : c’est de cela qu’il s’agit en fait dans cet amendement. Je comprends très bien que cela relève davantage du domaine réglementaire que de celui de la loi. C’est la raison pour laquelle je retire l’amendement. Cela dit, la généralisation de cet enseignement est un enjeu extrêmement important : un certain nombre de débats, y compris ici même, montrent qu’il est urgent de permettre à tout un chacun d’acquérir un minimum de culture scientifique pour se déprendre des croyances.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CS3088 de M. Philippe Naillet.

M. Jean-Louis Bricout. Il s’agit de demander un rapport sur l’évolution des impacts environnementaux, la production de déchets, les taux de réussite scolaire et le coût pour les collectivités des classes ayant recours aux outils numériques.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Il y a beaucoup de choses dans cette demande de rapport, qui ne sont d’ailleurs pas toutes au même niveau. Je suis défavorable à cet amendement, ne serait-ce qu’en raison de sa rédaction : il faudrait sans doute préciser les éléments visés.

Mme Barbara Pompili, ministre. À ma connaissance, toutes les classes ou presque ont recours aux outils numériques. Par ailleurs, la formulation n’est pas claire. Avis défavorable.

M. Jean-Louis Bricout. Je retire l’amendement. Mon collègue Philippe Naillet le présentera peut-être de nouveau, dans une rédaction plus précise. Il visait certainement les conséquences du tout numérique dans l’enseignement.

L’amendement est retiré.

 

Article 3 (article L. 421-8 du code de l’éducation) : Comité d’éducation à la santé, à la citoyenneté et à l’environnement

 

Amendements de suppression CS395 de Mme Valérie Beauvais et CS4689 de Mme Sylvie Bouchet Bellecourt.

Mme Valérie Beauvais. En quoi les modifications proposées dans cet article apportent-elles une plus-value par rapport à la rédaction actuelle de l’article L. 421-8 du code de l’éducation ? Celui-ci est ainsi libellé : « Le comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté présidé par le chef d’établissement a pour mission d’apporter un appui aux acteurs de la lutte contre l’exclusion. Ce comité a pour mission de renforcer sur le terrain les liens entre l’établissement d’enseignement, les parents les plus en difficulté et les autres acteurs de la lutte contre l’exclusion. En liaison avec les axes du projet d’établissement, approuvés par le conseil d’administration, il contribue à des initiatives en matière de lutte contre l’échec scolaire, d’amélioration des relations avec les familles, en particulier les plus démunies, de médiation sociale et culturelle et de prévention des conduites à risque et de la violence. »

Mme Sylvie Bouchet Bellecourt. Effectivement, on peine à voir le lien entre cet article et le dérèglement climatique. Ajouter une mission d’ordre environnemental au comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté est un non-sens. L’éducation à l’environnement et au développement durable doit passer par l’enseignement ou par diverses activités organisées par l’établissement scolaire. Ajouter le développement durable aux missions du comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté, c’est essayer de colorer celui-ci en vert, mais cela ne répond pas aux difficultés que rencontrent les élèves, ce qui est pourtant l’objectif de cet organe.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Cet article a toute sa place dans le texte. Il vise en effet à ajouter l’environnement aux missions du comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté, complétant ainsi les dispositions que nous venons d’adopter à l’article 2. L’éducation est un enjeu fondamental si nous voulons que le titre Ier, consacré à la consommation, soit suivi d’effet. Je suis donc défavorable à ces amendements de suppression.

Mme Barbara Pompili, ministre. Ces demandes de suppression de l’article 3 et les exposés des motifs qui les accompagnent témoignent d’une certaine méconnaissance des missions des comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté. L’action de ces organes, qui ont été mis en place dans la quasi-totalité des établissements, ne se limite pas à la lutte contre l’exclusion. Leurs missions sont multiples, transversales, en rapport avec les difficultés de tous ordres que peuvent rencontrer les élèves et avec l’avenir de ces derniers. Une enquête conduite par la direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO) montre qu’environ 90 % des actions qu’ils mènent portent sur la promotion des valeurs républicaines et de l’égalité ainsi que la santé. Ils offrent donc un éventail large de réflexions et d’actions éducatives. Je m’oppose à la suppression de cet article.

Mme Valérie Beauvais. L’alinéa 5 de l’article 3 dispose : « Ce comité a pour mission d’apporter un appui aux acteurs de la lutte contre l’exclusion. Il renforce sur le terrain les liens entre l’établissement d’enseignement, les parents les plus en difficulté et les autres acteurs de la lutte contre l’exclusion. » En quoi cette formulation est-elle différente de celle que je vous ai lue il y a quelques instants ? Certes, l’alinéa 3 modifie l’intitulé du comité pour y ajouter le mot « environnement », mais la plus-value de cette disposition me paraît assez limitée.

Mme Barbara Pompili, ministre. La plus-value réside dans l’alinéa 7 de l’article : « Ce comité a également pour mission de favoriser les démarches collectives dans le domaine de l’éducation à l’environnement et au développement durable en associant élèves, familles et partenaires extérieurs. »

M. Jean-Marie Sermier. À l’article 2, nous avons inscrit les enjeux liés à l’environnement et au développement durable dans l’éducation des enfants, ce qui est parfaitement normal. L’article 3, en revanche, a une portée extrêmement restreinte, car les comités en question s’occupent pour l’essentiel de la lutte contre l’exclusion et des phénomènes de violence et de décrochage scolaire, ce qui ne concerne qu’une partie des élèves. Dans quelle mesure fait-on avancer la cause environnementale si l’on ne cible pas l’ensemble des élèves ? Tout au contraire, ce faisant, vous réduisez de manière drastique la portée de la mission définie à l’article 2.

La commission rejette les amendements.

 

Amendement CS5211 rectifié de la rapporteure et sous-amendements CS5328, CS5329 et CS5327 de Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je propose une nouvelle rédaction de l’article, qui répondra peut-être aux interrogations que nous venons d’entendre. L’amendement vise en effet à préciser les nouvelles missions des comités. Ils auront ainsi « pour mission globale d’inscrire l’éducation au développement durable dans chaque projet d’établissement approuvé par le conseil d’administration ». Cette rédaction couvre bien la totalité des élèves.

