Compte rendu

Commission
des affaires culturelles
et de l’éducation

 Discussion générale, en nouvelle lecture, de la proposition de loi, modifiée par le Sénat, visant à démocratiser le sport, à améliorer la gouvernance des fédérations sportives et à sécuriser les conditions d’exercice du sport professionnel (n° 4930) (Mme Céline Calvez, M. PierreAlain Raphan et M. Cédric Roussel, rapporteurs)              2

 Présences en réunion................................16


Mercredi
2 février 2022

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 26

session ordinaire de 2021-2022

Présidence de
M. Bruno Studer,

Président
 

 


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COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

Mercredi 2 février 2022

La séance est ouverte à neuf heures trente.

(Présidence de M. Bruno Studer, président)

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La commission procède à la discussion générale, en nouvelle lecture, de la proposition de loi, modifiée par le Sénat, visant à démocratiser le sport, à améliorer la gouvernance des fédérations sportives et à sécuriser les conditions d’exercice du sport professionnel (n° 4930) (Mme Céline Calvez, M. PierreAlain Raphan et M. Cédric Roussel, rapporteurs).

 

M. le président Bruno Studer. À la suite de l’échec – que je déplore – de la commission mixte paritaire (CMP) lundi dernier, nous procédons à la discussion générale en nouvelle lecture de la proposition de loi, modifiée par le Sénat, visant à démocratiser le sport, à améliorer la gouvernance des fédérations sportives et à sécuriser les conditions d’exercice du sport professionnel (n° 4930).

Nous avions examiné ce texte en première lecture en mars 2021 et le Sénat l’a voté le 18 janvier dernier. La proposition de loi comprend désormais quatre-vingt-six articles, dont soixante-dix-neuf restent en discussion, ce qui est considérable.

Mme Céline Calvez, rapporteure pour le titre Ier. Déposée par les groupes de la majorité présidentielle et comprenant à l’origine douze articles, cette proposition de loi a été enrichie de quinze articles lors de la première lecture et adoptée à la quasi-unanimité par l’Assemblée. Le texte qui nous est soumis en comporte désormais quatre-vingt-six, le Sénat ayant adopté des articles qui s’éloignent des considérations purement sportives et de notre souhait de développer la pratique des sports.

Pour autant, il a enrichi la proposition de loi sur bien des points – sur lesquels nous ne reviendrons pas nécessairement demain lors de l’examen des articles. Je pense aux maisons sport-santé, au développement de l’activité physique adaptée (APA) et à certaines dispositions sur le sport à l’école et en entreprise. De ce fait, nous regrettons d’autant plus de ne pas être parvenus à un texte commun en CMP.

Il s’agit désormais d’examiner chaque article et nous vous proposerons trois possibilités demain, lors de la discussion des amendements : adopter le texte du Sénat avec simplement des modifications rédactionnelles – le plus souvent pour des articles qui n’avaient pas été discutés en première lecture à l’Assemblée nationale ; revenir au texte de l’Assemblée nationale en y intégrant certains apports du Sénat, ou supprimer des dispositifs introduits par le Sénat – tel sera le cas pour des dispositions d’ordre réglementaire, de pur affichage ou contraires à l’esprit de la proposition de loi.

Enfin, il conviendra de modifier le titre de la proposition de loi. Le Sénat l’a alourdi et nous vous proposerons de revenir au titre initial.

Démocratiser le sport, c’est démocratiser l’accès à la pratique sportive ainsi que la gouvernance du monde sportif ; c’est aussi consolider le modèle économique, pour que ses acteurs soient en mesure de diffuser et de partager le sport pour tous.

L’objectif premier de cette proposition de loi est bien de démocratiser l’accès à la pratique sportive, qu’elle soit spontanée, scolaire, associative ou prescrite pour des raisons de santé. Pour cela, il nous faut parcourir de nouveau le chemin que nous avions emprunté en mars dernier.

Dès le premier article, nous avions consacré l’accès aux activités physiques et sportives pour les personnes accueillies ou prises en charge dans des établissements sociaux ou médico-sociaux. En séance publique, nous avions élargi la prescription d’activités sportives aux patients atteints de maladies chroniques. Des compléments ont été apportés par les sénateurs ; certains sont intéressants et méritent d’être conservés.

Nous avions aussi modernisé l’article L. 100-1 du code du sport, qui définit les objectifs de la politique du sport. Cela répondait aux aspirations de plusieurs groupes, en mentionnant les objectifs de développement durable (ODD), la solidarité intergénérationnelle, la santé, ou encore l’égal accès – sans discrimination fondée sur le sexe, l’identité de genre, l’orientation sexuelle, l’âge, le handicap, l’appartenance vraie ou supposée à une nation ou une ethnie, la religion, la langue, la condition sociale, les opinions politiques ou philosophiques ou tout autre statut. Je vous proposerai un amendement pour revenir au plus près de la rédaction adoptée par l’Assemblée, tout en intégrant deux précisions proposées par le Sénat.

Nous aurons l’occasion de reparler de la série d’articles ajoutés par le Sénat après l’article premier, dont l’article 1er quinquies C.

Avec l’article 2, nous améliorons l’accès aux équipements sportifs scolaires pour les usagers extérieurs – en permettant des aménagements lors de la création ou de la rénovation d’une école, d’un collège ou d’un lycée –, mais aussi aux équipements sportifs relevant de l’État. Créer des accès est une chose, mais les faire connaître est également important. C’est pourquoi nous améliorons leur recensement par l’État et la connaissance qu’en ont les collectivités.

L’article 3 crée les plans sportifs locaux, démarche partenariale qui réunit nombre d’acteurs autour d’une finalité : proposer à l’ensemble des publics un parcours sportif diversifié tout au long de la vie. Nous aurons l’occasion de préciser les relations entre les plans sportifs locaux et les projets stratégiques territoriaux des conférences régionales du sport (CRS).

