Compte rendu

Commission
des affaires étrangères

 

         Examen, ouvert à la presse, et vote sur le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord relatif à la restructuration de la plate-forme douanière de Saint-Louis - Bâle sur l’autoroute A35, en France entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse (n° 175) (Mme Brigitte Klinkert, rapporteure) ;              2

         Nomination de représentants au Conseil d’administration de Campus France. 9

 


Mercredi
14 septembre 2022

Séance de 11 h 15

Compte rendu n° 11

session ordinaire de 2021-2022

Présidence
de M. Jean-Louis Bourlanges,
Président


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La commission procède à l’examen, ouvert à la presse, et au vote sur le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord relatif à la restructuration de la plate-forme douanière de Saint-Louis - Bâle sur l’autoroute A35, en France entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse (n° 175).

Présidence de M. Jean-Louis Bourlanges, président.

La séance est ouverte à 11h 20

M. le président Jean-Louis Bourlanges. L’ordre du jour appelle l’examen du projet de loi autorisant l’approbation de l’accord relatif à la restructuration de la plateforme douanière de Saint-Louis - Bâle sur l’autoroute A35, en France, entre le gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse.

À titre liminaire, je soulignerai que la France et la Suisse partagent une frontière longue de 570 kilomètres et que la ville de Bâle est la seule porte d’entrée, au Nord de la Suisse, pour le trafic de marchandises, lesquelles proviennent principalement des grands ports de la Manche et de la mer du Nord.

La plateforme douanière de Saint-Louis - Bâle, située à l’Est de l’autoroute A35, dans le département du Haut-Rhin, est dédiée au trafic de poids-lourds et permet d’accomplir les formalités douanières exigées pour le trafic routier de marchandises. L’infrastructure actuelle, datant des années 1990, n’est plus en mesure de faire face aux flux croissants de poids-lourds. Sa restructuration est impérative pour garantir la fluidité et la sécurité du trafic.

Signé à Berne le 31 mars 2021, l’accord dont il est demandé à notre assemblée d’autoriser l’approbation définit le périmètre et le montant des travaux décidés à cet effet, cofinancés à parité entre la France et la Suisse. Il précise en outre les travaux complémentaires réalisés et financés spécifiquement par chacune des parties.

Mme Brigitte Klinkert, rapporteure. En vertu de l’article 53 de la Constitution, qui confère au Parlement le pouvoir d’autoriser la ratification de certains accords internationaux, notre commission examine régulièrement des accords d’importance majeure : ce fut le cas, il y a quelques années, de l’accord de libre-échange avec le Canada, dit CETA, et, il y a quelques mois, de celui autorisant l’élargissement de l’OTAN à la Suède et à la Finlande.

L’accord dont nous sommes saisis aujourd’hui ne présente pas la même ampleur. S’il est incontestablement utile, sa portée est beaucoup plus restreinte et son contenu technique. Son objet est de fixer le périmètre et le montant des travaux nécessaires à la restructuration de la plateforme douanière de Saint-Louis - Bâle, à la frontière avec la Suisse.

Cet accord est néanmoins intéressant si on le situe dans le cadre général des relations entre les deux pays. Comme vous l’avez souligné, monsieur le président, nous partageons une frontière de 570 kilomètres avec la Suisse et les échanges humains et économiques y sont incessants. Ce sont 190 000 ressortissants français qui, chaque jour, traversent la frontière pour aller travailler en Suisse. S’est mise en place une coopération transfrontalière qui concerne plusieurs grands domaines, dont la santé, l’environnement et les transports. La relation commerciale entre nos deux pays est en outre particulièrement intense : les échanges avec la Suisse s’élevaient l’année dernière à 32 milliards d’euros, ce qui en fait notre neuvième partenaire commercial. Les trois régions françaises frontalières, le Grand Est, la Bourgogne-Franche-Comté et l’Auvergne-Rhône-Alpes, concentrent la moitié de ce commerce bilatéral. Enfin, fait suffisamment rare pour être mentionné, la France dégage un excédent commercial structurel avec la Suisse.

La Suisse est membre de l’espace Schengen mais pas de l’union douanière entre les États membres de l’Union européenne. En conséquence, les échanges de marchandises entre la France et la Suisse font l’objet d’un contrôle douanier.

