Compte rendu

Commission de la défense nationale
et des forces armées

Audition, à huis clos, du général d’armée Stéphane Mille, chef d'état-major de l’armée de l’air et de l’espace, sur le projet de loi de finances pour 2022.


Jeudi
14 octobre 2021

Séance de 9 heures

Compte rendu n° 12

session ordinaire de 2021-2022

 

Présidence de
Mme Françoise Dumas, présidente


 


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La séance est ouverte à neuf heures.

 

Mme la présidente Françoise Dumas. Général, ce n’est pas la première fois que nous avons le plaisir de vous accueillir au sein de la commission de la Défense nationale et des forces armées. Nous vous avions en effet reçu le 2 décembre dernier – en tant que sous-chef « Opérations » à l’état-major des armées – dans le cadre du cycle d’auditions que nous tenions alors sur l’opération Barkhane. Pour autant, il s’agit bien de votre première venue en tant que chef d’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace. Permettez-moi de vous en féliciter très chaleureusement aujourd’hui.

Votre nomination à la tête de l’armée de l’Air et de l’Espace intervient au moment où la remontée en puissance soutenue par la LPM commence à pleinement porter ses fruits.

C’est notamment le cas pour l’aviation de transport, le couple constitué de l’A400M et du MRTT Phénix ayant démontré avec éclat sa performance lors de l’opération d’évacuation APAGAN sur laquelle nous avons organisé un cycle d’auditions pour en faire le retour d’expérience. Le double pont aérien dressé entre Kaboul, notre base aérienne Al Dhafra à Abu Dhabi, et Paris a été d’une remarquable efficacité. Au nom de mes collègues, je tenais donc à vous faire part – et à travers vous aux aviateurs – de notre pleine reconnaissance et de notre fierté.

Si l’opération Apagan a été un succès, elle n’est que l’une des manifestations de l’intensité de l’activité opérationnelle de l’armée de l’air au cours de l’année 2021, en France comme sur les théâtres d’opérations extérieures. Et ce n’est pas la reconfiguration de notre dispositif au Sahel qui l’allégera, l’armée de l’Air et de l’Espace ayant vocation à y demeurer fortement engagée, en particulier depuis la base aérienne projetée de Niamey. Nous attendons d’ailleurs de vous que vous puissiez nous dresser un premier bilan de l’activité des drones Reaper en bande sahélo-saharienne.

2021, c’est aussi l’année de la reprise des exercices de grande envergure, qu’ils soient conduits par l’armée de l’Air et de l’Espace seule, en interarmées ou en interalliés. Je pense notamment à l’exercice RHEA de contre-terrorisme, conduit en mars dernier en Méditerranée, ou à la mission HEIFARA, qui a vu le déploiement de plusieurs Rafale et de leurs ravitailleurs A330 Phénix à l’autre bout du globe, dans le ciel polynésien, en moins de 48 heures. Dans les deux cas, ces démonstrations de force et de puissance ont été scrutées avec attention par celles et ceux à qui elles étaient destinées… qu’il s’agisse de nos alliés ou de nos compétiteurs stratégiques. Je n’oublie pas non plus l’exercice annuel VOLFA d’entraînement à la haute intensité, qui se déroule pour cette année jusqu’à demain.

Ce bref détour par les opérations me semblait important car, au fond, c’est bien la finalité du budget que nous examinons que de permettre à nos armées d’être prêtes à répondre aux ordres du Président de la République. Et nous constatons que l’armée de l’Air et de l’Espace a toujours répondu présente.

Votre audition a donc pour but de nous permettre de mieux apprécier les grands équilibres budgétaires du PLF 2022 s’agissant de l’armée de l’Air et de l’Espace, et également d’identifier les éventuels points de tension qui pèsent sur elle.

Dans cette perspective, j’aimerais notamment que vous puissiez nous faire part des conséquences du retrait de service anticipé des Transall, et en particulier des Gabriel. L’achèvement du programme Archange visant à renforcer les capacités de renseignement d’origine électromagnétique n’étant pas prévu à très court terme, nous risquons donc de rencontrer une rupture de capacité en matière de renseignement d’origine électromagnétique. Faut-il selon vous s’en inquiéter ?

Je souhaite également recueillir votre appréciation des incidences du succès du RAFALE à l’export, tant sur le format de l’aviation de combat que sur la capacité de l’armée de l’Air et de l’Espace à former et entraîner les futurs pilotes.

Je ne doute pas que notre rapporteur pour avis, M. Jean-Jacques Ferrara, complétera mes interrogations à ce sujet, puisque c’est à cette question qu’il a décidé de consacrer la partie thématique de son rapport.

J’en profite d’ailleurs pour saluer l’excellence de son travail et son engagement au cours des cinq dernières années. Malgré nos différences politiques, nous partageons, comme avec l’ensemble de mes collègues, le plus profond respect pour celles et ceux qui ont choisi de servir les armes de la France, et la plus grande détermination à leur donner les moyens d’exercer leurs missions.

Général Stéphane Mille, chef d’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace. C’est effectivement la première fois que je m’adresse à vous depuis que j’ai pris mes fonctions de chef d’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace, il y a un mois, et je vous remercie de m’accueillir aujourd’hui. En quelques minutes, je vous dresserai les constats que je fais en arrivant à la tête de l’armée de l’Air et de l’Espace et vous présenterai mes premières priorités. Avant de débuter mon propos, j’ai une pensée pour Hubert Germain qui vient de nous quitter, dernier survivant des Compagnons de la Libération, dont l’exemple inspire encore les jeunes générations. Je pense en particulier aux élèves officiers de l’École de l’air et de l’espace qui portent fièrement la fourragère de l’Ordre de la Libération et que nous verrons, demain, à la cérémonie d’hommage qui aura lieu aux Invalides.

Mon premier constat est que l’armée de l’Air et de l’Espace est engagée sur tous les fronts, et qu’elle est, à chaque fois, au rendez-vous des opérations. Je l’ai constaté dans les différentes fonctions que j’ai occupées au cours des cinq dernières années, au cœur des opérations militaires. C’est une très grande satisfaction pour moi, qui suis désormais à sa tête, de prendre le commandement d’une force capable, dans la durée, de mener les missions que l’on attend d’elle. Cette armée démontre en permanence et sur très court préavis sa capacité à agir sur un très large spectre. C’est le cas sur le territoire national, par ses postures permanentes de sûreté aérienne et de dissuasion nucléaire, et par son soutien à la population, notamment dans l’opération Résilience au cours de laquelle des patients atteints du Covid-19 ont été transportés par les airs d’une région à l’autre, grâce aux appareils dont la LPM nous a dotés.

C’est le cas également sur les théâtres d’opérations extérieures. Chacun connaît l’engagement des aviateurs dans l’opération Barkhane au Sahel, ou Chammal au Levant, mais je me dois de mentionner aussi l’opération Apagan, exemple marquant des derniers mois. Cette opération d’envergure menée depuis l’aéroport de Kaboul du 15 au 27 août dernier a permis d’évacuer un peu plus de 2 800 personnes, dont 142 Français. Elle s’est déroulée sur très court préavis : moins de 48 heures après la décision présidentielle de lancer l’opération, un pont aérien était mis en place entre Kaboul et la métropole via les Émirats arabes unis – j’y reviendrai.

Cette rapidité d’exécution témoigne des atouts intrinsèques de l’armée de l’Air et de l’Espace : son agilité, sa réactivité et sa capacité d’adaptation. Ainsi, nous avons dû innover dans l’urgence tout en maîtrisant les risques, pour rapatrier un maximum de personnes en un nombre restreint de rotations.

Cette opération démontre également l’efficacité et la polyvalence du couple A400M – MRTT. Celui-ci nous a permis pour la première fois de prendre en charge, outre l’évacuation primaire – sortie du territoire et mise en sécurité des personnels –, l’évacuation secondaire vers Paris depuis les Émirats Arabes Unis. Généralement, dans ces situations, les armées mènent à bien l’évacuation primaire et un affrètement par voie aérienne civile est organisé pour l’évacuation secondaire vers la France. En tout, trois A400M, deux MRTT, un A330 et un C-130J ont été mobilisés pour maintenir en permanence le flux de rotations entre Kaboul et Paris.

Cette opération démontre enfin l’importance de notre base aérienne d’Al Dhafra utilisée comme point d’appui, grâce aux accords noués avec les partenaires émiriens, qui a grandement facilité les choses.

L’armée de l’Air et de l’Espace est donc pleinement engagée, et je peux témoigner, pour avoir rencontré les aviateurs engagés sur ces opérations, de leur rôle clé, avec un enthousiasme que vous-même, madame la présidente, et certains d’entre vous avez constaté. Madame la ministre me disait récemment avoir été impressionnée par l’entraide manifeste entre membres d’équipages, personnel d’escale et mécaniciens ; une communauté s’était mise à l’œuvre pour remplir la mission que l’on attendait d’elle – rapatrier les gens au plus vite.

Mon deuxième constat est que l’armée de l’Air et de l’Espace élargit le spectre de son action pour répondre aux nouvelles conflictualités, y compris à l’autre bout de la planète, en intégrant les dimensions cyber et spatial. À ce sujet, je voudrais faire un focus sur la mission de projection de puissance menée en juillet dernier jusqu’en Indopacifique, baptisée HEIFARA. Elle a été une première pour l’armée de l’Air et de l’Espace, à plusieurs titres.

C’est en effet la première fois que nous projetons un ensemble cohérent jusqu’en Polynésie Française, soit 3 Rafale, 2 A330 Phénix et 2 A400M Atlas, et que nous planifions immédiatement à l’arrivée un engagement offensif simulé. Le but n’était donc pas uniquement de se déployer en 40 heures à plus de 17 000 km de la métropole, mais bien de mener un raid à l’autre bout du globe depuis la métropole.

D’autre part, et c’était aussi une première pour nous, la mission a été entièrement commandée depuis Lyon Mont-Verdun, dans notre nouveau centre de commandement, le Centre air de planification et de conduite des opérations (CAPCO). Ce succès permet à la France de figurer parmi les rares pays au monde à disposer d’un tel savoir-faire.

Enfin, la spécificité de cette mission est de s’inscrire dans une approche réellement multimilieux multichamps. D’une part avec un dispositif cyber déployé tout au long de la mission, et d’autre part avec l’intégration de nos capacités spatiales. La réussite de l’opération confirme notre aptitude à protéger notre souveraineté et nos intérêts, même au plus loin de la métropole.

Voici pour les constats. Cela me permet d’en venir à ce nouveau domaine dont l’armée de l’Air a pris la responsabilité en devenant, comme vous le savez, « Armée de l’Air et de l’Espace ».

L’incarnation la plus visible de cette transformation est la montée en puissance du Commandement de l’Espace. Déjà doté d’environ 250 personnes, il s’installe progressivement à Toulouse, où il profitera des synergies avec le CNES.

Le CDE a d’ailleurs mené en mars dernier, depuis le centre spatial toulousain, le premier exercice spatial en Europe, appelé AsterX, en coopération avec nos partenaires américains et allemands. Nous avons simulé une crise internationale avec pas moins de dix-huit scénarios spatiaux différents : attaque sur un satellite français, débris spatiaux menaçant les populations civiles, brouillage de nos satellites de communication… Couronné de succès pour cette première édition, AsterX a vocation à devenir un exercice annuel. Dans le cadre de la présidence française de l’Union européenne l’année prochaine, l’objectif sera notamment d’approfondir notre coopération avec nos partenaires européens.

Le but est d’entraîner régulièrement nos unités opérationnelles face à des situations auxquelles nous pourrions devoir faire face plus rapidement qu’on ne le pense. L’espace devient en effet de plus en plus disputé. Du fait de l’accroissement exponentiel du nombre de satellites lancés, et de l’arsenalisation de l’espace exo-atmosphérique, on ne peut pas exclure une escalade entre les grandes puissances.

Mais cet élargissement du spectre des menaces n’est pas circonscrit à l’espace. Dans un contexte de désinhibition et de progression technologique fulgurante de certains de nos compétiteurs, l’AAE doit notamment faire face dans le domaine aérien à des stratégies de déni d’accès (en particulier par l’utilisation de systèmes sol-air multicouches très performants) ainsi qu’à un emploi de plus en plus massif et systématique des drones, y compris à usage malveillant. Je ne saurais non plus passer sous silence l’augmentation de la menace de pénétration en profondeur : des avions à long rayon d’action s’approchent régulièrement de nos côtes. Ce contexte explique mes priorités. La première a trait aux ressources humaines. Parce qu’il n’y aura pas de succès opérationnel possible sans les femmes et les hommes qui servent pour défendre les valeurs qui nous unissent : il nous faut attirer et faire rester nos aviateurs. Nous devons recruter, former, entraîner, fidéliser notre personnel en poursuivant les efforts accomplis ces dernières années. La pyramide d’ancienneté des sous-officiers de l’armée de l’air – qui en sont l’ossature puisqu’ils mettent en œuvre les appareils – révèle deux problématiques. La première est un déficit concernant les sous-officiers de six à douze ans d’ancienneté, ceux qui devraient parrainer les jeunes sortant d’école, en conséquence de la révision générale des politiques publiques. La deuxième concerne les cadres les plus expérimentés qui quittent l’Institution plus vite que nous ne l’espérions, alors que nous en avons besoin pour assurer la structure de commandement de notre armée.

L’équation n’est évidemment pas simple, entre cohérence du modèle RH, l’arrivée de nouveaux équipements, le maintien en condition opérationnelle (MCO) et la préparation opérationnelle. C’est mon rôle de CEMAAE de veiller à cet équilibre, pour que l’armée de l’Air et de l’Espace soit toujours au rendez-vous des engagements opérationnels.

Ma deuxième priorité concerne l’aviation de chasse. Les préoccupations sont de tout autant de qualité que de quantité. De qualité, parce que nous avons besoin d’équipements modernes et performants pour remplir nos missions ; c’est tout l’enjeu de la feuille de route Rafale et de la feuille de route SCAF sur lesquelles nous travaillons en parallèle, puisque c’est un ensemble cohérent. Concernant le format de l’aviation de chasse, entre 2023 et 2025, j’aurai de 10 à 20 Rafale en moins par rapport à ce que prévoyait la LPM. C’est une réalité, que nous devrons gérer au mieux. L’année charnière sera 2023 : convergeront les cessions de Rafale à la Grèce avec les retraits programmés des Mirage 2000 D non rénovés et des Mirage 2000 C. Il faudra par ailleurs former sur Rafale nos équipages issus du Mirage 2000, certainement des pilotes croates ainsi que nos jeunes recrues, alors même que la flotte sera dans une période de creux.

D’où le besoin d’améliorer la disponibilité des appareils pour surmonter cette période : j’en viens ainsi à mon troisième point d’attention, le maintien en condition opérationnelle (MCO) aéronautique, sur l’ensemble des flottes.

Le MCO est essentiel pour assurer l’activité de nos équipages. Cela passe par un niveau d’entraînement suffisant, qui peut parfois souffrir d’arbitrages, bien compréhensibles, en faveur des opérations, mais qui est pourtant gage de sécurité aérienne et de crédibilité en opérations.

L’Armée de l’Air et de l’Espace s’inscrit pleinement dans la dynamique ministérielle de la transformation du MCO, selon deux piliers.

D’abord, la verticalisation des contrats. Je me félicite de la dynamique positive qui se dessine sur le plan qualitatif, induisant une fluidification du dialogue avec l’industrie. Nous observons ainsi les premiers signes d’amélioration de la disponibilité de nos aéronefs (c’est notamment vrai pour la flotte A400M, et pour le RAFALE avec le contrat RAVEL qui commence à porter ses fruits).

Deuxième pilier, le projet de soutien opérationnel « SO 4.0 » de l’AAE, qui vise à améliorer la performance de nos Escadrons de Soutien Technique Aéronautique (ESTA), en modernisant la logistique ainsi que la formation et l’environnement de travail des mécaniciens.

J’indiquais tout à l’heure à madame la présidente que nos jeunes officiers ont réorganisé l’ESTA de la base aérienne d’Orléans, conduisant par exemple à réduire la durée des chantiers d’échange de moteur d’A400M de 14 à 7 jours. Ce gain de temps de 50 % a été rendu possible grâce aux outils et dialogue mis en place avec Airbus. M. le député Claude de Ganay, qui était avec moi hier à la base aérienne d’Orléans a constaté ces évolutions.

Les compétences de nos mécaniciens sont d’autant plus essentielles que ce sont eux qui sont projetés en opérations. Lorsque nous avons déployé en 48 heures les A400M à Kaboul, une équipe de nos mécaniciens est montée à bord – et le taux de disponibilité de l’A400M pendant l’opération Apagan a été de 100 %, ce qui est assez extraordinaire pour être souligné.

J’identifie en outre un point de vigilance, que vous avez déjà évoqué, sur la défense Sol-Air, sur ses différents segments, et notamment la lutte anti-drones.

Ces moyens sont utilisés pour protéger nos bases à vocation nucléaire sur le territoire national, mais aussi nos bases aériennes projetées et nos troupes déployées. Ils participent en outre aux dispositifs particuliers de sûreté aérienne, comme lors du G7 de Biarritz, où l’Armée de l’Air et de l’Espace a déployé les premières briques du dispositif de lutte anti-drones sur la base des systèmes MILAD et BASSALT, qui sont en cours d’expérimentations. Nous gardons évidemment en ligne de mire l’échéance des JO 2024.

J’insiste sur ce volet de lutte anti-drones, qui est un vrai enjeu, dans un contexte de diversification du trafic et d’usage croissant des drones dans l’espace aérien : la menace d’usage malveillant des drones grandit, nous devons nous y préparer. Les pays du Moyen-Orient sont déjà touchés et nous pourrions également être concernés. Je pourrai y revenir dans les questions si vous le souhaitez.

Il me semble naturel que l’armée de l’Air et de l’Espace, étant donné son expertise dans la protection et la gestion de la troisième dimension, et le travail qu’elle accomplit depuis des décennies pour coordonner les mouvements aériens, soit au cœur de la coordination de la lutte anti-drones. Je sais que dans leur rapport d’information consacré à l’action aérospatiale de l’État, deux députés membres de la commission ont évoqué certaines hypothèses à ce sujet. Il est essentiel de faire prendre conscience à tous ceux qui veulent utiliser des drones dans l’espace aérien français qu’une coordination est indispensable ; cette coordination devra être organisée.

Enfin, je ne saurais terminer mon propos sans évoquer les perspectives du spatial de défense, et plus particulièrement le Centre d’Excellence Espace pour l’OTAN, qui sera adossé au Commandement de l’Espace à Toulouse. Parce que l’extension de la coopération aux opérations spatiales est une priorité, ce centre travaillera au profit de l’OTAN et de ses partenaires selon quatre piliers : le développement conceptuel, la doctrine, la formation et le retour d’expérience.

Voilà, en quelques minutes, mes premières impressions après ma prise de fonctions en tant que chef d’état-major de l’Armée de l’Air et de l’Espace. Je poursuis bien entendu ma réflexion avec mon équipe de commandement pour construire une vision stratégique, cohérente avec celle que le chef d’état-major des Armées vous a présentée il y a quelques jours. Mon objectif premier demeure que l’Armée de l’Air et de l’Espace soit toujours au rendez-vous des opérations.

Je vous remercie de votre attention. Je vous propose maintenant de visionner un petit film sur l’AAE et je serai ensuite prêt à échanger avec vous !

(Une courte vidéo mettant en images les missions de l’armée de l’Air et de l’Espace est projetée.)

Général Stéphane Mille, chef d’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace. Je vais désormais répondre à vos questions, madame la présidente, sur l’activité du drone Reaper dans la bande sahélo-saharienne. Le drone Reaper a permis un changement d’échelle dans la capacité de renseignement, dans la compréhension et la connaissance de ce qui se passe sur le terrain, et dans la permanence que nous sommes capables d’assurer au-dessus d’une zone d’engagement. Évidemment, la capacité de tirs sur opportunité ouverte en décembre 2019 a ajouté à l’intérêt de cet instrument. Ceci dit, le Reaper est avant tout un outil de renseignement : c’est sa mission principale. Mais, par sa permanence sur le terrain et grâce à son armement, il peut saisir une opportunité. Le Reaper apparaît ainsi comme complémentaire de l’aviation de chasse, qui offre de son côté une plus grande ubiquité propice aux dimensions du théâtre, une réactivité permettant une action dans des délais courts et une capacité de frappe beaucoup plus significative.

S’agissant de la décision de retrait légèrement anticipé du C-160 Gabriel, elle a été prise pour des raisons budgétaires. En effet, suite à l’export de Rafale à la Grèce, l’armée de l’Air et de l’Espace a dû prendre en partie sous enveloppe les recomplètements des pièces, rééquipements des avions et augmentation du marché Ravel pour augmenter la disponibilité de la flotte restante. Afin de préserver un socle indispensable à l’activité organique Rafale, des économies ont dû être trouvées sur d’autres segments. La décision a été prise de retirer l’ensemble de la flotte C160, ancienne et coûteuse. Le successeur du C-160 Gabriel, le système Archange, est attendu en 2026 au mieux. Mais nous ne serons pas entièrement démunis d’ici là, grâce au système ASTAC installé sur les avions de combat, aux drones et aux satellites CERES qui compensent partiellement le retrait du C-160 Gabriel en capacités de renseignement.

La formation liée à ces contrats d’exportation a déjà eu lieu pour les Grecs, il restera à former les Croates, probablement à l’horizon 2023. 2023 verra la convergence de plusieurs facteurs : moins de machines, des effectifs de pilotes croates à former et aussi la reconversion des équipages de Mirage 2000 D et de Mirage 2000 C qui devront être formés au pilotage de Rafale. Il pourrait en résulter un retard de quelques mois dans la formation des pilotes par rapport au schéma idéal. Ce n’est pas une catastrophe : d’autres aléas peuvent aussi provoquer des retards de quelques mois dans la très longue formation d’un pilote de chasse. Enfin, la modernisation de notre outil de formation raccourcit les délais de formation des pilotes, si bien que l’on perd d’un côté, mais on gagne de l’autre. Il n’en reste pas moins que la gestion des flux de formation, notamment sur Rafale, demandera de la vigilance en 2023.

Mme Patricia Mirallès. Je vous remercie pour cet exposé et aussi de nous avoir permis de participer à la mission Poker. J’ai mesuré à cette occasion les facultés d’adaptation de l’équipage quand un problème survient. Il est important pour nous de vivre ces moments pour mieux défendre votre budget. Ainsi, il est prévu dans le projet de loi de finances pour 2022 que les crédits dévolus à la préparation des forces aériennes augmenteront de 149 millions d’euros. Cela suffira-t-il pour assurer la mise à disposition des aéronefs ? Cette hausse ne correspond-elle pas à la couverture de l’explosion des coûts de maintien plutôt qu’à l’amélioration du taux de disponibilité des appareils ? D’autre part, les livraisons d’A400M permettront-elles de réduire le recours à l’affrètement d’avions privés ?

M. Charles de la Verpillière. J’ai également été impressionné par l’exercice Poker de la composante aérienne de la dissuasion nucléaire au départ d’Istres auquel nous avons assisté dans la nuit du 21 au 22 septembre dernier.

Je n’ai pas été entièrement convaincu par les solutions que vous avez esquissées pour compenser le décalage par rapport à l’objectif établi dans la LPM dû aux ventes de Rafale à la Grèce et à la Croatie. Notre groupe ne remet pas en cause le bien-fondé des ventes d’aéronefs d’occasion destinées à satisfaire les besoins de pays amis proches, exposés à certaines menaces de grandes puissances en devenir, mais nous nous interrogeons sur leurs effets pour nos armées. De dix à vingt Rafale manqueront pendant la période 2023-2025 et les solutions envisagées ne nous semblent pas à la mesure d’une montée des périls plus rapide qu’on ne le pensait. Il faut aller bien au-delà, et pour cela une décision politique est nécessaire.

M. Fabien Lainé. Mon général, je salue votre prise de fonction et vous souhaite plein succès dans l’accomplissement de vos nombreuses missions. Alors que la crise afghane a confirmé la nécessité d'accroître nos efforts de coordination capacitaire, technologique et humaine au sein de l’Union européenne, il semble primordial d’œuvrer pour la garantie de l’autonomie stratégique de la France. Le PLF 2022 renforce les crédits alloués au domaine spatial, prévoyant notamment 646 millions d’euros pour soutenir la stratégie projetée pour l’espace. Le Président de la République s’est dit déterminé à investir dans le domaine spatial. Évoquant SpaceX, il a rappelé que l’émergence de nouveaux acteurs du domaine spatial a été permise grâce à l’investissement massif des agences d’État et d’argent fédéral, conjugué à des innovations technologiques bouleversant les pratiques industrielles. Cela entraîne des conséquences sur le comportement des différentes puissances, et l’on comprend bien la nécessité d’avoir créé le commandement de l’espace. Partagez-vous le constat établi par le président Emmanuel Macron que l’État doit travailler avec les nouveaux acteurs spatiaux ? Considérez-vous que les crédits alloués au domaine spatial dans le PLF 2022 permettent de s’engager dans cette voie ?

M. Jean-Charles Larsonneur. Je partage les préoccupations exprimées au sujet du remplacement des avions de chasse Rafale cédés. Les contrats passés avec la Grèce et la Croatie sont de bonnes nouvelles, mais leurs conséquences appellent une grande vigilance. À ce sujet, le projet de budget pour 2022 prévoit 267 millions d’euros en crédits de paiement pour le développement du Rafale au standard F4-1 ; quel calendrier de mise en œuvre est prévu à ce sujet ?

Sur un autre plan, quel est votre rôle au sein du comité des chefs d’état-major, le COCEM ? Chaque chef d’armée s’y rend-il pour décrire ce que serait son arme idéale ou ce comité sert-il à définir une vision globale des armées ?

M. André Chassaigne. Je vous remercie, général, pour votre exposé introductif. J’ai toujours grand plaisir à entendre les nouveaux chefs d’état-major, tenus dans leurs propos à un équilibre aussi précaire qu’un funambule au-dessus des chutes du Niagara, et je constate que vous vous en sortez très bien… Nos industries aéronautiques et spatiales sont souvent duales, œuvrant dans le domaine civil et de défense. Cela a une incidence sur la souveraineté du pays et sur son indépendance en matière de défense nationale. Prenons ArianeGroup, qui étudie et fabrique les lanceurs civils mais aussi le missile M51 de la force de dissuasion nucléaire. Le lanceur Ariane 5 avait été conçu dans une perspective de vols habités avec la navette Hermès, et donc avec une qualité opérationnelle irréprochable pour éviter de perdre des vies. Cette logique est cohérente avec la doctrine du M51, équipé de têtes nucléaires et embarqué à bord de sous-marins qui ne peuvent davantage se permettre la moindre erreur.

La règle de qualité en vue de la sécurité n’a jamais été transgressée. Or, sous prétexte de baisses de coûts et de compétitivité, ArianeGroup a allégé ses contrôles. Ces choix évidemment dictés par des ratios de rentabilité peuvent entraîner des répercussions importantes sur le lanceur de la dissuasion nucléaire. Il y a une dizaine d’années déjà, une crise sans précédent avait été évitée de justesse après que l’on eut décelé des erreurs majeures commises par un sous-traitant sur les ensembles du M51, avec des conséquences financières non négligeables. La direction générale de l’armement (DGA) a récemment fait un audit de la fabrication du M51. Pour 2020, sa fiche de performance qualité est de 11,7 en moyenne, dont 5,6 pour la qualité produit ; cette note parle d’elle-même. Selon la direction d’ArianeGroup, la moyenne établie sur les années 2017 à 2020 est de 20 000 non-conformités. Or, à l’opposé de votre modèle de ressources humaines, le groupe a engagé il y a quelques jours un plan social prévoyant la suppression de 600 postes, les premiers départs devant avoir lieu dès le mois de décembre 2021. Comment se passer en si peu de temps des compétences et des savoir-faire de ceux qui partent ? Quel est le niveau de contrôle de l’État, de la DGA et de l’armée de l’Air et de l’Espace sur la qualité des engins fabriqués par nos industries de la défense française et européenne ?

Enfin, vous avez évoqué le MCO, mais encore faut-il donner les moyens suffisants au Service industriel de l’aéronautique (SIAé) – ou considérer que l’on va tout transférer au secteur privé. Comment ne pas déplorer la fermeture de l’atelier industriel de l’aéronautique de Toul en 2024-2025 avec l’arrêt du Puma ? On aurait pu imaginer d’autres solutions industrielles pour le maintenir. De même, à l’atelier de Clermont-Ferrand, la construction d’un bâtiment pour les hélicoptères est toujours en attente ; dans ces conditions, comment garantir le plan de charge du Tigre ? Encore faut-il avoir les locaux, recruter dans toutes les catégories, et aussi garantir l’avancement des salariés et des augmentations de salaires afin de rendre le SIAé attractif.

M. Jean-Jacques Ferrara, rapporteur pour avis sur la préparation et l’emploi des forces : Air. Plusieurs d’entre nous sommes préoccupés par les conséquences pour l’armée française, de l’exportation d’avions de chasse Rafale. Vous avez l’objectif de parvenir au standard F5 à l’horizon 2035. Pourriez-vous nous en dire davantage sur ce que vous attendez de ce standard face à des puissances qui entendent limiter nos capacités de déplacement dans l’espace ?

En présentant en juillet 2019 le rapport d’information sur l’action aérospatiale de l’État, Christophe Lejeune et moi-même avions conclu à la nécessaire amélioration de la coordination des moyens aériens par le renforcement du commandement de la défense aérienne et des opérations aériennes (CDAOA). Les choses sont-elles plus satisfaisantes maintenant, notamment dans le cadre de la lutte anti-drones ? Je n’en suis pas sûr.

Général Stéphane Mille, chef d’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace. Pour répondre à de nouvelles questions sur le Rafale, le standard F5 n’est pas encore défini. Nous cherchons à renforcer la connectivité et l’échange de données et nous travaillons à des sujets relatifs à la dissuasion. Les Rafale au standard F4-1 seront livrés à partir de 2022. Ce standard alliera de nouvelles fonctionnalités de connectivité, de survivabilité et de disponibilité. Nous attendons des gains capacitaires dès 2023-2026 et l’ensemble des fonctionnalités prévues avec ce standard en 2027-2030.

L’augmentation de 149 millions d’euros dévolue à la préparation des forces aériennes suffira-t-elle ? Je l’espère. Nous l’avons calculée pour passer l’étape difficile à venir.

Bien entendu, plus nombreux sont les A400M dont nous disposons et plus les affrètements à l’étranger diminuent, mais nous aurons toujours besoin d’appareils supérieurs en volume à l’A400M. La montée en puissance de l’A400M est réelle - il y a un an, mon prédécesseur, le général Lavigne, indiquait que quatre ou cinq A400M étaient disponibles chaque jour ; hier, dix étaient sur le parking de la base aérienne d’Orléans. Pour autant les affrètements ne seront pas supprimés, mais réduits.

Je laisserai le directeur général de l’armement, que vous recevez cet après-midi, répondre à vos questions portant sur la qualité des fabrications des entreprises duales.

En matière d’espace, un important travail de planification des capacités et services dont nous avons besoin est en cours. Nous devons atteindre la capacité de résilience nécessaire pour mener des opérations spatiales militaires ; des discussions ont lieu à ce sujet entre le Centre national d’études spatiales (CNES) et les armées. La menace d’emploi militaire dans l’espace étant désormais réelle, il faut modifier la réglementation établie depuis des années. Il est indispensable de disposer de capacités duales, mais les deux volets doivent désormais être gérés de manière à ce que l’état-major des armées puisse intervenir dans l’espace si une menace se précise. C’est tout l’objectif de l’exercice AsterX, qui vise à anticiper les réponses à des scénarios probables à court et moyen termes.

M. Stéphane Vojetta. AsterX a été, nous avez-vous dit, le premier exercice militaire spatial européen. Dans quel cadre s’est-il déroulé et avec quels autres États ? De quel ordre fut la coopération entre eux ? Quelles sont les conclusions de cet exercice en termes de forces et de faiblesses, s’agissant en particulier du partage de données avec nos partenaires ?

M. Jacques Marilossian. Dans un récent article de la revue Défense et sécurité internationale, le commissaire en chef Rémy Bonte expose qu’opérations aériennes et écologie sont compatibles. Les programmes d’armement comprennent souvent une dimension environnementale et l’armée de l’Air et de l’Espace a des leviers pour réduire son empreinte carbone : la sensibilité de tous les pilotes à l’enjeu écologique, la nécessité d’une résilience écologique, l’emploi de carburant écologique. M. Bonte souligne que pour bâtir la résilience écologique, des crédits spécifiques seraient nécessaires dans des domaines capacitaires mais aussi pour financer des initiatives locales destinées à améliorer la sobriété des bases aériennes. Le PLF 2022 et la LPM permettent-elles à l’armée de l’Air et de l’Espace de répondre au défi de la transition écologique ?

M. Christophe Blanchet. L’opération Apagan s’est heureusement déroulée mais personne n’avait prévu la prise de Kaboul par les Talibans et si l’opération a réussi, c’est aussi parce que les Talibans ne s’y sont pas opposés. En bref, rien ne s’est passé comme prévu. Pour l’exercice AsterX, vous avez travaillé dix-huit scénarios, mais pourquoi ceux-là ? S’agissait-il de scénarios uniquement militaires ? Vous êtes-vous inspirés de la Red Team ? Vous avez envisagé le brouillage de satellites mais avez-vous aussi imaginé une double attaque cyber et brouillage de satellite ? Quels scénarios n’avez-vous pas pensés ?

Mme Françoise Ballet-Blu. Quels moyens de gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences sont employés pour pallier les manques d’effectifs qui risquent de gravement vous pénaliser ?

Mme Sereine Mauborgne. Je pousserai plus avant la question de notre collègue Larsonneur en vous demandant de nous communiquer le compte rendu de la réunion du COCEM relative au repli de Barkhane, et de nous dire la vision de l’armée de l’Air et de l’Espace à ce sujet. La question des hélicoptères de transport lourd est d’une particulière importance. Mon collègue Jean-Jacques Ferrara et moi-même avons malheureusement assisté au départ des Merlin de la base de Gao en novembre 2020. La lueur d’espoir est que ces engins sortis de la mission Minusma pourraient revenir au profit de nos forces spéciales dans le contexte du redéploiement à venir ; tout ce qui nous permettra d’être réactifs dans les interventions, notamment les hélicoptères de transport lourd, sera essentiel. D’autre part, participez-vous aux discussions avec le chef d’état-major espagnol sur l’élaboration du standard 3 du Tigre ?

Mme Patricia Mirallès. Rapporteure, avec mon collègue Jean-Louis Thiériot, d’une mission d’information consacrée à la préparation à la haute intensité, je m’interroge sur la cohérence de la politique d’achat des munitions. Ainsi, il a d’abord été question d’acquérir 200 missiles Meteor, puis 100, et 160 finalement. En procédant de la sorte, n’en vient-on pas à un prix unitaire plus élevé que si l’on en était resté aux 200 initialement prévus ?

Général Stéphane Mille, chef d’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace. Les enjeux écologiques sont un sujet de préoccupation, pour les aviateurs comme pour tous les militaires qui sont également des citoyens. De multiples initiatives sont prises pour participer à l’effort collectif, dont l’emploi, pour partie, de biocarburant. Beaucoup de bases aériennes ont des espaces Natura 2000 dont les commandants assurent la protection. Sur la base aérienne de Cazaux, où se trouve l’école des pompiers de l’armée de l’air, l’aire d’entraînement aux incendies n’emploie plus de fuel mais du gaz, et les eaux employées sont réutilisées. La prise en compte de la dimension écologique fait évoluer les installations. Lorsque je dirigeais le CPCO, le chef de la base aérienne projetée H5 m’entretenait régulièrement de son concept d’autonomie électrique grâce à des capteurs solaires. Ces réflexions sur les enjeux écologiques irriguent désormais l’armée de l’Air et de l’Espace.

