Compte rendu

Commission
des affaires sociales

– Projet de loi de finances pour 2022 (n° 4482) (seconde partie) :

 Audition de Mme Élisabeth Borne, ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion 2

 Examen et vote sur les crédits de la mission Travail et emploi (M. Bernard Perrut, rapporteur pour avis) 27

 Présences en réunion.................................32

 

 

 

 


Mardi
26 octobre 2021

Séance de 18 heures

Compte rendu n° 10

session ordinaire de 2021-2022

Présidence de
Mme Fadila Khattabi,
Présidente
 


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COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mardi 26 octobre 2021

La séance est ouverte à dix-huit heures.

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La commission procède à l’audition de Mme Élisabeth Borne, ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion, sur la mission Travail et emploi du projet de loi de finances pour 2022.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Après le vote solennel du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2022, nous poursuivons nos travaux sur le projet de loi de finances (PLF) pour 2022. Après les crédits consacrés au logement la semaine dernière, nous en venons à la mission Travail et emploi.

Mme Élisabeth Borne, ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion. Il y a un an, le budget de mon ministère était déjà d’une ampleur exceptionnelle, à la hauteur de la crise qui s’abattait sur le pays. Les montants considérables que vous avez votés ont été employés utilement.

La conjoncture économique prouve l’efficacité du plan de relance que nous avons mis en place : notre économie connaît depuis la rentrée une reprise vigoureuse qui montre que nos choix ont été les bons.

La France a connu au troisième trimestre 2021 2,5 millions d’embauches en contrat à durée déterminée (CDD) de plus d’un mois et, pour moitié, en contrat à durée indéterminée (CDI) : c’est un record historique, puisqu’un tel niveau n’avait plus été atteint depuis vingt et un ans. L’emploi est désormais supérieur à ce qu’il était en 2019. Le chômage est d’ores et déjà revenu à son niveau d’avant la crise sanitaire et devrait même, selon les projections de l’INSEE, retrouver le niveau d’avant la crise de 2008-2009 dès le troisième trimestre.

Depuis le début du quinquennat, nous avons tout fait pour encourager le travail : c’est le sens de la réforme de l’assurance-chômage dont le dernier volet est entré en vigueur le 1er octobre dernier.

Nous avons eu raison de faire le choix de la protection des emplois et de l’adaptation des compétences. Le « quoi qu’il en coûte » était une politique responsable, la seule qui pouvait nous épargner une hausse massive du chômage telle que nous l’avions connue après la crise de 2008-2009. Je salue d’ailleurs l’engagement des agents du ministère et de ses opérateurs fortement mobilisés depuis un an et demi.

Notre budget pour 2022 entend conforter la reprise et investir dans les compétences nécessaires à l’avenir du pays.

Il poursuit plusieurs objectifs : accompagner le redémarrage de l’économie en répondant aux difficultés propres à chaque secteur, donner une place à chacun sur le marché du travail pour que la relance soit vraiment inclusive et préparer les compétences de demain pour conforter la place de la France dans l’économie mondiale.

Il a un fil rouge : permettre à chacun de s’émanciper par son travail en se formant à chaque étape de sa vie.

Au total, 16,6 milliards d’euros sont consacrés aux politiques de l’emploi et de la formation. Ces crédits sont répartis entre un budget socle de 13,4 milliards d’euros qui pérennise l’augmentation de l’année passée, et un budget relance de 2,7 milliards d’euros pour poursuivre ce nouvel élan. Nous disposons en complément de 500 millions d’euros supplémentaires pour financer l’effort de relance au titre de nos actions socle.

Tout d’abord, le budget 2022 met fin au « quoi qu’il en coûte » au profit de dispositifs sur mesure visant à accompagner des secteurs durablement fragilisés.

L’activité partielle aura été un véritable amortisseur de la crise. Elle a pris intégralement en charge le coût pour l’entreprise, entre les mois de mars et de juin 2021, avec près de neuf millions de salariés protégés au plus fort de la crise. Au total, ce sont près de 35 milliards d’euros qui ont été mobilisés. Nous n’avons cessé d’adapter cet outil à toutes les situations concrètes auxquelles notre pays a dû faire face.

L’activité partielle a ainsi pris en compte les secteurs les plus impactés tels que le tourisme, la culture, le transport aérien, les hôtels cafés-restaurants, les territoires les plus touchés, notamment lorsque des confinements géographiques ont été mis en place, et même certaines fermetures spécifiques telles que les stations de montagne.

Au fur et à mesure, la prise en charge a évolué en se recentrant sur l’activité partielle de longue durée pour accompagner les secteurs qui peinent à redémarrer. Grâce à la reprise, seuls 480 000 salariés avaient encore besoin d’être protégés en août 2021, pour un coût de 250 millions d’euros.

La baisse des dépenses d’activité partielle en 2021, puis dans le budget 2022, montre clairement que la reprise a profité à tous les secteurs. Elle est particulièrement marquée dans l’hébergement, la restauration, les transports et la fabrication de produits industriels. Jusqu’à fin décembre, les secteurs les plus touchés resteront pris en charge intégralement, notamment en cas de fermeture ou de baisse de plus de 80 % de leur chiffre d’affaires.

Le projet de loi de finances pour 2022 prolonge notre ambition pour la jeunesse en capitalisant sur le succès du plan « 1 jeune, 1 solution ». Avec 9 milliards d’euros déployés en 2020 et en 2021, il a indéniablement porté ses fruits : le taux d’emploi des jeunes est revenu à son niveau d’avant-crise, et les embauches connaissent un point haut depuis le mois de mai.

Surtout, plus de trois millions de jeunes ont trouvé leur solution : un emploi, un apprentissage, une formation ou un parcours d’insertion. En 2022, nous souhaitons poursuivre cette mobilisation pour l’emploi des jeunes. Le PLF consacre ainsi plus de 4 milliards d’euros à la poursuite des dispositifs du même plan, que ce soit au titre de l’accompagnement vers l’emploi, des formations qualifiantes ou des aides à l’alternance.

Malgré ces bons résultats, chacun peut constater que l’accès au premier emploi reste pour trop de jeunes un véritable parcours du combattant. Des centaines de milliers de jeunes éloignés de l’emploi ne seront en outre pas capables de retrouver un emploi sans accompagnement intensif.

Aujourd’hui, alors que la situation économique s’améliore, nous devons mener une politique d’accompagnement de qualité et bâtir un accompagnement personnalisé qui mobilise les dispositifs qui ont fait leurs preuves, le tout assorti d’une allocation pour celles et ceux qui en ont besoin. Il s’agira d’un contrat d’engagement exigeant, reposant sur des engagements réciproques, avec l’objectif d’encourager l’insertion professionnelle des jeunes dans les entreprises et l’activité.

Nous devons par ailleurs redoubler d’efforts pour aller vers les jeunes très éloignés de l’emploi qui ont le plus besoin d’être accompagnés : ils connaissent parfois des problèmes de santé ou d’accès au logement.

Les contours de cette réforme, esquissés dans l’allocution du Président de la République du 12 juillet dernier, sont en cours de finalisation. Notre projet est de bâtir une société qui encourage l’émancipation et facilite l’accès à l’autonomie grâce au travail.

Plus largement, ce PLF renforce tous les dispositifs d’insertion destinés aux publics les plus vulnérables. Avec Brigitte Klinkert, nous sommes pleinement engagées pour faire de l’insertion un levier de cohésion sociale et territoriale.

Le projet de loi de finances doit permettre d’atteindre les objectifs ambitieux de la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté fixés en 2018 par le Président de la République. Les structures d’insertion par l’activité économique bénéficieront ainsi de 1,3 milliard d’euros, soit une augmentation de 150 millions d’euros par rapport à 2021. Ces nouveaux moyens doivent permettre d’accompagner 240 000 personnes en 2022. Les entreprises adaptées recevront quant à elles 425 millions d’euros d’aides au poste. L’objectif est d’accompagner 50 000 personnes en situation de handicap en 2022.

Par ailleurs, nous finançons l’élargissement de l’expérimentation « Territoires zéro chômeur » (TZC) telle que prévue par la loi du 14 décembre 2020. Un budget de plus de 33 millions d’euros y sera consacré en 2022 après 28 millions d’euros cette année.

Enfin, pour répondre à la question de l’emploi dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV), un nouveau budget de 387 millions d’euros permettra la montée en charge des emplois francs dédiés aux demandeurs d’emploi de ces quartiers.

En parallèle, le budget 2022 poursuit des investissements sans précédent dans la formation et les compétences des actifs, qu’ils soient salariés ou demandeurs d’emploi. Ils visent à aider nos entreprises à se préparer à la transformation des métiers sous l’effet des transitions numérique et écologique et à répondre aux tensions actuelles de recrutement.

Tout d’abord, le plan d’investissement dans les compétences (PIC) bénéficiera d’un nouvel engagement de 3 milliards d’euros, ce qui porte le montant global engagé sur l’ensemble du quinquennat à 13,6 milliards d’euros. Cela permettra d’atteindre la cible de deux millions d’entrées en formation financées par le PIC sur l’ensemble du quinquennat. Notre objectif est de rehausser le niveau de qualification des jeunes et des demandeurs d’emploi pour favoriser leur insertion sur le marché du travail.

Le Premier ministre a par ailleurs annoncé le 27 septembre dernier un nouveau plan de 1,4 milliard d’euros visant à réduire les tensions de recrutement dans certains secteurs. Le texte initial n’intègre pas ces annonces. Nous souhaitons agir au plus vite : c’est la raison pour laquelle des crédits seront prévus dès le projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2021. Ils seront complétés par un amendement au PLF 2022 que le Gouvernement présentera en séance.

Ce plan se décompose en deux volets : 600 millions d’euros pour renforcer la montée en compétences et les reconversions des salariés en finançant 350 000 entrées en formation en 2021-2022, et 800 millions d’euros pour amplifier l’effort de formation des demandeurs d’emploi en ouvrant environ 100 000 places supplémentaires sur la même période.

Avec ce nouveau plan, nous voulons donner aux actifs la maîtrise de leur parcours. D’une part nous facilitons les transitions professionnelles des salariés pour leur permettre de se réorienter vers des métiers porteurs, et d’autre part nous maximisons le recours aux formations en situation de travail pour les demandeurs d’emploi.

Nous incitons aussi fortement les entreprises à embaucher en contrat de professionnalisation les demandeurs d’emploi de longue durée, car si nous avons retrouvé le taux de chômage d’avant-crise, le chômage de longue durée persiste quant à lui à un niveau élevé.

Ce faisant, nous rendons nos entreprises plus compétitives en les dotant des compétences nécessaires aux métiers aujourd’hui en tension et aux emplois qui feront l’économie de demain. Je compte donc beaucoup sur les futurs avenants aux Pactes régionaux d’investissement dans les compétences (PRIC). Nous devons orienter ces crédits vers les formations répondant aux besoins des entreprises ainsi que je l’ai indiqué au dernier congrès de Régions de France.

Enfin, avec ce budget nous nous donnons collectivement les moyens de nos ambitions. Tout d’abord, pour la première fois depuis dix ans, il est prévu une hausse du plafond d’emplois du ministère. Ces nouveaux effectifs viendront notamment renforcer les services déconcentrés dans la mise en œuvre d’un plan de contrôle du recours à l’activité partielle. Ils déploieront également le nouveau réseau des délégués à l’accompagnement des reconversions professionnelles qui auront un rôle de conseil et de soutien au tissu économique local. Ils aideront notamment les chefs d’entreprise à mobiliser les dispositifs destinés à maintenir les salariés dans l’emploi et à conserver les compétences.

Ensuite, l’État assure le bon financement de Pôle emploi pour que l’opérateur ne subisse pas les conséquences des pertes de recettes engendrées par la crise : la subvention socle est complétée par une subvention exceptionnelle de 175 millions d’euros sur la mission Plan de relance. S’y ajoute un nouveau financement européen de 463 millions qui permettra notamment de recruter 1 300 conseillers dédiés à l’accompagnement intensif des jeunes. Enfin, les missions locales verront à nouveau leur budget conforté, à hauteur de 596 millions d’euros au total en 2022. Elles avaient déjà bénéficié d’une enveloppe historique en 2021.

