Compte rendu

Commission
des affaires sociales

– Projet de loi de finances pour 2022 (n° 4482) (seconde partie) :

 Audition de M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé, sur la mission Santé 2

 Audition de M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé, et de Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées, sur la mission Solidarité, insertion et égalité des chances              19

• Examen et vote des crédits de la mission Santé (M. Pierre Dharréville, rapporteur pour avis)  40

• Examen et vote des crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances et de l’article 43, rattaché (Mme Christine Cloarec Le Nabour, rapporteure pour avis)              44

 Présences en réunion.................................54

 

 

 

 


Mercredi
27 octobre 2021

Séance de 15 heures

Compte rendu n° 12

session ordinaire de 2021-2022

Présidence de
Mme Fadila Khattabi,
Présidente
 


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COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 27 octobre 2021

La séance est ouverte à quinze heures.

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La commission auditionne M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé, sur la mission Santé.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. La mission Santé comporte deux programmes dont l’action est définie, pour une large part, dans le cadre de la stratégie nationale de santé. Cette stratégie marque la priorité donnée à la prévention, à la qualité et à la pertinence des soins, à l’égal accès aux soins sur le territoire et à l’innovation.

Le programme 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins vise à améliorer l’état de santé général de la population, dans un souci de réduction des inégalités sociales et territoriales de santé. Il finance des plans et des programmes de santé, pilotés au niveau national par la direction générale de la santé et par la direction générale de l’offre de soins. C’est à ce titre que le programme, par exemple, participe pleinement au déploiement de la stratégie décennale de lutte contre les cancers, annoncée au début de cette année par le Président de la République, avec une subvention d’un peu plus de 40 millions d’euros destinée à soutenir les actions de l’Institut national du cancer (INCa).

La sécurité sanitaire est également un champ important du programme 204 : il s’agit de garantir la protection de la population face à des événements sanitaires graves. Depuis mars 2020, le programme intègre en gestion une partie des dépenses liées à la lutte contre l’épidémie de la covid-19. Santé publique France a notamment abondé les crédits du programme à hauteur de 900 millions d’euros, par fonds de concours, pour financer des actions centralisées de lutte contre l’épidémie telles que l’achat de matériel et la fourniture de masques à des personnes en situation de précarité ou le déploiement de systèmes d’information, comme le fameux système d’informations de dépistage (SI-DEP). Le programme 204 joue ainsi un rôle fondamental en matière de santé publique, aussi bien dans une optique de prévention qu’au titre de la gestion de la crise.

Le programme 183 Protection maladie assure, en complément des politiques de sécurité sociale, la protection face à la maladie dans des situations relevant de la solidarité nationale. Il vise essentiellement à financer l’aide médicale de l’État (AME), dont la gestion est assurée par la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM) et qui s’adresse aux publics les plus défavorisés, dans un double objectif, humanitaire et sanitaire. Comme chaque année, je n’en doute pas, nous aurons l’occasion de revenir sur l’intérêt de l’AME. Selon la conception que je me fais de la solidarité, un malade doit être soigné, quelle que soit sa nationalité. Au‑delà même de cette conception, que je sais largement partagée, la crise sanitaire actuelle a démontré que notre santé collective était aussi celle des plus faibles et des plus fragiles d’entre nous. C’est l’honneur de notre pays que d’aider ceux qui souffrent sur son territoire, et il y va de notre santé publique en général. Pour ces raisons, nous continuerons en 2022 à financer l’AME, qui n’est certainement pas à l’origine d’un envahissement des hôpitaux par des personnes en situation de migration ; c’est tout simplement le moyen de solvabiliser une demande de soins qui serait de toute façon honorée. En effet, si vous êtes malade, les blouses blanches vous soignent, que vous ayez des papiers ou non.

Derrière ces programmes, il n’y a pas qu’une gigantesque machine administrative ; il y a une vision de notre politique de santé. La crise sanitaire liée à l’épidémie a accéléré et amplifié un certain nombre de pratiques. Je pense notamment au numérique en santé, qui est appelé à jouer demain un rôle central dans l’accès aux soins. Cette crise sanitaire a également apporté un démenti cuisant à tous ceux qui pointaient du doigt la prétendue désintégration de l’État social. Je l’affirme : l’État social a répondu présent et le « quoi qu’il en coûte » n’a pas été un simple slogan. Personne en France ne peut désormais l’ignorer.

M. Pierre Dharréville, rapporteur pour avis des crédits de la mission Santé. Les grandes orientations de la mission Santé que vous venez de nous exposer sont prometteuses, mais, quand on se penche un peu plus sur le détail – peut-être est-ce la raison pour laquelle votre intervention liminaire a été relativement brève –, on est un peu déçu.

Certes, on trouve dans la mission le budget de l’AME, qui en est le plus gros poste et en représente l’essentiel. Garantir l’accès aux soins à chacune et chacun, quelle que soit sa situation administrative et quels que soient ses moyens, c’est à la fois un geste d’élémentaire humanité et un geste élémentaire pour l’humanité – nous nous rejoignons sur ce point. La crise sanitaire nous a fait mesurer à quel point la santé est un bien commun : la santé de tous et de toutes est intimement liée à celle de chacune et chacun.

C’est pourquoi je ne comprends pas l’acharnement politique dont est victime l’AME, destinée aux femmes, aux hommes, aux enfants démunis, notamment en situation irrégulière. Nous devrions être fiers de cette solidarité. Pourquoi vouloir restreindre, limiter, rationner l’accès aux soins ? Contrairement ce que l’on entend parfois, la fraude à l’AME n’est pas un phénomène massif ; c’est le non-recours qui est massif. Seules 51 % des personnes éligibles à l’AME en bénéficient, comme l’indique une étude de l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé datée de 2019. L’AME représente moins de 0,5 % de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie et seulement 1,5 % du montant des exonérations de cotisations patronales – vous reconnaîtrez là un de mes chevaux de bataille.

La mission Santé financera l’AME à hauteur de 1,1 milliard d’euros en 2022. Nous devrions absolument consolider cette politique, qui a tout de même subi quelques restrictions en 2020.

Pour le reste, on ne trouvera pas dans la mission Santé les moyens véritables d’une politique publique digne de ce nom en matière de prévention et de promotion de la santé, ni en matière d’accès aux soins. On n’y découvre que des financements épars pouvant se rattacher de près ou de loin à ces thématiques. Elle ne comprend plus désormais que les brisures, pour reprendre un terme employé par mon grand-père, autrement dit les restes des crédits autrefois à la main de l’État en matière de santé publique.

En effet, notre politique de santé publique a été très largement déléguée à des agences sanitaires, entre autres Santé publique France, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) et l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), dont le financement a été transféré à la sécurité sociale. Pourtant, les missions de ces agences relèvent non pas de la protection sociale, mais bel et bien de l’action publique en santé, qui est une prérogative de l’État. Qui plus est, leurs moyens ordinaires ne progressent pas : le plafond d’emplois les bloque dans la possibilité d’honorer leurs missions, qui ont tendance à s’étendre plutôt qu’à diminuer, ce qui a des implications locales. Pouvez-vous nous dire ce qu’il en est, monsieur le ministre ?

Ce transfert à la sécurité sociale nous prive, en tant que législateur, de toute marge de manœuvre concernant le financement de ces agences : qui d’entre vous a conscience d’avoir voté les crédits de Santé publique France dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) ? Personne, tout simplement parce qu’il n’y a pas d’article dédié ! Cet aspect est devenu quasiment invisible, ce qui pose un vrai problème de démocratie sanitaire. J’appelle donc à réintégrer les agences sanitaires dans le budget de l’État.

En vérité, il ne reste plus grand-chose dans la mission Santé, hormis l’AME – ce qui n’est pas rien –, l’indemnisation des contentieux sanitaires, l’agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna, les systèmes d’information du ministère et des subventions pour une myriade d’associations, utiles, relevant du champ sanitaire. Quelle est la politique suivie pour les systèmes d’information que je viens de mentionner ?

Je ne dis pas que ces actions sont inutiles, loin de là. Le mécanisme de financement du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (FIVA), par exemple, fonctionne plutôt bien : il a permis de créer un espace dédié pour les victimes de cette catastrophe sanitaire, qui continue de tuer. Il faut désormais le consolider. Ne faudrait-il pas revaloriser les barèmes d’indemnisation ? Pouvez-vous nous confirmer l’abandon du projet de fusion entre le FIVA et l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) ?

Il y a donc des choses très utiles dans la mission Santé. Simplement, ces actions éparses ne font pas une politique de santé publique.

La réduction des inégalités territoriales et sociales de santé constitue un enjeu central pour notre pays, dont la crise a montré l’acuité. Comment jugez-vous l’efficacité des dépenses fiscales censées lutter contre la désertification médicale ?

La prévention et la promotion de la santé, qui figurent dans les intitulés des programmes, sont des enjeux tout aussi fondamentaux. Au-delà des campagnes de communication, il faut se doter de moyens humains pour faire de la santé un paramètre essentiel des choix. Si nos politiques en la matière avaient été plus volontaristes, aurions-nous eu besoin d’une telle multiplication de mesures coercitives ? De toute évidence, dans une société malmenée et soumise à de nombreux défis, il est nécessaire de faire progresser la conscience sanitaire individuelle et collective, face aux mauvaises pratiques induites par le marché, aux addictions et aux nécessaires transformations de nos modes de vie. Il faut aussi donner un poids plus déterminant à la santé et à l’humain dans les choix politiques.

Au fond, les financements souvent disparates et faibles apportés par la mission Santé me semblent assez à l’image de l’engagement de l’État dans ce domaine : insuffisants. C’est pourquoi je n’appellerai pas à voter en faveur des crédits de la mission, soulignant que l’asymétrie des programmes et leur faible contenu nous privent, pour ainsi dire, de toute possibilité d’amélioration par voie d’amendement.

Afin de donner plus de chair à ce propos et d’esquisser des perspectives, j’ai choisi de centrer mes investigations et mon rapport sur les enjeux sanitaires liés à la pollution atmosphérique. Les lignes budgétaires n’en disent rien, alors que c’est une question de santé publique prégnante.

D’après Santé publique France, la pollution atmosphérique est la cause de 7 % de la mortalité annuelle en France ; 40 000 décès par an sont imputables aux particules fines inhalées ; 7 000 décès, soit 1 % de la mortalité annuelle, sont liés au dioxyde d’azote. Et c’est sans parler de tous les autres polluants que l’on ne sait pas encore bien mesurer : particules ultrafines, pesticides, perturbateurs endocriniens, etc.

La pollution de l’air, c’est donc, chaque année, des dizaines de milliers de morts prématurées, et pas seulement pour des atteintes cardiorespiratoires ; c’est le cancer du poumon, mais aussi le cancer du sein et la leucémie ; c’est l’asthme des enfants, mais aussi le diabète, l’obésité, les maladies neurodégénératives et d’autres encore.

La France est loin d’être exemplaire en ce qui concerne la qualité de l’air. L’État a récemment été condamné par l’Union européenne et par le Conseil d’État pour des dépassements répétés des seuils de concentration des polluants réglementés. Manifestement, notre plan de réduction des émissions de polluants atmosphériques et ses déclinaisons locales, les plans de protection de l’atmosphère ne produisent pas les effets attendus. N’aurait-il pas mieux valu investir vraiment plutôt que de payer une amende de 10 millions d’euros, montant qui n’est d’ailleurs pas inscrit dans cette partie du budget ?

Ce qui me préoccupe, c’est que les seuils de l’Union européenne sont supérieurs aux normes de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui viennent du reste d’être abaissées.

Si nous avions une approche sanitaire de la question, nous chercherions constamment à réduire les émissions de polluants, mais nos politiques n’ont manifestement pas suffisamment cette ambition. Dans les années 1990-2000, nous avons réduit les émissions, surtout industrielles. Depuis lors, nous stagnons, à un niveau qui reste beaucoup trop élevé.

On ne se rend pas suffisamment compte qu’il s’agit d’un problème sanitaire majeur parce que le déclenchement différé des maladies atténue le sentiment d’urgence. Je suis élu d’une circonscription, à l’ouest de l’étang de Berre, dans un territoire plein de vitalité et de belles énergies, mais marqué par des pollutions atmosphériques liées aux industries ou aux transports. Les données de santé, trop restreintes, montrent néanmoins une prévalence de certaines maladies : davantage de cancers notamment, mais pas seulement. Certaines de ces maladies ont des causes professionnelles avérées. Ainsi s’explique au moins une partie des inégalités : ces maladies frappent davantage les ouvriers, y compris les ouvriers sous-traitants, qui ont parfois des difficultés à se faire reconnaître.

Depuis des années, il y a des mobilisations locales, pour savoir, pour comprendre et pour agir. On progresse tout doucement, mais pas assez vite et pas assez fort, parce qu’on n’est pas soutenu par une politique franche de l’État dans ce domaine. À mes yeux, il faudrait instituer des territoires pilotes dans la lutte contre la pollution atmosphérique et ses effets sur la santé, en manifestant une volonté politique et en faisant converger des moyens.

Il faudrait que l’État et ses agences financent de la recherche et des études pour mieux documenter les pollutions locales et les situations épidémiologiques, en établissant des cadastres, en analysant les récits de travail et de vie, en évaluant les exposomes. Les émissions sont très diverses selon les territoires, et il faut traquer les maladies éliminables. Il faudrait que l’État et ses agences, en concertation avec les collectivités locales, mettent le paquet pour réduire les émissions, notamment les plus dangereuses pour la santé. Il faudrait que l’État prenne ses responsabilités en matière d’aménagement du territoire, d’infrastructures et de contrôle des industriels, qu’il joue un rôle moteur dans la transformation des outils et des modes de production. Il faudrait que l’État informe et sensibilise le corps médical et la population, qu’il prenne des mesures de prévention pour limiter l’exposition de cette dernière, en particulier des plus fragiles.

Mais, pour cela, il faudrait qu’il y ait un pilote à bord. Or le pilote sur les questions de pollution atmosphérique, ce n’est pas le ministre de la santé, ce n’est pas vous, et je le regrette. Cette question doit impérativement être traitée à un niveau interministériel, pour que les enjeux sanitaires ne soient plus occultés, pour que l’on appréhende les problèmes à travers le prisme sanitaire bien plus qu’on ne le fait.

Il est temps de nous doter des leviers contemporains d’une politique de santé publique ambitieuse, et qu’au sein de cette politique, la lutte contre la pollution de l’air et ses effets sur la santé devienne une cause mieux identifiée et suivie. Pour contredire Michel Jonasz, « l’air que l’on respire » n’est pas exactement « le même pour tous », même s’il finit par se brasser. Et, pour appuyer Clara Luciani, nous voulons « respirer encore ». Chères et chers collègues, j’en appelle à vous pour mettre en avant avec moi cet enjeu, qui nous concerne tous et auquel plusieurs d’entre vous, j’en suis sûr, sont sensibilisés dans leur territoire.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq (LaREM). Les crédits de la mission Santé s’élèvent à 1,29 milliard d’euros. Cette mission a un champ d’action limité puisque 80 % des crédits sont consacrés à l’AME, les 20 % restants étant dédiés à la politique de prévention, de sécurité sanitaire et d’offre de soins financée par l’État, ainsi qu’au FIVA et à l’indemnisation des victimes de la Dépakine.

Au cœur du programme 183, nous retrouvons l’AME, budgétisée en 2022 à hauteur de 1,079 milliard, soit une progression de 2 %. Loin des caricatures qui reviennent chaque année lors du vote de ces crédits, je tiens à saluer l’engagement du Gouvernement dans la prise en charge des frais de santé des personnes démunies et vulnérables, en l’espèce des personnes migrantes les plus précaires, en vertu du devoir de solidarité nationale qui relève de l’État. Nous pouvons être satisfaits de la poursuite de cet engagement depuis 2017 et de l’attachement du groupe La République en Marche aux valeurs humanistes et de santé publique qui sous-tendent l’AME.

Ce système est à notre honneur. Il préserve au mieux ces femmes et ces hommes, déjà démunis, de pathologies beaucoup plus lourdes, chroniques ou invalidantes, qui les ostraciseraient davantage du reste de la société. Ce dispositif permet aussi de mieux maîtriser les dépenses publiques, en évitant les surcoûts liés à des soins retardés et pratiqués dans l’urgence. Néanmoins, des détournements ont eu lieu, qui ont été mis en avant médiatiquement. Malgré le faible nombre de mis en cause, ils ont porté des coups au système. Cela a nécessité une réforme, que le Gouvernement a menée en 2019, pour mieux contrôler l’attribution de ce droit.

L’application de cette réforme se poursuivra en 2022, sachant que, pendant la crise sanitaire, des mesures exceptionnelles ont été prises pour garantir l’accès aux soins des étrangers en situation de précarité. La réforme, je le rappelle, consiste à renforcer la lutte contre le détournement de ce droit. Quel bilan peut-on en tirer ? Après la réforme, qu’en est-il des contrôles et de l’accessibilité des personnes concernées à l’AME ?

S’agissant des politiques de prévention, je souhaite vous interpeller sur le dépistage du cancer de la prostate. L’INCa, opérateur financé par les crédits que nous examinons, coordonne la mise en œuvre de la stratégie décennale de lutte contre les cancers, annoncée par le Président de la République le 4 février 2021. Son objectif est de réduire significativement le poids des cancers dans le quotidien des Français. Il s’agit notamment de faire advenir le dépistage de demain, d’étendre le dépistage et d’améliorer la balance bénéfices-risques.

Or, lors d’une table ronde consacrée au dépistage du cancer de la prostate – je vous remercie une nouvelle fois de l’avoir organisée, madame la présidente –, nous avons tous été surpris par l’opposition franche entre d’éminents spécialistes, certains étant favorables à un dépistage élargi, plus systématique et faisant appel à de nouvelles techniques, d’autres relatant les effets secondaires nombreux et invalidants de certains traitements actuels, qui dégraderaient la balance bénéfices-risques. Les experts étaient toutefois d’accord sur un point : ils regrettaient l’absence d’études et de données fiables sur la méthode de dépistage de ce cancer. Je proposerai en séance publique de consacrer des crédits à une étude permettant de déterminer objectivement comment mieux dépister ce cancer. Cela s’inscrit pleinement dans la volonté de développer la recherche et le dépistage de demain.

Malgré son champ restreint, la mission Santé finance des actions importantes. Elle est caractérisée par un maître mot : la prévention, pour l’ensemble de la population. C’est pourquoi le groupe La République en Marche votera ses crédits.

Mme Isabelle Valentin (LR). Cette année encore, la mission Santé revêt une dimension particulière et inédite en raison de la crise sanitaire qui frappe notre pays et des mesures d’urgence qui ont été prises. D’une manière générale, elle se démarque de deux autres catégories de textes essentiels relatifs à la santé, les lois dites « santé » et les lois de financement de la sécurité sociale (LFSS), en ce qu’elle prévoit exclusivement des financements issus du budget de l’État, et non de celui de la sécurité sociale. Son objet est triple : le financement de certains opérateurs de la prévention, l’indemnisation des victimes de l’amiante et l’AME.

Cette année, les crédits de la mission Santé s’établissent à 1,296 milliard d’euros en autorisations d’engagement (AE) et à 1,299 milliard en crédits de paiement (CP), montants l’un et l’autre en baisse par rapport à 2021.

Le programme 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins rassemble 17 % des crédits de la mission. Le montant prévu est en diminution d’environ 40 millions par rapport à 2021, évolution qui s’explique par la non-reconduction d’une dotation exceptionnelle de 45 millions en faveur de l’agence de santé de Wallis-et-Futuna. Pourtant, la prévention en santé, constituée par un ensemble d’actions préventives, curatives, éducatives et sociales, est bel et bien la meilleure façon de faire baisser nos dépenses de santé.

Depuis 2020, le programme 204 sert de support indirect à la gestion financière de la crise sanitaire. Ainsi, les dépenses d’achat de matériel – masques, vaccins – et de prestations – transport, systèmes d’information – relèvent de Santé publique France, qui a reçu de l’assurance maladie une dotation exceptionnelle de 4,8 milliards d’euros.

Le programme 204 finance aussi le dispositif d’indemnisation des victimes de la Dépakine. Il y a deux ans, nous avons adopté une réforme de ce dispositif, à la demande de ma collègue Véronique Louwagie, rapporteure spéciale de la commission de finances. Cette réforme devait notamment permettre de réduire de trois à un mois le délai d’indemnisation des victimes par l’ONIAM. Toutefois, son application a été retardée en raison de la crise sanitaire, et il est dès lors difficile d’en établir un bilan complet. En tout cas, la trajectoire demeure toujours très éloignée des objectifs initiaux.