Comme deux-tiers des échanges de marchandises se font par la voie routière, la frontière est soumise à un intense trafic de poids-lourds. Parmi les cinq principaux points d’accès qui connectent le territoire suisse à notre réseau routier national, la plateforme douanière de Saint-Louis - Bâle est l’unique point d’entrée au Nord de la Suisse pour le trafic de marchandises. Elle est empruntée chaque jour par environ 3 000 poids-lourds chargés de marchandises en provenance des grands ports de la Manche et de la mer du Nord, dont Rotterdam, Anvers et Le Havre. Son importance est donc grande.

Comme le souligne l’exposé des motifs, les difficultés proviennent du fait que l’infrastructure actuelle n’est plus en mesure de faire face aux flux croissants de poids-lourds : conçue pour 400 véhicules par jour, la plateforme en reçoit aujourd’hui 3 000 en moyenne. L’engorgement qui en résulte se traduit par de longues files d’attente sur l’autoroute A35, ce qui suscite trois types de problèmes : un transit d’une durée particulièrement longue pour les camions ; une situation dangereuse sur l’autoroute, comme le montre l’accident mortel qui a eu lieu en 2017 ; une pollution de l’air liée aux émanations des véhicules à l’arrêt.

Un projet de réaménagement de la plateforme a donc vu le jour afin – selon les termes du préambule de l’accord – d’améliorer tout à la fois la sécurité des usagers de l’A35, la fluidité du trafic et, indirectement, la qualité de l’air.

Au total, selon les estimations dont dispose l’administration, ce chantier permettra une augmentation de 50 % des capacités de stationnement et une réduction du même ordre du temps d’attente.

Cela sera-t-il suffisant, vu que le trafic de poids-lourds a été multiplié par sept sur la plateforme au cours des trente dernières années et qu’il pourrait croître davantage ? On peut en douter et craindre qu’il faille, dans un avenir proche, envisager de nouveaux travaux. Mais, comme le disent les techniciens, « on est allé au maximum de ce qu’on pouvait faire au niveau des emprises dans une zone urbanisée ».

Pourquoi a-t-il été nécessaire de conclure un accord avec la Suisse ? Parce que cette plateforme permet de réaliser des contrôles douaniers aussi bien suisses que français.

L’accord a deux objets. Le premier est de définir le périmètre des travaux nécessaires et la responsabilité qui revient à chaque partie. Comme la plateforme est située sur le territoire français, l’accord prévoit que l’essentiel des travaux – le rétablissement des voiries, la réalisation du parking, les dispositifs de signalisation et d’éclairage – seront réalisés par la partie française. Le chantier est déjà bien engagé et son aboutissement est prévu au début de 2023. Le deuxième objet est de fixer les modalités de financement. La France et la Suisse se sont entendues pour prendre en charge à parité le coût des travaux, qui est d’environ 7 millions d’euros, aucun dérapage budgétaire n’étant à déplorer à ce jour. Toutefois, la Suisse ne versera sa contribution à la France qu’après la ratification de la convention. C’est pourquoi j’appelle notre commission à voter en faveur de celle-ci.

Pour conclure, je souhaite partager avec vous une réflexion que m’a inspirée l’examen de cet accord. Il aura fallu sept ans de négociations pour le conclure. Avant qu’il n’entre formellement en vigueur, il faut encore que le Parlement en autorise la ratification. La Suisse, qui dispose d’une procédure simplifiée pour approuver ce type d’accords, à la portée essentiellement technique, a pu le ratifier moins d’un mois après sa signature. N’aurions-nous pas intérêt à nous doter d’une procédure similaire ?

Mme Olga Givernet (RE). Le présent accord peut paraître technique et limité à un territoire, mais il témoigne d’une réalité que nous vivons, nous, frontaliers, au quotidien – je peux en témoigner, en tant que députée de l’Ain. Vous l’avez souligné, madame la rapporteure, la coopération franco-suisse intervient dans plusieurs domaines, dont la santé et les transports ; c’est ce qui fait de cet espace un véritable bassin de vie. Il importe donc que les travaux progressent aussi vite que possible, même si la continuité urbaine entre Bâle et Mulhouse peut susciter des difficultés. L’accord doit être ratifié dans des délais raisonnables afin que les crédits correspondants soient débloqués, la Suisse participant au financement des travaux aussi du côté français.

Je rappelle que la Suisse a quitté la table des négociations avec l’Union européenne. Il serait bon d’y remédier. La France gagnerait à ce que ces négociations aboutissent. Il reste en effet d’autres questions importantes à régler, comme le télétravail des frontaliers ou les accords sanitaires transfrontaliers. La ratification du présent accord devrait être l’occasion de souligner la diversité des sujets liés à la coopération entre nos deux pays.

M. Joris Hébrard (RN). Si ce projet de loi est de bon sens et purement technique – notre groupe votera en sa faveur –, il n’en soulève pas moins quelques questions. Ainsi, l’accord définit le périmètre, le montant et la clé de répartition des travaux, mais il n’en précise pas l’horizon, ni le terme. Un planning, même approximatif, n’aurait pas nui à la bonne information du législateur.

On peut en outre se demander, au vu de l’historique du dossier, qui remonte à la fin des années 2000, si la situation de référence, donc le calibrage de la restructuration, est adaptée à l’activité routière actuelle et à celle des années à venir. J’espère que c’est le cas mais une confirmation serait bienvenue, d’autant que l’étude d’impact indique que l’infrastructure actuelle était déjà obsolète quinze ans après sa réalisation.

Cela m’amène à faire une digression sur la lenteur des pouvoirs publics quand il s’agit de réaliser des travaux de ce type – une réalité que les élus locaux connaissent bien. Il serait temps que, dans un souci d’économie et d’efficacité et en vue d’améliorer les conditions de vie de nos concitoyens, l’État simplifie les procédures de réalisation des infrastructures routières. Aujourd’hui, le temps que tout soit terminé du point de vue réglementaire, le monde a changé !

Nous pourrions en profiter aussi pour demander aux Suisses des conseils en matière de protectionnisme économique et territorial… Ils ont l’air de s’y connaître !

Mme Élise Leboucher (LFI-NUPES). Je souhaite appeler votre attention sur l’objectif affiché d’améliorer la qualité de l’air en fluidifiant le trafic à la plateforme douanière. Bien que ce soit plus que souhaitable dans le contexte d’urgence climatique, il ne s’agit que d’un pansement vu les risques que font courir les émissions de CO2 sur l’environnement et la santé. En 2019, le transport, en particulier routier, était le secteur d’activité le plus polluant, représentant 31 % des émissions de gaz à effet de serre en France. Celles-ci constituent un réel danger pour l’ensemble de la population, puisque, selon une étude de Santé publique France, 48 000 décès prématurés par an sont imputables à la pollution de l’air extérieur. Il est donc nécessaire de trouver d’autres solutions, comme le développement du fret ferroviaire, que recommande l’Agence européenne pour l’environnement. Des mesures sont-elles prévues afin de mettre le projet de restructuration de la plateforme en cohérence avec les impératifs de l’action climatique ?

En outre, dans leur souci d’optimisation de la plateforme douanière, le projet de loi et l’accord négligent un élément central : les personnels douaniers, dont les compétences et l’action sont essentielles au bon fonctionnement du dispositif. Tous les travaux de restructuration de la plateforme ne sauraient contrecarrer les effets destructeurs des politiques menées à l’encontre des douanes ces dernières années. Le secteur est soumis à d’incessantes réformes depuis 2002, notamment le transfert des missions fiscales de la direction générale des douanes et droits indirects vers d’autres entités du ministère de l’économie ; on se prive ainsi de l’expertise de personnels spécialisés. Cela se traduit aussi et surtout par des suppressions d’emploi massives : selon les syndicats, en l’espace de vingt ans, près de 6 000 postes ont disparu.

La plateforme de Saint-Louis - Bâle n’est pas épargnée. Elle est en sous-effectif permanent depuis des années. Les personnels dénoncent des conditions de travail et d’accueil des usagers déplorables, ainsi qu’un manque criant d’équipements et de ressources lié à un défaut de financement par l’État. Cela empêche les personnels de mener à bien leurs missions, notamment le ciblage et le contrôle des marchandises, alors même que les enjeux de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales en Suisse restent importants. La restructuration de la plateforme ne pourra se faire en dépit et aux dépens des personnels douaniers. Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre afin de leur garantir des conditions de travail décentes ?

Eu égard aux effets positifs que la restructuration de la plateforme aura sur la sécurité routière, la fluidité du trafic et la qualité de l’air, le groupe LFI-NUPES votera en faveur de la ratification de l’accord mais il appelle à une vigilance renforcée, afin d’agir en profondeur sur les problématiques environnementales, fiscales et sociales que je viens de mentionner.

Mme Laurence Vichnievsky (DEM). Nous pouvons nous féliciter que la France et la Suisse aient trouvé un accord équilibré, dont l’objet principal est de fluidifier le transport de marchandises entre des territoires de plus en plus connectés. La plateforme douanière de Saint-Louis - Bâle, principale porte d’entrée en Suisse de marchandises en provenance des grands ports d’Europe du Nord, a vu le nombre de passages de camions augmenter dans des proportions comparables à celles de l’accroissement du commerce mondial ; les équipements de 1990 ne convenaient donc plus. Au-delà de la nécessaire amélioration des conditions de circulation, c’est la qualité de vie des riverains qui est en jeu.

L’autoroute A35, l’un des axes principaux du commerce le long du Rhin, cause des désagréments aussi bien en matière de sécurité que de pollution. Ces nuisances sont d’autant plus regrettables qu’elles sont dues en partie au report de trafic, du fait de l’existence d’une écotaxe sur l’autoroute allemande. L’instauration d’une taxe poids-lourds, à partir de 2024, par la collectivité européenne d’Alsace aura des conséquences sur lesquelles on peut aussi s’interroger. Il serait intéressant que la France et la Suisse travaillent sur le report d’une partie des flux de marchandises vers le rail, un domaine dans lequel nos voisins helvètes sont très en avance.

Notre groupe soutient pleinement ce projet d’accord, qui améliorera les conditions de vie de nos concitoyens résidant à la frontière suisse.

M. Alain David (SOC). Je vous remercie, madame la rapporteure, pour cet exposé limpide qui éclaire nos réflexions sur un sujet très ciblé et technique. Cet accord contribuera à améliorer la fluidité et la sécurité du trafic, ainsi que la qualité de l’air, sur l’A35. Il acte également la juste participation financière de notre voisin, ce dont on peut se féliciter. Notre groupe approuve ce projet.

Ce type de textes offre l’occasion d’aborder des questions plus larges concernant les relations bilatérales. Quant aux délais de ratification, j’entends vos arguments. Néanmoins, nous tenons au processus français, bien que plus long et laborieux, car il garantit la souveraineté du Parlement et le rôle de notre commission.

Mme Stéphanie Kochert (HOR). Je tiens à remercier Brigitte Klinkert pour le rapport très instructif qu’elle a rédigé sur un texte technique et néanmoins essentiel pour les usagers et les riverains de cette plateforme. L’accord franco-suisse renforce la coopération dans les transports et en matière douanière ; il garantit aussi le versement de la participation suisse aux travaux, qui représentent environ 7 millions d’euros. La maîtrise d’ouvrage est assurée par la collectivité européenne d’Alsace, laquelle travaille à l’instauration d’une écotaxe qui devrait rééquilibrer le trafic dans la vallée rhénane.

Sur ce site majeur de jonction entre réseaux français et suisses, les travaux devraient réduire de moitié le temps d’attente, améliorer la qualité de l’air et renforcer la sécurité des usagers – rappelons que 200 000 Français vivent en Suisse et que 190 000 autres sont des travailleurs transfrontaliers. Cette plateforme douanière, qui accueille les flux de marchandises provenant des ports belges et néerlandais, est le seul point reliant notre réseau routier au nord de la Suisse. Comme à Lauterbourg, Scheibenhard ou Beinheim, au Nord de l’Alsace, les infrastructures à l’entrée de notre pays sont aussi l’image de la France.

Je partage le questionnement de la rapporteure sur la procédure et le périmètre des accords nécessitant une autorisation parlementaire. Notre groupe soutiendra pourtant ce texte, aboutissement d’un processus engagé depuis la réalisation des premières études en 2008.