Vous l’aurez compris, nous sommes déterminés à tout faire pour encourager la reprise économique de notre pays, à accompagner la dynamique des embauches et à faire sorte qu’elle bénéficie à tous les Français. C’est en renforçant nos efforts auprès des plus fragiles et en travaillant main dans la main avec les collectivités territoriales, les partenaires sociaux, les branches professionnelles et les entreprises que nous y arriverons.

Ce nouveau budget de relance et d’investissement doit permettre à chacun d’augmenter ses chances de s’insérer et de se maintenir durablement dans l’emploi et à notre pays d’être plus compétitif sur la scène internationale.

M. Bernard Perrut, rapporteur pour avis des crédits de la mission Travail et emploi. La discussion du PLF 2022 intervient dans un contexte bien différent de celui de l’année dernière, puisqu’il est bâti sur une prévision de croissance de plus de 6 %, alors que nous évoquions en 2021 une contraction du PIB de 9 %.

Sur le front de l’emploi, les chiffres sont encourageants. Alors que l’Unédic estimait l’an dernier que 300 000 emplois salariés pourraient être créés en 2021, en réalité près de 450 000 l’ont été au premier semestre, et environ 75 000 devraient l’être au second, ce qui portera à près de 220 000 le nombre de créations nettes d’emplois entre fin 2019 et fin 2021.

Ces bonnes nouvelles ne doivent cependant pas conduire le Gouvernement à relâcher l’effort. Bien au contraire.

Le budget 2022 s’inscrit, pour la mission Travail et emploi, dans une certaine continuité par rapport au budget 2021. Au passage, madame la ministre, je regrette le retard avec lequel le Gouvernement a répondu aux questions que j’ai posées au début de l’été : une telle pratique n’a pas facilité le travail sur les crédits en question.

Les autorisations d’engagement (AE) du programme 102 Accès et retour à l’emploi augmentent assez significativement, avec une hausse de 11 % par rapport à 2021, et atteignent 7,5 milliards d’euros, tandis que les crédits de paiement (CP) connaissent une hausse de 8 % et atteignent 7,2 milliards d’euros. Cette hausse s’explique pour moitié par la pérennisation des contrats aidés, dispositif qui avait été supprimé en début de mandat.

Je salue le soutien au secteur de l’insertion par l’activité économique (IAE) : 127 330 ETP seront financés afin que soit atteint l’objectif de 240 000 personnes en 2022.

Je note également l’augmentation des crédits dédiés aux missions locales chargées de la mise en œuvre du Parcours d’accompagnement contractualisé vers l’emploi et l’autonomie (PACEA) et de la garantie jeunes, sa modalité la plus intensive. En 2022 comme en 2021, elle pourra ainsi accompagner 200 000 nouveaux jeunes. L’objectif pour 2021 pourra-t-il cependant être effectivement tenu ?

Concernant les moyens de Pôle emploi, je regrette que des engagements de l’État au sein de la mission Travail et emploi, à hauteur de 85 millions d’euros en 2022, après 86 millions d’euros en 2021, n’aient pas été tenus. Il est vrai que dans le même temps il lui est accordé, au travers de la mission Plan de relance, 175 millions d’euros en raison de la baisse du financement de l’Unédic. Malheureusement, cette rallonge n’est pas pérenne : qu’en sera-t-il à l’avenir ?

Les crédits du programme 103 Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi ont pour objectifs d’anticiper et d’accompagner les conséquences des mutations économiques sur l’emploi, de prévenir le licenciement et le reclassement des salariés. Ils visent à améliorer la reconnaissance des compétences et des qualifications à travers le déploiement du plan d’investissement dans les compétences (PIC).

Je salue la priorité accordée au développement de l’emploi des TPE et des PME grâce à une hausse substantielle des crédits correspondants. Pouvez-vous cependant préciser le soutien apporté à ce PIC dont les crédits baissent substantiellement – près de 600 millions au titre de ce même programme 103 ? Encore une fois, le plan de relance n’est pas pérenne.

Les crédits du programme 111 Amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail diminuent de 61,5 % en AE et augmentent de 4,2 % en CP, ce qui n’est dû qu’à la création d’une nouvelle action, Renforcement de la prévention en santé au travail, dotée de 11,8 millions d’euros de crédits, sans quoi les CP auraient baissé de plus de 9 %. Comment seront utilisés les crédits de cette action créée pour accompagner la récente réforme de la santé au travail ?

Les crédits du programme 155 Conception, gestion et évaluation des politiques de l’emploi et du travail sont inscrits au titre de la communication, du support informatique, des études et statistiques, du contentieux et de la gestion des ressources humaines. Les dépenses de personnel ont augmenté de 11 millions d’euros, ce qui s’explique en partie par la mobilisation des agents du ministère notamment pendant la crise sanitaire. Hormis ces dépenses, 5,5 millions d’euros supplémentaires ont été ouverts afin d’accélérer la modernisation numérique du ministère.

Comme l’an dernier, les crédits ouverts au titre de la mission Travail et emploi ne reflètent pas l’intégralité des dépenses budgétaires en faveur de l’emploi et de la formation professionnelle. En effet, la mission Plan de relance participe à l’effort global en la matière, à hauteur de 3,5 milliards d’euros, soit nettement moins que l’an dernier, cette évolution s’expliquant par le changement de contexte économique.

J’ai choisi de consacrer la partie thématique de mon rapport à deux dispositifs considérés comme des piliers des politiques d’accompagnement des jeunes vers l’emploi : la garantie jeunes et l’apprentissage.

La première, qui a vu le jour en 2013 sous la forme d’une expérimentation et qui a été généralisée à compter du 1er janvier 2017, s’adresse aux jeunes de 16 à 25 ans. Le dispositif, mis en œuvre par les missions locales, repose à la fois sur un accompagnement intensif, sur le plan individuel et collectif, et sur la pluralité des mises en situation professionnelle.

Il donne droit à une allocation, dont le montant équivaut à celui du revenu de solidarité active (RSA), déduction faite notamment du forfait logement, et qui est cumulable avec des ressources d’activité si celles-ci ne dépassent pas 300 euros par mois. Elle s’élève mensuellement au maximum à 497,50 euros, et en moyenne à 375 euros.

Depuis son lancement, la garantie jeunes produit des résultats encourageants, et il faut s’en féliciter. Dans le détail, environ un tiers des bénéficiaires en sort avec un « accès à l’autonomie avec situation active », c’est-à-dire qu’ils occupent un emploi ou qu’ils suivent une formation qualifiante ou certifiante. Et 41 % en sortent avec « un accès à l’autonomie sans situation active », c’est-à-dire ni en emploi ni en formation mais qu’ils ont passé au moins quatre-vingts jours en emploi ou en immersion en entreprise au cours de l’accompagnement.

Ce bon dispositif est donc perfectible. C’est pourquoi je formule dans le rapport quelques propositions afin de l’améliorer.

Il faut d’abord renforcer la lutte contre le phénomène de non-recours avec la systématisation de l’orientation du public concerné, par tous les acteurs – de la veille sociale, de l’hébergement ou de l’insertion – et l’amélioration de l’information des jeunes.

Il faut également renforcer encore les initiatives pour repérer les jeunes que l’on qualifie volontiers d’invisibles. Pouvez-vous nous donner quelques détails sur les actions qui seront conduites dans ce domaine en 2022 ?

Il faut veiller à mieux accompagner les jeunes dans l’accomplissement des démarches administratives préalables à l’entrée en garantie jeunes qui sont souvent un frein à l’entrée dans le dispositif.

Je pense enfin qu’il faut étendre le bénéfice de cette garantie à un public plus nombreux.

J’ai suivi avec beaucoup d’attention les annonces faites au sujet de l’instauration d’un éventuel revenu d’engagement, rebaptisé contrat d’engagement, hélas, très flou. Nous ne disposons en fait d’aucune information concrète sur le dispositif, encore moins sur son articulation avec ceux qui existent déjà. Sur une question aussi majeure, les parlementaires devraient être informés suffisamment tôt pour pouvoir faire correctement leur travail.

Pouvez-vous nous donner des éléments d’information concrets sur ce nouveau dispositif, notamment sur les critères qui seront établis pour pouvoir en bénéficier, et nous indiquer comment il s’articulera avec la garantie jeunes et avec les autres dispositifs existants ? Quel sera le montant de ces crédits ? 2 milliards prévus initialement ? 500 millions ? Comment sera-t-il introduit ? Par voie d’amendement ?

Il est impératif que les jeunes qui bénéficieront du futur dispositif soient tenus, en contrepartie de l’accompagnement qui leur sera proposé et de l’aide qui leur sera versée, de respecter un certain nombre d’engagements clairement définis. Le but ne peut être seulement de faire baisser le chômage artificiellement : il faut les accompagner vers l’emploi.

N’y a-t-il pas trop de dispositifs d’accompagnement ? « Il faudrait simplifier », me disait récemment une directrice de mission locale, qui évoquait aussi « le besoin d’une meilleure coopération avec Pôle emploi qui lui aussi a en charge des jeunes » !

Concernant l’apprentissage, l’objectif emblématique des 500 000 apprentis par an est enfin atteint et ce chiffre historique est d’ailleurs en passe d’être à nouveau battu en 2021. Nous le savons, l’apprentissage est devenu une voie privilégiée pour l’insertion professionnelle des jeunes et attire, depuis quelques années, un nombre croissant de diplômés du supérieur, ce qui est une bonne chose pour la réputation de ce type de formation mais ne doit pas nous détourner de son objectif premier : l’insertion des jeunes les plus en difficulté.

Si la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel du 5 septembre 2018 a un rôle dans l’évolution de ce dispositif, je m’interroge – comme bien d’autres – sur les effets des aides exceptionnelles déployées depuis le début de la crise. L’association Régions de France parle de chiffres trompeurs. Dans quelle mesure le succès de l’apprentissage est-il lié à ce financement exceptionnel ?

Je me fais également le relais des préoccupations qu’un tel succès implique pour le déficit de France compétences, estimé à 3 milliards d’euros, les dépenses liées à l’apprentissage pesant pour près d’1 milliard dans ce déficit. Si je n’occulte pas l’effet de la crise, qui a considérablement réduit la masse salariale des entreprises sur laquelle repose une partie des ressources de l’apprentissage, je m’interroge quant au caractère structurel de ce déficit et surtout quant aux solutions à mettre en œuvre pour le résorber durablement. Quelle est votre vision, madame la ministre ?

Grâce à l’aide exceptionnelle de 5 000 euros pour un apprenti mineur et de 8 000 euros pour un apprenti majeur, les entreprises peuvent aujourd’hui avoir recours facilement à l’apprentissage. Vous avez reporté l’échéance de ces aides exceptionnelles jusqu’à fin mars 2021 puis au 30 juin 2022. Mais qu’adviendra-t-il demain lorsqu’elles s’éteindront ? Qu’envisagez-vous pour soutenir durablement l’essor de l’apprentissage ?

En conclusion, les crédits de la mission Travail et emploi pour 2022 sont de nature à favoriser la sortie progressive de la crise mais je regrette qu’ils ne permettent pas, à ce stade, de refléter les ambitions nécessaires à plus long terme en matière d’emploi, et plus spécialement pour les jeunes, quand leur taux de chômage est de 19,8 %, contre 8 % en moyenne pour l’ensemble des actifs.

De nombreux Français sont toujours très éloignés de l’emploi : ne faut-il pas craindre que la fin du « quoi qu’il en coûte » ait un effet sur les entreprises, et donc sur la création d’emplois ?

Enfin, quid de la volonté de cogouvernance des régions pour le retour à l’emploi ? Ainsi, la région Auvergne Rhône-Alpes vient de lancer un plan de retour au travail avec trois objectifs : identifier les offres d’emploi, promouvoir les secteurs en tension et former aux métiers qui recrutent. Ne faudrait-il pas aller plus loin dans une coopération plus forte entre chacune de nos régions, notre organisation territoriale de Pôle emploi et tous les acteurs économiques ?

M. Dominique Da Silva (LaREM). Cette mission Travail et emploi revêt une importance particulière puisqu’il s’agit du dernier budget de la législature. C’est l’occasion de l’analyser en profondeur à la lumière des engagements du quinquennat.

Si l’année 2022 verra des dispositifs de soutien maintenus, voire renforcés, en réponse aux conséquences de la crise sanitaire, elle confirme bien, comme l’année en cours, la transformation de notre modèle économique et social dans la continuité des réformes engagées dès 2017, voulues par le Président de la République, portées par le Gouvernement et votées par les parlementaires de notre majorité ainsi que par bien d’autres.