L’article 4 permet justement d’étoffer les missions de ces dernières. Le texte initial l’avait prévu en intégrant le sport santé et les savoirs sportifs fondamentaux, et son examen tant à l’Assemblée qu’au Sénat a permis d’y ajouter le développement durable – je suis certaine que cela nous paraît à tous pertinent.

M. Pierre-Alain Raphan, rapporteur pour le titre II. Le titre II du texte que nous avions voté en première lecture comportait des mesures indispensables pour améliorer la gouvernance des fédérations. J’en rappelle rapidement les grandes lignes.

L’article 5 visait à instaurer une parité intégrale à la tête des fédérations, au niveau tant national que régional. L’article 6 instaurait un suffrage universel direct des associations sportives pour l’élection des instances dirigeantes des fédérations par les présidents de club. L’article 7 limitait à trois le nombre de mandats consécutifs exercés à la tête d’une fédération. Enfin, l’article 8 étendait les obligations déclaratives auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) à un grand nombre de dirigeants sportifs.

Pour résumer, il s’agissait d’ouvrir les fédérations à l’air vivifiant du renouvellement et, comme le précisait Tony Estanguet la semaine dernière, de participer à notre manière à l’héritage immatériel que laisseront les prochains Jeux olympiques et paralympiques (JOP) de 2024.

Le Sénat a suivi notre avis sur le contrôle de l’honorabilité prévu par l’article 8, tout en améliorant les conditions pratiques du contrôle exercé par la HATVP – donc son efficacité. Il est aussi favorable au suffrage direct dans les fédérations, en prenant notamment en considération les fédérations comprenant une forte proportion d’organismes non-associatifs.

En revanche, nos positions ont divergé sur la parité et sur le nombre de mandats autorisé.

S’agissant de la parité, je défendrai une position simple : la parité intégrale dans les instances nationales à compter du 1er janvier 2024 et au niveau régional du 1er janvier 2028. Cela laisse amplement le temps aux fédérations de recruter un vivier de dirigeantes ou de dirigeants au niveau régional, et de fixer une ligne claire.

Je serai ensuite favorable à un rétablissement du texte de l’Assemblée en matière de limitation du nombre de mandats, à trois au maximum, sans dérogation.

Le texte adopté par l’Assemblée comportait également des dispositions concernant le sport outre-mer, visant à permettre aux sportifs ultramarins de participer à des compétitions régionales et favoriser ainsi leur progression dans leur bassin géographique. Le Sénat a revu à la baisse le périmètre de cet article 8 ter et je le regrette. Je défendrai un rétablissement du texte voté en première lecture, moyennant la possibilité laissée aux fédérations de s’opposer à la participation des athlètes aux compétitions régionales.

Je défendrai également le rétablissement de l’article 5 bis A, qui prévoyait la parité intégrale au sein du bureau du Comité national olympique et sportif français (CNOSF), ainsi que le renforcement de la place des arbitres dans les fédérations.

Le Sénat a ajouté un certain nombre de dispositions sur la lutte contre les discriminations, le fonctionnement des fédérations, la délivrance de leur agrément et la lutte contre les violences sexuelles. Il s’agit d’excellents ajouts, auxquels je suis favorable. Plusieurs amendements que j’ai déposés doivent permettre d’en consolider la rédaction.

Je serai en revanche défavorable aux articles traitant de l’exploitation commerciale des supports audiovisuels des fédérations ainsi qu’à ceux sur la reconversion professionnelle. En effet, les dispositifs proposés ne me paraissent pas appropriés : l’un causerait des difficultés d’application considérables et les autres relèvent davantage du niveau réglementaire.

Pour conclure, nous avons effectué de réelles avancées au cours de l’examen de ce titre II depuis la première lecture, il y a bientôt un an. Il nous revient maintenant de les faire aboutir.

M. Cédric Roussel, rapporteur pour le titre III. Cette proposition de loi a connu un long chemin depuis son dépôt à l’Assemblée nationale, il y a près d’un an. Le 10 mars 2021, nous l’examinions en commission ; le 19 mars, l’Assemblée l’adoptait, à la quasi‑unanimité.

Notre travail avait permis d’enrichir significativement le titre III que j’ai l’honneur de rapporter.

L’article 9 opère une avancée significative en instaurant une plateforme de lutte contre la manipulation des compétitions, afin de mieux combattre le fléau des paris truqués. L’Assemblée avait consolidé le dispositif et l’article a été voté conforme par le Sénat, qui a renforcé le dispositif par un article autorisant le blocage administratif des sites illégaux par l’Autorité nationale des jeux (ANJ) : je suis favorable à cette évolution.

Le piratage est un fléau, qui nuit au financement du sport professionnel et, par ricochet, à celui du sport amateur. Avec l’article 10, nous proposions d’établir une nouvelle procédure judiciaire de blocage des sites pirates, au moyen d’une ordonnance « dynamique » unique qui permet de déréférencer un site sans repasser devant le juge. Entre-temps, le projet de loi relatif à la régulation et à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique a repris ce dispositif, désormais en vigueur. Nous avions soutenu cette évolution. Une première ordonnance a été prononcée la semaine dernière et ce résultat a été salué par beIN SPORTS et par Canal+. Je vous proposerai donc de ne pas revenir sur la suppression de l’article 10 par le Sénat. Je présente néanmoins un amendement visant à perfectionner le dispositif pour ce qui concerne les modalités de communication par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) des coordonnées des sites pirates.

Grâce à un amendement que j’avais déposé, l’Assemblée avait consacré en première lecture la possibilité pour les ligues professionnelles de constituer une société commerciale destinée à gérer leurs droits audiovisuels. Ce cadre organisationnel amélioré rend plus efficace la commercialisation des droits télévisuels sportifs. Il donne en outre l’occasion d’ouvrir le capital à des investisseurs privés, avec une rentrée d’argent frais permettant de mieux accompagner les clubs professionnels. Le Sénat a repris ce dispositif et lui a apporté quelques modifications. Je défendrai le retour à une ouverture du capital à hauteur de 20 %, ainsi que la réintroduction d’un garde-fou s’agissant des compétences de la société – de façon à ce qu’elle ne puisse pas déléguer, transférer ou céder les activités qui lui sont confiées par la loi.