Les crédits du programme 183 Protection maladie s’établissent à 1,087 milliard d’euros, en AE comme en CP. Ce montant est en progression par rapport à la loi de finances initiale pour 2021. Il finance presque exclusivement l’AME, c’est-à-dire l’accès aux soins des étrangers en situation irrégulière – l’AME représente 87 % des crédits de la mission. Les dépenses restantes couvrent la participation de l’État au FIVA.

Pour la deuxième année consécutive, la dépense au titre de l’AME s’accroîtra et dépassera le milliard d’euros. Rappelons qu’elle ne couvre qu’une partie du coût des soins dispensés en France aux étrangers en situation irrégulière, ces soins ne se limitant pas à ceux qui sont prodigués dans le cadre de l’AME. Le coût total représente au moins 1,5 milliard.

Nous ne voterons pas ces crédits en diminution, d’autant que la prévention est très peu abordée.

Mme Perrine Goulet (Dem). La mission Santé revêt une importance particulière, puisqu’elle met en œuvre les outils et les circuits de financement de la stratégie nationale de santé définie par le Gouvernement. Il nous revient notamment de valider la cohérence des crédits avec les dispositions prévues par le PLFSS. Au regard des sommes engagées dans celui‑ci, les crédits de la mission peuvent sembler un peu dérisoires, mais ils s’élèvent tout de même à 1,3 milliard d’euros.

Le programme 183, doté d’un peu plus de 1 milliard d’euros, soit 84 % des crédits de la mission, finance l’AME et le FIVA. Le programme 204, dont le montant s’établit à 213 millions, finance certaines politiques de santé, de santé publique et d’offre de soins.

Malgré leur faible coût, il s’agit de financements essentiels pour l’universalité de l’accès aux soins. L’augmentation des crédits destinés à l’AME, en particulier, témoigne de la responsabilité dont notre pays fait preuve : la France alloue les moyens nécessaires à cette noble mission. Celle-ci répond à des objectifs humanitaires et de santé publique, et fait honneur à notre pays. Par ailleurs, il convient de poursuivre le renforcement de la lutte contre les fraudes, engagé il y a deux ans. Non seulement les fraudes grèvent le budget de l’AME et nuisent à l’atteinte de ses objectifs, mais elles apportent aussi de l’eau au moulin de ses contradicteurs.

Notre groupe souhaite que les débats à ce sujet soient les plus mesurés possible, surtout dans le contexte pandémique actuel. S’agissant d’une telle politique publique, il est nécessaire de sortir des caricatures en vogue et, plus encore, de la surenchère qui précède l’élection présidentielle. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous présenter les résultats des réformes relatives à l’AME engagées depuis le début de la législature ?

Le programme 204 a connu plusieurs modifications ces dernières années. Il est désormais accompagné d’un document de politique transversale, qui donne une visibilité sur l’ensemble des financements ministériels concourant à la politique de prévention en santé. Il s’agissait d’une proposition de notre groupe, destinée à consolider cette politique et à la rendre plus lisible. La prévention n’est pas, nous en sommes convaincus, l’affaire du seul secteur médical ou d’un seul ministère. Ce jaune budgétaire est donc bienvenu.

La LFSS 2020 a acté le passage de Santé publique France dans le giron de la sécurité sociale. Depuis lors, le rôle de cette agence a été largement mis en lumière par la crise sanitaire. Pouvez-vous nous faire un retour d’expérience concernant le changement de pilotage de Santé publique France, notamment au regard des dysfonctionnements qui ont pu apparaître ces derniers mois ?

Notre groupe attache un intérêt marqué à la prévention et milite depuis le début de la législature pour une politique de santé publique qui en fasse une priorité. Or les crédits du programme 204, qui financent plusieurs agences telles que l’INCa et l’ANSES, restent stables. Ne mériteraient-ils pas d’être densifiés pour que ces agences puissent relever les défis auxquelles elles font face ?

Nous pouvons partager certains aspects du constat dressé par le rapporteur pour avis à propos de la lisibilité du programme 204. Tout en étant moins radicaux que lui, nous estimons qu’il serait nécessaire de le rendre plus clair à l’avenir.

En tout état de cause, notre groupe votera les crédits de la mission, qui financent des politiques publiques essentielles, plus encore dans le contexte sanitaire auquel nous devons faire face depuis près de deux ans.

M. Boris Vallaud (SOC). La mission Santé est au cœur des préoccupations des Français. Nous sommes donc frappés que vous asséniez un coup de rabot budgétaire à chacun des deux programmes qui la composent.

Le programme 204 comporte les crédits relatifs à la prévention, à la sécurité sanitaire et à l’offre de soins, qui sont, vous en conviendrez, des enjeux majeurs. Or vous les réduisez de plus de 41 millions d’euros, soit une diminution de 16 %. En particulier, les crédits de l’action visant à aider les hôpitaux à se moderniser baisseront de 43 millions, autrement dit de 44 %. Pour justifier une telle décision après les vagues épidémiques que nous avons eu à surmonter avec dignité et courage, vous aurez du mal à trouver les mots.

En parallèle, de nombreuses actions voient leurs crédits stagner, ce qui revient, une fois l’inflation prise en compte, à une baisse de 1,5 %.

Tel est le cas de l’action Santé des populations, qui finance pourtant des actions essentielles pour des publics fragiles, comme les migrants. Des actions de prévention relatives à la santé de la mère et de l’enfant sont également concernées. Elles seront tout aussi essentielles en 2022. Dès lors, pourquoi réduire leurs crédits ?

Cela concerne aussi l’action Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades, qui comporte des crédits pour la prévention des maladies neurodégénératives, la prévention des cancers et des addictions, comme le tabac et l’alcool, ou encore la santé sexuelle. La baisse des crédits en valeur nette que vous proposez reflète votre manque d’ambition pour des enjeux pourtant cruciaux.

Ensuite, alors que nous sortons tout juste d’une crise sanitaire grave, qui a mis en lumière bien des difficultés de notre système, comment comprendre la baisse en valeur nette des crédits de l’action correspondante ? Si nous avons bien compris que les 4,9 milliards d’euros fléchés dans le PLFSS pour gérer la crise de la covid-19 en 2022 serviront à la fourniture de vaccins et au financement de la prise en charge des tests, où sont les crédits pour reconstituer notre stock de masques ? Plus largement, où sont les crédits pour réarmer notre système de veille sanitaire et son opérateur, Santé publique France ?

Enfin, les crédits de l’action 18 Projets régionaux de santé sont nuls, tant en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiements. Or les projets régionaux de santé, qui sont élaborés sous le pilotage de l’agence régionale de santé (ARS) territorialement compétente, sont cruciaux pour la construction d’une offre de soins et de santé, par parcours, qui réponde aux besoins des territoires, pour le développement de la prévention dans notre système de santé et pour la vie de la démocratie sanitaire. Nous sommes preneurs d’une explication concernant l’absence de crédits pour cette action.

Les moyens que vous proposez pour le programme 204 Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins ne témoignent d’aucune stratégie d’envergure pour transformer notre système de santé. Vous n’avez pas de stratégie concernant la prévention et la promotion de la santé, pas plus que pour le développement de la démocratie en santé. Bref, en matière de santé, votre politique est gestionnaire, et elle ne répond pas aux enjeux que la crise a révélés.

Le second programme contient les crédits relatifs à la protection maladie, notamment l’AME. Là, la hausse des crédits dépasse à peine l’inflation – + 2 %, contre 1,5 % pour la hausse des prix en 2022. En outre, vous focalisez votre action sur « [la] mise en œuvre et [le] suivi des mesures de renforcement des contrôles décidées fin 2019 ». Comme l’AME permet de prendre en charge des soins urgents pour les plus défavorisés, ce n’est pas sur la lutte contre la fraude à l’AME qu’il faut se concentrer mais sur le non-recours à ce dispositif et sur les nombreux obstacles administratifs à son accès. Selon une étude, un allocataire potentiel sur deux ne demande pas l’AME. Force est de constater que vous n’annoncez aucune mesure à ce sujet.

Alors que notre système de santé doit prendre un vrai virage, autour de la prévention, de la santé environnementale, de la construction de parcours de soins et de la démocratie sanitaire, et que l’AME doit toucher un public beaucoup plus large, vos réponses à ces enjeux majeurs sont proches du néant dans ce PLF. Voilà un certain nombre de raisons qui nous conduiront à ne pas voter les crédits de la mission Santé.

Mme Annie Chapelier (Agir ens). La mission budgétaire Santé se focalise sur l’AME. Sa dotation financière, de 1,3 milliard d’euros en crédits de paiement au total, permettra la prise en charge médicale des personnes en situation irrégulière résidant en France depuis plus de trois mois et dont les ressources sont faibles. L’AME donne droit à la prise en charge à 100 % des soins médicaux et hospitaliers dans la limite des tarifs de la sécurité sociale, sans nécessité d’avancer les frais, pour une durée d’un an renouvelable.

Alors que nous souhaitons aller vers une meilleure intégration des personnes réfugiées ou en situation irrégulière, apporter des soins dignes et nécessaires à toute personne est aussi de notre devoir. Mme Buzyn, lorsqu’elle était ministre des solidarités et de la santé, avait défendu l’AME en tant que droit à la santé pour tous. En octobre 2020, elle s’était engagée à travailler à préciser le panier de soins de l’AME. Je rappelle que des débats très tendus avaient porté sur les abus et les fraudes autour de l’AME, dont la ministre avait dû rappeler qu’elle constitue une aide d’urgence au champ d’action délimité.

Quelle est la liste des soins concernés à l’heure actuelle par ce dispositif ? Il me semble que, depuis le 1er janvier 2021, certains soins et traitements non urgents ne sont pris en charge qu’au bout d’un délai de neuf mois après l’admission à l’AME pour tout bénéficiaire ou pour qui n’a pas bénéficié de l’AME depuis plus d’un an, des exceptions étant toutefois prévues pour les soins hospitaliers comme pour ceux de ville.

La mission Santé finance également, à travers son programme 183, le FIVA, créé en 2001, et l’ONIAM. Une dotation financière de 35,2 millions d’euros est prévue, notamment en lien avec la Dépakine et le Mediator.

Nous nous souvenons tous d’Irène Frachon, la pneumologue qui a révélé le scandale pharmaceutique du Mediator. Elle a dû faire face à un nombre colossal d’obstacles pour réussir à faire condamner, le 29 mars dernier, les laboratoires pharmaceutiques Servier pour tromperie aggravée, à l’origine de graves effets secondaires et du désastre humain que nous connaissons. Au total, entre 1 000 et 2 000 personnes seraient décédées en France des suites de ces effets secondaires. Mme Frachon avait alors déclaré que « la médiatisation n’a jamais été une fin en soi. Elle est un moyen qui a permis, dans la douleur, d’obtenir la vérité. » Qu’en est-il des enquêtes sur la mise sur le marché de produits qui ne devraient pas s’y trouver ? Le crime pharmaceutique doit être puni, et cela ne peut reposer uniquement sur les lanceurs d’alerte.

Nous avons été très sensibles au rapport pour avis de M. Dharréville. Bien que nous regrettions la faible présence de politiques de prévention en matière de santé environnementale et d’éducation à la santé dans cette mission budgétaire, le groupe Agir ensemble la soutiendra, de même que l’ensemble du projet de loi de finances pour 2022.

Mme Valérie Six (UDI-I). Les crédits de la mission Santé, relatifs aux dépenses en santé de l’État, sont distinct de ceux de la sécurité sociale. L’un des objectifs de cette mission est de réduire les inégalités territoriales et sociales en matière de santé. Nous militons depuis plusieurs années pour une décentralisation du système de santé afin de permettre une prise de décision plus proche des territoires et une meilleure répartition de l’offre de soins sur l’ensemble du territoire. Mais l’instauration d’une convention sélective a été rejetée à l’issue d’un débat lors de l’examen du PLFSS.

De trop nombreux Français sont encore éloignés des soins dans des territoires où il n’y a pas de médecins à plusieurs kilomètres de leur domicile ou bien où il faut plusieurs mois pour obtenir un rendez-vous. Résignés à l’absence d’offre de soins, beaucoup renoncent purement et simplement à se soigner. Un sondage publié dans le Journal du dimanche du 16 novembre 2019 révélait que 63 % des Français avaient déjà renoncé à des soins ou les avaient reportés, en raison de délais d’attente trop longs ou d’une distance trop importante à parcourir.

Le rapport d’information du 14 octobre dernier des sénateurs Philippe Mouiller et Patricia Schillinger dresse un état des lieux alarmant de l’accès aux soins dans notre pays. Ce rapport rappelle que le Conseil constitutionnel a reconnu expressément en 2012 le droit à la protection de la santé comme objectif de valeur constitutionnelle. Les rapporteurs du Sénat ont formulé plusieurs recommandations à l’État, parmi lesquelles la mise en question de la liberté d’installation des médecins.

Le rapport souligne que les tentatives d’ajustement de la répartition des professionnels de santé, en particulier des médecins, se heurtent à de fortes oppositions, et que le principe de liberté d’installation est insuffisamment mis en regard du principe d’égal accès aux soins et de la notion d’intérêt général. Le système social français solvabilise pourtant la patientèle médicale au travers des dispositifs de prise en charge des dépenses de santé. Ce constat conduit les rapporteurs du Sénat à s’interroger sur l’opportunité de renforcer des dispositifs d’incitation, voire d’adopter des mesures coercitives qui aménageraient la liberté d’installation des médecins. Nous ne pouvons pas rester les bras croisés alors que les inégalités d’espérance de vie s’accroissent à mesure que se creusent les inégalités dans l’offre de soins.

S’agissant du développement de la politique de prévention sanitaire dans le territoire des îles Wallis et de Futuna, nous saluons les mesures d’investissement prévues. Toutefois, le plan d’investissement pour 2022 sera financé par un report de crédits non consommés en 2021. Comment s’explique la non-consommation de ces crédits, et comment travailler à une rencontre plus efficiente entre les enveloppes budgétées et les projets envisagés ?

Nous nous interrogeons sur l’augmentation continue des moyens dédiés à l’AME, qui représente la grande majorité des crédits de cette mission. Des rapports de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et de l’Inspection générale des finances, mais aussi celui de notre collègue Véronique Louwagie, pointent du doigt les fraudes à l’AME et le dévoiement du dispositif. La réforme de l’AME devait permettre de mieux contrôler les dossiers déposés et de limiter la fraude, mais il semblerait qu’elle n’ait pas encore produit les effets escomptés.

L’AME est une mesure d’humanité, puisqu’une personne malade doit être soignée, d’où qu’elle vienne. Néanmoins, l’augmentation continue du coût du dispositif, qui est aujourd’hui équivalent au budget annuel de l’Assistance publique‑Hôpitaux de Marseille, et son dévoiement dénoncé par les rapports précités, nuisent à l’acceptabilité sociale de cette mesure. Compte tenu des effets très relatifs de la réforme de l’AME, notamment en raison de la crise sanitaire, comment comptez-vous remettre en œuvre cette réforme ?

Enfin, je tiens à saluer ce que vient de nous annoncer Charlotte Parmentier-Lecocq. Notre groupe est très investi en faveur de la prévention. Les crédits de cette mission budgétaire financent le fonctionnement des opérateurs de l’État en matière de prévention, notamment l’INCa. Nous plaidons pour une politique publique renforcée en matière de prévention, afin d’assurer une prise en charge précoce des pathologies.

Mme Jeanine Dubié (LT). L’an dernier, j’ai eu l’honneur de rapporter la mission Santé au nom de notre commission, et j’ai alors constaté son caractère assez hétérogène. Cette mission n’agrège en effet qu’une petite partie du financement étatique de la politique de santé publique, et elle a vu son champ rétrécir au fil des années sous l’effet de nombreux transferts à la sécurité sociale. Les derniers en date concernent Santé publique France, que la crise sanitaire a largement mise en lumière, et l’ANSM, en 2019.

Cet éclatement nous empêche d’avoir une vision globale en matière de santé publique, d’offre de soins et de prévention. La mission Santé finance des actions disparates, sans réelle cohérence d’ensemble, comme notre rapporteur pour avis l’a dit à juste titre. Je trouve donc intéressante sa proposition de rattacher les programmes de cette mission à celle intitulée Solidarité, insertion et égalité des chances.

Pour en venir concrètement au budget pour 2022, nous constatons deux tendances qui correspondent à des mouvements contraires dans chacun des programmes de la mission.

S’agissant du programme 204, relatif à la prévention, à la sécurité sanitaire et à l’offre de soins, les crédits seront en légère baisse, une fois neutralisée la dotation d’investissement exceptionnelle de 45 millions d’euros qui a été accordée à l’agence de santé de Wallis-et-Futuna dans le cadre du Ségur de la santé.

Je me réjouis de l’augmentation de la subvention à cette agence, qui sera portée à 49,4 millions d’euros en CP, contre 47,8 millions en 2021. J’avais consacré mon rapport à cette agence très particulière, car financée intégralement par la solidarité nationale, pour des raisons à la fois historiques et liées aux caractéristiques de ce territoire très éloigné de la France hexagonale. Le sous-financement chronique de l’agence n’a pas permis d’améliorer l’accès aux soins des habitants de Wallis et Futuna, qui sont confrontés à des moyens inadaptés et à des bâtiments vétustes. Leur état de santé est plus que préoccupant, les taux de diabète, d’hypertension, de cancers et d’addictions diverses étant très élevés. Il était urgent de renforcer les moyens, alors que la crise sanitaire a accentué l’isolement du territoire, du fait des confinements successifs. Nous appelons à une vigilance redoublée et durable concernant ce territoire, pour que les investissements et les moyens soient pérennes.

Une autre préoccupation s’agissant de ce programme concerne notre politique en matière de santé publique, tout particulièrement dans le domaine de la prévention. Les deux principales agences financées par le programme reçoivent une dotation stable mais souffrent d’un manque d’effectifs pour assurer leurs missions. C’est le cas de l’INCa, qui indique un besoin de 25 équivalents temps plein (ETP) et des difficultés à recruter, mais aussi de l’ANSES. Ces deux agences sont pourtant essentielles en matière prévention et de recherche.

L’an dernier, j’appelais le Gouvernement à faire preuve de plus de volontarisme concernant des problématiques de santé publique reléguées au second rang, comme les maladies vectorielles à tiques. Je réitère cet appel, en particulier pour la maladie de Lyme. Notre rapporteur Pierre Dharréville insiste, lui, sur la lutte contre la pollution de l’air, et je ne peux que le rejoindre. De manière générale, l’État doit se saisir davantage des problématiques liées à la santé environnementale.

L’autre tendance de cette mission budgétaire est la hausse des crédits du programme 183, relatif à la protection maladie, cette hausse étant essentiellement liée à l’AME.

Notre groupe continue de déplorer les mesures prises en 2020 pour limiter l’accès à l’AME et à la protection universelle maladie. Nous n’oublions pas que ces restrictions avaient entraîné une baisse de 15 millions d’euros et que leur entrée en vigueur a eu lieu en pleine crise sanitaire. Le dernier rapport annuel de Médecins du monde sur l’accès aux droits et aux soins a de quoi nous inquiéter quant à la santé et à l’accès aux soins des plus précaires, notamment les personnes migrantes.

Nous continuons d’alerter sur le risque de non-recours à l’AME par des personnes qui y ont droit mais sont découragées par la complexité du dispositif. En période d’épidémie, retarder l’accès aux soins peut être dangereux pour l’ensemble de la société. Garantir un accès effectif est un devoir collectif, éthique et humanitaire.

M. Marc Delatte. En raison des complications qui en découlent, le diabète a un coût pour l’assurance maladie de 7,7 milliards d’euros. Le tabac est à l’origine de 75 000 décès par an et coûte 26 milliards d’euros, à multiplier par quatre pour arriver au coût social total. Les chutes de personnes âgées causent 12 000 décès par an et représentent un coût de 2 milliards d’euros. Comment renforcer la prévention primaire et secondaire ? Quels leviers actionner pour que chacun soit réellement un acteur de sa santé ? Comment réduire concrètement les inégalités sociales et territoriales en la matière ?

M. Jean-Louis Touraine. J’envisage de déposer en séance publique un amendement sur l’usage addictif du chemsex, en espérant que vos collaborateurs travailleront également sur la question d’ici là.

Ces pratiques récentes sont le fait de personnes, souvent jeunes, qui utilisent des produits psychoactifs avant et pendant des relations sexuelles pour amplifier les sensations et la durée des rapports ainsi que pour se désinhiber. D’abord en usage parmi les homosexuels, elles connaissent désormais un développement rapide chez les hétérosexuels et touchent de plus en plus de personnes en addiction. Il en résulte les méfaits de l’addiction mais aussi des accidents mortels par surdosage ou association inopportune avec d’autres produits. Plusieurs vagues de décès sont survenues depuis 2017 à Paris, à Lyon et probablement dans d’autres villes. À cela s’ajoute une transmission du virus HIV et d’autres maladies sexuellement transmissibles.

Du fait du caractère récent de ces pratiques, maintenant largement répandues, la parade en matière de santé, de prévention et d’addictologie n’a pas encore eu le temps de se développer. Seriez-vous d’accord, monsieur le ministre, pour réserver quelques moyens afin d’analyser et de prévenir ce fléau qui menace nos jeunes ? Accepteriez-vous de le faire dès cette année, avant que la progression en cours ne soit encore plus forte ?

M. Bernard Perrut. La gestion financière de la crise sanitaire est particulièrement exigeante. Face aux dépenses liées à l’achat de matériel, aux masques, aux vaccins, aux prestations de transport et aux systèmes d’information, Santé publique France a reçu une dotation exceptionnelle, ensuite reversée partiellement au programme 204 au moyen d’un fonds de concours, qui a lui-même reçu des versements complémentaires. La Cour des comptes s’est intéressée à cette situation relativement complexe et à la confusion des rôles entre Santé publique et le ministère de la santé, mais ce n’est pas la question que je souhaite vous poser.

Du fait des éléments financiers que j’ai rappelés, on pourrait penser que nos hôpitaux ont reçu les moyens nécessaires pour faire face. Pour prendre l’exemple d’un hôpital que je connais bien, et dans lequel vous vous êtes rendu, en 2020, 60 % seulement des surcoûts covid ont été couverts, et l’exercice est clos. Pour 2021, me dit-on, l’hôpital aurait reçu à ce jour 2,3 millions d’euros pour les surcoûts covid, alors que 8 millions ont été engagés. Pour la vaccination, un surcoût de 1 million n’est toujours pas couvert. J’aimerais donc savoir si tous les hôpitaux ont bien reçu les moyens nécessaires pour faire face à leur mission.

Mme Michèle de Vaucouleurs. Les documents relatifs à la mission Santé ne précisent pas si les consultations et soins psychiatriques pour les personnes en situation irrégulière sur le sol français peuvent faire l’objet d’une prise en charge au titre de l’AME ou des soins urgents. Ils ne sont pas cités dans le panier de soins. L’accès à ces soins est pourtant fondamental pour les migrants, surtout compte tenu de leur parcours de vie souvent marqué par de nombreux traumatismes entraînant des conséquences sur la santé mentale. Ces soins sont-ils effectivement pris en charge ?

M. Thierry Michels. Comment améliorer la promotion et la mise en œuvre du dépistage gratuit du cancer du sein ? Le taux de participation des femmes de 24 à 74 ans connaît une baisse régulière depuis le début des années 2010. Quid, également, des femmes de plus de 75 ans, tout aussi concernées mais qui se sentent à tort exclues du programme de dépistage ? Quid, encore, des femmes éloignées des centres hospitaliers, vers lesquelles il faudrait aller ? Je pense à un déploiement généralisé d’unités mobiles de mammographie.

Quelles sont vos priorités en matière de recherche sur les causes des cancers du sein et de financement ? Les recherches menées au sein des hôpitaux universitaires de Strasbourg portent notamment sur l’incidence des facteurs environnementaux, grâce à des techniques d’exploitation massive des données et d’intelligence artificielle.

M. Alain Ramadier. À l’initiative de Véronique Louwagie, la loi de finances pour 2020 a modifié sur trois points le dispositif d’indemnisation des victimes de la Dépakine, dont le premier bilan était peu satisfaisant. La mise en œuvre progressive de la réforme et la crise sanitaire ont ralenti le fonctionnement du dispositif d’indemnisation. Méconnu des personnes concernées, ce dispositif connaît une trajectoire très éloignée des objectifs initiaux, qui contraste avec l’efficacité de celui des victimes du Mediator. Le refus persistant du laboratoire Sanofi de participer au processus d’indemnisation des victimes n’y est sans doute pas étranger. Quelles pistes pourraient être envisagées pour atteindre les objectifs fixés ?

M. Sébastien Chenu. Plus gros poste de la mission, l’AME représentera 1 milliard d’euros et sera en hausse de 2 % en 2022. Selon un rapport de l’IGAS, nous avons un des dispositifs les plus généreux de l’Union européenne et l’hypothèse d’une migration pour soins n’est clairement pas marginale. Plus d’un quart des étrangers en situation irrégulière citeraient les soins parmi les raisons de leur migration. La migration pour soins est donc une réalité.

Nous réaffirmons la nécessité de supprimer l’AME, sauf pour des soins urgents – c’était aussi l’objet d’une proposition de loi d’un ancien député LR, Yannick Moreau. Nous n’avons pas les moyens de faire supporter aux Français ce coût de 1 milliard d’euros. Le rapport de l’IGAS avance des propositions pour limiter les fraudes et les usages abusifs de l’AME. À un moment où l’hôpital crie famine – 20 % des lits sont fermés par manque de personnel –, qu’avez-vous retenu de ce rapport ? Que comptez-vous faire des préconisations de l’IGAS pour limiter les fraudes et les excès liés à l’AME ?

M. le ministre. Je voudrais tordre le cou à une idée que je vois monter dans le débat médiatique : un lit de médecine sur cinq serait fermé à l’hôpital. Étonné par ce chiffre, qui ne vient pas de mon ministère, j’ai saisi mes administrations centrales afin de savoir à quoi cela correspond.

S’il y a, comme chaque année à la période automnale, un certain taux d’absentéisme, des départs en vacances, parfois quelques démissions et des difficultés réelles pour maintenir ouvertes toutes les capacités hospitalières, j’aurais tendance à contester le chiffre de 20 %. Parce que j’aime profondément la science et qu’avant de m’exprimer, je fais des vérifications pour ne pas raconter n’importe quoi, j’ai demandé à avoir une étude aussi exhaustive que possible sur les fermetures de lits.

Pour l’instant, le seul chiffre dont je dispose porte sur un échantillon très parcellaire, de seize centres hospitaliers universitaires. Avec tous les biais qui peuvent exister, la dernière donnée qui m’est remontée est que 5 % des lits de médecine sont temporairement fermés – assez loin, donc, de 20 % du parc hospitalier. J’aurai l’occasion de communiquer sur ces chiffres, d’une manière très apaisée. Surtout, je continuerai de proposer toutes les solutions possibles pour permettre aux hôpitaux de fonctionner, même si, après quatre vagues de la pandémie de covid, et alors que l’automne a débuté et que beaucoup de soignants ont dû renoncer cet été à leurs congés et peuvent éventuellement commencer à les prendre, chacun peut comprendre que les tensions en ressources humaines puissent être vives à l’hôpital.

J’invite chacun à rester dans son rôle et à communiquer avec des données les plus précises possible. Je ne veux pas qu’on ajoute de l’anxiété dans le débat alors que l’hôpital tient bon depuis un an et demi – je crois qu’on peut collectivement en être fier.

S’agissant du rapprochement entre le FIVA et l’ONIAM, un rapport de l’IGAS a évoqué son intérêt, ce qui a pu créer un émoi auquel j’ai très vite répondu. J’avais même dit avant la publication du rapport que je n’avais aucun projet de fusion en la matière. Je ne nie pas l’intérêt que cela pourrait avoir mais les conditions ne sont clairement pas réunies. Il n’y aura aucun projet, ni avant-projet, tant que je serai le ministre en charge.

Nous pourrions avoir un débat très long sur la prévention en santé publique. Oui, la pollution de l’air est le premier risque environnemental. On estime que 40 000 morts prématurées par an lui sont imputables dans notre pays, et l’OMS considère aussi que la pollution de l’air est responsable de nombreux décès prématurés. Le coût de l’impact sanitaire est donc élevé. Il existe aussi une évaluation du coût social de la pollution de l’air intérieur : il serait de 19 milliards d’euros par an.

J’avais confié, quand j’ai été nommé, que je voulais prendre cette question à bras‑le‑corps. La crise du covid nous a fait prendre un retard, mais je vous rejoins totalement concernant l’objectif d’une santé publique plus globalisée. Quand une catastrophe se produit dans une usine, qu’on vous parle le lundi de la qualité de l’eau et le mercredi de l’impact sur l’air, cela n’a pas de sens : les Français veulent qu’on leur explique, de façon générale, l’impact sanitaire.

Nous devons être plus performants en matière de formation, d’information, de prévention et d’action dans les territoires. C’est un sujet que nous avons pris à bras‑le‑corps. Je ne vais pas énumérer tous les plans en vigueur et les observatoires qui existent, mais il faut évidemment continuer à le faire. Bien que la France soit très loin d’être à la traîne par rapport aux autres pays en matière de santé environnementale, on ne peut pas considérer que nos processus soient encore tout à fait aboutis.

Le plafond d’emplois des agences est en hausse, et cela faisait longtemps que cela n’avait pas été le cas. Il y a cinq emplois de plus à l’Agence de la biomédecine, cinq autres à l’ANSM et deux à l’ONIAM. Par ailleurs, les renforts de Santé publique France sont en train d’être consolidés, avec au moins 64 ETP supplémentaires.

S’agissant de la lutte contre la désertification médicale, l’efficacité des dépenses fiscales est réelle. Les mesures incitatives fonctionnent. Les ARS reçoivent beaucoup de demandes de jeunes médecins qui souhaitent s’installer : ils regardent quelles sont les conditions proposées, afin d’être correctement rémunérés.

Le dépistage du cancer de la prostate est une question majeure, et l’amendement que Mme Charlotte Parmentier-Lecocq prévoit de déposer en séance publique est intéressant. Ce cancer est le plus fréquent chez les hommes, et la troisième cause de mortalité par cancer. Le dépistage individuel est une pratique fréquente, mais la mise en place d’un dépistage systématique n’est recommandée ni en métropole ni aux Antilles par la Haute Autorité de santé, même pour les personnes à risque élevé. Il en est de même au niveau européen et au niveau de l’OMS. À l’inverse du cancer du sein, les sachants estiment qu’il n’y a pas lieu de proposer un dépistage systématique. Cela ne veut pas dire qu’il faut arrêter de chercher : je suis sûr qu’il faut explorer certaines pistes. Je rappelle en tout cas que notre stratégie décennale traite de la question du cancer de la prostate, notamment de son dépistage.

J’en viens à la question de l’AME.

D’abord, nous avons différé l’application de la réforme de l’AME en raison de la crise sanitaire, pour ne pas bousculer les choses.

L’AME et les soins urgents constituent des dispositifs généreux : et alors ? Ils sont à l’honneur de notre pays et, surtout, réalistes. Une personne malade qui se présente à l’hôpital sera soignée même si elle n’a pas les moyens de payer ses soins, et la facture incombera à l’hôpital. L’AME permet de solvabiliser une demande de soins qui, de toute façon, trouvera une réponse de la part des médecins, d’où que vienne la personne en demande et qu’elle ait des papiers ou non. La non-assistance à personne en danger ne fait pas partie de l’ADN des blouses blanches de notre pays, et ce n’est sûrement pas par l’AME qu’il faut aborder le débat sur l’immigration.

Le Président de la République a néanmoins souhaité que des dispositifs de contrôle soient mis en œuvre afin d’identifier tout mésusage. Parmi ceux qui ont été votés, la centralisation de la gestion dans quatre caisses pivots a permis de faire passer de 10 % à 13 % la proportion de dossiers doubles contrôlés par l’agent comptable – 1,3 % comportait une anomalie...

La CNAM a désormais accès à la base VISABIO pour contrôler d’éventuels visas dissimulés : ce n’est le cas que dans 0,35 % des demandes. Quel raz-de-marée !

M. Sébastien Chenu. Tout va bien !

M. le ministre. Par ailleurs, le nombre de bénéficiaires de l’AME en 2020 et au premier semestre 2021 ne marque pas de rupture tendancielle qui pourrait indiquer une hausse du non-recours, comme le craignaient les associations.

Enfin, nous avons prolongé les droits à l’AME pendant la crise sanitaire. La mesure 27 du Ségur de la santé, « Lutter contre les inégalités de santé », prévoit le financement de nouvelles équipes mobiles. Nous avons multiplié les permanences d’accès aux soins de santé et les opérations d’« aller vers », à la satisfaction des ARS et des associations.

Quant à l’évolution du panier de soins de l’AME, des mesures de resserrement autour des soins essentiels ont déjà été prises par voie réglementaire, en sorte que nous sommes parvenus à un équilibre. Depuis la loi de finances pour 2020, certaines prestations programmées non urgentes sont soumises à un délai d’ancienneté de neuf mois, mais, à partir du 1er janvier 2021, on pourra obtenir l’accord des services de contrôle médical de l’assurance maladie qu’elles soient effectuées avant expiration de ce délai si on les juge urgentes ou nécessaires. Cette mesure a donné lieu à de nombreux débats au Parlement ; elle a au moins cet avantage qu’elle permet de savoir combien de bénéficiaires de l’AME par an demandent à bénéficier d’une rhinoplastie ou d’une prothèse d’épaule : dix dossiers déposés dans toute la France !

Je confirme, par ailleurs, que l’AME couvre la prise en charge de soins psychiatriques, dans la limite du tarif de responsabilité.

Monsieur Vallaud, la baisse de 45 millions des crédits du programme 204 s’explique par la non-reconduction d’une subvention exceptionnelle du même montant versée l’année dernière à l’agence de santé de Wallis-et-Futuna. Le programme 204 ne connaît donc pas de baisse.

Les projets régionaux de santé (PRS) ne sont en effet crédités d’aucun euro : l’année dernière a été votée une bascule de ces crédits dans le Fonds d’intervention régional (FIR), qui entre dans le champ du PLFSS. Cette année, nous avons consacré 460 millions d’euros à ce même FIR pour des dépenses de prévention.

Mme Isabelle Valentin s’est inquiétée du manque de moyens consacrés à la prévention et de stratégie en la matière. Je ne citerai que quelques-uns des nouveaux plans emblématiques : le quatrième programme national nutrition santé (PNNS4), le quatrième plan national santé-environnement (PNSE4), la politique des 1 000 premiers jours, la stratégie décennale de cancérologie, le fonds de lutte contre les addictions liées aux substances psychoactives.

J’en conviens, malgré une action sur les structures et les modalités d’intervention au service d’un objectif ambitieux, on ne touche pas toujours la cible, surtout lorsqu’il s’agit de jeunes. J’ai diligenté trois grandes missions en santé publique sur cette question. Un rapport admirable sur la santé et le bien-être des jeunes m’a déjà été remis et je réfléchis avec mon équipe aux suites à lui donner. La santé publique a en effet évolué, et je ne suis pas sûr qu’un adolescent de 17 ans prête encore attention au message : « l’abus d’alcool est dangereux pour la santé ». Les jeunes ont besoin d’autoévaluation, d’exprimer leurs besoins sur les réseaux sociaux, et cela passe par des applications sur smartphones. Il est donc grand temps de mettre les politiques de prévention au diapason de notre époque et de tenir compte des attentes de la population. Nous pourrions y travailler ensemble.

Madame Six, les 45 millions octroyés en 2021 à l’agence de Wallis-et-Futuna sont destinés à des investissements, dont la crise sanitaire a retardé l’instruction. Les crédits non consommés seront intégralement reportés et l’enveloppe préservée.

Madame Goulet, Santé publique France a joué et continue de jouer un rôle central et extrêmement actif dans la gestion de la crise sanitaire, notamment au regard des campagnes de prévention et de promotion de la vaccination, et d’achat de vaccins. Son financement est désormais dans le champ du PLFSS, ce qui a permis de rehausser le budget de Santé publique France de plus de 4 milliards.

Madame Dubié, l’ANSM se verra octroyer cinq ETP supplémentaires et l’INCa bénéficiera, grâce aux crédits prévus dans le cadre de la stratégie décennale de lutte contre le cancer – 650 millions pour le quadriennal 2021-2025 –, de financements pour des effectifs de recherche.

J’ai anticipé les inquiétudes de Jean-Louis Touraine s’agissant du chemsex, en confiant, il y a trois mois, une mission au président de la Fédération française d’addictologie, le professeur Amine Benyamina. Il me rendra ses conclusions avant la fin du mois de décembre : nous les intégrerons à la feuille de route relative à la stratégie nationale de santé sexuelle.

Bernard Perrut m’a interrogé sur la question du surcoût lié au covid-19 dans les hôpitaux. À ce stade, ont été provisionnés 1,4 milliard d’euros pour 2021 ainsi que 870 millions pour la vaccination et les tests, et 1,8 milliard a déjà été délégué. Nous travaillons au cas par cas à intégrer le solde dans les prochaines délégations de crédits dans l’optique de ne pas déstabiliser les budgets hospitaliers. Le budget voté hier en PLFSS est considérablement plus élevé que l’ensemble des surcoûts en question.

Mme Six m’a également interrogé sur l’impact de la crise sur le renforcement des mesures de lutte contre la fraude. Durant les deux premiers confinements, pour éviter les ruptures de droits, nous avons décidé de prolonger ceux-ci de trois mois pour 300 000 bénéficiaires. L’exigence du dépôt des dossiers au guichet a été suspendue, mais les autres mesures ont pu être mises en œuvre, notamment l’accès au fichier par les agents de la CNAM.

Le dépistage du cancer du sein a marqué un recul pendant le confinement – de mémoire, de 55 % à 53 %. On ne peut, de toute façon, pas se satisfaire de 55 %, et nous nous efforçons de renforcer l’accès au dépistage, notamment pour les femmes âgées de plus de 75 ans, sujet de la question de Thierry Michels. C’est un travail constant qui fait partie de la stratégie décennale de lutte contre le cancer.

S’agissant de la Dépakine, la loi de finances pour 2020 a fusionné en une instance unique le collègue d’experts et le comité d’indemnisation, et a instauré un régime de présomption d’imputabilité des dommages causés par ce médicament à un manque d’information de la mère sur ses effets indésirables. Sur les 809 dossiers déposés par des victimes directes au 31 juillet 2021, 185 sont clos à l’instruction et 263 ont fait l’objet d’un projet d’avis du collège d’experts soumis à contradictoire. Le montant total des offres proposées par l’ONIAM s’élève à 35,25 millions d’euros, sachant que 29,5 millions ont d’ores et déjà été versés aux victimes. Le non-recours au dispositif amiable est un enjeu, mais l’amélioration des délais de traitement et les montants versés doivent faire la preuve de tout leur intérêt.

La commission entend ensuite M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé, et Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées, sur la mission Solidarité, insertion et égalité des chances du projet de loi de finances pour 2022 (n° 4482).

 

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. La mission Solidarité, insertion et égalité des chances regroupe des programmes relevant de plusieurs ministères, ce qui est révélateur de son importance. Elle s’inscrit au cœur des préoccupations des Français, dans une période sensible.

En matière de solidarité, la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté se déploie sur tous les territoires avec des mesures emblématiques comme le petit-déjeuner à l’école, la cantine à 1 euro, les points conseils budget, dont le rôle a récemment été mis en lumière par le rapport sur le surendettement de votre collègue Philippe Chassaing, mais aussi avec la contractualisation entre l’État et les collectivités – en premier lieu métropoles et départements – qui porte ses premiers fruits.

Le petit déjeuner gratuit à l’école me tient beaucoup à cœur, car il participe à remédier à un retard à l’apprentissage. Il connaît un fort redémarrage depuis le mois de septembre : 150 000 enfants en bénéficiaient l’année dernière et nous comptons dépasser les 300 000 cette année, avec une augmentation de la fréquence des petits déjeuners sur la semaine. L’évaluation montre que le dispositif fonctionne bien, et que tout le monde est content, les enfants comme les enseignants, les parents et les maires.

Autre mesure de lutte contre les inégalités de destin, le projet de loi de finances acte l’expérimentation de la recentralisation du revenu de solidarité active (RSA) pour la Seine‑Saint‑Denis. Il s’agit de permettre à ce département de consacrer davantage de moyens à sa compétence d’insertion. Des indicateurs de processus et de résultat permettront d’évaluer en temps réel l’effectivité de l’insertion des jeunes.

La crise sociale que chacun redoutait a été évitée, même s’il nous faudra du temps pour panser les plaies du traumatisme collectif que nous avons vécu. Nous pouvons être fiers que notre République sociale et que la force de la solidarité nationale aient permis d’éviter une véritable explosion de la pauvreté dans notre pays. Grâce au chômage partiel et au fonds de solidarité, parmi d’autres dispositifs d’accompagnement, le taux de chômage est inférieur à ce qu’il était avant la crise économique de 2008 et l’investissement est en hausse. Les deux aides exceptionnelles versées au printemps et à l’automne 2020, inscrites au programme 304 Inclusion sociale et protection des personnes, ont également contribué.

La mission intègre les moyens du ministère des solidarités et de la santé. Ceux-ci seront renforcés en 2022, ce qui traduit l’importance de ses politiques, non seulement dans la crise actuelle, mais plus largement pour notre modèle de société.

En particulier, des effectifs de crise seront maintenus à la fois en administration centrale, à hauteur de 116 équivalents temps plein (ETP), et dans les agences régionales de santé (ARS), à hauteur de 167 ETP. Pour la deuxième année consécutive, le schéma d’emplois structurel du ministère sera positif : 35 ETP permettront de le réarmer, notamment au travers de ses services déconcentrés ; 118 ETP seront également mobilisés au sein des ARS et dédiés spécifiquement à la mise en œuvre des 6 milliards d’euros d’investissements du Ségur de la santé.

La crise sanitaire a prouvé combien était précieuse et même vitale une protection sociale robuste, qui ne laisse personne au bord du chemin. Si elle a rebattu les cartes, elle ne nous fait pas perdre de vue les constats établis en 2017 qui ont conduit à une stratégie ambitieuse pour mieux lutter contre la pauvreté.

Celle-ci se déploie et porte peu à peu ses fruits, même si évidemment nous sommes loin du compte et si la pauvreté reste une réalité pour des millions de nos concitoyens. Nous continuerons donc avec détermination à actionner tous les leviers possibles pour la faire reculer.

Mme Sophie Cluzel, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées. Ce dernier budget du quinquennat consacré au handicap et à l’égalité entre les femmes et les hommes montre que nous pouvons être collectivement fiers du travail accompli et co‑construit ensemble.

Le programme 157 Handicap et dépendance de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances finance les actions engagées pour les personnes en situation de handicap et les personnes âgées en perte d’autonomie. Il est doté de 13,237 milliards d’euros, en progression de 4,5 %. Ce budget met l’accent sur trois grands axes de transformation : le plan de transformation des établissements et services d’aide par le travail (ESAT), la lutte contre la maltraitance, et bien sûr la réforme du mode de calcul de l’allocation aux adultes handicapés (AAH).

Grâce à la mobilisation de chacun, nous changeons la donne pour garantir aux personnes en situation de handicap leur juste place de citoyens à part entière et non à part.

Sur l’emploi, nous avons tenu bon durant la crise sanitaire, économique et sociale. Le taux de chômage des personnes handicapées a reculé. Leur taux d’emploi direct est en augmentation depuis le début du quinquennat : il est passé de 3,6 % à 3,8 % dans le privé, et s’élève à près de 6 % chez les employeurs publics. Une prise de conscience massive est en cours ; l’emploi des personnes handicapées est un vrai enjeu de ressources humaines au regard de la responsabilité sociale des entreprises.

L’activité professionnelle est au cœur des demandes des personnes en situation de handicap – c’est bien notre projet de société.

Trois mesures issues du plan de transformation des ESAT trouvent place dans ce projet de loi de finances.

D’abord, 10 millions d’euros sont consacrés à l’annualisation du calcul de l’aide au poste que ces établissements perçoivent. Un énorme chantier a été mené en six mois, notamment grâce aux associations concernées. Il était un préalable indispensable pour garantir financièrement le droit au retour des travailleurs ayant intégré le milieu ordinaire mais dont le contrat de travail a été rompu. Il s’agit de fournir le filet permettant de sécuriser la prise de risque que constitue le départ vers le milieu ordinaire, en l’accompagnant en tant que de besoin et en garantissant l’aller-retour.

Ensuite, nous investissons 1,2 million d’euros pour simplifier le quotidien des professionnels en dématérialisant enfin la transmission des bordereaux de paiement depuis les ESAT vers l’Agence de services et de paiement de l’État.

Enfin, 15 millions d’euros, inscrits, ceux-là, au programme Cohésion de la mission Plan de relance, sont dédiés au nouveau fonds d’aide à la transformation des ESAT mais aussi à l’aide au recrutement des salariés en situation de handicap, prolongée jusqu’à la fin du mois de décembre. Plus de 21 000 contrats ont ainsi été signés, dont 71 % en contrats à durée indéterminée, et 80 % dans des très petites entreprises et des petites et moyennes entreprises : le dispositif agit donc comme un vrai levier de la relance. Des financements supplémentaires, à hauteur de 15 millions, sont dédiés aux dispositifs d’emplois accompagnés : le job coaching produit également ses effets.

La principale dépense du programme 157 est l’AAH. Près de 12 milliards d’euros de crédits y sont consacrés, soit une progression de 25 % sur l’ensemble du quinquennat et 2,4 milliards de plus qu’en 2017.

Dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2022, les crédits augmentent de 563 millions d’euros. Cette hausse est bien sûr liée à la dynamique démographique des plus d’un million d’allocataires, mais elle résulte également de la revalorisation exceptionnelle à 904 euros intervenue en 2018, soit 100 euros de plus par mois et 2 milliards de dépenses supplémentaires.

Cette hausse concrétise surtout l’engagement fort que j’avais pris devant l’Assemblée nationale en juin dernier s’agissant de la réforme du calcul de l’AAH. Ce PLF instaure en effet un abattement forfaitaire de 5 000 euros sur les revenus du conjoint du bénéficiaire, qui se substitue à l’abattement existant de 20 %. Pour traiter toutes les situations, nous y ajoutons un abattement supplémentaire de 1 100 euros par enfant à charge.

Ce dispositif est plus redistributif et plus juste : il permet aux personnes inactives dont le conjoint est au SMIC de percevoir une AAH à taux plein. Au total, 120 000 foyers vont bénéficier d’une hausse moyenne de 110 euros par mois, pour un coût estimé à 185 millions, sans aucun perdant. En particulier, les 44 000 personnes en couple qui travaillaient n’y perdront pas un centime.

En cas de changement de situation familiale – décès ou séparation –, grâce à la caisse d’allocations familiales (CAF), les ressources du conjoint ne seront plus prises en compte dans le calcul de l’AAH dans un délai de dix jours. Cette mesure s’applique évidemment en cas de séparation consécutive à des violences conjugales.

Le programme 137 Égalité entre les femmes et les hommes finance les actions participant à la politique engagée en faveur de cette égalité, qui a été érigée au rang de grande cause nationale du quinquennat. Après une hausse de 40 % en 2021, le budget alloué au secrétariat d’état chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes connaîtra en 2022 une augmentation de 25 %. Ce sont 9,1 millions d’euros supplémentaires qui viendront renforcer trois axes prioritaires : la prévention et la lutte contre les violences faites aux femmes, l’égalité économique entre les femmes et les hommes, l’accès au droit et la diffusion de la culture de l’égalité.

Ces crédits accompagneront le développement des mesures issues notamment du Grenelle contre les violences conjugales. D’abord, l’extension des horaires du 3919 – depuis le 30 août 2021, le numéro fonctionne vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept. Ensuite, le renforcement de la structuration du réseau de lieux d’écoute, d’accompagnement et d’orientation ainsi que des accueils de jour. Les places d’hébergement réservées aux victimes de violences auront ainsi augmenté de façon tout à fait inédite depuis 2017 : en progression de 60 %, leur nombre atteindra 7 800 places disponibles à la fin 2021. Quant au financement à la place, sa revalorisation sera de 30 %, passant de 25 euros à 35 euros en moyenne.

Enfin, afin de lutter contre le passage à l’acte et contre la récidive des auteurs de violences faites aux femmes, vingt-sept centres de prise en charge des auteurs de violences conjugales (CPCA) ont vu le jour, et trois seront prochainement créés. Environ 3 000 hommes y ont été reçus.

Le budget pour 2022 est donc ambitieux. Il porte en lui la volonté d’une société de l’autodétermination et non de l’assignation à résidence, une société inclusive, qui protège, une société de la diversité, aux fondements de notre engagement et de notre richesse.

Mme Christine Cloarec-Le Nabour, rapporteure pour avis des crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances. La discussion du PLF 2022 intervient dans un contexte heureusement différent de celui de 2021, et marqué par une amélioration de la situation économique. Si nous pouvons nous en réjouir, nous devons redoubler d’efforts pour améliorer la situation de nos concitoyens les plus fragiles, objectif que nous poursuivons sans relâche depuis le début du quinquennat.

La mission Solidarité, insertion et égalité des chances est celle dont les crédits ont le plus augmenté depuis cinq ans, passant de 19,7 milliards d’euros en 2017 à 27,6 milliards en 2022, soit une augmentation de 50 % : c’est considérable et à la hauteur des enjeux.

Une nouvelle fois, l’évolution du budget est dynamique, avec des crédits de 27,9 milliards d’euros en AE et 27,6 milliards d’euros en CP.

Le programme 304 Inclusion sociale et protection des personnes augmente de 6,08 %. Le soutien à la prime d’activité, qui bénéficie aujourd’hui à 4 300 000 foyers, achève sa montée en charge après la revalorisation importante opérée en 2019. L’inscription de 565 millions d’euros au titre des crédits alloués à l’expérimentation de la recentralisation du RSA pour les départements volontaires prend en compte la participation nouvelle de la Seine‑Saint‑Denis. Les efforts en faveur de la stratégie de prévention et de protection de l’enfance 2020-2022 et de celle de prévention et de lutte contre la pauvreté se poursuivent. Ces stratégies de réduction des inégalités reposent sur une méthode de contractualisation entre l’État et les départements.

D’autres mesures fortes de justice sociale sont prises hors du cadre contractuel, en particulier la tarification sociale des cantines et le petit déjeuner à l’école, qui bénéficient respectivement de 19 millions et 28 millions d’euros supplémentaires en 2022.

Le programme 157 Handicap et dépendance met, comme en 2021, l’accent sur l’accès et sur le retour durable dans l’emploi des personnes en situation de handicap, en consacrant un investissement important aux aides aux postes et à l’emploi accompagné.

Il traduit également une réforme majeure de l’AAH pour les bénéficiaires en couple : l’article 43 du PLF prévoit ainsi de remplacer l’abattement proportionnel applicable sur les revenus du conjoint par un abattement de 5 000 euros, auquel s’ajoute un abattement supplémentaire de 1 100 euros par enfant. Cette réforme permettra aux bénéficiaires en couple et ne travaillant pas de percevoir une allocation à taux plein lorsque leur conjoint perçoit jusqu’à un SMIC. Au total, ce sont 60 % des 150 000 couples dont le bénéficiaire de l’AAH est inactif qui percevront cette allocation à taux plein.

Sous ce quinquennat, l’AAH aura connu une revalorisation sans précédent : de 819 euros en 2018, son montant mensuel à taux plein est passé à 904 euros aujourd’hui. Cette mesure a bénéficié à plus de 1 200 000 de nos concitoyens.

Le programme 137 Égalité entre les femmes et les hommes connaît, lui aussi, une augmentation importante, de 21 % supérieure à l’année précédente. La protection des femmes contre les violences tient une place centrale dans le budget pour 2022, qui consacre à cette politique plus de 8 millions d’euros supplémentaires. Citons l’investissement dans les lieux d’écoute, d’accueil et d’orientation (LEAO) et les accueils de jour ; la poursuite du déploiement de la plateforme d’écoute téléphonique pour les femmes victimes de violences, le 3919, ouverte vingt-quatre heures sur vingt-quatre, avec une meilleure accessibilité aux femmes des territoires ultramarins et aux femmes en situation de handicap ; le développement de la mise en sécurité des victimes dans les situations d’urgence ; la montée en charge des trente CPCA désormais en activité, ainsi que l’accent mis sur la lutte contre la prostitution.

La partie thématique de mon rapport pour avis porte sur l’accompagnement des jeunes majeurs vulnérables. Cette question, qui me tient particulièrement à cœur, a fait l’objet de différents travaux mobilisant plusieurs députées de la commission : Fiona Lazaar, notre ancienne collègue Brigitte Bourguignon, Monique Limon, Bénédicte Pételle, Michèle Peyron et Perrine Goulet.

J’ai choisi de considérer comme étant de jeunes majeurs vulnérables, non seulement ceux qui sortent du dispositif de prise en charge par les services de la protection de l’enfance, mais aussi ceux qui n’ont pas été pris en charge par ces services, mais sont confrontés à des difficultés familiales, sociales et éducatives susceptibles de compromettre gravement leur équilibre.

Ces jeunes cumulent les vulnérabilités : à la fragilité de leurs liens familiaux et amicaux s’ajoutent souvent d’importantes difficultés pour trouver un logement stable et autonome – environ une personne sans domicile fixe sur quatre serait issue de l’aide sociale à l’enfance (ASE) –, l’éloignement de l’emploi et des études supérieures, ainsi que la récurrence des situations de handicap et de souffrance psychique : 25 % à 30 % des enfants faisant l’objet d’un placement sont en situation de handicap, principalement psychique ou lié à des troubles neurocomportementaux.

Les réponses apportées à ces problèmes paraissent insuffisantes. D’une part, ces jeunes subissent de manière récurrente une forte injonction à l’autonomie, qui les pousse à devenir indépendants bien avant les autres, alors même qu’ils disposent de ressources financières et familiales moindres. D’autre part, la prise en charge proposée est inégale selon les territoires, puisque le contrat jeune majeur, qui permet à son bénéficiaire d’être suivi jusqu’à ses 21 ans par les services de l’ASE, fait l’objet d’une application à géométrie variable d’un département à l’autre. Je salue les importants chantiers engagés par le Gouvernement pour améliorer l’accompagnement des jeunes majeurs vulnérables, tout en proposant, à l’issue des auditions que j’ai menées, d’aller encore plus loin.

Le manque de coordination entre les acteurs chargés de l’accompagnement global des jeunes vers l’emploi et l’autonomie – services de l’ASE, protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), missions locales, Pôle emploi et associations – est constaté depuis longtemps. Le Gouvernement s’est efforcé d’y remédier. Ainsi, la contractualisation entre l’État et les départements vise à lutter contre les sorties sèches de l’ASE. L’accord-cadre signé en novembre 2020 par l’Union nationale des missions locales, l’Union nationale pour l’habitat des jeunes et la Convention nationale des associations de protection de l’enfant va également dans ce sens.

La poursuite du décloisonnement des différents outils de la politique d’aide aux jeunes majeurs me semble constituer la principale priorité. Cela passe par la connaissance de chaque acteur, par une meilleure coordination entre les uns et les autres et par l’amélioration de l’interopérabilité entre les services. Les auditions ont permis de mettre en évidence le rôle que peut jouer le service public de l’insertion et de l’emploi (SPIE) en la matière. Au-delà de la coopération entre services, il apparaît essentiel d’assurer un pilotage visant à la cohérence, mais aussi au suivi et à l’évaluation de l’accompagnement proposé au jeune. Ce pilotage pourrait d’ailleurs être confié aux commissaires à la lutte contre la pauvreté, que je propose de renommer « commissaires à l’égalité des chances ».

Il faut parfaire le dispositif d’accompagnement des jeunes majeurs vulnérables prévu dans le projet de loi relatif à la protection des enfants, défendu par le secrétaire d’État Adrien Taquet. Ce texte comporte une mesure particulièrement ambitieuse : la prise en charge systématique, à titre temporaire, des jeunes majeurs âgés de moins de 21 ans qui éprouvent des difficultés d’insertion sociale faute de ressources ou d’un soutien familial suffisant, lorsqu’ils ont été confiés à l’aide sociale à l’enfance avant leur majorité et souhaitent que cette prise en charge se poursuive. Il est également prévu que soit proposé systématiquement aux anciens mineurs de l’ASE un contrat jeune majeur ou une entrée en garantie jeunes à ceux qui ont besoin d’un accompagnement, ne poursuivent pas leurs études et remplissent les conditions de droit commun d’accès aux dispositifs.

Il me semble essentiel d’ouvrir cet accompagnement aux jeunes n’ayant pas été pris en charge par les dispositifs de l’aide sociale à l’enfance mais qui éprouvent des difficultés d’insertion sociale, faute de ressources ou d’un soutien familial suffisant. Il est également souhaitable d’ouvrir cet accompagnement à tous les jeunes majeurs issus des dispositifs de la PJJ, qui connaissent la plupart du temps les mêmes vulnérabilités que le public de l’ASE. Afin de mettre fin à l’importante injonction à l’autonomie, dont les effets sont délétères, je propose d’expliciter la possibilité d’un droit au retour dans un dispositif d’accompagnement.

La prise en charge des anciens mineurs non accompagnés (MNA) doit également être améliorée. Il convient d’abord de saluer la prise en compte du nombre de majeurs de moins de 21 ans anciennement MNA pris en charge au titre de l’ASE dans les critères retenus pour établir la clef de répartition des mineurs non accompagnés entre départements. Néanmoins, les acteurs regrettent depuis longtemps l’insuffisante anticipation et l’absence de suivi de la régularisation des conditions de séjour des MNA. Cette question, à l’origine de ruptures dans le parcours d’insertion des anciens MNA, constitue également un problème pour les entreprises, qui se trouvent régulièrement dans l’incapacité d’embaucher ces jeunes lorsque leur situation n’est pas en règle ; parfois aussi, les contrats d’apprentissage sont interrompus du jour au lendemain.

À cet égard, comment les services mettent-ils en œuvre l’instruction, signée en septembre 2020 par le ministre de l’intérieur, relative à l’examen anticipé des demandes de titre de séjour des mineurs étrangers confiés au service départemental de l’ASE ?

Nous proposons d’améliorer la gouvernance territoriale de l’aide aux jeunes majeurs prévue dans le projet de loi en associant la direction territoriale de la PJJ. Nous préconisons également de créer une commission jeunes majeurs vulnérables dans chaque territoire.

Par ailleurs, il est indispensable de développer une offre d’hébergement diverse, permettant au jeune de choisir son logement en fonction son degré d’autonomie.

Enfin, nous devons prendre des mesures fortes pour mieux prendre en compte la situation des jeunes majeurs vulnérables handicapés et celle des jeunes en souffrance psychique. S’agissant des jeunes présentant cette double vulnérabilité, quelle coopération existe entre les travailleurs sociaux, les conseillers en insertion et les experts du secteur médico-social, et qu’en est-il de leur formation ?

Le projet de loi relatif à la protection des enfants, en cours d’examen au Sénat, nous promet des débats passionnants.

En attendant, j’émets un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances.

M. Thierry Michels (LaREM). Cette mission importante mobilise 27 milliards d’euros en 2022. Depuis 2018, ses crédits ont connu une très forte hausse – 40 % – sous l’impulsion de la majorité présidentielle, fidèle à la promesse de 2017 de libérer les énergies et protéger les plus fragiles. J’en veux pour preuve la revalorisation exceptionnelle de la prime d’activité et celle de l’AAH. Cet effort se poursuit en 2022, avec des crédits en hausse de plus de 3 % pour l’ensemble des programmes de la mission.

Davantage de solidarité, c’est soutenir ceux qui ont une activité mais ne parviennent pas à en vivre suffisamment bien. Tel est l’enjeu du soutien aux bas salaires, prévu dans le programme 304 Inclusion sociale et protection des personnes, dont la mesure phare, à savoir la prime d’activité, voit son budget passer de 11,1 milliards à 11,7 milliards d’euros. Avec cette augmentation de 5,4 %, nous ferons en sorte que le travail paie mieux pour les travailleurs modestes. En 2021, plus de 4 200 000 personnes ont bénéficié du dispositif.

L’État co‑construit la solidarité nationale dans les territoires à travers une politique de contractualisation, pour mieux toucher les personnes en situation de précarité, comme l’illustrent les 325 millions d’euros alloués au financement de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté. Celle-ci intègre, pour 2022, 25 millions spécifiquement dédiés à la protection de l’enfance. Si l’État co‑construit, il sait également prendre ses responsabilités vis-à-vis des collectivités locales, comme en témoigne la recentralisation du RSA pour le département de la Seine‑Saint‑Denis dès le 1er janvier 2022.

Concernant la politique du handicap, priorité du quinquennat, la majorité est également au rendez-vous de ses engagements de 2017. Nous avons fait progresser les crédits alloués aux personnes en situation de handicap bénéficiaires de l’AAH, avec la revalorisation inégalée mise en œuvre en 2017 : ils dépassent désormais 13 milliards d’euros. La réforme prévue à l’article 43 du PLF prévoit une augmentation de l’AAH pour 120 000 foyers, à raison de 110 euros supplémentaires par mois en moyenne, pour un montant de plus de 200 millions. De nombreux collègues ont voulu centrer le débat sur la question de la déconjugalisation. Même si cela est respectable, notre majorité a préféré garder le cap et amplifier l’effort pour augmenter le niveau de l’AAH pour un plus grand nombre de bénéficiaires, sans faire de perdants.

Le programme concrétise également la transformation de l’offre des ESAT, à la lumière des enseignements de la crise sanitaire, comme annoncé lors du comité interministériel du handicap de juillet dernier, pour faire en sorte que l’aide au poste au titre de la garantie de rémunération des travailleurs handicapés soit aussi pertinente que possible. Ce dispositif concerne 120 000 personnes, pour un montant de 1,4 milliard d’euros.

Cet effort en faveur de l’insertion dans l’emploi doit s’apprécier dans le cadre de la politique d’ensemble pour une société inclusive que vous animez depuis 2017, madame la secrétaire d’État. Je pense en particulier à l’action 03 du programme 364 Cohésion dans la mission Plan de relance, qui renforce les dispositifs d’aide à l’emploi des personnes en situation de handicap. Mieux inclure et protéger dans l’emploi les personnes en situation de handicap est en effet une constante de votre politique, matérialisée également par le référent handicap de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, amplifiée par la loi pour renforcer la prévention en santé au travail, et qui se concrétise dans le budget pour 2022.

Le budget alloué à l’égalité entre les femmes et les hommes a, lui aussi, connu une nette progression. Si l’action du Gouvernement dans ce domaine dépasse le périmètre de la mission que nous examinons, cette dernière illustre l’effort important que nous consacrons à cet enjeu de société. Le programme voit ainsi ses crédits augmenter de 22 % cette année, après une augmentation de 37 % l’année précédente. Ainsi, plus de 5 millions d’euros sont prévus dans le PLF pour la mise en œuvre des mesures issues du Grenelle contre les violences conjugales.

À l’avenir, l’accompagnement dans la transition écologique de nos concitoyens les plus fragiles et les plus modestes sera un enjeu important. Vous soumettrez au débat la nécessité de faire la promotion de la carte mobilité inclusion et de développer des solutions de transport à la demande solidaire, pour permettre à ces personnes d’accéder aux zones à faibles émissions des métropoles, de manière à ne laisser personne au bord de la route.

Mon groupe apporte son soutien plein et entier au budget de cette mission. C’est un budget solide, sérieux et surtout nécessaire au vu des défis sociaux auxquels notre pays est confronté, et de l’accompagnement que ce contexte impose pour consolider la cohésion sociale.

Mme Isabelle Valentin (LR). Cette mission connaît une relative stabilité, avec une augmentation pour le programme 137 Égalité entre les femmes et les hommes et une diminution pour le programme 124 Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales, en raison du transfert des emplois liés au sport et à la vie associative au ministère de l’éducation nationale. Les deux principaux programmes sont le programme 157 Handicap et dépendance et le programme 137.

La mission témoigne de l’effort public particulier qui est consenti en faveur de la lutte contre la pauvreté et de la réduction des inégalités. Derrière la crise que traversent la France et l’Europe, ce sont autant de drames humains qui frappent nos territoires.

En 2022, 92,9 millions d’euros seront dédiés aux mineurs non accompagnés, dans le cadre du dispositif d’accueil et d’orientation, contre 141 millions en 2019, 162 millions en 2020 et 120 millions en 2021. Les modalités de la participation forfaitaire de l’État ont changé le 1er janvier 2019. Une aide de 500 euros par jeune évalué sera apportée aux départements, ainsi qu’un remboursement forfaitaire pour l’hébergement de ces jeunes : 90 euros pendant quatorze jours puis 20 euros pendant neuf jours. Or un mineur non accompagné coûte 65 000 euros par an au département. Quelles compensations ou quelles mesures le Gouvernement compte-t-il mettre en place pour permettre aux départements d’accueillir ces jeunes de façon décente et de faire face aux charges importantes que cela suppose ?

S’agissant du handicap, les réponses proposées sont globalement mitigées. Si l’on ne peut que saluer la revalorisation de l’AAH, de nombreux chantiers restent en suspens, à commencer par la déconjugalisation de l’allocation, qu’il est primordial d’instaurer. Il en va de même de l’ouverture de la prestation de compensation du handicap (PCH) aux personnes ayant des troubles neurologiques et psychologiques.

Le chantier du grand âge et de l’autonomie est, pour sa part, toujours à l’arrêt, avec l’abandon du projet de loi que nous attendions pourtant depuis le début de la législature. Étant donné l’évolution de la démographie, ce projet de loi est essentiel. Il est très attendu par les acteurs du grand âge et par les Français. Il devra reposer sur la solidarité et prendre en compte la prévention, l’hébergement, le maintien à domicile, ou encore le statut des aidants et des accueillants familiaux. Il devra être novateur et s’inspirer de ce qui se fait dans les territoires.

Les crédits consacrés à l’égalité hommes-femmes sont en hausse par rapport au budget précédent, mais on est loin des moyens qui devraient être alloués à cette grande cause du quinquennat.

Enfin, le programme 124, qui rassemble les moyens de fonctionnement des administrations du secteur des affaires sociales, de la santé et de la ville ainsi que les dépenses de personnel du ministère des droits des femmes, est en légère hausse.

Face à l’absence de mesures fortes concernant notamment la prévention, le handicap, le grand âge, l’autonomie et la famille, et compte tenu de la baisse de certains moyens
– principalement ceux de l’aide alimentaire et du soutien à la jeunesse –, le groupe Les Républicains votera contre les crédits de la mission.

Mme Perrine Goulet (Dem). Je mettrai à profit mon temps de parole pour interroger le Gouvernement sur certains points.

S’agissant de l’ASE, la doctrine du ministère est de mettre en place une contractualisation accrue avec les départements. Cette approche peut effectivement se révéler pertinente, car l’élaboration d’un contrat est susceptible de révéler des réalités différentes. Le budget et le nombre de départements concernés augmentent encore cette année, mais ces contractualisations sont noyées dans les différentes missions : la granularité des documents budgétaires ne nous permet pas de nous faire une idée du fonctionnement de ces contrats au niveau des départements. Quels sont les objectifs communs qui ont été fixés aux départements et par quels indicateurs seront-ils suivis ? Comment pouvons-nous avoir accès à ces données, de manière à effectuer notre travail de parlementaires ?

Lors des auditions, la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) nous a indiqué que le taux de jeunes majeurs ayant un logement stable était passé de 61 % en 2019 à 79 % en 2020. Si ce chiffre en augmentation peut nous satisfaire, il appelle toutefois une question : que sont devenus les 21 % restants ? La DGCS nous a également indiqué que 75 % des jeunes devenus majeurs en 2020 avaient fait l’objet d’une prise en charge dans le cadre de la stratégie nationale de prévention et d’action contre la pauvreté. On en déduit donc que 25 % n’ont pas été pris en charge. Cela interpelle, car nous avions voté l’année dernière une mesure salutaire visant à interdire les sorties sèches de l’ASE durant la crise sanitaire. Le taux de prise en charge devrait donc être plus élevé.

Il est également ressorti des auditions que l’orientation systématique des jeunes sortant de l’ASE vers la garantie jeunes ne convient pas à tous. Le dispositif a été construit dans la perspective de l’insertion professionnelle. Or cet objectif n’est pas atteignable pour certains jeunes, qui ont d’autres problèmes à régler auparavant. Quels moyens complémentaires donne‑t‑on aux missions locales pour accueillir ce nouveau public et leur permettre de proposer un accompagnement différent ?

En ce qui concerne les mineurs non accompagnés, une circulaire du ministère de l’intérieur enjoint aux préfets de procéder, l’année précédant leurs 18 ans, à un examen de régularisation. Ce dispositif est particulièrement pertinent, mais nous aimerions savoir quel est le retour du terrain à propos de cette circulaire. Qu’en est-il, par ailleurs, de l’application, ou plutôt la non‑application, de l’article 262 de la loi de finances pour 2021 aux termes duquel le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 1er juin 2021, un rapport sur les actions menées à destination des MNA accueillis par la France. Ce rapport ne nous a pas été remis. Il y va du respect dû à la loi, mais aussi au Parlement.

Pour être correctement assurée, la protection de l’enfance a besoin de personnel, d’éducateurs. Les confinements successifs ont montré l’engagement des personnels auprès des enfants. Ces acteurs du champ sanitaire et social, qui ne sont pas financés par la sécurité sociale, sont en attente d’une reconnaissance, notamment financière. La difficulté réside dans la disparité des employeurs. Où en sont les discussions avec ces personnels et que peuvent-ils espérer ? Ils ne doivent pas être les oubliés des revalorisations en cours. Par ailleurs, pourrions‑nous disposer d’un bilan de la prime exceptionnelle de 2020, distribuée conjointement par l’État et les départements ?

Nous avons eu cette année de nombreuses occasions de nous exprimer à propos de l’AAH, qui a été fortement revalorisée au cours de la législature. La position de la majorité est arrêtée ; il n’y a pas lieu d’y revenir. Le travail parlementaire sur la politique du handicap n’est pas aisé, car celle-ci est partagée entre le PLF et le PLFSS. La conjugalisation de l’AAH étant actée, il convient de permettre de travailler aux personnes handicapées qui le peuvent. Quelles sont les actions mises en œuvre à cet égard et quels en sont les résultats ?

Au gré de mes visites, j’ai entendu de nombreuses interrogations à propos de la réforme des services et établissements pour une adéquation des financements aux parcours des personnes handicapées (SERAFIN-PH). Il m’intéresserait d’avoir un point d’étape sur cette tarification qui va concerner les ESAT, les foyers, les services d’accompagnement à la vie sociale et les instituts médico-éducatifs.

La situation de nos compatriotes atteints d’un handicap est prise en considération par le programme 157, à travers l’AAH, mais il existe aussi, en miroir, les dispositions du PLFSS relatives à la PCH. Des réflexions ou des travaux sont-ils en cours sur la PCH, afin notamment de répondre aux détracteurs des choix faits pour l’AAH ?

En tout état de cause, mon groupe votera les crédits de cette mission, qui soutiennent des politiques publiques essentielles pour garantir la solidarité entre nos concitoyens.

M. Boris Vallaud (SOC). La mission Solidarité, insertion et égalité des chances est particulièrement importante, au regard notamment des effets de la crise économique causée par la covid-19, qui a aggravé la pauvreté. Partout en France, les files d’attente devant les banques alimentaires s’allongent. Le nombre d’allocataires du RSA croît trop vite, l’indice de Gini – qui retrace les inégalités – se dégrade. En outre, votre réforme de l’assurance chômage va réduire les allocations de plus de 15 millions de personnes.

En réponse à cela, aucune stratégie n’est retranscrite dans cette mission. Logiquement, les crédits que vous proposez pour aider les plus fragiles d’entre nous ne sont donc pas à la hauteur. Ils augurent même de graves reculs sociaux pour 2022. J’en prendrai quatre exemples.

Le premier concerne les crédits alloués à l’aide alimentaire. En dépit des files d’attente devant les banques alimentaires qui se grossissent à nouveau de notre jeunesse, vous avez l’audace de proposer une baisse de 12 %, soit 8 millions d’euros, des crédits dédiés à l’aide alimentaire. Après un tel coup de rabot budgétaire, que vont distribuer les épiceries solidaires et les associations de secours à toutes les personnes qui en ont manifestement besoin, alors même que vous refusez nos propositions sur l’extension du RSA aux 18‑25 ans ? Comment les jeunes les plus défavorisés de notre pays vont‑ils se nourrir ?

Mon deuxième exemple concerne la hausse de 1,2 %, soit une baisse de 0,3 % en valeur nette si l’on tient compte de l’inflation, des crédits de l’action 17 Protection et accompagnement des enfants, des jeunes et des familles vulnérables. Cette action finance pourtant la prise en charge des mineurs non accompagnés, les mesures liées aux 1 000 premiers jours de vie, issues du rapport de Boris Cyrulnik, ou encore la stratégie nationale de prévention et de protection de l’enfance 2020‑2022. Ce sont autant de politiques publiques dont vous allez donc réduire les crédits. De plus, le projet de loi relatif à la protection des enfants contient quelques avancées qui vont accroître les exigences des départements en la matière. Dès lors, comment expliquer cet écart entre vos ambitions et la réalité budgétaire dont nous sommes les témoins ?

Mon troisième exemple porte sur les crédits alloués à l’AAH. Certes, ils augmentent de 4 %, mais cela couvre seulement la hausse du nombre des bénéficiaires. Qui plus est, avec un montant moyen de 759 euros, l’allocation restera largement en dessous du seuil de pauvreté. Outre cette stabilisation des crédits qui ne dit pas son nom, vous n’accédez toujours pas à la principale demande des allocataires de l’AAH et des associations qui les représentent, qui a recueilli un large consensus dans les groupes d’opposition, à savoir la dignité. En effet, malgré l’unanimité parmi les oppositions, vous n’ouvrez pas la voie à la déconjugalisation de l’AAH. Vous la remplacez par une réformette du mode de calcul. Vous refusez donc la dignité à des milliers de personnes ; c’est indigne.

Mon quatrième exemple porte sur les crédits pour l’égalité entre les femmes et les hommes, prétendument la grande cause du quinquennat. En réalité, les AE baissent de 2 %, quand bien même les CP augmentent. Cela augure d’une baisse des CP dans les années à venir. Nous saluons les mesures que vous avez prises en la matière, comme l’ouverture vingt-quatre heures sur vingt-quatre du 3919, même si elles sont largement insuffisantes.

Quelle est votre réelle ambition, dès lors que vous baissez les crédits de ce programme de près de 3 % par rapport à 2021 ? Comment allez-vous lutter contre les violences faites aux femmes avec cette diminution des crédits, alors que tous les trois jours une femme décède, victime de son partenaire ou de son ex‑partenaire ? Comment allez-vous lutter contre les inégalités salariales ? Si nous attendons, l’égalité ne sera acquise qu’en 2126. Toutes les femmes, les associations de défense de leurs droits et toute la société française vous le demandent.

Enfin, nous avons une interrogation majeure à propos de l’action 11, qui comporte les crédits relatifs au RSA jeune. Nous n’avons pas trouvé les crédits finançant le revenu d’engagement, ce qui est logique puisque vous avez annoncé vouloir introduire celui‑ci par voie d’amendement. Pouvez-vous cependant nous informer des conditions d’accès à ce nouveau dispositif ? Va-t-il remplacer la garantie jeunes ? Ces questions appellent des réponses précises de la part du Gouvernement ; beaucoup d’organisations non gouvernementales et de syndicats les exigent.

Alors que la crise a creusé les inégalités sociales, que l’inclusion des personnes handicapées ne progresse pas, que votre ambition affichée en matière de protection de l’enfance ne trouve pas de traduction budgétaire, que les inégalités entre les femmes et les hommes sont toujours aussi criantes, vous n’apportez en définitive aucune réponse globale et n’appliquez qu’une logique budgétaire et comptable à des enjeux bien plus complexes. Vous ne serez donc pas surpris que nous votions contre l’adoption des crédits de la mission.

Mme Annie Chapelier (Agir ens). Cette mission, dotée de 27,6 milliards d’euros, voit son budget augmenter de 5,2 % par rapport à la précédente loi de finances. L’écrasante majorité de ses crédits – plus de 80 % – est dévolue au financement de l’AAH et à la prime d’activité.

Le texte prévoit un abattement fixe sur les revenus du conjoint du bénéficiaire de l’AAH, ce qui permettra à 120 000 foyers de voir leur allocation augmenter de 110 euros par mois en moyenne. Il convient de saluer cette avancée. Si le groupe Agir ensemble reconnaît l’effort énorme consenti par le Gouvernement pour revaloriser cette aide, il regrette que la déconjugalisation de l’AAH, mesure très majoritairement soutenue par les membres du groupe, ne fasse pas l’objet d’une action plus ambitieuse. Nous avons débattu à plusieurs reprises de la question, et encore très récemment, lors de l’examen de la proposition de loi portant diverses mesures de justice sociale et de la proposition de loi visant à plus de justice et d’autonomie en faveur des personnes en situation de handicap. Nous entendons vos arguments, madame la secrétaire d’État, mais nous entendons aussi ceux des familles et des associations en faveur de la déconjugalisation – et ils sont nombreux. Nous espérons donc que l’abattement fixe ne constituera qu’une première étape.

Le programme 137, consacré à l’égalité entre les femmes et les hommes, voit, lui aussi, sa dotation financière considérablement augmenter : elle est en hausse de 22 % par rapport à celle de 2021, ce qui représente une hausse de plus de 50 millions. Après une première augmentation de 37 % des moyens du programme entre 2020 et 2021, cette nouvelle hausse réaffirme l’égalité entre les femmes et les hommes comme la grande cause du quinquennat. Nous votons ainsi pour plus de prévention et d’intervention contre les violences faites aux femmes, pour une meilleure insertion professionnelle des femmes, notamment par la création d’entreprises et le développement de la mixité des métiers, et pour le développement de lieux d’accueil de proximité sur l’ensemble du territoire national, dont l’outre-mer, dont il est beaucoup question.

Une interrogation persiste tout de même à propos de la baisse des crédits du programme 124. À quoi correspond la diminution de 6 % de l’action 20, censée mettre en œuvre les politiques en faveur des droits des femmes ? Cette baisse risque de fragiliser l’ambition consistant à augmenter le budget en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes. Aussi, et alors que nous sortons des premières assises de l’égalité économique et professionnelle entre les femmes et les hommes, je tenais à souligner que l’égalité est un combat permanent ; nous ne devons jamais lâcher. À cet égard, j’ai une pensée pour la présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, notre collègue Marie‑Pierre Rixain, qui a vu sa proposition de loi visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle subir d’importantes coupes au Sénat. Je lui apporte tout mon soutien et lui rappelle que nous serons là pour défendre une société plus juste, plus égalitaire, plus équitable, où chacun est reconnu à sa juste valeur.

Malgré ces quelques interrogations, le groupe Agir ensemble soutiendra avec conviction cette mission budgétaire.

Mme Valérie Six (UDI-I). La crise sanitaire ayant exacerbé les inégalités, la solidarité nationale doit être plus que jamais au cœur de nos préoccupations. Les crédits de l’action 14 Aide alimentaire du programme 304 diminuent de 12 %. Selon le rapport, une telle baisse s’explique par « l’inflexion de la dépense associée à la contribution de la France au Fonds européen d’aide aux plus démunis (FEAD) par rapport à l’exercice 2021 ». Il est vrai que le pouvoir d’achat des Français a augmenté et que le stock d’épargne est très important, mais il est tout aussi vrai qu’à Roubaix, dans ma circonscription, le Secours populaire aide cette année deux mille familles de plus, soit 23 000 personnes au total, ce qui représente un quart de la population. Avant la crise sanitaire, il y distribuait dix colis alimentaires par jour ; aujourd’hui, il en distribue cent soixante-quinze. Ce qui est vrai à Roubaix l’est aussi dans bien d’autres villes, où un nombre de plus en plus important de nos concitoyens ne parvient plus à joindre les deux bouts. Dès lors, comment comprendre que le budget alloué à l’aide alimentaire diminue de près de 8 millions d’euros ?

J’appelle par ailleurs votre attention sur la hausse des prix affectant les produits du quotidien : je pense au coût de l’énergie, mais aussi à celui des matières premières et de la farine, qui fera mécaniquement augmenter le prix de la baguette de pain de 5 à 10 centimes. Les familles les plus modestes ne seront pas épargnées.

La solidarité nationale s’exprime aussi à travers les mesures prises en faveur de l’autonomie des personnes en situation de handicap. L’AAH est versée à 1 200 000 bénéficiaires, dont 270 000 vivent en couple, et son coût s’élève à 11 milliards d’euros. Des dispositions importantes ont été prises, dont la revalorisation de son montant, le 1er avril 2020, qui atteint désormais 900 euros par mois, et l’abattement fiscal intégré dans la première partie du PLF.

Notre groupe reconnaît et soutient ces efforts budgétaires. Néanmoins, le Gouvernement refuse toujours l’individualisation de cette allocation. Dès lors que la personne en situation de handicap se met en ménage, le montant de l’allocation dont elle bénéficie diminue puisque les revenus du conjoint sont pris en compte dans son calcul. C’est notamment le cas pour 60 % des 270 000 bénéficiaires qui vivent en couple. Après l’application de l’abattement fiscal, 40 % des bénéficiaires continueront de percevoir une allocation moindre uniquement parce qu’ils se sont mis en ménage.

Au début du mois, vingt-deux associations représentant des personnes en situation de handicap ont écrit au Président de la République pour l’inviter à considérer avant tout l’AAH comme un revenu individuel d’existence, car cette allocation renforce l’autonomie financière du bénéficiaire et ne saurait dépendre des revenus du conjoint. Accédons à leur demande d’individualisation ou de déconjugalisation !

Mme Jeanine Dubié (LT). Alors que la crise sanitaire et ses conséquences économiques rendent encore plus urgente la lutte contre la pauvreté, les crédits alloués à la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté de 2018, qui repose sur une démarche positive de contractualisation avec les collectivités, augmentent à nouveau. Pourtant, la France se caractérise par une forte reproduction de la pauvreté, qui plus est accrue par la crise.

Le bilan que le Gouvernement a dressé de cette stratégie le 13 octobre dernier est mitigé. S’il faut saluer les efforts accomplis en direction de l’enfance – petit déjeuner à l’école, cantine à 1 euro –, le nombre de places en crèche n’est toujours pas à la hauteur des objectifs.

Nous insistons : la lutte contre la pauvreté doit être notre priorité et la reprise économique ne doit pas détourner notre regard des situations d’extrême précarité et des inégalités.

