Compte rendu

Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi portant lutte
contre le dérèglement climatique
et renforcement de la résilience
face à ses effets

– Suite de l’examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (n° 3875 rect.) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, M. Damien Adam, M. Erwan Balanant, Mme Aurore Bergé, M. Lionel Causse, Mme Célia de Lavergne, Mme Cendra Motin, M. Mickaël Nogal et M. Jean-Marc Zulesi, rapporteurs)              2


Mercredi
10 mars 2021

Séance de 21 heures

Compte rendu n° 19

session ordinaire de 2020-2021

Présidence de
Mme Laurence Maillart‑Méhaignerie,
Présidente

 


  1 

La commission spéciale poursuit l’examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (n° 3875 rect.) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, M. Damien Adam, M. Erwan Balanant, Mme Aurore Bergé, M. Lionel Causse, Mme Célia de Lavergne, Mme Cendra Motin, M. Mickaël Nogal et M. Jean-Marc Zulesi, rapporteurs).

Article 4 (suite) (articles L. 581-25-1 et L. 581-35-1 [nouveaux] et article L. 581-40 du code de l’environnement) : Interdiction de la publicité en faveur des énergies fossiles

Amendement CS4671 de Mme Céline Calvez

Mme Céline Calvez. Nous sommes plusieurs à ne pas être satisfaits des modalités de l’interdiction prévue à l’article 4. Quant aux engagements volontaires des professionnels, que l’article 5 permet d’encadrer, ils sont très nombreux ces temps-ci, et peut-être seront-ils suivis d’effet, mais on sait que leur soudaine multiplication est liée à l’échéance législative qui nous occupe.

Nous avons beaucoup exploré l’éventualité d’un Éco-score ou d’un score carbone permettant d’apprécier le caractère nocif pour l’environnement d’un produit ou d’un service, et mesuré combien il est difficile de le mettre en œuvre aujourd’hui. Nous nous laissons donc quelques années avant d’y recourir.

Mais lorsque nous pourrons en disposer, quelles conclusions en tirerons-nous ? L’affichage environnemental, l’information du consommateur, qui misent sur la confiance accordée au citoyen, sont très importants. Mais si l’Éco-score d’un produit le révèle véritablement nocif, pourquoi se contenter de le pointer du doigt par l’affichage, pourquoi ne pas en interdire la production, la vente ou, à défaut, la publicité ? A contrario, si un produit ou un service a été suffisamment amélioré, s’il est devenu beaucoup moins émetteur de gaz à effet de serre (GES), pourquoi ne pas en faire la promotion ? Après avoir consacré autant de temps et d’énergie à élaborer un Éco-score, pourquoi nous contenterions-nous de l’afficher ? Pourquoi pas un système de bonification et de malus ?

Nous proposons ainsi un changement de paradigme, en complément des engagements volontaires des professionnels, ainsi qu’un suivi annuel par les parlementaires de l’application de la mesure.

Mme Aurore Bergé, rapporteure pour le titre Ier. Il est, en effet, important de tirer les conclusions de l’article 1er qui va permettre la création de l’affichage environnemental, notamment en matière de publicité.

L’affichage environnemental a certes pour but d’éclairer le consommateur, mais celui-ci reste libre de ses choix – nous avons beaucoup parlé de libre arbitre à propos des articles 2 et 3. Nous ne souhaitons donc pas que l’affichage environnemental débouche sur l’interdiction de la publicité pour certains produits, et encore moins de leur vente. D’ailleurs, quel serait l’intérêt d’avoir prévu un affichage environnemental dans les publicités si l’on supprimait celles-ci ? N’étendons pas le champ des interdictions déjà prévues sous peine de fragiliser certains secteurs dépendants des recettes publicitaires. Ne touchons pas au précieux équilibre de l’article 4. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique. L’amendement reprend une idée des membres de la Convention citoyenne pour le climat : établir un score carbone et interdire la publicité des produits pour lesquels il serait mauvais.

Le Gouvernement a choisi une autre option : travailler avec les différentes filières et avec les annonceurs pour susciter des engagements volontaires dont le respect sera contrôlé et dont les conditions seront affinées d’ici à la séance. Dès lors, il ne peut qu’être défavorable à l’amendement. Nous verrons, à la lumière des conclusions de la mission Leroy-Bousquet, si l’orientation que nous avons choisie promet d’être suivie d’effet, et nous en reparlerons en séance. Avis défavorable.

M. Guillaume Kasbarian. L’affichage environnemental donne des éléments au consommateur pour qu’il prenne sa décision. De ce point de vue, il ne serait pas cohérent d’étendre l’interdiction touchant les énergies fossiles. D’autant que l’interdiction se fonderait sur un score environnemental multi-critères dont on ne sait pas encore ce qu’il recouvre : légiférer dans ces conditions est problématique.

En outre, le dispositif serait défini par décret et, sur cette base, on interdirait la publicité pour les biens et services ayant un impact jugé excessif sur l’environnement ; mais excessif par rapport à quoi, à partir de quel seuil ? Que les parlementaires se dessaisissent ainsi du sujet pour laisser un futur gouvernement, en 2026, faire ce qu’il veut à partir d’un indicateur inconnu et décider ce qui est excessif ou non poserait un problème d’équilibre des pouvoirs et de contrôle parlementaire des règles en vigueur. Ne nous exposons pas au risque d’enfreindre la liberté de publicité et d’entreprise sur des fondements aussi flous et dans une perspective aussi éloignée.

M. Matthieu Orphelin. L’amendement a ceci de très intéressant qu’il vise à quantifier l’impact des produits, en lien avec la publicité.

Quel est le montant de recettes publicitaires en jeu dans l’article 4 ? Un calcul rapide permet d’évaluer sa cible à 0,1 % du total des publicités. Le confirmez-vous ?

Combien de tonnes de CO2 par an le même article permettra-t-il d’économiser d’ici à 2030 ? Ce sont 2 millions de tonnes dont nos amendements vous proposeront de faire l’économie, avec des élasticités prix et publicité classiques.

Mme Véronique Riotton. L’amendement a le grand avantage de donner du sens à l’article 1er. Celui-ci arrête le principe d’un affichage environnemental destiné à éclairer le consommateur dans ses décisions d’achat. Puisque nous devons changer notre façon de consommer et de produire, c’est un signal important adressé à ceux qui mettent les produits sur le marché et à ceux qui les consomment. D’où l’intérêt de cette articulation entre affichage environnemental et implication du secteur publicitaire.

Nous avons encore un peu de temps avant le rapport, puis la séance publique. Des intentions d’engagement se manifestent, mais quel a été le chemin parcouru depuis le rapport Libaert paru en juin dernier ? À en juger par les publicités encore diffusées, il n’est pas à la hauteur des attentes.

Je voterai l’amendement pour progresser sur cette voie d’ici à la séance.

M. Jean-Marie Sermier. Si l’on prend un peu de distance, on s’aperçoit que tout le monde a raison dans cette affaire, mais que nous ne disposons pas de la technique permettant de résoudre le problème. M. Orphelin l’a dit, il faut mettre progressivement fin à la publicité pour les énergies émettrices de CO2 ; mais, comme l’a souligné M. Kasbarian, on ne peut donner à un gouvernement futur un chèque en blanc concernant des éléments que nous connaissons mal, qui n’ont pas fait l’objet d’une appréciation technique, qui ne sont pas scientifiquement certains et qui engagent des décisions politiques. De grandes entreprises qui vendent des carburants fossiles ont aussi d’autres activités ; va-t-on supprimer leur nom des maillots de l’équipe de football locale ?

Si, sur le fond, nous sommes d’accord, sur la forme, l’amendement ne va donc pas. Nous regrettons de ne pas avoir su vous convaincre de supprimer l’article 4 pour le retravailler. Je vous invite néanmoins à y réfléchir d’ici à la séance, sans trop y croire, et surtout pour l’avenir de l’entreprise France.

Mme Cendra Motin. Voici la position du groupe La République en marche. Depuis plusieurs mois, nous parlons beaucoup de la publicité et de l’éventualité d’utiliser un score environnemental. Mais le problème, ce n’est pas la publicité, simple vecteur de communication : ce sont, le cas échéant, les produits. Le score environnemental, fondé sur des informations fiables et vérifiables, fournira des informations au consommateur pour qu’il puisse faire un choix éclairé. L’enjeu n’est pas d’interdire la publicité – la moitié des publicités pour des voitures concernent des véhicules électriques ou hybrides, qui ne représentent pas du tout la moitié du marché. L’acte d’achat relève de la liberté du consommateur, dont nous souhaitons évidemment tous qu’il soit un consommacteur.

Imaginons que l’on fonde sur le Nutri-score un régime d’interdiction équivalent : il deviendrait interdit de faire de la publicité pour les sardines à l’huile, alors qu’il n’est pas mauvais d’en manger de temps en temps.

Monsieur Orphelin, on ne sait pas non plus combien de tonnes de CO2 le plan national d’éducation à l’environnement et au développement durable va permettre d’économiser. Il s’agit de changer les mentalités, de changer de culture, et tout n’est pas évaluable au sens où vous l’entendez. Nous aurons d’ailleurs l’occasion de reparler de vos évaluations.