M. Bertrand Pancher (LIOT). Notre groupe est évidemment favorable à la coopération transfrontalière entre la France et la Suisse et à cet accord, qui devrait permettre de fluidifier le trafic et d’améliorer ainsi la sécurité routière et la qualité de l’air.

Je rappelle que les routes alsaciennes sont surchargées depuis l’établissement outre-Rhin, en 2005, d’une taxe sur les poids-lourds. Je voudrais insister sur l’erreur, je dirais même la grave faute politique, qui a conduit une ancienne majorité à revenir sur l’instauration de cette taxe en France, une des grandes avancées du Grenelle de l’environnement. Ce simple coup de tête de Ségolène Royal s’est conclu par un scandale financier puisque la France s’est retrouvée avec une ardoise de 1 milliard d’euros ! Quelle folie !

Le président de la collectivité européenne d’Alsace a annoncé en mars la mise en place d’une taxe poids-lourds pour rééquilibrer les flux Nord-Sud entre l’Allemagne et l’Alsace. Nous nous en réjouissons, estimant qu’il s’agit là d’un outil autonome fiscal et de préservation environnementale qui est indispensable pour donner aux exécutifs locaux une base différenciée s’ils le souhaitent. Nous espérons que cet impôt, vert et juste, sera à nouveau généralisé dans notre pays.

M. Bruno Fuchs. Les Allemands, eux, ont réussi à régler la question depuis longtemps et ils n’ont pas ces problèmes d’embouteillages ; je considère, comme mes collègues, que les lenteurs administratives et les délais imposés par nos procédures de décision entravent la vie quotidienne de nos concitoyens. Car il ne s’agit pas seulement des marchandises mais aussi de la liberté de déplacement des Français qui se rendent en Suisse – 30 000 y travaillent. Ils doivent parfois patienter une heure sur l’autoroute et leur sécurité est en jeu puisque certains empruntent la bande d’arrêt d’urgence. Nous devons trancher au plus vite et approuver la ratification de cet accord, même si – le processus est quelque peu étrange – les travaux ont déjà commencé.

Par ailleurs, cette opération n’aura d’effet que si elle s’accompagne d’autres aménagements. Les liaisons ferroviaires avec l’aéroport de Bâle-Mulhouse doivent être plus fluides, la deuxième tranche de la ligne à grande vitesse doit être achevée et il faut accélérer le ferroutage. Les Suisses doivent également élargir les horaires d’ouverture des bureaux de dédouanement car les camions stationnent dès le dimanche soir sur l’autoroute. Enfin, la collectivité européenne d’Alsace doit instaurer au plus vite la taxe poids-lourds pour rééquilibrer le trafic routier.

M. le président Jean-Louis Bourlanges. Une inquiétude m’est venue en écoutant votre exposé, madame la rapporteure. L’augmentation du trafic routier est vraisemblablement appelée à se poursuivre ; si les nouvelles infrastructures devaient s’avérer insuffisantes, et dans la mesure où l’emprise foncière est limitée, comment pourra-t-on réaliser d’autres travaux ? Je crains que l’on ne soit tenté de refaire, ailleurs, quelque chose de complètement différent.

Mme Brigitte Klinkert, rapporteure. Madame Givernet, le Conseil fédéral suisse a fini par constater, après des années de négociations, qu’il n’y avait pas de majorité en faveur de l’accord-cadre institutionnel avec l’Union européenne, qui portait sur de nombreux sujets, très concrets, tels que la libre circulation des personnes et le régime des travailleurs détachés. Il sera difficile de remettre ce projet sur les rails mais il ressort de mes auditions, notamment celle de l’ambassadeur de Suisse à Paris, que nos voisins souhaiteraient avancer. Même si l’Union européenne reste prudente à cet égard, nous devrons remettre l’ouvrage sur le métier : des centaines de milliers de frontaliers sont concernés.

La question de la santé est évidemment prioritaire. Des avancées doivent avoir lieu sur le plan transfrontalier. En la matière, je saisis cette occasion de remercier la Suisse, au nom de la commission, d’avoir accueilli des patients atteints par le Covid au printemps 2020, ce qui a permis de soulager nos hôpitaux.