Concernant AsterX 2021, l’Allemagne et les États-Unis ont participé aux cotés de la France. Dans le cadre de la présidence française du Conseil de l’Union européenne en 2022, l’objectif est une ouverture plus large aux pays européens, dont certains se disent déjà intéressés ; l’ouverture du centre d’excellence espace de l’OTAN accélérera d’ailleurs la dynamique européenne.

Les dix-huit scénarios de l’exercice AsterX ont été élaborés par le CDE avec le CNES et la direction du renseignement militaire. Alors que le centre d’opérations n’est pas encore inauguré, ce premier exercice AsterX devait permettre de définir comment intégrer le multi-champs et les multi-capteurs pour défendre plus efficacement notre espace exo-atmosphérique. Nous devons avancer progressivement, et les questions spatiales vont beaucoup nous occuper à l’avenir.

S’agissant de l’adaptation du dispositif Barkhane, nos partenaires – la Minusma, les Européens et les forces armées maliennes – réclament de la réassurance ; au Sahel, la réassurance passe par un dispositif 3D solide. Nos partenaires demanderont donc à ce que la France maintienne une capacité d’intervention, si bien que notre dispositif aérien ne sera modifié que marginalement et continuera de s’appuyer sur la base aérienne projetée de Niamey.

M. Jacques Marilossian. Étant donné l’activité chinoise en Mer de Chine, l’armée française envisage-t-elle d’utiliser là-bas des avions amphibies ?

Général Stéphane Mille, chef d’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace. Il n’existe pas de projets de ce type.

Toujours au sujet de Barkhane, l’augmentation des activités a été rendue possible notamment par les hélicoptères de transport lourd. Les Chinook britanniques étant arrivés avant même le départ des Merlin danois, il n’y a pas eu de rupture. Des transformations de mission se font naturellement en fonction des équipements mis à disposition du commandant de la force. La capacité n’a pas disparu du théâtre. Tout l’enjeu des discussions que j’avais avec mes homologues européens dans mes précédentes fonctions était de mesurer s’ils pouvaient participer à l’opération Barkhane ou à la Task Force Takuba en mettant à disposition des hélicoptères de transport lourd. Comme nous n’en avons pas, nous essayons d’attirer nos partenaires européens sur cette capacité particulière, indispensable au Sahel, où des volumes importants doivent être transportés sur de longues distances.

Sur le plan des ressources humaines, les recrutements ont beaucoup augmenté en 2021, ce qui génère des difficultés de formation que nous cherchons à combler par de nouveaux outils comme la simulation.

Il nous faut aussi tenir compte dans notre recrutement de tous les nouveaux espaces de conflictualité. Nous devons fournir des nouveaux spécialistes du cyber, du spatial. Cela passe évidemment par une gestion active des compétences et des parcours de formation efficaces. Nous avons aussi créé une spécialité du C2 (commandement et conduite des opérations) dans l’armée de l’Air et de l’Espace, car maîtriser le commandement d’une opération complexe est devenu un métier en soi.

Mme la présidente Françoise Dumas. Je vous remercie, général, pour cette belle présentation. L’armée de l’Air et de l’Espace fait face, vous en avez donné de nouvelles preuves. S’agissant du volume de l’aviation de combat d’ici 2025, nous avons mesuré l’ensemble de vos contraintes. Sur la défense sol-air et la lutte anti-drones, il reste encore à faire. Enfin, la montée en puissance du commandement de l’espace passera certainement par l’optimisation des relations avec le CNES. Nous saluons l’ensemble des équipes qui travaillent à vos côtés et l’ensemble des aviateurs, mécaniciens et personnels qui, récemment encore, ont démontré leur engagement et nous apportent un service de très grande qualité.

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La séance est levée à dix heures cinquante-cinq.

 

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Membres présents ou excusés

 

 Présents. - Mme Françoise Ballet-Blu, M. Christophe Blanchet, M. Jean-Jacques Bridey, M. André Chassaigne, Mme Françoise Dumas, M. Jean-Jacques Ferrara, M. Fabien Lainé, M. Jean-Charles Larsonneur, M. Jacques Marilossian, Mme Sereine Mauborgne, Mme Patricia Mirallès, M. Charles de la Verpillière, M. Stéphane Vojetta

 Excusés. - M. Florian Bachelier, M. Xavier Batut, M. Olivier Becht, M. Bernard Bouley, M. Christophe Castaner, M. Jean-Pierre Cubertafon, M. Olivier Faure, M. Yannick Favennec-Bécot, M. Richard Ferrand, M. Claude de Ganay, Mme Séverine Gipson, M. Stanislas Guerini, M. David Habib, Mme Manuéla Kéclard-Mondésir, Mme Anissa Khedher, M. Jean-Christophe Lagarde, Mme Monica Michel-Brassart, M. Patrick Mignola, Mme Florence Morlighem, Mme Nathalie Serre, M. Joachim Son-Forget, M. Aurélien Taché, Mme Laurence Trastour-Isnart, M. Stéphane Trompille