M. Dominique Potier. Selon l’ADEME, le montant des dépenses publicitaires représente 2,3 % de celui des dépenses des Français. Et puisque vous parlez du Nutri-score, madame Motin, sachez que, d’après certaines études, on consacre 500 fois plus d’argent à la publicité pour des produits notés D ou E qu’à la prévention en santé publique en matière d’alimentation. Vous pouvez toujours nous conter la légende de la liberté des consommacteurs : foutaises ! La vérité, c’est que nos imaginaires sont dominés par l’influence de la publicité, et que, plus on subit la précarité et la pauvreté économique, sociale et culturelle, plus on est dépendant d’une puissance privée qui ne nous incite guère à vivre sainement.

Dans ce contexte, l’innovation que propose Mme Calvez est tout à fait intéressante. Monsieur Kasbarian, vous ne vous êtes nullement ému du fait que la taxe carbone soit fixée par décret, sans aucune précision sur les filières qui seront prioritaires dans les années qui viennent ni sur la question de savoir qui, de Bercy, du MEDEF ou de l’Association française des entreprises privées (AFEP), va les identifier. Mais que l’on envisage la possibilité, en 2026, de taxer ou de limiter certaines publicités sur le fondement d’un score carbone au nom de la santé de la planète et des personnes, et là, vous réagissez. Il y a vraiment deux poids deux mesures !

Le rééquilibrage entre puissance publique et puissance privée s’impose si nous voulons faire des citoyens et des hommes libres, et refaire démocratie.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’amendement est intéressant, mais prématuré. On ne peut pas passer à l’interdiction avant d’avoir précisément défini l’Éco-score.

Du point de vue opérationnel, on ne peut pas interdire la publicité pour les voitures de la même manière que celle pour le tabac, car ce n’est pas pour les voitures qu’elles vendent le plus, ni pour les plus polluantes que les marques font le plus de publicité.

Ensuite, pourquoi une telle méfiance envers les Français, de tels doutes quant à leur intelligence ? Ils seraient dominés, ne seraient pas maîtres de leur destin, dites-vous. Donnez-leur l’information, faites-leur confiance, et ils choisiront. C’est ce qu’ils veulent. Leur consommation le montre, notamment dans le domaine alimentaire. Ils évoluent tous les jours. Faisons donc le pari de l’intelligence avant d’en venir à l’interdiction.

M. Alexandre Holroyd. Je suis d’accord. Que s’agit-il d’interdire exactement ? L’amendement ne le dit pas. Quels paramètres utilisera-t-on ? On en délègue le choix au Gouvernement, comme l’a dit Guillaume Kasbarian, et même, si je comprends bien l’amendement, à des organismes non gouvernementaux !

Du point de vue pratique, les constructeurs automobiles produiront certainement, à l’avenir, des véhicules acceptables eu égard à l’indicateur et d’autres qui ne le seront pas. Le recours à l’indicateur amènera-t-il à interdire la promotion de la marque elle-même ?

L’amendement est sympathique, mais n’indique ni ce qui sera interdit, ni qui en décidera.

Mme Delphine Batho. Les Français sont intelligents, c’est vrai ; cela n’a pas empêché de considérer que, pour des raisons de santé publique, il fallait interdire la publicité pour le tabac et réguler celle pour l’alcool. Et savez-vous de quoi se faisaient traiter les partisans de l’interdiction à l’époque ? D’ayatollahs de la santé publique ! Le même mot que celui qu’a utilisé le Premier ministre la semaine dernière en réunion de groupe, paraît-il…

Mme Christine Hennion. On se trompe en comparant ce qui est proposé ici à la loi Évin. À l’époque, la question était la même qu’aujourd’hui : faut-il interdire le produit ou la publicité ? Mais, dans le cas du tabac et de l’alcool, l’interdiction du produit risquait de créer un marché noir et de susciter des trafics ; ce risque n’existe pas du tout dans le cas qui nous occupe. Ce sont donc bien certains produits qu’il faudra peut-être en venir à interdire.

La commission rejette l’amendement.

Amendements CS4440, CS4442, CS4441 et CS4443 de M. Loïc Prud’homme (discussion commune)

M. Loïc Prud’homme. Le rapporteur général et M. Holroyd regrettaient que l’amendement précédent ne dise pas précisément ce qui allait être interdit. Mon amendement CS4440 devrait les satisfaire, puisqu’il vise très clairement à interdire la publicité pour les véhicules les plus polluants, ceux qui émettent plus de 95 grammes de CO2 par kilomètre.

Comme l’a rappelé Dominique Potier, les marques savent très bien influencer nos choix de consommation ou de non-consommation, en faisant passer pour indispensables des biens ou services totalement inutiles ou superflus et en nous persuadant que la sobriété n’est pas une solution et qu’il est possible de consommer sans cesse davantage sans altérer la quantité de ressources disponibles ni la qualité de l’environnement.

Les investissements du secteur automobile dans la publicité et la consommation ont été estimés à 4,3 milliards d’euros en 2019, dont 5 % seulement sont consacrés aux gammes de véhicules électriques – et non la moitié, contrairement à ce qui a été affirmé. C’est autant d’argent qui n’est pas investi dans la recherche en faveur de la transition écologique. Il est impossible de préparer la conversion du parc automobile à des modes moins polluants et le développement des transports en commun si la publicité continue de vendre aux citoyens le mythe de l’accomplissement individuel et de l’épanouissement personnel par l’acquisition de véhicules à motorisation thermique.

L’amendement CS4442 vise à interdire la publicité en faveur des bouteilles en plastique jetables. On produit 1 million de bouteilles en plastique par minute dans le monde ; en France, 9,3 milliards de litres d’eau en bouteille plastique jetable ont été bus en 2018. Or seuls 49 % des 25 millions de bouteilles jetées quotidiennement sont recyclés, et les bouteilles en plastique et leurs bouchons font partie des dix déchets que l’on retrouve le plus sur nos plages. Ce n’est pas un problème mineur !

L’amendement CS4441 porte sur la publicité en faveur des vols aériens. En effet, il ne pourra y avoir de transition écologique rapide – alors que c’est urgent – si nous ne nous défaisons pas de l’emprise cognitive que les multinationales ont établie depuis des décennies par ce type de publicités. Nous proposons donc d’interdire celles qui sont les plus problématiques pour la transition écologique : pour des vols particuliers entre deux villes situées en France métropolitaine ou pour des offres de voyage incluant des vols internationaux longs courrier dans le cadre de séjours de moins d’une semaine.

Chaque jour, nous voyons en moyenne 1 200 à 2 200 messages publicitaires et nous subissons 15 000 stimuli commerciaux. Comment les Français pourraient-ils se faire un avis indépendant de ce bombardement publicitaire et cognitif, monsieur le rapporteur général ? Selon un rapport de juin 2020, ce matraquage a pour but non pas d’adapter la marchandise aux besoins réels de l’individu, mais, au contraire, d’accorder ces besoins à l’objectif d’accumulation infinie de marchandises.

Enfin, l’amendement CS443 vise la publicité pour les téléphones portables. On en vend 25 millions chaque année en France, et 50 smartphones par seconde dans le monde. L’empreinte environnementale et le coût social de cette accumulation et de cette rotation rapide sont considérables : il faut 70 kilogrammes de matière première pour fabriquer un seul smartphone, soit 583 fois son poids ; ces appareils sont faits de métaux souvent rares, voire issus de zones de conflit, comme le cobalt ou le tantale, extraits à 80 % en République démocratique du Congo. Selon l’UNICEF, 40 000 enfants travaillent à ces extractions.

Mais la main-d’œuvre dédiée à la fabrication ne pèse que quelques euros dans le coût final de ces téléphones qui nous arrivent par milliers par porte-conteneur et par avion, de sorte que l’empreinte écologique est concentrée à 90 % dans la fabrication et le transport. De plus, elle augmente d’année en année. Sur les 47 millions d’iPhone vendus en 2010, seuls 10 % ont été recyclés. Pire, la plupart des fabricants, Apple et Samsung en tête, collent ou soudent les batteries à l’intérieur du téléphone pour compliquer l’entreprise déjà très ardue de recyclage.

À cela s’ajoute l’obsolescence programmée, matérielle et logicielle : 88 % des téléphones qui sont remplacés fonctionnent encore, selon l’ADEME. C’est toujours le bombardement publicitaire qui nous pousse à nous séparer ainsi d’appareils en état de marche.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Vous avez divisé en quatre amendements celui que vous nous aviez précédemment présenté d’un seul tenant ; mon avis reste défavorable.

Concernant les bouteilles d’eau en plastique, vous proposez d’en interdire non seulement la publicité, mais également la distribution gratuite, ce qui ne serait pas de bon aloi en période de canicule. Quant à l’interdiction des vols entre deux villes situées en France métropolitaine ou des offres de voyage incluant des vols internationaux, je doute qu’elle soit pertinente pour nos territoires d’outre-mer.

Mme Barbara Pompili, ministre. Même avis, pour les mêmes raisons qu’à propos des amendements précédents : tenons-nous en à la méthode que nous avons décidée ; tout ce qui préempte les résultats de la mission et les conclusions que nous pourrions en tirer est incompatible avec elle.

M. Bruno Millienne. La gauche et l’extrême gauche ont bien changé en quelques décennies. En 1968, il était interdit d’interdire ; aujourd’hui, il est autorisé d’interdire tout ! Quelle belle société vous nous préparez, monsieur Prud’homme : j’en salive déjà !