Comme pour les autres titres, le Sénat a significativement enrichi le texte et a ajouté plusieurs articles. Je serai favorable à plusieurs d’entre eux conformément l’esprit de concorde qui doit guider nos travaux, avec l’ambition transpartisane de promouvoir l’intérêt général avant toute chose. Ces ajouts concernent en premier lieu le supportérisme, notamment des dispositions qui visent à encadrer les interdictions commerciales de stade, à compléter le dossier des interdits de stade et à obtenir du ministère de l’intérieur la publication d’un rapport annuel sur les mesures privatives de liberté prononcées. Je suis également favorable à la création d’une amende forfaitaire pour lutter contre l’introduction d’artifices et de fumigènes dans les stades. Les modalités de cette amende feront l’objet de discussions au sein de notre commission.

En revanche, d’autres dispositions adoptées par le Sénat me paraissent plus contestables. Je pense notamment à l’article 11 bis AC, qui fait peser une obligation de moyens – et non de résultat – sur les organisateurs de manifestations sportives. Cela me semble contraire à la politique de fermeté contre la violence dans les stades poursuivie depuis le début de cette législature.

Je suis également défavorable à l’article 11 ter, qui autorise l’usage de scanners corporels à ondes millimétriques à l’entrée des stades. Les garanties proposées ne semblent pas suffisantes pour justifier l’utilisation de cette technologie très intrusive, actuellement réservée aux aéroports de façon strictement encadrée par le code des transports.

Le Sénat a porté à cinq ans la durée du premier contrat pour les jeunes joueurs en formation. J’avais formulé cette proposition en tant que rapporteur de la mission d’information sur les droits de diffusion audiovisuelle des manifestations sportives. J’y suis donc très favorable.

Je le serai également pour la bonne intention figurant à l’article 11 bis B, qui vise à aligner le statut des arbitres de haut niveau sur celui des athlètes. La rédaction adoptée par le Sénat ouvre ce régime aux « arbitres et [aux] juges de haut niveau des sports professionnels » ; je souhaite un élargissement à tous les arbitres de haut niveau et je proposerai un amendement en conséquence.

Enfin, le Sénat a introduit de nouvelles dispositions sur la diffusion audiovisuelle du sport et le droit collectif à l’image. Je partage l’intention de ces dispositifs, qui visent respectivement à soutenir l’exposition du sport au plus grand nombre et à rendre le sport professionnel français plus compétitif. Néanmoins, les articles proposés ne sont pas de bons vecteurs et l’on peut avancer autrement. Je fais ici référence au décret sur les événements d’importance majeure, pour lequel une consultation vient d’être lancée par le ministère de la culture et s’achèvera à la fin de ce mois. La nouvelle liste est significativement élargie et j’espère que le décret sera modifié au plus vite.

Pour conclure, le sport que nous souhaitons tous promouvoir, ses instances que nous devons aider et son économie que nous voulons développer méritent un débat serein et constructif.

M. Belkhir Belhaddad (LaREM). Aucun accord n’a pu être trouvé avec nos collègues sénateurs lors de la CMP. Malgré de nombreuses avancées pendant la navette, trois points d’achoppement ont empêché d’arriver à un texte commun. Il s’agit de la parité dans les instances fédérales et les organes régionaux, ainsi que du nombre de mandats des présidents de fédération. Quant à l’introduction d’une mesure visant à proscrire le port du voile dans les compétitions sportives, elle vient vicier l’objet de cette proposition de loi.

D’un texte équilibré et coconstruit avec le CNOSF pour développer la pratique sportive pour le plus grand nombre, le Sénat a tenté de nous attirer vers une nouvelle surenchère sur les questions de laïcité. Je le regrette. Le groupe La République en marche est opposé à l’ajout de considérations qui n’ont pas lieu de figurer dans ce texte. D’une part, parce que le combat contre le séparatisme a été notamment mené dans le cadre de la loi confortant le respect des principes de la République, avec le contrat d’engagement républicain – par lequel les associations et fédérations sportives s’engagent par écrit à respecter les valeurs républicaines et le principe de laïcité. D’autre part, parce que notre groupe considère que le sport est un vecteur d’émancipation, quelles que soient la condition, l’origine, la couleur de peau ou la confession. Il est l’endroit des rencontres, de la santé, de la saine compétition et de l’altérité. Il est tout sauf un bunker.

C’est la raison pour laquelle le Président de la République et le Gouvernement ont fixé comme objectif de favoriser le développement de la pratique d’une activité physique et sportive pour toutes et tous et partout, avec une cible de trois millions de pratiquants supplémentaires d’ici à 2024 pour permettre à notre pays de revendiquer son statut de nation sportive.

Cette nouvelle lecture doit être l’occasion de revenir aux fondamentaux du texte et de répondre à la priorité accordée au sport. À ce titre, je souhaiterais évoquer quelques dispositions majeures qui vont dans le sens de la promotion des valeurs du sport et de la démocratisation de ses usages.

Cette proposition de loi instaure la parité intégrale dans la gouvernance des instances fédérales. Elle modifie les modalités d’élection de la présidente ou du président par les clubs qui composent la fédération, ainsi que celles de son conseil d’administration. Elle limite à trois le nombre de mandats consécutifs d’un président de fédération ou d’un de ses organes déconcentrés.

