Compte rendu

Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi portant lutte
contre le dérèglement climatique
et renforcement de la résilience
face à ses effets

– Suite de l’examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (n° 3875 rect.) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, M. Damien Adam, M. Erwan Balanant, Mme Aurore Bergé, M. Lionel Causse, Mme Célia de Lavergne, Mme Cendra Motin, M. Mickaël Nogal et M. Jean-Marc Zulesi, rapporteurs)              2


Mardi
16 mars 2021

Séance de 18 heures

Compte rendu n° 35

session ordinaire de 2020-2021

Présidence de
Mme Laurence Maillart‑Méhaignerie,
Présidente

 


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La commission spéciale poursuit l’examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (n° 3875 rect.) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, M. Damien Adam, M. Erwan Balanant, Mme Aurore Bergé, M. Lionel Causse, Mme Célia de Lavergne, Mme Cendra Motin, M. Mickaël Nogal et M. Jean-Marc Zulesi, rapporteurs).

Mme Laurence Maillart-Méhaignerie. Mes chers collègues, nous poursuivons l’examen des articles du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

À ce stade de notre discussion, je souhaite vous communiquer quelques éléments statistiques.

Notre commission a déjà siégé pendant soixante-huit heures ; si nous voulons achever nos travaux vendredi à minuit, nous disposons encore de trente-sept heures trente de réunion.

Nous avons examiné 2 711 amendements ; il en reste 1 121 à étudier, ainsi répartis : 665 sur la fin du titre IV, 280 sur le titre V, 172 sur le titre VI et quatre sur le titre du projet de loi lui-même. Nos travaux ayant connu une accélération sensible hier, grâce au vice-président Millienne, il nous faudra maintenir le rythme d’au moins trente amendements à l’heure pour les achever dans les délais convenus.

Par ailleurs, sur les 5 476 amendements déposés – un record pour l’examen d’un texte en commission –, 1 399 ont été déclarés irrecevables pour divers motifs : 292 ont été écartés au titre de l’article 40 de la Constitution, relatif à l’irrecevabilité financière, soit 5,3 % des amendements déposés ; 107 étaient contraires à d’autres dispositions constitutionnelles, en particulier à l’article 38, qui interdit aux parlementaires d’étendre le champ d’une habilitation à légiférer par ordonnance ; enfin, 1 000 ont été déclarés irrecevables au titre de l’article 45, relatif aux cavaliers législatifs, soit 18,2 % de l’ensemble des amendements déposés. Ce taux, très éloigné de ceux qui ont pu être annoncés à de multiples reprises – sans doute par erreur –, est en réalité très proche de celui constaté lors de l’examen du projet de loi dit « énergie-climat », en 2019, puisque 25,9 % des amendements avaient été déclarés irrecevables, dont 16,2 % au titre de l’article 45 – sachant que 737 amendements avaient été déposés sur ce texte, soit sept fois moins que sur le projet de loi « climat et résilience ».

M. Sébastien Jumel. Madame la présidente, je vous remercie pour ce point d’étape. Toutefois, la politique, ce n’est pas que des mathématiques. J’avais cru comprendre que l’objet du texte était de transcrire dans la loi les propositions de la Convention citoyenne pour le climat. Or, lorsque nous avons transformé en amendements celles d’entre elles qui avaient été rayées d’un trait de plume par le Gouvernement, vous nous avez opposé l’article 45 de la Constitution, au motif que ces amendements n’avaient pas de lien avec le projet de loi. Ainsi, notre amendement relatif au service public de proximité de l’école a été balayé d’un revers de main. Je ne peux pas ne pas dénoncer cette turpitude. Vos explications mathématiques ne sont pas convaincantes au plan politique.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Mes explications mathématiques découlent de l’application de la Constitution, de la jurisprudence du Conseil constitutionnel et du règlement de l’Assemblée nationale, que vous ne manquez pas d’invoquer fréquemment au cours de nos débats dans l’hémicycle.

Mme Delphine Batho. Nous continuons de contester l’irrecevabilité de nos amendements. D’abord parce que nous estimons que l’ensemble des propositions de la Convention citoyenne pour le climat, issues de la démocratie délibérative, auraient dû être soumises à l’Assemblée nationale, c’est-à-dire à la démocratie représentative. Ensuite, parce qu’ont été ainsi écartées beaucoup de propositions efficaces pour lutter contre le dérèglement climatique, en particulier celles relatives à l’abandon des énergies fossiles. Enfin, parce que plusieurs de nos amendements ont été déclarés irrecevables au titre de l’article 45 alors qu’ils nous semblaient avoir un lien, même indirect avec le texte, lien qui a par ailleurs été admis pour d’autres amendements, déposés, ceux-là, par des collègues ou par le Gouvernement.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Plutôt que de laisser planer le doute, vous pouvez, comme je vous y ai invitée à de multiples reprises, nous interroger par écrit sur les raisons pour lesquelles vos amendements ont été déclarés irrecevables. Nous vous répondrons, comme nous sommes en train de répondre à Mme Forteza, par exemple.

M. Thibault Bazin. Madame la présidente, les chiffres que vous avez cités sont-ils définitifs ? Il me semble qu’il y a quelques heures, certains amendements étaient encore en cours d’examen par les services. Par ailleurs, le nombre d’amendements était, je crois, plus important sur le projet de loi instituant un système universel de retraite que sur celui-ci. Enfin, il est dommage que plusieurs de nos amendements n’aient pas été déclarés recevables, car cela empêche notre groupe de présenter son projet d’une écologie positive, notamment dans des domaines sur lesquels le texte fait l’impasse.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. S’il existe des impasses dans le texte, le Parlement ne peut que s’efforcer d’y remédier en déposant des amendements qui respectent le cadre défini par la Constitution.

Mme Véronique Riotton. Je suis ravie que de nouveaux collègues nous rejoignent pour participer aux travaux de notre commission. Moi qui suis présente depuis le début de la discussion, je vous remercie, madame la présidente, pour les éléments factuels que vous nous avez communiqués et je salue la qualité des débats ainsi que le climat dans lequel ils se déroulent. Les nombreux amendements que nous avons à examiner nous permettent de discuter, et des propositions de la Convention citoyenne et des nôtres.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Monsieur Bazin, certains sous-amendements sont peut-être en effet encore en cours d’examen, mais ils sont très peu nombreux.

M. François-Michel Lambert. On ressent tout de même une certaine frustration. Peut-être nos amendements peuvent-ils faire l’objet de critiques mais ce projet de loi est probablement le dernier grand texte consacré au climat que nous examinons avant 2023 ou 2024, et ce, quel que soit le résultat des élections de l’an prochain. Aussi les amendements que nous déposerons en séance pourraient-ils faire l’objet d’une interprétation moins restrictive, moyennant quoi nous en déposerions moins – je m’y engage, en tout cas, au nom du groupe Libertés et Territoires. Il serait dommage que, faute de pouvoir défendre des amendements constructifs, nous soyons contraints, pour nous exprimer sur certaines questions, de demander des rapports au Gouvernement.

M. Dominique Potier. Pour sa part, le groupe Socialistes et apparentés n’a jamais idéalisé la Convention citoyenne ni considéré qu’il fallait reprendre l’intégralité de ses propositions ; cela ne nous paraît pas souhaitable du point de vue de l’équilibre des institutions. Mais il est vrai, et ce fut sans doute une erreur de communication, qu’on avait promis à ses membres qu’il en serait ainsi.