Concernant le secteur automobile, vous devriez mieux vous renseigner : la norme Euro 7, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2025, est très contraignante et de nombreux constructeurs pensent déjà arrêter la production de véhicules à moteur uniquement thermique à énergie fossile pour ne plus mettre sur le marché, dès cette date, que des véhicules hybrides et électriques, ce qui devrait vous ravir. La fatwa contre les constructeurs automobiles, ça suffit : ils ont pris le virage ! Il y a encore des progrès à faire ; mais votre société de l’interdit, au groupe MoDem et Démocrates apparentés, on n’en veut pas !

M. Matthieu Orphelin. Puisque l’intelligence des citoyennes et des citoyens a été convoquée, permettez-moi de rappeler les dernières études d’opinion : 88 % d’entre eux pensent que les entreprises incitent à la surconsommation au moyen de la publicité, 80 % que la publicité sur les produits les plus émetteurs de gaz à effet de serre devrait être régulée, et 75 % sont favorables à une restriction ou à une interdiction de la publicité pour les voitures les plus polluantes. Les Français savent donc très bien qu’il faut réguler la publicité. Logiquement, les mesures dans ce domaine sont parmi celles qui ont été le moins bien notées par les 150 de la Convention citoyenne, car pas assez nombreuses.

La publicité va à l’encontre du libre arbitre puisqu’elle agit sur des processus neurobiologiques de stimulation et de récompense. Les travaux de recherche, notamment ceux de Mehdi Khamassi, du CNRS, ont montré que son efficacité est liée à un conditionnement basé sur la répétition : après une quinzaine d’expositions, l’envie de consommer est suscitée, même si l’on sait que le produit est néfaste.

M. Loïc Prud’homme. Je reconnais l’esprit toujours très mesuré et élégant de notre collègue Bruno Millienne. La caricature, ce n’est pas son genre !

Il s’agit bien, à travers ces amendements, de nous libérer d’une emprise cognitive, de permettre à chacun et à chacune de retrouver la liberté, chère à une précédente génération, de choisir sa trajectoire de vie. Il ne s’agit pas d’interdire. Votre positionnement politique, à vous, est constant, qui cherche à servir les intérêts particuliers de ceux qui veulent sans cesse nous vendre plus de biens et faire du profit, au détriment de la planète et de notre santé.

Mme Delphine Batho. Quelle spectaculaire défense du consumérisme !

Dans son avis, le Haut Conseil pour le climat (HCC) indiquait : « De nombreuses mesures portent sur des périmètres d’application restreints, couvrant une part insuffisante des activités émettrices de gaz à effet de serre en France. Par exemple, l’article 4 visant à réguler la publicité ne porte que sur les énergies fossiles, et non plus largement sur un ensemble de biens et de services manifestement incompatibles avec la transition tels que les véhicules lourds et peu aérodynamiques dits SUV ». Peut-être sera-t-il traité d’amish, d’ayatollah ou de gauchiste.

À côté des propositions de la Convention citoyenne pour le climat, extrêmement fortes et claires en la matière, le projet de loi présente à peine un filet d’eau tiède. Vous usez d’une technique que, dans le Poitou, on appelle le « pousse plus loin » : votre prédécesseure, madame la ministre, avait déjà commandé un rapport sur la publicité, la Convention citoyenne en a traité à son tour, et le projet de loi a suivi. Et vous nous renvoyez maintenant à un rapport que vous-même avez commandé. Soyons sérieux !

M. Dominique Potier. Au-delà de la liberté, il me semble que les sources intellectuelles et spirituelles du MODEM comprennent également la solidarité.

M. Bruno Millienne. Aux interdits nous préférons les solutions.

M. Dominique Potier. Par 502 voix sur 694, le Parlement européen vient d’adopter la loi que nous avions adoptée il y a quatre ans dans notre assemblée sur le devoir de vigilance, dont un aspect est la lutte contre la collecte des métaux rares sur laquelle prospèrent les conflits interethniques et les mafias dans le monde. On ne peut pas en appeler à la seule liberté. Au nom des valeurs qui sont les vôtres, il faut entendre le message sous-jacent d’une réforme du capitalisme et de partage de la ressource dans un monde fini.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements CS5060 de M. Matthieu Orphelin et CS5061 de M. Jean-Charles Colas-Roy (discussion commune).

M. Matthieu Orphelin. Il s’agit de mettre en place un cadre en vue d’une régulation progressive de la publicité. Programmée sur dix ans, avec l’ensemble des acteurs, elle concernerait tous les supports, y compris la publicité en ligne. Le Gouvernement serait chargé de définir, par la concertation, les catégories de produits et les seuils.

M. Jean-Charles Colas-Roy. La publicité influence fortement nos modes de consommation. Les membres de la Convention citoyenne pour le climat, après avoir entendu en audition notamment Valérie Masson-Delmotte, experte du GIEC, ont d’ailleurs proposé que nous allions plus loin que la simple interdiction de la publicité en faveur des énergies fossiles.

Il nous faut être plus volontaristes s’agissant de son encadrement : utilisons l’affichage environnemental défini à l’article 1er afin d’encadrer et d’interdire progressivement, c’est-à-dire à partir de 2023, la publicité sur les produits et les services les plus nocifs pour l’environnement.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Je trouve très appréciable que les amendements identiques déposés par des groupes différents soient sourcés. Ce n’est pas le cas de ceux-là, mais j’apprécie beaucoup cette transparence.

Mme Delphine Batho. Ce sous-entendu est inadmissible !

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Les amendements reprennent, en effet, l’article 2 de la proposition de loi déposée par Matthieu Orphelin et débattue en commission au mois de janvier dernier. J’y suis opposée, comme à tout élargissement, graduel ou non, des interdictions en matière de publicité qui, vous avez raison, influence nos comportements ainsi que nos actes d’achat : c’est même son objet principal.

S’agissant des véhicules, les engagements pris par la filière en faveur de la promotion des véhicules électriques, hybrides rechargeables et hybrides, à savoir leur réserver 50 % des investissements publicitaires en 2021, puis 60 % en 2022 et 70 % en 2023, témoignent d’une tendance très claire et très nette. On peut donc faire confiance à ce secteur.

Sans être vendue à des lobbies, je rappelle que le secteur de la communication représente dans notre pays 700 000 emplois, et que 1 euro investi en matière publicitaire rapporte 7,65 euros à notre PIB.

Mme Barbara Pompili, ministre. Au risque de me répéter, je laisse sa chance à la démarche entreprise par le Gouvernement auprès des différentes filières et annonceurs qui ont pris des engagements volontaires, que j’espère les plus ambitieux possible, en matière de contenu des publicités, et que nous pourrons évidemment contrôler. Je suis donc défavorable aux amendements puisqu’ils ne retiennent pas la même méthode.

M. Matthieu Orphelin. Vous imaginez bien, madame la présidente, à quel point j’ai apprécié votre sous-entendu à propos de mon amendement, alors même, que depuis le début du quinquennat, je source tous mes amendements. Vous avez semblé dire que mon amendement avait été écrit par d’autres – sans doute de méchantes ONG.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Ce n’est pas ce que j’ai dit.

M. Matthieu Orphelin. Il s’agit juste d’un amendement que j’avais déposé en tant que rapporteur dans le cadre de l’examen de ma proposition de loi.

Madame la ministre, une fois de plus, combien a coûté l’étude d’évaluation du Boston Consulting Group ?

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Mme la ministre a déjà répondu de façon parfaitement claire à cette question lors d’une audition.

M. Loïc Prud’homme. Si la communication représente 700 000 emplois, au siècle dernier les mines et les maréchaux-ferrants en représentaient quelques milliers : on a su évoluer et bouger. Il faut regarder ce qu’il est intéressant de développer au niveau macroéconomique du côté de la transition écologique pour créer de l’emploi.

Par ailleurs, l’écosystème de la presse et de la publicité appartient et profite à dix milliardaires qui détiennent 90 % des quotidiens nationaux. Mettons toutes les données sur la table pour voir comment sortir de l’emprise publicitaire et retrouver notre libre arbitre !

Mme Delphine Batho. Le sous-entendu était effectivement inadmissible : tous les amendements des députés Écologie Démocratie Solidarité sont sourcés.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Je n’ai pas dit le contraire.

Mme Delphine Batho. Ce n’est pas forcément le cas de tous ceux déposés par nos collègues.

Vous avez dit qu’il était étonnant que ces deux amendements soient quasiment identiques sans être sourcés, ce qui sous-entendait qu’ils auraient été écrits par d’autres. Or l’amendement de Matthieu Orphelin et celui de Jean-Charles Colas-Roy proviennent de la proposition de loi du groupe EDS.

Il se trouve que, dans le cadre de la réforme du règlement de l’Assemblée nationale, j’ai proposé que le sourcing de tous les amendements devienne obligatoire. Votre majorité s’y est opposée. Nous n’acceptons donc pas de telles insinuations. Par ailleurs, au nom du dépassement des clivages et de l’intelligence collective, M. Colas-Roy a le droit de trouver que l’article 2 de la proposition de loi d’EDS était intelligent et de le reprendre dans un amendement.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. J’ai juste dit qu’il était particulièrement appréciable, lorsque l’on examine un grand nombre d’amendements identiques, qu’ils soient sourcés, ce qui est systématiquement le cas des vôtres, madame Batho, ainsi que ceux du groupe La France insoumise. Arrêtez donc de me faire, comme vous le faites depuis dix jours sur les réseaux sociaux, des procès d’intention !