Nous n’avons eu de cesse de multiplier les dispositifs visant à aider, face à des crises exceptionnelles, et au cas par cas, l’ensemble des Français actifs, en emploi ou non, d’abord en investissant massivement dans les compétences et dans l’apprentissage. C’est sans doute la mère des réformes de la mission, avec un PIC de près de 14 milliards d’euros qui tiendra sa promesse de voir deux millions de demandeurs d’emploi et de jeunes sans qualification formés.

Je souligne l’effort sans précédent – que vous avez poursuivi, madame la ministre, dès votre arrivée au ministère du travail en juillet 2020 – en faveur des jeunes dans le cadre du plan « 1 jeune, 1 solution ». Avec l’aide unique à l’apprentissage prolongée jusqu’au 30 juin 2022, 525 000 contrats auront été signés au cours de la seule année 2020 malgré des conditions économiques dégradées par la crise sanitaire : c’est presque deux fois plus qu’en 2016.

Pour notre jeunesse, il y a aussi la montée en charge de beaucoup d’autres dispositifs : la garantie jeunes, portée à 690 millions d’euros en 2022, soit 200 000 entrées supplémentaires, le contrat initiative emploi (CIE), avec 10 000 jeunes accompagnés cette année et 45 000 en 2022, les écoles de la deuxième chance, avec 12 000 places en 2018 et 15 500 en 2022. Soulignons encore l’inauguration d’un vingtième EPIDE (Établissement pour l’insertion dans l’emploi) dès le mois de janvier prochain, et d’un vingt-et-unième au cours de l’année. Lors de ma visite de l’EPIDE de Margny-lès-Compiègne, dans l’Oise, j’ai été impressionné par la qualité de l’encadrement. Ces internats offrent véritablement une chance d’insertion à ces jeunes volontaires en très grande difficulté sociale. J’y vois une vraie solution éducative et professionnelle à promouvoir.

Les autres publics éloignés de l’emploi ne sont pas en reste : nous misons sur des parcours individualisés et sur un accompagnement au cas par cas. Avec les dispositifs du fonds d’inclusion dans l’emploi en faveur des personnes les plus éloignées du marché du travail, nous avons depuis 2018 atteint l’objectif de 100 000 PEC supplémentaires par an.

Concernant l’IAE, 127 300 équivalents temps plein (ETP) seront financés en 2022, ce qui permettra d’atteindre l’objectif de 240 000 salariés fin 2022.

Il ne faut pas oublier l’extension du dispositif « Territoires zéro chômeur » à cinquante nouveaux territoires ni le succès de la généralisation des emplois francs à l’ensemble des QPV, avec l’objectif de 36 000 contrats en 2022, soit presque autant que l’objectif triennal de l’expérimentation entre 2018 et 2020.

Le retour à l’activité des personnes les plus fragiles, notamment dans les territoires les plus en difficulté, demeure une priorité. Je salue donc le renforcement de notre politique au travers du plan gouvernemental de réduction des tensions qui est doté de 1,4 milliard d’euros pour 2021 et 2022 qui vise à répondre aux besoins immédiats des entreprises en orientant des salariés et des demandeurs d’emploi vers les métiers les plus demandés.

Sur ce point, il est nécessaire d’identifier au mieux les compétences des demandeurs d’emploi, en accord avec leurs souhaits mais aussi avec les possibilités d’emploi dans leur bassin de recherche.

Le projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE) a été conçu à cette fin, mais force est de constater qu’il ne remplit pas pleinement son objectif : Pôle emploi reconnaît que persiste un décalage entre les compétences inscrites dans le PPAE et celles qui sont mentionnées par les demandeurs d’emploi dans le cadre de leur recherche. Au-delà des statistiques, qui peuvent être trompeuses, l’offre raisonnable d’emploi qui y est rattachée est, dans les faits, impraticable. Pour remédier à ce problème et faciliter les transitions professionnelles, je crois beaucoup aux formations courtes au poste de travail.

Je souhaiterais, madame la ministre, vous entendre sur le parcours à Pôle emploi dans le cadre du PPAE et sur la manière dont on pourrait rapprocher l’offre de la demande de manière plus effective.

M. Gérard Cherpion (LR). Pour la première fois depuis 2019, le budget de la mission Travail et emploi – au sens strict, c’est-à-dire sans les crédits du plan de relance – est en baisse.

Ainsi, les crédits alloués à Pôle emploi baissent de 85 millions d’euros ; la diminution est analogue à celle que l’on observe dans chaque projet de loi de finances depuis plusieurs années.

France compétences se voit doter, et je m’en réjouis, de neuf emplois supplémentaires, leur nombre étant porté de 77 à 86. Cette évolution traduit, certes, une montée en puissance de cet organisme, mais celui-ci doit être maîtrisé. Or sa gouvernance et son déficit, qui pourrait atteindre 4 milliards d’euros l’an prochain, sont problématiques ; j’y reviendrai.

En ce qui concerne les jeunes et les contrats aidés, je rappellerai les propos que tenait le Premier ministre en 2017 : « Le précédent gouvernement prévoyait 280 000 emplois, mais 70 % ont été attribués dans les quatre premiers mois de 2017. On sait pourquoi », indiquait-il en faisant allusion à la campagne électorale. « Ces contrats, poursuivait-il, sont en réalité des contrats précaires, subventionnés par l’État, donc le contribuable. Ils constituent une aubaine pour les employeurs. Dans le secteur marchand, seuls 25 % des contrats aidés débouchent ensuite sur un emploi et seulement 57 % à 60 % dans le secteur non marchand ». Voilà ce que déclarait le Premier ministre avant de supprimer ce type de contrats aidés.

Quant à l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), elle perd, là encore, environ 200 emplois.

S’agissant du handicap, on relève une ligne unique de 425 millions d’euros et un objectif de 32 000 ETP, dont 5 000 sont des contrats à durée déterminée (CDD) tremplins.

Par ailleurs, on constate une très forte hausse de l’apprentissage, ce dont on ne peut que se réjouir. Toutefois, la part des apprentis suivant une formation pré-bac diminue : elle n’est plus que de 40 %. Or le financement des 60 % restants, qui suivent une formation post-bac, relève, non pas de l’université, c’est-à-dire de l’État, comme c’est le cas pour la voie générale, mais de l’apprentissage ; il contribue donc indirectement à grever les comptes de France compétences, à hauteur de 1 milliard.

J’en viens à mes questions. La lutte contre le travail illégal a été transférée du programme 103 vers le programme 155, mais le montant correspondant aux différentes lignes de ces deux programmes est nul. Où se trouve le budget consacré à cette politique ?

L’activité partielle est une bonne mesure, qui a été nécessaire durant la crise. Mais elle est financée, non pas par le budget de la mission, dans laquelle aucun crédit n’est inscrit à cet effet, mais par le plan de relance, lequel a vocation à s’éteindre rapidement ; il en est de même pour le Fonds national de l’emploi, le FNE.

Enfin, j’ai identifié une ligne dans laquelle est mentionné le contrat de sécurisation professionnelle (CSP), mais n’y figure qu’un échéancier de l’ouverture des crédits de paiement et des autorisations de programme. Quel est l’avenir du CSP, selon le Gouvernement ?

Mme Michèle de Vaucouleurs (Dem). Alors que nous examinons pour la dernière fois au cours de la législature les crédits de la mission Travail et emploi, je souhaite saluer, au nom du groupe Mouvement démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés, la cohérence des orientations prises dans le domaine de l’emploi depuis le début du quinquennat.

Redonner toute sa place au dialogue social, favoriser l’inclusion des personnes éloignées de l’emploi, soutenir l’insertion par l’adaptation des qualifications et l’alternance, adapter les règles d’indemnisation du chômage à la situation économique : ces lignes directrices se retrouvent dans les orientations budgétaires de l’année 2022.

Le budget global de la mission enregistre une légère hausse des autorisations d’engagement, dont le montant atteint 14,7 milliards d’euros, contre 14,3 milliards d’euros en 2021. Il se voit par ailleurs majoré de 0,5 milliard d’euros supplémentaires en autorisations d’engagement sur le plan de relance, au bénéfice de la revalorisation de la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle, des dispositifs du plan d’investissement dans les compétences et du soutien complémentaire de l’État à Pôle emploi.

Je veux par ailleurs souligner la résilience du marché de l’emploi, grâce à des mesures exceptionnelles de soutien à l’économie, dont le financement de l’activité partielle. Le taux de chômage est retombé à 7,6 %, hors Mayotte, au troisième trimestre 2021, soit à un niveau inférieur à celui du premier trimestre 2020.

Le programme 102 Accès et au retour à l’emploi est en hausse de 11,12 %. Il s’attache, cette année encore, à améliorer les dispositifs favorisant l’emploi des personnes les plus éloignées du marché du travail, dont les crédits augmentent de 41,29 %. Cet effort budgétaire demeure nécessaire car, à la différence des autres publics cibles, les allocataires du revenu de solidarité active (RSA) et de l’allocation de solidarité spécifique (ASS) n’ont pu bénéficier de l’embellie du marché du travail, leur taux de retour à l’emploi, de 3,6 points en 2019, étant tombé au plus bas en 2021, à 2,6 points. Pour favoriser le retour à l’emploi des publics les plus fragiles, il est nécessaire que le Gouvernement achève sa politique de reconnaissance de l’insertion par l’activité économique (IAE). Aussi défendrai-je des amendements visant à revaloriser l’aide au poste au sein des associations intermédiaires, dont la sous-dotation est manifeste alors que leur capacité à insérer des bénéficiaires du RSA dans l’emploi n’est plus à démontrer.

Le budget renforce par ailleurs l’action des missions locales, dont je salue le travail auprès des jeunes. Le parcours contractualisé d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie (PACEA) et la garantie jeunes sont ainsi confortés comme des outils clés. S’agissant de l’emploi des jeunes, je souhaiterais savoir, madame la ministre, si vous disposez d’informations complémentaires sur l’instauration du revenu d’engagement. Forte du témoignage des missions locales, je défendrai probablement en séance publique un amendement visant à augmenter leurs crédits afin de souligner des besoins d’accompagnement non couverts à ce jour.

Les crédits issus du plan d’investissement dans les compétences (PIC) vont s’amenuisant, ce qui est plutôt logique puisque nous arrivons au terme de la programmation pluriannuelle ; ils s’élèvent ainsi à 576,8 millions d’euros en autorisations d’engagement, sur une programmation initiale de 13,6 milliards d’euros ; j’y reviendrai.

Les crédits du programme 103, qui assure le soutien des entreprises dans la transformation de leur activité et l’accompagnement des compétences, bénéficieront d’une augmentation de 27,33 %, soit 2,2 milliards d’euros. Ces crédits supplémentaires seront dédiés à la qualification et à la reconnaissance des compétences. Le programme participe au déploiement du PIC, à la dynamique confortant le plan « 1 jeune, 1 solution » et la croissance de l’alternance, 520 000 contrats de ce type ayant été signés en 2020.

Enfin, traduisant l’attachement aux solutions qui sont en prise directe avec les besoins propres à chaque territoire, le budget comprend également les crédits alloués au déploiement du service public de l’insertion et de l’emploi (SPIE).

S’agissant du programme 111, consacré à l’amélioration de la qualité des relations de travail, on relève une baisse de 91 millions d’euros des crédits consacrés au dialogue social. Après des années de forte mobilisation en faveur de la réorganisation des instances, 2022 sera une année de bilan des réformes engagées ; elle sera par ailleurs importante pour la mise en œuvre des réformes concernant la santé au travail.

Le programme 155 centralise l’ensemble des emplois support de la mission ; son budget, en légère augmentation, entérine un accroissement du plafond d’emplois de 254 ETP destiné à renforcer l’action des services déconcentrés du ministère, récemment réorganisés autour du réseau des directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités.

Madame la ministre, comme je l’ai indiqué, je solliciterai le Gouvernement en défendant des amendements relatifs notamment aux moyens consacrés à l’accompagnement des personnes éloignées de l’emploi ainsi qu’à l’accompagnement des jeunes. Mais, ce soir, je souhaiterais que vous évoquiez l’utilisation des crédits du PIC tout au long du quinquennat.

En conclusion, le groupe MoDem et démocrates apparentés est très fier du travail qu’au fil de la législature, le Gouvernement a co-construit avec les parlementaires. En cohérence et en confiance, nous voterons les crédits de la mission Travail et emploi.