Les dispositifs d’urgence comme le chômage partiel et la prolongation de certains droits ont été salutaires pour prévenir l’entrée dans la pauvreté, mais ils n’ont pas permis d’atteindre tous les publics et n’ont pas suffi à éviter le basculement dans la pauvreté. Je pense, notamment, aux plus démunis, aux indépendants, aux jeunes.

Par ailleurs, le nombre de bénéficiaires du RSA a augmenté en juillet, peut-être en raison de l’arrêt de la prolongation des droits à l’assurance chômage depuis la fin du mois de juin. À ce propos, nous rappelons que le nouveau calcul de l’assurance chômage est très défavorable aux travailleurs précaires, notamment aux saisonniers et aux intermittents de l’emploi, ce qui, à moyen terme, pourrait entraîner une hausse significative du nombre des bénéficiaires du RSA.

Pour les plus jeunes, nous persistons à penser que nous avons perdu trop de temps. Notre groupe a proposé l’ouverture du RSA aux 18‑25 ans, levier facile à actionner en période de crise ; or, un an après, nous attendons toujours les annonces du Gouvernement quant à un éventuel revenu ou contrat d’engagement pour les jeunes.

Enfin, notre groupe s’inquiète du non‑recours aux droits et déplore l’abandon du projet de revenu universel d’activité annoncé depuis 2018.

Nous notons avec satisfaction l’augmentation des crédits du programme 137 Égalité entre les femmes et les hommes, notamment afin de lutter contre les violences faites aux femmes. Les signalements de violences et de harcèlements nous incitent à accroître nos efforts, par exemple en ouvrant des LEAO dans les départements qui n’en ont pas. De la même manière, les moyens dont dispose la plateforme téléphonique 3919 pourraient être renforcés afin d’atteindre un taux de réponse de 100 %.

Si nous saluons également la poursuite de la stratégie nationale de prévention et de protection de l’enfance, qui repose sur une démarche de contractualisation entre l’État et les départements, nous nous interrogeons sur la diminution des crédits consacrés aux dispositifs d’accueil des MNA, alors que le Gouvernement semble anticiper de nouvelles arrivées. Nous déplorons également, à cet égard, les mesures du projet de loi relatif à la protection des enfants, en cours d’examen au Parlement, qui tend à renforcer le contrôle de ces mineurs sans prévoir une amélioration de leur accompagnement.

Enfin, notre groupe rejette l’article 43, rattaché à la présente mission. Il reprend la mesure que vous nous avez opposée, dans des conditions peu honorables, pour refuser notre proposition de ne plus prendre en compte les revenus du conjoint dans le calcul de l’AAH. L’abattement forfaire de 5 000 euros – mesure purement budgétaire – sur les revenus du conjoint ne répond en rien à la demande des personnes handicapées, qui veulent que leur droit à l’autonomie soit reconnu et que leur dépendance financière à leur conjoint soit limitée. C’est là une demande de longue date des associations et des personnes en situation de handicap. Notre proposition de loi a d’ailleurs été rétablie et adoptée en seconde lecture au Sénat ; nous y reviendrons prochainement puisque le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, que je remercie, l’inscrira dans sa niche du 2 décembre.

En confondant RSA et AAH, en ne distinguant pas minimum social et prestation sociale à vocation spéciale, le Gouvernement persiste dans une erreur qui affecte non seulement le revenu des personnes mais aussi et surtout leur autonomie et leur capacité à décider et à agir librement.

M. Pierre Dharréville (GDR). Cette mission vise à réduire les inégalités et à favoriser l’accès aux droits, objectifs louables mais contradictoires avec la politique générale du Gouvernement. Ainsi de la réforme de l’assurance chômage, qui ne manquera pas de provoquer un certain nombre de désastres sociaux.

Les crédits alloués à la prime d’activité, qui s’élèvent à 12 milliards d’euros, constituent une forme de fuite en avant puisque l’État supplée les entreprises dans le financement des bas salaires, sur lesquels, par ailleurs, les cotisations patronales ont quasiment disparu. Plutôt que de maintenir un tel dispositif, qui n’est pas durable, il conviendrait de réfléchir à des mesures permettant d’améliorer le pouvoir d’achat. Or, le Gouvernement s’y refuse depuis le début de la législature.

Les crédits consacrés à l’AAH s’élèvent quant à eux à 15 milliards d’euros. Des efforts ont été accomplis pour augmenter son montant, mais cette dynamique devrait être maintenue et amplifiée, en particulier en raison de l’inflation et parce que l’AAH reste en deçà du seuil de pauvreté. Cette allocation, en outre, doit être déconjugalisée. C’est pourquoi le groupe de la Gauche démocrate et républicaine a en effet décidé de mettre à l’ordre du jour de sa niche parlementaire l’examen de la proposition de loi évoquée par Mme Dubié, cette mesure de reconnaissance et de soutien à l’autonomie des personnes en situation de handicap étant particulièrement attendue.

Par ailleurs, un risque de saupoudrage existe. La diminution de 12 % des crédits consacrés à l’aide alimentaire m’inquiète d’autant plus que la pauvreté continue de progresser, comme en atteste le baromètre de la pauvreté IPSOS-Secours populaire de 2021. Les jeunes sont de plus en plus touchés, sans qu’une amélioration soit envisageable à court terme : chômage, précarité du travail, privations, pertes de liens sociaux ont pris une ampleur inédite ces dix derniers mois. J’en veux pour preuve le rapport récemment remis par le collectif Alerte PACA, dans lequel celui-ci évoque une « ultra‑pauvreté », en appelant à s’attaquer aux causes du problème et à soutenir les actions immédiates, notamment en matière d’aide alimentaire. Dans certains secteurs, les demandes d’aide alimentaire ont augmenté de 100 %.

Par ailleurs, comment expliquer la baisse des crédits consacrés au RSA en Guyane, à Mayotte et à La Réunion ?

Le RSA jeune actif bénéficie seulement à trois mille personnes. Nous considérons quant à nous qu’il convient de créer une forme d’allocation d’autonomie pour la jeunesse, un revenu étudiant ou un RSA jeunes, autant de propositions que vous avez rejetées alors que les enjeux sont considérables.

La baisse de 27 millions d’euros des crédits consacrés aux MNA nous inquiète d’autant plus qu’elle s’accompagne d’une volonté de contrôle qui risque d’exclure un certain nombre d’entre eux d’une aide dont ils ont besoin.

Enfin, le plan 1 000 premiers jours est nécessaire. L’application mobile est bienvenue, mais il ne faudrait pas que les CAF soient au point mort ; or leurs effectifs baissent, alors qu’elles ont besoin d’agents supplémentaires.

M. Patrice Anato, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire pour les crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances. Le budget de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances progresse à nouveau pour atteindre 27,6 milliards d’euros, ce qui représente une hausse de 50 % depuis 2017. Le temps qui m’est imparti ne me permet pas de dresser la liste complète des dispositifs qui ont été créés ou renforcés dans le cadre de cette mission ; j’insisterai donc sur quelques-uns d’entre eux.

Tout d’abord, l’expérimentation de la recentralisation du RSA en Seine‑Saint‑Denis est particulièrement importante à mes yeux. Ce département cumulant nombre de difficultés, nous nous félicitons que l’État et le conseil départemental aient trouvé un accord offrant à la Seine‑Saint‑Denis une marge de manœuvre financière de 147 millions d’euros sur cinq ans afin de renforcer les moyens alloués à l’accompagnement des bénéficiaires du RSA. Quelles mesures seront-elles prises par ce département et quels indicateurs envisagez-vous de proposer pour suivre l’exécution de la convention qui sera conclue ?

Le budget pour 2022 permettra par ailleurs de revaloriser significativement le montant de l’AAH perçu par les 120 000 bénéficiaires vivant en couple. Je le répète : la mesure prévue à l’article 43 du PLF ne fera pas de perdants et constitue une avancée certaine, applicable dès le 1er janvier 2022.

Enfin, si un revenu d’engagement pour les jeunes devrait voir le jour à l’occasion de l’examen en séance publique de la mission Travail et emploi, nous attendons également le résultat des travaux menés par M. Fabrice Lenglart sur le revenu universel d’activité – ma collègue Stella Dupont et moi-même avons remis un rapport à ce propos en juin dernier. Pouvez-vous dresser un état des lieux de l’avancée de ces travaux ?

M. le ministre. Madame Cloarec‑Le Nabour, je veux tout d’abord saluer le travail accompli par les parlementaires sur la question des jeunes majeurs vulnérables. La lutte contre les inégalités de destin est évidemment au cœur du quinquennat.

S’agissant des compétences départementales, nous avons jugé que l’État devait réinvestir une politique publique qu’il ne connaissait plus. Nous avons ainsi procédé à des contractualisations, notamment en ce qui concerne la préparation de la sortie de l’ASE. Avec la déléguée interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes, j’aurai bientôt l’occasion d’en présenter les premiers résultats, mesurés grâce à des indicateurs, tels que celui relatif, par exemple, à l’accompagnement des jeunes. La situation s’améliore quasiment dans tous les domaines. Nous devons donc poursuivre et renforcer la contractualisation. J’ajoute que le projet de loi relatif à la protection des enfants, en cours d’examen, permettra de renforcer encore un certain nombre de dispositifs.

J’indique à Perrine Goulet, qui m’a également interrogé sur la situation des jeunes sortant de l’ASE et dont je connais la fougue et la passion lorsque l’on aborde ces questions, que, depuis 2021, l’accès de tous ces jeunes à la garantie jeunes est automatique ; leur accompagnement est renforcé et ils bénéficient d’une aide financière de 500 euros par mois. Chaque situation fait l’objet d’un accompagnement personnalisé et individuel. Le projet de loi relatif à la protection des enfants prévoit également la systématisation de l’octroi de la garantie jeunes aux sortants de l’ASE. En matière de logement, ces jeunes majeurs bénéficient d’un accès prioritaire au logement étudiant, d’un financement à travers la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté et d’une priorité d’accès au logement social.

Madame Cloarec-Le Nabour, les commissaires à la lutte contre la pauvreté et à l’égalité des chances pourraient en effet piloter le SPIE ainsi que les différents contrats concernant la pauvreté ou l’enfance. C’est là une excellente idée qui devrait être discutée dans la perspective des prochaines générations de contractualisations. Quoi qu’il en soit, comme les collectivités nous le font savoir, nous avons besoin de coordination et de lisibilité.

Les retours sur l’examen de régularisation systématique des MNA dans l’année précédant leurs 18 ans sont très bons. Le Gouvernement insiste sur la nécessité, pour les préfets et les départements, d’avoir des échanges en la matière, y compris dans les territoires où la systématisation n’est pas encore effective. Je vais me renseigner auprès des services compétents pour savoir pourquoi le rapport sur les MNA n’a pas été remis au Parlement. Des retards sont toujours possibles dans la période que nous connaissons, ce qui ne signifie pas que cette question n’est pas prise à bras‑le‑corps.

Sur les autres sujets concernant les MNA, je me permets de vous renvoyer au ministre de l’intérieur.

Monsieur Vallaud, le PLF 2022 permettra de généraliser la contractualisation de la protection de l’enfance avec les départements ; 50 millions d’euros supplémentaires y seront consacrés. Quant à la diminution des crédits de l’action 17 Protection et accompagnement des enfants, des jeunes et des familles vulnérables, elle s’explique par la baisse du nombre de MNA arrivés sur le territoire national : entre janvier et septembre 2019, nous en dénombrions 13 170, contre 7 710 sur la même période en 2021.

Certains d’entre vous se sont étonnés de la diminution de 7,8 millions d’euros des crédits consacrés à l’aide alimentaire. Cette baisse est, en fait, purement comptable et s’explique pour deux raisons : le remboursement des denrées que nous achetons pour le compte de l’Union européenne et que nous livrons aux associations étant meilleur, nous avons pu réduire les provisions pour défaut de remboursement ; le taux de cofinancement du Fonds social européen, passant de 85 à 90 %, est donc plus élevé et la participation budgétaire nationale a automatiquement diminué. En fait, si l’on tient compte de ces deux facteurs, les crédits dédiés à l’aide alimentaire augmentent légèrement, de l’ordre de 400 000 euros. J’ajoute que, dans ce domaine, l’Europe est au rendez-vous, puisque les crédits alloués à l’aide alimentaire par l’Union européenne ont augmenté de 48 %, passant de 583 millions pour la période 2014-2020 à 870 millions pour la période 2021-2027.

Mme Monique Limon. Le budget du programme 137 Égalité entre les femmes et les hommes s’élève à 47,4 millions en AE et à 50,6 millions en CP. L’action 25 Prévention et lutte contre les violences et la prostitution est dotée de plus de 28 millions pour déployer le dispositif du parcours de sortie de la prostitution créé par la loi du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées.

La lutte contre la prostitution en milieu rural est une question de plus en plus prégnante. Les élus locaux, la plupart du temps, sont démunis, faute de moyens spécifiquement consacrés à cette action, comme je le constate dans ma circonscription. Comment faire pour mieux prendre en compte ce fléau dans nos campagnes, prendre en charge ces très jeunes femmes et les accompagner vers la sortie de la prostitution ?

M. Bernard Perrut. Nous partageons le même engagement en faveur des personnes en situation de handicap, mais nous ne devons pas oublier les professionnels médico‑sociaux qui les accompagnent à domicile ou en établissement et dont le travail est admirable. Ces oubliés du Ségur de la santé en 2020 et 2021 ne sont pas reconnus à la hauteur de leurs compétences et de leurs engagements. Des associations nous interpellent car ils quittent le secteur du handicap. Je demande donc au nom des familles et des établissements une réelle reconnaissance de ces métiers.

La revalorisation de l’AAH est bienvenue, tout comme certaines mesures de simplification, même si les attentes restent nombreuses. La représentation nationale a le devoir de débattre de la déconjugalisation de cette allocation, car l’attente des publics concernés est légitime.

Mme Carole Grandjean. L’article 12 du PLF prévoit la possibilité pour les départements volontaires d’expérimenter la recentralisation du financement du RSA. Si la Seine‑Saint‑Denis s’est déjà manifestée, nous pouvons supposer que cela sera également le cas d’autres départements. Je souhaiterais donc savoir quels sont les effets attendus de ce transfert de compétence sur l’insertion et la solidarité. Quel est le suivi des politiques d’insertion menées par les départements en contrepartie de la contractualisation, dans un objectif d’efficacité et de réinsertion dans l’emploi ?

Mme Michèle de Vaucouleurs. La Seine‑Saint‑Denis expérimentera la recentralisation du RSA dès le mois de janvier 2022. Le coût de cette mesure est financé par une hausse de crédits, à hauteur de 564,90 millions d’euros, dont 524,88 millions issus d’une mesure de périmètre, étant entendu que les dépenses de ce département s’élevaient à 521 millions en 2019 et à 551 millions en 2020.

D’autres départements ont-ils vocation à rejoindre cette expérimentation ? Le cas échéant, le budget prévoit‑il des crédits pour financer la recentralisation ? Enfin, quelles sont les modalités d’intervention de l’État ? La rencentralisation entraîne-t-elle des modifications des modalités d’accompagnement des publics ?

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq. Le ministre ayant largement répondu à mes interrogations, je témoignerai de l’efficacité du plan « pauvreté » et de la contractualisation avec les départements. Dans le cadre de la maison départementale de l’insertion et de l’emploi, la coordination de l’ensemble des acteurs de l’emploi et de l’insertion est efficace dans le département du Nord, dont les efforts, confortés par l’État, ont permis de faire baisser le nombre de bénéficiaires du RSA.

M. Belkhir Belhaddad. Parmi les très nombreux points positifs de cette mission figure l’aide à la vie familiale et sociale (AVFS) des anciens migrants. À cet égard, je me réjouis qu’à l’issue des travaux menés par notre collègue Stella Dupont, nous disposions enfin d’un cadre stable et respectueux pour les chibanis navetteurs, qui se partagent entre un foyer ou une résidence sociale et leur pays d’origine. Ainsi, la réforme entrée en vigueur en janvier 2020 abroge enfin toute condition de durée de résidence en France, permettant ainsi à chacun d’entre eux de bénéficier d’un véritable droit, compensable à l’étranger.

Connaît-on le nombre de personnes potentiellement concernées qui n’auraient pas encore demandé à bénéficier de ce dispositif faute de connaître son existence ou les conditions requises pour y accéder ? Le public concerné se réduit-il aux 1 500 bénéficiaires visés d’ici à 2024 ? Enfin, est-il prévu de financer l’information et l’accompagnement de ceux qui n’y ont pas encore accès ?

M. Nicolas Turquois. Certains majeurs sortant de l’ASE sont en situation de handicap. Ainsi, dans la Vienne, je suis confronté à des jeunes, handicapés intellectuels, qui présentent des troubles du comportement pouvant les conduire à commettre des actes de violence. On a du mal à faire face à de telles situations, car on ne sait pas si ces jeunes relèvent de la psychiatrie, du judiciaire ou du handicap. Aucune institution ne semble correspondre à leur profil. Or, il s’agit de jeunes adultes ; on ne peut donc pas leur imposer une décision.

Mme la secrétaire d’État. La recentralisation du RSA fait l’objet, en Seine‑Saint‑Denis, d’une expérimentation de cinq ans, très élaborée. Des indicateurs de moyens et de résultats, en cours de discussion, feront l’objet d’une convention. Nous appliquons, dans le cadre de cette expérimentation, la même méthode de contractualisation et de conventionnement, comprenant des indicateurs et un suivi précis, que celle que nous appliquons pour les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) – il y va également de l’orientation professionnelle de ces personnes. La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) a ainsi accordé à la MDPH de Seine‑Saint‑Denis une subvention de 966 000 euros qui permettra de financer notamment dix‑sept postes supplémentaires, pour apurer l’ensemble des retards, qui sont colossaux du fait de l’explosion des demandes. Cette démarche gagnant-gagnant consiste à réinterroger les processus et à mettre tous les acteurs du bassin d’emploi autour de la table. Je salue, à ce propos, l’engagement des associations, qui est indispensable.

D’autres départements sont intéressés par la recentralisation du RSA ; des discussions sont en cours avec les représentants de l’État. Nous travaillerons main dans la main, pour tirer toutes les conséquences des résultats de l’expérimentation.

On estime que 20 % à 25 % des enfants pris en charge par l’aide sociale à l’enfance sont en situation de handicap, qu’il s’agisse de handicap psychique ou d’un autisme mal diagnostiqué. Une partie des MNA sont également dans cette situation. Mon collègue Adrien Taquet et moi-même étudions, avec les associations et les départements, la manière dont nous pourrions créer des structures qui répondent aux besoins de ces jeunes. De fait, il est souvent difficile de déterminer s’ils relèvent du médico-social ou de l’aide sociale à l’enfance, donc des maisons d’enfants à caractère social. Or nous ne parvenons pas à faire travailler ensemble les experts des deux champs. Cette réflexion sera également utile aux MNA, qui, après ce qu’ils ont traversé, sont parfois aussi en situation de handicap, notamment psychique.

Nous menons donc des expérimentations avec certaines structures, notamment dans le Nord. Nous avons besoin d’unités de taille très réduite, qui mettent l’accent sur l’accompagnement et rassemblent des experts du médico-social et de l’ASE. Une fois que nous aurons achevé ce travail de dentelle avec les territoires expérimentaux, ces structures pourront essaimer. C’est un travail complexe, qui demande une très grande coordination. Nous en sommes conscients, et nous y travaillons.

Par ailleurs, des expérimentations sont menées avec les missions locales, qui nouent des partenariats avec des experts du secteur médico-social, pour tous les jeunes éloignés de l’emploi. Plus d’un million de jeunes ne sont en effet ni en emploi, ni en formation, et parmi ces jeunes se trouvent des handicapés. Mais la démarche de droit commun, qui est très importante, est à présent entrée dans les mœurs, notamment au sein des missions locales, des agences Pôle emploi ou Cap emploi.

S’agissant de la revalorisation des salaires des soignants, les mesures du Ségur figurent dans le PLFSS. La revalorisation est donc actée, et sera effective au 1er janvier 2022. Toutefois, les soignants pourront bénéficier en avance de phase des 183 euros net, dès la paie de novembre. Nous avons donné l’instruction aux ARS de ne reprendre aucun crédit, pour anticiper ces versements et soutenir les organismes gestionnaires. Cette revalorisation, qui doit bénéficier à plus de 74 000 soignants et paramédicaux, était parfaitement légitime.

Des problèmes de recrutement se rencontrent dans les EHPAD comme dans les établissements médico‑sociaux ; nous en sommes conscients. Je suis en contact, chaque semaine, avec les organismes gestionnaires, pour leur permettre de pallier ces difficultés. Il y va de l’accompagnement des personnes. Nous sommes mobilisés sur ce sujet, en lien avec les départements.