M. Thierry Benoit. Les auteurs des amendements ont été très bien inspirés.

Ce qui gêne, semble-t-il, le Gouvernement n’est pas l’interdiction de la publicité en faveur de produits néfastes pour l’environnement, mais la manne financière qu’elle peut représenter pour celles et ceux qui sont susceptibles d’en bénéficier : médias télévisuels, radios, presse écrite, monde associatif professionnel ou amateur.

Nous devrions, si l’on veut collectivement emprunter une telle trajectoire, en débattre : comment substituer des recettes équivalentes à ce que représentent ces publicités que nous voudrions voir disparaître ?

M. Guillaume Kasbarian. Que la liste des produits et services concernés par l’interdiction de toute publicité à fort impact environnemental soit définie par décret, de même que les seuils d’impact négatif sur l’environnement, pose un problème conceptuel assez important : je ne peux pas expliquer à mes concitoyens ce que l’on interdit, qui va le faire et sur quelle base.

Notre collègue Prud’homme a évoqué, à propos des pertes d’emploi, les mineurs, disant qu’ils s’étaient bien adaptés. Je suis choqué par cette manière de raisonner. Oui, quand on vote, cela a des conséquences économiques et sociales qu’il n’est pas anormal de rappeler sans que l’on y voie la main des lobbies.

M. Alexandre Holroyd. Je suis partagé. Si je trouve objectivement les amendements très intéressants, la jauge pose problème – la définition que donne l’amendement de M. Orphelin d’un impact négatif sur l’environnement est relativement large.

La publicité influence certes nos comportements, mais moins que l’interdiction. Prétendre que cette dernière permet mieux l’expression du libre arbitre est difficile à suivre intellectuellement.

M. Benoit a raison, la publicité représente une manne financière et en emplois, qu’il faut quantifier s’agissant des produits qui ont vocation à être interdits. Pour ce faire, il faut qualifier ceux-ci. Or on ne peut pas le faire, donc on ne peut pas débattre d’une solution pérenne.

M. Jean-Marie Sermier. Nous sommes passés en quelques instants d’un débat sur la publicité pour les énergies fossiles, qui n’a pas été tranché du point de vue technique, à un autre, encore plus vague, sur les produits à fort impact sur l’environnement avant d’en venir au procès de la publicité et des publicitaires.

Revenons-en au projet de loi et à cette question du groupe Les Républicains : quelles solutions techniques et scientifiques mettrez-vous en œuvre pour l’appliquer ?

M. Jean-Charles Colas-Roy. L’exposé des motifs du projet de loi se réfère expressément à la loi Évin, s’agissant de l’article 4 : « À l’instar de la loi Évin, il vient inscrire dans le droit le principe qu’il ne sera plus possible de faire de la publicité pour les énergies fossiles en raison de leur impact direct sur le changement climatique. »

La question n’est pas tant de faire confiance aux Français puisque l’interdiction est posée dans l’article 4. Elle porte sur ce qu’il nous paraît légitime et bon de faire. Je pense que l’on peut aller plus loin que l’interdiction de la publicité pour les énergies fossiles.

Le renvoi à des décrets a suscité chez certains collègues des prises de position péremptoires. Attention, car à d’autres endroits du texte, on renvoie non seulement à des décrets, mais également à des ordonnances !

Enfin, notre boussole sur ce texte doit également être les travaux des membres de la Convention citoyenne pour le climat et les objectifs de la France en matière de réduction de gaz à effet de serre : les scientifiques nous disent que l’on peut aller plus loin sur ces sujets.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements CS1785 de Mme Chantal Jourdan, CS1782 et CS1784 de M. Dominique Potier (discussion commune).

Mme Chantal Jourdan. L’amendement CS1785 vise à interdire, un an après l’entrée en vigueur de la loi, la publicité en faveur des produits et services présentant l’impact le plus excessif sur le climat et dont la liste serait fixée par décret.

Il s’agit d’aller au-delà de l’interdiction de la publicité pour les énergies fossiles afin de faire évoluer de manière durable les comportements des consommateurs. Si tout être jouit de sa liberté de penser, la nécessité d’informer ne doit pas empêcher la prise en compte de tous les phénomènes d’influence qui s’apparentent à de l’emprise. L’interdiction protège cette liberté.

M. Dominique Potier. Les amendements CS1782 et CS1784 ont été coécrits avec le mouvement Impact France, avant-garde de l’économie sociale se présentant comme une alternative au MEDEF.

Leur approche, que le groupe Socialistes et apparentés fait sienne, passe par la réforme de l’entreprise. Nous ne nous intéressons pas qu’au produit. La pire des entreprises capitalistes des points de vue environnemental et social peut, en effet, produire un produit labellisé agriculture biologique et équitable pour un segment de marché. Ce qu’il importe d’apprécier, c’est le process et l’entreprise dans son ensemble.

L’originalité de ces amendements tient à ce qu’ils visent l’entreprise comme ayant le droit ou non de faire de la publicité pourvu qu’elle respecte un minimum de conditions. Dans le premier, si elle est mal notée à l’Impact-score – élaboré très facilement avec quelques éléments sociaux et environnementaux très clairs –, elle ne peut pas aller sur le marché publicitaire car ses méthodes détruisent la société et la planète.

Dans le second, ses résultats doivent s’inscrire dans la trajectoire de lutte contre le réchauffement climatique énoncée dans l’Accord de Paris. Une entreprise qui ne la suivrait pas serait interdite de pub, car considérée comme captant des ressources et provoquant la mort des autres, dans une relation d’interdépendance. La question du carbone n’est pas une question de confort mais de vie ou de mort.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Ces amendements portent sur l’élargissement du champ des interdictions. Celui de Mme Jourdan concerne d’autres types de publicité, ceux de M. Potier introduisent l’interdiction sur la base de critères d’impact à la fois écologique et social. Ils rejoignent des travaux européens, auxquels notre ancienne collègue et ministre Olivia Grégoire participe, en matière de performances extra-financière et de devoir de vigilance.

Je reste convaincue qu’il y a davantage de sens à éclairer les consommateurs sur leurs choix de consommation, y compris au moyen de notations, plutôt qu’à élargir le champ des interdictions. Avis défavorable aux amendements.

Mme Barbara Pompili, ministre. Ces idées sont intéressantes, mais elles ne vont pas dans le cadre de la démarche choisie par le Gouvernement. Avis défavorable.

M. Dominique Potier. Madame la ministre, on ne peut pas dire que la coconstruction prospère beaucoup depuis le début !

Madame la rapporteure, s’agissant du PIB, l’économie sociale crée plus d’emplois et de valeur que l’autre économie, et elle les partage mieux : pourrions-nous nous en convaincre une bonne fois pour toutes ? N’ayons pas peur du changement – sauf si vous craignez l’abolition des privilèges !

M. André Chassaigne. J’apporte mon soutien à ces amendements. Il est très important de veiller au respect des engagements climatiques, en particulier de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) définie dans le code de l’environnement et de l’accord de Paris. J’avais d’ailleurs déposé un amendement, qui a été déclaré irrecevable, visant à s’assurer que les grandes entreprises prennent des engagements climatiques afin que leur activité soit en ligne avec ceux-ci. M. Potier a été plus habile en prenant le biais de la publicité !

M. Alexandre Holroyd. Je rejoins M. Chassaigne s’agissant des amendements – j’en avais moi-même déposé dans le même sens. Nos règles constitutionnelles nous interdisent d’aborder, dans le cadre de ce texte, la question des données non financières. C’est parfaitement légitime, et vous avez accompli un travail remarquable, madame la présidente.

Cela étant, il me paraît impératif que les grandes entreprises publient à l’avenir des stratégies et des données non financières, et montrent comment elles comptent s’aligner sur la SNBC, sur le plan national, et l’Accord de Paris, sur le plan international. Ces informations devraient être annexées à des projets d’investissement très concrets, engagés sur plusieurs années. J’espère que l’Europe fera preuve d’ambition dans le cadre de la révision de la directive sur la publication d’informations extra-financières (NFRD), en avril.

Mme Jennifer De Temmerman. Les entreprises, contrairement à ce qu’on peut entendre, sont demandeuses de ce type de mesures. J’ai rencontré, au forum politique de haut niveau pour le développement durable, à New York, des représentants de grandes entreprises appartenant au Global Compact – réseau international des entreprises engagées pour les objectifs de développement durable. Ces sociétés publient des rapports extra-financiers, en s’assignant des objectifs de développement durable, et regrettent que cela ne soit pas reconnu. Elles souhaiteraient que ce type de documents soient pris en compte et valorisés.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS5018 de la rapporteure.

Amendements CS3276 de Mme Aude Luquet et CS3530 de M. Jimmy Pahun (discussion commune).

Mme Aude Luquet. L’amendement CS3276 a pour objet d’éviter les distorsions entre supports de communication, en interdisant la publicité directe ou indirecte pour les énergies fossiles quel que soit le moyen de communication, physique ou numérique.