Ils participeraient également « de la promotion de la santé, physique, mentale et sociale ». « Cette promotion intègre notamment des projets d’éducation à la sexualité et à l’alimentation et de prévention des conduites addictives. »

Nous ne retranchons donc rien de ce qui existe déjà, mais renforçons les comités en élargissant leur action à l’environnement et en précisant la manière dont chaque établissement devrait déployer son projet.

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. Le sous-amendement CS5328 est de cohérence. L’éducation à la citoyenneté et l’éducation à la santé ont autant leur place que l’éducation au développement durable dans la définition des missions du comité ainsi que dans le projet d’établissement.

Le sous-amendement CS5329 vise quant à lui à apporter une précision. En effet, la rédaction de l’amendement CS5211 rectifié limite la participation au comité d’éducation à la santé, à la citoyenneté et à l’environnement aux élèves, aux familles et aux partenaires extérieurs. Or d’autres acteurs participent au comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté – je pense aux représentants des enseignants et des personnels des collectivités, mais aussi aux autres personnels de l’éducation ayant un rôle éducatif et social, ou intervenant dans le domaine de la santé. La philosophie des comités s’inscrit bien dans une démarche globale, qui fédère les acteurs au-delà des seuls élèves, familles et partenaires extérieurs. Il me semble donc préférable de faire référence à « la communauté éducative », notion rassemblant les élèves et tous ceux qui, dans l’établissement ou en relation avec lui, participent à l’accomplissement de ses missions.

Le sous-amendement CS5327 a trait aux comités interétablissements. La circulaire de 2016 relative aux comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté a décidé d’approfondir leurs missions et d’améliorer le dispositif en rendant possible la création de comités interdegrés et interétablissements, ce qui permet de disposer d’organes plus larges, à l’échelle de bassins de vie. Ainsi, davantage d’acteurs de milieux différents sont mobilisés – les collectivités notamment, mais aussi les acteurs associatifs et ceux de la santé publique. Les agences régionales de santé (ARS) conditionnent d’ailleurs l’octroi de subventions à l’existence de comités interétablissements. Je propose donc de faire de ces comités interétablissements la règle, ce qui n’enlève pas à chaque établissement la possibilité de faire vivre son propre comité.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Le sous-amendement CS5328 est de cohérence avec le reste du texte, j’y suis favorable. Le sous-amendement CS5329 porte sur la composition des comités. Ce sujet est réglé par des dispositions réglementaires que le projet de loi ne modifie en rien : avis défavorable. Quant au sous-amendement CS5327 qui veut donner la possibilité de créer des comités communs aux écoles et établissements d’un même bassin d’éducation, il est satisfait : il existe déjà des comités inter-établissements. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. L’amendement CS5211 rectifié propose une nouvelle rédaction de l’article 3 qui précise les missions du comité d’éducation à la santé, à la citoyenneté et à l’environnement (CESC) et indique notamment que l’éducation au développement durable doit être inscrite dans chaque projet d’établissement approuvé par le conseil d’administration. Elle inclut par ailleurs des notions chères aux autres députés en matière de santé ou d’éducation à l’alimentation, si j’en crois les nombreux amendements déposés après l’article 3 sur ces sujets. J’y suis donc favorable.

Je suis également favorable au sous-amendement de cohérence CS5328. Le sous-amendement CS5329, lui, veut supprimer la mention des élèves et des familles. Il me semble important de la conserver, car c’est un rôle très important des CESC que d’associer les élèves et les familles. La communauté éducative, elle, est bien évidemment partie prenante du comité. C’est pourquoi je vous propose le retrait de ce sous-amendement. Quant au sous-amendement CS5327, il vise à établir un comité commun aux établissements d’un même bassin d’éducation. Il me semble au contraire que le CESC doit être piloté au plus près de la réalité du terrain, au niveau de l’établissement si nécessaire. Il est déjà possible de le faire au niveau du bassin, mais il me semble important de ne pas imposer une organisation qui ne serait pas forcément généralisable. Je propose également le retrait de ce sous-amendement.

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. La communauté éducative, ce sont les enfants, les parents, les encadrants. L’expression est donc plus inclusive que la rédaction actuelle et permet de ne pas oublier un certain nombre d’acteurs qui concourent à l’encadrement et au développement de l’enfant. Il n’exclut pas l’enfant ni la famille, au contraire. Le sous-amendement CS5329 est donc un sous-amendement de précision, qu’il serait dommage de ne pas adopter car il est plus juste d’un point de vue légistique. Par ailleurs, en matière de santé publique, et il en va de même pour l’environnement, plus une démarche est collective et plus elle a des chances d’être efficace. Le fait d’élargir les CESC, comme le propose le sous-amendement CS5327, ne compromet donc pas le dispositif.

Mme Delphine Batho. Les enjeux d’éducation à la santé et à la sexualité sont essentiels, et ceux liés à la définition de la communauté éducative aussi. Je relève simplement le paradoxe qu’il y a à réformer les comités d’éducation à la santé, à la citoyenneté et à l’environnement dans ce texte tandis que d’autres dispositions capitales, sur la sortie des énergies fossiles par exemple, sont considérées comme hors sujet dans un texte sur le climat.

La commission adopte le sous-amendement CS5328.

 

Elle rejette successivement les sous-amendements CS5329 et CS5327.

 

Elle adopte l’amendement CS5211 rectifié sous-amendé.

 

En conséquence, l’article 3 est ainsi rédigé et les autres amendements sur l’article tombent.

 

Après l’article 3

 

Amendement CS1861 de Mme Paula Forteza.

Mme Delphine Batho. Il s’agit d’inclure dans la formation des ingénieurs en informatique un module sur l’écoconception des services numériques.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Même avis défavorable que pour les programmes de l’enseignement supérieur.

Mme Barbara Pompili, ministre. Même avis. Le numérique est un enjeu majeur pour l’environnement, nous aurons l’occasion d’en débattre en séance.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements identiques CS278 de M. Martial Saddier et CS461 de M. Pierre Vatin,, et amendement CS533 de Mme Delphine Batho (discussion commune).