Monsieur Hébrard, la date de la fin des travaux n’avait pas à être mentionnée dans l’accord qui nous est soumis. Les chiffres retenus datent non de 2008, année où les premières études ont été lancées, mais de 2014. S’agissant des délais, je ne jette la pierre à personne. Les négociations ont impliqué de multiples acteurs : la gendarmerie, les douanes, la direction interdépartementale des routes et les autorités équivalentes du côté suisse. Par ailleurs, les riverains et les élus locaux ont été très attentifs à la question – c’était très bien ainsi –, et une concertation importante a eu lieu. Le délai tient aussi à la durée des études : il fallait prendre en considération, de la manière la plus globale possible, les dysfonctionnements de la plateforme actuelle et son environnement, très contraint en raison d’une urbanisation très forte. La lourdeur de l’opération et les arbitrages qui devaient intervenir tant du côté français que du côté suisse ont également joué. Le plus long, néanmoins, fut la négociation, en tant que telle, de l’accord : sept ans se sont écoulés entre la sollicitation d’une participation de la Confédération suisse au financement du réaménagement de la plateforme et la signature du texte.

Le fret ferroviaire, qui a notamment été évoqué par Mme Leboucher, devra bien sûr être développé, ne serait-ce qu’en raison des enjeux climatiques. Dans le couloir rhénan, le trafic ferroviaire est essentiellement Nord-Sud. On voit très peu de poids lourds sur les routes et les autoroutes en Suisse : ils circulent sur des trains. Nous devons travailler ensemble sur cette question, en examinant les problèmes techniques que cela soulèverait, liés notamment à l’écartement des rails et au relief – s’il n’y a pas aujourd’hui de trafic ferroviaire Est-Ouest, c’est bien pour cette raison. Le report modal, sur le transport ferroviaire, est la seule solution d’avenir, à moyen et à long terme.

L’accord vise à moderniser la plateforme, grâce à de nouvelles technologies, pour améliorer l’accueil des poids-lourds, faciliter toutes les formalités douanières et donner en conséquence de meilleures conditions de travail aux personnes œuvrant sur place.

Madame Vichnievsky, l’un des buts du texte est effectivement d’améliorer la qualité de vie des riverains, en particulier la qualité de l’air. L’A35 est un axe routier très emprunté par les poids-lourds. Depuis que l’Allemagne a instauré une taxe sur les poids lourds circulant sur les autoroutes, il y a plus de dix ans, un report très important du trafic vers l’Alsace s’est produit. La loi relative aux compétences de la collectivité européenne d’Alsace permet donc la création d’une taxe sur les poids lourds. Le travail qui est en cours devrait aboutir en 2024. Cela permettra peut-être aussi d’améliorer la situation entre Saint-Louis et Bâle.

Des bénéfices importants sont attendus, grâce au présent accord, en ce qui concerne non seulement la fluidité et la sécurité du trafic routier mais aussi sur le plan climatique et en matière de pollution. La fin des travaux est prévue, je l’ai dit, pour 2023. Il faut penser dès à présent à la suite, avec les Suisses et également avec les Allemands.

M. le président Jean-Louis Bourlanges. Merci pour votre présentation de ce texte qui, sous des dehors techniques, touche à des problèmes centraux pour l’aménagement du territoire, l’aménagement de l’Europe et les rapports entre la France, l’Allemagne et la Suisse.

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Article unique : Autorisation de l’approbation de l’accord relatif à la restructuration de la plate-forme douanière de Saint-Louis - Bâle sur l’autoroute A35, en France, entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse

La commission adopte l’article unique non modifié.

L’ensemble du projet de loi est ainsi adopté.

 

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M. le président Jean-Louis Bourlanges. Je reviens sur une question que je n’ai pas abordée tout à l’heure, lors de l’audition de M. Rioux, parce que j’estimais qu’elle était susceptible de lui valoir une balle perdue alors qu’il n’est pour rien dans l’affaire.

Le décret d’application relatif aux modalités de fonctionnement de la commission d’évaluation de l’aide publique au développement, instaurée par la loi du 4 août 2021, est paru le 6 mai dernier, ce qui n’était pas le meilleur moment pour l’exercice d’un contrôle parlementaire. Or nous sommes quelques-uns à penser – nos collègues du Sénat partagent cet avis – que le décret n’est pas totalement conforme à ce qu’avait souhaité la commission mixte paritaire (CMP), même s’il faut reconnaître que le texte adopté n’était pas parfait.

La loi prévoit que le secrétariat de la commission d’évaluation est assuré par la Cour des comptes, comme c’est déjà le cas, notamment, pour le Conseil des prélèvements obligatoires, et crée un double collège, objet de tractations assez complexes avec le Sénat lors de la CMP, à savoir un collège constitué de parlementaires et un autre composé d’experts. En effet, le rapporteur de l’Assemblée nationale, M. Hervé Berville, tenait absolument à ce qu’il y ait des experts – il tirait d’une expérience parlementaire sans doute insuffisante l’idée que les parlementaires n’en étaient pas.

Le décret d’application prévoit que deux magistrats de la Cour des comptes, dont son premier président, siègent parmi les experts, ce qui pose un problème. Le premier président de la Cour des comptes est ainsi membre d’une des deux composantes de la commission d’évaluation, alors que la Cour, comme la loi le rappelle, est compétente pour contrôler l’action de l’Agence française de développement. M. Moscovici se retrouve ainsi, si je puis dire, aux deux bouts de la chaîne, ce qui est tout à fait insatisfaisant sur le plan des principes. Selon le décret, la commission d’évaluation est chargée de réaliser des évaluations « de manière complémentaire aux travaux menés par la Cour des comptes ». Celle-ci a pour fonction centrale d’exercer un contrôle a posteriori, tandis que la commission d’évaluation se voit surtout confier des missions d’évaluation a priori – elle doit notamment examiner le bien-fondé de projets.

Nous pourrons en reparler lorsque nous recevrons la ministre de l’Europe et des affaires étrangères, dont j’ai appelé l’attention sur ce point, et la secrétaire d’État chargée du développement, de la francophonie et des partenariats internationaux.

 

Nomination de représentants au Conseil d’administration de Campus France

En clôture de sa réunion, la commission désigne :

-          Mme Sabrina Sebaihi et M. Bruno Fuchs membres du conseil d’administration de l’établissement public Campus France, sur le fondement de l’article 6 de la loi n° 2010-873 du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État.

 

La séance est levée à 12 h 05

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Membres présents ou excusés

 

Présents. - Mme Nadège Abomangoli, Mme Clémentine Autain, Mme Fanta Berete, M. Carlos Martens Bilongo, M. Benoît Bordat, M. Jean-Louis Bourlanges, M. Moetai Brotherson, M. Jérôme Buisson, Mme Eléonore Caroit, Mme Clara Chassaniol, M. Sébastien Chenu, Mme Mireille Clapot, M. Alain David, Mme Julie Delpech, M. Nicolas Dupont-Aignan, M. Frédéric Falcon, M. Olivier Faure, M. Marc Ferracci, M. Nicolas Forissier, M. Bruno Fuchs, Mme Maud Gatel, M. Hadrien Ghomi, Mme Olga Givernet, M. Michel Guiniot, Mme Marine Hamelet, M. Joris Hébrard, M. Michel Herbillon, Mme Laurence Heydel Grillere, M. Alexis Jolly, Mme Brigitte Klinkert, Mme Stéphanie Kochert, Mme Amélia Lakrafi, M. Arnaud Le Gall, Mme Élise Leboucher, M. Jean-Paul Lecoq, M. Sylvain Maillard, M. Laurent Marcangeli, Mme Sophie Mette, M. Karl Olive, M. Bertrand Pancher, M. Frédéric Petit, M. Kévin Pfeffer, Mme Laurence Robert-Dehault, Mme Ersilia Soudais, Mme Laurence Vichnievsky, M. Lionel Vuibert, M. Christopher Weissberg, Mme Caroline Yadan, M. Frédéric Zgainski

 

Excusés. - Mme Véronique Besse, M. Louis Boyard, M. Meyer Habib, M. Hubert Julien-Laferrière, M. Tematai Le Gayic, Mme Marine Le Pen, M. Vincent Ledoux, M. Nicolas Metzdorf, Mme Mathilde Panot, Mme Barbara Pompili, Mme Sabine Thillaye, M. Patrick Vignal, M. Éric Woerth, Mme Estelle Youssouffa

 

Assistaient également à la réunion. - M. Karim Ben Cheikh, M. Guillaume Garot