Mme Frédérique Tuffnell. Comme pour le tabac, allons jusqu’au bout en interdisant la publicité directe et indirecte pour les énergies fossiles, quel que soit le support utilisé. L’État doit démontrer sa volonté de lutter contre le changement climatique. Nous devons encadrer strictement la publicité. Je partage l’idée selon laquelle il faut endiguer les biens et services climaticides. La mesure proposée encouragerait les entreprises à faire de la publicité pour des produits vertueux.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je considère que ces amendements sont satisfaits, car l’interdiction de la publicité s’appliquera indépendamment du support employé. Il n’est pas question de recréer des asymétries entre les médias traditionnels, qui seraient privés de ressources publicitaires, et les supports numériques, qui pourraient continuer à en bénéficier. Demande de retrait.

Mme Barbara Pompili, ministre. L’article 4 ne précisant pas quels supports sont concernés, il va de soi que l’interdiction s’applique à l’ensemble d’entre eux. Cette disposition induira un changement culturel majeur. De ce point de vue, votre amendement est satisfait.

Quant à étendre l’interdiction à la publicité indirecte, cela ne me paraît pas opportun. C’est l’arrêt de la publicité directe pour ces énergies qui importe pour faire évoluer les comportements. Votre proposition risquerait, de surcroît, d’étendre significativement le champ de l’interdiction sans qu’on puisse en mesurer précisément les conséquences, qui pourraient se révéler excessives au regard de l’objectif visé. Enfin et surtout, la mesure risque d’être fragilisée au regard du principe de proportionnalité consacré par la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Cette voie lui paraissant imprudente, le Gouvernement demande le retrait des amendements ; à défaut, il émettrait un avis défavorable.

Mme Frédérique Tuffnell. J’entends les arguments juridiques, mais il me paraît tout de même préférable de viser la publicité directe et indirecte.

M. Julien Dive. Au-delà du numérique et de l’audiovisuel, l’interdiction s’étend-elle aux supports papier, aux panneaux, aux flocages sur des maillots de sport, par exemple ?

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’interdiction concerne tous les supports dès lors que la publicité cible les énergies fossiles, et non une marque. Une grande entreprise pourra continuer à floquer les maillots de football à son nom.

M. Matthieu Orphelin. Le champ de l’article 4 est donc très restreint, si la publicité pour une marque qui ne produit, par exemple, que des bouteilles de gaz est autorisée. Je repose ma question : avez-vous évalué le nombre de tonnes de CO2 que l’on éviterait d’émettre avec cet article ?

Mme Barbara Pompili, ministre. Je répète qu’il s’agit d’un travail en cours. Comme l’a relevé le Conseil d’État, l’interdiction de la publicité pour les énergies fossiles adresse un message symbolique. Cela représente certes une faible part de la publicité, mais l’intérêt, ici, est d'instaurer à travers les articles 4 et 5 un dispositif législatif efficace pour que la publicité sur les produits soit adaptée aux enjeux, notamment environnementaux, de notre monde. Le dispositif concernera l’ensemble de la publicité, l’interdiction posée à l’article 4 ne concernant qu’une petite partie du champ.

L’amendement CS3276 est retiré.

La commission rejette l’amendement CS3530.

Amendement CS3894 de la rapporteure.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Dans son avis, le Conseil d’État a considéré que l’objet de l’article 4 n’est pas défini assez précisément : on ne sait pas s’il couvre tous les produits ou seulement les sources d’énergie fossile. L’amendement tend donc à préciser le champ de l’article, afin d’éviter une éventuelle censure, et à envoyer le message clair que de l’interdiction de certaines publicités en raison de leur contribution au dérèglement climatique. La liste des produits faisant l’objet d’une interdiction de publicité pourra être complétée et précisée par décret.

Mme Barbara Pompili, ministre. L’amendement répond de manière bienvenue aux demandes d’éclaircissements formulées par des parlementaires. Avis favorable.

Mme Delphine Batho. Le Conseil d’État écrit dans son avis, après avoir évoqué le risque d’incompétence négative : « Si le champ de l’interdiction devait être interprété comme ne visant que la publicité directe pour des sources d’énergie, et elles seules, le caractère peu fréquent de ces publicités directes et l’absence de référence à des modes de consommation ne permettent pas de considérer cette mesure d’interdiction comme adaptée et proportionnée à l’objectif poursuivi, qui est de diminuer la consommation des produits les plus fortement émetteurs de gaz à effet de serre. »

Mme Barbara Pompili, ministre. Merci de confirmer mes propos !

M. André Chassaigne. Il aurait fallu voter l’amendement précédent qui visait la publicité « directe ou indirecte ». Une publicité, qu’elle vise directement ou indirectement la vente d’un produit, peut avoir le même résultat.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’amendement auquel vous faites référence visait les supports concernés par l’interdiction. Je vous confirme que cette dernière s’appliquera à l’ensemble des supports. Le présent amendement a trait à l’objet de la publicité.

La commission adopte l’amendement.

Amendements CS3209 de Mme Sylvie Bouchet Bellecourt et CS2957 de M. Éric Alauzet (discussion commune).

Mme Sylvie Bouchet Bellecourt.  L’énergie nucléaire n’étant ni renouvelable ni carbonée, la question se pose de savoir si la publicité pour les entreprises qui la distribuent demeurera autorisée.

Le groupe Les Républicains tient à rappeler par cet amendement d’appel, CS3209, que l’énergie nucléaire émet très peu de CO2 et qu’elle contribue, comme les énergies renouvelables, à la lutte contre le changement climatique. Comparé aux énergies éolienne et solaire, le nucléaire présente plusieurs avantages : il a un fort potentiel de production électrique – un seul réacteur nucléaire fournit autant d’électricité qu’un millier d’éoliennes ; il fournit une énergie disponible à tout moment quand le vent et le soleil sont intermittents. C’est un atout incontestable et un avantage considérable sur le charbon et le gaz naturel, sources de plus de 60 % de l’électricité mondiale.

Les députés du groupe LR rejettent, par ailleurs, le principe d’une interdiction de la publicité dès lors qu’il n’est question ni d’addiction ni de violence. Nous préférerions la diffusion d’une information climatique dans le cadre des campagnes publicitaires.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Par l’amendement précédent, nous avons interdit la publicité en faveur de la vente des énergies fossiles. On ne pourra donc plus faire de publicité directe pour l’uranium – laquelle, à ma connaissance, est assez rare. Toutefois, ce sera sans conséquence sur les usages de ce métal : la publicité en faveur du nucléaire demeurera autorisée. Votre amendement étant satisfait, je vous demande de le retirer ; à défaut, l’avis serait défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. L’article 4 introduit, au chapitre Ier du titre VIII du livre V du code de l’environnement, une section VI intitulée « Publicité sur les produits et services ayant un impact sur le climat excessif ». Votre crainte me paraissant infondée, j’émets un avis défavorable sur l’amendement CS3209. Même avis sur l’amendement CS2957, qui me semble superflu.

M. Jean-Marie Sermier. Madame la ministre, vous n’avez pas répondu clairement à la question soulevée par cet amendement d’appel : pourra-t-on encore faire de la publicité pour l’énergie nucléaire, bien que celle-ci utilise de l’uranium, qui est un minerai fossile ? Nous sommes prêts à retirer l’amendement de notre groupe si vous nous confirmez que l’énergie nucléaire ne sera pas affectée par l’article 4.

Mme Barbara Pompili, ministre. Je vous confirme que l’énergie nucléaire n’est pas concernée par l’interdiction prévue à l’article 4. Elle n’est généralement pas considérée comme faisant partie des énergies fossiles dans le cadre des négociations internationales sur le climat visant à réduire la part de ces énergies. En tout état de cause, ce n’est pas le sujet de l’article.

L’amendement CS3209 est retiré.

La commission rejette l’amendement CS2957.

Amendements CS3267 de Mme Fannette Charvier, CS2649 de Mme Laurence Vichnievsky et CS3255 de M. Fabien Lainé (discussion commune).

M. Jean-Marc Zulesi. L’amendement CS3267 vise à interdire la publicité directe pour une source d’énergie fossile et la publicité pour des produits consommateurs d’énergie fossile.

M. Nicolas Turquois. Il est rare que des publicités portent directement sur les énergies fossiles ; plus fréquemment, elles concernent des produits qui y font appel. Aussi les amendements CS2649 et CS3255 visent-ils les produits consommateurs des énergies fossiles, tels que les chaudières ou les véhicules frappés de malus.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Nous ne souhaitons pas élargir la liste des produits interdits de publicité. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Avis également défavorable. Le Gouvernement table sur les engagements volontaires. Nous verrons s’ils sont à la hauteur.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements CS858 de M. Julien Aubert et CS1229 de M. Jacques Cattin (discussion commune).

M. Pierre Vatin. L’amendement CS858, de repli, vise à exclure du champ de l’interdiction la publicité pour le gaz, qui est un combustible fossile n’émettant quasiment pas de CO2.

M. Jean-Marie Sermier. Il semble utile de prévoir une exception pour le gaz, qui est une énergie de transition.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je ne fais pas la même analyse que vous des émissions de CO2 liées au gaz. Je doute de la pertinence de faire une exception en faveur du gaz. Avis défavorable.

Mme Barbara Pompili, ministre. Le gaz représente tout de même 20 % des énergies fossiles consommées dans le monde. Il n’y a pas lieu de le faire bénéficier d’une exception. Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CS2720 de M. Matthieu Orphelin.

Mme Delphine Batho. Il s’agit de garantir que l’interdiction prévue par l’article 4 s’applique à la publicité en ligne.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’interdiction de la publicité couvre bien l’ensemble des supports. Votre amendement étant satisfait, je vous demande de le retirer.