La formation des travailleurs sociaux doit leur permettre de prendre en compte l’ensemble des difficultés des jeunes. S’agissant de l’ASE, il existe ainsi des formations conjointes. Avec la délégation interministérielle à l’autisme et aux troubles du neuro‑développement, nous travaillons à améliorer la détection de ces troubles, car l’autisme de nombreux enfants n’est pas diagnostiqué, de sorte qu’ils font parfois l’objet de signalements inappropriés. Nous nous efforçons donc d’améliorer la communication, mais aussi la formation et l’accompagnement des travailleurs sociaux dans ce domaine, afin d’éviter des placements abusifs. Il y va de la recomposition de la cellule familiale.

Nous avons eu l’occasion de débattre longuement de la déconjugalisation de l’AAH ; je n’y reviens pas. Il est essentiel de poursuivre la réflexion sur l’accompagnement et l’accès à l’emploi des personnes en situation de handicap. Il convient également de faciliter le cumul de l’AAH et d’un travail à temps partiel, afin de sécuriser le retour à l’emploi. C’est, du reste, également l’enjeu de la transformation des parcours en ESAT : au-delà de la sécurisation des parcours, nous envisageons de permettre à une personne de travailler à la fois en ESAT à temps partiel et en milieu ordinaire. Il s’agit de favoriser au maximum le retour à l’emploi.

Nous développons également, avec l’emploi accompagné et le job coaching, l’aide à l’emploi et le maintien dans l’emploi des personnes en situation de handicap, notamment psychique ou mental. C’est un véritable enjeu, notamment à la suite de la crise sanitaire. Cette aide, à laquelle 15 millions supplémentaires d’euros sont alloués pour 2022, est pérenne, gratuite pour les employeurs – elle est financée par l’Association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées, le Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique et les ARS – est déployée partout en France. À ce jour, 6 000 personnes sont accompagnées ; leur nombre devrait être porté à 10 000. Le dispositif permettra de sécuriser les parcours de retour à l’emploi et, surtout, de maintien dans l’emploi.

Il est très difficile d’estimer précisément le taux de non‑recours à l’AVFS des migrants, même s’il est question d’un faible volume. Les associations réalisent un travail colossal, comme les structures sociales qui accompagnent les familles et les migrants dans leurs démarches.

Enfin, le projet SERAFIN-PH est mis en œuvre depuis 2016. Il s’agit de mieux financer les établissements en fonction des prestations qu’ils offrent aux personnes en situation de handicap, donc d’avoir une vision plus fine, plus individualisée de ces prestations. En effet, ce ne sont pas les murs qui protègent, mais la qualité de la prestation que les professionnels délivrent aux personnes concernées. L’objectif est de rendre le système plus équitable. Une expérimentation d’envergure a été lancée en septembre 2021, qui concerne un panel de 1 000 services et établissements, soit près de 10 % du périmètre de la réforme. Le calendrier, qui prévoit un déploiement généralisé en 2024, devrait ainsi être maintenu. Il faut identifier les conséquences de la réforme sur le parcours, mais aussi sur les établissements, pour qu’ils puissent se projeter. Je salue, à cet égard, le travail de la CNSA, de la DGCS et, surtout, de l’ensemble des associations gestionnaires, qui participent à l’expérimentation. Cela demande beaucoup de temps, car il faut vérifier toutes les prestations offertes dans les établissements, mais c’est leur individualisation qui est en jeu.

Mme la présidente Fadila Khattabi. Je remercie M. le ministre et Mme la secrétaire d’État pour leur disponibilité et leurs réponses.

La commission va procéder à l’examen des amendements après votre départ.

 

La commission examine ensuite les crédits de la mission Santé (M. Pierre Dharréville, rapporteur pour avis).

Article 20 et état B

 

Amendement II-AS126 de M. Joël Aviragnet.

M. Boris Vallaud. Il s’agit de doubler les crédits de l’action 19 Modernisation de l’offre de soins du programme 204.

Le Gouvernement propose de baisser de plus de 44 % les crédits de cette action pour 2022, tant en AE qu’en CP. Or elle comporte des crédits essentiels à la modernisation de l’offre de soins, qui abondent notamment la stratégie nationale d’amélioration de la qualité de vie au travail des professionnels de santé, la simplification des organisations et du quotidien des équipes soignantes, le financement d’études, d’enquêtes et d’expertises pour préparer la modernisation de l’offre de soins, et la transformation numérique de notre système de santé. Alors que le Ségur de la santé a fléché plus de 6 milliards d’euros sur l’investissement dans les hôpitaux, nous ne retrouvons pas cette ambition dans les crédits proposés par le Gouvernement dans le bleu budgétaire.

M. Pierre Dharréville, rapporteur pour avis. La diminution des crédits à laquelle vous faites allusion s’explique par le fait que l’agence de santé du territoire des îles Wallis et Futuna, dont le budget représente l’essentiel des crédits de l’action 19, a bénéficié l’année dernière d’une dotation d’investissement exceptionnelle de 45 millions d’euros dans le cadre du Ségur de la santé, notamment à la suite de l’avis budgétaire de Jeanine Dubié. La dotation n’avait pas vocation à être reconduite pour 2022. Elle ne sera mobilisée que progressivement, pour conduire les travaux visant à remettre à niveau les infrastructures de santé dans le territoire. En 2021, 1,5 million d’euros seulement ont été dépensés sur la dotation, en raison de la crise sanitaire, qui a retardé certains chantiers. En dehors de cette dotation d’investissement, la dotation annuelle de l’agence de santé du territoire augmentera de 1,4 million en 2022, ce qui semble nécessaire pour satisfaire les besoins de santé de la population.

Je partage votre souhait de moderniser notre système de santé et d’abonder l’action 19 mais ce n’est pas en doublant ainsi ses crédits que nous y parviendrons.

Avis défavorable.

M. Boris Vallaud. Je ne vous en veux pas, monsieur le rapporteur pour avis...

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-AS125 de M. Joël Aviragnet.

M. Boris Vallaud. L’amendement vise à doubler les crédits de l’action 14 Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades du programme 204 – dont le Gouvernement propose la baisse en valeur réelle pour 2022 –, afin de déployer une politique ambitieuse de prévention. Selon la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), la France est l’un des pays occidentaux dont la part des dépenses de santé consacrée à la prévention, qui est de 2,5 %, est la plus faible. Dans certains pays nordiques, qui font figure d’exemple, cette part peut atteindre 15 %. En raison de ce déséquilibre structurel, notre système de santé est essentiellement réparateur et n’anticipe pas le risque de soins, ce qui a des conséquences graves pour nos concitoyens. Doubler les crédits de l’action 14 permettra de réduire les risques à long terme d’hospitalisation et de mortalité.

M. le rapporteur. L’amendement vise à augmenter les dépenses de prévention de 20 millions d’euros, un objectif auquel je suis sensible. Malheureusement, pour abonder le programme 204, il n’y a d’autre solution que de prélever des crédits sur la mission 183, qui comprend l’essentiel de la mission Santé, c’est-à-dire l’AME et une partie du FIVA. Or les crédits pour l’AME sont trop limités, et je ne suis pas favorable à leur réduction, comme certains le demandent – ce n’est pas le cas du groupe Socialistes et apparentés, qui proposera au contraire de les augmenter.

Il s’agit donc évidemment d’un amendement d’appel. J’ai moi-même renoncé à déposer des amendements, pour ne pas avoir à proposer de réduire les crédits de l’AME. Sur le fond, je suis très favorable à votre amendement. Néanmoins, j’émettrai un avis de sagesse, pour ne pas faire une entorse à la règle que je me suis fixée.

M. Boris Vallaud. Je remercie le rapporteur pour avis de son soutien de principe. Nous connaissons les contraintes liées à la recevabilité des amendements. Celui-ci a été déposé dans l’espoir qu’en séance, le Gouvernement « lève le gage » et reprenne à son compte une mesure de progrès.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq. Le groupe La République en Marche ne votera pas l’amendement, non pour les raisons évoquées par le rapporteur pour avis, mais parce que l’action 14 comprend la prévention des maladies chroniques ainsi que les plans pluriannuels largement abondés, tels que la stratégie décennale de lutte contre les cancers, le programme national de lutte contre le tabac ou la stratégie nationale de santé sexuelle. Le ministre a expliqué l’engagement fort du Gouvernement dans ce domaine et rappelé les financements correspondants.

M. le rapporteur. Je veux bien voter l’amendement, à condition que le Gouvernement « lève le gage », si je puis dire.

M. Boris Vallaud. Nous verrons comment nous pourrons rédiger l’amendement d’ici à la séance, pour suggérer que le gage soit levé.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-AS123 de M. Joël Aviragnet.

M. Boris Vallaud. L’amendement vise à doter l’action 18 Projets régionaux de santé de 19 millions d’euros. Dans le bleu budgétaire, les crédits associés sont nuls. Nous proposons de doter chaque ARS de 1 million, notamment pour évaluer la mise en œuvre du PRS en cours, préparer la concertation du prochain PRS, notamment en étant à l’écoute des corps représentatifs de la démocratie sanitaire, ou identifier des expérimentations de parcours de soins et de santé innovants à mener sous l’égide du FIR, qui seraient à inscrire dans le prochain PRS.

M. le rapporteur. L’action 18 est dépourvue de crédits car les projets régionaux de santé sont financés dans le cadre du PLFSS. On comprend mal, du reste, pourquoi la ligne a été maintenue. De fait, je l’ai dit, la mission ne comporte plus grand‑chose, et on peut s’interroger sur l’objet de nos discussions. S’il s’agit de faire revenir dans le budget de l’État des dispositifs qui ont été inclus dans le PLFSS, j’y suis favorable, à condition que l’on ne prélève pas les crédits de l’AME.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq. Le ministre a expliqué le transfert de ce dispositif vers le PLFSS. J’ajoute que les montants qui lui sont alloués ont été considérablement augmentés, notamment pour mener des actions de prévention, comme cela est proposé dans l’amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AS121 de M. Joël Aviragnet.

M. Boris Vallaud. L’amendement vise à augmenter de 20 % – et non de 2 %, comme le prévoit le PLF – les crédits dédiés à l’AME, pour faire face à la hausse du nombre de bénéficiaires enregistrés, qui est de 20 % depuis 2017, et couvrir les besoins de santé qu’elle engendrera. Ces crédits visent à financer les soins critiques dispensés aux plus démunis. Ce sont des crédits d’investissement pour l’avenir, qui traduisent un effort de solidarité auquel nous pouvons consentir sans grand débat.

M. le rapporteur. L’augmentation de 2 % de l’enveloppe de l’AME prévue par la mission Santé est à peine supérieure à l’inflation prévue en 2022, alors que le nombre des bénéficiaires ne cesse d’augmenter. Cet amendement, qui vise à augmenter les crédits de l’AME de 200 millions d’euros en 2022, nous semble juste. Il faut en effet mieux répondre aux besoins dans ce domaine, mais sans empiéter sur les budgets de prévention, que vous souhaitez augmenter par ailleurs. Je soutiendrai donc l’amendement, à condition, là encore, que le Gouvernement lève le gage.

Mme Charlotte Parmentier-Lecocq. Notre groupe votera contre. L’AME fait l’honneur de notre pays. Ses crédits sont en hausse et ont été calibrés en fonction du nombre de bénéficiaires. Nous contestons donc l’intérêt de l’amendement.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-AS124 de M. Joël Aviragnet.

M. Boris Vallaud. L’amendement a pour objet de créer un nouveau programme dédié à la santé mentale et de le doter de 1,2 milliard d’euros pour l’année 2022. Ce programme est la traduction de la priorité collective que nous souhaitons donner à notre système de prise en charge de la santé mentale.

La santé mentale est la préoccupation quotidienne de nombreux Français. Son spectre est très large, et le coût de l’ensemble des troubles psychiques est élevé pour la société. Un pays qui va bien sur le plan de la santé mentale est un pays qui se porte bien. Les annonces du Président de la République ne sont pas à la hauteur de ce qu’attendent les professionnels. Nous proposons un véritable effort de remise à niveau de la santé mentale en France. Nous souhaiterions quant à nous, socialistes, en faire une priorité du prochain quinquennat.

M. le rapporteur. Je suis sensible à la question que vous soulevez. Une partie de ces crédits aurait probablement sa place dans le PLFSS ; il faudrait discuter de manière plus approfondie de ce que vous entendez faire. Quoi qu’il en soit, la création d’un programme consacré à la santé mentale dans la mission Santé, censée financer la santé publique, est une bonne idée. Cela permettra aux parlementaires de voter des crédits qui ont du sens. J’y suis donc favorable, avec les précautions précédemment mentionnées.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-AS122 de M. Joël Aviragnet.

M. Boris Vallaud. L’amendement propose de créer un nouveau programme Santé environnementale, doté de 500 millions d’euros. La sortie de la crise du covid-19 doit nous conduire à intégrer l’approche One Health de l’OMS à notre système de santé. La santé et l’environnement étant interdépendants, la politique doit les conjuguer pour améliorer l’état de santé général de la population. L’adoption de cette approche, qui s’appuie sur de nombreux travaux scientifiques, doit représenter un tournant pour la santé publique en France.

M. le rapporteur. L’exposé sommaire détaille les enjeux auxquels vous souhaitez vous attaquer, notamment la sensibilisation à l’alimentation, la transition des entreprises qui utilisent des produits dangereux pour la santé humaine tels que les produits cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques ou les hydrocarbures aromatiques polycycliques. Cela rejoint la préoccupation que j’exprimais tout à l’heure concernant les effets de la pollution atmosphérique sur la santé. Je suis très favorable à des politiques de santé environnementale plus offensives et lisibles. Encore faut-il définir une stratégie claire et un pilotage efficace de la politique de santé environnementale, ce qui n’est tout à fait le cas à l’heure actuelle.

Il est indispensable de se donner les moyens de conduire de telles politiques. C’est pourquoi je soutiendrai l’amendement, à condition que les crédits ne soient pas prélevés sur ceux de l’AME.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-AS120 de M. Joël Aviragnet.

M. Boris Vallaud. L’amendement vise à créer un programme nommé Inclusion numérique en santé. En effet, l’État et l’assurance maladie ont engagé de nombreux projets de transformation numérique à destination des acteurs de la santé ces dernières années, qui sont partiellement décrits dans le bleu budgétaire de la mission Santé : HOP’EN, l’espace numérique de santé, le répertoire des professionnels de santé...

Si la première jambe de la transformation numérique en matière de santé est bien de rendre plus efficaces les activités de soins, sa seconde jambe doit être l’inclusion des patients. Le numérique en santé ne peut pas être un facteur d’exclusion des patients. Or nous en voyons poindre ici le risque.

Concrètement, cela pourrait se traduire par la mise en place de bornes d’accès à l’espace numérique de santé dans tous les services publics de proximité, par des actions d’« aller vers » dans les zones les plus éloignées du numérique pour former aux outils de la santé grand public, par exemple avec la circulation d’un bus santé, ou encore par un programme de formation des professionnels de santé aux outils numériques, entre autres propositions.

M. le rapporteur. C’est une vraie question. Sur les équipements, j’ai interrogé le ministre tout à l’heure. Le programme finance en effet des investissements du ministère dans un certain nombre d’infrastructures numériques. Il serait utile que la commission se penche plus précisément sur l’usage que nous faisons du numérique, la manière dont nous y recourons, les besoins de notre système de santé en la matière et la manière d’y répondre. La puissance publique a-t-elle une capacité propre à faire face ? Quels sont les opérateurs qui interviennent ? Le champ d’investigation est vaste, pour mieux comprendre où nous en sommes dans ces mutations.

Cela dit, votre véritable préoccupation touche surtout à l’accès au numérique et à la lutte contre l’illectronisme. Jacques Toubon, alors Défenseur des droits, avait déjà alerté sur le recul de l’accès aux droits qu’occasionne le recours au numérique. On ne peut pas se satisfaire de la situation, mais le numérique ne doit jamais remplacer l’humain. Cela suppose d’avoir une réflexion plus approfondie sur l’inclusion numérique, notamment dans le domaine de la santé.

Je soutiendrai donc cet amendement, avec toutes les précautions d’usage.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Santé non modifiés.

 

 

La commission examine enfin les crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances et de l’article 43, rattaché (Mme Christine Cloarec Le Nabour, rapporteure pour avis).

 

 

Article 20 et état B

 

Amendement II-AS116 de M. Joël Aviragnet.

M. Boris Vallaud. L’amendement vise à octroyer 3,2 millions d’euros supplémentaires aux LEAO, par le biais de l’action 25 du programme Égalité entre les femmes et les hommes.

Les LEAO offrent un accompagnement spécialisé́ et dans la durée aux femmes victimes de violences, afin de les aider à rompre le cycle de la violence et à trouver les moyens de leur autonomie. Ils nous semblent essentiels dans le parcours de reconstruction de ces femmes.

Certes, le Gouvernement indique vouloir augmenter les crédits des LEAO de 1,6 million d’euros par rapport à 2021, mais cela ne nous semble pas suffisant. Sachant que les signalements de violences conjugales sont en hausse et que 89 % des femmes sont victimes d’injures sexistes, cette augmentation ne couvre pas la croissance forte des besoins en espaces d’écoute.

Mme Christine Cloarec-Le Nabour, rapporteure pour avis. Vous avez raison de rappeler l’importance fondamentale de ces lieux, qui permettent aux femmes de briser le silence, d’être entendues, écoutées et conseillées.

La lutte contre les violences faites aux femmes constitue une priorité pour le Gouvernement : le budget qui y est consacré augmente de 22 % en 2022. Comme vous l’avez dit, 1,6 million d’euros seront en effet consacrés au renforcement et à l’évolution structurelle et organisationnelle du réseau des LEAO et des accueils de jour. Mais le combat mené par le Gouvernement ne se limite pas à cela : il faut aussi noter le développement de la mise en sécurité des victimes dans les situations d’urgence, le déploiement de la plateforme 3919, la montée en charge des trente CPCA désormais en activité, ainsi qu’un appel à projets sur les violences sexistes et sexuelles au travail.

Je vous propose de retirer votre amendement.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-AS115 de M. Joël Aviragnet.

M. Boris Vallaud. L’amendement vise à octroyer 2 millions d’euros supplémentaires à la plateforme téléphonique 3919, qui offre écoute, information et orientation aux victimes de violences et à leur entourage.

Selon le dernier bleu budgétaire, le taux d’appels traités de la plateforme était de 85 % en 2021, ce qui laisse 15 % des usagères sans réponse. Nous saluons les efforts du Gouvernement pour améliorer l’accueil téléphonique de ces femmes en détresse, avec notamment le passage en juin 2021 à un fonctionnement vingt‑quatre heures sur vingt‑quatre. Toutefois, il nous semble essentiel que le taux des appels traités soit de 100 %.

Mme la rapporteure. En 2019, des moyens complémentaires ayant été alloués à la Fédération nationale Solidarité Femmes, l’objectif de qualité du 3919 a été fixé à 100 % pour 2020. Toutefois, lors du premier semestre 2020, le trafic d’appels de la plateforme a quasiment doublé par rapport au premier semestre 2019, avec 64 051 appels supplémentaires sur la période. Dans ce contexte, la cible a été réactualisée à 80 %, pour 2020 et 2021. Elle a toutefois été revue à la hausse pour 2021, à 85 %, compte tenu du renforcement des moyens humains et techniques de la plateforme lié à son passage à un fonctionnement vingt‑quatre heures sur vingt‑quatre.

Pour 2022, 5,1 millions d’euros supplémentaires seront consacrés aux mesures de lutte et de prévention des violences faites aux femmes, dont 700 000 pour la plateforme 3919. Je vous invite donc à retirer votre amendement.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-AS118 de M. Joël Aviragnet.

M. Boris Vallaud. Nous proposons par cet amendement que le montant moyen servi aux bénéficiaires de l’AAH atteigne le seuil de pauvreté.

Selon la DREES, le montant moyen versé aux allocataires de l’AAH serait de 759 euros, sur une base de 1 280 000 bénéficiaires. Le seuil de pauvreté s’établissant à 1 060 euros, nous proposons une augmentation à due concurrence.

J’ai compris, au cours de la discussion, que le Gouvernement avait l’intention de travailler sur le sujet. Je propose que nous prenions cette mesure dès à présent.

Mme la rapporteure. En indiquant que, selon la DREES, le montant servi aux allocataires de l’AAH atteint 759 euros, vous omettez un élément important : le calcul du montant de l’allocation prend en compte les revenus du bénéficiaire ainsi que ceux de son conjoint, lesquels ne doivent pas dépasser un certain plafond.

L’attribution de l’AAH est soumise à condition de ressources. Elle constitue une prestation différentielle : le droit à l’AAH n’est ouvert que lorsque la personne ne peut prétendre au versement d’une rente ou d’une prestation contributive d’un montant au moins égal à celui de l’allocation. Dans ce cas, l’AAH s’ajoute à la prestation touchée par l’allocataire sans que l’addition de ces deux revenus puisse excéder le montant maximum de l’allocation à taux plein, aujourd’hui fixé à 904 euros par mois.

Je rappelle que le PLF comporte une réforme importante du calcul de l’AAH, qui conduira 120 000 foyers à bénéficier d’une hausse moyenne de 110 euros par mois. Au total, la dépense consacrée à l’AAH aura progressé de 25 % entre 2017 et 2022. Il faut aussi rappeler les nombreux chantiers ouverts pour changer notre regard sur le handicap et améliorer l’autonomie et les conditions de vie des personnes en situation de handicap.

Je vous propose de retirer votre amendement.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-AS111 de M. Boris Vallaud.

M. Boris Vallaud. L’amendement vise à abroger les règles si restrictives d’accès au RSA jeune, pour ouvrir largement le RSA aux 18‑25 ans.

Nous sommes dans une situation curieuse : on peut aller en prison à 16 ans, on peut voter à 18 ans, mais on atteint la majorité sociale à 25 ans. À l’heure où les files d’attente devant les banques alimentaires se grossissent de notre jeunesse et où les engagements du Président de la République tardent à trouver une concrétisation, un certain nombre de jeunes se retrouvent dans les plus grandes difficultés. Il faut leur apporter une réponse.

Mme la rapporteure. Depuis le début du quinquennat, nous avons fait le choix d’une société de compétences, avec l’ambition de qualifier nos jeunes et de les accompagner toujours mieux vers l’emploi et l’autonomie.

Dans le cadre du plan « 1 jeune, 1 solution » lancé à l’été 2020 pour atténuer l’impact de la crise sanitaire sur la situation des jeunes, de nombreux dispositifs ont été renforcés, améliorés, réactivés. Les missions locales ont été confortées dans leur rôle d’accompagnement vers l’emploi et l’autonomie. L’objectif est de trouver des solutions à tous les jeunes et de fluidifier et de sécuriser leurs parcours pour éviter qu’ils ne renoncent à entrer dans les dispositifs d’insertion.

Il reste beaucoup à faire, notamment pour repérer et aller chercher les fameux « invisibles ». Il faut mobiliser tous les acteurs sur le territoire pour cela. Nous avons travaillé à l’assouplissement des critères de la garantie jeunes, qui étaient liés au foyer fiscal des parents, et pour y rendre éligibles les jeunes qui ont des petits boulots. C’est chose faite. Des expérimentations sont menées un peu partout dans les territoires pour adapter la garantie jeunes aux différents profils. Et bien sûr nous développons les partenariats et les coopérations, pour rassembler tous les acteurs autour de l’architecte qu’est le conseiller en insertion des missions locales.

Plus de deux millions de jeunes sont soit entrés dans l’emploi, soit en cours de formation, soit accompagnés dans un parcours d’insertion. Je crois que nous avons suffisamment d’outils pour continuer à trouver des solutions pour tous les jeunes qui en ont besoin.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-AS119 de M. Joël Aviragnet.

M. Boris Vallaud. L’amendement vise à doter notre système de protection sociale d’une stratégie efficace de lutte contre le non‑recours aux prestations sociales. En dépit des augmentations de crédits annoncées, que nous saluons, ce volet continue d’être le parent pauvre de la politique du Gouvernement.

Mme la rapporteure. Vous voulez consacrer 12,5 milliards d’euros à la lutte contre le non‑recours aux prestations sociales.

Vous savez que c’est un sujet auquel je suis attachée, que j’évoquais dans un rapport remis au Premier ministre en 2018. Nous avons toujours autant de mal à apprécier le taux de non-recours. Cela n’enlève rien à la nécessité de trouver des leviers pour informer chacun de ses droits et lui en rendre l’accès effectif. Mais il faut bien dire aussi que cela constitue un défi technique.

Le réseau France services que nous avons déployé pour aider, dans tout le territoire, les personnes qui ont besoin d’être accompagnées dans leurs démarches sera très utile en matière de lutte contre le non‑recours. De façon générale, toutes les démarches d’« aller vers » le seront. Je signale aussi que d’importants progrès ont été réalisés dans le taux de recours à la prime d’activité, qui comptait 4 600 000 foyers bénéficiaires en 2020. C’est un succès qu’il faut souligner.

Il faut continuer en ce sens, et beaucoup de chemin reste à faire, mais je donne un avis défavorable à cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-AS117 de M. Joël Aviragnet.

M. Boris Vallaud. L’amendement vise à doubler le montant des dépenses consacrées à l’aide alimentaire, que le Gouvernement avait proposé de baisser de 12 %. Compte tenu des réponses du ministre tout à l’heure, je le retire.

L’amendement est retiré.

 

Amendement II-AS113 de Mme Isabelle Santiago.

M. Boris Vallaud. Cet amendement important vise à doter notre politique de protection de l’enfance des moyens de ses ambitions, en augmentant de plus de 20 %, en AE et en CP, les moyens consacrés à l’action 17 du programme Inclusion sociale et protection des personnes.

En effet, malgré la hausse prévisible des dépenses qui résultera des avancées du projet de loi relatif à la protection des enfants, les budgets prévus par le Gouvernement sont en quasi‑stagnation par rapport à 2021 – ils augmentent de 1,22 % selon le bleu budgétaire. Un plus grand nombre d’enfants devant être pris en charge grâce à ce projet de loi, cela conduira mathématiquement à une baisse des moyens par enfant.

Or, la difficulté principale exprimée par les acteurs de terrain est le manque de moyens, immobiliers, mais aussi et surtout humains. Ce manque de moyens est à l’origine de l’échec de notre politique publique de protection de l’enfance. Je ne reviens pas sur les statistiques liées à la part de jeunes issus de l’ASE qu’on trouve parmi les sans‑abri, que vous connaissez.

Les 50 millions d’euros supplémentaires que nous proposons d’affecter à la protection de l’enfance sont des dépenses d’investissement – autant de dépenses qui ne seront pas à consacrer plus tard aux politiques d’insertion, à l’accueil des jeunes laissés à l’abandon ou aux soins en urgence par exemple.

Cette somme permettra à la loi que nous aurons votée de trouver sa pleine et entière application, ce qui est notre souhait à tous.

Mme la rapporteure. L’action 17 Protection et accompagnement des enfants, des jeunes et des familles vulnérables est dotée de 249,2 millions d’euros en 2022, soit une hausse de 2,9 millions par rapport à 2021.

Cette relative stabilité cache en réalité une reconfiguration des moyens alloués par l’État à la protection de l’enfance.

D’une part, les crédits alloués à la prise en charge et à l’évaluation des mineurs non accompagnés continuent de diminuer en 2022, principalement en raison du moindre nombre d’arrivées sur le territoire.

D’autre part, la montée en charge de la stratégie de prévention et de protection de l’enfance, du plan 1 000 premiers jours et du plan de lutte contre les violences faites aux enfants induit un engagement financier croissant de l’État pour accompagner les départements dans l’exercice de leur compétence de protection de l’enfance.

Depuis 2017, on peut ainsi constater une progression des crédits consacrés par l’État à la protection des enfants de l’ordre de 680 %, ce qui mérite d’être souligné.

Par ailleurs, tout ne vient pas du manque de moyens. Il ressort des auditions que j’ai menées un besoin essentiel de coopération et de coordination dans les territoires.

Je suis défavorable à votre amendement.

M. Boris Vallaud. Je suis en désaccord absolu avec vous. L’organisation et la coopération peuvent effectivement être améliorées, mais ce dont me parlent les acteurs, c’est bien d’un manque de moyens, qui sera encore accentué si l’enveloppe n’est pas augmentée dans la perspective d’une croissance du nombre d’enfants pris en charge.

Nous prenons le risque que la bonne loi qui devrait résulter de nos travaux ne soit pas correctement appliquée, par défaut de moyens. J’insiste sur le bien‑fondé de cette proposition, qui ne représente qu’un montant modeste.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-AS112 de Mme Isabelle Santiago.

M. Boris Vallaud. L’amendement vise à créer un fonds de mobilisation départementale pour les jeunes majeurs de la protection de l’enfance, abondé de 1,5 milliard d’euros.

Notre politique publique de protection de l’enfance échoue à insérer les jeunes qu’elle a protégés pendant de longues années. Notre stratégie pour l’insertion des jeunes majeurs issus de l’ASE est rudimentaire. À 18 ans, les jeunes de l’ASE passent du tout au rien. Ils sont parfois exclus de leur foyer du jour au lendemain, sans vérification qu’ils ont un toit pour se loger – ce qui, dans bien des situations, n’est pas le cas. Dans ce contexte, les enfants vulnérables sont poussés à choisir les filières les plus courtes, quelles que soient leurs appétences, dès le début de l’adolescence.

Comment une politique publique de 10 milliards d’euros peut-elle se satisfaire d’un tel résultat, qui met à mal tout le travail réalisé, qui pousse les jeunes à partir au plus tôt ? Ces économies à court terme conduisent à un gâchis humain, social, citoyen mais aussi économique.

Le surcoût pour la nation de l’accompagnement des plus de 18 ans en situation de vulnérabilité est ainsi estimé à 700 millions d’euros, à comparer aux 10 milliards dépensés chaque année pour la protection de l’enfance en danger.

Nous proposons donc d’investir 1,5 milliard d’euros dans l’insertion sécurisée des jeunes relevant de la protection de l’enfance. Cette somme permettrait de financer l’accompagnement des jeunes majeurs en difficulté jusqu’à leur insertion pleine et entière dans la société, sans condition et limite d’âge. Selon les cas, l’accompagnement pourrait être court ou long, ténu ou soutenu en fonction des périodes. Le financement serait dédié, fléché et réparti selon les besoins repérés dans les territoires.

Mme la rapporteure. Je vous invite à lire la seconde partie de mon rapport, consacrée à la question des jeunes majeurs vulnérables. Certes, il y a des manques, mais nous les avons identifiés : nous avons auditionné les institutions, les associations, les députés qui ont travaillé sur le sujet.

Il y a fort à faire pour éviter des ruptures de parcours à ces jeunes. Encore une fois, nous avons des outils. Ce qui manque, c’est le lien entre tous les acteurs : les travailleurs sociaux des départements, les conseillers en insertion des missions locales et les experts chargés de les former sur un point particulier, par exemple le diagnostic précoce de l’autisme ou des handicaps psychiques... Ce n’est la faute de personne : nous avons simplement vraiment besoin que tous ces acteurs se mettent autour de la table pour travailler ensemble à sécuriser les parcours de ces jeunes et leur éviter de se trouver à la rue.

Il arrive que certains d’entre eux aient envie de rompre un peu avec l’aide qu’ils reçoivent depuis leur plus jeune âge. Mais il arrive aussi qu’ils aient besoin d’y revenir. Une des préconisations de mon rapport concerne donc le droit au retour – le droit pour tout jeune qui est parti voler de ses propres ailes de bénéficier à nouveau d’un accompagnement vers l’autonomie et l’emploi.

M. Nicolas Turquois. C’est une des situations que ma fonction de député m’a permis de découvrir et qui m’ont profondément touché. J’ai rencontré des jeunes sortis de l’ASE, dont certains, après le parcours qu’ils ont connu, peuvent faire preuve d’une certaine violence comportementale. Ces jeunes ont besoin d’un accompagnement particulier. Vous savez ce que l’un d’entre eux m’a dit ? Qu’il avait besoin d’une maman ! Si l’on se contente de leur dire qu’à 18 ans, ils sont majeurs et autonomes, cela ne marchera pas.

Je n’ai aucune idée des montants qu’il faudrait y consacrer ni du type de réponse à apporter, mais je vous interpelle collectivement pour y travailler, peut-être dans le cadre d’une proposition de loi. Il y a vraiment quelque chose qui ne fonctionne pas.

M. Boris Vallaud. Isabelle Santiago, la première signataire de cet amendement, s’est longtemps occupée de ces sujets en tant qu’élue départementale. Elle a identifié beaucoup des difficultés que vous avez évoquées.

Vous avez dit qu’il y a fort à faire : nous proposons qu’on se donne les moyens de faire, au lieu d’en rester au diagnostic. On peut sans doute discuter des montants nécessaires, mais ce qui est certain, c’est qu’il ne s’agit pas que d’une question de méthode de travail entre les uns et les autres, même si je ne disconviens pas qu’il y a sans doute des progrès à faire en la matière.

Parmi les jeunes relevant de la politique de protection de l’enfance, un sur quatre devient, une fois majeur, sans‑abri. Franchement, quel échec ! J’entends que chacun en a bien conscience, mais fixons-nous l’objectif commun de remédier à cet échec.

Mme Bénédicte Pételle. Je travaille beaucoup sur la question, et je partage vos constats. Nous avons fait avec Isabelle Santiago beaucoup de propositions lors de l’examen du projet de loi relatif à la protection des enfants. Par exemple, les jeunes se verront systématiquement proposer la garantie jeunes ou un contrat jeune majeur. Mais il reste des questions en suspens, notamment concernant le logement. On a parlé d’une priorité pour les logements sociaux, le nombre des places en foyer Adoma a augmenté... Une série de mesures ont été prises, mais il est clair que ce n’est pas réglé. Notre majorité est très engagée sur le sujet.

Mme Perrine Goulet. Je veux rectifier les chiffres qui ont été cités. Ce que la Fondation Abbé Pierre a établi, c’est qu’à peu près 28 % des personnes sans‑abri de moins de 25 ans nées en France sont issues de l’ASE. N’allons pas dire qu’un jeune de l’ASE sur quatre va finir à la rue : nous allons affoler tous ceux qui sont concernés !

Il s’agit d’une véritable question. À cet égard, le projet de loi du secrétaire d’État Adrien Taquet ne va clairement pas assez loin, puisqu’il ne prévoit qu’une protection temporaire dont la durée n’est pas précisée. Quelques avancées qui ont été réalisées, mais elles ne sont pas suffisantes. En tout cas, gardons-nous de propager des chiffres inexacts qui pourraient être repris dans les médias.

Mme la rapporteure. Je suis d’accord avec les orateurs précédents ; nous aurons l’occasion d’en débattre très prochainement. Il est clair que le problème n’est pas réglé, mais nous avons des outils. Nous nous sommes aperçus, au fil des auditions, que les uns ne connaissaient pas les missions des autres. Ça, ce n’est pas possible : essayons déjà de mieux informer sur les dispositifs qui existent et de mettre en relation les différents acteurs.

Parmi les facteurs de difficulté pour ces jeunes, outre le logement, dont on a parlé, il y a aussi la mobilité, et un troisième frein qui est rarement évoqué : les modes de garde. Parmi les bénéficiaires du RSA jeune actif, il y a de nombreuses jeunes mamans qui n’ont pas la possibilité d’accéder à une formation et à un emploi. Cette question sera un véritable enjeu dans les années futures.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-AS107 de M. Thierry Michels.

M. Thierry Michels. L’accélération de la transition écologique ne doit laisser personne au bord de la route et nécessite, en conséquence, un accompagnement solidaire. Nous avons créé, dans la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, les zones à faibles émissions mobilité (ZFE‑m) dans les agglomérations de plus de 150 000 habitants. C’est un levier essentiel de la politique de santé publique, destiné à réduire les émissions de CO2 induites par la circulation automobile. La création d’une ZFE‑m s’accompagne d’aides substantielles pour le développement des transports en commun et des mobilités douces, ainsi que pour la conversion de la voiture individuelle.

Toutefois, l’usage des transports en commun et la marche peuvent présenter des difficultés pour les plus fragiles d’entre nous, tandis que l’achat d’une voiture propre est, malgré les aides, hors de la portée de nos concitoyens les plus modestes. La loi accorde aux détenteurs de la carte mobilité inclusion (CMI) comportant la mention « stationnement » une dérogation aux mesures de restriction de la circulation prévue dans les ZFE‑m. On peut donc s’attendre à une augmentation des demandes d’obtention de la carte mobilité. Les crédits que nous sollicitons ont pour objet, d’une part, d’aider les MDPH à traiter les demandes de nos concitoyens et, d’autre part, de développer des campagnes d’information spécifiques à destination de ces publics.

Je proposerai également, en séance publique, le développement de transports à la demande solidaires pour permettre à nos aînés et aux plus fragiles de nos concitoyens de rester au centre de la cité, au sens propre comme au sens figuré.

Mme la rapporteure. Nous soutenons évidemment le développement de l’accès des personnes à la CMI, la mobilité des personnes en perte d’autonomie constituant une priorité. Nous sommes néanmoins défavorables à la création d’une nouvelle voie de financement des MDPH, lesquelles bénéficient du concours de la CNSA, dans le cadre du PLFSS. S’il n’y a pas d’intérêt à créer un nouveau canal de financement, il conviendra toutefois d’engager une réflexion sur les leviers à notre disposition.

Je vous propose de retirer votre amendement.

M. Thierry Michels. Il importe en effet que l’on débatte de cette question et que des organes comme la CNSA s’en emparent. Elle sera d’une importance croissante à mesure que nous accélérerons la transition écologique.

L’amendement est retiré.

 

La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances non modifiés.

 

Article 43 : Abattement forfaitaire sur les revenus du conjoint d’un bénéficiaire de l’allocation aux adultes handicapés

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 43 non modifié.

 

Après l’article 43

 

Amendement II-AS128 de M. Thierry Michels.

M. Thierry Michels. On doit impérativement améliorer la qualité des éléments dont on dispose pour apprécier le pilotage de la politique publique concernant l’AAH. On doit faire plus pour les personnes en situation de handicap, ce qui nécessite davantage de transparence et d’objectivation. Cela permettrait au Parlement d’approfondir sa mission de contrôle et de s’assurer de l’efficacité et de l’efficience de notre dépense publique.

Depuis le début du quinquennat, nous avons œuvré au refinancement de la solidarité
– qui était attendu depuis des années – en faveur des personnes les plus fragiles. La revalorisation de l’AAH témoigne de l’importance que nous lui accordons.

Notre groupe souhaite une amélioration significative de la qualité des données portant sur les demandeurs en situation de handicap et bénéficiaires de l’allocation. On doit comprendre les raisons des inégalités territoriales, qui sont préjudiciables à nos concitoyens, comme l’a relevé la Cour des comptes dans son rapport public thématique L’Allocation aux adultes handicapés de novembre 2019.

Mme la rapporteure. Votre amendement a pour objet la publication des données nécessaires à l’appréciation précise de l’application des critères de conjugalité de l’AAH afin de compléter l’information sur les bénéficiaires et d’étudier plus précisément le pilotage de l’allocation. Les difficultés relatives à la collecte d’informations précises sur l’attribution de l’AAH alimentent en effet une incertitude quant aux critères retenus par les MDPH et induisent un risque de disparités entre bénéficiaires. Les témoignages mettent en évidence une incompréhension par les bénéficiaires des règles retenues pour le calcul de leur allocation. Ces règles sont l’objet de recours qui ne bénéficient qu’aux personnes handicapées les mieux informées. Il est par ailleurs regrettable que subsistent tant de disparités territoriales dans l’attribution de l’AAH, qui témoignent d’une application variable des critères d’attribution de l’allocation.

Je suis donc favorable à votre amendement.

M. Pierre Dharréville. Ces questions pourraient trouver une réponse plus adaptée dans la proposition de loi que nous soumettrons à nouveau à notre assemblée le 2 décembre prochain.

La commission adopte l’amendement.

 

 

 

La séance s’achève à dix-huit heures quarante-cinq.


Présences en réunion

Réunion du mercredi 27 octobre 2021 à 15 heures

Présents. - M. Belkhir Belhaddad, M. Philippe Chalumeau, Mme Annie Chapelier, M. Sébastien Chenu, Mme Christine Cloarec-Le Nabour, Mme Josiane Corneloup, M. Marc Delatte, M. Pierre Dharréville, Mme Jeanine Dubié, Mme Catherine Fabre, Mme Perrine Goulet, Mme Carole Grandjean, Mme Véronique Hammerer, Mme Fadila Khattabi, Mme Monique Limon, M. Didier Martin, M. Thierry Michels, Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, M. Bernard Perrut, Mme Bénédicte Pételle, Mme Michèle Peyron, M. Alain Ramadier, Mme Valérie Six, M. Jean-Louis Touraine, M. Nicolas Turquois, Mme Isabelle Valentin, M. Boris Vallaud, Mme Michèle de Vaucouleurs, Mme Annie Vidal

Excusés. - Mme Stéphanie Atger, Mme Justine Benin, Mme Claire Guion-Firmin, M. Thomas Mesnier, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Nadia Ramassamy, M. Jean-Hugues Ratenon, Mme Hélène Vainqueur-Christophe

Assistaient également à la réunion. - M. Patrice Anato, Mme Véronique Louwagie