Le texte reconnaît davantage le sport santé, en l’ajoutant aux missions des conférences régionales du sport et en inscrivant l’offre d’activités physiques et sportives parmi les missions d’intérêt général des établissements et services médico-sociaux. Ces dispositions sont à rapprocher de la stratégie nationale sport santé 2019-2024 et de ses actions pour promouvoir la santé et le bien-être par l’activité physique et sportive. Les 436 maisons sport-santé seront le relais de la stratégie d’accompagnement des personnes éloignées du sport ainsi que des personnes souffrant de maladies chroniques ou d’affections de longue durée nécessitant, sur prescription médicale, une APA sécurisée et encadrée par des professionnels formés.

Avec cette loi, nous agissons également pour faciliter l’accès aux équipements sportifs scolaires pour les associations et les entreprises, dans le but d’optimiser l’utilisation de ces équipements et d’apporter à tous une offre sportive.

Enfin, en ce qui concerne le modèle économique sportif, la faculté pour les ligues professionnelles de créer une société commerciale permettra de mieux valoriser les droits de diffusion, ce qui renforcera le financement du sport. Nous prévoyons aussi des moyens supplémentaires de régulation, avec le blocage administratif de sites illégaux de paris sportifs.

Je me réjouis que notre groupe puisse poursuivre le travail mené sur ces thèmes, afin d’aboutir à un texte consensuel et équilibré au service de la pratique sportive et de ses valeurs.

M. Maxime Minot (LR). Faut-il favoriser la pratique du sport dans notre pays ? La réponse est : oui. Ce texte est-il espéré, après trois ans d’attente, à deux ans des JO de Paris et dans un contexte de crise sanitaire ? Oui.

Mais est-il à la hauteur des ambitions ? La réponse est : non. La majorité et le Gouvernement ont-ils permis qu’il puisse en être autrement ? Là encore, la réponse est négative. En effet, l’échec de la CMP illustre l’intransigeance et le manque de raison de la majorité, qui a refusé les ajouts de bon sens du Sénat. On nous avait promis, comme souvent, une grande loi sur le sport, un texte d’envergure qui réformerait tout de fond en comble : la montagne accouche d’une souris, avec des ajouts de l’Assemblée nationale qui n’ont pas modifié l’équilibre du texte.

Grâce au travail du Sénat, la proposition de loi répondait davantage aux enjeux auxquels doit faire face le sport français. Le développement du sport santé, du sport en entreprise et du sport à l’école avait été renforcé. Plusieurs mesures appropriées visaient à mieux lutter contre les violences dans les stades. De même, des dispositions allongeant de trois à cinq ans la durée du premier contrat professionnel et améliorant la reconversion des sportifs avaient été ajoutées dès l’examen en commission.

La nouvelle rédaction de l’article 5 n’a pas manqué d’interroger des députés lors de la CMP, mais une lecture attentive ne laisse pas de doute. Sans renoncer à l’ambition d’atteindre l’objectif de parité, la modification effectuée par le Sénat renforce les exigences tout en laissant le temps nécessaire pour faire émerger davantage de responsables, au niveau tant national que régional, afin d’atteindre la parité réelle.

D’autres ajouts ont été effectués lors de l’examen en séance au Sénat. Ce dernier a ainsi légitimement rétabli la désignation d’un référent sport dans chaque établissement social ou médico-social. Il a promu la pratique au sein des entreprises des activités physiques et sportives, en les intégrant dans le champ de la négociation annuelle. Il a permis aux entreprises d’inscrire le sport dans leur raison d’être. Le Sénat a fait figurer la promotion et le développement du sport santé parmi les missions de service public de l’enseignement supérieur. Il a limité à 25 % les postes réservés aux sportifs de haut niveau et aux sportifs professionnels au sein des instances dirigeantes des fédérations. Il a également modifié les règles relatives à la diffusion des événements sportifs d’importance majeure, afin d’élargir les pendants féminins des grandes compétitions ainsi que les Jeux paralympiques. Le texte voté par le Sénat autorise l’utilisation de l’offre locale d’équipements sportifs, en dehors des horaires spécifiques de l’éducation nationale, par les collectivités territoriales, les associations, les clubs sportifs et les entreprises ainsi que par les pratiquants individuels.

Jusque-là, les députés LaREM étaient presque d’accord pour accepter ces mesures.

Mais voilà que le Sénat interdit le port de tout signe religieux ostentatoire pendant les compétitions sportives organisées par les fédérations. Quel scandale et quelle ignominie de demander que les compétitions sportives organisées par les fédérations respectent les valeurs de la République ! Alors là, c’en est trop ! Fort heureusement, le dogmatisme et le ridicule ne tuent pas.

Plus sérieusement, votre irresponsabilité est choquante car elle met en évidence une laïcité de façade et de convenance, complaisante à l’égard de l’islam politique et de tout ce qu’il représente pour les droits des femmes et les libertés. À moins qu’il s’agisse juste de repousser une proposition car elle aurait le malheur d’être formulée par l’opposition. Ce serait tout aussi dangereux, car cela en dirait long sur notre démocratie. Il est pourtant urgent de faire régner la neutralité et de mettre fin à un flou juridique qui sert aujourd’hui les intérêts du communautarisme qui nous gangrène.

Les députés du groupe LR se sont abstenus lors de la première lecture et ils le feront sûrement à l’occasion de cette nouvelle lecture, en raison de votre incapacité à bâtir un consensus et à œuvrer pour l’intérêt général.

Mme Maud Petit (Dem). Un important travail avait été mené au sein de notre assemblée sur cette proposition de loi, permettant d’arriver à un texte équilibré et fortement enrichi grâce à nos échanges. Aussi le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés exprime-t-il sa grande déception au vu de l’échec de la CMP, d’autant qu’il résulte de la ferme volonté des sénateurs de maintenir une disposition à la portée hautement politique, dont l’objet est d’interdire le port de signes religieux lors de compétitions et manifestations sportives.

Or cette proposition de loi porte sur la démocratisation du sport, comme son titre l’indique. Notre objectif premier réside dans l’accès et le développement de la pratique du sport pour chacune – j’insiste sur le féminin – et chacun d’entre nous. Démocratiser, c’est mettre à la portée de tous.