M. Boris Vallaud (SOC). Alors que la crise liée à la covid-19 a mis en lumière la pauvreté croissante des travailleurs en première ligne, nous sommes appelés à nous prononcer sur les crédits alloués à la politique du travail et de l’emploi, qui sont au cœur des préoccupations des Français. À la lecture du « bleu » budgétaire, nous constatons qu’il est possible de dépenser sans compter et, en même temps, de pratiquer l’injustice sociale tout en affaiblissant les services publics.

De fait, l’augmentation des crédits de la mission Travail et emploi ne permet pas de répondre aux enjeux auxquels sont confrontés nos concitoyens. Si les autorisations d’engagement augmentent de 3 %, vous persévérez néanmoins, de manière coupable, dans la mise en œuvre de votre réforme de l’assurance chômage – adoptée, pour la première fois depuis quarante ans, contre l’avis des partenaires sociaux – tout en nous assurant de votre attachement au dialogue social. Véritable supplice chinois, l’entrée en vigueur progressive de cette réforme continue d’exclure chaque jour davantage de travailleurs précaires, au premier rang desquels les jeunes, de leur droit à une allocation-chômage.

En outre, le décret qui instaure cette réforme prévoit un surcroît de prélèvement d’un point sur le budget de l’Unédic – cette ponction atteindra, en 2022, un cumul de 1,225 milliard d’euros – au bénéfice de Pôle emploi et au détriment des assurés. Ainsi le Gouvernement fait-il payer aux chômeurs eux-mêmes – moins ou pas indemnisés, pour plus d’un million d’entre eux – leur propre accompagnement dans la recherche d’un nouvel emploi alors que, comme tout service public, Pôle emploi devrait être financé par l’impôt.

Or, pendant ce temps, le Gouvernement persévère à se désengager du financement des missions de service public de Pôle emploi. Ainsi, s’agissant des missions de prospection du marché du travail, d’accueil et d’accompagnement des personnes à la recherche d’un emploi, d’une formation ou d’un conseil professionnel, le quinquennat aura en réalité duré quatre ans. En effet, avec un manque à recevoir cumulé de 1,259 milliard d’euros en cinq ans, c’est une année entière de financement des charges de service public qui fait défaut à Pôle emploi au terme de la législature. Le Gouvernement aura donc fait payer trait pour trait aux personnes privées d’emploi son désengagement du financement des missions de service public, en leur faisant les poches, via la ponction opérée sur le budget de l’Unédic.

Tel est le solde de tout compte du quinquennat pour les personnes privées d’emploi. Nous ne vous donnons évidemment pas quitus d’un tel bilan, pas plus que nous ne passons sous silence vos véritables renoncements. Ainsi, derrière la nouvelle promesse faite à la jeunesse d’un revenu d’engagement dont on ne connaît rien et dont nous voyons, chaque semaine, le périmètre se réduire comme peau de chagrin, nous n’oublions pas que vous continuez d’appeler universelle une garantie jeunes qui n’est au mieux accessible qu’à 200 000 jeunes, alors que plus de 600 000 d’entre eux, âgés de 16 à 25 ans, n’ont pas d’emploi et ne suivent ni études ni formation. Alors que la population des jeunes adultes est celle qui a le plus souffert des conséquences économiques et sociales de la crise née de la covid-19, alors que nous les voyons à nouveau grossir les rangs de ceux qui recourent aux banques alimentaires, vous avez refusé toute proposition d’instauration d’un minimum jeunesse, notamment notre proposition d’ouvrir le RSA à 18 ans, ne serait-ce que pour la durée de la crise – deux ans.

C’est pourquoi nous vous proposerons de rendre véritablement universelle la garantie jeunes – seul engagement que vous nous opposez, mais que vous ne tenez pas –, afin que les 600 000 jeunes âgés de 16 à 25 ans dont je parlais à l’instant puissent véritablement en bénéficier. Puisque vous nous avez reproché de ne pas prévoir, dans notre proposition, un accompagnement des bénéficiaires du RSA, je me désole que le service public de l’accompagnement, si souvent annoncé, n’ait pas trouvé le début d’un commencement. Nous reprendrons à notre compte l’avis de janvier dernier dans lequel le Conseil d’orientation des politiques de jeunesse recommande un doublement des moyens dédiés à l’accompagnement dans le cadre de la garantie jeunes, notamment à destination des missions locales. Voilà de quoi donner un tant soit peu de contenu à votre politique en faveur de la jeunesse.

Il va sans dire que les députés socialistes et apparentés ne voteront pas les crédits de la mission Travail et emploi.

M. Paul Christophe (Agir ens). Le PLF 2022 prolonge l’effort financier en faveur de l’emploi et de la formation professionnelle dans le contexte particulier de la relance, à la suite de la crise sanitaire et de ses conséquences économiques délétères. Ces crédits sont particulièrement importants puisqu’ils traduisent l’effort consenti par la société pour ne laisser aucun de ses membres de côté, permettant ainsi à ceux d’entre eux qui sont le plus éloignés du travail de retrouver un emploi, et construire véritablement une société plus inclusive. Il est en effet impératif de ne pas créer une société à deux vitesses dans laquelle une partie de nos concitoyens demeureraient en dehors de l’emploi, privés de toute perspective d’embauche, tandis que les autres seraient mieux insérés dans le modèle économique.

Il est donc primordial de lutter contre les fractures qui favorisent les replis et nuisent considérablement à notre modèle social. C’est par ces crédits spécifiques que nous y contribuons. En accompagnant le rebond de l’économie et de l’emploi, nous susciterons les talents de demain et permettrons à chacun de mettre à profit ses compétences dans un cadre de travail sécurisant et bienveillant.

Madame la ministre, nous nous interrogeons sur le plan d’investissement dans les compétences. En effet, si l’année 2022 est censée correspondre à une année de plein régime pour ce plan, son budget total perd 21 millions d’euros en 2022. Cette baisse, combinée à celle de 5 % des crédits de paiement dédiés au développement de l’emploi, entraîne une diminution de 11,5 % du programme Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi par rapport à 2021. Comment cet ajustement budgétaire s’articule-t-il avec les politiques publiques menées dans ce domaine ?

Nous saluons l’augmentation des crédits alloués au programme 102 Accès et retour à l’emploi, dont la hausse de plus de 11 % par rapport à 2021 permettra de conforter le Fonds d’inclusion dans l’emploi en faveur des personnes les plus éloignées du marché du travail, le plan « 1 jeune, 1 solution », auquel nous sommes particulièrement attachés, et les structures d’insertion par l’activité économique.

Nous nous interrogeons plus spécifiquement sur la coexistence de tensions dans le recrutement et d’un chômage élevé. C’est notamment le cas dans mon territoire, où des métiers moins qualifiés, notamment dans le bâtiment ou l’hôtellerie-restauration, souffrent d’un certain manque d’attractivité alors que les offres d’emploi sont nombreuses, particulièrement après la crise sanitaire. Quel plan le Gouvernement envisage-t-il d’établir pour limiter ces écarts importants et rendre ces professions plus attractives ?

Le groupe Agir ensemble soutiendra la répartition des crédits alloués à la mission Travail et emploi.

Mme Valérie Six (UDI-I). Le projet de loi de finances pour 2022 prolonge les mesures déployées dans le champ de l’emploi et de la formation des jeunes, notamment le plan « 1 jeune, 1 solution », et c’est une bonne chose. L’action du ministère s’appuie sur le service public de l’emploi pour mettre en œuvre ces mesures. Pour atteindre nos objectifs, nous avons également besoin des plans locaux d’insertion et de l’emploi, les PLIE, et des maisons de l’emploi. J’avais déposé un amendement visant à leur donner davantage de moyens, mais il a été déclaré irrecevable. Aussi, j’appelle votre attention sur ce point, madame la ministre.

Par ailleurs, le Premier ministre a annoncé la création d’un revenu d’engagement pour les jeunes de 16 à 25 ans sans emploi ni formation mais aussi pour ceux dont l’emploi est précaire ; ils recevraient environ 500 euros par mois. Se pose la question du financement de ce dispositif, dont le coût est évalué à 500 millions d’euros, et de sa différence avec la garantie jeunes. Enfin, nous devons anticiper les recrutements que les missions locales vont devoir opérer dans le cadre de la mise en œuvre d’un tel dispositif. Le directeur général adjoint de la mission locale de Paris nous rappelle en effet que, pour la garantie jeunes, le taux d’encadrement est d’un conseiller pour 50 jeunes au maximum.

Le projet de loi de finances pour 2022 prévoit une baisse de 1,67 % des crédits de paiement de l’action Amélioration de l’efficacité du service public de l’emploi. Pourtant, la mission de ce dernier est centrale dans le contexte de la sortie de crise. En outre, si le taux de chômage baisse, celui des chômeurs de longue durée augmente. Or les demandeurs d’emploi les plus touchés par le chômage de longue durée sont âgés de plus de 55 ans. Est-il possible de doter Pôle emploi de crédits spécifiques pour financer leur accompagnement ?

Mme Jeanine Dubié (LT). Alors que l’activité économique, très abîmée par la crise sanitaire, repart, les perspectives en matière d’emploi s’améliorent. Néanmoins, le groupe LT regrette de voir les crédits de la mission Travail et emploi diminuer, certes légèrement : ce n’est pas un bon signal dans un contexte de crise économique et de tension sur le marché du travail.

Par ailleurs, nous sommes inquiets de la réforme de l’assurance chômage. Nous continuons à penser que le nouveau mode de calcul, entré en vigueur le 1er octobre, est injuste et dangereux, notamment pour les travailleurs exerçant une activité discontinue, comme les intérimaires et les saisonniers, dont les emplois sont souvent peu qualifiés et rémunérés à hauteur du SMIC. Ainsi, les principales victimes de la réforme seront des travailleurs qui appartiennent plutôt à des catégories fragiles. Je sais que vous ne partagez pas les conclusions de l’Unédic à ce sujet, mais vous devriez les prendre en compte, car elles ne sont pas rassurantes s’agissant de l’allocation d’un grand nombre de bénéficiaires.

Notre groupe s’interroge également sur la répartition des crédits du plan d’investissement dans les compétences ; ce dispositif central depuis le début du quinquennat avait été largement abondé l’an dernier. D’autres crédits sont prévus dans le plan de relance. Pourriez-vous détailler les objectifs visés par le Gouvernement en la matière ?

En 2020, la crise sanitaire a affecté la plupart des dispositifs de formation, dont ceux du projet insertion emploi – PIE –, ainsi que l’accueil physique des stagiaires dans les organismes de formation et dans les centres de formation des apprentis (CFA), dont l’activité a été suspendue à compter du 16 mars 2020. Pouvez-vous nous présenter un bilan rapide des résultats obtenus dans ce domaine en 2021 ?

Nous nous interrogeons par ailleurs sur les moyens et les effectifs de Pôle emploi alors que la subvention de l’État a baissé ces dernières années, et diminue encore en 2022. Dans le même temps, les ressources de Pôle emploi ont été rendues plus dépendantes de la contribution de l’Unédic, donc plus sensibles à la conjoncture économique. Or la situation de l’Unédic est préoccupante : ses comptes pourraient bientôt redevenir excédentaires, mais sa dette a explosé. Face à ces constats, nous doutons que les crédits du plan de relance suffisent à donner à Pôle emploi les moyens de proposer des accompagnements pérennes et renforcés. Pouvez-vous nous rassurer sur ce point ?

Nous sommes également inquiets de l’expérimentation du dispositif Territoires zéro chômeur de longue durée, dont nous avons adopté l’extension et la généralisation. Il est prévu de prendre en compte les spécificités des outre-mer et de la Corse. Or nous avons été alertés sur les difficultés que rencontrent ces territoires pour mettre en œuvre ce dispositif, faute d’un pilotage et d’une gestion adaptés à leurs réalités. Avez-vous l’intention de leur apporter une réponse ?

Je veux insister sur la situation de la formation. Malgré la reprise de l’activité, certains secteurs demeurent confrontés à la menace d’une pénurie de main-d’œuvre, notamment celui de l’hôtellerie-restauration. Deux priorités nous semblent essentielles à cet égard. La première est la soutenabilité financière de France compétences, qui accuse cette année encore un important déficit. Déjà, l’an dernier, notre groupe s’inquiétait des conclusions du rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), qui estimait qu’il manquerait 4,9 milliards d’euros sur la période 2020-2023, donc de la pérennité des dispositifs de l’apprentissage, du compte personnel de formation (CPF) ou du PIC. La seconde priorité est l’accès à la formation des demandeurs d’emploi, qui éprouvent beaucoup de difficultés du fait de l’importance du nombre d’offres et de la multiplicité des interlocuteurs ou des freins financiers. Nous souhaiterions en savoir davantage sur le plan de formation annoncé par le Gouvernement.