Quoi qu’il en soit, madame la présidente, nous ne contestons pas l’irrecevabilité des amendements : nous ne remettons en cause ni votre présidence ni les services de l’Assemblée, dont les choix sont à coup sûr techniquement irréprochables. En revanche, nous reprochons au Gouvernement d’avoir fait le choix de laisser dans le projet de loi de nombreux angles morts, car ce choix nous empêche de défendre des propositions, issues non seulement de nos groupes mais aussi de think tanks ou d’entrepreneurs, que nous aurions tant aimé vous soumettre.

Je salue néanmoins la qualité de nos débats qui, sur certains sujets, m’ont fait changer d’avis ; ils nous permettent de faire de tout petits pas. Toutefois, leur périmètre est si restreint que le texte, même s’il obtient une meilleure note que 3,5 à la fin de la discussion, n’atteindra pas la moyenne, car il ne sera pas à la hauteur des enjeux.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Je vous remercie. Conservons le bel état d’esprit dans lequel nous avons débattu jusqu’à présent, et avançons dans nos travaux en respectant les temps de parole dont nous sommes convenus.

 

Article 49 (suite) (articles L. 4251-1, L. 4424-9 et L. 4433-7 du code général des collectivités territoriales ; articles L. 123-1, L. 141-3, L. 141-8, L. 151-5, L. 151-9 et L. 161-3 du code de l’urbanisme) : Insertion dans les documents d’urbanisme régionaux et territoriaux d’un objectif de réduction de moitié de l’artificialisation des sols et conditionnement de l’ouverture à l’urbanisation de nouveaux secteurs

 

Amendements identiques CS752 de M. Gérard Menuel, CS1482 de M. Thibault Bazin, CS2620 de M. Charles de Courson, CS2947, de M. Mohamed Laqhila et CS4861 de Mme Sandrine Le Feur.

M. Thibault Bazin. Il est bien beau de se fixer des objectifs – nous pouvons du reste être d’accord sur certains d’entre eux –, encore faut-il se donner les moyens d’y parvenir. Ainsi, la planification n’est possible que si l’on se dote des outils appropriés et de l’ingénierie nécessaire. Nous proposons donc que la stratégie fasse l’objet d’une contractualisation, de manière à accompagner les territoires pour qu’ils puissent mobiliser le foncier avec l’ensemble des outils à leur disposition.

M. Charles de Courson. Afin d’engager à court terme un travail sur la lutte contre l’artificialisation, il est proposé que la stratégie territoriale à vingt ans prévue dans le schéma de cohérence territoriale (SCOT) fasse l’objet d’une déclinaison à six ans qui sera le support d’un contrat d’aménagement et de développement incluant un volet de lutte contre l’artificialisation, dont les projets opérationnels, les études et l’ingénierie feraient l’objet d’une contractualisation avec l’État et la région. Cette contractualisation pourrait s’inscrire dans les démarches en cours, par exemple dans le cadre du contrat unique de l’État avec les collectivités du bloc local, dans le volet territorial du contrat de plan État-région et dans les programmes de fonds européens.

Tel est l’objet de cet amendement, car fixer un objectif sans expliquer la manière dont on l’atteint n’a pas beaucoup d’intérêt !

M. Lionel Causse, rapporteur pour les chapitres III à V du titre IV. Je vous demanderai de bien vouloir retirer ces amendements au profit du CS3450 de M. Gouffier-Cha, que nous examinerons ultérieurement. À défaut, avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement. L’ordonnance du 17 juin 2020 relative à la modernisation des SCOT a renforcé la faculté pour les établissements d’élaborer un programme précisant les actions destinées à mettre en œuvre la stratégie, les orientations et les objectifs du schéma. Or le projet de loi permet d’intégrer la lutte contre l’artificialisation des sols dans ces objectifs. Il me semble donc que les amendements sont satisfaits par la combinaison des deux dispositions. C’est pourquoi je demande leur retrait ; à défaut, avis défavorable.

Mme Sandrine Le Feur. Les arguments du rapporteur et de la ministre m’ont convaincue ; je retire mon amendement.

L’amendement CS4861 est retiré.

La commission rejette les amendements CS752, CS1482, CS2620 et CS2947.

 

Amendement CS5323 du rapporteur.

M. Lionel Causse, rapporteur. Cet amendement de coordination avec l’amendement CS5320, que nous avons adopté hier soir, a pour objet d’assurer la cohérence interne des plans locaux d’urbanisme (PLU) et des plans locaux d’urbanisme intercommunaux (PLUi) en liant les prévisions établies dans le diagnostic, d’une part, et les dispositions du projet d’aménagement et de développement durable (PADD), d’autre part.

Lorsque l’on conçoit un PLU, il faut, vous le savez, établir au préalable un diagnostic afin d’évaluer les besoins économiques et démographiques, notamment en matière de surfaces et de développement agricoles, de développement forestier, d’aménagement de l’espace, de transport, de commerces et d’équipements. Nous proposons de préciser que les observations faites dans le diagnostic doivent être prises en compte dans le plan d’aménagement et de développement durable. Ce faisant, nous assurons la cohérence entre les objectifs et les différentes projections ou analyses établies dans le cadre du diagnostic.

M. Julien Aubert. Dans l’exposé sommaire de l’amendement, vous indiquez que les données d’occupation du sol à grande échelle, qui permettront une observation précise de l’artificialisation, seront disponibles en 2024. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi le délai est si long et, surtout, puisque vous fixez un objectif à dix ans, pourquoi elles ne seront pas utilisées avant 2031 ?

M. Sébastien Jumel. Nous sommes évidemment favorables à la lutte contre l’artificialisation des sols, mais nous souhaitons que la ruralité vivante ne soit pas qu’un slogan. À ce propos, nous regrettons que vous ne nous donniez pas les moyens de lutter contre l’artificialisation commerciale, qui défigure nos paysages et démantèle l’économie réelle. En tout état de cause, je crains que le principe de la libre administration des communes ne soit mis en miettes par des objectifs très techniques tels que celui de mise en conformité des PLU, des PLUi des SCOT et, demain, du schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET). Comptez sur moi pour veiller à ce que les maires ruraux puissent continuer à s’occuper de l’avenir de leurs communes !

M. Lionel Causse, rapporteur. Monsieur Aubert, l’Observatoire national de l’artificialisation des sols utilise les données sur l’artificialisation et la consommation de l’espace que lui fournit le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA). Ces données sont composées, soit de fichiers fonciers transmis par les collectivités, soit d’études, comme des relevés topographiques ou des photographies aériennes. À partir de 2024, il pourra disposer de données beaucoup plus fines, issues de photographies satellite.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CS2285 de Mme Sylvia Pinel.

M. Lionel Causse, rapporteur. Défavorable.

M. Julien Aubert. Monsieur le rapporteur, vous n’avez pas répondu à la deuxième partie de ma question : que se passera-t-il entre 2024 et 2031 ? Par ailleurs, quel est le niveau de précision des données beaucoup plus fines que vous évoquez ?

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Si notre objectif à moyen terme est bien de mesurer l’artificialisation, nous avons accepté que, lors de la première tranche de dix ans, soit mesurée la consommation des espaces naturels agricoles ou forestiers (NAF). En effet, l’historique de données connues dont nous disposons dans ce domaine nous permet d’engager la démarche de réduction de l’artificialisation. Entre-temps, l’Observatoire national de l’artificialisation sera installé et les futures données seront disponibles, en 2024, de sorte que la tranche suivante pourra être construite à partir de données déjà anciennes puisqu’elles auront été collectées entre 2024 et 2030. Quant à la taille de la maille, elle correspondra, pour l’observation, à un carreau de 200 mètres sur 200 mètres mais, in fine, le travail sera effectué à partir de la parcelle.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’amendement de coordination CS5324 du rapporteur.

En conséquence, les amendements identiques CS1475 de M. Thibault Bazin, CS1557 de M. Hervé Pellois, CS2612 de M. Charles de Courson et CS2899 de M. Mohamed Laqhila tombent.

 

La commission adopte l’amendement rédactionnel CS5225 du rapporteur.

 

Amendements identiques CS1474 de M. Thibault Bazin, CS2611 de M. Charles de Courson et CS2876 de M. Mohamed Laqhila.

M. Thibault Bazin. Il s’agit d’un amendement d’appel. Aux termes de l’alinéa 21, la collectivité devra justifier que la capacité d’aménager et de construire est déjà mobilisée dans les espaces urbanisés, qui comprennent notamment les friches. Or, nous avons tous, dans nos circonscriptions, des friches qui nécessitent un désamiantage, une dépollution, voire un remembrement foncier. L’application de cette disposition risque ainsi d’être problématique dans certains territoires. Je vous propose donc, sinon d’accepter l’amendement, du moins de trouver une solution d’ici à la séance.

M. Charles de Courson. Le projet de loi tend à imposer aux collectivités locales souhaitant ouvrir de nouveaux espaces à l’urbanisation de démontrer que la capacité de construire ou d’aménager est déjà mobilisée dans les espaces urbanisés, en particulier les friches. Le texte risque donc de provoquer un phénomène de surenchère sur les terrains qui demeureraient ouverts à l’urbanisation et par conséquent une augmentation du prix du foncier. Au surplus, le financement actuellement sous-dimensionné du fonds « friches », eu égard au prix à l’hectare du recyclage et de la dépollution – 60 à 80 euros par mètre carré selon l’étude d’impact du projet de loi –, se traduira par le délaissement de nombreuses parcelles non traitées, les zones d’activités économiques représentant à elles seules 450 000 hectares, toujours selon l’étude d’impact. Or, leur seule existence suffirait à s’opposer à l’ouverture à l’urbanisation.

Nous proposons donc de modifier cette disposition afin de ne pas restreindre les projets d’urbanisation aux espaces urbanisés existants et aux friches.

M. Lionel Causse, rapporteur. L’analyse des besoins économiques et démographiques, qui est l’un des critères de l’ouverture à l’urbanisation, fournit un début de réponse. J’émets donc un avis défavorable. Néanmoins, je suis prêt, monsieur Bazin, à rediscuter de cette question d’ici à la séance.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Tout d’abord, je me félicite du succès du fonds « friches », qui permet, pour la première fois, de consacrer 300 millions d’euros à cette question qui a occupé de nombreux gouvernements successifs. On nous dit que les crédits du fonds ne sont pas suffisants ; nous examinerons cette question dans le cadre des redéploiements possibles au sein du plan de relance. Quoi qu’il en soit, il s’agit d’une action concrète au service de la politique que nous souhaitons mener.

Dans l’alinéa 21, que vos amendements tendent à supprimer, il est prévu de tenir compte de la capacité à mobiliser « effectivement » les locaux vacants, les friches ou les espaces déjà urbanisés. Si la mobilisation effective d’une friche n’est pas possible, faute, le cas échéant, de pouvoir boucler le financement, la condition est réputée remplie. Les amendements me semblent donc satisfaits dans leur esprit ; demande de retrait, ou avis défavorable.

M. Sébastien Jumel. Tout d’abord, les différentes mises en conformité – PLU, PLUi, SCOT, SRADDET – coûtent très cher aux collectivités – il serait d’ailleurs intéressant qu’une étude d’impact évalue ce coût.

Si l’on veut éviter l’étalement urbain, il faut permettre aux maires ruraux de construire des logements, éventuellement des logements sociaux, sur les friches, et de boucher les « dents creuses ». Mais si les maires de villes moyennes disposent de l’ingénierie nécessaire pour mobiliser le fonds « friches » ou l’établissement public foncier de la région et pour mener des opérations complexes en bouclant le financement grâce à des contrats de territoire ou d’agglomération, tel n’est pas le cas du maire d’une commune rurale, qui n’a pas un rond et partage son secrétaire de mairie avec la commune voisine. La loi ne doit pas l’oublier !

Mme Valérie Petit. Je soutiens les amendements de mes collègues. Je salue la création du fonds « friches », mais il ne faudrait pas que celles-ci deviennent en quelque sorte les martyrs de la lutte contre l’artificialisation : n’oublions pas de prendre aussi en considération la biodiversité et la nature !

M. Charles de Courson. Reconnaissez que l’alinéa 21 pose un vrai problème. Imaginez qu’une collectivité dispose d’un espace assez restreint, comportant de nombreuses friches dont la réhabilitation serait très coûteuse, malgré l’aide apportée par le fonds « friches ». Dans mon département, le coût de dépollution de certaines friches atteint dix à vingt fois le prix du marché : ces terrains sont alors neutralisés. Dans des cas pareils, les dispositions de l’alinéa 21 entraîneront nécessairement une forte augmentation du prix des terrains, hors friches. La situation française est très diverse. Mme la ministre déléguée et M. le rapporteur ont fait une ouverture, mais existe-t-il une solution différente de celle proposée par des députés de toutes sensibilités pour essayer de faire baisser la pression sur le prix du foncier ?

M. Dominique Potier. Permettez-moi d’exposer deux propositions que je développais dans des amendements déclarés irrecevables – ce que je ne conteste pas.

Nous pourrions tout d’abord dresser un inventaire national des biens de l’État – incluant notamment ceux de la SNCF, de Voies navigables de France (VNF) et de l’armée – susceptibles d’être confiés aux établissements publics fonciers et créer un fonds spécifique destiné à leur réallocation au vu des besoins des territoires, dans des conditions financières à déterminer. Cette tâche, qui n’a encore jamais été effectuée, s’inscrirait dans un temps long et serait assurée par l’État, lequel pourrait trouver dans une telle mesure un moyen de réduire ses frais de fonctionnement tandis que les collectivités obtiendraient un espace de respiration. Tout le monde y gagnerait.

Au-delà du fonds « friches », dont je salue la création, il convient de trouver des ressources plus pérennes. Entre l’instauration d’une taxe sur le changement d’affectation assise sur la valeur du sol et la remise sur le marché de terres anthropisées et lourdement polluées, il y a une équation à trouver. Nous y travaillerons en vue de la séance.

La commission rejette les amendements.

 

Amendements identiques CS667 de M. Didier Le Gac, CS677 de Mme Valérie Beauvais, CS2541 de M. Charles de Courson et CS3425 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

Mme Valérie Beauvais. Si les pouvoirs publics promeuvent l’implantation de systèmes de production d’énergie renouvelable dans des espaces déjà urbanisés tels que les toitures des bâtiments, les ombrières de parking ou les sites dégradés, la répartition de ces installations est également guidée, par nature, par la disponibilité de la ressource énergétique. Or, bien souvent, cette ressource ne se trouve pas ou n’est pas disponible en quantité suffisante dans ces espaces déjà urbanisés. Nous proposons de tenir compte de cette réalité physique en prévoyant explicitement que l’absence ou l’insuffisance d’une ressource nécessaire à l’activité considérée constitue une justification suffisante pour que le plan local d’urbanisme ouvre droit à l’urbanisation des sols naturels, agricoles ou forestiers.

M. Charles de Courson. On privilégie l’implantation de fermes éoliennes ou photovoltaïques dans des espaces non agricoles comme les friches industrielles ou les espaces aquatiques pour des systèmes flottants. Ainsi, dans ma circonscription, nous avons mobilisé de vieilles carrières et d’anciennes tuileries. Or certaines collectivités ne disposent pas de tels espaces et ne peuvent donc pas développer ce type de projets. Doivent-elles s’y résoudre ? La mauvaise répartition de ces installations sur le territoire pose problème. C’est pourquoi nous proposons d’ouvrir droit à l’urbanisation des sols naturels, agricoles ou forestiers « en raison de la rareté des espaces urbanisés disposant de la ressource naturelle nécessaire à l’activité considérée ou en permettant l’exploitation ».

M. Lionel Causse, rapporteur. Il est important que les collectivités développent les énergies renouvelables avec les outils existants en matière d’urbanisme. Avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. En vertu des principes généraux du droit de l’urbanisme, la nécessité de développer les énergies renouvelables figure parmi les considérations dont les règles d’urbanisme doivent tenir compte. Il s’agit donc déjà d’un élément important d’appréciation.

Par ailleurs, tous les territoires ne sont pas égaux devant la possibilité de développer tel ou tel type d’énergie renouvelable. Il est vrai que le Gouvernement n’est pas favorable à ce que la pose de panneaux solaires au sol artificialise de nombreux hectares de terres naturelles ou agricoles. Il existe déjà, en France, différents endroits où l’on peut poser des panneaux photovoltaïques au sol – je pense à d’anciennes carrières, à d’anciennes friches industrielles ou à d’anciens circuits automobiles, par exemple. Dans les territoires comptant moins de surfaces de ce type, il faut privilégier les toitures des bâtiments. M. de Courson a aussi évoqué l’énergie éolienne : là encore, tous les territoires ne sont pas égaux car dans certaines régions, il n’y a pas de vent.

La contrainte de la consommation d’espaces naturels doit être prise en compte dans la stratégie de développement territorial des énergies renouvelables. Je ne suis donc pas favorable à ces amendements, d’autant que le critère de la rareté de la ressource ne peut pas toujours s’apprécier à l’échelle du PLU puisque ce document est communal ou intercommunal.

M. Raphaël Schellenberger. Un élément n’est absolument pas pris en compte dans le débat sur les énergies renouvelables : la production d’énergie solaire photovoltaïque ou éolienne consomme énormément de foncier. Rapportée à l’hectare consommé pour installer ces systèmes, l’énergie produite est très faible.

Nous nous trouvons donc confrontés à des conflits d’usage. On utilise des terrains déjà urbanisés comme d’anciennes carrières ; c’est la moins mauvaise des solutions, mais ces terrains pourraient aussi être rendus au milieu naturel ou agricole. Ainsi, dans ma circonscription, l’État vient de valider un projet de production d’énergie photovoltaïque sur l’ancienne piste de délestage de la base aérienne 132. On va installer des panneaux solaires sur une piste en macadam. Mais on aurait très bien pu décider d’enlever le macadam et de rendre cet espace à l’agriculture ou à la biodiversité. Il y a toujours des conflits d’usage à trancher. Quoi qu’il en soit, les énergies renouvelables sont d’abord et avant tout de grandes consommatrices de foncier.

M. Charles de Courson. Madame la ministre déléguée, vous avez évoqué les éoliennes, qui consomment peu d’espace.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. C’est parce que vous les avez citées au début de votre intervention.

M. Charles de Courson. Ma langue a dû fourcher, car le problème concerne surtout l’énergie photovoltaïque. Dans ma circonscription, la question s’est posée au sujet d’une base de l’OTAN créée en 1955 qui n’a jamais fonctionné. Pour rendre cet espace à la nature, il aurait fallu dynamiter les pistes : c’est alors que nous avons envisagé d’en faire une ferme photovoltaïque. Nos amendements sont tout à fait raisonnables, à moins que vous ne vouliez renoncer au développement de certaines énergies renouvelables.

La commission rejette les amendements.

 

Amendement CS1779 de Mme Anne-Laurence Petel.

M. Jean-Luc Fugit. Il vise à clarifier la rédaction de l’alinéa 21, qui dispose que le PADD « tient compte de la capacité à mobiliser effectivement les locaux vacants, les friches et les espaces déjà urbanisés existants pendant la durée comprise entre l’élaboration, la révision ou la modification du plan local d’urbanisme et le bilan prévu à l’article L. 153-27 » du code de l’urbanisme. Cette formulation n’est pas suffisamment prescriptive pour prévenir les dérives ; il convient donc de préciser que l’ouverture à l’urbanisation de sols naturels, agricoles ou forestiers est une exception, nécessairement justifiée par une étude démontrant l’impossibilité de mobiliser les solutions existantes. Cette proposition n’entrave nullement la capacité d’un territoire à répondre à une croissance démographique ou à développer son économie.

M. Lionel Causse, rapporteur. L’étude de densification prévue à l’alinéa 17 répond en grande partie à vos attentes. Avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Même avis. Je comprends tout à fait votre préoccupation, mais votre demande est satisfaite par l’alinéa 17.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CS3295 de M. Alain Perea ; amendements identiques CS1113 de Mme Danielle Brulebois, CS1508 de M. Thibault Bazin, CS1643 de M. Hubert Wulfranc et CS4352 de M. Arnaud Viala ; amendements identiques CS120 de M. Dino Cinieri, CS303 de M. Guy Bricout, CS373 de M. Martial Saddier, CS493 de M. Pierre Vatin et CS773 de M. Gérard Menuel ; amendement CS3933 de M. Alain Perea (discussion commune).

M. Alain Perea. L’alinéa 21 dispose que les communes ne pourront ouvrir de nouvelles zones à l’urbanisation que lorsqu’elles auront apporté la preuve de leur incapacité à mobiliser les friches et autres dents creuses de leur territoire. Je partage tout à fait cette vision ; toutefois, il me paraît important de prendre en compte les difficultés rencontrées par certaines communes et intercommunalités dans ce domaine. J’ai été maire d’une commune de 500 habitants, dont le budget s’élevait à 250 000 euros. Quand on apprend qu’une friche située au centre du village vaut 150 000 euros, on sait qu’on ne pourra jamais mobiliser ce terrain, à moins d’élaborer des montages financiers complexes, sans parler des problèmes juridiques soulevés. L’amendement CS3295 vise donc à préciser que sera prise en compte la capacité « juridique et financière » des collectivités à utiliser le foncier urbanisé disponible.

Mme Danielle Brulebois. J’appelle moi aussi l’attention de notre commission sur les difficultés que l’alinéa 21 pourrait poser à certaines communes et intercommunalités rurales, qui devraient mobiliser des moyens juridiques et financiers importants pour justifier de leur droit à l’urbanisation. Alors que nous avons adopté de nombreuses mesures en faveur de la ruralité, nous devons veiller à maintenir la possibilité, pour ces communes, de renouveler leur population et faire en sorte que les jeunes nourrissant un intérêt grandissant pour la campagne aient toujours le droit de s’y installer. Quand un jeune ménage s’établit dans une commune rurale, aménage un jardin et installe un poulailler, peut-on vraiment parler d’artificialisation des sols ?

M. Thibault Bazin. L’amendement CS1508 rejoint celui de M. Perea et va même plus loin. En promouvant le développement durable, nous devons à la fois poursuivre une véritable ambition environnementale et adopter une approche économique réaliste. Ainsi, il faut tenir compte non seulement des surcoûts qui pourront incomber à la collectivité à l’occasion, par exemple, de la dépollution ou du désamiantage de la friche, mais également des capacités économiques de la population locale pour l’accès au logement, dans la mesure où les rénovations nécessaires et le raccordement aux réseaux d’énergie peuvent coûter très cher.

M. Sébastien Jumel. M. Perea, qui a été maire, nous a parlé de la vraie vie des communes rurales. Son amendement est plein de bon sens. Nous devons tenir compte des moyens financiers et des outils juridiques à la disposition des communes pour restructurer les friches et les dents creuses présentes sur leur territoire. Par ailleurs, si l’État a effectivement augmenté la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) et la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) et constitué un fonds « friches », il conditionne souvent le versement des différentes aides à la dimension intercommunale du projet.

Si nous n’y prenons pas garde, la ruralité va mourir. Certes, il ne faut pas toucher aux terres agricoles, mais une commune qui ne construit pas voit ses écoles menacées – le directeur académique des services de l’éducation nationale (DASEN) procède bien souvent à des regroupements pédagogiques surréalistes – et ses commerces de proximité fermer les uns après les autres. Pour notre part, nous sommes pour une ruralité vivante.

M. Jean-Marie Sermier. Notre amendement CS4352 est empreint d’écologie solidaire et sociale. Il introduit à l’alinéa 21 un principe de réalisme afin de permettre aux communes rurales de mobiliser des terrains situés à l’intérieur des villages plutôt que de chercher des zones à bâtir complètes plus éloignées.

M. Thierry Benoit. Il a été rappelé, à juste titre, que les collectivités ne sont pas toutes égales en termes de moyens financiers. Cela vaut aussi, malheureusement, pour les populations. Comme vous, madame la présidente, je connais un peu le département de l’Ille-et-Vilaine et les différences de revenu médian – et donc de capacité financière – des populations selon qu’elles habitent la première, la deuxième, la troisième ou la quatrième couronne de Rennes, qui est, par ailleurs, une métropole régionale dynamique. Dans un contexte d’accentuation de ces fractures territoriales, notre amendement CS303 soulève un vrai sujet d’égalité.

M. Julien Dive. Le fait que ces amendements aient été déposés par tant de groupes différents doit vous conduire à leur accorder une certaine attention. De nombreux villages n’ont pas adopté de PLU ; certains ont une carte communale, d’autres sont même soumis au règlement national d’urbanisme (RNU). Les municipalités ayant fait l’effort d’adopter un PLU ont vraiment l’ambition d’organiser leur village. Ceux d’entre nous qui ont été maires et sont encore membres d’un conseil municipal savent que l’élaboration d’un tel document nécessite un vrai travail de fond, qui coûte d’ailleurs beaucoup d’argent, ainsi qu’une enquête publique. Un PLU n’est pas gravé dans le marbre : il a vocation à être révisé en fonction des évolutions de la population, des services implantés sur le territoire de la commune et des projets des uns et des autres. Il est important d’en tenir compte.

M. Alain Perea. On parle beaucoup de l’aptitude des territoires à accueillir des populations, mais l’expérience montre que ces dernières se décident surtout en fonction de leur capacité à acheter un bien. Ceux qui en ont les moyens achètent un logement au centre-ville ; ensuite, moins les ménages ont des revenus importants, plus ils s’éloignent. L’amendement CS3933, qui est plutôt un amendement d’appel, vise donc à inclure à l’alinéa 21 les « capacités économiques de la population locale à accéder au logement ». Ne suscitons pas des mécontentements qui finiront par s’exprimer sur les ronds-points.

M. Charles de Courson. Je soutiens ces différents amendements, qui permettront de faire baisser la pression foncière. On nous dit que les zones déjà urbanisées comportent des dents creuses, mais ces dernières sont-elles mobilisables ? Si nous n’adoptons pas ces amendements, nous risquons de faire monter le prix du foncier et d’encourager la rétention foncière.

M. Lionel Causse, rapporteur. Tous ces amendements visent à desserrer, en fonction de certains critères, les contraintes à l’ouverture à l’urbanisation de nouveaux secteurs. Dans le cadre du PLU, le PADD a déjà vocation à déterminer les règles que la collectivité se fixe en matière de développement et d’aménagement ; bien entendu, il tient compte de ses capacités financières, économiques et juridiques. C’est à ce niveau que le sujet doit être abordé : il n’est nul besoin d’intégrer explicitement ces aspects dans le projet de loi. Les amendements étant déjà satisfaits, j’en demande le retrait, faute de quoi je leur donnerai un avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Revenons à la logique du texte. L’alinéa 21 vise simplement à préciser que les SCOT et les PLUi peuvent toujours ouvrir des zones à urbaniser ou artificialiser certains sols, à condition toutefois d’avoir examiné au préalable les autres solutions qui s’offrent à la collectivité. La même disposition figure à l’alinéa 23 s’agissant des cartes communales, dont M. Dive a rappelé l’existence.

Aux termes de l’alinéa 21, les documents d’urbanisme doivent donc prendre en compte « la capacité à mobiliser effectivement les locaux vacants, les friches et les espaces déjà urbanisés ». Vos amendements visent à préciser de quelle capacité il s’agit. Ainsi, l’amendement CS3295 évoque la capacité « juridique et financière » de la collectivité ; on pourrait tout aussi bien parler de sa capacité technique, de sa capacité administrative, ou encore de sa capacité en termes de ressources humaines. L’adverbe « effectivement » a toute son importance : s’il n’est pas possible de mobiliser les terrains concernés pour des raisons juridiques, financières ou tenant à la complexité de l’opération, alors l’artificialisation de nouvelles zones reste permise, dans le cadre général de l’objectif de réduction d’au moins 50 % du rythme d’artificialisation des terres, qui se décline territorialement. Aussi, les mots « capacité » et « effectivement » me paraissent suffisants pour couvrir toutes vos exigences et répondre à vos interrogations légitimes. Je me réjouis en tout cas que le débat ait permis de clarifier ce point.

Vous dites que les communes rurales ont besoin d’accueillir de nouvelles populations pour continuer à vivre. Or, accueillir de nouvelles populations, c’est dans certains cas construire, dans d’autres rénover, dans d’autres encore redonner vie à d’anciens bâtiments situés au cœur du village, ce qui permet en outre d’attirer de l’activité économique. À travers les programmes « Action cœur de ville » et « Petites villes de demain », nous soutenons beaucoup ce retour à l’attractivité. Par ailleurs, nous donnons de plus en plus d’importance aux aides à la rénovation – je ne reviens pas sur cette question, qui était l’objet du chapitre précédent – afin de rendre ces opérations économiquement intéressantes et de permettre aux ménages qui le souhaitent d’acheter des maisons anciennes auxquelles ils redonneront de la valeur. Pour accueillir de nouvelles populations, construire sur des terres naturelles ou agricoles est donc le dernier recours, après s’être assuré qu’on ne pouvait pas faire autre chose. Avis défavorable.

M. Thibault Bazin. Il faut effectivement examiner la capacité d’une collectivité à aménager les zones urbanisées existantes en tenant compte de toutes les contraintes. En cela, l’alinéa 21 va dans le bon sens, mais il n’est pas suffisant. Il arrive que les contraintes inhérentes au site, qui peut être une friche, un terrain en pente ou une construction nécessitant des fondations spéciales, soient telles que le coût final de l’opération dépasse les moyens financiers de la population locale. À mon sens, il convient d’ajouter cet élément à l’alinéa 21 afin de conjuguer la capacité des habitants à acheter et rénover de manière exemplaire avec la capacité des collectivités à mobiliser ces terrains.

M. Sébastien Jumel. Lorsque j’étais maire, ma ville a mené neuf opérations programmées d’amélioration de l’habitat : en mobilisant l’Agence nationale de l’habitat (ANAH), nous avons restructuré et rénové des bâtiments, y compris d’un point de vue thermique. Je connais donc bien ce sujet. La première difficulté à laquelle sont confrontées les collectivités rurales est la mobilisation des moyens financiers. La réhabilitation d’une friche, d’un logement insalubre ou d’une dent creuse est non seulement coûteuse, mais elle se heurte également à des contraintes que ce projet de loi renforce – je pense, entre autres, au schéma départemental d’analyse et de couverture des risques (SDACR), au plan de prévention des risques naturels (PPRN), ou encore au plan de prévention du risque inondation (PPRI). Même lorsqu’on connaît bien le fonctionnement des collectivités locales, on se demande si les gens qui pondent ces dispositifs ne cherchent pas à étouffer la vitalité des zones rurales ! En somme, tous ces amendements visent à rendre vos objectifs légitimes compatibles avec la réalité et la vitalité des communes rurales.

M. Dominique Potier. La démographie de la Meurthe-et-Moselle n’est pas celle de l’Ouest ou de l’Occitanie. Sur le temps long, la Lorraine perd des habitants. Pour autant, les maires demandent toujours la possibilité de construire pour accueillir de nouvelles populations. Il faut donc accomplir une révolution culturelle. Penser l’urbanisme à l’échelle d’un grand territoire, celle du SCOT ou du PLUi, nous oblige à concevoir des outils de planification ou de programmation de l’action publique qui permettront aux communes de résoudre des équations impossibles. Après avoir adopté un SCOT ou un PLUi, il faut créer des établissements publics fonciers beaucoup plus puissants qu’ils ne le sont actuellement, des bailleurs sociaux capables d’agir dans des zones détendues, ainsi que des agences organisées sur le modèle de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) en milieu rural. Faisons preuve d’inventivité, sans renoncer pour autant à préserver les terres agricoles.

M. Nicolas Turquois. Je partage le point de vue de M. Potier. Lorsque j’étais maire d’une toute petite commune rurale, j’ai pu constater que mes prédécesseurs avaient l’habitude d’acheter de grandes surfaces de terrain agricole pour construire des lotissements en veux-tu en voilà – c’était, pour eux, une solution de facilité. Or les services de l’État peuvent accompagner les communes et leur permettre de trouver d’autres solutions. Il faut changer notre état d’esprit : certaines opérations telles que la restructuration d’une ancienne ferme pour y créer des logements peuvent s’avérer complexes, tant sur le plan technique que sur le plan financier, mais elles sont tout à fait réalisables. Ne voyons pas des problèmes partout et arrêtons de dire que ce n’est pas possible : il suffit parfois de se prendre par la main et de solliciter les services de l’État, qui disposent de toute l’expertise nécessaire.

M. Alain Perea. Hormis à une certaine époque durant laquelle la construction s’apparentait davantage à une opération financière qu’à autre chose, en France, on ne construit pas des logements pour qu’ils restent vides. Si les maires construisent, c’est pour accueillir de nouveaux habitants dans leur commune.

Je ne voudrais pas laisser croire qu’au travers de ces amendements, on veut aller à l’encontre de l’objectif de limitation de l’artificialisation des sols. Le message que j’essaie de faire passer, c’est que dans de nombreux endroits, contrairement à ce qui vient d’être dit, il y a des blocages. Certes, il arrive que les services de l’État apportent leur aide, mais samedi dernier, à Floure, qui a dépensé 35 000 euros pour son PLU, la réunion a duré trente secondes ; les services de l’État ont dit – alors que le présent texte n’a même pas été encore adopté : « Non, vous artificialisez trop ». Il faut laisser des espaces de respiration aux élus !

M. Lionel Causse, rapporteur. M. Potier l’a dit : d’un territoire à l’autre, la situation est très différente. Cela fonctionne aussi par cycles. Pendant longtemps, la ville de Bayonne s’est dépeuplée : les personnes qui avaient des moyens la quittaient – ce sont souvent elles qui contribuent à l’étalement urbain. Aujourd’hui, le phénomène inverse se produit. Dax se dépeuple. Je connais, dans les Landes, des petites communes qui ont construit des logements sociaux qui restent vides.

Il importe donc de prendre en considération les stratégies locales. Ce n’est pas nous, ici, qui pouvons savoir ce qui est bon pour chaque territoire ; c’est aux acteurs locaux de le définir. C’est pourquoi j’en reviens toujours à la nécessité de mettre en avant les SCOT, les PADD et toute cette ingénierie territoriale capable de s’adapter aux conditions locales. Certes, tous les SCOT ne se valent peut-être pas, mais il y a tout de même de très belles réussites. Faisons confiance aux décideurs locaux : je suis persuadé qu’ils trouveront les bonnes réponses.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement CS3885 de M. Jean-Luc Lagleize.

M. Lionel Causse, rapporteur. Cet amendement traite de la surélévation des bâtiments. Nous en avons déjà parlé hier. Mon amendement CS5087 après l’article 51 apportera une réponse à cette question. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS3891 de Mme Valérie Petit.

Mme Valérie Petit. Je propose de préciser la notion de « friches » en ajoutant « urbaines et industrielles ».

M. Lionel Causse, rapporteur. Avis défavorable : si je comprends votre souci de précision, cet amendement risque d’avoir des conséquences négatives. Il convient d’inclure tous les types d’espaces délaissés dans cette catégorie. Nous aurons l’occasion de définir la friche par un amendement que nous examinerons sous peu.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Même avis : une telle rédaction risquerait d’exclure les friches commerciales ou administratives. Néanmoins, je suis prête à en rediscuter ultérieurement.

M. Charles de Courson. Je trouve cet amendement dangereux : on pourrait comprendre a contrario que le texte ne concerne que les friches urbaines « et » industrielles.

M. Thibault Bazin. Je suis moi aussi opposé à l’amendement. En milieu rural aussi, il existe des friches, notamment scolaires et agricoles. Le bâti peut avoir divers usages, et c’est de changer d’usage qui est le plus compliqué. Si l’on veut favoriser le renouvellement, qu’il soit urbain ou rural, il faut retenir une définition large de la friche.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS5132 du rapporteur.

 

Amendement CS2062 de M. Dominique Potier.

M. Dominique Potier. Il importe que nous disposions d’un outil public de gestion des espaces forestiers, qui représentent environ un tiers de la surface nationale. C’est pourquoi nous appelons, à travers cet amendement, au renforcement du budget et des missions de l’Office national des forêts (ONF).

La forêt joue un rôle important dans l’économie de notre territoire. Elle doit faire l’objet d’une gestion et d’une planification intelligentes, eu égard à ses usages concurrents, à des fins énergétiques ou de biodiversité, ainsi qu’aux risques d’artificialisation par l’habitat ou par des infrastructures. Cet amendement est par conséquent un plaidoyer en faveur de ce grand organisme de gestion à long terme et de protection de notre patrimoine forestier commun qu’est l’ONF.

M. Lionel Causse, rapporteur.  Si je partage votre volonté de protéger et de développer l’ONF, qui est un acteur essentiel dans tous nos territoires, l’article 49 vise précisément à limiter la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers. C’est l’objectif même de l’ONF : autant en rester là. Avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. J’entends votre plaidoyer en faveur de l’ONF, monsieur Potier, mais il me semble que ce que vous proposez dépasse largement l’objet de l’article. Demande de retrait ou avis défavorable.

M. Dominique Potier. Il est tellement difficile d’élargir l’objet du texte – au moins aurais-je essayé ! (Sourires.)

Nous avons besoin d’une vision à long terme, susceptible de défendre l’intérêt général. L’ONF a été créé pour cela, et il doit être renforcé pour qu’il puisse continuer à jouer son rôle.

Mme Valérie Petit. Il n’y a pas que l’ONF qui joue ce rôle, monsieur Potier, il y a aussi l’Office français de la biodiversité (OFB) – qui est lui aussi un peu déplumé.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CS4068 de Mme Frédérique Tuffnell.

M. Nicolas Turquois. Chaque été, il y a un problème de remplissage des nappes phréatiques, et les agriculteurs – dont je suis – ont leur part de responsabilité dans ce phénomène, ayant arraché des haies et creusé des fossés pour que l’eau s’écoule plus rapidement.

Il se passe la même chose en milieu urbain : on imperméabilise les sols en goudronnant et en bétonnant. Un certain nombre de villages en zones humides ont disparu au profit de l’urbanisation. Il faudrait donc pouvoir tenir compte dans le PLU de l’imperméabilisation et de la « désimperméabilisation » – si vous me passez ce néologisme – des sols. Cela permettrait de préserver des milieux humides à côté de nos villes et de nos villages et favoriserait le remplissage des nappes phréatiques.

M. Lionel Causse, rapporteur. L’amendement est en grande partie satisfait, puisque le code de l’urbanisme prévoit déjà que le règlement du PLU peut imposer une part minimale de surface non imperméable ou aménageable. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Même avis : votre préoccupation est parfaitement légitime, mais l’amendement est satisfait.

M. Nicolas Turquois. La prise en considération du problème ne me semble pas à la hauteur des enjeux. On a tendance à essayer de faire partir l’eau au plus vite, soit dans le caniveau, soit par des tuyaux vers les fossés. D’un point de vue symbolique, il serait important d’adopter cet amendement. Je le maintiens.

M. Julien Dive. Je voterai en faveur de l’amendement, quand bien même il serait satisfait. Nous avons déjà adopté tant de dispositions qui étaient en réalité satisfaites !

Nicolas Turquois a raison d’insister sur ce point. Tout à l’heure, on laissait entendre que les maires étaient des fous dangereux qui ne pensaient qu’à bétonner. Je ne crois pas que ce soit le cas. Il faut impérativement faire confiance aux élus locaux. Nombre d’entre eux font beaucoup d’efforts en sens inverse, par exemple en cassant les trottoirs en macadam pour les remplacer par des espaces de stationnement végétalisés. Il faut encourager cette dynamique, et il me semble important de le faire dans le cadre des PLU.

M. Charles de Courson. Je trouve l’amendement excellent. Prenons, mes chers collègues, l’exemple de la vallée de la Marne. Depuis une cinquantaine d’années, le niveau des précipitations n’a pas changé. En revanche, si l’écoulement se faisait autrefois en cloche, il suit désormais une progression logarithmique et le volume des eaux de ruissellement s’accroît. Pourquoi ? Parce que dans toutes les villes, tous les villages, on a goudronné, on a bétonné et l’on a fait des réseaux d’eaux pluviales. Appeler l’attention sur ce point dans la loi me semble plein de sagesse.

Mme Chantal Jourdan. Le groupe socialiste soutient lui aussi cette proposition. L’enjeu est important et cela permettrait d’amener à une prise de conscience du problème par l’ensemble de la population.

Mme Delphine Batho. Moi aussi, je voterai en faveur de l’amendement. Pourriez-vous, madame la ministre ou monsieur le rapporteur, nous indiquer les références des textes qui le satisferaient ?

M. Lionel Causse, rapporteur. Il s’agit de l’article L. 151-22 du code de l’urbanisme.

Mme Valérie Petit. J’appuie moi aussi cet amendement, qui permettrait, comme l’a dit notre collègue Dive, de soutenir le volontarisme dont certains élus font preuve.

La commission adopte l’amendement.

 

Suivant les avis du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements CS3303 de M. François Pupponi et CS5006 de M. Julien Aubert.

 

Amendements identiques CS3056 de Mme Sylvia Pinel et CS3306 de M. François Pupponi.

M. Lionel Causse, rapporteur. Ces amendements visent à introduire dans le PLU des servitudes de mobilisation foncière permettant de procéder à une expropriation simplifiée dans deux cas de figure : en cas de non-occupation d’un bien pendant plus de cinq ans ou en cas de construction insuffisante par rapport aux droits à construire. Même si je partage la volonté de leurs auteurs de densifier le tissu urbain, je ne suis pas convaincu que la mesure d’expropriation proposée soit la bonne solution, surtout vu les délais retenus. Je proposerai, à travers l’amendement CS5087 déposé après l’article 51, une autre voie pour atteindre le même objectif. Avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Même avis. J’ajoute que le Gouvernement a engagé un chantier en vue d’accélérer le recours à la procédure d’acquisition des biens sans maître ; ce travail trouvera son aboutissement dans le projet de loi dit « 4D ».

M. Raphaël Schellenberger. Tous ces amendements sont inutilement bavards, à l’image d’ailleurs du texte. Il semblerait que le Gouvernement n’ait pas encore compris qu’on n’en était plus au plan d’occupation des sols (POS), mais qu’on était passé au PLU. Les documents d’urbanisme étant des instruments de planification à long terme, il faut du temps avant qu’ils ne produisent leurs effets. Le temps du foncier est calé sur celui de la construction. En réalité, la totalité des objectifs que vous fixez sont déjà présents dans les différents documents d’urbanisme. Bref, on est dans un concours de bavardage !

M. Charles de Courson. Tous ceux qui ont été maires – notamment, mais pas seulement, en zone rurale – ont été confrontés au problème des dents creuses, lesquelles donnent lieu à des débats homériques. Le mécanisme proposé dans ces amendements me semble plutôt respectueux du droit de propriété : il s’agirait de créer une servitude dite de mobilisation foncière permettant une expropriation simplifiée si un bien est inoccupé depuis plus de cinq ans ou une propriété insuffisamment bâtie ; en retour, le propriétaire aurait le droit d’obliger la commune ou la communauté de communes à lui acheter son bien après un certain temps. Ce dispositif, équilibré, permettrait de résoudre nombre de problèmes – par exemple, celui posé par les jardins ou vergers délaissés dont on ne peut pas faire grand-chose. Cette mesure de simplification est d’ailleurs préconisée par l’Union sociale pour l’habitat.

La commission rejette les amendements.

 

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement CS3305 de M. François Pupponi.

 

Amendements identiques CS1111 de Mme Danielle Brulebois, CS1509 de M. Thibault Bazin et CS4354 de M. Arnaud Viala.

M. Jean-Marie Sermier. Il s’agit de lever un certain nombre de contraintes, en tenant compte de la capacité des communes à mobiliser les espaces déjà urbanisés.

M. Thibault Bazin. C’est parfaitement cohérent avec ce que nous avions proposé précédemment.

M. Lionel Causse, rapporteur. Nous avons déjà eu le même débat au sujet des SCOT : avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Même avis : c’est la suite de la discussion précédente, appliquée à la carte communale.

La commission rejette les amendements.

 

Amendements identiques CS668 de M. Didier Le Gac, CS2521 de Mme Valérie Beauvais, CS2545 de M. Charles de Courson et CS3627 de Mme Marie-Noëlle Battistel.

M. Charles de Courson. Parallèlement à l’objectif de lutte contre l’artificialisation des sols, la France s’est dotée, à travers la loi relative à l’énergie et au climat, d’objectifs ambitieux de développement des énergies renouvelables, objectifs qui sont déclinés dans la programmation pluriannuelle de l’énergie.

Si des outils de politiques publiques promeuvent le développement d’installations renouvelables dans des espaces déjà urbanisés – toitures des bâtiments, ombrières de parking, sites dits dégradés –, la répartition des installations de production d’énergies renouvelables est également guidée, par nature, par la disponibilité de la ressource sur le territoire national. Or, bien souvent, cette ressource ne se situe pas dans les espaces déjà urbanisés, ou elle n’y est pas disponible en quantité suffisante.

Le présent amendement vise à tenir compte de cette réalité physique en prévoyant que l’absence ou l’insuffisance d’une ressource nécessaire à l’activité considérée est une justification suffisante pour que le plan local d’urbanisme ouvre droit à l’urbanisation des sols naturels, agricoles ou forestiers.

M. Lionel Causse, rapporteur. Nous avons déjà eu ce débat : avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Il s’agit du même débat que sur le PLU, appliqué à la carte communale. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements.

 

Amendements identiques CS121 de M. Dino Cinieri, CS304 de M. Guy Bricout, CS370 de M. Martial Saddier et CS774 de M. Gérard Menuel.

M. Jean-Marie Sermier. Il convient de tenir compte de la capacité financière des communes à mobiliser les espaces déjà urbanisés.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette les amendements.

 

Amendements identiques CS3335 de M. Alain Perea et CS4356 de M. Arnaud Viala, amendements identiques CS293 de M. Guy Bricout, CS753 de M. Gérard Menuel et CS1487 de M. Thibault Bazin, et amendements identiques CS100 de M. Dino Cinieri et CS364 de M. Martial Saddier (discussion commune).

Mme Sandra Marsaud. Il s’agit de fixer pour les documents d’urbanisme locaux des calendriers propres afin de tenir compte des réalités du terrain.

M. Jean-Marie Sermier. Il convient en effet d’être pragmatique dans la lutte contre l’artificialisation des sols.

M. Thibault Bazin. Ce sont des amendements très importants. Il faut plusieurs années pour concevoir un SCOT, un PLU ou un PLUi, et leur révision aussi prend du temps. Du fait de l’évolution de la législation, de nouvelles études d’impact et de nouveaux diagnostics sont demandés à chaque fois. Ce sont des démarches coûteuses. Il convient que les délais fixés soient réalistes. Je ne suis même pas sûr qu’il faille, comme le proposent MM. Perea et Viala, arrêter une date butoir, parce qu’on ne sait pas quand la loi sera promulguée : vu la longueur des discussions, cela peut prendre encore beaucoup de temps !

M. Lionel Causse, rapporteur. J’entends la préoccupation des auteurs des amendements. Il convient de laisser aux élus locaux des délais suffisants pour mettre à jour leurs documents, et ceux fixés dans le texte seraient peut-être difficiles à respecter. C’est pourquoi je proposerai ultérieurement des amendements – qui, je l’espère, recevront votre approbation – en vue de les modifier. En conséquence, avis défavorable sur l’ensemble des amendements en discussion commune.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Faut-il allonger les délais fixés pour la modification des documents stratégiques ? Sur ce sujet, je suis ouverte à la discussion. M. le rapporteur a d’ailleurs déposé plusieurs amendements en ce sens, notamment les CS5251, CS5252 et CS5241.

Cela étant, si l’on fixe le point de départ à 2026, comme cela est proposé dans les amendements CS3335 et CS4356, il ne sera pas possible de respecter l’objectif de lutte contre l’artificialisation que nous avons fixé pour les dix prochaines années, alors même que nous venons de débattre d’un éventuel avancement de celui de zéro artificialisation nette. Il me semble préférable de desserrer la contrainte de mise en cohérence des documents les uns par rapport aux autres.

Toutefois, si, comme M. Bazin le suggère, le point de départ varie en fonction de la date d’approbation de chacun des documents, ceux-ci n’offriront plus du tout de cohérence entre eux. Une date glissante me paraît en total décalage avec les objectifs du projet de loi.

M. Thibault Bazin. Votre position, madame la ministre, serait pertinente si rien n’avait été fait avant. Or, à travers notamment les SCOT, un certain nombre de territoires se sont déjà engagés dans des démarches extrêmement vertueuses, par exemple de renouvellement urbain ou rural. Il serait dommageable de leur imposer de nouveaux objectifs, donc de nouvelles contraintes en matière de PLU ou de PLUi. Aujourd’hui, on a aussi besoin de logements. Or, à chaque fois qu’on modifie la donne, cela gèle les projets. Il serait bon de faire « dans la dentelle », de manière à tenir compte du fait que certains territoires ont déjà intégré dans leurs documents stratégiques des objectifs de limitation ou de maîtrise de l’artificialisation des sols.

La commission rejette successivement les amendements identiques CS3335 et CS4356, les amendements identiques CS293, CS753 et CS1487, et les amendements identiques CS100 et CS364.

 

 

 

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