Alors que les dispositifs à même de garantir le respect de la laïcité ont été largement renforcés grâce à la loi confortant le respect des principes de la République – que nos collègues du groupe les Républicains ont refusé de voter –, il nous semble illégitime de rouvrir ce débat et de détourner la proposition de loi de son ambition première. Nos concitoyens sont las des postures politiques. En revanche, ils souhaitent qu’on améliore leur quotidien. Travaillons-y.

Cette nouvelle lecture nous donne la possibilité d’examiner une version du texte amplement modifiée par le Sénat, puisqu’une cinquantaine d’articles additionnels ont été introduits. Le groupe des Démocrates souhaite revenir sur certaines de ces modifications.

Les sénateurs ont ainsi freiné l’instauration de la parité dans les fédérations, ce que nous regrettons. Notre groupe souhaite que cette exigence soit rétablie à l’échelle nationale et régionale, pour amplifier les progrès opérés en faveur de la place des femmes dans le mouvement sportif.

L’Assemblée nationale avait prévu une limitation à trois mandats pour les présidents de fédération, afin de garantir un renouvellement des instances dirigeantes. Nous souhaitons le rétablissement de cette disposition.

Le Sénat a supprimé la possibilité pour les ligues et comités sportifs ultramarins affiliés à une fédération régionale d’organiser des compétitions et manifestations sportives internationales à caractère régional, mais aussi de constituer des équipes en vue de participer à de telles compétitions ou d’intégrer des organisations internationales – dès lors que leurs statuts le permettent. Dans un souci de compétitivité et de progression des équipes ultramarines, éloignées des compétitions hexagonales, nous tenons à ce que cette disposition, issue d’un amendement de notre collègue Justine Benin, soit rétablie.

Notre commission doit aussi reconnaître le travail réalisé par les sénateurs lorsqu’il va dans le bon sens. Il faut ainsi saluer de nombreuses dispositions. L’amendement que j’avais proposé sur l’élargissement de la prescription du sport santé a été enrichi par l’introduction du principe d’une formation des médecins à la prescription d’APA. Je relève aussi la possibilité donnée aux masseurs kinésithérapeutes de renouveler la prescription d’APA. Ces belles avancées contribuent à l’amélioration des politiques publiques de prévention. Nous approuvons aussi l’amélioration de l’encadrement des sportifs de haut niveau dans le cadre de leur scolarisation, mais également lors de leur reconversion professionnelle.

Il faut reconnaître l’intérêt porté par le Sénat au développement de la pratique sportive dans le monde professionnel. Cependant, la disposition proposée sur ce point par les sénateurs est incomplète et pourrait même être contreproductive, faute de concertation avec les entreprises. Ma collègue Aude Amadou et moi-même avons été désignées par le Gouvernement parlementaires en mission sur le sport en entreprise, et nous sommes convaincues que la contrainte n’est pas la voie qu’il faut emprunter pour y garantir la pérennité d’une offre d’activités physiques et sportives. Nous présenterons très prochainement nos recommandations à la ministre des sports.

Notre groupe espère que les débats permettront de faire avancer ce texte, en revenant sur les modifications du Sénat qui dénaturent son esprit tout en conservant les apports qui l’enrichissent.

M. Régis Juanico (SOC). Au nom du groupe Socialistes et apparentés, je regrette l’échec des discussions de la commission mixte paritaire. Il emporte une conséquence pratique : la proposition de loi ne pourra être définitivement adoptée par notre assemblée que dans l’ultime semaine de séance de la législature. C’est un peu une session de rattrapage, à seulement deux ans et demi des JOP de Paris 2024. Sacrée performance pour un texte examiné en procédure accélérée ! Adopté à la quasi-unanimité en première lecture par l’Assemblée nationale le 19 mars 2021, il n’a été inscrit à l’ordre du jour du Sénat qu’au début du mois de janvier 2022, à l’issue d’une course de lenteur incompréhensible. Nous avons perdu de précieux mois, sans compter que la publication de décrets sera nécessaire à l’application de plusieurs dispositions utiles du texte – je pense par exemple au blocage des sites illégaux par l’Autorité nationale des jeux, à la reconnaissance législative de la plateforme nationale de lutte contre la manipulation des compétitions sportives et à la possibilité pour les sociétés sportives de prendre la forme d’une société coopérative d’intérêt collectif.

Cet examen tardif, en pleine campagne présidentielle, a eu une autre conséquence fâcheuse : la majorité Les Républicains du Sénat a instrumentalisé, à des fins politiques, l’examen d’un texte visant à développer la pratique sportive ; elle en a fait une tribune sur la seule question du voile dans le sport, en introduisant l’article 1er quinquies C qui tend à interdire le port de signes religieux ostensibles lors des compétitions et événements sportifs. Cet article dénature le texte et en détourne complètement l’objet. Le sport doit rassembler, promouvoir les valeurs d’intégration, d’émancipation, de brassage social, de fraternité laïque et républicaine, non la haine, la division ou la stigmatisation. Cette opération est d’autant plus irresponsable qu’elle a un autre objectif, moins avouable : faire diversion pour occulter les importants reculs de cette même majorité sénatoriale sur les questions de parité et de limitation du cumul des mandats des dirigeants sportifs. Nous soutiendrons la suppression de l’article 1er quinquies C ainsi que celle d’autres articles improvisés comme celui relatif au droit à l’image collectif.

Cette nouvelle lecture doit permettre à notre commission de revenir à l’équilibre originel de la proposition de loi. Le nombre d’articles est passé de 29 à l’Assemblée nationale à 86 au Sénat, au risque d’une dilution et d’un brouillage total des objectifs de départ, noyés dans de nombreuses dispositions qui n’ont pas leur place dans une loi. Nous souhaitons conserver dans le texte définitif certaines avancées du Sénat qui ont enrichi le texte : l’extension des possibilités de prescription des APA ; le développement des activités physiques dans les établissements sociaux et médico-sociaux ; la définition dans la loi des maisons sport-santé, que Marie Tamarelle-Verhaeghe et moi avions préconisée dans le rapport sur l’évaluation des politiques de prévention en santé publique que nous avions remis en juillet 2021. Nous sommes également favorables à la possibilité d’allonger de trois à cinq ans, de façon encadrée, le premier contrat des jeunes sportifs professionnels, comme l’avait recommandé le rapport publié en décembre 2021 par la mission d’information sur les droits de diffusion audiovisuelle des manifestations sportives, que j’avais présidée et dont Cédric Roussel était le rapporteur.

Malgré les ambitions limitées de certaines dispositions, notre groupe a joué le jeu, dès le début, de l’enrichissement du texte, considérant que le sport ne devait pas être l’otage de joutes politiciennes. Nous avons fait adopter par exemple un article relatif au recensement des équipements sportifs dans les établissements scolaires, qui n’existait pas jusqu’à ce jour, la parité au sein du bureau du CNOSF et de celui du Comité paralympique et sportif français (CPSF), des amendements encadrant la création d’une société commerciale par les ligues professionnelles ou permettant à des clubs sportifs constitués en société coopérative d’intérêt collectif de bénéficier de subventions de l’Agence nationale du sport.

Au Sénat, à l’initiative de Jean-Jacques Lozach, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain a également permis de nombreuses avancées : l’intégration du développement des activités physiques et sportives pour les salariés dans le champ de la négociation annuelle sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail ; l’inclusion, dans la déclaration de performance extrafinancière des grandes sociétés, des actions de promotion des activités physiques et sportives ; l’assouplissement et la simplification pour les personnes majeures du certificat de non-contre-indication à la pratique sportive ; l’extension aux marques d’homophobie du délit réprimant certains comportements lors des manifestations sportives, puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

Sous réserve du maintien de ces dispositions et de l’adoption d’un certain nombre des amendements que nous avons déposés en commission ou déposerons en séance, nous voterons la proposition de loi, comme nous l’avons fait en première lecture.

M. Pierre-Yves Bournazel (Agir ens). Après l’échec de la CMP, nous examinons en nouvelle lecture un texte attendu de longue date par le mouvement sportif, à un moment charnière pour le sport français. Nous portons une appréciation positive sur le texte, sachant qu’il n’y a pas de petite ou de grande loi : il y a simplement la loi de la République, qui doit s’appliquer à toutes et à tous.

Le texte marque une réelle avancée pour le mouvement sportif et pour la nation sportive que nous appelons de nos vœux. À bien des égards, le sport français se trouve à un tournant. Ne perdons pas de vue deux objectifs qui sous-tendent notre projet sportif : le développement du sport pour toutes et tous, le succès des JOP de Paris 2024. À deux ans de cette échéance majeure pour notre pays, une loi sur le sport était nécessaire pour apporter une réponse sur les différents enjeux. Le groupe Agir ensemble se réjouit des avancées permises par cette proposition de loi en faveur du développement de la pratique sportive, de la modernisation de la gouvernance des fédérations et d’un modèle sportif plus vertueux.

En première lecture à l’Assemblée, nous avions bien travaillé : nous avions encore amélioré l’accès au sport pour tous en imposant l’aménagement d’un accès indépendant aux équipements sportifs dans les nouvelles écoles et nouveaux collèges publics ; nous avions élargi la prescription du sport santé aux personnes à risque ou atteintes de maladies chroniques et prévu la désignation de référents sport au sein des établissements sociaux et médico-sociaux ; afin de garantir la sécurité des pratiquants, nous avions étendu le contrôle des antécédents judiciaires à toutes les personnes intervenant auprès des mineurs. À l’initiative du groupe Agir ensemble, nous avions en outre doté les projets sportifs territoriaux d’un objectif de formation à la lutte contre toutes les formes de discrimination dans le sport et demandé la remise d’un rapport sur l’impact de la crise actuelle sur les dépenses de sponsoring. Je me réjouis que ces dispositions aient été maintenues lors de la navette.

Dans le même esprit, nous souhaitons conserver plusieurs dispositions introduites par le Sénat qui vont dans le bon sens. Je pense notamment à l’inscription dans la loi des maisons sport-santé, à la fin de l’obligation générale de présenter un certificat médical afin de souscrire une licence, au contrôle de l’honorabilité des encadrants dans le e-sport et au blocage administratif des sites illégaux de paris en ligne.

Vous le voyez, cette proposition de loi est riche et équilibrée. Pour ma part, je considère que le devoir de la République est toujours de rechercher l’équilibre. Le mouvement sportif demande que l’on ait le courage de la nuance, que l’on ne cède pas à la radicalisation des esprits. Il est question ici de démocratiser le sport ; il ne faut donc pas chercher à en restreindre l’accès. Ne réduisons pas l’examen de cette loi à des débats instrumentalisés à quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle !

Parce que le sport est un formidable vecteur de cohésion sociale et d’émancipation individuelle ; parce que les valeurs de respect, de solidarité, de persévérance et l’esprit collectif qu’il véhicule sont celles dont notre pays a le plus besoin ; parce que la France, notre nation, aura très prochainement l’occasion, lors de grands rendez-vous, d’être la vitrine sportive du monde, nous devons nous assigner une véritable ambition pour le sport en France. Profitons des JOP de Paris 2024 et de la Coupe du monde de rugby de 2023 pour défendre haut et fort cette ambition et faire en sorte que le sport irrigue pleinement la société française, grâce à nos écoles, à nos entreprises et à notre système de santé.

Notre groupe soutiendra avec force et conviction ce texte qui tend à accompagner pleinement les transformations à l’œuvre au sein du mouvement sportif et à faire du sport un élément central de notre société. Vive la parité, vive le sport, vive la République !

M. Grégory Labille (UDI-I). Lors de l’examen de cette proposition de loi l’année dernière, tout en regrettant, sur de nombreux bancs, un manque d’ambition, nous étions parvenus à construire un texte équilibré, que nous avions voulu concis. Je dois reconnaître que nos collègues sénateurs l’ont considérablement enrichi, avec des mesures plus ou moins utiles. Je pense néanmoins qu’il aurait pu faire l’objet d’un compromis lors de la CMP, car il apporte de premières réponses intéressantes et attendues par les acteurs du monde sportif.

La situation a évolué depuis la première lecture. Après des difficultés à la rentrée 2020, le pass’sport a permis à certaines familles de réinscrire leurs enfants dans différentes pratiques sportives. Toutefois, on ne saurait ignorer que l’entrée en vigueur du pass’sport a connu quelques problèmes en raison du manque d’expérimentation préalable. Nous pourrions en outre envisager un soutien à d’autres publics, notamment aux étudiants qui n’ont pas accès à des équipements sportifs sur leur campus, comme l’avait proposé ma collègue Béatrice Descamps lors de l’examen du premier budget de la législature.

De même, tandis que le principe de l’article 2 est de compenser le manque d’infrastructures sportives en ouvrant les terrains des établissements scolaires, l’annonce d’un investissement de 200 millions d’euros pour la construction d’équipements sur la période 2022-2024 rebat les cartes. Mon groupe demandait un tel investissement depuis longtemps, chaque année lors de l’examen du projet de loi de finances. C’est la preuve que, quand on veut, on peut. Il serait d’ailleurs intéressant pour notre commission de suivre l’évolution de ce plan d’investissement et l’avancée des constructions. J’espère que nous pourrons effectuer ce suivi d’ici à la fin de cette législature ou au cours de la prochaine.

J’aurais souhaité que la question du sport en milieu scolaire soit traitée de manière plus approfondie encore. D’après une étude de l’Organisation mondiale de la santé, près de 80 % de nos adolescents ne font pas assez de sport au quotidien. Cela nous montre bien que la question du sport dès le plus jeune âge, notamment à l’école, est centrale, alors que l’on aborde ici des points plus secondaires.

Je me réjouis néanmoins qu’il soit prévu d’accorder une plus grande attention aux jeunes inscrits dans un parcours sportif de haut niveau. L’école doit tout mettre en œuvre pour accompagner le développement de leur carrière sans compromettre leurs études. Leur réussite, la poursuite de leur carrière et, partant, le rayonnement du sport français dépendent notamment de leur accompagnement dès le plus jeune âge dans nos établissements scolaires.

Avec cette proposition de loi, nous commençons en outre à mettre réellement en avant les bienfaits du sport pour la santé et pour l’intégration sociale. À l’avenir, il faudra plus encore que les pouvoirs publics perçoivent le sport non plus comme un simple loisir, mais comme un véritable outil de politique publique.

Enfin, la gouvernance des fédérations connaîtra des avancées salutaires vers davantage de parité, même si le Sénat a modifié un certain nombre de critères, sur lesquels nous resterons vigilants.

Par ailleurs, le Sénat a voulu revenir sur l’exclusivité de retransmission de grands événements sportifs détenue par certains groupes, accaparement qui prive les Français de moments forts et rassembleurs. C’est un aspect sur lequel nous devons continuer à travailler.

Le groupe UDI et indépendants aborde favorablement les débats, en espérant que certaines avancées sénatoriales seront conservées.

Mme Stéphanie Kerbarh (LT). Il est regrettable et surprenant que nous nous retrouvions pour une nouvelle lecture de cette proposition de loi. Nous aurions pu nous accorder sur ces dispositions plutôt consensuelles, mais nous avons échoué. Le regret de ne pas parvenir à élaborer rapidement un texte commun s’ajoute à celui, exprimé par tous les groupes en première lecture, de ne pas voir advenir la grande loi « sport et société » qui avait été annoncée en 2017. Nous regrettons aussi qu’il n’ait pas été possible de progresser sur un certain nombre de sujets importants aux yeux du groupe Libertés et territoires, comme le remboursement du sport sur ordonnance ou la participation accrue des licenciés et des supporters à la gouvernance des fédérations.

Il nous avait fallu nous pencher au chevet d’un mouvement sportif en difficulté, et les réponses proposées étaient probablement en deçà des attentes du secteur. Déjà fragilisé, celui‑ci a été encore affaibli par la crise sanitaire. Avec l’approche des JOP de Paris 2024, l’occasion de bâtir un héritage autre que matériel se présente à nous. Le sport à l’école, le sport en entreprise, le sport dans les territoires, le sport santé sont autant d’éléments qu’il faut consolider par des politiques d’encouragement et d’accompagnement ambitieuses. Tel est le contexte dans lequel nous avions examiné cette proposition de loi. À l’époque, le groupe Libertés et territoires l’avait votée en saluant les mesures consensuelles qu’elle comportait.

Le Sénat a adopté des mesures intéressantes qui, pour la plupart, enrichissent le texte. Je pense notamment à la consécration des maisons sport-santé et aux dispositions en faveur du sport scolaire et du sport de haut niveau. En revanche, l’article relatif à la parité dans les fédérations est moins-disant que celui que nous avions adopté.

Avec la crise sanitaire, il faut le rappeler, le nombre de licences a chuté de 25 à 30 %. Par conséquent, des dizaines de milliers d’associations sportives sont menacées de disparition. La question des moyens accordés au mouvement sportif pour renforcer la pratique du sport sur tout le territoire nous paraît prioritaire. Du fait d’un certain nombre de dysfonctionnements, la généralisation du pass’sport n’a pas encore eu les effets escomptés mais c’est une première étape et il nous faut améliorer ce dispositif.