Enfin, si les chiffres de l’emploi s’améliorent, le taux de chômage des jeunes reste très élevé, puisque, au deuxième trimestre 2021, il était de 19 % pour les 15-24 ans, contre 8 % pour l’ensemble des actifs. Pourtant, le budget initial ne dit rien d’un dispositif annoncé de longue date dans ce domaine. Trop de temps a été perdu alors que la situation est urgente. Surtout, nous craignons un renoncement, après de premières annonces portant sur une garantie jeunes universelle, puis sur un revenu d’engagement pour les jeunes et enfin sur un contrat d’engagement. Au gré des changements de nom, c’est le périmètre du dispositif qui semble s’être restreint. Un amendement devrait être présenté d’ici à la séance publique à ce sujet, mais nous le disons d’emblée : 500 millions d’euros pour aider 500 000 jeunes ne suffiront pas. Le budget a été divisé par quatre et le public par deux depuis les premières annonces… Pouvez-vous nous en dire plus sur le dispositif proposé pour soutenir l’insertion des jeunes, très affectés par la crise, et pour remédier à leur précarité ?

M. Pierre Dharréville (GDR). Après plusieurs années de réduction massive des crédits affectés à la mission Travail et emploi – à hauteur de 1,5 milliard d’euros en 2018, puis de 2 milliards d’euros en 2019, avant que ces crédits soient stabilisés en 2020 et augmentent faiblement en 2021 –, le PLF 2022 prévoit une hausse anecdotique des financements de 60 millions d’euros à périmètre constant, bien que complétés par les crédits engagés dans le cadre du plan de relance. Néanmoins, le montant des crédits de cette mission demeure inférieur à ce qu’il était dans le PLF 2018. Ce budget socle, c’est-à-dire hors plan de relance, est sans grande ambition et s’inscrit dans la continuité du précédent exercice.

Rappelons que l’année 2022 sera également marquée par la pleine application de la réforme de l’assurance chômage, plusieurs fois reportée grâce aux actions judiciaires des organisations syndicales mais maintenue de manière forcenée par le Gouvernement. Elle entraînera, de manière injuste, des baisses d’allocations pour plus d’un million de chômeurs, le Gouvernement espérant réaliser 2,3 milliards d’euros d’économies sur le dos des personnes précaires.

S’agissant du service public de l’emploi, nous constatons que l’État poursuit son désengagement du financement de Pôle emploi, avec une baisse des subventions de 86 millions d’euros en 2022, qui s’ajoute aux précédentes mesures d’économie : 400 millions d’euros sur le quinquennat. Pôle emploi se verra toutefois attribuer une enveloppe conjoncturelle de 175 millions d’euros dans le cadre du plan de relance, pour répondre aux besoins d’accompagnement des demandeurs d’emploi, notamment de longue durée.

En ce qui concerne le volet consacré à l’accompagnement des jeunes et des travailleurs privés d’emploi, il convient de souligner les volte-face du Gouvernement depuis le début de la législature. Après avoir coupé drastiquement le financement des contrats aidés entre 2018 et 2020, fragilisant ainsi le tissu associatif, il a été conduit par la crise sanitaire à réviser sa politique de soutien à l’emploi, puisque des crédits supplémentaires sont déployés pour couvrir de nouveaux contrats aidés dans le secteur privé et non marchand. On peut également noter la progression des financements dédiés à d’autres dispositifs d’accompagnement : à défaut d’étendre le bénéfice du RSA aux jeunes âgés de 18 à 25 ans, il octroie des crédits supplémentaires à la garantie jeunes, pour atteindre l’objectif de 200 000 jeunes accompagnés. Ce dispositif reste toutefois sous-dimensionné pour apporter à lui seul une réponse aux 800 000 jeunes précaires qui n’ont pas d’emploi et ne suivent ni études ni formation.

L’effort est également notable concernant l’insertion par l’activité économique, dont les crédits progressent de 150 millions d’euros. De même, les emplois francs, qui permettent des embauches aidées dans les quartiers relevant de la politique de la ville, voient leur enveloppe augmenter de 55 millions d’euros. Pourtant, ces hausses ne viennent jamais compenser la division par trois du nombre des contrats aidés intervenue depuis le début du quinquennat.

Enfin, nous prenons acte de la stabilité des moyens accordés aux services de l’administration du travail, après quatre années successives de coupes dans les dépenses de fonctionnement et de réductions des effectifs. À ce propos, madame la ministre, combien de médecins inspecteurs du travail sont-ils actuellement en exercice ? Dans le même ordre d’idées, 196 suppressions de poste sont prévues à l’AFPA, ce qui affaiblit un instrument public essentiel au développement de la formation professionnelle.

En résumé, l’appréciation que nous portons sur le budget de cette mission est, comme les années précédentes, négative. Sur fond de réforme de l’assurance chômage, qui prévoit 2,3 milliards d’euros d’économies sur le dos des chômeurs, ce budget ne permet pas de rattraper trois années d’austérité en matière de politique du travail et de l’emploi.

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, rapporteure spéciale de la commission des finances pour les crédits de la mission Travail et emploi. Face à la crise, le Gouvernement a mobilisé tous les moyens pour que l’emploi, en particulier celui des plus vulnérables, demeure la priorité des priorités. À l’heure de la reprise, il répond présent pour faire de celle-ci une chance pour chaque demandeur d’emploi. Les crédits de la mission Travail et emploi progressent ainsi de 3 % en autorisations d’engagement, pour atteindre 14,74 milliards d’euros. Cela est concret, quoi qu’on en dise, et nous pouvons nous féliciter des efforts consentis sous votre impulsion, madame la ministre.

Je pense aux dispositifs d’insertion par l’activité économique, avec 16 000 aides au poste supplémentaires, aux crédits des contrats aidés, pour financer 5 000 nouvelles entrées en parcours emploi compétence et 45 000 nouvelles entrées en contrat initiative emploi, aux dotations relatives à la garantie jeunes et aux missions locales, pour financer 200 000 nouvelles entrées en garantie jeunes et 80 000 entrées supplémentaires pour le PACEA, à la montée en gamme de l’apprentissage, qui est une véritable réussite, à la suspension de l’effort de résorption de l’emploi public, dont nous avons tant besoin, à l’augmentation significative de moyens dont France compétences et Pôle emploi bénéficient à nouveau cette année – sur ce point, je suis en désaccord avec le rapporteur pour avis – et, enfin, au maintien de notre engagement en faveur du budget de Territoires zéro chômeur de longue durée, qui satisfait les acteurs concernés.

Je vous remercie, madame la ministre, pour la présentation du plan de réduction des tensions de recrutement. Il était nécessaire.

Je tiens à saluer la mise en place de la réforme de l’assurance chômage. Libérer et protéger : c’est ce que nous mettons en pratique depuis le début de notre mandat.

Le dispositif des entreprises d’insertion pour le travail indépendant (EITI) doit expirer à la fin du mois de décembre. Pouvez-vous confirmer que vous déposerez un amendement pour prolonger cette expérimentation ?

Qu’en est-il de la suppression du critère de performance pour l’attribution de crédits complémentaires pour les missions locales – ce mécanisme étant selon moi encore nécessaire cette année – et de la baisse de 5 % pour les aides aux postes des entreprises adaptées ? Cette dernière aide avait été gelée l’an dernier et je pense qu’il faut le faire de nouveau en 2022.

Enfin, comment envisagez-vous la poursuite du PIC ?

M. Thierry Michels. Ma question porte sur l’accompagnement par votre ministère de la transition vers une économie décarbonée, sujet d’actualité avec le rapport « Futurs énergétiques 2050 », remis par le Réseau de transport d’électricité (RTE), et l’ouverture dimanche de la Conférence de Glasgow sur les changements climatiques (COP 26).

À la suite du plan de relance, dans quelle mesure le budget du travail et de l’emploi va-t-il permettre d’assurer le verdissement des emplois grâce à l’effort de formation, en mettant ainsi en œuvre la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets ? Il est indispensable d’accélérer la diffusion des qualifications requises par ces emplois verts, qu’il s’agisse des secteurs de la rénovation énergétique, des énergies renouvelables ou de la transformation des processus industriels.

Cet enjeu nécessite par ailleurs d’améliorer l’orientation dès le collège, au moment où les jeunes choisissent leur avenir. Malgré le succès du développement de l’apprentissage, les métiers techniques continuent de souffrir d’une image dégradée, alors qu’ils apportent une véritable qualification et des rémunérations attrayantes. Quel rôle peut jouer votre ministère dans l’orientation, en lien avec les différentes parties prenantes ? Je pense notamment à l’articulation nécessaire des dispositifs cités éducatives et cités de l’emploi dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, comme celui de Hautepierre à Strasbourg.

Mme Véronique Hammerer. Les formations en apprentissage souffraient d’un délaissement – en raison d’un manque de visibilité et de conceptions erronées – qui a été mis en lumière au début de cette législature.

Il s’agissait donc de simplifier l’accès à la formation, tant pour les apprentis que pour les employeurs. Il fallait une véritable révolution de la formation en apprentissage. Avec le transfert de cette mission des régions à l’État, la création de France compétences et le plan « 1 jeune, 1 solution », on observe d’ores et déjà une augmentation considérable du nombre de nouveaux contrats.

Néanmoins, cette politique volontariste et nécessaire est également associée au déficit de France compétences, dont la dette atteint aujourd’hui près de 2 milliards d’euros. Pourriez-vous nous rassurer sur la pérennité du dispositif ? Cette dette aura-t-elle des conséquences sur les centres de formation et d’apprentissage, notamment en ce qui concerne leur rénovation ?

Mme Catherine Fabre. À l’occasion de cette sortie de crise, la reprise économique est très forte, et avec elle celle de l’emploi. Ce résultat est largement dû au plan de protection massif qui a été déployé pendant la crise et qui démontre toute sa puissance. Je me réjouis également de la réactivité du Gouvernement dans l’accompagnement de cette reprise, notamment avec le nouveau plan de réduction des tensions de recrutement doté de 1,4 milliard d’euros, que vous avez annoncé avec le Premier ministre. Nous rencontrons tous les jours dans nos circonscriptions des employeurs qui peinent à recruter, dans des métiers très variés. Il est essentiel que ce plan soit déployé rapidement, afin de financer des formations dans les secteurs où les besoins sont les plus grands.

Quand et comment sera-t-il financé, selon quelles modalités et comment s’assurer qu’il répondra rapidement aux besoins réels ?

Mme Isabelle Valentin. Le nombre d’allocataires du RSA a considérablement augmenté depuis la crise sanitaire. Quelles sont les politiques publiques qui pourraient être menées en partenariat avec les départements pour favoriser le retour durable à l’emploi et réduire les tensions de recrutement par bassin d’emploi ?

Les certificats de qualification professionnelle (CQP) constituent une solution rapide, correspondant aux besoins réels des entreprises. Envisagez-vous de les développer ?

Accéder à la formation est essentiel non seulement pour la modernisation du marché du travail, mais aussi pour répondre aux besoins croissants de reconversion professionnelle, dans un marché du travail en perpétuelle évolution. Le CPF est un outil important. Or beaucoup de personnes titulaires de droits inscrits sur leur CPF n’y ont pas recours. En 2019, 15 % des Français ont déclaré n’avoir jamais entendu parler du CPF et 52 % n’avoir aucune information sur son utilisation. Comment sensibiliser les trois quarts des salariés qui n’ont pas converti leur droit individuel de formation ? Est-il possible d’aller plus loin pour les inciter à en faire bon usage ?

Mme Stella Dupont. Je suis favorable à la réforme de l’assurance chômage, mais en même temps préoccupée par la situation des plus fragiles et par les conséquences sur le niveau de leurs indemnités. Une évaluation rapide de cette réforme permettrait de bien en mesurer tous les effets. Que prévoyez-vous en la matière ? L’utilisation de cas types pourrait utilement nous éclairer sur les conséquences pratiques pour les personnes concernées.