M. Jean-Marie Sermier. Les amendements identiques visent à promouvoir la sobriété numérique et les écogestes au sein des instituts de formation des enseignants et professeurs. Rien dans ce texte n’a trait au problème de la consommation de CO2 par le numérique, et il semble important de commencer à s’en préoccuper.

Mme Delphine Batho. Nous avons déjà discuté de la question après l’article 2. Mon amendement propose d’inclure la sobriété numérique dans la formation des enseignants, ce qui est une proposition de la Convention citoyenne pour le climat.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Nous en avons effectivement déjà discuté et mon avis reste défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Ces mentions figurent déjà dans l’article L. 721-2 du code de l’éducation. En outre, à l’été 2020, les programmes ont connu un renforcement de la place de l’éducation au développement durable. On peut désormais y lire que l’enseignement de sciences et de technologies développe progressivement chez les élèves un regard critique sur les objets du quotidien s’agissant de l’impact engendré par leur création, leur utilisation et leur recyclage sur l’exploitation des ressources de la planète. Ces amendements sont donc satisfaits, avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement CS452 de M. Pierre Vatin.

M. Julien Dive. Cet amendement vise à ajouter, dans la liste de l’article L. 712-2 du code de l’éducation, une formation à la santé environnementale et à ses enjeux. Cela doit devenir une partie intégrante et non négligeable de l’éducation des enseignants et professeurs du domaine de l’environnement et du développement durable.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Nous en avons déjà parlé : cette question de la santé figure déjà dans le code de l’éducation. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

 

Amendements CS4002 et CS4003 de M. Patrick Mignola.

M. Bruno Millienne. Ce sont des amendements auxquels notre groupe tient tout particulièrement. Le premier propose de compléter le deuxième alinéa de l’article L. 110-2 du code de l’environnement par la phrase suivante : « Toute personne peut également remplir ce devoir, seule ou par contrat, par un engagement volontaire plus ambitieux que les exigences du droit en vigueur. » La démarche des engagements volontaires pour l’environnement correspond à l’une des manières d’exercer le devoir général de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement. Cette démarche doit être encouragée et, à l’image des autres moyens d’exercer ce devoir, encadrée. L’essentiel n’est pas d’inscrire les mots « engagements volontaires pour l’environnement » dans le titre Ier du livre Ier du code de l’environnement, mais de compléter la définition du devoir général de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement.

L’amendement CS4003 va plus loin en créant un titre X dans le livre Ier du code de l’environnement. L’idée est d’établir un cadre juridique précis pour la catégorie des engagements volontaires pour l’environnement. Dès l’instant où le législateur s’apprête à faire référence à ces engagements, la question n’est plus tant de savoir s’il faut créer un cadre juridique, mais lequel. Ce cadre juridique doit permettre principalement de définir ce qu’est et ce que n’est pas un engagement volontaire pour l’environnement, d’arrêter les principes d’élaboration de ces engagements et d’établir un régime juridique spécifique pour les engagements volontaires signés par l’État.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je comprends l’objectif, qui est d’ancrer dans la loi les engagements volontaires pour l’environnement et de leur donner un cadre. Néanmoins, il n’est pas besoin d’inscrire dans la loi le fait que des engagements volontaires peuvent exister et qu’ils peuvent être plus ambitieux que les exigences du droit en vigueur. De nombreux exemples d’engagements volontaires pour l’environnement se trouvent déjà dans un certain nombre de filières, comme celui que les acteurs de la chaîne logistique et du transport de voyageurs ont établi avec l’Agence de la transition écologique. Demande de retrait ou avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Pour ce qui est de l’amendement CS4002, je reconnais l’utilité des engagements volontaires lorsqu’ils sont cadrés, ambitieux et contrôlés. Cela permet l’émergence d’éclaireurs, de précurseurs sur les sujets environnementaux. Je m’interroge en revanche sur l’intérêt de faire figurer dans la loi le fait qu’on peut prendre un engagement volontaire : je ne vois pas de conséquence opérationnelle. Je demande le retrait de cet amendement.

L’amendement CS4003, lui, revient à donner aux engagements volontaires une valeur et une portée normative équivalente à ce que sont les conventions collectives de branche en matière sociale. Il s’agirait d’une innovation qui permettrait de crédibiliser les engagements volontaires visant la protection de l’environnement, et de garantir que la signature de l’État engage des contreparties pour les autres signataires. J’aurai particulièrement à cœur de vérifier que les contrats climat qui sont prévus à l’article 5 en matière de publicité font apparaître des garanties suffisantes en termes de transparence et d’indicateurs de résultat et de suivi – des garanties que tous les engagements volontaires qui impliquent l’État devraient à mon sens fournir. L’innovation que vous proposez pourrait cependant entraîner une insécurité juridique en matière de hiérarchie des normes entre loi et contrat. Je souhaite vérifier tout cela du point de vue juridique et vous demande donc à ce stade de retirer aussi cet amendement.

M. Bruno Millienne. Vous comprendrez que nous maintenions ces deux amendements – le second surtout, qui constituerait une véritable innovation. Même si nous ne parvenons pas à trouver un accord aujourd’hui, nous devons continuer à y travailler, et trouver une solution : c’est essentiel pour le texte que nous sommes en train de défendre.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Chapitre II
Encadrer et réguler la publicité

 

Article 4 (articles L. 581-25-1 et L. 581-35-1 [nouveaux] et article L. 581-40 du code de l’environnement) : Interdiction de la publicité en faveur des énergies fossiles

 

Amendements de suppression CS149 de M. Michel Vialay, CS388 de Mme Valérie Beauvais, CS793 de M. Julien Dive, CS859 de M. Julien Aubert, CS2147 de Mme Laurence Trastour-Isnart et CS3139 de Mme Anne-Laure Blin.

M. Michel Vialay. Cet article doit être supprimé parce qu’il est beaucoup trop imprécis. Il y est question d’interdire la publicité en faveur des énergies fossiles, mais sans préciser de quelles publicités il s’agit. Si les publicités consacrées aux véhicules qui utilisent ces énergies disparaissent, la conséquence sera directe sur les ventes d’automobiles, notamment françaises, ce qui fera d’autant moins de chiffre d’affaires pour les constructeurs qui doivent mener à bien la transition vers des modèles plus vertueux. Et puis, la publicité disparaîtra certes des médias nationaux, mais en aucun cas des réseaux sociaux. Nous allons donc amenuiser les recettes publicitaires des médias français – radio ou télévision, en particulier publique, ce qui aura un effet clair sur nos contributions fiscales – tout en donnant beaucoup de bonheur aux réseaux sociaux qui percevront ces recettes publicitaires.

Mme Valérie Beauvais. J’ajoute que cela privera aussi de recettes les associations sportives et culturelles, puisqu’au cours d’un match de foot par exemple, les publicités de voitures défilent au milieu des autres, ainsi que les collectivités locales, qui perçoivent la taxe locale sur la publicité extérieure.

M. Julien Dive. Je trouve un peu excessif de présenter cet article, dans l’exposé des motifs, comme la nouvelle loi Évin. Cette dernière visait à lutter contre des addictions, alors que les présentes dispositions concernent des problématiques en matière de mobilité ou de chauffage par exemple. Elles soulèvent surtout la question de l’accès aux alternatives aux énergies fossiles, ce qui est un sujet de base de la lutte contre le dérèglement climatique. Par ailleurs, je ne suis pas convaincu que la suppression de la publicité soit l’arme essentielle qui permettra de lutter contre ce dérèglement et d’assurer l’accès aux alternatives. Enfin, la rédaction est effectivement beaucoup trop large. On peut envisager d’interdire la publicité pour les énergies fossiles en tant que telles, pourquoi pas, mais la rédaction actuelle permet aussi d’imaginer l’interdiction de la promotion de producteurs, de réseaux de distribution, des opérations « prix coûtant » pour le carburant à la pompe… Non, c’est vraiment trop flou, et quand c’est flou il y a un loup.

M. Julien Aubert. Par principe, il me semble que le modèle de la loi Évin, de la prohibition, n’est pas forcément le plus porteur pour aborder un secteur économique. Aujourd’hui, les interdictions en matière de publicité sont essentiellement liées à des exigences de santé publique, et touchent des professions diverses. Il y a les médicaments remboursables, soumis à prescription médicale, les armes à feu, l’assistance juridique, et évidemment l’alcool et le tabac. Mais le CO2 n’est pas une pollution : c’est un produit naturel, c’est grâce à lui que les plantes produisent de l’oxygène – c’est la différence avec les autres émissions de particules. Vous voulez donc créer une interdiction légale de publicité à l’égard d’un secteur sans pouvoir la justifier par un impact direct en matière de santé publique, simplement parce que vous considérez que ce n’est pas un secteur à encourager. Il faudrait vérifier si cela tient la route d’un point de vue constitutionnel.

Cette interdiction serait de surcroît très large. Il y a pourtant une grosse différence entre les énergies fossiles : par exemple, le gaz émet 42 % de moins de CO2 que le charbon, et 26 % de moins que le pétrole. Le gaz est une énergie de transition, évidemment moins bonne qu’une énergie décarbonée mais tout de même meilleure qu’une énergie très carbonée. Penser qu’on peut basculer du jour au lendemain, en matière de transport ou d’habitat, dans un monde totalement exempt de carbone, c’est de la folie. Dans « transition énergétique », pour citer Brune Le Maire, il y a « transition ».

M. Jean-Marie Sermier. Nous n’avons vraiment pas la même conception de la politique environnementale. Pour nous, elle doit proposer des solutions : s’agissant des énergies carbonées, on pourrait donc imaginer qu’elle encourage plus fortement encore l’hydrogène, l’électricité décarbonée, les biocarburants, qui ne sont d’ailleurs pas abordés dans le projet de loi. Nous souhaitons encourager des politiques vertueuses qui permettent de réduire les émissions de gaz à effet de serre, et notamment le CO2. Vous, plutôt que d’encourager ce qui va dans le bon sens, vous voulez interdire ce qui ne serait pas bien, mais sans donner aucun moyen pour évoluer vers le mieux. Et comme vous n’êtes pas certains de vos résultats, vous rajoutez une couche en interdisant la publicité de ce qui ne vous plaît pas. Nous ne sommes pas favorables à cet article, et le fait qu’il y ait cinq amendements de suppression du groupe LR est révélateur. Nous aurions préféré un texte de proposition à un texte d’interdiction.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je voudrais dire le plus précisément possible pourquoi je soutiens l’article 4, et pourquoi je comprends certaines de vos réserves.

Nous faisons avec cet article un choix très clair, en lien avec la Convention citoyenne pour le climat, en faveur d’un changement de paradigme important. Nous prévoyons une interdiction de publicité dans certains cas, ciblée sur des secteurs dont personne ne peut ignorer leur impact sur le changement climatique. C’est notre conviction, mais c’est aussi une donnée scientifique prouvée et reconnue, qu’il paraît nécessaire de faire figurer dans une loi qui a trait aux enjeux du dérèglement climatique. Nous prenons, en pleine cohérence avec nos arguments sur la lutte contre le dérèglement climatique, des mesures justes, proportionnées et efficaces.

Mais oui, le champ d’application de l’article 4 mérite d’être précisé. Nous y avons travaillé avec le Gouvernement et je vous présenterai plus tard un amendement sur ce point. Le Conseil d’État nous y a clairement invités, au risque que l’article ne passe pas la barre du Conseil constitutionnel.

Cet article ne va pas faire disparaître, comme je l’ai entendu, toutes les publicités que vous avez citées. Il n’est notamment pas question d’interdire une publicité en faveur du secteur automobile. D’ailleurs la communication de ce secteur change : si le parc de vente des véhicules dits propres, électriques ou hybrides, ne représente que 16 % des ventes en France, ces véhicules représentent déjà une publicité télévisuelle sur deux, ce qui démontre la tendance, l’engagement et le changement qui sont déjà à l’œuvre.

Enfin j’avais moi-même évoqué la question du financement des médias. Nous devons tous être sensibles, à chaque fois que nous envisageons une interdiction en matière publicitaire, à ce qu’elle n’entraîne pas une baisse des recettes des médias qui ferait peser un risque important d’une part sur le pluralisme de l’information, pour des raisons évidentes, sauf à ne vouloir être informé que par le biais des GAFA – Google, Amazon, Facebook et Apple – et d’autre part sur la création cinématographique et audiovisuelle, dont on voit bien les turbulences qu’elle connaît.

Cet article 4 est donc juste et proportionné. Il permet de cibler des secteurs d’une façon que nous rendrons plus précise en cours de discussion. Il montre un engagement très clair du Gouvernement et de la majorité afin que la publicité s’implique de manière plus puissante dans la lutte contre le dérèglement climatique – elle le fait aussi avec des engagements volontaires. C’est pourquoi je serai à la fois contre les amendements de suppression et contre ceux qui élargiraient de manière disproportionnée le champ des interdictions, au détriment du financement de nos médias.

Mme Barbara Pompili, ministre. Une des motivations de ces amendements est le risque d’une perte de revenus pour le secteur automobile, la presse et les médias. Le Gouvernement est conscient de l’importance de la publicité pour les annonceurs, pour de nombreux secteurs de l’économie, dont l’automobile, et pour le financement de la presse et des médias. Toutefois la publicité reflète et influence nos modes de consommation : elle doit contribuer à les rendre plus vertueux, notamment en matière d’empreinte carbone.

À ce propos, j’ai entendu des choses qui m’inquiètent fortement. Qu’on fasse une distinction entre les émissions de gaz à effet de serre et les émissions de polluants, c’est une chose. Mais qu’on dise que l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre et donc le changement climatique ne sont pas des questions de santé publique, c’est vraiment grave. C’est aussi scientifiquement faux : le dernier rapport du GIEC (groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) a confirmé qu’il existait des preuves écrasantes que l’activité humaine agissait sur le climat de la planète et a souligné que cela avait de multiples incidences sur la santé humaine. Si vous voulez que je vous en lise des extraits, ce sera avec grand plaisir. Bref, basons notre travail sur des faits scientifiques, pas sur des idées ou des idéologies.

Le Gouvernement privilégie à ce stade, plutôt que des interdictions, une approche fondée sur l’information du consommateur, avec le développement du score environnemental et des engagements volontaires qui vont transformer les messages publicitaires. L’article 5 du projet de loi prévoit ainsi que des codes de bonne conduite sont promus par le Conseil supérieur de l’audiovisuel. Ce « contrat climat » comportera des engagements de l’ensemble des acteurs – médias, filière communication et annonceurs – qui permettront d’une part l’encadrement strict de certains messages ou produits, et d’autre part d’introduire une dimension positive en mettant en avant des produits et des comportements vertueux. Ils feront l’objet d’un suivi régulier et rendront la corégulation du secteur plus transparente. Pour finaliser un travail enclenché il y a plusieurs mois sur la nature et le contenu de ces nouveaux contrats, le Gouvernement a confié une mission à deux personnalités qualifiées, Agathe Bousquet et Arnaud Leroy.

En tout état de cause, l’article 4 ne vise que la publicité directe pour les énergies fossiles, il ne prohibe pas la publicité pour des produits qui les utilisent, comme les automobiles. L’amendement CS3894 qu’a annoncé la rapporteure, auquel le Gouvernement est favorable, lèvera toute ambiguïté sur ce point. Je suis défavorable à ces amendements de suppression.

M. Matthieu Orphelin. Je suis évidemment très défavorable à la suppression de cet article. Le projet de loi est déjà très minimaliste sur ces sujets : on est loin d’une loi Évin sur le climat ! Les dispositifs des articles 4 et 5 sont très limités.

Il faut rappeler que la fameuse loi Évin sur le tabac n’a entraîné la mort ni de la pub, ni de la presse. Avant cela, c’est une loi de Simone Veil de 1976 qui la première a régulé la publicité sur le tabac : Jacques Séguéla avait expliqué alors que la loi n’avait pas à s’en mêler, que les politiques avaient tué beaucoup plus que le tabac, que tout cela allait être la mort de la publicité… ce qui n’a évidemment pas été.

Madame la ministre, la mission confiée à Arnaud Leroy et Agathe Bousquet, qui sont tous les deux très compétents, nous paraît arriver très tardivement dans l’examen de ce projet de loi. En tout état de cause, si l’article 4 ne concerne que la publicité directe sur les ventes d’énergies fossiles, ce n’est quasiment rien – quelques centaines de milliers d’euros par an, au mieux 1 ou 2 millions, pour les grandes centrales de publicité du pays ! Si c’est vraiment cela, nous sommes en train de faire un article pour les publicités sur les bouteilles de gaz. Cela prête à rire.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Cet article illustre très bien la philosophie de notre projet de loi. Certains amendements veulent le supprimer, d’autres aller beaucoup plus loin : je crois que nous avons trouvé un équilibre qui permet d’éviter ces deux excès. Nous ne voulons pas faire comme si de rien n’était : il faut interdire la publicité pour ces énergies, dont on connaît l’impact. Il ne s’agit pas que de quelques millions ou dizaines de millions de publicités, Monsieur Orphelin, mais d’un symbole extrêmement fort pour commencer à interdire ce type de produits. Mais il ne faut pas non plus tomber dans le piège de vos propositions, qui est d’expliquer aux Français ce qu’ils doivent acheter ou non, de les prendre par la main pour tous leurs achats… Avec cet article et le suivant, nous incitons les filières à progresser d’elles-mêmes, à prendre des engagements, à suivre un chemin vertueux. Nous n’en restons pas à la punition, nous voulons la mobilisation de tous pour arriver à nos objectifs.

M. Thierry Benoit. Mon sentiment est que cet article 4 va dans la bonne direction. Il nous rappelle d’abord qu’une énergie fossile n’est pas inépuisable, ce qu’il est important de le faire comprendre à nos concitoyens. Elle a aussi une empreinte écologique, ce qui était un des axes forts de la Convention citoyenne pour le climat auquel le projet de loi fait suite. Elle a aussi un bilan carbone plutôt négatif. Certes, comme le dit Julien Aubert, le bilan carbone du gaz est meilleur que celui du charbon, mais l’ensemble n’est guère positif. Sensibiliser nos concitoyens en restreignant la publicité est donc la bonne trajectoire. Enfin, il me semble qu’un décret est pris sous l’autorité du ministre et que si tout va bien, il doit être pragmatique. Il faut commencer par une orientation et resserrer les dispositions au fil du temps pour arriver à supprimer complètement à terme la publicité concernant les énergies fossiles.

M. Dominique Potier. Tout ça pour ça ! Je me demande s’il fallait faire un article. C’est comme si la loi Évin interdisait la publicité pour les cigarettes mais l’autorisait pour les paquets. C’est à peu près le même ridicule. Par ailleurs, s’en remettre à de la comitologie et à des expertises alors que le Parlement a montré plusieurs fois sa volonté de se saisir de ce sujet a tout de même quelque chose d’un peu humiliant.

Nous sommes devant une question très importante. La publicité, selon la racine latine, cela sert à rendre public. Or nous avons laissé la puissance privée rendre publics des messages qui créent pour nos imaginaires une forme de servitude marchande. Sommes-nous prêts en tant que puissance publique, en tant que démocratie, à réguler ces messages dès lors qu’ils nuisent à la planète ou à la santé humaine ? L’article 4 ne répond pas du tout à cette question. Êtes-vous prêts à entendre des amendements qui ouvrent des voies de régulation pour rééquilibrer la puissance publique et la puissance privée, autrement dit pour refaire une démocratie ?

M. Julien Dive. Oui, Madame la ministre, la lutte contre les gaz à effet de serre est un sujet de santé publique, mais la comparaison avec la loi Évin n’est pas valable. La loi Évin veut lutter contre des addictions, le tabagisme, avec tous les cancers qu’il provoque, et l’alcoolisme. Ce dont nous parlons aujourd’hui, c’est d’accès à des solutions énergétiques. On connaît bien, depuis le 17 novembre 2018, les problématiques de l’accès de nos concitoyens à certaines énergies non fossiles et du coût que cela représente ; on a bien compris aussi qu’il fallait un effort. Il faut une transition qui permette d’accompagner les citoyens vers de nouvelles pratiques. En revanche, je ne suis pas certain qu’une interdiction permettra à nos concitoyens les plus précaires d’accéder à des énergies alternatives. Madame la ministre, puisque vous dites que le dispositif est ciblé, pouvez-vous nous donner un exemple de publicité que vous souhaitez interdire avec cet article ? Les bouteilles de gaz, ou l’affichage d’un sponsor sur un maillot ?

M. Hubert Wulfranc. Le rapporteur général, écoutant les réactions des oppositions, en conclut que ce texte est équilibré. Je lui fais remarquer, et cela vaut de manière générale dans ce projet de loi, que les codes de bonne conduite, que l’autorégulation confiée aux groupes industriels n’ont pas démontré leurs résultats. Ainsi, la charte alimentaire qui a été adoptée en 2009 procurait aux industriels la faculté d’engagements volontaires. Or on constate, notamment dans une étude de Que Choisir, que douze ans après, ce sont encore les scores D et E qui prédominent dans l’alimentation destinée aux enfants. Sans parler de l’article du Monde sur les cantines de Marseille, qui sont sous la tutelle d’un groupe de restauration bien connu. On ne peut pas faire confiance aux industriels : il faut encadrer la publicité sur les énergies fossiles – car il ne s’agit que de publicité, il n’est pas question d’interdire une quelconque vente !

La commission rejette les amendements.

 

Amendement CS4438 de M. Loïc Prud’homme.

M. Loïc Prud’homme. Je propose d’interdire les messages publicitaires relatifs aux produits les plus polluants, dont l’alimentation industrielle ultratransformée fait partie. L’article 4 ne concerne que la publicité sur les énergies fossiles.

Le groupe La France insoumise a déjà fait plusieurs propositions en ce sens. Nous avons proposé d’interdire la publicité pour les voitures les plus polluantes lors de la discussion du projet de loi sur l’orientation des mobilités, en 2019, et celle sur le transport aérien intérieur lors des débats sur le projet de loi sur l’économie circulaire. J’ai également déposé une proposition de loi visant à libérer l’espace public de la manipulation publicitaire en septembre 2020. Toutes ces propositions ont été rejetées, et désormais, ce sont les propositions de la CCC qui sont enterrées par la majorité.

L’urgence climatique réclame une rupture nette. Il ne peut y avoir de transition écologique rapide et populaire sans la disparition de cette emprise cognitive que les multinationales ont construite depuis des décennies. Les Français y sont prêts : selon un sondage BVA pour Greenpeace France, 65 % seraient favorables à l’interdiction des publicités pour les marques contribuant au changement climatique. Nous pouvons ainsi faire d’une pierre deux coups : libérer nos villes et nos esprits de la publicité agressive et intrusive, et réduire les émissions de gaz à effets de serre en limitant les incitations à une consommation débridée de produits néfastes pour l’environnement, et souvent pour notre santé.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Avis défavorable. Vous proposez d’élargir considérablement le champ de l’interdiction de la publicité en l’étendant aux véhicules polluants, aux trajets aériens, aux bouteilles d’eau en plastique ou aux téléphones portables. Je ne souhaite pas étendre à l’infini les interdictions de publicité. D’ailleurs, vous n’expliquez pas comment les conséquences sur les médias seraient compensées. Or je suis particulièrement attachée à la pluralité de l’information, et je ne doute pas que ce soit aussi votre cas.

Mme Barbara Pompili, ministre. Le Gouvernement partage l’objectif poursuivi par cet amendement, mais pas les moyens proposés pour l’atteindre.

L’interdiction de la publicité pour les énergies fossiles touchera par exemple celle qui a occupé une pleine page d’un journal du dimanche il y a trois semaines, qui annonçait : « C’est aussi grâce au fioul qu’on ne passera pas la moitié de l’hiver dans le noir. »

Les codes de bonne conduite promus par le CSA formeront un contrat climat qui comportera des engagements de l’ensemble des acteurs – médias, filière communication et annonceurs –, afin de strictement encadrer certains messages. L’expérience nous fait préférer cette solution aux interdictions, que nous estimons préjudiciables au financement des médias. C’est pourquoi nous attendons les conclusions de la mission confiée à Arnaud Leroy et Agathe Bousquet, qui doivent collecter les propositions d’engagements volontaires des acteurs de la filière. Ces engagements devront garantir des progrès concrets et une véritable évolution des publicités. À défaut, le législateur pourra prendre des mesures plus contraignantes. Les interdictions que vous proposez semblent disproportionnées, présentent des risques pour l’économie et préemptent les initiatives en cours. Avis défavorable.

M. Loïc Prud’homme. La publicité ne concerne qu’une minorité des entreprises : moins de 600 – soit 0,02 % du total – qui représentent 85 % des dépenses engagées.

L’argument sur le modèle pluraliste de l’information est l’arbre qui cache la forêt, et revient à défendre le statu quo. Le modèle de l’audiovisuel n’a pas toujours été celui que nous connaissons et n’est pas gravé dans le marbre. Il a été aliéné aux publicités, dont certaines ont des effets délétères sur nos vies. Il faut remettre en question le financement de l’audiovisuel. Cela relève d’une volonté politique : soit nous maintenons son aliénation à des industriels qui vendent des produits néfastes à nos vies et à l’environnement, soit nous prenons des mesures pour que la pluralité que vous brandissez comme un étendard soit assurée par l’État.

M. Matthieu Orphelin. Ne mésestimons pas le rôle de la publicité. Elle se définit comme le fait d’exercer une action psychologique pour inciter un consommateur à acheter un produit ou un service. C’est très important. Les dépenses de publicité se sont élevées à 34 milliards d’euros en 2019 et sont en hausse de 2 % par an depuis 2015. Bien sûr, il faut prendre en compte l’effet de la crise. Peut-être les interdictions pourraient-elles prendre effet dans deux ou trois ans ? En tout cas, nous devons indiquer une trajectoire. La publicité pour les voitures représente 4,3 milliards d’euros en 2019, en majorité pour les SUV. Il est normal dans de telles conditions que les consommateurs aient acheté ce type de véhicule pendant des années.

Madame la rapporteure, quelle part des 34 milliards d’euros de dépenses publicitaires annuelles sera touchée par la rédaction retenue de l’article 4 ?

Mme Véronique Riotton. La majorité se réjouit de la mission qui a été confiée à Agathe Bousquet et Arnaud Leroy. Nous attendons beaucoup de ces éléments factuels dont nous tiendrons compte dans les amendements que nous déposerons en vue de l’examen de ce texte en séance qui commencera le 29 mars. À quelle date les conclusions de cette mission vous seront-elles remises, et comment comptez-vous informer le Parlement ?

Mme Barbara Pompili, ministre. Notre intention est bien d’éclairer le Parlement. Je ne connais pas la date de remise précise, mais je m’engage à ce que vous disposiez des résultats de la mission à temps pour déposer des amendements.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS4351 de M. Mounir Mahjoubi.

M. Mounir Mahjoubi. Cet amendement est technique, mais il s’agit d’assurer la survie de cet article. Ainsi rédigé, il est inopérant. Les critiques du Conseil d’État étaient très violentes, tant sur sa forme que son intégration au code de l’environnement. Si vous mettez des ailes de papillon à un cheval, vous n’aurez pas une licorne !

Il faut que l’article soit inséré dans le bon chapitre du code de l’environnement.

La rédaction actuelle l’incorpore au chapitre consacré à la police de l’environnement sur la publicité, à destination des maires. Il ne concerne qu’un seul support : la publicité par affichage dans l’espace public. Et il n’a qu’un seul objectif : assurer la protection du cadre de vie.

Je propose simplement la création d’un chapitre qui rappelle l’objectif de préservation du climat et précise que les tous les supports publicitaires sont concernés, pas uniquement ceux définis aux articles L. 581-2 et R. 581-1, qui ne portent que sur l’affichage publicitaire sur voie publique. Faute d’adopter cet amendement, tout ce que vous déciderez sur le fond de l’article sera sans effet. Cet amendement ne porte pas sur l’étendue de l’interdiction, il a simplement pour objet de la rendre possible.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je persiste à penser que la place donnée à cet article au sein du code de l’environnement est la bonne. Le code de l’environnement ne traitait initialement que des publicités visibles à l’extérieur pour des raisons évidentes, mais ça ne limitera pas la portée de cet article, qui s’appliquera aux publicités dans les médias écrits ou audiovisuels. C’est tout l’enjeu de cet article. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Monsieur Mahjoubi, les licornes n’ont pas forcément d’ailes, il est important de le préciser ! (Sourires.)

Le Gouvernement propose aujourd’hui une base de travail, qui devra être complétée suite aux engagements pris par les différents acteurs de la publicité. Votre amendement invite à légiférer plus avant : ce n’est pas la voie que nous avons retenue. Je vous demande donc de le retirer, sinon j’émettrai un avis défavorable. Mais je confirme que le texte devra être amélioré pour garantir que les publicités prendront en compte les enjeux du développement durable.

M. Mounir Mahjoubi. Je n’ai pas été convaincu par nos échanges sur le sujet. Les modifications que vous apporterez devront concerner tous les éléments que j’ai cités. Vous ne répondez pas à mes observations sur l’objectif du chapitre Ier du titre VIII, ni sur les définitions de l’article L 581-2 : aucune modification n’est proposée à cet égard.

Qu’il n’y ait aucune ambiguïté : je soutiens cet article et je veux le sauver. Ce n’est pas un amendement d’opposition ; vous connaissez mon soutien à votre action.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements identiques CS2715 de M. Matthieu Orphelin et CS4609 de M. Jean-Charles Colas-Roy, et amendements CS411 de Mme Valérie Beauvais. (Discussion commune).

M. Matthieu Orphelin. J’appuie la ministre : les licornes n’ont pas toujours d’ailes !

Plus sérieusement, la mission confiée à Arnaud Leroy et Agathe Bousquet soulève deux problèmes. Le premier porte sur les délais. Leurs travaux viennent de commencer, vous vous engagez à ce que nous disposions des résultats à temps, mais vos collègues de Bercy feront-ils de même ? Le rapport promis aux députés sur les impacts environnementaux, sociaux et économiques du commerce en ligne a été remis depuis trois semaines aux sept ministres concernés, dont vous faites partie, mais il est bloqué par Bercy. La situation devrait se dénouer, mais trop tard pour alimenter les travaux de notre commission. J’ai du mal à comprendre pourquoi, sur tous les sujets importants de ce texte – rénovation énergétique, commerce électronique et publicité – les rapports seront remis après l’examen en commission.

Second problème : vous dites que si les engagements volontaires sont insuffisants, nous légiférerons. Nous avons reçu hier les engagements globaux de la filière communication sur le climat, ça ne casse pas des briques. Dans quel texte pourrons-nous corriger ces engagements s’ils ne sont pas assez forts ?

M. Jean-Charles Colas-Roy. Nous pouvons décider une trajectoire d’encadrement de la publicité plus volontariste, sans nous limiter aux énergies fossiles. Je détaillerai mes propositions à l’amendement CS5061.

Mme Valérie Beauvais. L’amendement CS411 propose de modifier le titre de la section 6 du chapitre Ier du titre VIII du livre V du code de l’environnement pour qu’il se lise : « Publicité sur les produits et services ayant un impact excessif sur le climat ».

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Les amendements CS2715 et CS4609 proposent de modifier le titre de la section 6 pour mentionner « les produits et services ayant un fort impact négatif sur l’environnement ». Or les termes retenus dans le projet de loi – « impact excessif » – répondent à cette préoccupation. Je demande le retrait de ces amendements ou j’émettrai un avis défavorable.

Monsieur Orphelin, nous avons tous demandé que les conclusions de la mission Bousquet-Leroy soient remises avant la séance, pour que nous puissions en prendre connaissance et intégrer au texte les propositions pertinentes.

S’agissant de la modification proposée par l’amendement CS411, j’y suis favorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Avis défavorable aux amendements CS2715 et CS4609.

Je suis adepte de la transparence, très importante pour éclairer le débat démocratique. Le rapport sur les impacts économiques, sociaux et environnementaux du commerce en ligne aurait dû être publié depuis longtemps, nous nous employons à déboucher les canaux pour que vous puissiez en prendre connaissance avant nos débats en séance publique.

S’agissant du rapport Bousquet-Leroy, je me suis engagée à vous le remettre avant le terme du délai de dépôt des amendements. Il n’était pas possible de procéder à cette étude plus tôt car il a été décidé de laisser la possibilité aux acteurs de prendre des engagements volontaires exigeants, qui pourront être contrôlés et sanctionnés. Il faut maintenant collecter ces engagements – c’est le travail de fourmi réalisé par Arnaud Leroy et Agathe Bousquet. Nous avons de premières remontées intéressantes. Nous vous fournirons ces éléments le plus tôt possible.

En ce qui concerne l’amendement CS411, avis favorable.

M. Matthieu Orphelin. Les efforts de transparence de la ministre sur le rapport consacré à l’impact du commerce en ligne ne sont manifestement pas partagés par tous ses collègues. Nous comptons sur elle pour que l’intégralité du rapport soit rendue publique, et pas simplement son résumé.

La transparence sur les engagements des différentes filières est à saluer. Pourrons-nous en avoir connaissance au fur et à mesure de leur transmission, ce qui nous permettrait de travailler en avance ?

L’amendement CS4609 est retiré.

 

La commission rejette l’amendement CS2715, et adopte l’amendement CS411.

 

Amendements identiques CS942 de Mme Jennifer De Temmerman, CS1030 de M. Loïc Dombreval et CS1753 de M. Dominique Potier.

Mme Jennifer De Temmerman. Cet amendement propose de rendre contraignante la recommandation « développement durable » de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), organisme privé d’autorégulation des professionnels du secteur.

Nous respectons ainsi l’engagement du Président de la République de reprendre les propositions de la Convention citoyenne pour le climat, qui a inséré cette mesure dans sa proposition C.2.2.5.

M. Dominique Potier. Nous souhaitons élargir le champ de l’interdiction à toutes les publicités qui ont un effet néfaste sur l’environnement et le développement durable.

Je suis en train de compiler les budgets consacrés par l’ADEME à la communication et l’éducation. Nous consacrons, toutes actions confondues, 6 milliards d’euros à la prévention en santé publique, tandis que 31 milliards sont attribués au financement de la publicité. Je pense que cette disproportion sera doublée sur la question du climat.

Le groupe Socialistes et apparentés propose d’étendre l’interdiction de publicité à tous les produits néfastes à la santé humaine et de la planète, et d’instaurer un système de taxation faisant porter la responsabilité aux annonceurs qui promeuvent des produits entraînant des émissions de carbone, au nom de l’équilibre et de la justice dans notre république et sur la planète.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Il s’agit d’un sujet essentiel, qui doit aboutir dans le cadre de ce projet de loi : définir le greenwashing de manière à sanctionner les manquements à son interdiction éventuelle. Votre amendement visant le code de l’environnement, alors que nous travaillons à des modifications du code de la consommation, j’émettrai un avis défavorable.

En tout cas, nous travaillons à une rédaction en vue de la séance et je suis disposée à associer tous les députés qui ont proposé des amendements sur ce sujet afin de parvenir à une formulation commune.

Mme Barbara Pompili, ministre. Monsieur Orphelin, transmettre les engagements des acteurs de la publicité au fil de l’eau n’est pas une bonne idée. Mieux vaut disposer d’une vision globale pour juger si les engagements sont suffisamment exigeants. Les très bons engagements pris par une filière ne doivent pas entraîner la décision si les autres filières ne font pas le travail.

La recommandation de l’ARPP de ne pas diffuser de publicité contraire aux engagements de développement durable est excellente, et elle la fait respecter avec ses méthodes, qui ne sont pas inefficaces. Si nous voulons revoir ce mécanisme, nous devons l’étudier dans son ensemble, c’est pourquoi j’attends les conclusions de la mission Bousquet-Leroy.

La commission rejette les amendements.

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