Nous sommes confrontés à bien des enjeux : la lutte contre les violences sexuelles, qui impose un meilleur contrôle des encadrants ; le manque de parité ; le rôle de l’État et la nécessité d’un service public fort et de qualité en faveur du sport. Le groupe Libertés et territoires appelle à poursuivre le travail sur ces questions prioritaires. Nous espérons que les débats en nouvelle lecture porteront précisément sur ces points.

Mme Elsa Faucillon (GDR). Pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, la question du sport et l’ambition en matière de démocratisation de sa pratique ne sont pas des sujets annexes : ils sont au cœur d’une politique d’émancipation.

Le Sénat a élargi le champ du texte et l’a enrichi sur certains points, ce que nous avions nous-mêmes tenté de faire en première lecture, considérant que son contenu était trop faible. Nous saluons notamment les avancées sur le sport santé et les facilités d’accès aux équipements sportifs.

Nous avons en revanche un avis beaucoup plus mitigé sur les dispositions relatives au sport à l’école, qui font l’impasse sur l’éducation physique et sportive (EPS). Nous le répétons, il revient aux professeurs des écoles et aux professeurs d’EPS d’assurer cette mission. L’EPS est une vraie matière, qui doit retrouver toute sa place si l’on veut vraiment créer des habitudes, voire un habitus, de pratique du sport chez les plus jeunes.

Nous regrettons en outre que le Sénat ait reporté à 2028 l’atteinte de la parité dans les instances dirigeantes des fédérations ; c’est un recul. Nous appelons le Gouvernement à garder le cap de la parité stricte d’ici à 2024 aux niveaux national et régional.

Nous nous opposons très nettement aux mesures introduites par le Sénat qui ont fait achopper la CMP. L’article visant à interdire le port de signes religieux lors des compétitions sportives n’a rien à faire dans cette loi, ni dans aucune autre. La démocratisation du sport concerne toutes les femmes, croyantes ou non. Nous assistons au retour d’une idée assez insupportable, d’une marotte, qui peine à raison beaucoup de gens, notamment des femmes. Loin de promouvoir la laïcité et de défendre les droits des femmes, on cherche en permanence à exclure les mêmes, c’est-à-dire les femmes musulmanes. Qui plus est, cette disposition remettrait en cause l’autonomie des fédérations sportives, ce qui serait contraire aux exigences du Comité international olympique. J’espère que la commission nous permettra d’évacuer cette question. De même, nous sommes résolument opposés à l’article rendant possible la convocation de l’enfant devant le médecin scolaire afin de lutter contre les certificats médicaux dits de complaisance. C’est tout bonnement n’importe quoi ! Nous soutiendrons les amendements de suppression de ces deux articles, qui parasitent le texte.

À l’instar de ma collègue Marie-George Buffet, je regrette qu’il soit impossible de progresser par la loi sur les questions relatives au supportérisme, en particulier sur une meilleure régulation des interdictions administratives de stade et des interdictions de déplacement des supporters – on recourt aux unes et aux autres de manière trop systématique. Nous soutiendrons les amendements qui vont dans le sens d’un meilleur respect des droits et libertés des supporters et de l’émergence d’un modèle français du supportérisme.

Une fois que le texte de la commission sera connu, les députés communistes présenteront une série de propositions, comme ils l’ont fait en première lecture, afin de renforcer les dispositions en faveur d’un service public du sport pour toutes et pour tous.

Mme Céline Calvez, rapporteure. Je vous remercie de vos interventions. Vous avez rappelé les améliorations apportées au texte par l’Assemblée nationale et mentionné de nombreuses avancées permises par le Sénat. Nous ne jetterons pas le bébé avec l’eau du bain ! Loin de toute attitude partisane, notre intention est de consacrer les mesures susceptibles de faire progresser le sport proposées par nos collègues sénateurs. Tel ne sera pas le cas, en revanche, pour les dispositions qui ne relèvent pas de ce champ. À l’exception peut-être d’un groupe, nous souhaitons unanimement nous concentrer sur l’essentiel, à savoir la démocratisation du sport.

M. le président Bruno Studer. Nous poursuivrons nos travaux demain, à partir de neuf heures trente, avec l’examen des articles.

 

La séance est levée à dix heures vingt.

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Présences en réunion

Réunion du mercredi 2février 2022 à 9 heures 30

 

Présents.  Mme Géraldine Bannier, Mme Valérie Bazin-Malgras, M. Belkhir Belhaddad, M. Philippe Berta, M. Pierre-Yves Bournazel, M. Bertrand Bouyx, Mme Anne Brugnera, Mme Céline Calvez, Mme Danièle Cazarian, Mme Pascale Cesar, Mme Sylvie Charrière, M. Stéphane Claireaux, Mme Fabienne Colboc, Mme Béatrice Descamps, Mme Elsa Faucillon, M. Alexandre Freschi, M. Jean-Jacques Gaultier, Mme Florence Granjus, M. Pierre Henriet, Mme Danièle Hérin, M. Régis Juanico, Mme Stéphanie Kerbarh, M. Yannick Kerlogot, Mme Brigitte Kuster, M. Grégory Labille, Mme Constance Le Grip, Mme Sophie Mette, M. Maxime Minot, Mme Maud Petit, Mme Béatrice Piron, Mme Florence Provendier, M. Pierre-Alain Raphan, M. Julien Ravier, M. Frédéric Reiss, Mme Muriel Ressiguier, M. Cédric Roussel, M. Bertrand Sorre, M. Bruno Studer, Mme Agnès Thill, Mme Sylvie Tolmont, Mme Souad Zitouni

Excusés. – M. Pascal Bois, M. Bernard Brochand, Mme Jacqueline Dubois, M. Luc Geismar, Mme Annie Genevard, Mme Karine Lebon, Mme Josette Manin, M. Benoit Potterie, Mme Cathy Racon-Bouzon, M. Patrick Vignal

Assistait également à la réunion.  Mme Michèle Victory