Mme Monique Limon. Le chômage atteint le taux historiquement bas de 7,6 % de la population active. C’est le résultat de l’ensemble des mesures prises par le Gouvernement depuis le début du quinquennat. Le PLF 2022 s’inscrit dans cette continuité, puisque le budget consacré aux politiques publiques de l’emploi et de l’insertion est à la fois important – 13,4 milliards d’euros – et stable par rapport à 2021. Ce budget ambitieux est tout particulièrement orienté en faveur des jeunes et des personnes les plus éloignées de l’emploi. Plus de 350 000 contrats d’apprentissage ont été signés, soit 75 000 de plus par rapport à septembre 2020.

Si le succès de l’apprentissage n’est plus à démontrer, tant pour les jeunes que pour les entreprises, de nombreux apprentis de moins de 18 ans rencontrent des difficultés d’accès à des stages proposés dans des sites présentant des risques. C’est par exemple le cas dans ma circonscription au sein de la plateforme chimique de Roussillon, classée en site Seveso. Serait-il possible d’envisager une gradation des risques pour que l’on puisse accueillir des jeunes apprentis sur ces sites ? L’enjeu de l’apprentissage est primordial pour réussir l’insertion professionnelle de tous.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq. Je salue le niveau des crédits mobilisés pour la mise en œuvre de la réforme opérée par la loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail, ainsi que ceux consacrés au quatrième plan santé au travail.

Ma question porte sur l’emploi des seniors et particulièrement des cadres qui, malgré le contexte économique, rencontrent encore des difficultés d’accès au marché du travail. Quelles sont les mesures spécifiques qui leur sont destinées ?

Enfin, je souhaite vous faire part du cas d’une personne qui a créé son entreprise de formation au début du confinement, après avoir été demandeur d’emploi et avoir bénéficié de l’aide à la création ou à la reprise d’une entreprise (ACRE). Elle n’a pas pu véritablement lancer son activité du fait des mesures de restrictions. Cet exemple permet d’évoquer plus largement la situation des créateurs d’entreprise précédemment indemnisés par l’assurance chômage et dont l’activité n’a pas pu démarrer du fait du contexte sanitaire.

Mme Josiane Corneloup. Le PLF 2022 consacre 300 millions d’euros à l’accompagnement vers l’emploi, ce qui représente 45 000 CIE jeunes. Le plan « 1 jeune, 1 solution » a permis d’investir 9 milliards d’euros en un peu plus d’un an, afin de prévenir le risque de sacrifier une génération. Quel bilan en tirez-vous, et quels en sont les résultats ? Pouvez-vous nous en dire davantage sur la garantie jeunes universelle en cours de préparation ?

 Les différents acteurs des établissements ou services d’aide par le travail (ESAT) sont inquiets pour l’avenir, en raison de passerelles plus fluides vers le milieu ordinaire. Ces structures ont-elles vocation à perdurer ?

Mme Bénédicte Pételle. Dans ma circonscription, la garantie jeunes est un vrai succès. Nous avons ouvert un nouveau local, trois nouveaux conseillers ont été recrutés et la capacité d’accompagnement a été doublée. La collaboration entre l’aide sociale à l’enfance et la mission locale est bonne.

Mais le problème du logement persiste, comme vous l’avez d’ailleurs dit dans votre présentation, et particulièrement pour les mineurs non accompagnés. Pourrait-on envisager dans un prochain PLF une expérimentation associant les accès à la garantie jeunes, au logement et à la formation, comme le propose pour les réfugiés le programme Accelair, organisé dans le Rhône par l’association Forum réfugiés-Cosi ? Il a rencontré un vif succès et est devenu le programme régional d’intégration des réfugiés (PRIR), qui a été développé depuis 2017 dans de nombreux départements, dont notamment l’Ain, l’Allier, le Puy-de-Dôme, la Haute-Garonne, l’Hérault et le Cantal.

Mme Carole Grandjean. Dans son enquête relative à l’emploi de 2019, l’INSEE relève que les Not in Education, Employment or Training (NEET) représentent 12,9 % des jeunes de 15 à 29 ans, qui ne sont donc ni en emploi ni en formation. Ce phénomène s’est accentué du fait de la crise sanitaire, qui a provoqué des ruptures plus importantes dans le suivi des personnes concernées et a sans doute plongé davantage de nos concitoyens dans cette situation de rupture et de désinsertion sociale.

Si on peut saluer la réussite du plan « 1 jeune, 1 solution », le déploiement prochain de l’aide à l’engagement ou encore l’obligation de formation portée à 18 ans, je souhaiterais que vous nous indiquiez quelles sont les actions entreprises pour la réinsertion de ces jeunes et les perspectives de lutte contre le phénomène des NEET – qui touche par ailleurs davantage les femmes que les hommes. Pourriez-vous également détailler le financement de tous les dispositifs déployés pour l’accompagnement de ces jeunes ?

Mme la ministre. Je commence en vous priant d’excuser, monsieur le rapporteur pour avis, le retard dans l’envoi des réponses préparées par les services. Il est vrai que le suivi des différentes étapes de l’élaboration du budget n’était pas aisé, avec une partie des crédits ouverts sur le budget du ministère et d’autres sur les missions Plan d’urgence face à la crise sanitaire et Plan de relance – ce qui renvoie aussi à un certain nombre de questions évoquant le fait que le budget du ministère baisserait.

En tout état de cause, le budget augmente de 3 % en AE, et si l’on compare entre 2020 et 2022, l’augmentation est de 1,5 milliard d’euros en AE et de 1 milliard d’euros en CP. Ces moyens sont à la hauteur des défis que rencontre notre pays et de la poursuite de l’accompagnement de tous vers l’emploi.

Des moyens considérables ont été consacrés au plan « 1 jeune, 1 solution » en 2020 et 2021, avec 9 milliards d’euros. Plus de 4 milliards d’euros sont d’ores et déjà prévus dans le PLF 2022. Par ailleurs, le Gouvernement présentera un amendement pour fixer les crédits du dispositif pour l’engagement des jeunes, auquel nous sommes en train de travailler à la demande du Président de la République. Grâce l’effort réalisé en 2020 et 2021, on peut dire que le plan a atteint ses objectifs. Le taux de chômage des jeunes est revenu à son niveau d’avant la crise. Leur taux d’emploi est légèrement plus élevé qu’en 2019. Pour mémoire, après la crise de 2008-2009, le taux de chômage en général avait augmenté de plus de 25 % et celui des jeunes de plus de 30 %. Cela montre l’efficacité du plan « 1 jeune, 1 solution ».

Pour autant, on ne peut se satisfaire ni du niveau de chômage des jeunes – qui est proche de 20 % – ni du nombre de NEET. C’est la raison pour laquelle nous avons maintenu toutes les solutions proposées par le plan « 1 jeune, 1 solution » dans le PLF 2022. Nous allons continuer à accompagner les jeunes, mais bien entendu cet accompagnement sera différent dans une période où sont créés de très nombreux emplois et où les entreprises sont confrontées à des difficultés de recrutement. L’aide à l’embauche des jeunes, comme celle qui avait été mise en place jusqu’à la fin du mois de mai dernier, n’est plus nécessaire.

Nous avons aussi recentré les contrats aidés sur ce qui est le plus efficace pour accompagner les jeunes en difficulté, c’est-à-dire les CIE. C’est un dispositif performant pour l’insertion dans le monde de l’entreprise des jeunes les plus éloignés de l’emploi. Le Gouvernement considère que ces emplois aidés doivent être qualitatifs, afin que leurs bénéficiaires soient accompagnés et bénéficient de formations. En 2021, nous avions augmenté de 60 000 le nombre des PEC, qui concernent les employeurs publics. Nous en revenons au niveau précédent, car l’objectif prioritaire est de permettre aux jeunes d’accéder à un emploi dans les entreprises, et non pas nécessairement chez des employeurs publics qui ne pourront pas leur offrir la suite de leur parcours professionnel.

L’objectif poursuivi au travers du revenu d’engagement ou du contrat d’engagement pour les jeunes est bien qualitatif. Malgré la reprise économique, un certain nombre d’entre eux sont éloignés de l’emploi et ne pourront pas bénéficier des créations d’emplois sans un accompagnement renforcé.

Pour répondre au rapporteur pour avis, la garantie jeunes est un dispositif qui fonctionne bien, mais je pense que nous pouvons faire mieux. Par-delà l’atout indéniable que constitue le fait pour le jeune de pouvoir passer six semaines en mission locale en venant chaque jour, on doit pouvoir mieux mobiliser les différences réponses bâties dans le cadre du plan « 1 jeune, 1 solution ». Cela permettra d’aider les jeunes qui n’ont pas encore de projet professionnel élaboré à choisir un métier et à accéder, s’ils en ont besoin, à une formation ou un apprentissage. Ce qui peut supposer, le cas échéant, qu’ils bénéficient des dispositifs de préparation à l’apprentissage ou de préparation à la formation professionnelle qui ont été développés récemment. Tout cela doit être géré de manière fluide pour le jeune, et tel est bien le travail en cours pour renforcer l’accompagnement des jeunes.

Pour l’année 2021, on tend vers les 200 000 garanties jeunes qui avaient été prévues. Je ne suis pas certaine que nous atteindrons cet objectif. Certains prônent plusieurs centaines de milliers de garanties jeunes en plus, mais ce n’est pas qu’une question de chiffres : il s’agit de s’assurer que les jeunes qui se rendent dans les missions locales ou à Pôle emploi obtiennent l’accompagnement qui leur permet d’accéder à un emploi. C’est sur cela qu’il faut mettre l’accent.

Il faut par ailleurs renforcer toutes les démarches d’« aller vers », parce qu’il y a encore des jeunes qui ne se tournent pas naturellement vers les missions locales ou Pôle Emploi. C’est notre deuxième défi. Des expérimentations très intéressantes ont déjà pu être menées, notamment grâce aux appels à projet « 100 % inclusion » et de repérage des publics « invisibles ». Il faut désormais passer à une plus grande échelle, ce qui ne pourra être fait qu’en étroite collaboration avec les collectivités locales.

Notre intention est, d’une part, d’améliorer l’efficacité et la fluidité des parcours qu’on peut proposer aux jeunes qui, malgré la reprise économique, ne trouveront pas d’emploi et, d’autre part, de renforcer tous les dispositifs qui permettent d’aller chercher les jeunes qui ne sollicitent pas d’aide. Certains d’entre eux peuvent manifester une certaine méfiance à l’égard de l’ensemble des institutions.

J’entends les questions sur l’articulation entre les missions locales et Pôle emploi, mais la situation s’est améliorée. Nous avons choisi de leur donner des objectifs partagés et la coopération est très bonne, même si l’on peut bien entendu encore progresser. L’époque des oppositions est révolue et la réussite du plan « 1 jeune, 1 solution » doit beaucoup à la mobilisation de tous.

Le PIC a été évoqué par le rapporteur pour avis et par Michèle de Vaucouleurs. Malgré la crise qui a affecté un certain nombre de dispositifs de formation, nous avons réussi à passer d’un chômeur sur dix formé à un sur six en 2021. Si l’on ajoute les crédits des missions Travail et emploi et Plan de relance, 3,6 milliards d’euros sont prévus en AE et 2,6 milliard d’euros en CP. Il faut y ajouter les crédits prévus dans le cadre du plan de relance pour les 100 000 formations qualifiantes dans le cadre du plan « 1 jeune, 1 solution ». On devrait atteindre 1,3 million de demandeurs d’emploi formés en 2021 et passer à 1,4 million l’an prochain avec le plan de lutte contre les tensions de recrutement. Dit autrement, les entrées en formation se situent un peu au-dessus d’1 million à la fin septembre, contre 1,1 million au cours de l’année 2020. On accélère donc vraiment grâce au PIC. C’est un acquis très important, comme l’ont relevé les préfets de région et les acteurs du service public de l’emploi réunis hier par le Premier ministre.

 Grâce au PIC, nous pourrons également sortir du paradoxe que l’on connaît depuis des décennies dans notre pays : dès que l’économie repart, des tensions de recrutement apparaissent dans de nombreux secteurs, alors même que le nombre de demandeurs d’emploi reste élevé. La solution consiste évidemment à permettre à ces derniers d’accéder à une formation en lien avec les métiers qui recrutent.

