Compte rendu

Commission spéciale chargée d’examiner le projet de loi portant lutte
contre le dérèglement climatique
et renforcement de la résilience
face à ses effets

– Suite de l’examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (n° 3875 rect.) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, M. Damien Adam, M. Erwan Balanant, Mme Aurore Bergé, M. Lionel Causse, Mme Célia de Lavergne, Mme Cendra Motin, M. Mickaël Nogal et M. Jean-Marc Zulesi, rapporteurs)              2


Mardi
16 mars 2021

Séance de 21 heures

Compte rendu n° 36

session ordinaire de 2020-2021

Présidence de
Mme Laurence Maillart‑Méhaignerie,
Présidente

 


  1 

La commission spéciale poursuit l’examen du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (n° 3875 rect.) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général, M. Damien Adam, M. Erwan Balanant, Mme Aurore Bergé, M. Lionel Causse, Mme Célia de Lavergne, Mme Cendra Motin, M. Mickaël Nogal et M. Jean-Marc Zulesi, rapporteurs).

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Chers collègues, nous poursuivons l’examen du titre IV du projet de loi, dont le rapporteur est M. Lionel Causse.

Nous avons examiné 2776 amendements, à un rythme moyen de 39 amendements par heure.

 

Article 49 (suite) (articles L. 4251-1, L. 4424-9 et L. 4433-7 du code général des collectivités territoriales ; articles L. 123-1, L. 141-3, L. 141-8, L. 151-5, L 151-9 et L. 161-3 du code de l’urbanisme) : Insertion dans les documents d’urbanisme régionaux et territoriaux d’un objectif de réduction de moitié de l’artificialisation des sols et conditionnement de l’ouverture à l’urbanisation de nouveaux secteurs

 

Amendement CS5320 du rapporteur.

M. Lionel Causse, rapporteur pour les chapitres III à V. J’avais annoncé cet amendement hier et Mme la ministre l’a évoqué à plusieurs reprises. Il vise à redéfinir le mode de calcul de l’artificialisation des sols pour la décennie à venir.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement. Avis favorable. Nous avons longuement débattu de la définition de l’artificialisation et cet amendement introduit une définition pour la première période de dix ans.

M. Martial Saddier. J’aimerais savoir si l’adoption de cet amendement en fera tomber d’autres.

Ce serait une bonne chose, pour le grand public, et par respect pour les élus d’hier et d’aujourd’hui, que l’on ait, d’ici à la séance, une vision précise des efforts qui ont déjà été faits pour diminuer la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers dans les collectivités territoriales.

Par ailleurs, votre amendement prévoit que les modalités d’application du dispositif à l’intérieur des régions seront fixées par un décret en Conseil d’État. Cela signifie que le Parlement n’aura pas son mot à dire là-dessus. Pourriez-vous, madame la ministre, comme c’est la tradition dans cette maison, nous éclairer d’ici à la séance, sur les grandes lignes de ce décret ?

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. L’adoption de cet amendement ne ferait tomber que l’amendement CS5129 du rapporteur.

M. Lionel Causse, rapporteur. Vous trouverez les données relatives à l’évolution de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers sur le site internet de l’Observatoire national de l’artificialisation des sols. On est passé de 30 000 hectares par an entre 2009 et 2012 à 22 000 ou 23 000 hectares au cours des dernières années.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement CS5129 du rapporteur tombe.

 

Amendements identiques CS101 de M. Dino Cinieri, CS294 de M. Guy Bricout, CS360 de M. Martial Saddier, CS754 de M. Gérard Menuel, CS1159 de Mme Danielle Brulebois, CS1488 de M. Thibault Bazin, CS2468 de Mme Nathalie Sarles, CS4357 de M. Arnaud Viala, CS4994 de M. Jean-Marie Sermier, et amendement CS882 de M. Julien Aubert (discussion commune).

M. Martial Saddier. D’après les chiffres que vous donnez, monsieur le rapporteur, la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers a donc diminué d’un tiers à l’échelle nationale au cours des dernières années. Mais tous les départements n’ont pas fait les mêmes efforts et il faudrait que ceux qui ont déjà fait des efforts énormes ne soient pas soumis aux mêmes contraintes que ceux qui en ont fait moins – cela pourrait être précisé dans le décret.

M. Jean-Marie Sermier. Il importe en effet de tenir compte des efforts déjà consentis. Si une collectivité ne consomme plus du tout d’espace depuis plusieurs années, ce peut être, soit le signe d’une déprise foncière, soit le résultat d’une volonté politique. Dans les deux cas, il faut en tenir compte.

M. Julien Aubert. Il faut tenir compte de l’effort déjà réalisé par les différents territoires, en faisant en sorte que la déclinaison régionale ne s’applique pas de manière uniforme à toutes les communes. L’un des points faibles de votre texte tient au fait que vous ne prenez en compte que les dix dernières années. Nous craignons que ce choix ne se retourne contre les communes qui ont fait des efforts importants par le passé.

M. Lionel Causse, rapporteur. Vous souhaitez tenir compte de l’effort de réduction de consommation du foncier déjà réalisé. Nous avons déjà débattu de cette question hier soir et je vous ai indiqué que je serais favorable à l’adoption de l’amendement CS4212 de Mme Sandra Marsaud, qui va dans ce sens. Je vous invite donc à retirer vos amendements au profit du sien.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Nous partageons votre objectif : il faut que la trajectoire de réduction de l’artificialisation – ou de la consommation – des espaces naturels tienne compte des efforts déjà réalisés et de la situation spécifique de chaque territoire. Il importe en effet de ne pas pénaliser les territoires qui se sont déjà engagés dans une démarche de réduction de l’artificialisation.

Deux amendements qui viennent d’être adoptés le garantissent. Le premier, c’est l’amendement CS3169 de M. Alain Perea, qui pose le principe qu’à l’échelle régionale, les règles générales des schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) seront territorialisés entre les différentes parties du territoire. Le second, c’est l’amendement CS5320 du rapporteur, qui précise que le décret en Conseil d’État tient compte de « la réduction de la consommation de ces espaces déjà réalisée dans les différentes parties du territoire régional ». Je m’engage d’ailleurs, monsieur Saddier, à vous exposer les grandes lignes de ce décret en séance publique. Vos amendements me paraissent totalement satisfaits.

M. Thibault Bazin. Vous avez imaginé une déclinaison qui, à partir du SRADDET, s’appliquera aux schémas de cohérence territoriale (SCOT), puis aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Mais certaines communes ont déjà, dans leur plan local d’urbanisme (PLU), fait des efforts considérables. Ce que votre texte ne prend pas en compte, ce sont les éventuelles situations conflictuelles. Si des conflits apparaissent au sein d’une région, d’un EPCI ou d’un SCOT, qu’est-ce qui arrivera aux communes qui ont déjà fait des efforts pour réduire leur consommation d’espaces naturels ? Certaines d’entre elles ont réduit leur consommation par dix : c’est le cas de Dombasle-sur-Meurthe, dans ma circonscription. Elles ont droit à un avenir !

La commission rejette successivement les amendements.

 

Elle adopte l’amendement de coordination CS5241 du rapporteur.

 

Amendement CS5242 du rapporteur et sous-amendement CS5427 de Mme Sandra Marsaud.

M. Lionel Causse, rapporteur. Cet amendement, que je vous avais annoncé, accorde un délai supplémentaire aux SRADDET pour intégrer l’objectif de réduction de 50 % de l’artificialisation. Le délai de réalisation des documents d’aménagement, de stratégie, de planification et d’urbanisme se verra ainsi allongé.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Avis favorable.

Mme Sandra Marsaud. Comme nombre de mes collègues, je pense qu’il est très important de tenir compte des efforts déjà réalisés, mais aussi d’accompagner et de responsabiliser tous les échelons, du national au local. Afin de garantir une territorialisation équilibrée, je propose que la conférence territoriale de l’action publique (CTAP) soit réunie pour définir une répartition cohérente sur l’ensemble du territoire des efforts en matière d’artificialisation des sols. Je défendrai d’autres amendements après l’article 49 pour préciser le rôle de la CTAP, mais il me paraissait important de la mentionner dès l’article 49. On nous a dit, au cours des auditions, que cette conférence ne fonctionnait pas bien parce qu’elle était trop large. Puisqu’il existe une sous-commission à la culture et une commission au foncier, je propose de créer une conférence du foncier au niveau régional, afin de favoriser la territorialisation.

M. Lionel Causse, rapporteur. Même si je comprends votre objectif, ce sous‑amendement me semble un peu trop directif, puisqu’il prévoit la réunion systématique de la CTAP. Je vous invite à le retirer pour le retravailler. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Je comprends la logique de votre sous-amendement, mais prévoir la consultation systématique de la CTAP, sachant que tous les SRADDET qui n’ont pas un objectif satisfaisant de réduction de l’artificialisation vont être modifiés, impliquerait un surcroît de travail considérable pour elle. Nous examinerons d’autres amendements relatifs à la CTAP un peu plus tard. Pour l’heure, j’émets un avis défavorable sur ce sous-amendement.

Mme Sandra Marsaud. Il me semblait important de mentionner la CTAP à l’article 49, mais je vais le retirer.

M. Julien Aubert. Les grandes régions regroupent des territoires très hétérogènes. Dans ce contexte, il peut être compliqué de faire du SRADDET le vaisseau amiral, surtout si l’objectif est d’être au plus près du terrain.

Par ailleurs, l’amendement prévoit que si la région ne fait rien, les documents de rang inférieur n’auront que deux ans, après la promulgation de la loi, pour se mettre en ordre de bataille. J’aurais préféré un dispositif qui épouse le renouvellement naturel des documents d’urbanisme, car celui que vous proposez risque de provoquer une vraie pagaille : on sera à la main de ce que décidera la région. Je ne suis pas certain que ce soit le choix le plus pragmatique pour obtenir une montée en gamme, surtout sachant que vous vous donnez dix ans pour atteindre votre objectif.

Le sous-amendement est retiré.

L’amendement est adopté.

En conséquence, l’amendement CS4204 de Mme Sandra Marsaud et les amendements identiques CS1239 de M. Vincent Descoeur et CS736 de Mme Émilie Bonnivard, et les amendements CS1085 de Mme Stéphanie Do et CS3264 de Mme Fannette Charvier tombent.

 

Amendement CS5243 du rapporteur.

M. Lionel Causse, rapporteur. Il s’agit d’adapter l’amendement précédent à la situation particulière de la Corse et du plan d’aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC).

La commission adopte l’amendement.

 

Amendements CS5244 et CS5086 du rapporteur.

M. Lionel Causse, rapporteur. Ces amendements adaptent les dispositions de l’amendement CS5242 relatives aux SRADDET aux schémas d’aménagement régional (SAR) en outre-mer et au schéma directeur de la région Île‑de‑France (SDRIF).

La commission adopte successivement les amendements.

 

Amendement CS5246 du rapporteur.

M. Lionel Causse, rapporteur. Il s’agit de permettre à la collectivité d’engager la procédure d’évolution de son document d’urbanisme selon la procédure de la modification simplifiée, qui est plus rapide, sans fermer la possibilité de recourir à la procédure de révision. Cet amendement devrait satisfaire tous les collègues qui ont déposé des amendements relatifs au mode de révision des documents d’urbanisme, puisque nous laissons le choix entre la modification et la révision.

La commission adopte l’amendement.

 

Elle rejette l’amendement CS104 de M. Dino Cinieri.

 

Amendements CS5247 du rapporteur et CS883 de M. Julien Aubert (discussion commune).

M. Lionel Causse, rapporteur. Afin de permettre une meilleure intégration des objectifs de réduction du rythme de l’artificialisation des sols dans les documents de planification et d’urbanisme, cet amendement propose une adaptation des délais imposés pour leur évolution. Je suis très attaché aux SCOT, vous le savez, et nous avons longuement discuté avec Mme la ministre et ses services pour trouver une solution susceptible de convenir à tout le monde. Cet amendement en fera tomber quarante-six portant sur l’alinéa 32 : vingt de la majorité et vingt-six de l’opposition.

La première partie de l’amendement concerne le délai d’intégration de l’objectif de réduction de l’artificialisation dans le SCOT. Le projet initial fixait un délai de quinze mois, à compter de la promulgation de la loi – douze mois pour le SRADDET, et trois mois d’adaptation. Cette évolution devait avoir lieu avant le 1er juillet 2024, c’est-à-dire moins de trois ans à compter de la promulgation de la loi. Je propose de porter ce délai à cinq ans, ce qui satisfait la totalité des amendements déposés. Je proposerai d’autres amendements permettant d’allonger les délais d’adaptation – par exemple un allongement de six mois pour les SRADDET.

M. Julien Aubert. Tous les articles sont réécrits, les uns après les autres : nous sommes pleinement dans notre rôle de législateur, certes, mais cela témoigne aussi d’un problème de rédaction du texte initial. Et toutes ces modifications rendent l’ensemble peu lisible.

La philosophie de mon amendement est beaucoup plus simple, puisque je propose d’intégrer les nouveaux objectifs relatifs à l’artificialisation des sols au moment du renouvellement naturel des documents d’urbanisme. Une telle disposition me paraît beaucoup plus lisible que la vôtre, qui prévoit que « les documents de rang inférieur seront mis en compatibilité dès leur première révision, au moment de leur bilan, et au plus tard, dans un délai de cinq ou six ans suivant l’adoption du schéma régional intégrant les objectifs de la loi, ou à défaut, deux ans après l’entrée en vigueur de la présente loi ».

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Je n’ai pas eu le temps de m’exprimer sur l’amendement CS104 : il supprime purement et simplement tous les mécanismes contraignants d’intégration de l’objectif général posé au plan national, puis régional, dans le SCOT et le plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi). L’adoption d’un tel amendement supprimerait les outils opérationnels qui doivent nous permettre d’atteindre notre objectif, puisque ce sont ces documents d’urbanisme qui définissent les zones à urbaniser.

Je suis favorable à l’amendement du rapporteur qui, sans supprimer les mécanismes d’obligation, laisse plus de temps pour mettre en cohérence les différents documents les uns avec les autres. Le délai est porté à cinq ans, alors que le projet de loi avait initialement retenu l’échéance de juillet 2024, qui était probablement trop optimiste.

Vous proposez, monsieur Aubert, une évolution au fil de l’eau des différents documents d’urbanisme. Le problème, c’est qu’une telle disposition n’assurera pas la cohérence territoriale et la différenciation dont on a besoin. Si tout se fait au fil de l’eau, c’est le dernier document révisé qui sera obligé de faire tout ce qui n’aura pas été fait à l’échelle régionale. Il importe que la déclinaison se fasse de manière coordonnée dans le temps. Avis défavorable.

Mme Delphine Batho. Le rapporteur propose de laisser du temps au temps pour tenir compte de la complexité de l’ingénierie territoriale. Or ce n’est malheureusement pas compatible avec le calendrier de l’urgence climatique et de la lutte contre l’effondrement de la biodiversité…

L’objectif qui consiste à diviser par deux le rythme de l’artificialisation des sols en dix ans est déjà modeste, et on va encore allonger les délais. Quand va commencer cette période de dix ans : en 2025 ou en 2026 ?

M. Thibault Bazin. Monsieur le rapporteur, votre amendement va dans le bon sens, puisque les délais prévus dans la rédaction initiale n’étaient pas réalistes. Toutefois, je ne suis pas certain que l’aménagement que vous proposez sera suffisant. J’aimerais aussi avoir une précision : vous évoquez un délai de « cinq ans ou six ans » : pouvez-vous préciser quel sera le délai pour les SCOT et pour les PLU ? On sait qu’il faut en moyenne trois à quatre ans pour réviser un SCOT et un PLU, qu’il soit communal ou intercommunal. Il faut articuler clairement la mise en cohérence des SCOT et celle des PLU.

Par ailleurs, vous introduisez une sanction en cas de non-respect des nouvelles règles. Elle me semble injuste pour les secteurs déjà urbanisés, où on travaille à réaménager les friches.

M. Martial Saddier. Environ 95 % du territoire français est couvert par des SCOT : on en compte 354, qui regroupent en moyenne 200 000 habitants. Ce projet de loi introduit un vrai bouleversement et quatre ou cinq ans ne seront pas de trop pour réviser tous nos SCOT et nos PLU, d’autant plus que les amendements que nous avons adoptés depuis hier soir ont introduit de nouvelles obligations, qui vont représenter un coût de plusieurs centaines de milliers d’euros – je pense notamment aux études préalables qui devront être réalisées.

Compte tenu du bouleversement qu’il impose, le Gouvernement reconnaît-il qu’il n’est pas nécessaire d’ajouter à cela une modification tous azimuts du périmètre des SCOT ? Je vous le demande, parce que certains préfets rêvent que leur département ne soit plus couvert que par un ou deux SCOT. Si, aux bouleversements que vous introduisez, s’ajoute une division par deux ou trois du nombre de SCOT, il sera absolument impossible de réaliser tout cela en quatre ou cinq ans.

M. Yannick Kerlogot. L’amendement CS1564 de M. Hervé Pellois, qui risque de tomber, nous a été soumis par l’Union nationale des aménageurs (UNAM) et il relaie la préoccupation de nombreux élus, qui s’inquiètent de ne pouvoir atteindre l’objectif ambitieux qui a été fixé dans un délai qui leur paraît très court.

Vous avez proposé un allongement des délais, mais j’aimerais avoir une précision sur la sanction prévue en cas de non-respect de ceux-ci. Si j’ai bien compris, l’entrée en vigueur d’un SCOT modifié devra se faire dans un délai de cinq ans, sous peine d’une suspension de toute possibilité d’ouverture à l’urbanisation. Les élus s’inquiètent du fait que cette suspension est sans limite de temps. Nous sommes tous favorables à une limitation de l’artificialisation des sols, mais faut-il aller jusqu’à une suspension définitive du droit à urbaniser ?

Mme Sandra Marsaud. Soyons un peu positifs et saluons cet effort pour prendre en compte ce qui a déjà été réalisé. Le rapporteur a été, comme nous, alerté par les acteurs de terrain. Certains collègues font comme si rien n’avait été fait depuis la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) de 2000. Certains territoires ont fait un travail remarquable au cours des dernières années et se sont montrés plus vertueux que d’autres. Il faut en tenir compte, et c’est ce que fait le rapporteur. Il a pris la mesure de cette question et peu importe, dans ces conditions, que nos amendements tombent, puisqu’ils sont satisfaits. Si nombre de documents d’urbanisme ont déjà modifié leur trajectoire dans le bon sens, c’est que les urbanistes et les bureaux d’étude, qui sont souvent critiqués, ont bien travaillé depuis vingt ans.

M. François-Michel Lambert. Il faut saluer le travail du rapporteur, mais la suspension des ouvertures à l’urbanisation est effectivement problématique. Il ne faudrait pas que cette disposition favorise la spéculation immobilière. Nous sommes sur la bonne voie, mais il faut encore travailler cette question.

M. Lionel Causse, rapporteur. J’ai tenu compte des auditions auxquelles nous avons procédé et des échanges que j’ai pu avoir avec nombre d’associations, mais aussi avec nombre d’entre vous. C’est d’ailleurs pourquoi je vous ai dit que mes amendements satisfaisaient la totalité de ceux qui ont été déposés sur ce sujet.

Nous avons allongé les délais et laissé la possibilité de procéder à des modifications simplifiées, qui sont moins lourdes que la révision. En contrepartie, il paraît normal de formuler des exigences de réussite et d’introduire des sanctions en cas de non-respect de celles-ci.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Pour répondre à la question de Mme Batho, la date de la promulgation de la loi constitue le point de départ de la période de dix ans.

Des délais maximaux sont prévus pour l’intégration des modifications du SRADDET dans les documents d’urbanisme. Dans l’amendement du rapporteur, ce délai est fixé à cinq ans pour le SCOT. Pour le PLU, il est prévu un délai de six ans par l’amendement CS5249 du rapporteur, qui sera examiné par la suite.

La question du périmètre du SCOT est en effet importante ; une réflexion sur l’accompagnement du processus de modification par les préfets est en cours, afin d’éviter un bouleversement des périmètres qui rendrait les choses beaucoup plus difficiles.

Les sanctions ne sont pas prévues pour l’éternité. S’il n’y a pas eu de modifications à l’expiration de ces délais de cinq ou six ans – période de transition sans sanction – aucune ouverture à l’urbanisation ne sera possible tant que les documents d’urbanisme n’auront pas été modifiés. C’est aux élus de décider du rythme de modification de ces documents, pour les mettre en cohérence.

Les délais initialement prévus par le Gouvernement étaient très volontaristes, puisque tout aurait dû être terminé en juillet 2024. Les amendements du rapporteur laissent davantage de temps.

M. Thibault Bazin. Des communes se sont parfois inscrites dans une démarche vertueuse en termes de consommation d’espace en procédant déjà à la révision de leurs documents d’urbanisme, ce qui leur a coûté plusieurs dizaines de milliers d’euros. On sait qu’il faut plusieurs années pour réviser un PLU. Vous allez donc les obliger à lancer à nouveau des démarches de modification avant 2026, c’est-à-dire avant la fin du mandat en cours, faute de quoi elles se retrouveraient dans une impasse urbanistique au début du prochain. Il faut prévoir des délais spécifiques pour ces communes.

M. François-Michel Lambert. Vous savez que le groupe Libertés et territoires considère que la place et le rôle de l’État ne doivent pas être trop prééminents dans les territoires. Mon intervention pourra donc paraître un peu décalée par rapport à nos positions habituelles.

Ne peut-on pas envisager le retour du rôle du préfet dans des communes qui organiseraient l’inflation des prix de l’immobilier et du foncier en bloquant toute modification des documents d’urbanisme, et donc toute urbanisation supplémentaire ? Connaissant bien ma Provence, et sans vouloir la dénigrer, j’ai quelques inquiétudes à son sujet.

La commission adopte l’amendement CS5247.

En conséquence, l’amendement CS883 tombe ainsi que tous les amendements se rapportant à l’alinéa 32.

 

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l’amendement CS126 de M. Dino Cinieri.

 

Amendements CS884 de M. Julien Aubert et CS5249 du rapporteur (discussion commune).

M. Julien Aubert. Cet amendement repose sur une philosophie consistant, comme dans la nature, à laisser les choses se faire au bon moment, et non pas à recourir à la coercition et à l’accélération du calendrier.

Il est, pour cela, proposé d’intégrer le fameux objectif de division par deux du rythme d’artificialisation nette des sols dans le PLU et la carte communale lors de l’évolution naturelle de ces documents, à savoir lors de leur prochaine révision. Une période de dix ans étant fixée par l’article 47, il est tout à fait possible d’atteindre l’objectif recherché avec cette méthode.

M. Lionel Causse, rapporteur. Mon amendement satisfait celui de M. Aubert. Comme cela a déjà été évoqué, il prévoit un délai de six ans pour l’entrée en vigueur du PLU intégrant, par le biais d’une modification simplifiée, les objectifs en matière d’artificialisation des sols.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée.  Sans surprise, s’agissant de la déclinaison au niveau du PLU de l’amendement précédent concernant les SCOT, je suis favorable à l’amendement du rapporteur et donc défavorable à la solution alternative de M. Aubert.

M. Thibault Bazin. C’est dommage, car l’amendement de M. Aubert est très pertinent.

Bien entendu, il faut intégrer ces objectifs ; la question est : dans quels délais et comment ?

Vous avez mis en avant le fait que les délais seront un peu rallongés et que l’intégration des objectifs en matière d’artificialisation des sols passera par une modification simplifiée et non par une révision. Mais vous savez parfaitement qu’un PLU fait l’objet de fréquentes modifications à la marge pour tenir compte de petits projets. Il ne faudrait pas qu’une de ces modifications soit utilisée pour imposer immédiatement l’intégration des objectifs, avec toute la lourdeur que cela comporte. Et ce d’autant plus que cela supposerait que les modifications en amont des documents de planification régionale et du SCOT aient bien eu lieu, ce qui ne sera pas forcément le cas.

M. Martial Saddier. Comme le texte est réécrit, je souhaiterais obtenir une confirmation du rapporteur et de la ministre : vous parlez bien d’un délai de cinq ans pour le SCOT et de six ans pour le PLU ?

Pour faire partie de ceux qui connaissent la manière dont cela fonctionne, j’estime qu’une fois qu’un SCOT aura été modifié conformément aux objectifs de ce projet de loi, il sera impossible d’achever dans un délai d’un an la modification de tous les PLU et plans locaux d’urbanisme intercommunaux relevant de son périmètre et qui en sont la déclinaison.

M. Thibault Bazin. Il a raison !

M. Lionel Causse, rapporteur. Monsieur Bazin, vous reconnaissez bien qu’il y a souvent des modifications du PLU. C’est en effet un document qui évolue en permanence, avec parfois plusieurs modifications par an. Lors d’une de ces modifications, les élus locaux auront la possibilité de le mettre à jour en y intégrant les objectifs en matière d’artificialisation des sols.

Le délai de modification du PLU à la suite de celle du SCOT sera d’un an si cette modification du SCOT a pris cinq ans. Mais nous espérons que la modification des SCOT ira plus vite.

En tout état de cause, en un an on peut réaliser plusieurs modifications de PLU.

M. Thibault Bazin. Vous marchez à la schlague. Nous organisons des concertations.

Mme Sandra Marsaud. Pourriez-vous nous éclairer sur le recours à la procédure de modification simplifiée ? Elle est très encadrée, sans enquête publique. Lorsque des communes qui n’ont pas été vertueuses en matière de consommation d’espace auront à réviser leurs documents d’urbanisme, elles devront procéder à une réduction des surfaces constructibles – ce que je trouve bien entendu souhaitable. Assurons-nous que le recours à la procédure de modification simplifiée est le bon instrument et qu’on ne fragilise pas juridiquement ces documents. Je m’excuse de poser cette question mais je la considère importante.

M. Thibault Bazin. Ne vous excusez pas, vous avez raison madame Marsaud.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Je vous confirme qu’il est bien prévu la possibilité d’utiliser la procédure de modification simplifiée, qui comprend une enquête publique électronique. Je suis disposée à étudier avec vous, d’ici à la séance publique, les tenants et les aboutissants du recours à cette procédure.

M. Thibault Bazin. Mme la ministre, le rapporteur réécrit tout le texte !

Successivement, la commission rejette l’amendement CS884 et adopte l’amendement CS5249.

En conséquence, tous les amendements se rapportant à l’alinéa 33 tombent.

 

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement CS127 de M. Dino Cinieri.

 

Amendement CS5250 du rapporteur.

M. Lionel Causse, rapporteur. L’amendement poursuit la déclinaison, en prévoyant que l’entrée en vigueur de la carte communale intégrant les objectifs en matière d’artificialisation des sols doit intervenir dans un délai de six ans.

M. Jean-Marie Sermier. Je souhaite revenir sur le recours à la procédure de modification simplifiée.

Celle-ci ayant lieu sans véritable enquête publique, les propriétaires ne disposent pas du même niveau d’information que lors d’une révision globale. Nous avons tous l’occasion de recevoir dans nos permanences électorales des propriétaires, parfois non-résidents, qui découvrent après-coup des changements de règles d’urbanisme qui ne sont pas anodins pour leur patrimoine.

Avec la démarche proposée par le projet de loi, une réduction significative des zones constructibles interviendra dans les communes dont le PLU ou la carte communale, jugés peu vertueux en termes de consommation d’espace, seront devenus incompatibles avec le SCOT modifié. Le faire dans le cadre d’une procédure simplifiée est un abus notoire vis-à-vis des propriétaires fonciers.

M. Martial Saddier. Le texte change le statut de la modification simplifiée. Auparavant, cette procédure ne devait pas affecter l’équilibre général du document d’urbanisme, et il était effectivement possible de la mettre en œuvre en six mois. Avec le dispositif que vous proposez sa portée est accrue, puisqu’elle pourra modifier l’équilibre général du document en rendant des terrains inconstructibles. Dans ce cas, cela ne pourra pas être fait en un an.

Je remercie la ministre d’avoir esquissé la possibilité d’une discussion d’ici à la séance, car il est absolument nécessaire de s’assurer du réalisme des délais entre la modification du SCOT et la mise en conformité du PLU.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, tous les amendements se rapportant à l’alinéa 34 tombent.

 

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement CS4417 de M. Alain Perea.

 

Amendements CS5251 du rapporteur, CS1767 de Mme Anne-Laurence Petel, CS738 de Mme Émilie Bonnivard, CS3518 et CS3515 de M. Alain Perea (discussion commune).

M. Lionel Causse, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Je voudrais apporter des précisions s’agissant de la procédure de modification simplifiée. Deux cas de figure sont possibles.

Dans le premier, un travail sur les documents d’urbanisme a été largement fait par des élus que l’on peut qualifier de vertueux, et la mise en cohérence de ceux-ci avec le schéma régional sera aisée ; la procédure de modification simplifiée pourra alors être utilisée.

Dans le deuxième cas, un tel travail n’a pas été effectué et il faudra donc bouleverser l’économie générale de ces documents. Personne ne dit qu’on peut le faire au travers d’une procédure de modification simplifiée : le droit commun s’applique.

Si je voulais être un peu provocatrice je dirais que, pour se ménager un délai supplémentaire pour la mise en conformité des PLU, il faudrait déposer en séance un amendement ramenant à quatre ans le délai maximal pour l’adaptation des SCOT.

Les délais retenus de cinq ans pour les SCOT et de six ans pour les PLU sont des délais maximaux. Là où le travail à réaliser est le plus grand du fait du retard pris, il faudra probablement préparer en parallèle les travaux d’adaptation des deux catégories de documents.

Telle est la philosophie retenue par le rapporteur s’agissant des délais.

Mme Véronique Riotton. Cet amendement propose de réduire les délais d’adaptation des documents d’urbanisme aux nouvelles dispositions prescrivant les objectifs de réduction d’artificialisation des sols, en fixant à douze mois le délai d’adaptation du SRADDET et au 31 décembre 2022 la date limite pour l’adaptation des documents communaux.

M. Martial Saddier. Je remercie la ministre pour la précision de sa réponse sur le champ d’application de la procédure de modification simplifiée. C’est un point très important, car des gens suivent nos débats et notamment des élus.

Vous savez comme moi qu’il s’écoule nécessairement plus d’une année entre la délibération lançant une procédure de révision et la délibération finale adoptant le PLU ou le PLUi modifié. Il y a donc un problème à régler d’ici à la séance s’agissant de l’écart d’un an entre les délais maximaux d’adaptation du SCOT et du PLU.

Par-delà nos différences d’opinion, il faut veiller à ce que le dispositif retenu fonctionne.

M. Lionel Causse, rapporteur. Avis défavorable à tous ces amendements.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Avis favorable à l’amendement du rapporteur.

M. Julien Aubert. Les maires n’ont pas pour seule tâche d’attendre l’arme au pied que le législateur ait bien voulu modifier les règles en matière d’urbanisme. De nombreuses communes ont déjà beaucoup de mal à répondre à toutes les obligations, qu’elles portent sur la mise en œuvre de la loi SRU ou sur l’établissement de plans de prévention des risques naturels.

Réduire les délais d’adaptation des documents d’urbanisme représente un coût administratif, mais c’est aussi prendre le risque de ne pas pouvoir résoudre une équation devenue insoluble. Les maires auxquels j’ai parlé de ce que propose le projet de loi m’ont dit en avoir ras la casquette qu’on change les règles et qu’on alourdisse leurs charges. On ne les aide pas.

La commission adopte l’amendement CS5251.

En conséquence, les amendements CS1767, CS738, CS 3518 et CS3515 tombent.

 

Amendements identiques CS1478 de M. Thibault Bazin, CS1564 de M. Hervé Pellois, CS2615 de M. Charles de Courson et CS2938 de M. Mohamed Laqhila.

M. Thibault Bazin. Dans le monde idéal que vous décrivez, on révise les SCOT – certains étaient déjà en cours d’adaptation et c’est très bien, d’autres viennent d’être adoptés et c’est un peu moins bien. Ensuite, les PLU ou PLUi doivent être mis en conformité, par le biais de la procédure de modification simplifiée s’il n’y a quasiment rien à changer dans ces documents.

En réalité, même si une commune a été vertueuse en limitant la consommation d’espace, justifier que la capacité de construire ou d’aménager est déjà mobilisée dans les espaces urbanisés afin d’obtenir l’ouverture à l’urbanisation ne constitue pas une modification simplifiée – il ne faut pas être hypocrite. C’est une démarche beaucoup plus lourde que par le passé et qui va prendre du temps.

Madame la ministre, avez-vous prévu des financements pour aider ces communes à financer les études nécessaires, alors qu’elles viennent d’en payer à l’occasion de l’actualisation récente de leurs documents d’urbanisme ?

M. Lionel Causse, rapporteur. Avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Avis défavorable, car ces amendements suppriment la disposition prévoyant qu’il n’est pas possible d’obtenir l’ouverture à l’urbanisation tant que les documents d’urbanisme n’ont pas été modifiés. Ils ne correspondent donc pas à la démarche retenue par le projet de loi.

Joël Giraud a récemment annoncé que les services fournis par l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), et donc l’ingénierie, seront gratuits pour toutes les communes de moins de 3 500 habitants et pour les EPCI de moins de 15 000. C’est une première marche et on pourra en franchir d’autres.

La commission rejette les amendements.

 

Amendement CS4549 de Mme Mathilde Panot.

M. Loïc Prud’homme. En complément de nos autres amendements contre l’artificialisation des sols, cet amendement vise à respecter la proposition SL3.1 de la Convention citoyenne pour le climat (CCC). Celle-ci demande de rendre les PLUi et PLU conformes aux SCOT.

L’article 49 ne prévoit qu’un simple lien de compatibilité avec le SCOT, ce qui est beaucoup moins contraignant.

M. Lionel Causse, rapporteur. La notion de compatibilité exige que les dispositions d’un document ne fassent pas obstacle à l’application d’un document de rang supérieur.  Celle de « prise en compte » implique qu’il est possible d’inscrire dans un document une disposition qui serait contraire à une disposition figurant dans un document supérieur, mais que cette contradiction doit être dûment motivé.

Le Conseil d’État a précisé les modalités de compatibilité du PLU avec le SCOT et l’étendue des modalités de son contrôle. Il est acquis depuis longtemps qu’un document est compatible avec un document de portée supérieure lorsqu’il n’est pas contraire aux orientations ou principes fondamentaux de ce dernier et qu’il contribue, même partiellement, à sa réalisation. Si le SCOT érige une obligation de réduction par deux de l’artificialisation des sols, le PLU doit contribuer à la réalisation de cet objectif. Il est donc légitime de prévoir une sanction si le PLU évite délibérément de mettre en œuvre cette disposition.

À mon sens, cette notion de compatibilité est un instrument parfait pour contraindre dans une certaine direction, sans forcément gommer les différences. Tout en imposant un objectif commun, elle permet de s’ajuster en fonction des situations locales. Quand elle est assortie d’une sanction, comme dans cet article, elle est très efficace. Je suis donc défavorable au remplacement de la compatibilité par la conformité.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Ce point a été étudié très tôt lors des discussions entre les membres de la CCC et le Gouvernement. Nos analyses juridiques l’établissent de manière certaine : conformément au principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales, il n’est pas possible de prévoir un lien de conformité entre un document d’une collectivité et celui d’une autre de rang inférieur. C’est la raison pour laquelle nous avons opté pour la compatibilité.

M. Jean-Marie Sermier. L’établissement de documents compatibles nécessitera une forte ingénierie.

On ne peut pas laisser croire aux maires que l’ANCT règlera ce problème. Ce n’est pas vrai. Elle n’est pas prévue pour cela, et elle n’en a ni la compétence ni les moyens en personnel. En revanche, on va faire la part belle aux cabinets d’urbanisme.

Mme Sandra Marsaud. Ces débats autour de la conformité ou de la compatibilité reviennent souvent. C’est trop facile. Qui vote les SCOT ? Ce sont bien des élus, qui ont par la suite la responsabilité d’appliquer des PLU ou des cartes communales dans les collectivités de rang inférieur. Ils sont cohérents et ne vont pas se tirer une balle dans le pied.

M. Hubert Wulfranc. L’objectif de réduction de l’artificialisation est un véritable bouleversement sur le terrain. Les élus locaux vont devoir faire face à un travail d’arbitrage et d’expertise considérable : j’entends tout à fait leurs observations à propos des délais et de la nécessité d’arbitrages démocratiques sur les choix politiques territoriaux. Ils sont donc très attentifs aux conditions dans lesquelles cette révolution en matière d’aménagement du territoire va être conduite.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements identiques CS2432 de M. Thibault Bazin, CS2454 de M. Maxime Minot et CS2787 de Mme Véronique Louwagie.

M. Thibault Bazin. Je lance un cri d’alerte au nom des territoires, et notamment des communes à faibles revenus, qui ont d’ores et déjà fait de lourdes dépenses pour mettre à jour leurs documents d’urbanisme par rapport au SCOT.

Des élections municipales auront lieu en juin 2026, horizon que vous donnez pour sa révision. Imaginons qu’un autre covid impose de les reporter de quelques mois. Il faudrait alors prévoir un certain délai : tel est le sens de l’amendement, qui amène à 2027.

M. Lionel Causse, rapporteur. Vous proposez de limiter dans le temps l’application de la sanction, ce qui permettrait de ne jamais mettre à jour les documents ni atteindre les objectifs. Avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Je suis également défavorable aux amendements.

Je reviens sur le financement et sur l’accompagnement des collectivités. Les prestations d’ingénierie financées par l’ANCT seront désormais gratuites, comme Joël Giraud vient de l’annoncer, pour les communes de moins de 3 500 habitants et pour les intercommunalités de moins de 15 000 habitants. La dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) peut également être mobilisée, tout comme les conseils d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE) qui couvrent la majeure partie des territoires et dont 98 % des prestations sont gratuites.

La base de données PLU indique que le coût moyen de révision d’un PLU est de l’ordre de 30 000 euros pour une commune de moins 10 000 habitants, et de l’ordre de 50 000 euros pour des communes de taille moyenne, tout cela se mutualisant en cas de PLU intercommunal. Pour les communes petites ou moyennes, ces frais peuvent donc être financés par des aides de l’État.

M. Thibault Bazin. J’imagine que les règlements de DETR prévoiront des interventions au bénéfice des communes qui ne seront pas prises en compte par l’ANCT.

Pourquoi obliger des communes qui n’ont pas de projet, donc pas d’artificialisation, à des dépenses d’études inutiles ?

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. La seule sanction étant l’impossibilité d’ouvrir de nouvelles zones à l’urbanisation, si ces communes n’en ont pas l’intention, elles peuvent attendre tranquillement la révision naturelle.

M. Dominique Potier. La question des coûts constitue tout d’abord un encouragement à ce que se montent sur les territoires métropolitains des agences d’urbanisme à la hauteur des enjeux. Par ailleurs, le bénéfice des SCOT ou des PLUi va bien au-delà de simples instruments de planification et amène bien d’autres économies. L’ingénierie est donc un investissement public dans l’intelligence du territoire, la bonne planification créant de la programmation coopérative et innovante.

La commission rejette les amendements.

 

Amendement CS5252 du rapporteur.

M. Lionel Causse, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination consistant à remplacer l’échéance de 2025 pour l’application de la sanction par un délai de six ans accordé au PLU et à la carte communale pour intégrer les objectifs.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendements CS4211 et CS4212, de Mme Sandra Marsaud, et sous-amendement CS5426 du rapporteur (discussion commune).

Mme Sandra Marsaud. Toujours pour prendre en compte ceux qui ont déjà une trajectoire de lutte contre l’artificialisation ou l’imperméabilisation des sols et qui l’ont déjà appliquée, en pourcentage de réduction et dans le temps, dans des documents approuvés, qu’il s’agisse de SCOT ou de PLU, je propose d’exclure de cette révision pour les dix ans ces documents d’urbanisme.

L’amendement CS4211 fixe des objectifs chiffrés et datés, travaillés avec la Fédération nationale des SCOT, selon laquelle plus 50 % des SCOT appliquent déjà ces réductions de consommation d’espace. L’amendement CS4212 est de repli. En tout cas, il se passe des choses dans les territoires.

M. Lionel Causse, rapporteur. Je ne suis pas favorable à l’amendement CS4211, considérant que les 30 % mentionnés ne correspondent pas à l’objectif de 50 % que nous nous sommes fixé.

Il faut des documents conformes à ceux de niveau supérieur. C’est la raison pour laquelle je suis favorable à l’amendement CS4212, que j’ai sous-amendé pour tenir compte du délai de dix ans.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Même avis. L’amendement ainsi sous-amendé répondrait à la préoccupation de Mme Marsaud d’équilibre de la loi.

Mme Delphine Batho. J’entends la logique visant à prendre en compte les collectivités ayant déjà fait énormément d’efforts en matière de lutte contre l’artificialisation des sols. En revanche, je crois comprendre qu’il suffirait d’inscrire dans un document d’urbanisme un objectif chiffré, par exemple 5 %, de moindre consommation d’espaces pour être dédouané de toute action pour les dix prochaines années. Sait-on combien de territoires cette disposition va concerner ?  Si elle crée une dérogation pour la plupart des SCOT, des PLU et des cartes communales, cela va poser un problème.

M. Lionel Causse, rapporteur. L’objet de l’amendement de notre collègue est que ceux qui sont déjà vertueux ne se trouvent pas dans l’obligation de réviser leurs documents. Quant à savoir combien ils sont, c’est une question à laquelle on ne peut pas répondre.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Est ici visé le cas particulier, je l’espère exceptionnel, d’une région n’ayant pas mis à jour son SRADDET, c’est-à-dire où la territorialisation à l’échelle régionale ne s’est pas faite. Si des SCOT ont fixé des objectifs chiffrés, ils peuvent alors s’y tenir pendant les dix années suivantes. L’expérience montre qu’en général, les objectifs chiffrés dans les SCOT sont ambitieux : 58 % d’entre eux ont des objectifs de réduction de la consommation de foncier supérieurs à 50 %, et 74 % des objectifs supérieurs à 35 %.

M. Julien Aubert. Je réagis aux chiffres du Gouvernement, à savoir 30 000 euros pour une révision dans des villes de moins de 10 000 habitants, qui sont très nombreuses : le coût n’est pas anodin.

Je ne comprends pas votre préférence pour l’amendement CS4212, beaucoup plus large, car avec ses 30 % de réduction de consommation d’espace, le CS4211 traduit une forme d’ambition. S’agissant des dix ou des quinze ans, il faut prévoir de la flexibilité, l’enjeu étant que la transition se fasse de la manière la plus douce possible.

M. Lionel Causse, rapporteur. Assorti du délai de dix ans que je considère important, le CS4212 est nettement plus adapté aux objectifs que l’on se fixe.

Mme Delphine Batho. La simple mention d’objectifs chiffrés et datés me semble insuffisante ; il faut préciser en donnant une référence.

M. Dominique Potier. Certains SCOT ont été baptisés « SCOT Grenelle », car ils allaient plus loin que les autres. Cette appellation va-t-elle survivre à la loi ?

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. C’est une bonne question, à laquelle je vous répondrai en séance.

La commission rejette l’amendement CS4211.

Elle adopte successivement le sous-amendement et l’amendement CS4212 sousamendé.

 

La commission adopte l’amendement de coordination CS5240 du rapporteur.

 

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette l’amendement CS3521 de M. Alain Perea.

 

Amendement CS3574 de M. Alain Perea.

M. Lionel Causse, rapporteur. Avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Je m’en remets, s’agissant de cet amendement qui porte sur l’adaptation des outils fiscaux, à la sagesse de la commission.

La commission adopte l’amendement.

 

Elle adopte l’article 49 modifié.

 

Après l’article 49 

 

Amendement CS4198 de Mme Sandra Marsaud.

Mme Sandra Marsaud. J’aborde, à travers quelques amendements, la politique locale de l’habitat, complètement liée à la lutte contre étalement urbain : comment accompagner et responsabiliser ? Il s’agit d’encourager très fortement la mise en place des programmes locaux de l’habitat (PLH) afin de donner aux collectivités des outils permettant d’atteindre leurs objectifs en matière de sobriété foncière. Faute de tels documents, les territoires ruraux notamment n’ont pas une vision assez large des besoins en logements et la gouvernance locale est inexistante.

Ce premier amendement tend à offrir la possibilité aux collectivités de moins de 30 000 habitants de bâtir des PLH, ce qui ne constitue aujourd’hui pas une obligation.

M. Lionel Causse, rapporteur. Je partage votre objectif de définir des stratégies territoriales en matière d’habitat à travers des PLH, toutefois je vous demande de retirer l’amendement au profit des CS4196 et CS4197, plus adaptés à la situation.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Je vais suivre le rapporteur dans sa grande sagesse.

L’amendement est retiré.

 

Article 49 bis (nouveau) (Article L. 302-1 du code de la construction et de l’habitation, articles L. 132-6, L. 321-1 et. L. 324-1 du code de l’urbanisme, article L. 5219-1 du code général des collectivités territoriales, article 16 de la loi n° 89-642 du 6 juillet 1989) : Création obligatoire d’observatoires de l’habitat et du foncier dans les intercommunalités dotées d’un programme local de l’habitat

 

Amendements CS5351 du rapporteur et CS4207 de Mme Sandra Marsaud (discussion commune).

M. Lionel Causse, rapporteur. Il s’agit de renforcer les dispositions existantes en matière d’observation foncière. L’action vigoureuse de réduction de l’artificialisation des sols exige des outils de connaissance foncière à la hauteur des objectifs ambitieux que nous nous fixons.

Je propose de capitaliser sur les dispositifs d’observation foncière existants là où existe un PLH afin de créer des observatoires de l’habitat et du foncier, qui doivent notamment permettre l’identification des gisements fonciers pouvant faire l’objet d’une identification urbaine – projets de renouvellement urbain, de surélévation, opérations de démolition-reconstruction, utilisation des dents creuses en secteur déjà urbanisé. Ces observatoires auraient pour mission le recensement des friches constructibles, des surfaces réalisables en surélévation des constructions existantes et des espaces de densification potentielle et de nature en ville, des surfaces non imperméabilisées ainsi que des trames verte et bleue. Ils seraient mis en place dans un délai de deux ans après que le PLH ait été rendu exécutoire.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Avis très favorable. Nous avons effectivement besoin de renforcer le dispositif d’observation pour déterminer comment élaborer tous les documents dont nous parlons.

Mme Sandra Marsaud. L’amendement CS4207 regroupe tous les amendements suivants, de repli. Il tend à modifier l’article L. 302‑1 code de la construction et de l’habitation pour faire des PLH des plans opérationnels au service du projet de territoire, car on sait que l’habitat est très consommateur d’espace en matière d’artificialisation des sols.

Je propose notamment une déclinaison départementale de la commission régionale « Habitat et hébergement », grand-messe devant laquelle sont présentés les PLH, ce qui rejoint vraisemblablement l’amendement du rapporteur.

M. Lionel Causse, rapporteur. Je suis défavorable à l’amendement CS4207 et lui préfère le CS4196..

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée.  Même avis.

M. Martial Saddier. L’amendement du rapporteur oblige à la création d’un observatoire dans les deux ans à compter de la promulgation de la loi. À quel niveau de collectivité territoriale sera-t-il rattaché ? Peut-on envisager un observatoire départemental ? Les grandes agglomérations disposent aujourd’hui de ce type d’observatoires : seront-ils considérés comme valables ?

M. Julien Aubert. Il s’agit d’un sujet juridique. Vous faites référence au III de l’article L. 302‑1 au code de la construction et de l’habitation. Or il ne porte pas sur des observatoires mais sur un diagnostic sur le fonctionnement des marchés, ce qui pose un problème légistique. Comment passez-vous de l’un aux autres ?

En outre, une telle création signifie-t-elle des fonctionnaires, des structures, des coûts fixes ? Doit également être traitée la question du bon niveau.

M. Lionel Causse, rapporteur. Le niveau du PLH est celui de l’intercommunalité. Pourquoi pas un observatoire départemental ? Il faudra y travailler.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Ces dispositions sont issues du travail du rapporteur mais également de celui de Jean-Luc Lagleize dans le cadre de sa mission sur la maîtrise du coût du foncier dans les opérations de construction.

Les dispositifs d’observation prévus au III de l’article L. 302‑1 du code de la construction et de l’habitation ont nécessité la mise en place de structures qui constituent de facto des observatoires. L’idée est de transformer des structures disparates en clarifiant leurs objectifs et en précisant leurs méthodes de travail. Il s’agit donc plutôt d’une mise en cohérence de structures existantes que de création ex nihilo. Nous pourrons préciser ce point d’ici à la séance.

L’amendement CS4207 est retiré.

La commission adopte l’amendement CS5351.

 

Article 49 ter (nouveau) (Article L. 302-1 du code de la construction et de l’habitation) : Renforcement de l’effectivité des programmes locaux de l’habitat

Amendements CS4196 et CS 4197 de Mme Sandra Marsaud.

 

Mme Sandra Marsaud. Il s’agit d’encourager fortement la mise en place de programmes locaux d’habitat afin de donner des outils aux collectivités en vue d’atteindre des objectifs ambitieux en matière de sobriété foncière.

M. Lionel Causse, rapporteur. Avis favorable à l’amendement CS4196 et à l’amendement CS4197, puisqu’il s’agit d’une coordination avec l’amendement CS4196.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Avis favorable.

 

 

Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte les amendements.

 

 

Après l’article 49

 

Amendement CS4199 de Mme Sandra Marsaud.

Mme Sandra Marsaud. Le PLH n’est pas qu’un outil de programmation de logements neufs ; il doit être mis au service d’un projet de territoire, afin notamment de reconquérir les centres-villes. L’amendement CS4199 tend à le rappeler à l’article L. 302-1.

M. Lionel Causse, rapporteur. Je suis défavorable à l’amendement CS4199.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Je ne suis pas favorable à cet amendement, il me semble que la mention « […] au service du projet de territoire » est contenue dans l’idée même de PLH et de document programmatique, et qu’il est de surcroît dommage de perdre la notion de performance énergétique de l’habitat.

L’amendement CS4199 est retiré.

 

Après l’article 49

 

Amendements CS4200 et CS4202 de Mme Sandra Marsaud.

 

Mme Sandra Marsaud. J’insisterai sur l’amendement CS4202, qui pourrait répondre aux questions de M. Aubert et ses collègues. Au-dessus des PLH, les plans départementaux de l’habitat (PDH) sont importants pour les territoires ruraux. Ils sont obligatoires sur tout le territoire national mais ne le couvrent pas encore en totalité. Sans modifier le code de la construction et de l’habitation, l’amendement vise à fixer une date à laquelle chaque territoire devra avoir son PDH. Je trouve que les PDH constituent de bons lieux de gouvernance et d’échanges sur les questions d’habitat et de foncier.

M. Lionel Causse, rapporteur. Je suis défavorable aux amendements CS4200 et CS4202, puisque l’obligation relative aux PDH figure déjà dans la loi.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Je suis défavorable aux amendements CS4200, qui crée une convention supplémentaire, et CS4202, qui fixe une échéance difficile à tenir.

M. Julien Aubert. Ce dernier amendement renvoie au débat que nous avons eu sur les observatoires. La réponse relative à leurs moyens a été un peu gazeuse : pouvez-vous nous expliquer ce qu’il en est avant la séance ?

L’amendement CS4200 est retiré.

La commission rejette l’amendements CS4202.

 

 

Article 49 quater (nouveau) (Article L. 1111-9 du code général des collectivités territoriales) : Inclusion des présidents des syndicats mixtes pilotant les SCOT dans la conférence territoriale de l’action publique

 

Amendements CS4185, CS4190 et CS4188 Mme Sandra Marsaud (discussion commune).

Mme Sandra Marsaud. Cette série d’amendements revient sur les SRADDET avec un objectif de territorialisation de la stratégie à l’échelon infrarégional. Ils proposent d’appuyer celle-ci sur un organe existant qui ne fonctionne pas bien, la CTAP, en créant, d’une part, une commission dédiée au foncier et, d’autre part, une déclinaison de celle-ci, organisée par la région, à l’échelon départemental.

L’amendement CS4185 est celui qui reprend l’ensemble de mes idées ; les autres sont des amendements de repli.

L’amendement CS4188 modifie la composition de la CTAP en ajoutant les présidents des syndicats mixtes ou des EPCI pilotant les SCOT. J’ai également réfléchi à la société civile, qu’il s’agisse du monde économique ou des associations citoyennes.

M. Lionel Causse, rapporteur. Je comprends votre volonté de faire évoluer les CTAP. Toutefois, la création d’une commission thématique traitant du foncier est déjà rendue possible à l’échelon régional par le code général des collectivités territoriales (CGCT) et en vertu de la libre administration des collectivités. Il faut laisser la main aux régions et non pas l’imposer dans la loi, quitte à leur présenter directement ces bonnes idées. Avis défavorable sur cette série d’amendements.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. L’amendement CS4185 me paraît trop restrictif et prescriptif pour les régions. Je n’y suis pas favorable.

À l’amendement CS4190, la désignation de représentants des conseils de développement me paraît excessive. En revanche, je m’en remets à votre sagesse pour l’amendement CS4188, qui ajoute à la conférence territoriale de l’action publique les présidents des syndicats mixtes qui pilotent les SCOT.

M. Julien Aubert. Je salue l’intelligence des amendements qui nous sont proposés, car ils permettent de contourner le problème de la hiérarchie des collectivités locales que vous souhaitez mettre en place. Une région qui, pour des raisons politiques, élaborerait un SRADDET dans le but d’embarrasser certains territoires pourrait le faire si l’on ne prévoit pas de déclinaison territoriale. Il faut absolument appliquer le principe de subsidiarité.

Je n’ai pas eu de réponse du Gouvernement sur la question des observatoires. Il serait plus simple d’en créer un par département, soit une centaine, plutôt qu’un par EPCI, soit 1 250 observatoires. Pouvez-vous nous dire en quoi cela consistera ? S’agit-il juste d’un nom, ou est-ce une structure dotée d’un directeur, de quelques agents et d’un siège ? On ne peut pas, au détour d’un amendement, créer 1 250 structures en considérant que c’est anodin. Cela engendre des coûts substantiels.

Mme Sandra Marsaud. Ce que je propose est déjà possible. On sait tous que les lois sont souvent bavardes ou pas appliquées. La CTAP a été très critiquée lors des auditions. Elle ne fonctionne pas parce qu’elle n’est pas suffisamment fléchée.

Nous avons une responsabilité nationale avec ce texte, mais nous exerçons aussi une responsabilité territoriale – ce n’est pas un gros mot. Nous devons responsabiliser davantage les régions en leur fixant un cap, sans remettre en cause la libre administration des collectivités locales.

La commission rejette successivement les amendements CS4185 et CS4190 et adopte l’amendement CS4188.

 

Après l’article 49

 

Amendements CS4187, CS4189 et CS4186 de Mme Sandra Marsaud (discussion commune).

Mme Sandra Marsaud. Je les ai déjà défendus. De la même façon qu’il y avait un débat sur la possibilité de confier la politique en faveur de la culture au sein de cette CTAP qui ne fonctionne pas, je propose de lui confier le foncier.

M. Lionel Causse, rapporteur. Demande de retrait, sinon avis défavorable aux trois amendements.

M. Thibault Bazin. Je suis très inquiet des conséquences qu’auront les amendements que nous votons au niveau local. Certains PLH sont indispensables parce qu’ils reposent sur des délégations des aides à la pierre, d’autres ont été élaborés par des communautés de communes de manière très volontaire, alors qu’elles n’y étaient pas contraintes. Vous ajoutez de nouvelles contraintes non négligeables au regard des coûts, impositions et procédures, alors qu’il n’y a pas forcément d’enjeu en termes de volume. Je vous invite à examiner si, en étant généralisé, ce dispositif est bien proportionné ; cela m’inquiète très fortement. Sinon, le Sénat corrigera.

M. Thierry Benoit. Je reconnais à Mme Marsaud sa haute technicité dans ce domaine. Toutefois, nous devons être au quotidien des acteurs de la simplification. J’aimerais pouvoir voter ce projet de loi Climat et résilience mais je suis préoccupé par les conséquences des amendements que nous avons adoptés, dont la grande complexité ne sera pas simple à expliquer aux élus locaux quand nous retournerons dans nos circonscriptions. Je compte sur vous, monsieur le rapporteur et madame la ministre, pour œuvrer, d’ici à la séance, à la simplification de la vie de nos collègues élus dans les territoires.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements CS4206, CS4195 et CS4194 de Mme Sandra Marsaud (discussion commune).

Mme Sandra Marsaud. Les politiques de l’habitat apparaissent dans le CGCT et dans le code de la construction et de l’habitation sous deux appellations différentes : d’un côté, on parle de politique du logement, de l’autre, de politique de l’habitat. Pour ma part, je ne propose pas de nouveau « machin », mais de simplifier. Or faire simple, c’est compliqué. Quand les enjeux sont aussi importants et que quarante ans de décentralisation ont créé un véritable millefeuille, on se doit d’être un peu complexe pour forcer la gouvernance locale à fonctionner.

En tout cas, la différence entre le CGCT et le code de la construction n’est pas normale parce qu’elle gêne les élus localement. Depuis que je suis élue, je me bats avec les préfets successifs de mon département pour leur faire faire un PDH. Eh bien, on n’en fait pas ! Je retire mes amendements.

Les amendements sont retirés.

 

Amendements identiques CS821 de M. Julien Dive, CS853 de M. Antoine Herth, CS2815 de Mme Florence Lasserre et CS3428 de M. Dominique Potier.

M. Dominique Potier. La mobilisation des commissions départementales de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) peut constituer une voie complémentaire pour réduire l’artificialisation des sols. Nous proposons qu’elles soient systématiquement saisies pour les projets d’artificialisation des sols naturels ou agricoles, et que leur avis devienne prescriptif et non plus seulement consultatif. C’est une voie que nous voulions explorer avec Laurence Petel, dans notre rapport sur la protection des sols.

M. Lionel Causse, rapporteur. Vous souhaitez élargir les compétences de la CDPENAF alors que nous venons de parler de simplification. Il faut être logique ! La CDPENAF peut déjà émettre des avis dans certaines situations ; il n’est pas nécessaire d’en faire une obligation pour tous les projets. Avis défavorable.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Étendre autant les compétences de la CDPENAF est une décision lourde. Ce sujet avait fait l’objet de longs débats lors de l’examen de la loi d’avenir pour l’agriculture en 2014. Il n’est pas suffisamment mûr pour que l’on opère une extension aussi massive dans ce texte. Avis défavorable.

M. Dominique Potier. Quand elle est saisie, la question de la nature de son avis, consultatif ou prescriptif, peut vraiment se poser. Peut-être faudrait-il mieux définir sa complémentarité, car nous sommes actuellement dans une zone intermédiaire, flottante. Le rôle de cette institution mérite d’être clarifié compte tenu des modifications que nous avons adoptées, notamment sur la hiérarchie entre les régions, les SCOT et les EPCI.

La commission rejette les amendements.

 

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement CS3291 de M. Pierre Venteau.

 

Amendements CS4773 de M. Jean-Baptiste Moreau et amendements identiques CS820 de M. Julien Dive, CS852 de M. Antoine Herth et CS2814 de Mme Florence Lasserre (discussion commune).

M. Julien Dive. Dans l’optique de préserver les terres agricoles, qui sont cruciales du point de vue tant de la protection de l’environnement que de notre souveraineté agricole et alimentaire, la loi d’avenir pour l’agriculture de 2014, renforcée par décret en 2016, a instauré la compensation collective agricole, dont le but est de limiter la perte des surfaces arables en demandant une contrepartie par la recréation de valeur à un porteur de projet lorsqu’il demande un permis de construire, par exemple. La compensation n’est pas contraignante ; dans les faits, certains s’en affranchissent sans difficulté et sans être inquiétés.

L’amendement CS820 vise à conditionner la délivrance d’un permis de construire à un porteur de projet d’urbanisme à la réalisation d’une étude préalable et à une compensation effective.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement CS2747 de M. Thibault Bazin. 

M. Thibault Bazin. Cet amendement a pour objet la contractualisation dans le cadre d’un contrat de sobriété foncière, sur le modèle des opérations de revitalisation du territoire (ORT). Cela permettrait de donner une priorité d’accès aux fonds, notamment le fonds friches, ou à des mesures de défiscalisation, parce qu’il sera compliqué pour les territoires d’atteindre les objectifs fixés dans cette loi si on ne leur en donne pas les moyens. Nous formons donc des vœux en vue du projet de loi de finances.

M. Lionel Causse, rapporteur. J’entends votre souhait de recourir à la contractualisation pour atteindre les objectifs de sobriété foncière. Comme je vous l’ai indiqué hier, je vais donner un avis favorable à l’amendement qui sera défendu par notre collègue Guillaume Gouffier-Cha. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement au profit de celui-ci.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Permettre la signature de contrats de sobriété foncière entre l’État et les collectivités territoriales est une bonne idée, mais il se trouve que l’amendement CS3450 de M. Gouffier-Cha fait explicitement référence à la lutte contre l’artificialisation des sols, qui me semble être le sujet de ce chapitre. C’est la raison pour laquelle je vous propose de retirer votre amendement au profit du CS3450 ; à défaut, avis défavorable.

M. Thibault Bazin. C’est la méthode du nouveau monde : quand les amendements viennent de l’opposition, ils ont du mal à passer, sauf s’ils sont rédactionnels ! J’aurais préféré que vous sous-amendiez mon amendement pour l’améliorer, monsieur le rapporteur ; c’eût été courtois. Le mien s’inscrit dans le code de l’urbanisme, tandis que le sien se contente d’ajouter une mention. Je vais donc maintenir mon amendement parce que je ne suis pas sûr que celui de M. Gouffier-Cha passe !

La commission rejette l’amendement.

 

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement CS99 de M. Dino Cinieri.

 

Amendements CS1645 et CS1644 de M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Dans un ouvrage de l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) publié en 2008, Les nouvelles ruralités à l’horizon 2030, plusieurs scénarios sont envisagés, dont l’un, que j’avais rejeté a priori, s’intitule « Les campagnes au service de la densification urbaine ». J’ai l’impression de le vivre, car il décrit ce qui est en train de se passer aujourd’hui : « […] l’augmentation du coût de l’énergie fossile a […] produit une concentration de la population et des activités dans les villes. Cela a donné naissance à de grands ensembles métropolitains régionaux […]. La mise en œuvre des politiques s’effectue à l’échelle métropolitaine mais dans le cadre de politiques publiques concernant de grandes régions européennes. […] Cependant de fortes tensions sociales subsistent car les populations rurales sont de plus en plus marginalisées sur le plan économique et social ; le fossé entre ruraux et urbains se creuse, tandis que les difficultés de logement et de déplacement dans les métropoles aggravent la situation des populations défavorisées, accroissant les inégalités et les tensions sociales. » Cette parabole « à la Potier » permet de comprendre le sens de mon amendement.

Quant à l’amendement CS1644, il vise à autoriser des exceptions, notamment pour procéder à un changement de destination dans une zone qui a été définie comme non constructible, ou pour des équipements collectifs : il faut desserrer l’étau si l’on souhaite éviter le scénario décrit en 2008.

M. Lionel Causse, rapporteur. Selon l’article 49 que nous avons voté, les documents supra communaux, notamment les SRADDET et les SCOT, devront tenir compte des contraintes locales et de l’historique de la consommation d’espaces des territoires pour fixer des objectifs cohérents aux communes et aux intercommunalités. Cela devrait répondre à certaines de vos inquiétudes. Demande de retrait de ces deux amendements ou, à défaut, avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Article 49 quinquies (nouveau) : Création des contrats de sobriété foncière

Amendement CS3450 de M. Guillaume Gouffier-Cha et sous-amendement CS5414 du rapporteur.

M. Guillaume Gouffier-Cha. Pour viser une politique de sobriété foncière efficace, les documents d’urbanisme sont nécessaires mais pas suffisants. Avec cet amendement, rédigé après des échanges avec la Fédération nationale des agences d’urbanismes (FNAU), je vous propose de créer un contrat de sobriété foncière permettant de conjuguer planification et action opérationnelle, approche quantitative et qualitative, coercitive et incitative.

M. Lionel Causse, rapporteur. Si je comprends tout à fait l’objectif de la contractualisation, celle-ci ne doit pas remplacer le dispositif que nous avons prévu pour intégrer les objectifs aux documents d’urbanisme. C’est pourquoi je vous propose ce sous‑amendement précisant que cette contractualisation ne pourra se substituer à l’intégration des objectifs déterminés par la loi. Avis favorable à l’amendement de CS3450 sous réserve de sa modification par mon sous-amendement CS5414.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Avis favorable à l’amendement sous-amendé. La contractualisation est une bonne manière d’articuler la volonté des collectivités locales avec la capacité de l’État à les accompagner à l’aide de différents outils : le fonds friches, les agences comme l’ANCT ou le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CEREMA), ainsi que divers outils de contractualisation comme les projets partenariaux d’aménagement. Les contrats de sobriété foncière sont le cadre naturel dans lequel ce partenariat peut s’exercer. Je suis favorable à la précision que cela ne se substitue pas à l’intégration des objectifs dans la trajectoire, et je trouve important que l’objectif de lutte contre l’artificialisation soit bien à la base de ces contrats. Avis favorable.

M. Thibault Bazin. C’est le jeu des sept erreurs ! Je me demande pourquoi on a refusé mon amendement : c’est le même ! De plus, le mien définit le contrat de sobriété foncière ; il précise que la convention devra fixer sa durée, son calendrier ; il détaille les actions qui pourront être menées, comme la mise en place d’un système d’observation foncière ou la réalisation d’un programme d’études. Ce n’est pas fair-play, madame la ministre ! Où est la co-construction, quand les bonnes idées, plus complètes, viennent de l’opposition ?

M. Lionel Causse, rapporteur. Pour que vous ne vous sentiez pas frustré, je vous signale que j’ai sous-amendé l’un de vos amendements, que nous examinerons ce soir ou demain : cela vous arrivera donc, à vous aussi !

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Nous allons passer au vote.

M. Julien Aubert. Madame la présidente, j’ai demandé la parole.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Nous entendons un orateur par groupe, comme nous le faisons depuis plusieurs jours.

M. Julien Aubert. Je suis l’orateur de mon groupe sur cette partie du texte. Quelle est la base réglementaire de votre décision, madame la présidente ?

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. C’est une décision prise par consensus.

M. Julien Aubert. Nous sommes le premier groupe d’opposition ! Nous avons accepté cette règle pour que les débats aillent plus vite…

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. C’est la règle fixée dans le règlement de l’Assemblée nationale : un pour, un contre, et une prise de parole par groupe pour chaque amendement.

M. Julien Aubert. Cette règle vaut pour la séance, pas en commission !

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. C’est exactement la même chose en commission ! Ce n’est pas discutable.

M. Julien Aubert. Dans ce cas, nous n’avons qu’à appliquer les règles qui s’appliquent pendant le confinement : les membres d’un groupe défendent tous leurs amendements ! C’est compliqué quand vous êtes orateur sur une partie d’un texte et que vous ne pouvez pas prendre la parole !

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Tous les amendements des députés sont défendus par leur groupe, même si les cosignataires sont absents. On ne peut pas mieux faire !

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement sousamendé.

 

Après l’article 49

 

Amendement CS886 de M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Cet amendement vise à compenser l’artificialisation au niveau de la parcelle : si quelqu’un bâtit une petite construction, il pourra prévoir d’en désartificialiser une partie à titre de compensation. Cela permet plus de flexibilité et de ne pas compter ces parcelles dans l’artificialisation générale.

Pour en revenir à la défense des amendements, le groupe Les Républicains n’est pas d’accord avec cette façon de fonctionner. Le consensus, par définition, suppose l’accord de tout le monde.

Mme la présidente Laurence Maillart-Méhaignerie. Si vous êtes l’orateur de votre groupe, je vous prie de bien vouloir vous coordonner avec vos collègues. Nous n’avons pas rencontré ce problème avec M. Sermier.

M. Lionel Causse, rapporteur. Avis défavorable à l’amendement.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Défavorable, notamment parce que l’exposé des motifs cite la petite artificialisation, alors que le corps de l’amendement lui-même vise des travaux soumis à permis de construire, qui sont d’une autre ampleur. Je ne suis pas opposée à ce principe, mais à la rédaction proposée. Avis défavorable.

M. Julien Aubert. Si nous n’avions évoqué que la petite artificialisation dans le dispositif de l’amendement, auriez-vous donné un avis favorable ? Si vous déposez un permis de construire pour votre maison, vous pouvez compenser votre impact carbone en plantant quatre ou cinq arbres. Seriez-vous d’accord pour procéder de la même façon à un niveau plus important ?

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. L’artificialisation telle qu’on la conçoit se mesure à l’échelle de la parcelle. Si votre amendement a pour objet de préciser que le fait de construire une cabane et de planter trois arbres à l’intérieur d’une parcelle n’a pas d’impact, alors je suis d’accord sur le principe. En réalité, votre amendement serait même déjà satisfait par la rédaction que nous proposons.

En revanche, si votre objectif est d’appliquer ce même principe à des travaux d’une autre ampleur, nécessitant un permis de construire et dépassant l’échelle de la parcelle, alors je ne suis pas d’accord. Mais comme je ne suis pas totalement sûre d’avoir compris le sens de votre amendement, je ne peux pas lui donner un avis favorable. De plus, je ne sais pas quelles seraient les conséquences de ce nouveau régime ; il serait donc nécessaire d’y travailler pour en préciser les termes.

La commission rejette l’amendement.

 

Article 50 (article L. 2231-1 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) : Présentation d’un rapport local annuel sur l’artificialisation des sols

 

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement CS4794 de M. Guillaume Kasbarian.

 

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS5135 du rapporteur.

 

Amendements CS1683 de M. François-Michel Lambert, CS3734 de M. Jean-Bernard Sempastous et CS5153 du rapporteur (discussion commune).

M. François-Michel Lambert. Cet amendement est issu de l’Association des petites villes de France (APVF), présidée par notre ancien collègue Christophe Bouillon. Il vise à ce que le rapport soit remis, non pas à un rythme annuel mais trisannuel, cette fréquence paraissant adaptée à l’objectif visé.

Mme Véronique Riotton. L’amendement CS3734 vise à permettre aux petites communes d’élaborer un rapport de suivi du rythme d’artificialisation des sols tous les trois ans et non annuellement, comme le propose le projet de loi. La rédaction de ce rapport constituera une contrainte pour nombre d’entre elles, dans la mesure où elles n’ont pas l’expertise et les moyens suffisants pour analyser l’artificialisation de leurs sols. L’amendement reflète le souhait de plusieurs acteurs du monde agricole auditionnés sur le texte.

M. Lionel Causse, rapporteur. Ce sujet constitue une source de préoccupation pour les élus locaux, comme l’ont montré les échanges que nous avons eus lors des auditions. À la suite du travail approfondi que j’ai mené avec Mme la ministre et son cabinet, je vous propose, par cet amendement, que les communes de moins de 3 500 habitants établissent le rapport tous les deux ans et que celles de plus de 3 500 habitants le publient annuellement. Cela me paraît une avancée notable et un bon compromis. Je vous demande de retirer vos amendements au profit du CS5153.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Le projet de loi prévoit une remise annuelle, les deux premiers amendements, une publication trisannuelle, et celui du rapporteur, une parution bisannuelle pour les communes de moins de 3 500 habitants. Cette dernière proposition me paraît une solution de compromis, à laquelle je me rallie. Avis défavorable sur les amendements CS1683 et CS3734, et favorable sur l’amendement CS5153.

M. François-Michel Lambert. La rédaction que je propose a le mérite de la simplicité, ce qui, me semble-t-il, répond aux attentes des élus locaux. Le seuil des 3 500 habitants entraînera des effets injustifiés. Des communes de 3 501 habitants n’ont quasiment pas d’espace foncier, tandis que d’autres, moins peuplées, peuvent être les plus vastes de leur département. Essayons de faire simple.

M. Dominique Potier. L’essentiel est qu’une évaluation soit faite à mi-mandat. Monsieur Lambert, l’effet de seuil sera neutralisé si l’EPCI se voit reconnaître la compétence, ce qui se produira, dans les années à venir, dans 99 % des cas. Le rythme biennal me convient, car il permet un bilan d’étape.

Je reviens sur un débat que nous avons eu précédemment. Il est à souhaiter que l’instrument comptable proposé par le CEREMA soit retenu, afin que les communes et les intercommunalités disposent d’un outil commun leur permettant d’établir des comparaisons et de communiquer. À défaut, la confusion risque de s’installer.

L’amendement CS3734 est retiré.

Successivement, la commission rejette l’amendement CS1683 et adopte l’amendement CS5153.

 

Elle adopte l’amendement rédactionnel CS5136 du rapporteur.

 

Amendements identiques CS1526 de Mme Claire Pitollat, CS2894 de M. Matthieu Orphelin et CS3429 de M. Dominique Potier.

Mme Delphine Batho. Il s’agit d’insérer dans le texte, au côté de l’artificialisation, la notion d’imperméabilisation, sujet sur lequel un amendement a été adopté tout à l’heure.

M. Dominique Potier. L’amendement vise à faire figurer à l’alinéa 5 la notion d’imperméabilisation conjointement à celle d’artificialisation.

M. Lionel Causse, rapporteur. L’imperméabilisation est un enjeu important, mais cet ajout constituerait une difficulté supplémentaire pour les exécutifs locaux. Nous leur demandons déjà des efforts substantiels en leur imposant des délais et des contraintes liés à la gestion de l’artificialisation au cours des dix années à venir.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. L’artificialisation, à mon sens, est une notion globale, qui inclut plusieurs composantes, dont l’imperméabilisation. Je ne suis pas sûre qu’il faille mettre en exergue l’imperméabilisation dans un rapport sur l’artificialisation. Elle pourra faire partie des indicateurs communs. Avis défavorable.

Mme Frédérique Tuffnell. L’artificialisation peut se faire à l’aide de matériaux poreux. La question, ici, est de savoir comment le sol peut se gorger d’eau, de quelle manière les nappes phréatiques seront alimentées. Il me paraît important d’introduire d’ores et déjà la notion d’« imperméabilisation » dans notre droit, parce qu’elle complète celle d’artificialisation et que, demain, l’eau sera véritablement un enjeu – il est déjà prégnant dans les territoires. Toutes les communes se demandent quels matériaux poreux utiliser, par exemple dans les cours d’école.

M. Dominique Potier. En matière de rénovation énergétique, si on décide d’épaissir une couche d’isolant de 2 centimètres afin de passer de la classe C à la classe B, cela ne représente pas un coût très élevé. En revanche, lorsqu’on s’est lancé dans la voie de la limitation de l’artificialisation, engager une réflexion sur les moyens de limiter les désordres dans le cadre de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations (GEMAPI) est une démarche supplémentaire. Je suis d’accord pour une rédaction rendant facultatif le travail d’analyse de l’imperméabilisation, mais ce serait une erreur de faire l’impasse sur le sujet, alors qu’il existe plusieurs modalités d’artificialisation dont les effets sur le réseau hydraulique sont variables.

M. François-Michel Lambert. Si vous estimez que l’ajout de ce terme complexifierait le rapport, il me semble d’autant plus opportun de prévoir sa remise tous les trois ans. Je préfère un rapport triennal qui permette de comprendre précisément ce qui est fait dans le domaine foncier à un rapport annuel limité à l’artificialisation stricto sensu, décrivant la construction de places de stationnement gazonnées ou en couches de goudron pouvant atteindre quarante ou cinquante centimètres d’épaisseur. La stratégie à suivre doit être de garder le sol vivant, voire de rendre possible un retour du foncier.

M. Martial Saddier. À mon sens, il faudrait employer le terme de « désimperméabilisation ». Compte tenu de ce qu’on a voté, et de l’état des connaissances, du travail des bureaux d’études, des architectes, je pense qu’on ne goudronnera plus et qu’on n’imperméabilisera plus un parking comme on le faisait jusqu’à présent. L’enjeu majeur, dans les années à venir, sera la désimperméabilisation. Le mot n’est peut-être pas entré dans le dictionnaire, mais il apparaît dans le onzième programme des agences de l’eau voté dans le cadre des schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE).

Mme Delphine Batho. Nous avons adopté tout à l’heure l’amendement CS4068 de Mme Tuffnell, qui me paraît plus pertinent que celui-ci – au passage, le sujet qu’il abordait n’est pas véritablement traité par le code de l’urbanisme. L’artificialisation et l’imperméabilisation, ce n’est pas la même chose. Il faut arrêter l’artificialisation, pas seulement au regard de l’enjeu de l’eau, mais aussi pour des raisons tenant au stockage du carbone ou à la biodiversité, pour ne citer que celles-ci. L’imperméabilisation ou désimperméabilisation constitue un autre enjeu essentiel, qui renvoie à la question de l’eau mais aussi, par exemple, aux îlots de chaleur. Il n’est pas certain, cela dit, qu’il faille traiter ce problème dans le rapport établi par les collectivités.

M. André Chassaigne. Je me noie dans ce débat ! Je pensais naïvement qu’un texte de loi était précisé par des décrets d’application. Dans mon esprit, l’adoption du rapport annuel sur l’artificialisation des sols donnerait lieu à un décret stipulant les points à aborder dans celui-ci.  Je ne vois pas comment on peut définir exhaustivement le contenu du rapport dans la loi.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée. Le décret doit, en effet, préciser le contenu du rapport. Cela étant, le débat est légitime. Quand on imperméabilise, il est certain qu’on artificialise ; lorsqu’on artificialise, on peut éventuellement utiliser des matériaux poreux. Peut-être serait-il intéressant de faire la différence. Il peut être utile de savoir, par exemple, qu’une cour d’école a fait l’objet de travaux pour être rendue poreuse. Je vous propose qu’on y réfléchisse, et je m’engage à ce que le décret respecte l’esprit de notre discussion en définissant les types d’artificialisation et en prévoyant un sous-ensemble pour suivre l’imperméabilisation.

La commission rejette les amendements.

 

————