Mme Barbara Pompili, ministre. Même avis. L’article 4 s’applique à tous les supports de publicité.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CS389 de Mme Valérie Beauvais

Mme Valérie Beauvais. La crise sanitaire a durement affecté les finances des clubs et associations sportifs et culturels. Dans ce contexte, il ne paraît pas opportun de les priver d’une source de revenus. Aussi proposons-nous d’exclure du champ de l’interdiction les opérations de communication et de sponsoring conclues, par exemple, par des marques automobiles ou des enseignes dont l’activité relève du secteur des énergies, y compris fossiles, avec des clubs et associations sportifs et culturels.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Le texte n’a pas pour objet d’empêcher une marque d’accompagner ou de soutenir un événement sportif ou culturel. L’article 4 ne vise que la publicité sur la vente d’un certain nombre de produits. Le Tour de France et toute autre manifestation culturelle pourront toujours être sponsorisés par une marque. Votre amendement est satisfait. Demande de retrait.

Mme Delphine Batho. On peut souhaiter autre chose, pour la vie sportive, associative et culturelle de notre pays, que d’être sponsorisée par les énergies fossiles.

Mme Valérie Beauvais. Madame la rapporteure, parlez-vous des événements occasionnels ou de la publicité présentée dans les stades pendant les matchs, qui contribue aussi à faire vivre les clubs ? Madame Batho, c’est du sponsoring, et cela existe de longue date.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. L’article vise à interdire la publicité sur la vente de produits, non à empêcher une marque de faire de la publicité, du sponsoring ou du parrainage, quel que soit le support – une banderole, le flocage d’un maillot…

Madame Batho, les secteurs culturel et sportif ont le droit de choisir leurs mécènes. Il n’est en rien honteux que de grandes entreprises françaises les accompagnent. Cela permet en particulier de restaurer le patrimoine. Nous devons nous réjouir que les partenariats privés soutiennent des événements culturels et sportifs, notamment dans la période actuelle.

Mme Delphine Batho. Nous avons une divergence sur ce point. Je pense que nous devons sortir de la dépendance aux énergies fossiles, à tout point de vue. Nous devons nous libérer des carcans qui promeuvent et confortent notre dépendance aux activités d’extraction et de consommation des énergies fossiles. Les activités de sponsoring et de mécénat devront être visées. Ce débat avait eu lieu s’agissant des marques de tabac ; nous devrons l’avoir.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS5019 de la rapporteure.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. L’adoption de cet amendement fait tomber les amendements identiques CS659 de M. Didier Le Gac, CS672 de Mme Valérie Beauvais, CS1457 de M. Thibault Bazin, CS1568 de M. Pierre Vatin, CS2533 de M. Charles de Courson et CS4953 de M. Jean-Marie Sermier.

M. Charles de Courson. Comment un amendement rédactionnel pourrait-il faire tomber cette série d’amendements qui portent sur le sujet essentiel des biocarburants ?

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. L’amendement CS5019 a supprimé le mot « modalités », à la suite duquel vous proposez une nouvelle rédaction de la fin de la seconde phrase de l’alinéa 5.

M. Jean-Marie Sermier. On peut considérer que nos amendements s’inscrivent dans la continuité du texte qui vient d’être amendé.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. En adoptant mon amendement, nous avons remplacé « modalités s’appliquant » par « règles applicables ». Vos amendements, qui visent à modifier la phrase « après le mot “modalités” », font référence à un mot qui n’existe donc plus, et c’est pourquoi ils tombent. C’est une question de bon sens. Nous n’allons pas passer un quart d’heure sur un amendement rédactionnel !

M. Charles de Courson. Il ne s’agissait pas d’un amendement rédactionnel !

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Si, puisqu’il ne change rien à l’esprit du texte.

M. Charles de Courson. Dans ce cas, il ne devrait pas faire tomber les autres. En vingt-huit ans de présence à l’Assemblée, c’est la première fois que je vois un amendement rédactionnel en faire tomber d’autres. C’est inacceptable !

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Si des amendements tombent, monsieur de Courson, c’est parce que le mot auquel ils se réfèrent a été supprimé, non parce qu’on aurait modifié le texte sur le fond. C’est de la légistique.

M. Jean-Marie Sermier. Pourquoi l’avoir déposé, s’il devait faire tomber les nôtres ?

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Si je l’ai déposé, c’est pour des raisons de clarté, ce n’est pas en fonction des vôtres. Ne soyez pas aussi suspicieux.

M. Charles de Courson. Madame la présidente, les amendements que nous proposons sont parfaitement compatibles avec l’amendement qui vient d’être adopté – et le problème qu’ils soulèvent est trop sérieux pour être passé sous silence.

M. Guillaume Garot. Il a raison !

M. Charles de Courson. Nous en avons même parlé avec Mme la rapporteure tout à l’heure. Ne pourrait-on les soumettre à l’examen ?

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Il est vrai qu’après étude approfondie, et dans un souci d’apaisement, nous pourrions considérer qu’ils sont compatibles avec ce qui vient d’être adopté.

M. Charles de Courson. Ce serait une sage décision.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Il en est ainsi décidé.

Amendements identiques CS659 de M. Didier Le Gac, CS672 de Mme Valérie Beauvais, CS1457 de M. Thibault Bazin, CS1568 de M. Pierre Vatin, CS2533 de M. Charles de Courson et CS4953 de M. Jean-Marie Sermier.

M. Didier Le Gac. Je remercie Charles de Courson pour son intervention, fondée sur sa longue expérience dans cette assemblée, et qui nous permet de défendre ces amendements.

L’article 4 interdisant la publicité en faveur des énergies fossiles, l’amendement CS659 vise à garantir que les énergies renouvelables incorporées dans les énergies fossiles pourront continuer à faire l’objet de publicité. On le sait, la décarbonation de notre système énergétique va prendre un certain temps et elle passera par l’incorporation progressive d’énergies renouvelables dans ce qu’on appelle un mix énergétique. Il serait dommage que ce mix soit interdit de publicité puisque son objet est précisément de faciliter la sortie des énergies fossiles.

Dans un souci de transparence, je signale que cet amendement m’a été suggéré par le syndicat des énergies renouvelables.

Mme Valérie Beauvais. La transition énergétique ne doit pas être un vain mot. Si nous voulons sortir progressivement des énergies fossiles, cela passe par un mix énergétique. Or, on l’a dit, les biocarburants, le gaz naturel pour véhicules (GNV) et l’hydrogène sont des carburants alternatifs ; les agriculteurs ont d’ailleurs consenti à des investissements très importants pour produire des biocarburants. Dans l’attente d’être totalement vertueux – si du moins la voiture électrique est réellement vertueuse, car, pour fabriquer les batteries, il faut aller chercher dans les pays étrangers ce dont on a besoin – il convient de ne pas pénaliser le mix énergétique.

M. Pierre Vatin. L’énergie que nous utilisons aujourd’hui n’est qu’en partie d’origine non fossile – et je vois mal comment elle pourrait l’être entièrement un jour. C’est pourquoi il convient de prendre en considération le mix énergétique.

M. Charles de Courson. Dans son avis, le Conseil d’État estime que « faute de désigner les modes de publicité et les biens et énergies visés par une mesure d’interdiction, les dispositions du projet de loi pourraient être regardées comme entachées d’incompétence négative, mais également, dès lors que le dispositif prévoit des sanctions pénales, de méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines. » Ce que nous soulignons à travers ces amendements, c’est qu’on ne peut pas simplement opposer les énergies fossiles et les énergies non fossiles, car il existe des formes intermédiaires. Il convient donc de continuer à autoriser la publicité pour les carburants fossiles qui sont partiellement oxygénés ou qui contiennent des taux variables de biocarburants ; il existe ainsi du E10 à 10 % et du E85 à 85 % – ainsi que quelques carburants composés à 100 % d’énergie renouvelable, mais qui n’entrent pas dans le champ de l’interdiction.

M. Jean-Marie Sermier. Madame la ministre, vous nous avez répondu avec clarté concernant l’électricité issue du nucléaire ; nous souhaiterions une réponse du même ordre au sujet des biocarburants. Les carburants E85 ou B100, notamment, pourront-ils continuer à bénéficier de la publicité ?

En outre, dans le mix électrique français, 95 % de l’électricité est décarbonée ; seule une part infime provient des quelques centrales à charbon encore en fonctionnement. Sera-t-il impossible de faire de la publicité en faveur de l’électricité française ?

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Avis défavorable, les amendements me semblant satisfaits, surtout après l’adoption de l’amendement CS3894, puisque l’interdiction ne vise que la publicité en faveur de la vente des énergies fossiles. Si, dans un mix énergétique, il devait y avoir une part majoritaire d’énergies renouvelables, il me semblerait conforme tant à l’esprit du texte qu’à la volonté du législateur que la publicité reste autorisée. Tout cela sera néanmoins précisé par décret.

Mme Barbara Pompili, ministre. Monsieur Sermier, ce dont il est ici question, ce sont des énergies renouvelables incorporées dans des énergies fossiles – par exemple, les biocarburants.

Il me semble que pour régler un problème, il faut toujours en appeler au bon sens. En l’espèce, il s’agit de savoir quelle part d’énergie fossile dans les carburants justifierait une interdiction de la publicité. Prenons le cas d’un carburant composé pour plus de la moitié d’énergie d’origine fossile. Que dit le bon sens ? Qu’il ne devrait pas pouvoir bénéficier de publicité ! A contrario, s’il est composé à moins de 50 % d’énergie d’origine fossile, il devrait pouvoir en bénéficier. Il me semble donc évident que l’on pourra faire de la publicité pour le B100, qui est à 100 % renouvelable, mais pas pour le E10.

Nous vous en dirons davantage au moment de la rédaction du décret, mais je pense que nous pouvons partir sur cette base. En conséquence, je demande le retrait des amendements.

M. Charles de Courson. Dont acte, madame la ministre, mais dans ce cas, il conviendrait de préciser les choses ; on pourrait ainsi indiquer que « les énergies renouvelables incorporées majoritairement dans des énergies fossiles peuvent continuer de faire l’objet de publicité ». À défaut, le décret risquerait d’être attaqué, parce que la loi n’aurait pas prévu ce cas de figure. Je rectifie donc mon amendement en ce sens.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. L’amendement CS2533 est ainsi rectifié.

M. Julien Dive. Le problème, madame la ministre, c’est que l’on renvoie tout cela à un décret. Votre éventuel successeur n’aura pas forcément la même position que vous. Hier, une collègue signalait qu’un décret prévu il y a une dizaine d’années n’avait toujours pas été pris ! Tout ce qui n’aura pas été inscrit dans la loi risque de ne pas être pris en considération.

M. André Chassaigne. Attention, chers collègues, certaines précisions relèvent non de la loi, mais d’un décret. Prenons l’exemple du biofioul : il est actuellement composé pour environ 70 % de fioul et 30 % d’ester de colza – mais le pourcentage peut évoluer, et il serait dangereux de figer les proportions. On ne peut pas tout mettre dans la loi, sinon, cela devient du règlement !

D’autre part, les éoliennes sont-elles incluses dans les énergies fossiles ? Elles sont censées produire de l’électricité verte, mais leur rendement n’est que de 15 % à 20 % et il est nécessaire de compenser les fluctuations de leur production par de l’énergie fossile, principalement issue de centrales à gaz ou à charbon.

M. Nicolas Turquois. Si l’E85 existe, c’est parce qu’auparavant il y a eu l’E10. Avant de trouver une solution, il faut y aller progressivement. Je me demande s’il n’est pas trop restrictif de prévoir une exception pour les seules énergies renouvelables incorporées majoritairement dans les énergies fossiles.

Mme Delphine Batho. Ce texte porte lutte contre le dérèglement climatique et l’article 4 est censé reprendre la proposition de la Convention citoyenne pour le climat visant à interdire la publicité. Or non seulement cet article se contente de réguler la publicité concernant la seule vente directe d’énergies fossiles, mais en plus vous voudriez qu’on exclue du champ de l’interdiction, qui ne concerne que quelques rares publicités, tous les produits qui contiennent un peu d’agrocarburants. Ignorez-vous le bilan environnemental désastreux de ces derniers, qu’il s’agisse de la betterave aux néonicotinoïdes ou, pire encore, de l’huile de palme de Total ? À travers ces amendements, ce que vous proposez, c’est en réalité qu’on continue à autoriser des pratiques comme la déforestation ou le changement d’usage des sols. Il faut impérativement les rejeter !

La commission rejette successivement les amendements identiques et l’amendement CS2533 rectifié.

Amendements CS5020 de la rapporteure et CS3037 de M. Sébastien Cazenove.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Afin de parer à toute mauvaise interprétation, je précise qu’il s’agit d’un amendement rédactionnel, qui tend à substituer aux mots « avec dans des » le mot « aux ». Il me semble en effet nécessaire – je pense que vous en conviendrez, chers collègues – de corriger cette petite faute de français…

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement CS3037 tombe.

Amendement CS794 de M. Julien Dive.

M. Julien Dive. Cet amendement d’appel vise à faire en sorte que les activités de promotion ou de sponsoring échappent à l’interdiction, afin que l’équipe cycliste Total Direct Énergie, chère au maire de Lyon, puisse continuer à participer au Tour de France ou que l’Amiens Sporting Club, dont vous êtes une supportrice, madame la ministre, puisse continuer à arborer le logo de l’un de ses sponsors, qui fabrique des lubrifiants. Eu égard aux explications de Mme la rapporteure et de Mme la ministre, il me semble néanmoins qu’il est satisfait et je le retire.

L’amendement est retiré.

Amendement CS4807 de Mme Sylla.

Mme Huguette Tiegna. Il s’agit d’intégrer les consommateurs dans la stratégie française d’atteinte de la neutralité carbone en 2050 en insérant, après le mot « concernées », les mots : « et au niveau d’émission en dioxyde de carbone des biens et services ».

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable : c’est le décret qui devra veiller à la bonne information du public.

Mme Barbara Pompili, ministre. De toute façon, cette précision me semble inopportune : nous souhaitons une application uniforme de l’interdiction sur toutes les énergies fossiles, sans que l’on tienne compte de leurs émissions respectives. Demande de retrait.

L’amendement est retiré.

La commission adopte l’amendement rédactionnel CS5021 de la rapporteure.

Amendement CS1551 de M. Dominique Potier, amendements identiques CS940 de Mme Jennifer De Temmerman et CS1787 de M. Dominique Potier, et amendements CS1788 de M. Dominique Potier, CS1599 de M. Hubert Wulfranc, CS4005 de Mme Aude Luquet et CS4892 de M. Buon Tan (discussion commune).

Mme Jourdan. L’amendement CS1551 du Groupe Socialistes et apparentés vise à créer, à partir de 2022, un mécanisme permettant d’interdire la publicité pour des produits ou services à impact environnemental excessif. À partir de 2024, ce mécanisme est complété par l’intégration d’un volet relatif à l’impact social.

Mme Jennifer De Temmerman. On ne peut pas, d’un côté, prôner l’éducation à l’environnement et, de l’autre, laisser continuer dans les médias à inciter à la consommation de produits polluants. L’amendement CS940 est issu de discussions avec le Réseau Action Climat, le WWF-France, Les Amis de la Terre-France et Résistance à l’agression publicitaire. 

M. Guillaume Garot. Il s’agit de créer un mécanisme permettant d’interdire la publicité pour des produits ou services à impact environnemental excessif, à partir de 2022 pour l’amendement CS1787 ou de 2024 pour le CS1788.

En termes de volumes, les dépenses de publicité et de communication du secteur des énergies fossiles représentaient 668,1 millions d’euros en 2019 en France sur les 5,1 milliards d’euros d’investissements bruts de publicité et de communication des secteurs automobile, aérien et pétrolier.

Qu’entend-on par « impact environnemental excessif » ? Par cohérence, nous nous appuyons sur l’article 15 de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC), qui prévoit des seuils en la matière.

M. André Chassaigne. Issu des propositions de la Convention citoyenne pour le climat, l’amendement CS1599 prévoit d’interdire la publicité sur les produits ou services les plus polluants. Il convient en effet d’élargir le champ d’application de l’article 4 au-delà des seules énergies fossiles.

Mme Aude Luquet. En lien avec l’article 1er du projet de loi, l’amendement CS4005 propose d’interdire la publicité pour les produits ou services les plus polluants en fonction de leur score carbone.

M. Jean-Charles Colas-Roy. L’amendement CS4892 prévoit d’interdire la publicité sur les produits les plus polluants, en s’appuyant sur les seuils de pollution excessive prévus par l’article 15 de la loi AGEC et en lien avec la belle avancée sur l’affichage environnemental votée avec l’article 1er.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je reste défavorable à l’élargissement du champ d’interdiction de la publicité. Cela ne correspondrait pas à l’esprit du projet de loi. En outre, nous attendons les conclusions de la mission confiée à Agathe Bousquet et Arnaud Leroy.

Mme Barbara Pompili, ministre. Avis défavorable. Je m’en tiens à la méthode que j’ai exposée précédemment.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CS921 de Mme Delphine Batho.

Mme Delphine Batho. Au regard de l’urgence climatique, il s’agit d’interdire toute forme de publicité pour des produits dépendant très largement des énergies fossiles et liés au secteur des transports.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que celles exposées pour les amendements précédents.

Mme Barbara Pompili, ministre. Une telle extension des interdictions présenterait des difficultés au regard du cadre juridique européen, qui impose a minima une coordination entre les États membres pour ce type de mesure.

La commission rejette l’amendement.

Amendements CS2732 de M. Matthieu Orphelin, CS1849 de M. Dominique Potier et CS4612 de M. Jean-Charles Colas-Roy (discussion commune).

Mme Delphine Batho. L’amendement CS2732 vise à interdire en 2022 la publicité pour les liaisons aériennes inutiles, car substituables par un trajet en train d’une durée inférieure à quatre heures.

Il propose aussi d’interdire, à compter de 2023, toute publicité pour des vols long-courriers ou des offres de voyage incluant un vol long-courrier impliquant un séjour sur place de moins de quinze jours. Nous connaissons tous ces publicités dans le métro qui proposent un week-end au bout du monde pour 119 euros aller-retour. Ce type de publicité n’est plus compatible avec l’urgence climatique.

Mme Chantal Jourdan. L’article 36 du projet de loi interdit l’exploitation de services aériens sur des liaisons intérieures, dès lors qu’un trajet alternatif par un autre moyen de transport collectif existe en moins de deux heures trente.

Par anticipation des difficultés attendues pour porter cette durée à quatre heures, l’amendement CS1849 vise a minima à mettre fin progressivement à la publicité portant sur des liaisons aériennes substituables par un trajet en train d’une durée inférieure à quatre heures. Il doit ainsi permettre de contribuer au succès de transports alternatifs et moins polluants.

Il vise également à limiter la promotion des vols long-courriers associés à une courte durée de séjour, fixée à quinze jours, dont l’impact climatique est fort.

M. Jean-Charles Colas-Roy. L’amendement CS4612 prévoit d’interdire la publicité en faveur des activités de tourisme qui banalise ou valorise l’usage du transport aérien sur des périodes courtes. Le secteur de l’aviation représente, au niveau mondial, les émissions de gaz à effet de serre de la France et du Royaume-Uni. Le Haut Conseil pour le climat nous encourage à élargir les domaines concernés par l’interdiction de la publicité.

Ces séjours courts sont d’un autre temps et nous pourrions essayer de sortir de cette banalisation de l’avion.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Je demeure défavorable à l’élargissement des interdictions de publicité. En outre, en se référant aux vols long-courriers les amendements CS2732 et CS1849 interdiraient la publicité pour des vols permettant de se rendre dans les outre-mer. Les secteurs du transport aérien et du tourisme subissent la crise de plein fouet. Des interdictions supplémentaires de publicité dès 2022 ne seraient pas de bon aloi.

Mme Delphine Batho. Le I de l’amendement CS2732 mentionne bien les liaisons aériennes internationales et il n’y a pas de malentendu, même si par erreur ces mots ne figurent pas à l’alinéa 2. Il n’y a donc pas lieu à faux débat sur les outre-mer.

Il est temps d’ouvrir les yeux. On ne peut pas continuer comme cela avec le transport aérien, avec un doublement du nombre de passagers transportés au cours des dix dernières années et un scénario de cette industrie prévoyant à nouveau un doublement d’ici à 2035.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CS2730 de M. Matthieu Orphelin, amendements identiques CS939 de Mme Jennifer De Temmerman et CS1549 de M. Dominique Potier, amendements CS1537 de M. Dominique Potier, CS2727 de M. Matthieu Orphelin, CS1598 de M. André Chassaigne, CS4610 de M. Jean-Charles Colas-Roy et CS4006 de Mme Aude Luquet, amendements identiques CS4613 de M. Jean-Charles Colas-Roy et CS4891 de M. Buon Tan, et amendement CS4611 de M. Jean-Charles Colas-Roy (discussion commune).

Mme Delphine Batho. L’amendement CS2730 est issu de la proposition de loi EDS et a été retravaillé avec des ONG. Il vise à interdire la publicité pour les véhicules de tourisme dont les émissions de CO2 sont supérieures ou égales à 123 grammes par kilomètre ou dont la masse en ordre de marche est supérieure ou égale à 1,8 tonne.

Mme Jennifer De Temmerman. La loi de finances de 2021 a prévu des évolutions fiscales visant à contenir le phénomène d’augmentation du poids moyen des modèles commercialisés. L’amendement CS939, travaillé en lien avec des organisations non gouvernementales, propose, par cohérence, d’interdire la promotion de produits dont la loi s’efforce de décourager la consommation.

M. Guillaume Garot. L’amendement CS1549 vise à interdire la publicité pour les véhicules les plus polluants, en fonction de leur poids et des émissions de GES. L’efficacité d’une interdiction de publicité dépend de la combinaison de deux facteurs : l’impact environnemental du produit et le niveau de dépenses publicitaires associées. Les seuils retenus permettent notamment de mettre fin à la promotion des modèles SUV en moyenne plus lourds de 205 kilogrammes qu’un véhicule standard et émettant 20 % de plus de CO2. Si l’on veut être efficace, il faut être volontariste vis-à-vis de ces véhicules très lourds et très polluants.

L’amendement CS1537 reprend le même raisonnement en interdisant la publicité pour les véhicules soumis à un malus écologique.

Mme Delphine Batho. L’amendement CS2727 met en œuvre la proposition C2.1 de la Convention citoyenne pour le climat, en restreignant progressivement la publicité portant sur les voitures les plus polluantes. L’annonce à l’avance des régulations permettra d’adapter les stratégies industrielles.

Un premier palier interviendrait en 2023, avec la suppression de la publicité pour les véhicules faisant l’objet d’un malus écologique. En 2025 serait supprimée la publicité pour les véhicules émettant plus que le seuil européen fixé aux constructeurs automobiles pour la moyenne de leur flotte – 123 grammes de CO2 par kilomètre –, puis en 2027 celle pour tous les véhicules essence ou diesel émettant plus de 88 grammes de CO2 par kilomètre. Enfin, en 2029 seule la publicité pour les véhicules propres de type véhicules électriques serait autorisée.

Un dispositif d’interdiction progressive est aussi prévu en fonction du poids des véhicules.

Cette proposition est extrêmement raisonnable. Elle dessine un chemin praticable sur le plan industriel et qui traduit une volonté politique claire. Il n’y a aucune raison de ne pas l’adopter.

M. André Chassaigne. L’amendement CS1598 a pour objet d’interdire en 2024 la publicité pour les véhicules les plus lourds et les plus émetteurs. Les seuils retenus sont raisonnables et permettent une application plus aisée que d’autres solutions proposées, plus brutales.

M. Jean-Charles Colas-Roy. Le principe de l’interdiction en 2040 de la vente de véhicules thermiques neufs utilisant des carburants fossiles a été voté dans le cadre de la LOM. Des réflexions sont en cours au sein de l’Union européenne pour fixer cette date d’interdiction à 2035, avec un vote du Parlement européen susceptible d’intervenir dès cette année. Pour le Royaume-Uni, Boris Johnson a même annoncé vouloir interdire la vente de ces véhicules neufs dès 2030.

Par souci de cohérence, les amendements CS4610, CS4613 et CS4611 ont pour objet d’interdire la publicité pour ces véhicules quelques années avant leur date d’interdiction de vente.

Mme Aude Luquet. Par cohérence avec les objectifs poursuivis par l’article 25 du projet de loi, l’amendement CS4006 tend à interdire, à partir de 2025, la publicité pour les voitures les plus polluantes.

Mme Aurore Bergé, rapporteure. Comme je l’ai dit de manière constante, il n’est pas question d’étendre à l’infini le champ d’interdiction des publicités, mais bien de s’en tenir à celles en faveur des énergies fossiles. Nous attendons, de surcroît, la remise du rapport Bousquet-Leroy avant le début de nos travaux en séance. Avis défavorable à la série d’amendements.

Mme Barbara Pompili, ministre. Avis défavorable, non pas sur l’esprit de ces amendements, mais parce qu’ils ne correspondent pas à la méthode que nous avons retenue et que j’ai expliquée plusieurs fois.

M. Dominique Potier. S’agissant des gros véhicules, les diagnostics réalisés et répétés par les ONG et le HCC convergent de manière scientifique : tous les gains obtenus par le développement de moteurs électriques ou grâce à la baisse de consommation des moteurs thermiques sont ruinés par l’augmentation de la part de marché des SUV depuis dix ans. Et on ne changerait rien en matière de publicité ? C’est stupéfiant, car c’est pourtant une question de justice climatique. Qu’au moins ceux qui achètent des véhicules lourds et qui ruinent les différents efforts consentis par d’autres pour améliorer la santé publique et celle de la planète, en paient le prix.

M. Alexandre Holroyd. Ils s’acquittent déjà d’un malus. 

M. Dominique Potier. Vous savez que cela ne suffit pas.

M. Antoine Herth. Il y a probablement une maladresse dans la rédaction de ces amendements : il n’est précisé à aucun moment qu’ils concernent seulement les véhicules neufs. Il faudrait indiquer que ces mesures d’interdiction ne portent pas sur le marché de l’occasion.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. C’est juste.

Mme Delphine Batho. Le marché publicitaire automobile est très majoritairement consacré aux véhicules neufs. La meilleure voiture, c’est celle qu’il ne faut pas fabriquer et qui dure le plus longtemps. Il n’y a pas de débat sur ce point.

On demande que l’Assemblée nationale respecte les propositions de la Convention citoyenne pour le climat, qu’elle entende les recommandations du Haut Conseil pour le climat et qu’elle lise l’avis du Conseil d’État. Même ce dernier dit que le dispositif de l’article 4 du projet de loi n’aura quasiment pas d’impact sur les émissions de gaz à effet de serre.

Il faut favoriser un changement culturel, ce qui passe par la libération des imaginaires en s’éloignant d’une civilisation dépendante de voitures toujours plus grosses. C’est le minimum que l’on puisse faire pour être efficace en matière de publicité.

M. André Chassaigne. Je voudrais vous féliciter : vous battez un record avec cette discussion sur un projet de loi où tout est verrouillé. Je ne pense pas qu’on puisse retrouver un tel cas dans l’histoire parlementaire. Quelle belle conception de l’activité parlementaire que la vôtre !

J’observe également que la rapporteure ne cesse de s’opposer à nos amendements au motif qu’ils « sortent du champ ». Mais ils sont précisément dans le champ des énergies fossiles. Le poids d’un véhicule détermine bien sa consommation. Nos propositions permettent de déterminer dans la loi un objectif et des seuils précis.

La commission rejette successivement les amendements.

 

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