Monsieur Da Silva, lorsque l’on s’adresse à des demandeurs d’emploi de longue durée, il est en effet nécessaire de leur proposer aussi des formations courtes, sur mesure, de nature à les replonger rapidement dans un univers professionnel et qui correspondent aux besoins des entreprises. Toute une partie du plan de lutte contre les tensions de recrutement va développer ces formations courtes en situation de travail, grâce aux préparations opérationnelles à l’emploi, qui articulent promesse d’embauche et formation.

Comme j’ai eu l’occasion de le dire lors des questions au Gouvernement, il est en outre prévu une aide de 8 000 euros pour les besoins de formations plus longues, qui entrera en vigueur à partir du 1er novembre pour les entreprises qui recrutent en contrat de professionnalisation un demandeur d’emploi de longue durée. C’est une transposition aux chômeurs de longue durée du dispositif prévu pour les formations en alternance pour les jeunes.

Nous pouvons tous saluer le record historique atteint en 2020 pour l’apprentissage, et nous sommes bien partis pour le dépasser de nouveau en 2021. Je partage les interrogations sur la part relative des formations de niveau infra bac, bac et bac +2. C’est la raison pour laquelle, avec Frédérique Vidal, nous avons demandé un rapport conjoint à l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et à l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR). Il permettra de mieux comprendre les effets du financement de l’apprentissage pour les écoles et les universités, et de s’assurer que les ressources sont utilisées au mieux.

Ce dont je suis certaine, c’est qu’il faudra continuer à amplifier l’effort pour attirer des jeunes vers les métiers manuels de l’artisanat, de l’industrie et du bâtiment, qui restent insuffisamment connus. Avec les branches professionnelles concernées et avec les régions, en charge de l’orientation, il faut donner envie aux jeunes d’aller vers ces métiers pour lesquels l’apprentissage est une voie d’accès quasi exclusive.

Les aides exceptionnelles ont certainement donné un coup de fouet à l’apprentissage, mais il ne faut pas sous-estimer l’efficacité de la réforme de 2018. Un directeur de centre de formation d’apprentis (CFA) peut désormais faire évoluer les formations pour répondre aux besoins des entreprises locales et adapter la pédagogie à des profils très différents – allant de jeunes qui sortent du collège à d’autres qui ont éventuellement un diplôme de l’enseignement supérieur. Je suis convaincue que les entreprises qui ont découvert l’apprentissage grâce aux aides exceptionnelles prendront goût à ce dispositif, qui leur permet de préparer les compétences dont elles ont besoin.

La coopération avec les régions existe dans le cadre des pactes régionaux d’investissement dans les compétences, auxquels les crédits supplémentaires dont nous avons récemment décidé l’allocation doivent nous permettre de faire de nouveaux avenants. Nous sommes d’accord avec les présidents de région quant à la nécessité d’une jonction optimale entre l’État, les régions et Pôle emploi pour créer de véritables task forces garantissant que les formations proposées de manière individuelle par Pôle emploi s’articulent bien avec celles que proposent les régions et que les missions locales et Pôle emploi mobilisent les jeunes et les demandeurs d’emploi pour suivre ces formations. J’y reviendrai dans le cadre d’un prochain comité État-régions relatif à ces sujets.

Répondre aux besoins des entreprises et amener vers l’emploi l’ensemble de nos concitoyens supposent d’œuvrer avec les intercommunalités, pour repérer les jeunes les plus éloignés de l’emploi, avec les départements, dont plus de quatre-vingts vont être concernés par le déploiement du service public de l’insertion et de l’emploi, et avec les régions, pour ce qui concerne la formation des demandeurs d’emploi.

Monsieur Cherpion, la lutte contre le travail illégal ne correspond pas à une ligne de crédits, mais elle est au cœur de la mission de l’inspection du travail, dont l’objectif est de procéder à 20 000 contrôles ciblés sur ces sujets. Quant au contrat de sécurisation professionnelle, financé par l’Unédic, il ne fait pas non plus l’objet de crédits dans le budget du ministère du travail. Nous finançons les cellules d’appui à la sécurisation professionnelle, en amont du reclassement des salariés.

Je ne sais s’il faut rouvrir le débat sur la réforme de l’assurance chômage, mais je ne peux laisser dire que nous ferions des économies sur le dos des chômeurs. Nous avons prolongé les droits des demandeurs d’emploi pendant huit mois, pour 3,7 milliards d’euros, et accompagné 600 000 travailleurs précaires pendant dix mois par une aide exceptionnelle leur garantissant un revenu de 900 euros mensuels. Notre objectif est de profiter de la reprise économique pour leur permettre d’accéder à l’emploi. Tous les dispositifs dont je viens de parler, du plan d’investissement dans les compétences au plan pour réduire les tensions de recrutement, apportent la meilleure solution qui soit pour un demandeur d’emploi : la possibilité de retrouver un travail.

S’agissant des cas pratiques, madame Dupont, mes services se tiennent à votre disposition pour vous en fournir. En tout cas, nous proposons un accompagnement entièrement inédit. Ainsi, Pôle emploi recontactera tous les demandeurs d’emploi de longue durée d’ici à la fin de l’année pour leur offrir un accompagnement adapté – notamment face à des problèmes de santé, grâce à une prestation spécifique –, des immersions en entreprise, des formations sur mesure en entreprise ou en alternance, ou d’autres formations dans le cadre du PIC et des PRIC.

Contrairement à ce que l’on entend parfois, le montant global des droits des demandeurs d’emploi ne change pas : ceux qui auront une allocation moins élevée la toucheront plus longtemps et pourront être accompagnés plus longtemps, ce qui leur permettra d’actualiser leur projet professionnel le cas échéant.

Par ailleurs, les périodes de restrictions sanitaires sont neutralisées dans le mode de calcul de l’allocation chômage. Ainsi, non seulement le nouveau mode de calcul ne s’applique qu’aux nouveaux demandeurs d’emploi, mais, en vertu de cette neutralisation, il n’entrera en vigueur que très progressivement.

Comme le Premier ministre s’y est engagé, nous allons installer un comité de suivi de la réforme, en lien avec les partenaires sociaux. Nous pourrons également vous rendre compte de l’application de la réforme au fur et à mesure de sa mise en œuvre.

S’agissant des tensions de recrutement, vous aurez compris que nous mobilisons les moyens nécessaires aux formations en entreprise, qu’elles soient courtes ou plus longues dans le cadre de contrats de professionnalisation. Ces tensions peuvent aussi être liées à un problème d’attractivité des métiers. Nous en discutons avec cinquante-sept branches qui réunissent les travailleurs de deuxième ligne et les branches dont les minima étaient inférieurs au SMIC au 1er octobre. Ces employeurs comprennent qu’ils doivent rendre les emplois plus attractifs : selon les dernières enquêtes de Pôle emploi, un nombre significatif de ceux qui subissaient des tensions de recrutement ont ajusté la rémunération ou les conditions de travail qu’ils proposent. Il importe que nous avancions sur cette voie ; je pense notamment au secteur des hôtels, cafés, restaurants, pour lequel des négociations sont engagées.

En ce qui concerne les maisons de l’emploi, dispositif auquel je sais votre commission et l’ensemble du Parlement très attachés, je ne serai pas surprise qu’elles fassent l’objet d’amendements, auxquels nous pourrons, comme chaque année, être favorables.

Madame Verdier-Jouclas, je vous confirme que nous déposerons bien l’amendement dont vous parlez au sujet des EITI. Nous allons par ailleurs neutraliser la part de financement sur objectif des missions locales, comme l’an dernier, car la contractualisation avec les missions locales, dans le cadre de nos travaux visant à améliorer l’accompagnement des jeunes, ne doit pas reposer sur des objectifs quantitatifs. Ce n’est pas, selon elles, le bon mode de pilotage ; il convient bien plutôt de nous assurer qu’elles proposent aux jeunes les parcours les plus efficaces vers l’emploi.

L’an dernier, un million de Français ont utilisé leur CPF ; les chiffres devraient être encore plus spectaculaires cette année. Cela dit, nous considérons avec les partenaires sociaux qu’il est nécessaire de vérifier que la mobilisation du CPF profite bien aux salariés, en leur permettant de développer leurs compétences dans le cadre de leur projet professionnel. Outre le CPF, il faut donc promouvoir le conseil en évolution professionnelle (CEP), un dispositif formidable, mais moins connu. L’articulation entre les deux fait partie des sujets à propos desquels nous pourrons tomber d’accord avec les partenaires sociaux.

Madame Limon, ce n’est pas la nature de l’établissement qui peut constituer un frein, mais tel ou tel métier qui est considéré comme à risque, donc réservé aux adultes. Rien ne doit en revanche s’opposer à ce qu’un apprenti suive son apprentissage dans un établissement. Nous allons réinterroger nos services à partir du cas précis que vous signalez.

Madame Parmentier-Lecocq, si nous devons faire mieux en matière d’entrée des jeunes dans la vie active, il en va de même lorsqu’il s’agit de maintenir les seniors dans l’emploi. Le taux d’emploi des 55-64 ans en France est de plus de six points inférieur à la moyenne des pays européens. Cela engage notre compétitivité, l’équilibre de notre protection sociale et notre capacité à tirer parti de l’expérience de nos salariés. Pour progresser en ce domaine – ce à quoi le Parlement a également travaillé –, il nous faut mobiliser tous les leviers à notre disposition : les incitations à la représentation des seniors dans l’emploi, la prévention de l’usure professionnelle, la formation tout au long de la vie – il n’est pas rare que l’on reproche soudain à une personne de 55 ans n’ayant jamais bénéficié d’une formation professionnelle de ne plus avoir les compétences nécessaires pour son poste.

Je vous confirme enfin que le déficit de France compétences s’aggrave en contrepartie des bonnes nouvelles concernant l’apprentissage et la mobilisation du CPF. Son résultat prévisionnel initial, de moins 1,1 milliard, a ainsi été réévalué en juin pour aboutir à un déficit d’un peu plus de 3 milliards. Nous n’avons pas prévu de crédits à son profit dans le PLF 2022, mais le Gouvernement prendra ses responsabilités en assurant son financement dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2021. Pour la suite, il faudra en discuter avec les partenaires sociaux. En effet, si une partie du déficit est liée à la baisse, en raison de la crise, de la contribution unique à la formation professionnelle et à l’alternance, assise sur la masse salariale, le succès des dispositifs financés par France compétences soulève la question de l’équilibre à long terme de cet opérateur.

Mme la présidente. Merci, madame la ministre, pour vos réponses et votre présence cet après-midi.

La commission va procéder à l’examen des amendements après votre départ.

La commission examine ensuite les crédits de la mission Travail et emploi (M. Bernard Perrut, rapporteur pour avis).

Article 20 et état B

Amendements II-AS57, II-AS53, II-AS56 et II-AS55 de M. Boris Vallaud

M. Boris Vallaud. L’amendement II-AS57 vise à relever de 1,259 milliard d’euros le niveau des crédits versés à Pôle emploi au titre de sa subvention pour charges de service public, afin que le montant de cette subvention en 2022 annule la totalité du manque à gagner accumulé par Pôle emploi du fait des baisses successives de ce financement depuis le premier budget voté par l’actuelle majorité. Ainsi Pôle emploi pourra-t-il assurer correctement ses missions de service public, qui sont essentielles.

L’amendement II-AS53 vise à relever de 1,125 milliard d’euros le montant des crédits versés par l’État à l’opérateur Pôle emploi, ce qui permettrait de réduire d’un montant équivalent la contribution versée par l’assurance chômage.

L’amendement II-AS56 est un amendement de repli visant à relever de 442,55 millions seulement le niveau des crédits versés à Pôle emploi au titre de sa subvention pour charges de service public, afin que le montant de cette subvention en 2022 retrouve son niveau de 2017.

Enfin, l’amendement II-AS55, également de repli, propose fort modestement de relever de 86 millions le montant de ces mêmes crédits.

M. le rapporteur. Mme la ministre a évoqué les moyens supplémentaires accordés à Pôle emploi, auxquels s’ajoutent les crédits européens et ceux du plan de relance. À la question de savoir si cette enveloppe était suffisante, le directeur général de Pôle emploi – qui aurait pu s’exprimer plus librement – a répondu lors de son audition que tout allait bien.

Je comprends bien votre demande, ayant souhaité moi-même un budget plus fourni pour Pôle emploi afin d’en garantir la pérennité. Toutefois, c’est en ponctionnant le programme 103 que vos amendements proposent de financer la hausse des crédits qui lui sont alloués, ce qui ne paraît ni envisageable ni vraiment conforme à vos intentions, vous qui défendez par ailleurs ce programme.

