Compte rendu

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

–  Audition de M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et de M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics, sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 et le projet de loi de finances pour 2023.              2

  présences en réunion...........................33

 


Lundi
26 septembre 2022

Séance de 15 heures

Compte rendu n° 18

session de 2021-2022

 

 

Présidence de

 

M. Éric Coquerel,

Président

 

 


  1 

La commission entend M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics, sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 et le projet de loi de finances pour 2023.

M. le président Éric Coquerel. Nous auditionnons Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, et Gabriel Attal, ministre délégué, chargé des comptes publics, au sujet du projet de loi de finances (PLF) pour 2023 et du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, adoptés ce matin en Conseil des ministres. Même si nous avons déjà examiné un projet de loi de finances rectificative (PLFR), il s’agit du premier budget initial de ce quinquennat.

Nous entamons ainsi l’examen des textes budgétaires de l’automne, selon une séquence un peu exceptionnelle, puisque c’est la première fois depuis 2017 que le Gouvernement se livre à un exercice de programmation pluriannuelle. C’est aussi cet automne que nous inaugurons la plupart des innovations introduites par la réforme de la loi relative aux lois de finances (LOLF), promulguée le 28 décembre 2021.

Parmi ces innovations, on peut citer : dans l’article liminaire, la présentation des prévisions de dépenses en volume et en valeur, pour l’ensemble des administrations publiques et par sous-secteurs ; en première partie, l’introduction d’un article recensant la liste exhaustive des taxes affectées et leur éventuel plafond d’affectation, la présence de l’ensemble des mesures fiscales, quelle que soit l’année de leur effet sur le budget de l’État ainsi que la présentation des ressources et des dépenses en distinguant fonctionnement et investissement, dans l’article d’équilibre ; en seconde partie, deux nouveaux états annexés, l’un récapitulant l’ensemble des moyens par mission du budget général, l’autre énumérant l’intégralité des objectifs et indicateurs de performance des missions. Enfin, même si cela peut sembler plus anecdotique, les documents budgétaires sont désormais intégralement dématérialisés.

S’agissant du calendrier d’examen des textes que les ministres vont nous présenter, nous débuterons en commission par l’examen du projet de loi de programmation et de la première partie du PLF, dès mardi prochain, 4 octobre, puis le mercredi et le jeudi. Le délai de dépôt des amendements est fixé au vendredi qui précède, à 17 heures, ce qui laissera un peu plus de quatre jours.

En séance publique, après une discussion générale commune au projet de loi de programmation des finances publiques et au projet de loi de finances, nous commencerons par l’examen des articles du projet de loi de programmation, dès le lundi 10 octobre, puis nous poursuivrons avec l’examen de la première partie du PLF. Cette dernière discussion devrait s’achever le mercredi 19 octobre, avec le débat sur le prélèvement au profit de l’Union européenne, le vote solennel sur l’ensemble de la première partie devant avoir lieu le mardi suivant, après les questions au Gouvernement, en même temps que le vote solennel sur le projet de loi de programmation des finances publiques.

J’utilise le conditionnel pour le calendrier de la séance publique, à l’inverse du calendrier de la commission, car cela dépendra du tour que prendront les discussions et de ce que le Gouvernement pourrait décider de faire. La seule certitude que nous pouvons avoir, d’un point de vue procédural, c’est qu’il faut que la première partie du PLF soit adoptée avant que nous passions à l’examen de la seconde partie.

En commission, l’examen de cette seconde partie commencera le mercredi 19 octobre. Jusqu’au mercredi suivant, la commission se saisira successivement de toutes les missions, qui seront inscrites à l’ordre du jour de la séance publique à compter du jeudi 27 octobre et jusqu’au jeudi 10 novembre.

Il faudra également examiner en commission les articles non rattachés, le mercredi 2 novembre, en vue d’un passage en séance publique le lundi 14 novembre.

Le vote solennel sur l’ensemble du projet de loi de finances pour 2023 interviendrait, sous réserve de la tournure des débats, le mardi 15 novembre.

M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Je suis très heureux de vous retrouver, avec Gabriel Attal, pour vous présenter le premier budget de ce nouveau quinquennat et le sixième consécutif pour notre majorité et votre serviteur. Ce n’est pas un budget de rigueur, ni de facilité, mais un budget responsable et protecteur, dans des temps de grande incertitude, et un budget qui veut atteindre un juste équilibre entre la protection nécessaire de nos compatriotes et le rétablissement indispensable des finances publiques. Par ailleurs, c’est un budget qui tient la ligne économique qui a toujours été la nôtre depuis 2017 : le travail, sa juste rémunération, la croissance et l’investissement.

Ce budget, je l’ai dit, a été défini dans une période de très fortes incertitudes économiques. Je n’en citerai que quelques-unes : la poursuite de la guerre en Ukraine, dont l’issue est incertaine et qui a un impact majeur sur les prix de l’énergie, les difficultés économiques de beaucoup de partenaires, comme les États-Unis, la Chine, du fait de sa stratégie contre le covid, et l’Allemagne, mais je pense aussi aux mouvements politiques en Europe et à leur incidence éventuelle sur la zone euro.

Dans ce contexte, je tiens à rappeler la résistance de l’économie française. Il a été dit que l’objectif de 2,3 % de croissance en 2022 ne pourrait pas être atteint, mais notre perspective de croissance est actuellement de 2,7 % pour cette année. La consommation des ménages a rebondi et l’emploi tient, de même que les investissements. Pour toutes ces raisons, malgré les incertitudes que j’ai rappelées, nous maintenons une prévision de croissance positive, de 1 %, en 2023.

Notre priorité absolue, dont vous parlent nos compatriotes dans vos circonscriptions et dont ils me parlent aussi lors de mes déplacements, c’est l’inflation. Elle est une menace directe pour les ménages les plus fragiles, pour les classes moyennes, pour les retraités qui ne peuvent pas augmenter leurs revenus, et c’est un facteur de désorganisation des chaînes de valeur, qui peut obliger certaines entreprises industrielles à réduire leur production, tout simplement parce que leur facture d’énergie est trop élevée, voire à délocaliser. Nous avons eu l’occasion vendredi dernier, en Haute-Savoie, avec certains d’entre vous, de vérifier à quel point l’augmentation des prix de l’énergie a un impact significatif sur les PME et notre tissu industriel.

Notre priorité absolue est de faire reculer l’inflation, qui restera à un niveau élevé dans les mois qui viennent, de l’ordre de 6 %, avant de revenir autour de 4 % dans le courant de l’année 2023. Nous comptons nous y employer, d’abord, en maintenant un bouclier énergétique qui constitue la singularité de la politique économique française. Nous sommes le seul pays de la zone euro à avoir adopté dès l’automne 2021, sur la proposition du Président de la République, un bouclier énergétique qui a maintenu les prix de l’électricité et du gaz à des niveaux raisonnables. En conséquence, nous avons le taux d’inflation le plus faible de la zone euro : nous n’atteignons pas les 8 % à 12 % que connaissent certains États membres. Nous avons pris la décision de maintenir ce bouclier énergétique. Les prix du gaz et de l’électricité augmenteront, c’est vrai, mais de seulement 15 % au début de l’année 2023, alors qu’ils auraient dû augmenter de plus de 100 %.

Nous maintenons cette protection, à la fois juste pour les ménages et efficace pour notre économie. Le coût net est de 16 milliards d’euros, 11 milliards pour le gaz et 5 milliards pour l’électricité. Ce coût serait plus de trois fois plus élevé si nous n’avions pas déjà un mécanisme de redistribution des rentes des énergéticiens. Nous ne voulons pas de nouveaux impôts, mais nous refusons catégoriquement les rentes. Des énergéticiens qui touchent des revenus exceptionnels, non parce qu’ils ont investi mais uniquement parce que les prix flambent, doivent reverser de tels bénéfices à la collectivité, et ils le font déjà. C’est ce qui nous permet de financer le bouclier énergétique. Je ne veux laisser aucun doute : nous ne sommes pas pour le laisser-faire ou le laisser-aller, ni pour des impôts supplémentaires, mais nous sommes contre les rentes et nous récupérons leur produit, notamment en ce qui concerne les énergéticiens, pour financer le bouclier énergétique. Je me réjouis que la Commission européenne ait repris à son compte ce mécanisme. C’est la preuve de sa justice et de son efficacité.

Protéger nos compatriotes contre l’inflation, c’est également protéger tous ceux qui travaillent et tous ceux qui paient des impôts. Nous avons pris la décision d’indexer le barème de l’impôt sur le revenu sur le niveau de l’inflation, hors tabac, c’est-à-dire 5,4 %. Nous aurions pu indexer le barème sur les salaires, mais nous avons fait un autre choix et nous le revendiquons : nous évitons ainsi à tous ceux qui sont soumis à l’impôt sur le revenu de payer davantage. C’est le sens de ce choix stratégique. Très concrètement, le revenu disponible après impôt restera le même pour tous les ménages, même si les salaires augmentent. Ceux qui travaillent en seront donc récompensés, au lieu de subir une privation à cause de l’inflation.

Nous voulons également protéger les entreprises, conformément à la stratégie que nous avons toujours suivie. Nous avons refusé que la crise du covid et la récession brutale qui a suivi emportent des pans entiers de l’économie française et conduisent à des dizaines de milliers de faillites. Nous ne voulons pas que ce qui n’est pas arrivé pendant cette crise se produise en raison de l’inflation. Il faut protéger notre tissu industriel contre les ravages de la flambée des prix de l’électricité et du gaz. Les plus petites entreprises, qui ont un chiffre d’affaires inférieur à 2 millions d’euros et emploient moins de 10 salariés, sont protégées par les tarifs régulés de vente, dont la hausse sera limitée à 15 %. Pour toutes les autres entreprises, nous mettrons en place un guichet simplifié, pour des aides allant jusqu’à 2 millions d’euros, qui sera opérationnel le 3 octobre. Le précédent dispositif n’ayant pas fonctionné, nous l’avons corrigé et simplifié. Nous avons notamment retenu comme critère le fait d’avoir des bénéfices en baisse sur un mois, au lieu de trois précédemment, et nous avons aussi simplifié le critère portant sur le chiffre d’affaires.

Reste la question des entreprises exposées à la concurrence internationale et dont les factures d’énergie sont particulièrement élevées. Je reprends l’exemple des décolleteurs de la vallée de l’Arve, qui produisent notamment des pièces de moteurs automobiles : s’ils cherchent à faire passer des hausses de prix de 5, 10, 15 ou 20 % à cause de l’évolution du coût de l’électricité, les marchés chinois ou américains ne verront pas pourquoi ils devraient payer plus cher puisqu’ils ne connaissent pas d’augmentation du prix de l’énergie. Il faut protéger – c’est une priorité absolue – ces entreprises qui consomment beaucoup d’énergie et qui ne peuvent répercuter la hausse de son coût sur les prix, parce qu’elles sont exposées à la concurrence internationale. J’ai fait des propositions à la Commission européenne pour modifier le dispositif existant, car il est insuffisant et trop complexe.

J’ai ainsi demandé que le critère de la part de l’énergie dans le chiffre d’affaires, qui est actuellement de 3 %, soit revu à la baisse et que le calcul porte non pas sur l’année précédente mais sur l’année en cours. En effet, des entreprises pour lesquelles la part de l’énergie dans le chiffre d’affaires était de 1 % ou 2 % en 2021 ne seront pas concernées par le dispositif alors que cette part représentera 5 % ou 6 % en 2022. J’ai également demandé que le critère de baisse de l’EBITDA – le bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement – sur trois mois soit supprimé. Cela n’a aucun sens, dans une entreprise industrielle, d’attendre que l’EBITDA soit négatif sur trois mois. Au bout d’un mois, en général, une entreprise industrielle est déjà en très grande difficulté. Enfin, j’ai demandé que le plafond des aides soit doublé, jusqu’à 100 millions d’euros, de façon à apporter les sommes nécessaires aux entreprises qui en ont le plus besoin et dont les factures d’énergie sont les plus importantes.

Nous connaîtrons les réponses de la Commission dans les prochains jours, mais je peux déjà vous dire que les modifications de ces règles relatives aux aides d’État, qui devaient intervenir le 1er janvier 2023, auront lieu en octobre de cette année, grâce à l’intervention de la France. C’est pourquoi nous avons recommandé à toutes les entreprises concernées, avec le Président de la République, de ne pas signer leurs contrats énergétiques pour l’année 2023, mais d’attendre que les nouvelles règles soient établies.

S’agissant des collectivités locales, je rappelle qu’un fonds de 430 millions d’euros a été mis en place grâce à la loi de finances rectificative pour 2022 (LFR 2022) et que 30 000 communes bénéficient du tarif réglementé et sont donc protégées par le bouclier tarifaire.

Dans ce budget, nous poursuivons aussi la transformation de notre économie pour atteindre les objectifs stratégiques que nous nous sommes fixés, avec le Président de la République et la Première ministre : le plein emploi en 2027 et le passage sous le seuil de 3 % du déficit public. Pour cela, notre stratégie reste la même : le soutien à la croissance, la réduction des dépenses et les réformes de structure.

Le soutien à la croissance se voit dans la baisse des impôts de production que nous poursuivons. C’est la traduction d’une politique de l’offre qui vise tout simplement à permettre à notre tissu économique, notamment industriel, de se développer. Nous sommes la seule majorité depuis vingt-cinq ans à avoir engagé une baisse des impôts de production. Je considère que c’est indispensable pour accélérer la reconquête industrielle de la nation française. On ne peut pas y arriver quand les industries sont lestées d’un tel boulet. Nous avons réduit ces impôts de 10 milliards d’euros et nous les réduirons encore de 8 milliards, en deux fois, d’abord en 2023 puis en 2024, pour tenir compte de la situation des finances publiques. Nous vous proposons, pour garantir que la parole est tenue, d’inscrire cette trajectoire sur deux ans dans le PLF pour 2023.

Afin de soutenir la croissance, nous nous appuierons aussi sur l’innovation, notamment dans le cadre de France 2030. Nous avons ainsi inscrit 6 milliards d’euros d’engagements dans le budget pour 2023. Nous veillons à ce que cet environnement plus favorable et le financement de l’innovation se traduisent bien, concrètement, par des décisions de relocalisation de productions industrielles, de sites industriels et de chaînes de valeur dans notre pays. C’est ce que nous avons fait avec GlobalFoundries pour les semi-conducteurs à Crolles, avec STMicroelectronics, et c’est aussi ce que nous voulons obtenir de l’industrie automobile et d’autres secteurs industriels.

Le deuxième volet de notre stratégie de rétablissement des finances publiques est la réduction des dépenses. Le « quoi qu’il en coûte » était la bonne réponse face à l’effondrement de notre économie. Cela nous a évité des dizaines de milliers de faillites et une explosion du chômage, et a été, au bout du compte, moins coûteux que les dépenses qui auraient été nécessaires pour réparer les dégâts d’une crise économique majeure. Mais le « quoi qu’il en coûte » serait une faute économique en période d’inflation. Nous y avons donc mis fin, et nous ne le rétablirons pas, je ne veux laisser aucune ambiguïté sur ce point. Rétablir le « quoi qu’il en coûte » reviendrait tout simplement à alimenter l’incendie inflationniste. Il faut, au contraire, mettre en place des aides ciblées sur les secteurs, les personnes, les industries, les entreprises qui en ont le plus besoin. Nous avons donc mis fin aux crédits de relance et aux dispositifs d’urgence. Même si certains demandent parfois de rétablir des dispositifs globaux de ce type, nous ne le ferons pas : ce serait une faute économique. Par ailleurs, et Gabriel Attal aura l’occasion d’y revenir, la progression des dépenses publiques restera inférieure au rythme de l’inflation, preuve de notre détermination à contenir l’augmentation de la dépense publique.

Enfin, je veux là aussi être très clair, nous ne pourrons pas rétablir nos finances publiques, baisser la dette et réduire les déficits si, en plus de la croissance et de la réduction des dépenses, nous n’engageons pas des transformations structurelles, qui sont au cœur de ce que notre majorité a promis au peuple français. Nous poursuivrons donc la réforme de l’assurance chômage, à un moment où près de 400 000 emplois ne sont pas pourvus, et nous engagerons une réforme des retraites. Nous ne le ferons pas pour le plaisir de réformer les retraites, mais d’abord parce que cette réforme a été promise par le Président de la République lors de sa campagne présidentielle et qu’elle fait donc partie du mandat confié, à lui et à cette majorité, par le peuple français.

J’ai toujours été convaincu qu’il valait mieux, en matière de politique, tenir ses promesses. Nous ne pouvons pas dire, six mois après les élections, que nous pourrions abandonner une promesse de campagne centrale, sur laquelle un débat a eu lieu. Malgré des controverses ou des critiques, parfois, ce débat a été tranché par le peuple souverain, qui s’est prononcé en faveur d’un candidat proposant une réforme des retraites, laquelle comportait une modification de l’âge légal de départ à la retraite et des critères de calcul. J’ai la conviction qu’il vaut mieux tenir parole.

Deux voies s’ouvrent à nous si nous voulons financer notre modèle de solidarité. Ce modèle, auquel nous sommes tous attachés, est généreux et efficace, mais il est coûteux et il faut bien le payer. Il y a deux manières de le faire : soit on augmente les impôts, ce qui n’a jamais été la voie choisie par la majorité, soit on s’appuie sur plus de recettes, plus de prospérité et plus de travail. C’est notre voie, et c’est ce qui nous amène à la réforme des retraites. Par ailleurs, je suis convaincu que l’on peut faire une réforme juste, responsable, dans des délais raisonnables, tout en arrivant à obtenir l’adhésion de nos compatriotes.

Enfin, ce budget reste fidèle à notre détermination à accélérer la transition écologique et énergétique. Je serai, comme toujours, honnête avec vous : nous pourrions certainement faire mieux, et il est évident que le budget est un peu déporté, dans un sens qui n’est pas celui que nous aurions souhaité, par les aides et les subventions destinées à nos compatriotes s’agissant du gaz et, en 2022, des carburants – c’était une nécessité face à la crise de l’inflation. Je voudrais souligner certaines décisions qui figurent dans ce budget et qui sont importantes pour accélérer le verdissement, même si je pense que nous devrons faire plus et mieux dans les mois qui viennent.

Le budget de MaPrimeRénov’ passera de 2 milliards d’euros à 2,5 milliards en 2023, ce qui constitue une augmentation très significative. Comme l’ont montré les dialogues de Bercy, lancés par le ministre des comptes publics, nous devrons travailler ensemble à une amélioration de l’efficacité de ce dispositif en passant de rénovations par gestes individuels à des rénovations globales. C’est un des débats intéressants que nous pouvons avoir dans le cadre de ce PLF. Nous prévoyons aussi 1,3 milliard d’euros pour le verdissement du parc automobile, dont la transformation sera ainsi accélérée, et nous déploierons un fonds vert pour les collectivités territoriales, créé à la demande de la Première ministre et doté de 1,5 milliard d’euros. Enfin, nous amorçons un virage radical en matière de garanties à l’export. Pour la première fois de son histoire, la France n’accordera plus aucune garantie en matière d’export à aucune énergie fossile, depuis l’exploration jusqu’au raffinage et en passant par le transport.

S’agissant des finances publiques, je rappelle que nous voulons tenir l’objectif de 5 % de déficit public et ramener la dette à un peu plus de 111 % du PIB à la fin de l’année 2023. Tout cela demandera de la fermeté, de la constance, mais aussi de l’imagination. Je remercie Daniel Labaronne et les parlementaires qui ont travaillé avec lui sur des propositions pour réduire la dépense publique. Toutes les propositions qui nous permettront de respecter nos engagements nationaux et européens seront les bienvenues.

M. Gabriel Attal, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics. Bruno Le Maire a rappelé les aléas auxquels nous faisons face, en matière géopolitique et économique. Si l’on ne fait pas de politique avec une boule de cristal, on peut en faire avec une boussole. La nôtre, depuis le début de ces crises, est la protection des Français. Le budget que nous vous présentons est ainsi un budget de protection.

Le premier axe de protection est d’aider les Français à faire face à l’urgence des fins de mois. Le bouclier tarifaire, détaillé par Bruno Le Maire, représente une des dépenses importantes du budget pour 2023. L’indexation du barème de l’impôt sur le revenu est aussi une mesure forte pour la protection du pouvoir d’achat des Français. J’ai parfois entendu dire que c’était une mesure automatique, appliquée chaque année. Or ce n’est pas le cas : certaines années, le barème n’a pas été indexé sur l’inflation, notamment pour les revenus de 2011 et de 2012. Ensuite, face à un tel niveau d’inflation et compte tenu des implications pour les finances publiques, convenez que la question peut se poser. Très concrètement, plus de 6 milliards d’euros – j’avais annoncé 6,2 milliards, mais ce sera en réalité 6,4 milliards – ne seront pas prélevés sur les Français au titre de l’impôt sur le revenu.

Le deuxième axe de protection est la poursuite du réarmement des services régaliens. Nous prévoyons ainsi 3 milliards supplémentaires pour la défense, conformément à la loi de programmation militaire, et 1,4 milliard de plus pour le ministère de l’intérieur, suivant la trajectoire inscrite dans la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (LOPMI), ce qui signifie plus de moyens pour les équipements et les technologies numériques, pour renforcer la présence des policiers et des gendarmes sur la voie publique, mais aussi plus de moyens pour les douanes, auxquelles je suis très attaché, en tant que ministre de tutelle – les douaniers bénéficieront de 144 millions supplémentaires entre 2022 et 2025, pour renforcer les équipements mobiles et améliorer notre flotte aérienne et navale. Enfin, nous poursuivrons le renforcement des moyens du ministère de la justice : ils augmenteront de 8 % pour la troisième année consécutive.

Troisième axe de protection, nous préparons l’avenir, en faisant le pari de l’éducation, en gagnant la bataille du plein emploi et en accélérant la transition écologique. Nous prévoyons une augmentation de 3,7 milliards d’euros pour l’éducation. Comme nous nous y étions engagés dans le cadre de la campagne présidentielle, aucun enseignant ne gagnera moins de 2 000 euros net par mois à compter de la rentrée prochaine. Pour ce qui est de la bataille du plein emploi, nous nous sommes fixé pour objectif de la gagner à l’horizon 2027 : 6,7 milliards d’euros de crédits supplémentaires seront investis pour l’emploi et pour l’apprentissage, notamment en vue d’arriver à un million d’apprentis d’ici à 2027. Cette bataille, je le redis, nous ne la gagnerons pas par davantage de pression fiscale. C’est la raison pour laquelle nous avons d’ores et déjà rendu 54 milliards aux ménages et aux entreprises au cours des cinq dernières années. Nous allons continuer à baisser les impôts lorsqu’ils sont néfastes au développement économique de notre pays, en supprimant la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Et puis, préparer l’avenir, c’est protéger la planète. Nous agissons, vous le savez, d’une manière résolue en ce sens. Outre le fonds de 1,5 milliard d’euros qui a été annoncé par la Première ministre, il y aura 500 millions d’euros de plus pour MaPrimeRénov’ et 250 millions supplémentaires pour le plan Vélo.

Le quatrième axe de protection consiste à protéger les comptes publics. Nous sommes sortis du « quoi qu’il en coûte » pour entrer dans le « combien ça coûte ». Un euro dépensé est un euro raisonné, évalué et utile à la protection des Français. Nous avons une trajectoire, fixée dans le cadre du programme de stabilité. Nous tiendrons l’objectif de 5 % de déficit l’an prochain, après avoir tenu l’objectif pour cette année. Je rappelle que le déficit était de près de 9 % en 2020 : nous l’avons ramené à 6,4 % en 2021, et il est de 5 % en 2022. Il sera, de même, de 5 % en 2023, et nous serons revenus sous les 3 % en 2027. Nous le ferons, comme Bruno Le Maire l’a dit, en suscitant de l’activité économique par des réformes ambitieuses qui permettent d’améliorer l’emploi dans notre pays – plus il y a de Français qui travaillent, plus les recettes sont élevées et moins il faut de dépenses de réparation pour accompagner des Français qui ne travaillent pas –, mais aussi en maîtrisant la dépense publique. Elle diminuera de 2,6 % en volume en 2023, et la part des dépenses publiques rapportée au PIB se réduira, puisqu’elle passera de 57,6 % à 56,6 % du PIB l’an prochain, puis à 53,8 % en 2027. Nous poursuivrons, par ailleurs, le travail d’évaluation de la qualité de la dépense publique. Le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit des outils supplémentaires : son article 7 vise à systématiser les évaluations des dépenses fiscales avant leur éventuelle reconduction. C’est un outil dont le Parlement devra pleinement se saisir : nous sommes tous responsables de nos finances publiques.

Répondre à l’urgence, financer l’essentiel, préparer l’avenir et tenir les comptes, voilà les quatre axes qui structurent notre action et la stratégie que nous vous proposons pour protéger les Français dans cette période exceptionnelle.

Nous avons parfaitement conscience que les défis sont immenses, et c’est précisément pour cela que nous devons inventer ensemble une nouvelle méthode : c’est ce que nous avons voulu en lançant les dialogues de Bercy. Nous verrons dans les prochaines semaines si les pistes que nous avons dessinées ensemble permettent d’enrichir le texte. Je ne minimise en rien nos désaccords sur le fond : il y aura toujours ceux qui veulent augmenter les impôts et ceux qui veulent les baisser. Mais ce n’est pas parce qu’on n’est pas d’accord sur tout qu’on ne peut discuter de rien. Et ces réunions, qui ont duré plus de dix heures et auxquelles une grande partie d’entre vous étaient présents, ont montré que nous étions capables de nous parler, de travailler ensemble et d’identifier des propositions et des solutions au service des Français.

De fait, le texte qui vous est présenté n’est pas celui qui avait été prévu avant le lancement des dialogues de Bercy, et il sera encore enrichi par nos travaux. Toute une série de mesures ont été imaginées à la suite de nos échanges. Ainsi, nous avons décidé de suspendre l’application de l’actualisation des bases locatives, qui était critiquée de toutes parts ; accepté de revaloriser plus encore que prévu les crédits de MaPrimeRénov’ et engagé un travail de révision de son barème pour soutenir davantage les rénovations globales ; enrichi le paquet « collectivités locales », notamment en échelonnant sur deux ans la suppression de la CVAE et en décidant de la compenser par une fraction de TVA.

Caroline Cayeux et moi-même venons d’annoncer devant le Comité des finances locales que nous allons renforcer les dotations de péréquation au sein de la dotation globale de fonctionnement (DGF) l’an prochain, à hauteur de 210 millions d’euros ; c’est encore une proposition qui avait été émise dans le cadre des dialogues de Bercy – j’en remercie Christine Pires Beaune. Autrement dit, nous garantissons la stabilité de la DGF au niveau non seulement national, comme nous le faisions depuis cinq ans, mais aussi individuel – pour chaque collectivité –, comme le souhaitait également Jean-René Cazeneuve, grâce à un abondement des dotations de péréquation : la péréquation ne se fera plus « sur le dos » de la dotation forfaitaire, donc de certaines collectivités.

Nous souhaitons poursuivre un travail aussi partenarial que possible, au service de la protection de nos concitoyens.

M. le président Éric Coquerel. Lors de la discussion sur le programme de stabilité, nous avions été quelques-uns à évoquer le caractère optimiste de certaines prévisions du Gouvernement ; Bruno Le Maire avait alors déclaré que nous étions dans le pic inflationniste et que celui-ci allait encore durer quelques semaines, voire quelques mois. Force est de constater, et le Gouvernement l’admet, que ses prévisions, de croissance comme d’inflation, étaient bel et bien optimistes.

Vous avez eu l’honnêteté de dire que la situation économique est très instable et incertaine. Mais votre prévision de croissance de 1 % pour 2023, au lieu de 1,4 % précédemment, est optimiste par rapport à celle de la Banque de France, qui varie entre 0,8 % et une croissance négative de 0,5 %, c’est-à-dire une récession. De même, votre prévision d’inflation pour 2023 est réévaluée à 4,2 % – au lieu de 3,2 % dans le programme de stabilité –, alors que, selon la Banque de France, elle sera de 4,7 % au minimum et pourra monter jusqu’à 6,9 %. Au total, et au regard de l’objectif des 5 % de déficit, vos prévisions sont tout aussi optimistes que celles de juillet dernier. Je ne dis pas cela pour le plaisir, mais au vu de la conjoncture internationale et de ses conséquences possibles.

Vous aviez annoncé une augmentation des dépenses publiques de 0,6 %, alors que la croissance tendancielle des dépenses publiques, c’est-à-dire le niveau de dépenses publiques correspondant aux besoins de la population compte tenu de son augmentation, est estimée par Bercy à 1,35 %. Nous avions alors dit que cela équivalait à une cure d’austérité inédite sous la Ve République. Vous parlez ce matin de 21,7 milliards d’euros de hausse ; j’aimerais d’ailleurs en connaître le détail, car, d’après le tableau retraçant les dépenses de l’État, j’aboutis à 14,5. Avec une inflation à 5,2 %, cela porterait la croissance de la dépense publique à 1 %, c’est-à-dire moins que la croissance tendancielle, mais plus que 0,6 %. En revanche, si on tient compte de la prévision d’inflation de la Banque de France, la hausse tombe à 0,5 %, ce qui complique encore plus la situation.

Si vous ne réduisez pas autant les dépenses publiques que vous l’annonciez cet été – mais c’est à confirmer –, vous continuez de revendiquer la maîtrise de ces dépenses. Or je ne suis pas d’accord – je l’ai dit à plusieurs reprises à Bruno Le Maire – pour considérer que le « quoi qu’il en coûte » est derrière nous. Tout dépend peut-être de la définition que l’on en donne : à mes yeux, il change de nature, pour nous permettre de faire face non plus au covid, mais aux détériorations dues au réchauffement climatique et que nous avons vues cet été – incendies, sécheresse, changements météorologiques – ou aux conséquences de la guerre en Ukraine. Autrement dit, votre budget ne tient pas assez compte des besoins de la population ni de l’intérêt général, du point de vue écologique et social. Parce que vous avez d’autres visées – la maîtrise des dépenses, la baisse des impôts –, vous laissez des urgences de côté.

Ainsi, vos mesures ne sont pas suffisantes pour maintenir, surtout au profit des plus défavorisés, un pouvoir d’achat qui, l’an prochain, diminuera de 1 % selon Rexecode et stagnera d’après la Banque de France. Pourtant, ce serait une façon de préserver la consommation populaire, qui est profitable pour l’économie. De même, en matière d’écologie, ce n’est pas avec MaPrimeRénov’, qui permet une rénovation partielle, que l’on sera à la hauteur du nombre annuel de rénovations complètes requis par la nécessaire bifurcation. Lors des dialogues de Bercy, vous en avez convenu, Bruno Le Maire, face à Eva Sas.

S’il y a urgence, il faut des recettes supplémentaires. Or vous avez dit en substance qu’il n’y aurait pas de dépenses en plus sans recettes correspondantes, à l’euro près. Cela ouvre le débat sur les baisses de recettes prévues dans le PLF.

D’abord, la suppression de 4 milliards d’euros de CVAE. Vous voyez dans celle-ci un boulet pour les entreprises. En fait, la CVAE aggrave les inégalités affectant la fiscalité des entreprises, puisque, aux deux tiers, elle bénéficie aux 10 000 plus grosses entreprises françaises. Ainsi, une entreprise qui a 2 millions de chiffre d’affaires et 550 000 euros de valeur ajoutée ne paie que 825 euros de CVAE chaque année. Mais, pour les collectivités, elle est remplacée par des impôts plus injustes : la TVA, impôt non proportionnel, mais aussi les taxes foncières, à taux unique.

Ensuite, la suppression de la taxe d’habitation pour les 20 % de ménages les plus favorisés : était-elle urgente alors que nous avons besoin de recettes ?

En revanche, j’avais cru comprendre des dialogues de Bercy qu’il s’agissait de toucher à des niches fiscales dépourvues de rentabilité. Pourtant, au vu des quelques-unes qu’il tend à supprimer, le PLF n’est pas à la hauteur des enjeux. On aurait pu, par exemple, réviser le crédit d’impôt recherche (CIR).

Vous avez évoqué le débat qui s’engagera sur la taxation des superprofits ; je l’ai noté. Vous critiquez la rente, comme – je m’en réjouis – lors des dialogues de Bercy. Mais pourquoi n’appliquer ce raisonnement qu’aux énergéticiens ? D’autres entreprises constituent une rente, reversée en dividendes ; nous le soulignons, avec d’autres groupes, dans notre proposition de référendum d’initiative partagée. Voilà qui devrait nous fournir une piste de travail, d’autant qu’il sera difficile de s’attaquer à un seul secteur : cela pourrait être jugé anticonstitutionnel.

En ce qui concerne les retraites, nous verrons cette semaine ce qu’il en est. J’espère que le Gouvernement n’aura pas l’idée d’introduire la réforme des retraites dans un amendement au PLFSS ; je lui conseillerais d’y surseoir, que ce soit pour des questions de majorité à l’Assemblée ou en raison du risque de mouvement social. Mais c’est sous un autre angle que j’aborderai le sujet. Gabriel Attal a expliqué dans Le Journal du dimanche que la réforme était une manière de réduire les déficits et de pouvoir envisager des dépenses, par exemple au profit des enseignants. Je m’étonne que l’on puise pour cela dans le budget de la sécurité sociale, en l’occurrence celui des retraites, dans lequel les cotisations devraient permettre de s’assurer que les Français bénéficient d’une retraite. Il est de plus en plus fréquent que l’on fasse ainsi jouer aux comptes sociaux un autre rôle que le leur. Or, si on peut débattre de la manière de trouver l’argent permettant aux gens de partir à la retraite à un âge décent, je ne vois pas en quoi c’est aux retraites de compenser les déficits de l’État.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. En 2020, nous avions un budget du « quoi qu’il en coûte », pour faire face à une crise inédite ; en 2021, nous avions un budget de relance ; aujourd’hui, vous nous présentez un budget protecteur et volontariste.

Quatre axes définissent la politique budgétaire et économique de la majorité.

Premièrement, la protection et le soutien constant aux Français dans la crise, dès la fin 2021, et plus fortement encore en 2022, comme en témoignent aides directes, bouclier tarifaire et revalorisation des prestations sociales et du point d’indice. Vous proposez notamment de maintenir le bouclier tarifaire en 2023, en le complétant par un chèque énergie ciblant les ménages les plus fragiles, et de rendre 6,4 milliards aux ménages en revalorisant le barème de l’impôt sur le revenu.

Deuxièmement, poursuivre la politique de l’offre par une nouvelle baisse des impôts de production, en faveur de l’attractivité de notre pays et du plein emploi. En deux ans, nous rendrons plus de 6 milliards à nos entreprises, notamment industrielles, dans la continuité d’une politique efficace depuis 2017 : enfin, la France est redevenue attractive pour les investissements et les emplois industriels et a fait refluer le chômage, rompant avec le chômage endémique dont ma génération entendait parler depuis sa jeunesse – désormais, c’est à une pénurie de main-d’œuvre que nous devons faire face. Oui, nous devons travailler plus pour sauvegarder notre système de retraite par répartition et créer des marges de manœuvre afin de financer de nouvelles politiques publiques. Ceux qui stigmatisent les entreprises, dénigrent la valeur travail, voire font l’apologie de la paresse portent une lourde responsabilité !

Troisièmement, poursuivre l’effort de financement de nos politiques prioritaires. En premier lieu, le Gouvernement propose de majorer les dépenses publiques relatives à l’éducation et à la formation : rémunération des enseignants, financement de l’apprentissage et de la formation continue. Ensuite, il s’agit de ne rien lâcher en matière de transition écologique et énergétique – je suis d’accord pour dire que nous n’en ferons jamais assez dans ce domaine. C’est le sens de l’ouverture de crédits relatifs à MaPrimeRénov’ et au plan d’investissement pour la France de 2030. Enfin, un réarmement régalien s’opère en faveur de nos armées et de nos forces de l’ordre.

Quatrièmement, l’engagement d’une trajectoire soutenable pour nos finances publiques. C’est l’objectif du PLF, mais aussi et surtout du projet de loi de programmation des finances publiques. Il faut, à moyen terme, entreprendre notre désendettement, ce qui passe par une trajectoire crédible et raisonnable en dépenses et par un déficit maîtrisé, inférieur à 3 % de notre richesse nationale en 2027. Il y faudra du courage et de la pédagogie, car des réformes seront nécessaires. Un coup d’œil chez nos voisins le montre aisément : la trajectoire proposée est très loin de l’austérité, comme d’une politique budgétaire sans cap ni maîtrise. Il nous faut absolument suivre cette ligne de crête ; soyons-en collectivement responsables.

J’en viens à mes questions.

L’avis du Haut Conseil des finances publiques nous interroge sur les moyens dont nous disposons pour mettre en œuvre le budget. Il juge notamment optimistes les hypothèses de croissance économique et de maîtrise de la dépense publique inhérentes à ce budget. J’y vois surtout une incitation à engager plus vite les réformes structurelles que nous défendons : la réforme des retraites, l’accompagnement des allocataires du RSA, la réforme de l’assurance chômage. Pouvez-vous préciser la manière dont ces réformes sont traduites dans les hypothèses du Gouvernement ?

Nous sommes tous soucieux du poids de la dette que nous transmettons aux générations futures. En 2023, la dette coûtera 51,7 milliards d’euros. Nous nous sommes engagés à maintenir le déficit sous la barre de 5 % du PIB cette même année. Dans le budget qui nous est présenté, le poids de la dette en pourcentage du PIB baisse ; c’est encourageant, mais quel engagement à la réduire, et à atteindre les 3 % d’ici à 2027, pouvons-nous donner aux générations qui nous suivent ?

L’année 2022 a été marquée par une très forte instabilité. Le contexte de crise a nécessité des dépenses imprévues, comme le bouclier énergétique, qui a protégé les Français de la hausse colossale des prix de l’énergie. Ces mesures d’urgence ont entraîné une augmentation de la dépense de près de 21 milliards par rapport à la loi de finances initiale. Nous maintenons cependant résolument notre engagement à ramener la dépense publique à 53,2 % du PIB au cours du quinquennat. Le budget pour 2023 prévoit une baisse des dépenses de l’État et de ses opérateurs de 2,6 % en volume. Pouvez-vous préciser l’ampleur de la maîtrise de la dépense par sous-secteur d’administration publique ?

Entre 2012 et 2017, les dotations générales de fonctionnement aux collectivités territoriales ont drastiquement baissé. Depuis 2017, notre majorité soutient les collectivités et a augmenté leur niveau de dotation. Pendant la crise sanitaire, nous avons pris de nombreuses mesures afin de les aider et, dès cette année, nous leur avons apporté notre soutien dans le cadre du PLFR. La Banque postale vient d’annoncer que la capacité d’autofinancement des collectivités territoriales ne devrait baisser que de 4 % en 2022, mais ce résultat encourageant peut cacher de très grandes disparités. Seriez-vous ouverts à un dispositif d’aide ciblée pour les collectivités les plus touchées ?

Vous proposez de reconduire le bouclier tarifaire, dispositif massif et efficace, en contenant à 15 % l’augmentation des prix de l’énergie. Pour les ménages les plus modestes, une revalorisation du montant du chèque énergie est envisagée. Pouvez-vous nous préciser par le biais de quel texte financier et à quelle hauteur ?

Enfin, monsieur le ministre de l’économie et des finances, pouvez-vous préciser le montant des reports de crédits de 2022 à 2023 ? Est-il possible qu’y figurent ceux destinés à protéger les entreprises dans le cadre du dispositif d’aide aux énergo-intensifs, qui, comme vous l’avez dit, n’a pas vraiment fonctionné jusqu’à présent ? Quelles sont les perspectives d’une prolongation du mécanisme en 2023, au-delà des crédits votés en 2022 ?

M. Bruno Le Maire, ministre. En ce qui concerne nos prévisions, monsieur le président, personne n’a la prétention de détenir la vérité révélée dans cette période de grande incertitude, et certainement pas moi. Je ne mésestime pas le risque que la situation en Ukraine et le contexte géopolitique se dégradent encore et que l’effet sur les prix de l’énergie en soit encore plus fort. Mais notre scénario central est une situation géopolitique stable et où le stockage à près de 100 % de nos réserves de gaz, la diversification des approvisionnements à laquelle nous travaillons depuis plusieurs mois, le début de la sobriété énergétique et la réduction de la consommation devraient améliorer les choses sur le front de l’énergie.

Dans les prévisions de la Banque de France, le scénario central est une croissance à 0,5 % et il existe un autre scénario, à 0,8 %, se rapprochant du nôtre. Quant au scénario très négatif, il correspond à des conditions géopolitiques très dégradées, qui ne sont pas totalement improbables mais dont nous ne faisons pas, je le répète, notre scénario central. Voilà pourquoi je maintiens notre chiffre de croissance positif pour 2023.

Même chose pour l’inflation. J’avais dit qu’elle durerait quelques mois : oui, elle dure quelques mois à un niveau élevé. Pour la Banque de France, le référentiel est l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) européen ; si on retraduit ses chiffres selon l’indice des prix à la consommation (IPC) de l’INSEE, qui fait référence pour le PLF pour 2023, on retombe bien sur les 4,2 % retenus par le Gouvernement.

En ce qui concerne le « quoi qu’il en coûte », j’assume nos divergences sur le fond. Nous ciblons de plus en plus les dispositifs. La remise sur le carburant, qui concernait tous nos compatriotes, se termine à la fin de 2022 : les 30 centimes d’euro de réduction à la pompe dont nous bénéficions tous dans les stations-service françaises ont vocation à disparaître. Nous nous réservons la possibilité, si jamais les prix du pétrole devaient flamber à nouveau, de recourir à des dispositifs – ils sont prêts – qui cibleront uniquement les personnes qui travaillent.

De même, les prix du gaz et de l’électricité avaient été respectivement gelés et plafonnés à une augmentation de 4 % ; cette fois, nous laissons passer une hausse, afin d’anticiper leur évolution. Car si l’inflation reflue progressivement en 2023, nous voulons éviter un effet de second tour qui ferait que la France serait rattrapée par la patrouille parce qu’elle n’aurait pas ajusté ses dispositifs. C’est très important, même si c’est compliqué à expliquer.

En revanche, oui, il faut plus d’investissement dans la transition écologique, et je suis tout à fait prêt à ce que l’on réfléchisse à des rénovations globales dans le cadre de MaPrimeRénov’. Mais c’est justement en réduisant la voilure des dispositifs de protection, pour cibler ceux qui en ont le plus besoin, que nous contribuerons à dégager des marges de manœuvre.

S’agissant des baisses de recettes, je veux être très précis à propos de nos choix, qui sont responsables. Nous avons décidé, en écoutant les avis du Haut Conseil, de procéder en deux fois pour mettre fin à la CVAE ; je l’ai moi-même proposé au Président de la République et à la Première ministre, pour tenir compte de la situation des finances publiques. C’est plus responsable. La suppression de la CVAE sera utile à l’industrie, bénéficiera à 75 % à des PME et soulagera tout le tissu productif français. En revanche, nous avons accepté de décaler d’un an les mesures relatives à la fiscalité des transmissions, car cet engagement présidentiel, qui sera tenu, n’est pas la priorité absolue en une période où nous voulons d’abord relancer l’activité économique et défendre notre tissu industriel.

Concernant enfin les niches fiscales, nous sommes d’accord, et je suis prêt à en reparler. Nous pouvons faire plus et mieux. Voilà près de six ans que nous essayons, et cela vaut le coup de continuer à tenter, car il existe des marges de manœuvre en la matière – même si je ne citerais pas en premier le CIR, bien que ce soit la plus grosse niche, car il est important pour l’innovation – pour faire des économies sans affecter notre croissance ni pénaliser les entreprises.

À propos de la taxation, nous ne voulons pas demander des impôts supplémentaires à des entreprises qui créent des emplois, redistribuent des salaires et paient des impôts à l’étranger – l’audition du dirigeant de Total était éclairante de ce point de vue. Nous voulons simplement prélever des rentes que nous trouvons indues afin de financer le bouclier énergétique.

Enfin, concernant les retraites, vous abordez un débat politique majeur. C’est un autre point d’accord que j’ai avec vous et avec Philippe Martinez – une fois n’est pas coutume : les personnes de plus de 55 ans, que je n’appellerai pas des seniors car je ne vois pas très bien ce qu’elles ont de senior, qui ont de l’expérience, des qualifications, un savoir-faire à transmettre, doivent pouvoir travailler plus longtemps. Or, quand on décale l’âge légal de départ, cela amène mécaniquement ces personnes à continuer de travailler. Le taux d’emploi des « seniors » est de plus de 70 % en Allemagne et dans d’autres pays européens, contre un peu moins de 54 % en France : il y a quelque chose qui cloche. Nous nous privons de compétences et de savoir-faire utiles au pays. C’est un débat de société qui mérite d’être ouvert.

Enfin, j’indiquerai simplement à M. Cazeneuve que la réforme des retraites, dont le corollaire serait l’augmentation du taux d’activité et des richesses supplémentaires, pourrait se traduire par un gain de 0,2 point de croissance.

Notre stratégie pour maîtriser les finances publiques repose sur la croissance, les réformes structurelles et la réduction des dépenses publiques. Enfin, 1,5 milliard d’euros de crédits seront reportés de 2022 à 2023 pour financer les dépenses des entreprises les plus exposées à la concurrence et dont les factures énergétiques sont les plus élevées.

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Il est important de maintenir la dernière étape de la suppression de la taxe d’habitation. Un impôt dont l’essentiel de la population serait exonéré ne peut perdurer. Surtout, nous ne mettons pas fin à cet impôt pour avantager les 20 % de Français les plus riches, comme je l’entends très souvent, mais les 20 % les moins modestes, ceux dont le revenu fiscal de référence est supérieur à 29 000 euros par an.

Vous trouvez anormal que les bénéfices qui pourraient être retirés de la réforme des retraites financent l’éducation ou la transition écologique. Pourtant, c’est le contraire qui se produit aujourd’hui : l’argent que nous dépensons pour compenser des systèmes de retraite déficitaires manque à l’éducation ou à la transition écologique. Surtout, les moyens supplémentaires que dégagerait la réforme des retraites ne tiennent pas seulement aux économies réalisées mais aussi aux gains qui découleraient de la hausse du taux d’emploi – la hausse des cotisations mais aussi de la consommation améliorera les recettes fiscales.

Monsieur le rapporteur général, les dépenses de l’État baisseront de 2,6 % en volume. La dépense globale en volume diminuera de 1,5 % en 2023, dépenses d’urgence et de relance comprises. La baisse des dépenses de relance et d’urgence représente 8,8 milliards d’euros. Chaque ministère est invité à maîtriser ses dépenses, ce qui n’empêche pas d’augmenter les crédits lorsqu’il convient de financer des mesures prioritaires.

Concernant le budget de la sécurité sociale, les dépenses liées à la crise sanitaire devraient diminuer – ce qui améliorera le déficit de la sécurité sociale en 2023 par rapport à 2022. Le déficit de la branche maladie s’amoindrit grâce à la sortie de la phase aiguë de l’épidémie.

Quant aux collectivités locales, le projet de loi de programmation des finances publiques prévoit de réduire leurs dépenses de fonctionnement de 0,5 % en volume par an.

J’en viens aux reports de crédits. La prévision d’exécution permettra d’affiner les chiffres, en janvier et février. Nous souhaitons limiter le volume des reports par rapport aux dernières années. Ils avaient été très importants en plein cœur de la crise épidémique pour, « quoi qu’il en coûte », soutenir au mieux notre économie et nos concitoyens. Bien évidemment, les crédits destinés à financer les aides aux entreprises énergo-intensives qui n’auraient pas été utilisés en 2022 pourront être reportés en 2023. L’article 36 du projet de loi de finances prévoit une liste de programmes autorisés à dépasser la limite de report de 3 % prévue par l’article 15 de la loi organique relative aux lois de finances.

Pour ce qui est des collectivités locales, fin 2021, leur situation financière était très bonne. Ainsi, leur capacité d’autofinancement était supérieure à celle d’avant la pandémie et leur trésorerie comptait 15 milliards d’euros en plus, grâce à l’État qui a apporté un soutien direct à hauteur de 10 milliards d’euros aux collectivités ainsi qu’un soutien indirect tout aussi massif. Leur situation est plus floue en 2022. Les dépenses augmentent pour l’énergie, l’alimentation mais aussi les ressources humaines du fait de la hausse du point d’indice. En revanche, les recettes grossissent, elles aussi, grâce aux impôts fonciers et à la TVA. Nous avions annoncé aux collectivités locales – régions, départements, EPCI – une hausse de leurs recettes de 2,89 % pour l’année 2022. Les recettes de TVA étant plus importantes que prévu, la hausse des recettes est revalorisée à 9,6 %, plus du triple. Le 20 octobre, les régions, les départements et les EPCI recevront 2,5 milliards de plus qu’annoncé – un milliard pour les régions, un milliard pour les départements, 500 millions pour les EPCI. La fiscalité locale progresse aussi, en raison de l’inflation et de la décision de certaines collectivités de revaloriser leurs taux. Même si la capacité d’autofinancement s’est dégradée par rapport à 2021, elle reste supérieure à celle de fin 2019.

Cela ne veut pas dire que tout va bien pour tout le monde et nous devons poursuivre notre action. Bruno Le Maire agit au niveau européen pour « refroidir » les prix de l’énergie. Nous devrons également accompagner les collectivités les plus fragiles : c’est pour cette raison que vous avez voté cet été, à l’initiative de Christine Pires Beaune, une enveloppe de 430 millions destinée aux communes fragilisées par l’inflation. Le décret sortira dans les prochains jours et les premiers acomptes seront versés aux collectivités en novembre – 25 % des communes pourront en bénéficier. Ainsi, jusqu’à 70 % de la hausse des dépenses d’énergie et d’alimentation et jusqu’à 50 % de la hausse des dépenses salariales seront compensées par l’État. Cela ne signifie pas que l’État pourra compenser, en toutes circonstances, les hausses de dépenses contraintes des collectivités locales. Nous n’en avons pas les moyens, aussi devons-nous accompagner celles qui sont le plus en difficulté.

M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Ce budget s’inscrit dans un contexte politique et économique inédit. Pour répondre à la singularité de la situation, vous avez convié les responsables parlementaires de tous les groupes aux dialogues de Bercy et nous vous en remercions. D’autre part, l’environnement international nous impose de relever des défis gigantesques – la crise énergétique nous le rappelle chaque jour.

Plusieurs solutions existent. Vous auriez pu aggraver l’endettement, augmenter les impôts ou diminuer les prestations. Vous avez préféré accroître le temps de travail en le rémunérant mieux tout en maîtrisant nos finances publiques, comme en témoigne votre projet de loi de finances. Vous avez également prévu de baisser massivement les impôts puisque plus de 6 milliards d’euros ne seront pas prélevés au titre de l’impôt sur le revenu.

Vous accordez la priorité au réarmement régalien de l’État et au financement des dépenses d’avenir – les professeurs de l’éducation nationale pourront ainsi gagner 2 000 euros dès le début de leur carrière.

Reconnaissons cependant que nos finances publiques sont dans un mauvais état. Si nous prévoyons de revenir sous la barre des 3 % de déficit en 2027, nous serons le dernier grand pays de la zone euro à y parvenir. Notre endettement approche les 3 000 milliards. C’est pour cette raison que vous avez décidé d’augmenter la quantité de travail, de réduire les impôts, de libérer l’activité tout en maîtrisant les finances publiques.

Concernant le budget vert, comment serait-il possible d’augmenter le volume des dépenses analysées dans le rapport relatif aux effets du budget général sur l’environnement ? Pourrait-il être étendu aux collectivités territoriales ?

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). À force d’écrire des romans ou d’être vous-même un personnage houellebecquien, je me demande, monsieur le ministre, si votre perception de la réalité et des fantasmes n’est pas gravement entamée. Vous vivez dans un monde qui semble contrôlé et vous donnez à l’irrationalité de votre politique un semblant de rationalité qui ne trompe personne. En vérité, quand on voit les hypothèses à partir desquelles votre politique se forme et les réponses que vous apportez, vous apparaissez comme le capitaine d’un navire pris dans la tempête, qui aurait perdu ses voiles et son gouvernail. L’horizon ne se dégagera pas de lui-même ! Il appartient aux hommes politiques et aux dirigeants de prendre leurs responsabilités et d’assumer des décisions qui cassent la fatalité.

Vous présentez un budget de soumission à la mondialisation, à l’inflation, à la guerre. Vous êtes victime d’un incendie que vous avez vous-même allumé mais que vous ne savez plus éteindre. Vous ne vous attaquez pas aux causes de l’inflation, en particulier de l’inflation énergétique. Votre bouclier tarifaire n’est rien de plus que la subvention de la spéculation par les contribuables. Vous financez par l’impôt des Français les marges ahurissantes, infondées, injustes, spéculatives des énergéticiens et vous présentez la récupération d’un surprofit qui n’aurait pas lieu d’être comme une action politique. Mais vous ne faites rien, à part rattraper un argent qui n’a jamais appartenu à ceux à qui vous le reprenez !

Vous prétendez chercher de l’argent mais il n’y a jamais eu autant de bénéfices qui devraient être taxés à leur juste proportion. Il faut rétablir la justice fiscale. Vous ne prenez aucune mesure pour soutenir les consommateurs de fioul comme si un drame social ne se jouait pas, en ce moment, en France ! Vous restez tout aussi passif face à la flambée du prix du bois alors que c’est votre gouvernement qui a incité les gens à se chauffer au bois. Ils ne s’en sortent plus ! Et je ne parle pas des sujets tabous ! Il ne faut pas toucher aux 26 milliards de l’Union européenne, ni au déficit public et encore moins à l’immigration ! Il est certain que, dès lors que vous sortez 100 milliards de dépenses publiques de l’action politique, vous ne pouvez que subir ! Les Français se demandent quand vous reprendrez le contrôle de la situation. Arrêtez de faire payer vos erreurs aux contribuables !

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Voilà un budget inquiétant : la hausse des prix est plus forte et la croissance plus faible que vous ne l’aviez prévu. Le Haut Conseil des finances publiques a confirmé la fragilité de vos chiffres. Vos discours ne sont guère plus rassurants : le 8 juin vous affirmiez que le pic de l’inflation avait été atteint avant de reconnaître, fin août, que la situation ne s’améliorerait pas avant 2023 ; M. Véran a même découvert que le pic s’était transformé en un « plateau haut de l’inflation ». Bref, vous vous êtes lourdement trompés !

La crise est-elle derrière ou devant nous ? Vous vouliez nous faire croire, cet été, qu’elle se terminerait bien vite et qu’il était inutile d’augmenter les salaires ou les minima sociaux parce qu’une prime suffirait largement. Il n’était pas davantage nécessaire, bien évidemment, de bloquer les prix ou de taxer les superprofits puisque cet enrichissement indécent n’était pas censé perdurer.

Or, à présent que la crise semble devant nous, qu’allez-vous faire ? Il faut soulager les classes populaires et moyennes, qui se saignent à la pompe et au supermarché. Les plus fortunés doivent contribuer au budget de la nation en s’acquittant de l’impôt sur la fortune, qu’il convient de rétablir. Sinon, expliquez-nous comment fonctionne ce ruissellement dont vous nous parlez tant ?

Si la crise est devant nous, nous avons impérativement besoin d’une taxe sur les superprofits, ne serait-ce que pour équilibrer les comptes de la nation, auxquels vous semblez attacher une certaine importance.

Si la crise est devant nous, mettrez-vous enfin entre parenthèses l’absurde objectif de réduire les déficits publics ? J’y vois, non pas une réforme structurelle mais la destruction de nos biens communs qui seuls nous permettent d’affronter les crises économique, écologique, sociale, sanitaire.

D’autres situations sont très préoccupantes. Je pense en particulier aux bailleurs sociaux. L’explosion des charges conduira à des situations dramatiques.

Quant à la réforme des retraites, je sais qu’il ne faut pas revenir sur une parole mais encore faut-il savoir de laquelle il s’agit. Le Président de la République ne nous expliquait-il pas en 2017 qu’il n’était pas nécessaire de reculer l’âge de départ à la retraire ? Il vaut mieux abandonner sa parole que les Français qui ont droit au respect et au repos.

Mme Véronique Louwagie (LR). Monsieur Le Maire, vous êtes bien le seul à croire à votre scénario. Tous les instituts, le Haut Conseil des finances publiques en tête, considèrent que ces hypothèses sont improbables. Cela étant, en dépit de ces chiffres très optimistes, vous ne parvenez pas à réduire notre déficit puisque vous l’évaluez à 5 %, ce qui reste très élevé. Les taux augmentent et nous devrons emprunter 270 milliards pour financer le remboursement de la dette, probablement à 2,5 % – ce qui est bien supérieur au taux de la dette.

Vous faites de la maîtrise des dépenses publiques un totem. Or les dépenses courantes augmenteront de 62 milliards d’euros l’année prochaine. Pierre Moscovici considère que le redressement des comptes publics n’est pas assuré entre 2022 et 2023. Votre trajectoire suit celles des dépenses publiques du quinquennat précédent : 140 milliards en plus. Vous auriez pu fixer un nouveau cap, donner une nouvelle impulsion. Le « quoi qu’il en coûte » est loin d’être derrière nous. Votre présentation est décevante, inquiétante même.

Concernant le bouclier énergétique, son maintien serait ramené à 16 milliards d’euros grâce à la récupération par l’État d’une partie de la rente des énergéticiens. Pourriez-vous préciser ces chiffres ?

Mme Marina Ferrari (Dem). Ces deux textes ne sont pas placés sous le signe de la soumission ou de la victimisation mais de la responsabilité, de la stabilité et de la protection. Ils nous invitent à poursuivre la politique engagée depuis quelques années pour protéger les Français, accélérer la transition énergétique, valoriser les entreprises et favoriser le plein emploi. Les perspectives pour la croissance fin 2022 sont d’ailleurs encourageantes. Certaines pourraient la trouver insuffisante pour 2023 mais elle reste positive, ce qui est une prouesse dans le contexte actuel. J’y vois les fruits des mesures prises au cours du précédent quinquennat.

Ce PLF prévoit de renforcer les missions régaliennes de l’État. Des budgets importants sont alloués à la justice, la santé, la sécurité et l’éducation. Au-delà des mesures de protection des Français, de nombreux dispositifs permettront de lutter contre la grande pauvreté. Ainsi, la solidarité à la source est un chantier très attendu par les Français.

L’engagement de l’État envers les collectivités territoriales reste fort, comme en témoigne le maintien des dotations. L’évolution des dépenses de fonctionnement est limitée à un rythme inférieur de 0,5 point par rapport à l’inflation nationale.

Nous approuvons la suppression de la CVAE pour soutenir notre économie. Le fonds vert de 1,5 milliard d’euros permettra d’accompagner les collectivités locales dans la transition écologique mais nous nous demandons comment il s’articulera avec la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL). Espérons enfin que les collectivités locales retrouveront leur autonomie fiscale dans certains secteurs.

L’article 21 du projet de loi de programmation des finances publiques prévoit un dispositif pérenne d’évaluation de la qualité de l’action publique. Comment s’articulera-t-il avec le travail parlementaire ?

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Concernant les retraites, le débat n’a pas été tranché. J’ai voté pour Emmanuel Macron au deuxième tour, comme des millions de personnes, mais pas pour qu’il mène cette réforme des retraites. J’aurai d’ailleurs la bonté de ne pas vous rappeler le score du Président de la République au premier tour. Qu’est-ce qu’un délai raisonnable, monsieur le ministre ? Réformer les retraites en déposant un amendement au projet de loi de financement de la sécurité sociale remplit-il ce critère ? Je suppose que vous avez chiffré cette réforme : vous fera-t-elle économiser plus ou moins de 8 milliards d’euros, qui correspondent à la suppression de la CVAE ?

S’agissant des entreprises électro-intensives et exportatrices, vous annoncez un rehaussement du plafond des aides jusqu’à 100 millions d’euros : vous engagez-vous à publier la liste des entreprises bénéficiaires ?

Le 30 juin 2023, le tarif réglementé prendra fin : que deviendra le bouclier tarifaire à partir du 1er juillet 2023 ?

L’article 7 du projet de loi de programmation des finances publiques prévoit que les dépenses fiscales nouvellement créées devront être évaluées avant leur éventuelle reconduction. Pourriez-vous nous fournir les résultats précis de l’évaluation, en termes d’emplois, d’investissement, de relocalisation, de la suppression des 10 milliards de CVAE avant d’aller plus loin ?

Enfin, les collectivités territoriales sont des acteurs à part entière et protègent nos concitoyens au même titre que l’État. Nous n’approuvons pas la politique d’affaiblissement du budget de l’État que vous menez depuis cinq ans, après avoir supprimé 50 milliards de ressources, mais nous pourrions au moins nous entendre pour instaurer des dispositifs en faveur des collectivités. J’ai lu dans la presse qu’enfin, la dotation forfaitaire des communes ne serait plus écrêtée pour financer la progression des dotations de péréquation – dotation de solidarité urbaine ou dotation de solidarité rurale. Je suis prête à y travailler avec vous.

M. François Jolivet (HOR). Saluons tout d’abord les dialogues de Bercy qui sont une excellente initiative.

Ce PLF semble réussir à protéger le pouvoir d’achat des Français face à l’inflation tout en contenant la dette publique afin de ne pas compromettre les ressources des générations futures.

Les intervenants des dialogues de Bercy ont ciblé les critiques dont fait l’objet MaPrimRénov’, les bénéficiaires souhaitant des rénovations plus complètes. Que deviendra la démarche monogeste du changement de pompe à chaleur, destiné le plus souvent à changer les chaudières au fioul qui ne sont plus réparables ?

Vous prévoyez d’installer un fonds vert doté d’1,5 milliard pour accélérer la transition écologique dans les territoires. Quelles en seront les conditions d’accès ?

Le nouveau dispositif de l’assurance récolte prévoit de doubler le plafond de la taxe affectée au fonds national de gestion des risques agricoles. Quels en seront les montants et les conditions d’utilisation ?

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Le cadre budgétaire que vous proposez n’est pas adapté à la situation. Vous prévoyez un déficit budgétaire à 5 % du PIB. Vous supprimez en deux étapes la CVAE, nous privant ainsi de 4 milliards de recettes fiscales. Vous refusez de taxer les surprofits alors que nous avons besoin de ressources pour financer les besoins sociaux non couverts, en particulier dans l’éducation nationale ou les hôpitaux. Ainsi, 150 lits sont encore fermés à l’hôpital Saint-Antoine en raison du manque d’infirmiers.

Vous dites ponctionner la rente des énergéticiens mais, pour le moment, seuls les producteurs d’énergies renouvelables reversent une partie de leur manne. Quelles mesures prendrez-vous pour que les producteurs d’énergie fossile contribuent à l’effort ?

L’enveloppe allouée à la transition écologique, notamment la rénovation thermique, est très insuffisante. Un homme politique doit tenir ses promesses, avez-vous dit. Où sont les 10 milliards par an annoncés à Aubervilliers, le 17 mars dernier, par le candidat Emmanuel Macron pour accompagner la transition écologique. En dehors de ceux du programme 145, les crédits affectés à l’écologie stagnent. Ils augmentent en apparence de 2,3 milliards mais ceux dédiés à l’écologie dans le plan de relance baissent de 2,1 milliards. Le budget de MaPrimRénov’ n’augmente que de 500 millions d’euros pour atteindre la modique somme de 2,5 milliards alors que la mission que vous avez confiée à Olivier Sichel, relative à la réhabilitation des logements privés, évalue les besoins entre 8,8 et 10 milliards par an. Vous annoncez le renforcement du dispositif de rénovation globale MaPrimRénov’Sérénité mais quel montant prévoyez-vous d’y affecter ?

M. Nicolas Sansu (GDR). Dans un contexte de crises majeures – guerre en Ukraine, crise sociale, crise climatique, crise démocratique –, vous faites une faute politique en restant dans le cadre des règles libérales européennes avec la réforme des retraites ou le massacre de l’assurance chômage. Les conséquences sont terribles pour les peuples qui se tournent, en désespoir de cause, vers les partis d’extrême droite, comme cela s’est produit chez nos voisins.

Le PLF pour 2023 confirme le désarmement fiscal en préférant l’impôt indirect à l’impôt direct, pourtant plus juste, ou l’impôt proportionnel à l’impôt progressif, en profitant de la richesse nationale pour rémunérer encore davantage le capital plutôt que le travail.

Vous ne tenez pas compte des crises qui nous assaillent. Où est le grand plan de transition écologique qui aurait dû échapper aux calculs de Maastricht ? Où est la grande réforme du marché de l’énergie qui verrait enfin naître un véritable service public de l’énergie, seul capable de mettre fin aux rentes insupportables ? Les 45 milliards déboursés pour financer le bouclier tarifaire se retrouveront dans les profits de Total demain. L’objectif doit être de casser la rente, pas seulement de la compenser. Les producteurs d’énergies renouvelables paient 19 milliards, la contribution au service public d’électricité (CSPE) 9 milliards et la compagnie nationale du Rhône un milliard, sur ces 45 milliards. La taxation des superprofits ne serait pas seulement une mesure de justice fiscale mais une nécessité. Vous avez tort de ne pas répondre à une situation exceptionnelle par des mesures exceptionnelles.

Enfin, où est le soutien aux collectivités territoriales ? Vos annonces sont indigentes. Les 430 millions issus de la LFR pour 2022 ne régleront rien pour 2022 ni pour 2023. Les tarifs réglementés de vente (TRV) ne s’appliquent plus qu’aux très petites communes. C’est une faute politique que d’abandonner les collectivités territoriales, en particulier les communes, qui sont le creuset de notre République et de ses valeurs.

M. Charles de Courson (LIOT). Malgré un cadrage macroéconomique trop optimiste, le déficit effectif est stable à 5 %, niveau parmi les plus élevés de nos partenaires européens. Le poids de la dette publique est quasiment stable en 2023, et ce jusqu’en 2027, et le taux de prélèvements obligatoires, à 44,7 % du PIB, se situe à un niveau encore plus élevé qu’en 2021, où il était de 44,3 %. Cette situation s’explique par le fait qu’il n’y a pratiquement pas d’économies réelles. L’évolution des dépenses publiques n’est pas une baisse de 1,5 % en volume, comme M. le ministre Attal vient de l’indiquer, mais, d’après le Haut Conseil des finances publiques, une hausse de 0,7 %. Vous vous référez en effet à l’indice de la consommation plutôt qu’à l’indice des prix implicites du PIB, et avez baissé massivement les recettes – de 13,7 milliards, selon le Haut Conseil. Quel est le montant des économies prévues par le Gouvernement dans ce projet de loi de finances ? Êtes-vous ouverts, comme vous l’avez indiqué dans le cadre des dialogues de Bercy, à d’éventuels amendements d’économies ?

S’agissant des mesures pour les ménages en matière d’énergie, vous persistez à prévoir des mesures générales et uniformes, mais M. Le Maire s’est déclaré tout à l’heure ouvert à une évolution. Êtes-vous favorables à des amendements qui permettraient de concentrer les aides sur ceux de nos concitoyens qui en ont le plus besoin ?

Vous cassez le lien entre entreprises et collectivités territoriales en supprimant la CVAE en deux ans. Une solution pour la maintenir serait un dégrèvement, plutôt que le dispositif que vous nous proposez. Êtes-vous ouverts à un tel dégrèvement ?

Quel est le coût du nouveau décret pour les entreprises électro-intensives ?

Où en êtes-vous de l’éventuel prélèvement exceptionnel sur les bénéfices générés par les entreprises, notamment dans les domaines de l’énergie et des transports ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Monsieur Lefèvre, oui nous travaillons à l’extension du budget vert, et tout ce qui permettra de l’étendre, de le développer ou de lui donner plus d’ampleur recevra un accueil favorable. Nous l’avons déjà étendu, pour 2023, à France 2030 et ses 30 milliards d’euros de crédits, aux transferts à l’Union européenne et aux dotations de soutien à l’investissement local. Certaines communes, y compris de très grandes, comme Paris, se sont déjà inscrites dans cette perspective du budget vert. C’est une dynamique qu’il faut encourager et développer.

Monsieur Tanguy, vous avez un rapport compliqué à la vérité. Vous parlez de soumission matin, midi et soir ; or, en la matière, vous en connaissez un rayon ! Soumission à Vladimir Poutine, à la Russie, à la violence de l’armée russe, refus des sanctions contre la Russie : en matière de soumission, vous parlez en expert.

Pour ce qui est de la justice fiscale, je rappelle que le seul État qui s’oppose à la mise en place d’un impôt minimum de 15 % pour éviter l’évasion et l’optimisation fiscales est la Hongrie de M. Orban, que Mme Le Pen soutient matin, midi et soir.

Quant au fioul, vous avez sans doute oublié que vous avez voté 230 millions de crédits de soutien aux ménages qui se chauffent avec ce combustible.

Avoir un rapport aussi compliqué à la vérité, c’est dommage pour un membre de la commission des finances !

Monsieur Guiraud, le plus difficile est devant nous, je l’ai dit au mois de juin ; je ne crois donc pas avoir trompé les Français sur la réalité de la situation économique ni sur la réponse que nous avons apportée. Nous sommes le seul pays de la zone euro qui a indexé sur l’inflation le salaire minimum, l’intégralité des prestations sociales et l’intégralité des retraites : protection. Le seul pays qui a mis en place un bouclier sur le gaz et sur l’énergie : protection. Le seul qui a instauré une remise sur le carburant : protection, encore, de nos compatriotes, notamment des plus modestes. Avec la remise supplémentaire de 20 centimes d’euro que nous avons obtenue de Total, le prix à la pompe affiche 50 centimes en moins ; nos compatriotes préfèrent que cette réduction aille dans leur poche plutôt que dans celle du Trésor public. Nous avons également obtenu des banques un plafonnement à 2 % des frais bancaires. Pour les plus modestes, nous avons obtenu que le niveau maximal de frais bancaires mensuels passe de 3 euros à 1 euro. Nous avons obtenu également un plafonnement de la part des assureurs et des remises de 750 euros par container pour les transporteurs maritimes.

Oui, nous nous sommes battus depuis des mois pour que la facture soit la moins lourde possible pour les classes moyennes et pour les ménages les plus modestes.

Pour ce qui est, enfin, des retraites, vous évoquez 2017, mais permettez-moi de vous rappeler que nous sommes en 2022, et que le Président de la République a gagné l’élection présidentielle. Lorsqu’il était candidat, il a présenté son projet, dans lequel se trouvait une réforme des retraites qui comportait une mesure d’âge à 65 ans et une accélération du nombre de trimestres à cotiser. Ayant gagné cette élection, le Président de la République est donc fondé à mettre en œuvre le projet pour lequel il a été choisi par nos compatriotes.

Madame Louwagie, nous ne sommes pas les seuls à défendre cette prévision de croissance pour 2023, que le Haut Conseil lui-même dit ambitieuse, mais crédible. Depuis à peu près cinq ans qu’on me répète que toutes nos prévisions de croissance sont trop ambitieuses, je constate que la croissance française se tient, qu’elle est solide. Je crois dans les forces de la France et dans la capacité de l’économie française à dégager des marges de croissance, parce que nos entreprises continuent à investir, parce que nous voulons les protéger contre le risque énergétique, parce que nous avons préservé la demande et parce qu’un taux d’épargne qui reste élevé doit permettre, le cas échéant, de soutenir la demande.

Pour ce qui est, enfin, du gain que nous faisons sur les énergies renouvelables, si le bouclier énergétique représente bien 16 milliards d’euros, le gain lié aux ENR, les énergies renouvelables, est de 19 milliards d’euros pour 2023. À tous ceux qui diront que nous ne taxons pas assez, je ferai observer que 19 milliards d’euros, ce ne sont pas des clopinettes : c’est beaucoup d’argent pour financer notre modèle de protection, notre bouclier énergétique, qui résulte précisément du prélèvement sur les énergéticiens.

Madame Pires Beaune, vous n’avez pas eu la cruauté de rappeler le score d’Emmanuel Macron au premier tour de l’élection présidentielle, je l’aurai moi-même : il a obtenu 28 % – Anne Hidalgo, 1,7 % – et il a remporté le second tour de cette élection. Il me semble donc que l’un est mieux fondé que l’autre, en droit comme politiquement, à mettre en œuvre le projet pour lequel il a été élu.

Quant aux entreprises bénéficiaires de la CVAE, il s’agit à 75 % de PME et à 25 % d’entreprises du secteur de l’industrie, c’est-à-dire beaucoup plus que les 11 % que représente l’industrie dans la richesse nationale. Il me semble donc qu’il s’agit d’une bonne mesure, puisqu’elle bénéficiera principalement aux entreprises industrielles.

Pour ce qui est, enfin, de la suppression des 10 milliards d’euros d’impôt de production, je constate que, pour la première fois depuis vingt ans, le solde net d’emplois industriels sur cinq ans est positif. Ce n’est pas un miracle – il ne s’agit que de 17 000 emplois, une fois prises en compte les destructions d’emplois liées à la crise du covid –, mais nous sommes dans la bonne direction. Pour la première fois depuis de nombreuses années, nous mettons fin à l’hémorragie de l’emploi industriel – plus d’un million d’emplois industriels détruits – et recréons enfin des emplois dans ce secteur. L’année dernière, on a ouvert plus de sites industriels qu’on n’en a fermés ; des investissements majeurs ont été faits, tel celui de Global Foundries à Crolles, près de Grenoble, avec STMicroelectronics, qui permet à notre pays d’être leader dans le domaine des semi-conducteurs. Quand on tient le bon bout, il ne faut pas le lâcher.

Je suis prêt à ce que nous rendions des comptes sur ces choix. S’il y avait eu des destructions d’emplois industriels par dizaines de milliers au cours des années passées, j’aurais bien été obligé de constater que ce n’était pas la bonne politique, mais dès lors que le solde est positif, je considère que nous sommes dans la bonne direction.

Par ailleurs, et je pense que vous partagez cette ambition, la reconquête industrielle n’est pas seulement un sujet économique. Certes, elle crée des emplois qualifiés et bien rémunérés, et permet de répondre aux attentes de nombreux jeunes, mais elle est aussi un enjeu politique, car l’industrie est une part de la culture économique française. De fait, l’hémorragie industrielle se traduit aussi par des désastres politiques. Reconquérir l’emploi industriel est donc pour moi une priorité vitale. Par respect pour la culture industrielle qui a toujours fait la force de notre nation, je ne ménagerai pas mes efforts : outre la baisse des impôts de production, nous ferons tout ce qui est nécessaire pour réussir cette reconquête, que ce soit en matière de formation, de qualification, de CFA, d’installation des usines ou d’accompagnement de ces dernières face à la transition énergétique et à l’augmentation des prix.

Madame Sas, je vous confirme que les recettes fiscales représentent 19 milliards d’euros et qu’elles s’appliquent principalement aux énergies renouvelables. C’est une question de justice. Durant des années, nous avons garanti aux énergéticiens – Total, Engie, EDF – un certain prix en échange de leurs investissements dans le solaire ou dans les éoliennes, parce qu’ils étaient coûteux et risqués. Des milliards d’euros ont ainsi financé le manque à gagner de ces énergéticiens, il est donc normal que, lorsque le prix de l’électricité explose bien au-dessus de ce prix garanti, ceux-ci nous reversent la différence. Elle représente près de 20 milliards d’euros de recettes, ce qui est considérable. Cette mesure est donc efficace et juste, car les énergéticiens n’ont fait aucun investissement de plus l’année où ils ont touché ces milliards de bénéfices ; ils ont bénéficié d’une rente et nous la récupérons.

Il y a là un vrai débat politique, tout à fait noble et intéressant, entre ceux qui veulent taxer toutes les entreprises qui font des bénéfices, sous couvert d’une « taxe sur les superprofits », et ceux qui veulent récupérer une rente. J’ai vu la proposition qui vise à taxer toutes les entreprises réalisant plus de 750 millions d’euros de chiffre d’affaires et des bénéfices : cela s’appelle une taxe universelle sur toutes les entreprises et ce n’est pas ce que nous voulons. Nous voulons récupérer les rentes. Nous sommes contre les rentes, les bénéfices indus et les profits que des entreprises peuvent faire alors qu’elles n’ont pas investi et ne font que bénéficier d’une explosion conjoncturelle des prix de l’électricité. Nous les taxons donc à hauteur de près de 20 milliards d’euros

Nous ne taxons pas la production d’énergie fossile tout simplement parce que la France ne produit plus ni gaz ni pétrole : il n’y a donc rien à taxer. On peut, en revanche, taxer le raffinage – il y a là une vraie question, sur la base de la proposition européenne, et nous aurons l’occasion d’en parler. Quant à la production de pétrole de Total, elle est taxée dans les pays de résidence : c’est le principe de l’établissement stable en matière fiscale, qu’il est bon de respecter.

Quant à la rénovation globale, ses coûts vertigineux en font un débat compliqué. Faut-il concentrer les aides sur un nombre plus restreint de personnes pour favoriser des rénovations globales, ou maintenir un dispositif très large qui donne lieu à plus de gestes individuels, ce qui soutient aussi les activités du bâtiment et l’emploi ? Nous sommes prêts à avoir ce débat car il est utile pour notre pays.

Monsieur Sansu, vous évoquez un désarmement fiscal, mais avec un taux de prélèvements obligatoires qui reste le deuxième de tous les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), on ne peut pas véritablement dire que ce soit le cas et je ne pense pas que ce soit la perception de nos contribuables.

Quant à la part de rémunération du capital et du travail, c’est une fierté française que nous soyons le pays développé qui a le mieux maintenu la part de rémunération du travail par rapport au capital, et nous avons tout intérêt à rester dans cette direction.

À propos de la réforme du marché européen de l’énergie, je vous confirme notre détermination, qui est celle du Président de la République, de la Première ministre et de toute la majorité, à porter ce débat. Voilà un an que nous demandons le découplage des prix du gaz et de l’électricité, car ce couplage est une aberration économique et environnementale. Je me suis entretenu au téléphone à plusieurs reprises à ce sujet avec mon homologue allemand, Robert Habeck, et nous continuerons à nous battre en ce sens. Cela me paraît absolument indispensable.

Enfin, monsieur de Courson, les amendements proposant des économies recevront, bien entendu, un accueil favorable de notre part.

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Monsieur Lefèvre, le budget vert sera présenté dans les prochains jours. Christophe Béchu, Caroline Cayeux et moi-même travaillons avec les associations d’élus à l’adoption d’un référentiel national de budget vert, ce qui nous permettra de faire la vérité quant au prix de ce budget pour l’État comme pour les collectivités locales. Bercy a connaissance de l’existence d’un tel budget dans une dizaine de collectivités, mais elles sont probablement beaucoup plus nombreuses à l’avoir adopté. C’est le cas, par exemple, d’Issy-les-Moulineaux – chez moi –, qui l’a fait très tôt. Il serait bon de systématiser cette pratique, avec un cadre global afin de parler de la même chose.

Madame Louwagie, le rythme de réduction de la dépense publique prévu par le programme de stabilité, qui s’inscrit très concrètement dans la loi de programmation des finances publique, est l’effort le plus soutenu depuis vingt ans – le rythme de réduction est deux fois supérieur à ce qu’il était durant le quinquennat précédent.

Vous critiquez la marche prévue pour l’année 2023, mais le total s’élève, pour tous les ministères, à 22 milliards d’euros – et non pas 62 milliards, comme je l’ai entendu dire. On peut critiquer ce projet, mais il faut alors nous dire quoi retirer. Les 3 milliards d’euros supplémentaires pour la défense, alors qu’il faut évidemment continuer à la réarmer ? Le 1,4 milliard destiné à nos forces de sécurité, nos forces de police ? Les 3,7 milliards pour l’éducation, qui nous permettent de revaloriser la rémunération des enseignants ? Les 6 milliards en plus pour le travail, qui nous permettent d’atteindre le chiffre d’un million d’apprentis ? Les budgets pour l’écologie, qui nous permettent d’accélérer la transition ? Il y a des choix à faire, mais je suis sûr que vous pourrez, dans le cadre du débat, porter des propositions d’économies structurelles et que nous travaillerons ensemble à cet objectif.

Madame Ferrari, l’article 21 de la loi de programmation des finances publiques fait suite immédiatement aux dialogues de Bercy. Durant la deuxième séance de ces dialogues, nous avons eu un débat assez vigoureux sur la question de la qualité de la dépense publique, dans lequel est intervenu M. Tanguy. A notamment été cité l’exemple des dépenses de logement – on dépense beaucoup plus en France pour le logement que chez nos voisins européens, pour une qualité qui n’est pas vraiment au rendez-vous. Je me suis déclaré très ouvert à l’idée d’inscrire, dans la partie consacrée à la gouvernance de la programmation des finances publiques, un dispositif permettant d’évaluer la qualité de la dépense publique. Nous avons donc intégré dans la LPFP une accroche permettant d’avoir ce débat au Parlement, afin d’enrichir le dispositif. Contrairement donc à ce qu’a pu dire M. Tanguy, les dialogues de Bercy n’étaient pas seulement de la « com’ ».

Nous proposons donc un cadre et, dans les débats parlementaires que nous aurons, d’établir ensemble une liste de politiques publiques nécessitant une évaluation qualitative de la dépense publique. Ces évaluations auront lieu durant l’hiver et les rapports seront remis concomitamment au dépôt du projet de loi de règlement pour alimenter les travaux du Printemps de l’évaluation, eux-mêmes pouvant ensuite alimenter le prochain PLF. Cet exercice, qui sera répété chaque année, pose une nouvelle brique de notre gouvernance des finances publiques.

Madame Pires Beaune, je suis très ouvert à ce que nous travaillions ensemble au dispositif que nous avons annoncé pour abonder les dotations de solidarité urbaine et de solidarité rurale. Le rapporteur général voulait, lui aussi, proposer un mécanisme permettant de cibler cela le mieux possible.

Monsieur Jolivet, le fonds vert visera notamment à soutenir la performance environnementale des collectivités, en matière notamment de rénovation des bâtiments publics ou de modernisation de l’éclairage public, l’adaptation des territoires au changement climatique du point de vue des risques naturels et de la renaturation, et l’amélioration du cadre de vie. Il portera également à 150 millions d’euros le financement de la stratégie nationale pour la biodiversité.

L’organisation de ce fonds vert relève des prérogatives de Christophe Béchu et de Caroline Cayeux – nous nous contentons, quant à nous, de le financer –, mais je puis au moins vous dire que le Gouvernement veut un dispositif simple et accessible aux petites collectivités. Nous avons retenu l’expérience des appels à projets qui sont multipliés, avec parfois un coût d’entrée très lourd pour de petites collectivités, et nous voulons déconcentrer au maximum les fonds et faire des préfets les interlocuteurs des collectivités. Tout cela est en train d’être défini par mes collègues Béchu et Cayeux.

Pour ce qui est de l’assurance récolte, le montant des crédits bruts budgétaires introduits sur le programme 149 de la mission Agriculture est de 256 millions d’euros au titre du PLF pour 2023. Le plafond de la taxe affectée au Fonds national de gestion des risques en agriculture, assise sur les cotisations d’assurance, est doublé, ce qui la porte à 120 millions. Avec les crédits du Fonds européen agricole pour le développement rural, d’un montant de 184,5 millions d’euros, on atteint un chiffre total de 560 millions d’euros de soutien public pour la gestion des risques en 2023, destinés au subventionnement de l’assurance récolte et aux tâches de solidarité nationale. Ce soutien public doit ensuite passer à 600 millions d’euros en 2025. On voit que l’engagement du Président la République de soutenir nos agriculteurs soumis à des aléas climatiques majeurs est tenu.

Concernant MaPrimeRénov’, nous convenons tous qu’il faut recalibrer le soutien pour qu’il aille davantage aux rénovations globales. Alors que l’objectif initial était de rénover 80 000 passoires thermiques en 2021, 2 500 l’ont été : nous n’y sommes pas, et il faut avancer. Nous avons commencé à en parler dans le cadre des dialogues de Bercy et nous allons continuer à travailler ensemble pour mieux calibrer les aides.

Madame Sas, pour ce qui est du niveau de soutien de l’État pour le climat et la rénovation énergétique, je rappellerai l’analyse transmise par l’Institut de l’économie pour le climat, think tank indépendant régulièrement cité, notamment par les Verts : si on additionne les financements pour le climat, les dépenses budgétaires et fiscales et l’action des opérateurs publics et privés, on atteint un chiffre de près de 15 milliards d’euros, ce qui représente, pour la France, un étiage de dépenses acceptable et soutenable, mais il faut mieux centrer certaines aides, dont MaPrimeRénov’.

Monsieur Sansu, vous avez qualifié d’indigent notre soutien aux collectivités locales. Comme vous l’imaginez bien, je ne reprendrai pas ce terme à mon compte alors que 2,5 milliards d’euros de recettes de TVA supplémentaires vont arriver d’ici à la fin de l’année et que nous avons instauré un filet de sécurité de 430 millions d’euros sur 2022 – système que nous sommes disposés, si nécessaire, à rééditer pour 2023. En outre, je ne l’ai pas dit dans mon intervention liminaire mais les concours financiers de l’État aux collectivités locales en 2023 augmenteront de 1,1 milliard d’euros, tout comme le Fonds de compensation pour la TVA (FCTVA), le prélèvement sur recettes de compensation à la suppression des impôts de production et plusieurs concours. Ajoutons à cela le fonds vert et l’abondement des dotations proposé par Mme Pires Beaune, que nous retenons pour un montant de 210 millions d’euros. Cela ne me semble pas du tout indigent, surtout dans le contexte de finances publiques que nous connaissons aujourd’hui.

Monsieur de Courson, nous sommes évidemment ouverts à des amendements et à des propositions d’économies. Quant à savoir pourquoi ne pas remplacer la suppression de la CVAE par un dégrèvement, c’est tout simplement parce que nous ne voulons pas continuer à faire vivre un impôt fantôme, qui mobilise des agents publics chargés de son calcul et impose des obligations déclaratives assez lourdes aux entreprises. Supprimer la CVAE, c’est supprimer de la pression fiscale pour les entreprises et supprimer des modalités et des charges administratives et déclaratives assez lourdes, pour leur simplifier la vie.

M. le président Éric Coquerel. Je précise, pour la qualité des arguments échangés dans notre débat, que la taxe sur les superprofits ou sur les bénéfices telle qu’elle a été proposée en vue d’un référendum d’initiative partagée porterait sur un seuil de bénéfices supérieur de 25 % à la moyenne de 2017-2019, ce qui correspond à peu près, sauf erreur de ma part, à la proposition de la Commission européenne pour les énergéticiens.

Nous en venons aux questions individuelles des députés.

M. Dominique Da Silva. Nous soutenons, évidemment, le merveilleux cap du plein emploi fixé par le Président la République.

Avec l’ambition de dépasser le million de contrats d’alternance, comment appréhendez-vous le bon financement du coût des contrats avec les régions et avec France compétences, qui, après ce doublement du nombre d’apprentis – dont on ne peut du reste que se féliciter – accuse un déficit de près de 6 milliards d’euros ?

Les besoins en logements locatifs pour les salariés les plus modestes sont grands, et la mobilité dans le parc social fort nécessaire. Quelles orientations budgétaires ou pistes permettraient d’y répondre ?

M. Louis Margueritte. Ces textes sont résolument tournés vers l’avenir et allient protection du pouvoir d’achat des Français et réhabilitation de la valeur travail. Ils traduisent clairement l’engagement de l’État et de la majorité en termes de créations de postes : 1 547 équivalents temps plein (ETP) dans l’armée, 200 brigades de gendarmerie renforcées dans nos territoires,  une augmentation inédite dans la justice. C’est essentiel pour renforcer la présence de l’État dans nos territoires.

Le maintien de la trajectoire des dépenses publiques n’étant assurément pas un objectif absurde, pouvez-vous nous dire où se portent les efforts de la puissance publique en matière de réduction ou de moindre augmentation des effectifs de la fonction publique ?

M. David Amiel. Le bouclier tarifaire, dispositif unique en Europe, permet d’éviter des hausses qui, sans lui, seraient huit fois supérieures. Comme d’autres mesures, ce dispositif peut être financé, car la stratégie économique du Gouvernement est solide – ce qui se passe au Royaume-Uni suffit à rappeler que, quand on ne maîtrise pas son déficit public, l’impact sur le pouvoir d’achat de la hausse des taux d’intérêt et de l’inflation est délétère.

Les fortes incertitudes qui pèsent sur l’évolution du prix de gros et la fin, prévue en juillet, des tarifs réglementés de vente du gaz, auront-elles des conséquences sur le bouclier tarifaire en 2023 et sur son coût pour le budget ?

M. Charles Sitzenstuhl. Ce quinquennat coïncidera avec une remise à plat des règles budgétaires européennes, chantier très important demandé par la France depuis plusieurs années et confirmé par la présidente de la Commission européenne à Strasbourg, dans son discours sur l’état de l’Union.

Où en sont vos discussions à ce propos avec vos homologues au sein de l’Eurogroupe et du Conseil des affaires économiques et financières (ECOFIN) ? Quelles incidences sur les travaux de l’Assemblée nationale, en particulier de notre commission des finances, l’évolution des règles pourrait-elle avoir pour le quinquennat actuel ?

M. Michel Castellani. Monsieur le ministre j’appelle votre attention et celle du Gouvernement sur la nécessité d’adapter les mesures de soutien aux situations particulières des îles, des outre-mer et de certains territoires vulnérables. Je vous sais sensible à la question corse et à son caractère particulier. Nous discutons actuellement avec le Gouvernement et il ne faudrait surtout pas rater cette occasion.

J’ai défendu et je défendrai encore une série d’amendements qui vont dans le sens d’un soutien adapté aux territoires fragiles, ainsi qu’à l’économie et à la vie sociale de l’île. Je ne peux qu’espérer que cette demande ne reste pas lettre morte et, en particulier, que vous renonciez aux suppressions de certaines exonérations prévues à l’article 9, qui vont visiblement dans le mauvais sens.

Pour ce qui est de la question du carburant, il faut aller au bout de la mission de l’Autorité de la concurrence, réguler les prix finaux et empêcher la disparition du groupe Ferrandi, qui susciterait des problèmes sociaux et transformerait la structure, déjà cartellisée, en situation monopolistique, avec tous les aspects négatifs que cela comporterait.

Nous avons conscience de vos difficultés, mais nous attendons que vos services et vous-même interveniez pour plus de justice en direction des territoires les plus défavorisés et pour la Corse.

Mme Marie-Christine Dalloz. Le Haut Conseil des finances publiques considère votre prévision de croissance de 1 % comme un peu ambitieuse, du moins peu réalisable. De fait, de nombreuses entreprises pratiquent aujourd’hui des arrêts de travail sur les chaînes de production en raison de la hausse du prix de l’énergie. Si ce phénomène se poursuit en 2023, la croissance en sera nécessairement affectée.

Je souhaiterais voir des simulations avec des progressions de taux d’intérêt au-delà des 2,5 % pratiqués actuellement par la banque centrale. Je ne pense pas que nous puissions avoir des garanties sur une stabilisation de ce taux : comment, alors, estimer l’éventuelle dérive ?

Mme Stella Dupont. Nous sommes tous très attachés à notre modèle social, qui vise à soutenir les plus fragiles. Je note, dans les crédits vous nous présentez, plus de 2 milliards d’euros supplémentaires pour la mission Solidarité en crédits de paiement, et un peu moins en autorisations d’engagement. La cohésion des territoires bénéficie d’une hausse de l’ordre de 700 millions d’euros, mais je m’étonne du recul de 30 millions d’euros en autorisations d’engagement. Quelles sont les priorités qui guident l’action du Gouvernement en matière de lutte contre la pauvreté, et particulièrement en matière d’hébergement d’urgence ?

M. Franck Allisio. S’il y a un domaine qui se porte bien ces derniers mois, ce sont les recettes fiscales sur les ménages : plus 6 milliards d’euros de TVA par rapport à 2022, plus 4,5 milliards d’impôt sur le revenu. Cela fait du Gouvernement, à tout le moins, un profiteur de l’inflation, et de la France, l’éternel vice-champion du monde des impôts. Vous invoquerez votre effort en matière d’impôt sur le revenu, mais cet effort n’en est pas un, car c’est la non-indexation du barème de cet impôt qui eût été une véritable augmentation d’impôts déguisée. Parlant d’efforts, où en est le chèque alimentation que vous avez annoncé au mois de juin ?

S’agissant de la taxe foncière, le risque de flambée des valeurs locatives nécessite d’en prévoir le plafonnement, en le compensant toutefois, car il ne s’agit pas de le faire peser sur nos communes.

M. Philippe Lottiaux. On nous dit que la baisse de la CVAE sera compensée intégralement par la TVA et que la moyenne retenue sera celle de 2021-2022. Dans la mesure où le rendement de la CVAE a été moindre sur cette période, du fait d’un décalage des effets de la crise sanitaire, ne serait-il pas plus juste d’inclure le résultat de 2023 ? J’espère aussi que les EPCI, qui sont fortement impliqués dans le développement économique, profiteront de la nouvelle répartition du produit de la TVA et qu’on ne se retrouvera pas avec une énième dotation de compensation.

L’article 23 du projet de loi de programmation des finances publiques fixe une norme pour l’évolution des dépenses des collectivités territoriales. Il est bon qu’une perspective soit donnée, mais il est délicat, au regard de l’autonomie financière des collectivités, que tout écart soit assorti d’une punition. Il est aussi irréaliste de donner le même cadre à toutes les collectivités de France et de Navarre.

M. Fabrice Brun. La France connaît un déficit record, que vous avez encore creusé ces cinq dernières années en décidant de 140 milliards de dépenses ordinaires supplémentaires. La dette excessive, l’envolée de l’inflation et celle des taux à long terme forment une spirale infernale. Ce budget comporte-t-il des mesures de nature à l’enrayer ?

Vous venez d’évoquer, monsieur Le Maire, la suppression de niches fiscales. Pour la clarté de nos débats, pourriez-vous préciser quels dispositifs vous ciblez ?

M. Karim Ben Cheikh. Rapporteur spécial de la mission Action extérieure de l’État, je constate une légère augmentation des moyens budgétaires et humains du ministère de l’Europe et des affaires étrangères. Pouvez-vous confirmer devant la représentation nationale que celle-ci s’inscrit dans une vision pluriannuelle de réarmement de la diplomatie française ? Au vu des premiers éléments disponibles, il me semble que cette hausse n’est pas à la hauteur de l’urgence et des défis auxquels la France est confrontée.

La loi de finances rectificative du 16 août 2022 ne contient pas de mesure en faveur des Français installés à l’étranger, lesquels subissent depuis plusieurs mois la hausse du coût de la vie. Vous avez affirmé devant notre commission qu’une augmentation pérenne des moyens de l’État à destination de nos compatriotes établis hors de France était prévue. Est-ce toujours le cas ? Cette hausse s’intègre-t-elle dans une vision pluriannuelle ?

M. Michel Sala. Vous prônez un dialogue entre le Parlement et le Gouvernement avec de nouvelles méthodes, dont participent les dialogues de Bercy. Pourriez-vous indiquer les effets sur le budget que cette démarche a pu avoir – je n’en vois pas trace dans les réponses que vous avez apportées ?

La BCE a accordé 2 300 milliards de prêts aux banques pour relancer l’activité économique lors de la crise sanitaire, avec des taux allant jusqu’à moins 1 %. Le relèvement récent des taux à 0,75 % a entraîné des superprofits, estimés entre 24 et 31 milliards, pour les banques – lesquelles ne se hâtent pas de rembourser leurs emprunts. Le Gouvernement entend-il intervenir auprès des autorités européennes pour que cette situation indécente cesse immédiatement ?

M. le président Éric Coquerel. M. Tanguy souhaite faire un rappel au règlement ; je vais le lui accorder, non sans indiquer que cette procédure n’est pas d’usage en commission. La courtoisie de nos échanges, à laquelle je suis attaché, doit permettre de l’éviter.

M. Jean-Philippe Tanguy. Je n’ai d’autre choix que de faire ce rappel au règlement car M. Le Maire a gravement mis en cause, et même injurié, les élus du Rassemblement national en osant dire que nous étions soumis à la violence de l’armée russe.

Monsieur le ministre, vous avez le droit d’être ivre des mensonges et de la propagande d’État mais, en tant que ministre de la République, vous devez respecter les élus qui siègent ici, à quelque parti qu’ils appartiennent. Dans la mesure où vous n’avez aucun début de preuve de ce dont vous nous accusez, l’éthique républicaine vous impose de vous taire. Proférer de telles accusations est un poison pour la démocratie !

Nous ouvrirons sans hésiter nos cœurs et notre réalité. Ferez-vous de même dans le cadre de la commission d’enquête, dont nous demanderons prochainement la création, sur les ingérences étrangères et leur influence sur les décisions d’État ?

M. Le Maire, ministre. Je suis au regret de décevoir M. Tanguy, mais je ne me tairai pas. Je prends donc la parole.

Le sujet de la taxation, parfaitement légitime, nécessite de bien poser le débat. La NUPES propose de taxer toute entreprise dont le résultat fiscal de 2023 serait supérieur de 25 % à la moyenne des résultats 2017-2019. À mes yeux, cela ne revient pas à taxer les superprofits mais à taxer tous les profits de toutes les entreprises qui réussissent. La NUPES propose aussi que cette taxe soit imposée jusqu’en 2025, ce qui lui ôte tout caractère exceptionnel. Il s’agira d’une taxe permanente et je souhaite bien du courage à ceux qui voudront la supprimer après cette date. Derrière les mots de « taxation exceptionnelle des superprofits », qui sonnent bien, il y a donc une réalité, celle d’une taxation permanente des profits des entreprises.

La proposition de l’UE est très différente : il s’agit de taxer les entreprises d’un seul secteur, celui de l’énergie, dont le résultat d’une seule année, 2022, serait supérieur de 20 % à la moyenne des résultats 2019-2021, une période plus proche de la crise inflationniste.

M. Da Silva m’a interrogé sur le financement de l’apprentissage. Il est vrai que France compétences accuse un déficit de 6 milliards d’euros ; nous ferons des propositions dans le budget pour que la machine ralentisse et que l’argent soit destiné aux apprentis qui en ont le plus besoin. Olivier Dussopt s’exprimera sur le sujet.

Monsieur Amiel, je veux rassurer nos compatriotes qui s’inquiètent de la fin des TRV du gaz. Afin d’éviter tout risque de flambée des prix, le bouclier s’appuiera sur un indice de référence que la Commission de régulation de l’énergie (CRE) sera chargée de calculer.

J’ai présenté à nos partenaires des propositions concernant les règles budgétaires européennes, monsieur Sitzenstuhl. Ces règles communes, que l’évolution des situations politiques dans la zone euro rend plus nécessaires encore, doivent reposer sur trois principes. La différenciation, d’abord, puisqu’on ne saurait demander à un État dont la dette est de 158 % du PIB de la réduire à 60 % au même rythme qu’un autre dont la dette atteint 70 %. L’appropriation, ensuite : les États doivent faire eux-mêmes des propositions de réformes structurelles et de réduction des dépenses qui garantissent le retour du déficit sous les 3 %. Ainsi, lorsque nous proposons de réformer les retraites ou l’assurance chômage, nous traçons une trajectoire crédible de réduction des dépenses publiques. La responsabilisation, enfin : chaque État est comptable devant les autres membres car la zone euro, comme nous l’avons vu lors de la crise sanitaire, nous protège.

Mme Dalloz a parlé de ces entreprises à qui il revient moins cher, compte tenu du coût de l’énergie, de ralentir de 20 % à 30 % leur production. Si nous nous battons autant pour faire baisser les prix de l’électricité et aider les entreprises énergo-intensives, c’est pour éviter qu’une crise économique ne vienne s’ajouter à la crise énergétique. Nous devons intervenir pour soutenir les entreprises et faire en sorte que les usines continuent de tourner à un rythme normal. J’attends des énergéticiens, que je recevrai avec Agnès Pannier-Runacher dans les prochains jours, un comportement exemplaire et solidaire vis-à-vis de leurs clients. Quand je les entends dire qu’ils anticipent un prix du mégawattheure de 250 euros et que, parallèlement, ils proposent aux entreprises des contrats à 400 ou 500 euros le mégawattheure, je me dis qu’il y a un problème.

Monsieur Allisio, l’État va mettre sur la table 50 milliards d’euros pour protéger nos compatriotes. Il ne me semble pas qu’il profite de l’inflation, mais qu’il protège de l’inflation !

M. Brun m’a demandé de préciser quels dispositifs seront concernés par la suppression des niches. Je n’ai pas d’a priori sur la question. M. Labaronne a fait des propositions ; si nous nous y mettons tous ensemble, nous parviendrons à supprimer un certain nombre de ces dépenses fiscales, que je considère effectivement comme inappropriées. Il est d’usage de dire que derrière chaque niche fiscale, il y a un chien qui aboie ; eh bien, cela ne doit pas empêcher la caravane du rétablissement des finances publiques de passer !

Je conclurai, monsieur Sala, en disant à quel point la concertation lancée par mon excellent collègue ministre délégué aux comptes publics est une initiative bonne et utile pour notre pays.

M. Gabriel Attal, ministre délégué. Monsieur Margueritte, les créations d’emplois correspondent aux engagements pris pendant la campagne présidentielle. Le réarmement en matière de sécurité se poursuivra avec le doublement de la présence des forces de l’ordre sur la voie publique d’ici à 2030. Cela passera à la fois par la création de 8 500 postes au cours du quinquennat, dont 3 000 dès l’année prochaine, par une réforme des horaires et rythmes de travail ainsi que par le transfert de certaines missions exercées par les forces de sécurité intérieure – transfert de malades, garde de bâtiments publics.

La Première ministre nous a fixé pour objectif la stabilité de l’emploi public sur la durée du quinquennat. Les ministères qui connaîtront une hausse de l’emploi public seront en nombre limité – je les ai déjà cités : la sécurité, les armées, la justice. Des efforts sont demandés à d’autres ministères. À Bercy, nous sommes bien placés pour le savoir puisque ce ministère supporte l’essentiel des efforts depuis vingt ans – 2 000 suppressions de postes par an en moyenne sous le précédent quinquennat. Notre ministère demeurera exemplaire mais les efforts seront poursuivis à un rythme moins soutenu afin de garantir le bon exercice de ses missions.

Dans certains ministères, notamment l’éducation nationale, les créations de postes seront moins importantes que par le passé – après le bond démographique, on attend 500 000 élèves de moins dans les cinq prochaines années. Pour continuer à améliorer le taux d’encadrement, il n’est pas nécessaire de créer autant de postes qu’auparavant.

La hausse que vous constatez dans le schéma d’emplois est aussi le résultat d’un effort de sincérité budgétaire : désormais, celui-ci comptabilise les accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH). Dès lors que nous voulons remédier à la précarité qui caractérisait ces emplois, le fait de les intégrer au plafond d’emplois de l’État relève de la bonne gestion.

Monsieur Castellani, s’agissant de la Corse, des discussions importantes sont menées en ce moment par Gérald Darmanin. Nous apportons tout le soutien nécessaire sur les volets économique et fiscal. Une réunion doit se tenir fin octobre ou début novembre sur le sujet. Vous avez mentionné l’article 9, qui prévoit d’abroger l’exonération temporaire de l’impôt sur les sociétés en faveur des entreprises créées en Corse dans les secteurs de l’artisanat, de l’industrie, de l’hôtellerie, du bâtiment et des travaux publics. Je vous rassure, il ne s’agit que de nettoyer la législation fiscale en supprimant des dispositions devenues obsolètes. Nous tenons à votre disposition tous les documents permettant d’apaiser les éventuelles craintes des acteurs locaux sur ce point

Madame Dupont, notre stratégie pour lutter contre la pauvreté repose sur le retour à l’emploi. Le taux de chômage est au plus bas depuis quinze ans ; des millions de Français ont retrouvé un emploi sous le précédent quinquennat, ce qui leur a permis de sortir de la pauvreté.

En ce qui concerne l’hébergement d’urgence, les crédits du programme 177 Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables progressent de 100 millions d’euros, afin de financer la revalorisation salariale des métiers de l’accompagnement social mais aussi le deuxième plan Logement d’abord qui favorise l’accès à un logement plutôt que le recours aux nuitées hôtelières. Les crédits de la mission Solidarité, insertion et égalité des chances sont en hausse de 2,1 milliards d’euros, sous le double effet de la revalorisation des prestations sociales liée à l’inflation et de la déconjugalisation de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) – important progrès auquel vous avez contribué et qui doit être appliqué au plus tard le 1er octobre 2023.

Monsieur Allisio, s’agissant d’un éventuel plafonnement de la taxe foncière, les impôts fonciers ont toujours varié au gré de l’inflation. Les associations d’élus locaux nous ont implorés de ne pas modifier la règle légale. Ce sujet suscite un débat au sein de la majorité et de l’opposition – lors des dialogues de Bercy, j’ai entendu Jean-René Cazeneuve et Charles de Courson. Celui-ci se poursuivra dans l’hémicycle. Je le répète, j’appelle les collectivités à modérer la hausse des taux de fiscalité locale afin de ne pas ruiner tous les efforts consentis en faveur du pouvoir d’achat des Français.

Certaines collectivités pourraient baisser leur taux pour compenser la revalorisation du coefficient des valeurs locatives cadastrales liée à l’inflation. Certains maires l’ont déjà annoncé.

Monsieur Lottiaux, s’agissant de la compensation de la CVAE, nous avons retenu une période de référence de trois ans car les résultats sur une année ne sont pas homogènes : alors que les recettes de CVAE au niveau national peuvent être très bonnes, celles de certaines collectivités peuvent connaître au même moment un point bas, et inversement. C’est une ressource très volatile. Je prends l’exemple d’une commune sur le territoire de laquelle se trouve une centrale nucléaire à l’arrêt pour cause de maintenance : à Civaux, les recettes passent de 3,8 millions d’euros cette année à 53 000 euros l’an prochain. La compensation telle que le prévoit le PLF apporte aux collectivités de la visibilité et leur assure que les recettes de CVAE ne baisseront pas. C’est une belle garantie que nous leur donnons.

Nous souhaitons que le lien avec le territoire et la dynamique des ressources soit maintenu. Un maire qui accueille des activités économiques sur son territoire doit pouvoir continuer à dire à ses administrés que c’est bon pour les recettes de la ville. Afin de conserver la territorialisation, nous avons donc proposé de nous appuyer sur la cotisation foncière des entreprises (CFE) qui est déjà l’un des critères d’affectation de la CVAE. Lors des dialogues de Bercy, plusieurs interlocuteurs nous ont incités à ajouter d’autres critères. Nous sommes très ouverts aux propositions en la matière.

Non, la norme de dépenses qui est fixée aux collectivités locales ne remet pas en cause leur autonomie. Le Conseil constitutionnel a estimé que les contrats de Cahors, pourtant bien plus contraignants que les nouveaux pactes de confiance, ne portaient pas atteinte à cette dernière. En revanche, un mécanisme est prévu pour infléchir la trajectoire des dépenses en cas de dérapage afin d’en garantir la maîtrise. C’est normal. Contrairement à ce que vous prétendez, la norme ne sera pas la même pour tous. En cas de dérapage, le mécanisme de correction ne s’appliquera qu’aux communes dont le budget est supérieur à 40 millions d’euros, ce qui vise les 500 plus grosses collectivités.

Monsieur Sala, s’agissant des évolutions consécutives aux dialogues de Bercy, je pense en avoir mentionné plusieurs depuis le début de l’audition. Je pense à la suspension de l’actualisation des bases locatives à la demande unanime des groupes. À rebours de notre objectif de redynamisation des centres-villes, à travers le plan Action cœur de ville notamment, elle avait pour effet d’accroître la fiscalité pour les commerces de centre-ville et de la diminuer pour les hypermarchés de la périphérie.

Nous accédons aux demandes qui ont été formulées en abondant de 210 millions d’euros les dotations de péréquation.

Des propositions ont été faites pour mieux protéger la forêt ; nous reprenons l’idée de sanctuariser les effectifs de l’Office national des forêts (ONF) alors que des suppressions de postes étaient prévues, celle d’une incitation fiscale à replanter pour les propriétaires de forêts ainsi que celle d’un fonds pour accompagner les communes forestières victimes de scolytes.

L’article 21 de la loi de programmation pour les finances publiques permettra d’organiser le débat sur la qualité de la dépense publique qui a été réclamé. Les dialogues de Bercy auront été utiles.

Monsieur Ben Cheikh, la mission Action extérieure de l’État bénéficie d’une hausse de crédits de 187 millions d’euros dont 63 millions concernent la masse salariale. Ils visent à financer les priorités définies en 2022, notamment l’immobilier, la sécurité ainsi que le renforcement de la diplomatie culturelle et d’influence – à hauteur de 47 millions d’euros. Les aides à la scolarité dans le réseau de l’enseignement français à l’étranger sont maintenues. Après un renforcement des effectifs de l’administration centrale en 2022, le schéma d’emplois de la mission prévoit 100 ETP supplémentaires en 2023 afin d’accroître notre présence dans l’Indo-Pacifique – plusieurs nominations importantes ont été entérinées ce matin en Conseil des ministres – et notre capacité d’analyse politique dans les postes diplomatiques les plus exposés. La sécurisation des emprises diplomatiques, la cybersécurité et la lutte contre la manipulation de l’information bénéficient également de crédits supplémentaires.

Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

 

 

Réunion du lundi 26 septembre 2022 à 15 heures

Présents. - M. Franck Allisio, M. David Amiel, Mme Christine Arrighi, M. Karim Ben Cheikh, M. Mickaël Bouloux, M. Fabrice Brun, M. Philippe Brun, M. Frédéric Cabrolier, M. Michel Castellani, M. Thomas Cazenave, M. Jean-René Cazeneuve, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, M. Dominique Da Silva, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jocelyn Dessigny, Mme Stella Dupont, Mme Marina Ferrari, M. Luc Geismar, M. Joël Giraud, M. Daniel Grenon, M. David Guiraud, Mme Nadia Hai, M. Alexandre Holroyd, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Emmanuel Lacresse, Mme Constance Le Grip, M. Pascal Lecamp, M. Mathieu Lefèvre, Mme Patricia Lemoine, M. Philippe Lottiaux, Mme Véronique Louwagie, Mme Lise Magnier, M. Louis Margueritte, M. Bryan Masson, M. Kévin Mauvieux, M. Benoit Mournet, Mme Christine Pires Beaune, M. Christophe Plassard, M. Robin Reda, M. Xavier Roseren, M. Alexandre Sabatou, M. Michel Sala, M. Nicolas Sansu, Mme Eva Sas, M. Charles Sitzenstuhl, M. Jean-Philippe Tanguy

Excusés. - M. Christian Baptiste, Mme Karine Lebon, M. Jean-Paul Mattei

Assistait également à la réunion. - M. Éric Woerth