Avis défavorable.

M. Boris Vallaud. Je ne vous en veux pas, monsieur le rapporteur pour avis, mais vous connaissez les règles auxquelles nous devons nous plier pour rendre nos amendements recevables.

Je profite de l’occasion pour souligner que le budget de l’Unédic est très bien géré par les partenaires sociaux, et que les difficultés de l’Unédic, qui appellent parfois sa mise sous tutelle, viennent surtout du fait que l’État ne finance plus les politiques de l’emploi, préférant les faire payer par les chômeurs eux-mêmes.

M. Dominique Da Silva. Il n’y a aucun désengagement de l’État. Le budget de Pôle emploi est stable par rapport à 2021. Il faut en effet tenir compte de la subvention exceptionnelle de 175 millions inscrite dans le plan de relance, ainsi que des 463 millions de financements européens, mobilisés pour l’accompagnement intensif des jeunes, en particulier. Les crédits de Pôle emploi sont donc suffisants ; l’audition de Jean Bassères, son directeur général, l’a confirmé.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement II-AS26 de Mme Valérie Six

Mme Valérie Six. Il s’agit d’un amendement d’appel. Le budget pour 2022 ne prévoit pas de financement par l’État de l’opérateur France compétences. Or le succès du compte personnel de formation est indiscutable : le nombre de ses bénéficiaires a explosé, tant mieux ; il faut donc revoir le financement de l’opérateur pour assurer la soutenabilité du dispositif.

Nous proposons par conséquent de prélever les moyens correspondants sur les crédits affectés à l’action 11 du programme 155 pour les reverser à l’action 04 du programme 103.

M. le rapporteur. Nous ne pouvons qu’approuver votre volonté d’alerter l’exécutif sur une situation financière qui n’a rien de passager, puisque la réforme de 2018, en instaurant une logique de guichet ouvert pour l’apprentissage comme pour le CPF, a compliqué toute tentative de régulation. Une telle solution devrait pourtant être à terme envisagée.

Avis favorable à cet amendement d’appel.

M. Dominique Da Silva. Les effectifs de France compétences ont été revalorisés de douze ETP. Aucun désengagement là non plus, donc.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AS54 de M. Boris Vallaud

M. Boris Vallaud. Il s’agit de rendre la garantie jeunes vraiment universelle. Le Gouvernement a prévu les financements nécessaires pour accompagner 200 000 jeunes, alors que 835 000 jeunes âgés de 16 à 25 ans n’ont ni emploi, ni formation et ne suivent pas d’études. Ainsi, trois jeunes éligibles sur quatre ne peuvent bénéficier de la garantie jeunes. Nous soutenons la politique du Gouvernement en proposant de doter comme il se doit ce dispositif que nous avons inventé.

M. le rapporteur. En effet, la garantie jeunes n’est pas actuellement universelle, et l’on ne peut que partager votre souhait de l’ouvrir à un public plus nombreux. Si nous voulons être objectifs, nous ne devons toutefois pas oublier les efforts consentis en faveur des missions locales en 2021 et 2022 afin d’accompagner 200 000 nouveaux jeunes. Le Gouvernement va annoncer un nouveau dispositif ; ne faut-il pas attendre de le connaître avant de pousser le débat plus loin ? Vous pourrez certainement le faire en séance publique.

Au demeurant, et même si je sais, comme précédemment, que vous ne voulez pas vraiment réduire le montant des crédits alloués au programme 103, je ne puis être favorable à un amendement qui propose de ponctionner près de 3 milliards sur un programme dont les crédits diminuent déjà de 3,6 % en autorisations d’engagement et de 11,5 % en crédits de paiement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AS59 de M. Boris Vallaud

M. Boris Vallaud. Cet amendement vise à donner les moyens financiers d’allonger à deux ans la durée possible du bénéfice de la garantie jeunes.

M. le rapporteur. On ne peut être contre votre proposition de porter à deux ans la durée possible du bénéfice de la garantie jeunes : dans certains cas, ces deux ans se justifient parfaitement. Je vous ferai néanmoins la même réponse que précédemment, non sans rappeler qu’un jeune qui a été accompagné dans le cadre de la garantie jeunes peut l’être de nouveau, à condition que la décision de la mission locale s’appuie sur un diagnostic approfondi permettant de faire le point sur la situation du demandeur. Il y a certes un délai – de trois mois selon les préconisations de la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) – entre la fin de la première garantie jeunes et le début de la seconde.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AS58 de M. Boris Vallaud

M. Boris Vallaud. Il propose de doubler le montant consacré à l’accompagnement des jeunes bénéficiant de la garantie jeunes, conformément à une préconisation du Conseil d’orientation des politiques de jeunesse émise en janvier dernier.

Avec 80 millions d’euros de dépenses d’accompagnement pour 100 000 jeunes accompagnés, l’investissement est de 800 euros par an et par jeune ; le Conseil d’orientation des politiques de jeunesse préconise de porter ce montant à 1 600 euros.

C’est toujours pour permettre à la politique gouvernementale de réussir que nous souhaitons suivre le COJ sur ce point.

M. le rapporteur. Votre souhait est tout à fait louable, mais, je le répète, je suggère que nous ne touchions pas à la garantie jeunes tant que nous ne savons rien des modifications qui pourraient l’affecter prochainement. Espérons que, d’ici à l’examen en séance publique, nous aurons des informations à ce sujet.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendements II-AS60 de M. Boris Vallaud, II-AS89, II-AS90 et II-AS88 de Mme Michèle de Vaucouleurs

M. Boris Vallaud. Notre amendement vise à revaloriser l’aide au poste en association intermédiaire (AI), en la portant de 1 486 à 4 000 euros, pour un montant total de 54 millions d’euros.

Les AI sont de très loin le dispositif le moins aidé, alors qu’elles affichent l’un des meilleurs taux de sortie en emploi des structures d’insertion par l’activité économique (IAE) et qu’elles représentaient en 2020 plus de 45 % des effectifs de l’ensemble du secteur de l’IAE pour moins de 3 % de son budget.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Je partage la préoccupation de M. Vallaud concernant le financement des AI, mais mes propositions portent sur des montants moins élevés.

Les AI ont établi une comparaison très précise entre les aides qui leur sont attribuées et celles qui vont aux entreprises de travail temporaire d’insertion (ETTI) : en prenant en compte l’ensemble des paramètres nécessaires à cette comparaison, il apparaît que le juste financement de l’aide au poste pour les AI serait de 2 700 euros par aide au poste. Tel est le sens de mon amendement II-AS89.

L’amendement II-AS90 propose un rattrapage permettant de couvrir dans un premier temps à 100 % les coûts inhérents à l’accompagnement, contre 60 % actuellement.

Enfin, l’amendement de repli II-AS88 tend à porter l’aide au poste de 1 486 à 1 789 euros pour la seule année 2022, en espérant une nouvelle majoration plus tard.

M. le rapporteur. Il est exact que le montant de l’aide au poste versée aux AI est nettement inférieur à celui de l’aide au poste dont bénéficient les autres structures de l’IAE. Gardons-nous toutefois d’en tirer des conclusions trop hâtives : selon l’Union nationale des associations intermédiaires (UNAI), la comparaison n’a de sens qu’entre le régime des AI et celui des ETTI, qui présentent plusieurs similitudes.

Cela dit, le montant de l’aide au poste ne permet pas aux AI de couvrir les frais d’accompagnement des personnes qui leur sont confiées, car il n’a pas été vraiment revalorisé à la suite des évolutions ayant affecté le régime fiscal applicable à ces structures. Il semblerait d’ailleurs que le Gouvernement n’ignore pas le problème, puisqu’il pourrait lancer une mission en vue d’aménager les règles encadrant l’aide au poste pour les AI.

En tout cas, il serait bon de revaloriser le montant de l’aide. Alors que la proposition de M. Vallaud va bien au-delà des revendications des acteurs du secteur, celle de Mme de Vaucouleurs dans son amendement II-AS90 répond à leurs attentes immédiates et légitimes. Je demande donc le retrait des autres amendements au profit de celui-ci.

Les amendements II-AS60, II-AS89 et II-AS88 sont successivement retirés.

M. Dominique Da Silva. Il faut rappeler que les AI bénéficient d’un régime fiscal tout à fait particulier. Ainsi, l’exonération de TVA à laquelle elles ont droit représente 5 000 euros environ par poste. On ne saurait comparer des statuts qui ne sont pas comparables. Dans l’attente de l’aboutissement de la mission à laquelle il vient d’être fait allusion, nous sommes défavorables à tout amendement concernant les AI – mais ce n’est que partie remise : nous étudierons ensuite plus précisément de quoi il retourne.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Les AI ont longtemps bénéficié d’un régime d’exonération particulier, mais, depuis l’allégement général des charges, elles sont dans la même situation que les ETTI à cet égard. Il n’y a donc pas lieu de maintenir une telle disparité entre elles. Quant à la TVA sur les transports, on a simplement entériné l’année dernière une situation de fait qui existait depuis le début, sans créer d’opportunité particulière pour les AI.

Il est vraiment urgent de revoir la question. Depuis le début de la législature, les représentants des AI rencontrent le cabinet, lui remettent des éléments, et le Gouvernement dit réfléchir au sujet. Nous avons fourni un énorme travail sur le secteur de l’IAE ; nous le terminerions de la meilleure des manières en mettant à jour l’aide au poste pour les AI.

M. Dominique Da Silva. Si l’aide au poste peut être supérieure pour les autres structures, c’est aussi parce qu’elles subissent de plus fortes contraintes, notamment la qualité des emplois et le peu de flexibilité dont elles disposent. Comparons ce qui est comparable : on ne peut se fonder sur la seule aide au poste sans tenir compte de tous les éléments qui la déterminent.

La commission rejette l’amendement II-AS90.

Amendement II-AS61 de M. Boris Vallaud

M. Boris Vallaud. Il vise à revaloriser les crédits des engagements de développement de l’emploi et des compétences (EDEC). Alors que le nombre d’EDEC a augmenté depuis 2018 en raison d’un appel à projet dédié du PIC, une baisse des engagements de l’État est prévue ces prochaines années ; c’est difficile à comprendre à l’heure où les régions sont en phase de construction des nouveaux contrats de plan régionaux de développement des formations professionnelles.

M. le rapporteur. En effet, le nombre d’EDEC conclus au niveau national augmente depuis 2018 et couvre de plus en plus de secteurs, notamment dans le cadre du plan de relance. Les EDEC territoriaux jouent un rôle-clé dans le contexte de la crise sanitaire.

Je déplore comme vous que le Gouvernement se fixe pour objectif d’encourager la signature d’EDEC interbranches pour favoriser les synergies entre branches professionnelles tout en réduisant les crédits alloués au dispositif : c’est incompréhensible.

Avis favorable.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Travail et emploi sans modification.

 

 

La séance s’achève à vingt heures quinze.

 

 

 

 


Présences en réunion

Réunion du mardi 26 octobre 2021 à 18 heures

 

Présents.  M. Belkhir Belhaddad, M. Sébastien Chenu, M. Gérard Cherpion, M. Paul Christophe, Mme Christine Cloarec-Le Nabour, Mme Josiane Corneloup, M. Dominique Da Silva, M. Marc Delatte, M. Pierre Dharréville, M. Jean-Pierre Door, Mme Jeanine Dubié, Mme Audrey Dufeu, Mme Catherine Fabre, Mme Agnès Firmin Le Bodo, Mme Carole Grandjean, Mme Véronique Hammerer, Mme Caroline Janvier, Mme Fadila Khattabi, Mme Monique Limon, M. Didier Martin, M. Thomas Mesnier, M. Thierry Michels, Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, M. Bernard Perrut, Mme Bénédicte Pételle, Mme Michèle Peyron, Mme Valérie Six, M. Nicolas Turquois, Mme Isabelle Valentin, M. Boris Vallaud, Mme Michèle de Vaucouleurs, M. Stéphane Viry, Mme Hélène Zannier

Excusés.  Mme Stéphanie Atger, Mme Justine Benin, Mme Caroline Fiat, Mme Claire Guion-Firmin, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Nadia Ramassamy, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Nicole Sanquer, Mme Hélène Vainqueur-Christophe

Assistaient également à la réunion.  Mme Stella Dupont, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas