Compte rendu

Commission
des affaires culturelles
et de l’éducation

–  Examen pour avis de la proposition de loi portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers et des producteurs de papier (n° 676) (Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis)              2

–  Présences en réunion..............................17

 

 

 

 

 


Mardi
24 janvier 2023

Séance de 21 heures 30

Compte rendu n° 22

session ordinaire de 2022-2023

Présidence de
Mme Isabelle Rauch,
Présidente
 

 


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La séance est ouverte à ving-et-une heures trente.

(Mme Isabelle Rauch, Présidente)

 

La commission examine pour avis la proposition de loi portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers et des producteurs de papier (n° 676) (Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis).

Mme la présidente Isabelle Rauch. Mes chers collègues, nous examinons l’avis que notre commission a souhaité donner sur la proposition de loi portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs (REP) d’emballages ménagers et des producteurs de papier. Cette saisine est apparue nécessaire car la proposition de loi a notamment pour objet de régler une difficulté que les représentants de la presse écrite nous avaient signalée pendant la période budgétaire.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis. Notre commission est saisie pour avis sur ce texte car deux de ses dispositions auront, l’une, une incidence sur la filière des imprimés et papiers graphiques – tout le papier qui n’est pas destiné à l’emballage – l’autre, un impact majeur sur la filière de la presse papier.

La genèse de ce texte remonte à la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite loi Agec, qui visait à réduire notre production de gaz à effet de serre, à mieux organiser le tri et le recyclage de nos déchets, et à responsabiliser les producteurs ou « metteurs sur le marché » – tous objectifs vertueux en matière d’environnement.

Les producteurs doivent ainsi s’acquitter de leur obligation en créant collectivement des éco-organismes agréés, dont ils assurent la gouvernance et auxquels ils transfèrent leur obligation par le versement d’une contribution financière. Ainsi, l’éco-organisme Citeo vise, depuis 2017, à renforcer la compétitivité des filières de collecte et de recyclage des emballages ménagers et des papiers graphiques.

Au demeurant, dans une grande partie de notre territoire, les poubelles et les containers à déchets – les « bacs jaunes » – sont déjà communs pour les déchets d’emballages et les papiers. Il paraît donc opportun de renforcer cette synergie en fusionnant les deux filières à responsabilité élargie que sont la filière relative aux emballages et celle des imprimés et papiers graphiques.

Les conséquences de cette fusion, qui, de l’avis d’interlocuteurs auditionnés, réduirait les coûts de structure, doivent être bien évaluées. La fusion conduirait à regrouper la filière REP emballages, en bonne santé économique, très polluante et aux déchets très nombreux, avec la filière REP des imprimés et papiers graphiques, fragilisée depuis de nombreuses années, et plutôt vertueuse en matière environnementale.

Ses acteurs n’ont pas manqué, lors des auditions, d’appeler l’attention du législateur sur leur situation. Ainsi, Copacel, l’Union française des industries, des cartons, papiers et celluloses, a fait part de ses réticences. D’abord, parce que la nouvelle filière REP unifiera deux cahiers des charges bien distincts pour en créer un cahier plus dense et plus complexe. Ensuite, parce que, dans cette filière unifiée, la filière des imprimés et papiers graphiques, ne pèsera que 10 % des déchets produits face à la filière emballages – elle ne pèse déjà que 120 millions d’euros, contre 1 milliard pour le papier d’emballage. Elle sera donc de faible poids face à une filière en pleine expansion.

Enfin, l’une des réticences des acteurs de la filière relative aux papiers graphiques porte sur la fin, prévisible selon eux, du taux d’acquittement dont elle bénéficie. Ce taux représente le rapport entre les tonnages de déchets de papiers graphiques issus d’entreprises qui s’acquittent de leur contribution et l’ensemble des papiers graphiques assujettis à la filière REP. Il en découle le pourcentage des assujettis qui ne remplissent pas leurs obligations – les « passagers clandestins » ou free riders – c’est-à-dire la masse de déchets papier d’origine étrangère et inconnue ainsi que ceux qui en sont exonérés, soit un total de 13,5 %. Concrètement, la compensation, par les collectivités territoriales, de ce taux d’acquittement représentait une aide financière substantielle pour la filière des imprimés et papiers graphiques.

Cette aide est toutefois perçue comme une charge financière pour les collectivités en charge de la gestion des déchets, lesquelles financent la collecte, le tri et le recyclage de ces papiers dont les émetteurs ne paient pas d’écocontribution.

Un scénario probable, qui répondra peut-être aux acteurs de la filière des papiers graphiques et des collectivités territoriales, est qu’à terme, la filière emballages puisse compenser ce manque à gagner venu de l’autre filière, en l’aidant à supporter financièrement ces coûts, puisque cette filière bénéficie a contrario d’une hausse forte et constante de son chiffre d’affaires. L’éco-organisme Citeo pourrait aussi supporter les coûts liés aux free riders en lieu et place des collectivités territoriales.

Le second volet de la proposition de loi porte sur la situation de la presse et sur son exemption de cette nouvelle filière fusionnée, conditionnée à la mise à disposition d’encarts consacrés à la transition écologique. D’un point de vue principiel, la presse papier ne peut évidemment pas être regardée comme un simple déchet. Elle est certes un produit potentiellement jetable mais sa vocation n’est pas d’être immédiatement mise aux ordures comme un carton d’emballage ou un emballage plastique.

Comme la filière des imprimés et papiers graphiques, la presse est devenue un acteur économique fragile. La France ne dispose plus que d’un seul site de production de papier pour la presse, l’usine de Golbey dans les Vosges, qui fabrique de la pâte de papiers récupérés, de la pâte de bois et du papier.

S’agissant de la fabrication du papier, de nombreuses contrevérités, parfois proférées par des acteurs très influents, continuent de circuler. Non, on n’abat pas des forêts entières pour éditer nos journaux ou nos livres. Que ce soit pour l’édition ou la presse, le papier est constitué de 75 % de papier recyclé et de 25 % de fibres nouvelles, prélevées sur des chutes de scierie, qui sont nécessaires pour atteindre une certaine blancheur et qualité du papier, permettant ensuite son recyclage. Seuls certains quotidiens sont fabriqués en papier intégralement recyclé. Quant aux huiles nécessaires à l’impression de la presse en quadrichromie, des efforts sont faits, quand cela est possible, pour les rendre plus respectueuses de notre environnement et passer des huiles minérales aux huiles végétales.

Une petite musique assez insistante accuse les médias papier d’être polluants, contrairement aux médias dématérialisés. C’est évidemment faux : le numérique est largement plus polluant par son fonctionnement. Rappelons qu’envoyer 12,3 mails par jour pendant un an, soit 4 500 mails, pollue autant que parcourir 100 kilomètres en voiture et qu’un mail consomme en moyenne 4 grammes de CO2. La presse ne saurait être comparée à un bidon de lessive ou à une cloison de placoplatre. Loin d’être un déchet comme un autre, la presse, comme les livres, délivre un message signifiant, s’adresse à un public, à un lectorat qu’elle a pour vocation d’informer, de faire réfléchir, d’édifier.

C’est pourquoi, en tant que rapporteure pour avis, je soutiens sans réserve la proposition contenue dans ce texte de sortir les publications de presse définies à l’article 1er de la loi du 1er août 1986 de la filière REP. Notre pays est d’ailleurs le seul à les avoir inclues dans une filière REP en 2017.

Il faut ainsi maintenir et préserver le dispositif instauré par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Ce dispositif était simple : les journaux contribuent aux objectifs de transition écologique en mettant à disposition des encarts publicitaires relatifs aux bons gestes de tri. Certains titres de presse, eux, faisaient le choix de ne pas mettre à disposition d’encarts, en versant une contribution financière.

La présente proposition de loi vise à reproduire ce mécanisme, en obligeant les acteurs de la presse, sortis de la filière REP, à participer aux enjeux auxquels nous sommes confrontés en termes de transition écologique. Les acteurs, notamment les syndicats d’éditeurs, signeraient alors avec le ministère chargé de l’environnement et le ministère chargé de la communication une convention de partenariat qui aboutirait à mettre à disposition des encarts publicitaires sur un thème – la transition écologique –, plus large que le simple message lié au tri prévu auparavant, afin de sensibiliser nos concitoyens, par ailleurs consommateurs, à une nécessaire sobriété ou à toutes les formes de pollution, y compris numérique.

Sur ce point, j’ai déposé un amendement prévoyant que le ministère chargé des collectivités territoriales soit cosignataire de cette convention. Des messages liés au tri et au recyclage pourraient ainsi être déclinés de manière plus locale et travaillés avec la presse quotidienne régionale (PQR) et les collectivités. La convention serait revue tous les trois ans, ce que prévoit un amendement du rapporteur au fond. Une telle révision permettrait, par un dialogue permanent avec les éditeurs de presse et leurs syndicats représentatifs, d’intégrer des critères d’écoresponsabilité soutenables, au fur et à mesure des évolutions techniques – ces acteurs en respectent déjà beaucoup.

En somme, il s’agit de continuer à faire fonctionner un système qui donne satisfaction par le biais du concours en nature. Citeo, l’éco-organisme en charge des filières REP relatives aux emballages et papiers graphiques, estime que la presse remplit bien ses obligations et son rôle dans ce cadre, puisque 85 % du taux de financement dont elle s’acquitte est effectué en nature.

Pour ce qui me concerne, je ne suis pas favorable à ce que les conventions de partenariat nouvellement créées établissent des distinctions en fonction des titres de presse, à partir du moment où nous parlons de publications définies précisément à l’article 1er de la loi du 1er août 1986.

Pour conclure, j’appelle votre attention sur le nécessaire soutien aux collectivités locales, afin que les recettes perdues puissent être compensées à due concurrence, dans un contexte d’inquiétude forte, liée au sujet annexe de la hausse de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP).

Il est indispensable d’être vigilant quant à l’avenir de la filière des imprimés et papiers graphiques hors presse. Une fusion avec le géant que constitue la filière REP emballages pourrait être une bonne chose, à condition que soit conservée une attention accrue à ce secteur fragile mais qui reste apprécié de nos concitoyens. Le papier – autre qu’emballage – demeure une matière à part, sensible, dans tous les sens du terme, et porteuse de solutions pour l’avenir.

Enfin, il convient de perpétuer la contribution en nature pour la presse, afin de permettre à ce secteur en difficulté de poursuivre l’adaptation de son modèle. Nul ne peut réellement augurer de l’avenir de la presse papier. La vertu écologique en ce domaine n’est pas forcément celle qu’on croit. Elle reste évidemment à défendre pour sa vertu patrimoniale, démocratique et, évidemment, culturelle.

M. Denis Masséglia, rapporteur de la commission du Développement durable et de l’aménagement du territoire. La presse est dans une situation critique : elle souffre de difficultés conjoncturelles majeures, qui viennent s’ajouter aux fragilités structurelles du secteur. Le prix de la tonne de papier a doublé en un an pour atteindre près de 900 euros en 2022. Selon les estimations de la filière, la hausse du coût du papier pourrait représenter un manque à gagner de 120 millions d’euros.

Si toute la presse est touchée à des degrés divers, la presse quotidienne régionale, dont la pagination est importante, l’est particulièrement. La hausse du coût de l’énergie affecte également le coût de distribution, de transport et de fabrication de la presse. La presse numérique n’est pas épargnée, avec la hausse des tarifs des hébergeurs.

L’augmentation des prix des quotidiens et périodiques ne peut à elle seule absorber l’augmentation du prix du papier : elle risquerait d’accélérer encore la décrue des ventes, eu égard à la forte élasticité prix des ventes de la presse papier.

Si l’on peut considérer que cette hausse des coûts qui affecte en premier lieu la presse papier ne fait qu’accélérer un mouvement inexorable de basculement total sur le numérique, il convient de rappeler que certains titres, notamment des magazines, reposent sur une qualité de pagination qui rend peu pertinent tout basculement vers le numérique.

Par ailleurs, la monétisation de la presse numérique reste difficile, bien que le volume global d’abonnements ait augmenté. En somme, si les éditeurs parviennent à absorber une part de la hausse de ces coûts, notamment au travers de l’augmentation des prix et d’une réduction de la pagination déjà décidée par une majorité d’entre eux, le risque de déstabilisation pour tout le secteur est réel – il suffit de voir ce qui se passe en Nouvelle-Calédonie.

En parallèle, il faut rappeler que la presse est, depuis 2017, inclue dans la filière à responsabilité élargie des producteurs de papiers graphiques. Toutefois, étant considérée comme un secteur particulièrement sensible, au même titre que les livres, elle a bénéficié d’une dérogation lui permettant de contribuer à sa filière sous la forme de prestations en nature, par la mise à disposition d’encarts publicitaires destinés à informer le consommateur sur la nécessité de favoriser le geste de tri et le recyclage du papier.

La loi Agec de 2020 a mis un terme à ce régime dérogatoire, disposant qu’à compter du 1er janvier 2023, l’écocontribution de la presse doit être numéraire. Ce financement direct pour la presse représente entre 15 et 22 millions d’euros. La présente proposition de loi vise à exempter la presse de la filière REP des papiers graphiques, à la condition qu’une convention de partenariat soit signée avec l’État, convention engageant la presse à mettre à disposition gratuitement des encarts destinés à communiquer auprès des lecteurs sur la transition écologique. Cela représente un élargissement des messages qui ont été diffusés depuis de nombreuses années.

La convention de partenariat sera à la fois un outil négocié par les syndicats de presse et le support de la volonté de l’État – et de la nôtre – de continuer à attendre que la presse ait un engagement total envers des processus de fabrication plus propres et durables, ainsi qu’un recyclage des déchets issus de la presse. Il est capital que les collectivités territoriales puissent bénéficier d’un tel dispositif d’encarts : informer sur les gestes de tri et l’économie circulaire continue à être nécessaire pour sensibiliser les Français.

Il convient de donner à la presse les outils pour prendre pleinement part aux défis de la transition écologique, tout en l’accompagnant face à la crise qu’elle traverse, notamment dans un souci de préserver la PQR dans nos territoires respectifs. Afin d’aller plus loin en matière d’écologie et d’accompagnement des collectivités territoriales, j’ai ainsi déposé des amendements qui répondront aux attentes de chacun des groupes.

Mme la présidente Isabelle Rauch. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Quentin Bataillon (RE). La proposition de loi touche notamment à l’économie de la presse écrite, très marquée par la flambée des prix du papier depuis près de deux ans ainsi qu’aux bouleversements des usages liés au numérique, depuis plus de deux décennies. Je veux dire tout notre soutien à ses acteurs. Le texte concerne en particulier la gestion des déchets issus de la presse – magazines et journaux.

La France est pionnière en matière de responsabilité élargie des producteurs, dite REP, qui repose sur le principe assez simple de pollueur-payeur. Nous sommes d’ailleurs le seul pays européen à disposer d’une REP pour la filière relative à la presse. La loi Agec du 10 février 2020 a permis de franchir une étape supplémentaire, avec la création de plusieurs nouvelles filières REP. Je salue l’engagement exigeant et constant de sa rapporteure, Véronique Riotton, Cette loi prévoyait de renforcer les synergies entre la filière des papiers, qui intègre notamment les éditeurs de la presse, et la filière des emballages, en harmonisant leurs modalités de collecte.

Trois ans après son entrée en vigueur, les collectivités territoriales ont respecté la volonté du législateur. Le rapprochement de ces deux filières est désormais une réalité dans la quasi-totalité du territoire. En proposant de les fusionner, le texte s’inscrit en cohérence avec la trajectoire qu’a fixée la loi Agec.

La proposition de loi vise également à prolonger la possibilité, offerte à la presse et renouvelée par la loi Agec, de verser son écocontribution en nature, sous la forme d’encarts publicitaires mis gratuitement à disposition, pour sensibiliser les lecteurs au recyclage du papier. En application de la directive européenne de 2018 sur les déchets, la loi Agec a transposé l’obligation d’appliquer à partir du 1er janvier 2023 une contribution financière pour la presse, estimée à une charge d’entre 20 et 30 millions par an.

Cette situation n’est pas satisfaisante, pour deux raisons. D’abord, parce que la mise à disposition d’espaces publicitaires constitue un vecteur d’information utile, permettant de sensibiliser les citoyens aux écogestes et à la transition écologique. Ensuite, parce que la situation économique de la presse écrite confrontée au doublement du coût du papier depuis 2021 n’est pas compatible avec une nouvelle contribution financière, qui risquerait d’aggraver un équilibre financier déjà fragile et d’entraîner une nouvelle hausse des prix des journaux en kiosque, faisant craindre un recul des ventes.

Nous avons d’ailleurs apporté notre soutien aux éditeurs de presse en octroyant une aide de 5 millions d’euros dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) pour 2023. Il serait contradictoire de demander à ses acteurs une contribution cinq fois plus importante. Comme nos concitoyens, nous sommes très attachés à la presse écrite, notamment à la PQR dont nous mesurons chaque jour l’importance dans nos territoires. Avec la radio, elle est le média en lequel les Français ont le plus confiance. À l’heure des fake news, de la défiance croissante envers les médias – de Bolloré, également –, nous avons plus que jamais besoin de disposer d’une presse indépendante et plurielle, jouissant de moyens suffisants pour accomplir sa mission d’information, y compris en matière de transition écologique. C’est un préalable au bon fonctionnement de notre démocratie.

Soyons clairs, nous n’exonérons pas pour autant une filière de ses obligations environnementales : nous proposons de pérenniser et d’élargir un dispositif qui préexistait dans la loi Agec. Je salue la volonté du rapporteur au fond d’amender le texte en ce sens.

Nous n’amputons pas non plus le budget des collectivités : elles n’ont jamais bénéficié des contributions financières de la presse papier. Précisons par ailleurs que les titres de presse qui choisiraient de ne pas respecter la convention devraient s’acquitter d’une contribution financière.

Le groupe Renaissance votera en faveur de la proposition de loi.

Mme Sophie Blanc (RN). Au titre de la REP, les filières emballages et papier sont appelées à contribuer respectivement à hauteur de 850 millions d’euros et d’à peine 80 millions, dont 14 millions en nature. Ces filières n’ont ni la même taille ni le même poids ni la même trajectoire. Portée par l’essor du commerce en ligne et la disparition du plastique au profit du carton, la filière emballage est sur une courbe ascendante. À l’inverse, la filière papier est victime de la multiplication des canaux d’information et de la digitalisation de la société qui expliquent, en partie, la désaffection des Français pour le papier.

Les collectivités territoriales versent 10 milliards d’euros, soit 150 euros par habitant, pour le traitement et le recyclage des déchets.

Le système de recyclage doit être repensé afin de mettre fin à l’aberration en vertu de laquelle plus on trie, plus on paie. Les contribuables, qui sont les premiers à en faire les frais, considèrent légitimement que le principe pollueur-payeur n’est pas appliqué.

La proposition de loi poursuit deux objectifs : pour la filière papier, substituer une contribution en nature à la contribution financière qui devait être instaurée à compter du 1er janvier 2023 – jusqu’à présent, celle-ci mettait à disposition des encarts publicitaires relatifs aux bons gestes du tri et s’engageait à faire des efforts en matière de transition écologique ; second objectif, assurer la pérennité de la presse papier en offrant à un modèle économique structurellement déficitaire une béquille financière supplémentaire.

Dans un monde de plus en plus dématérialisé, la question de la survie de la presse papier est posée. La liberté éditoriale d’un journal est garantie par un modèle économique pérenne. L’option du tout dématérialisé comporte aussi son lot de pollutions.

Outre le précédent qu’elle crée en exonérant de REP des filières en difficulté, la proposition de loi n’a pas d’autre objet que de faire supporter par la collectivité l’aide à une filière mal en point.

Après une énième rustine, n’est-il pas temps de revoir un modèle hérité du XIXe siècle ? Nous ne soutiendrons pas un texte qui n’apporte pas de réponse à cette question essentielle.

M. Hendrik Davi (LFI-NUPES). Notre système économique, qui nous pousse à produire et à consommer toujours plus pour enrichir certains sans limite, fait hélas fi des enseignements des sciences de l’environnement. Or sur une planète aux ressources naturelles finies, cette spirale infernale n’est pas durable.

Il est évidemment préférable de recycler les déchets produits par notre société de consommation – 72 % de nos emballages le sont aujourd’hui – mais le recyclage lui-même émet des gaz à effet de serre et consomme de l’énergie. Les progrès ne doivent pas masquer la hausse préoccupante du volume des ordures ménagères : les ménages français produisent 39 millions de tonnes de déchets par an contre 36 millions en 2005. Ils sont en quelque sorte face au tonneau des Danaïdes. Pire, loin d’être un problème écologique, les déchets deviennent une marchandise comme les autres et une manne financière pour certains.

L’idée selon laquelle le marché apportera une solution au pillage des ressources naturelles et à la pollution qu’il engendre a prévalu depuis plus de trente ans. Le principe du pollueur-payeur, qui s’inscrit dans cette logique, montre avec la proposition de loi ses limites.

Le texte ne propose ni plan de réduction des déchets, pourtant indispensable, ni remise en cause du modèle de surproduction et de surconsommation. Le meilleur déchet est en effet celui que nous ne produisons pas. Il est urgent d’interdire les plastiques à usage unique, de rendre obligatoire le recyclage et le compostage, de généraliser les consignes, et de développer les filières de réutilisation des matériaux. Rien dans la proposition de loi ne permet d’aller dans cette direction.

L’exposé des motifs est peu convaincant sur les éventuelles synergies entre les deux filières fusionnées – la rapporteure a d’ailleurs fait état des doutes de ces dernières.

En ce qui concerne la presse, il faut aider les éditeurs fragilisés par l’envolée des prix du papier et de l’énergie. Or l’exonération de l’écocontribution ne suffit pas à la compenser En outre, nous ne devons pas mélanger les sujets. Il faut revoir les critères d’attribution des aides publiques afin de favoriser le pluralisme et de soutenir les médias de proximité. Ce n’est pas la priorité du Gouvernement puisque les moyens alloués à ces derniers diminuent dans le budget pour 2023.

Enfin, en exemptant un secteur, le texte crée un précédent qui pourrait aboutir à une remise en cause de la REP. Pour toutes ces raisons, le groupe LFI-NUPES votera contre.

M. Jean-Jacques Gaultier (LR). Le droit européen n’oblige pas à soumettre la presse et le livre au régime de la REP. Le livre a toujours été exempté tandis que la presse contribue pour partie en nature sous forme d’encarts publicitaires. Le groupe LR est favorable à ces spécificités. Un livre de Victor Hugo ou un journal, ce n’est pas la même chose qu’un emballage.

Il faut également prendre en considération la crise sans précédent que subit la presse – baisse du nombre de lecteurs à cause de la concurrence du numérique, doublement du prix du papier en un an et division par deux en dix ans des recettes publicitaires.

En revanche, pour la filière papier graphique, la fusion serait une véritable catastrophe. Six usines ont fermé et le tonnage a été divisé par deux. La dernière usine française, installée dans les Vosges, abrite aussi la dernière machine qui fournit le papier à tous les journaux de France. Ne fragilisons pas le dernier des Mohicans. Je vous invite à prendre contact avec ses responsables qui m’ont fait part de leurs inquiétudes. Ils souffrent déjà de difficultés d’approvisionnement– il faut aller chercher le papier en Espagne, aux États-Unis, au Canada, ce qui n’est pas très bon pour le bilan carbone. On ne peut pas pleurer sur la désindustrialisation de la France et mettre en péril la dernière usine qui fabrique le papier journal pour notre pays.

Hostile à la fusion des deux filières, le groupe LR ne pourra pas voter en l’état la proposition de loi.

M. Laurent Esquenet-Goxes (Dem). Le texte est de prime abord technique et il le reste. Il n’en est pas moins indispensable.

Sans lui, nous accroîtrions le mal-être d’un secteur dont la mauvaise santé n’est plus à démontrer. Depuis 2010, le nombre de journaux imprimés a été divisé par deux ; les éditeurs de presse ont vu leur chiffre d’affaires baisser de plus de 40 %. Derrière ces chiffres, il y a des hommes et des femmes, des emplois mais aussi la démocratie. Sans un accès à l’information pour tous, y compris ceux qui ne sont pas familiers d’internet ou ceux qui se réjouissent de sentir le papier entre leurs doigts, la liberté de la presse tangue et avec elle, la légitimité de notre institution.

La presse et le livre ne sont pas des contenants polluants mais des contenus vertueux sur lesquels nous devons nous appuyer pour ne pas sombrer dans une société où les mots, noyés dans un torrent numérique, perdraient de leur valeur et de leur sagesse. Le maintien de l’exception en faveur de la presse est une mesure de bon sens.

Il nous faut recycler papier et emballages et responsabiliser ceux qui sont à l’origine de cette pollution. Il nous faut aussi sensibiliser nos concitoyens, les inciter à faire les bons gestes et à ne pas jeter par terre. Notre groupe est attaché à la mise à disposition d’encarts publicitaires destinés à encourager le tri et les gestes écologiques.

Les collectivités perdront certes des revenus directs mais elles récolteront les fruits bien plus riches de la sensibilisation écologique à condition qu’elles se saisissent du nouvel outil qui leur est offert.

Il n’est pas besoin de rappeler l’importance de la presse dans nos démocraties, en témoigne l’absence d’amendements pour revenir sur l’exception qui est accordée à ce secteur.

Les emballages sont aujourd’hui le plus souvent collectés avec les papiers, raison pour laquelle le texte propose une fusion des filières REP. Nous comprenons toutefois les inquiétudes que les secteurs ont exprimées et espérons que la commission du développement durable saura trouver une solution garantissant un recyclage effectif.

Le groupe Démocrate soutiendra la proposition de loi.

Mme Agnès Carel (HOR). La fusion des deux filières a pour objet la mutualisation des coûts fixes et la simplification de la gouvernance. Le texte substitue aussi à l’application du principe pollueur-payeur aux publications de presse au 1er janvier 2023 une obligation de mise à disposition gratuite par la presse d’encarts publicitaires visant à informer le public sur la transition écologique.

Les collectivités territoriales qui devaient percevoir, par le biais de l’écocontribution obligatoire, près de 20 millions d’euros par an pour financer leur politique de gestion des déchets, sont les perdants de la proposition de loi. Toutefois, l’État leur a versé 150 millions au titre de cette politique.

Sans méconnaître les difficultés de la presse confrontée à la hausse des coûts des matières premières, l’écocontribution représente moins de 2 centimes d’euro par journal vendu pour un réel bénéfice pour la structuration des filières de recyclage.

Le groupe Horizons comprend l’intérêt de renforcer l’information du public sur la transition écologique. Il est aussi très attaché au principe pollueur-payeur dont l’efficacité est démontrée s’agissant des déchets.

Compte tenu de ces interrogations, il défendra deux amendements devant la commission du développement durable : le premier vise à expérimenter la contribution en nature pendant trois ans au terme desquels un rapport du Gouvernement évaluera les conséquences de ce choix et la pertinence d’une écocontribution. Le second amendement, de repli, a pour objet de demander seulement un tel rapport au Gouvernement.

Malgré ces réserves, le groupe votera le texte.

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). La fusion concerne deux filières dont les caractéristiques et les problématiques ne sont pas semblables.

L’ambition de la proposition de loi est double : simplifier et rationaliser ; ne pas mettre en péril la survie de la presse.

Nous devons rester attentifs aux difficultés de la presse car sa bonne santé et sa diversité sont garantes de la pluralité et de la liberté propres à toute démocratie. La presse écrite souffre de la hausse du coût du papier ainsi que de la baisse des ventes. J’ai reçu, comme nombre d’entre vous j’imagine, un courrier m’invitant à soutenir le texte au nom de la défense de la presse quotidienne.

Le nécessaire soutien du Gouvernent aux éditeurs ne doit pas nuire à ses ambitions écologiques. Il y a peut-être d’autres moyens pour l’État de garantir plus directement les aides à la presse en les conditionnant à des critères environnementaux. Nous espérons que les états généraux de l’information se saisiront pleinement du sujet et apporteront des solutions pérennes, ce qui n’a pas été le cas jusqu’à présent.

La simplification et la maîtrise des coûts sont des objectifs louables. Pourtant, la première nous semble souvent le prétexte à un détricotage des acquis écologiques – le projet de loi sur les énergies renouvelables en est un autre exemple.

Le texte n’est pas compatible avec l’effort collectif que réclament nos ambitions écologiques. Alors que la loi Agec représentait une avancée pour l’économie circulaire, il crée un précédent fâcheux pour l’application du principe pollueur-payeur auquel notre groupe est très attaché. Il adresse un mauvais signal à l’ensemble des acteurs économiques : si vous connaissez des difficultés financières, vous êtes exonérés du financement du traitement de vos déchets et de vos objectifs en matière de recyclage. C’est un coup porté à la responsabilité sociétale et environnementale.

Les exigences en matière environnementale étant renvoyées à une convention de partenariat sur laquelle nous n’avons guère de visibilité, il est à craindre que les entreprises ne les respectent plus. Quant aux encarts publicitaires, ils n’équivalent pas aux obligations écoresponsables.

Le caractère rétroactif de la proposition de loi n’est sans poser des difficultés juridiques et opérationnelles.

Enfin, le groupe Écologiste-NUPES s’inquiète du risque que le texte fait peser sur les finances des collectivités territoriales qui doivent déjà supporter l’inflation et la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Elles perdront les 3 millions d’euros qu’elles percevaient, auxquels s’ajoutera un manque à gagner de 17 millions en 2023 alors que les coûts de gestion des déchets croîtront inévitablement. Une fois encore, c’est l’usager qui paiera.

Pour ces raisons, le groupe ne pourra pas voter le texte en l’état.

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). La presse papier vit une crise structurelle mais aussi conjoncturelle. La hausse des coûts des matières premières vient s’ajouter à la perte de lecteurs, à la fermeture des points de vente, aux difficultés de la distribution ainsi qu’à l’inflation et à la pénurie de papier, les ressources étant majoritairement captées par les emballages depuis l’essor du commerce en ligne.

Il est délicat de déroger à la responsabilité élargie des producteurs au risque de se soustraire à ses obligations financières en faveur de l’environnement.

Dans le cas de la presse, à l’instar du régime du livre, il nous faut concilier deux impératifs : la contribution des producteurs à la prise en charge et à la valorisation de leurs déchets ; le soutien à un secteur fondamental qui touche à la vie des idées, à la culture et à la démocratie. C’est la raison pour laquelle la presse pouvait jusqu’à présent contribuer en nature à ses obligations en matière d’écologie. La fin de cette exception entraînerait selon un rapport sénatorial une contribution d’un montant de 22 millions d’euros. L’exclusion de la presse et du livre de la filière REP, comme le font tous les autres pays européens, semble plus adaptée.

Pour le groupe GDR-NUPES, la solution trouvée par la proposition de loi est la bonne. L’obligation de mise à disposition d’encarts publicitaires pour l’information du public sur la transition écologique, et non plus seulement sur le tri, apporte une amélioration bienvenue.

Nous aurions cependant souhaité débattre d’une restriction du dispositif à la seule presse d’information politique et générale, à l’exclusion des titres qui ne participent ni à la diffusion des idées ni à la vie démocratique – les deux catégories ne sont pas comparables du point de vue de l’intérêt général qui justifie la dérogation.

Sous réserve des travaux de la commission du développement durable, notre groupe, soucieux de soutenir la presse, votera en faveur du texte.

Mme Béatrice Descamps (LIOT). Les difficultés de la presse ne cessent de s’accumuler : érosion des ventes, faillite de Presstalis, transition numérique délicate, concurrence de grandes plateformes numériques ; s’y ajoute depuis le début de l’année la hausse dramatique des coûts de production. À l’instar d’autres secteurs économiques, la presse est affectée par la guerre en Ukraine et par la hausse des prix de l’énergie, dont les conséquences se font particulièrement sentir sur le prix du papier : alors que la tonne coûtait 400 euros au premier trimestre de l’année 2021, elle atteint 900 euros.

Ces évolutions tarifaires ne résultent pas exclusivement du contexte géopolitique, elles ont également des causes structurelles. La première est la chute de la production du papier journal. Voilà plusieurs années que les papetiers choisissent de réorienter leurs investissements vers l’emballage en carton plutôt que de continuer à produire du papier pour les journaux. Face à cette raréfaction et à la hausse du coût du papier, la presse nationale n’a d’autre choix que d’augmenter ses prix. Depuis janvier 2023, il faut débourser 20 centimes de plus pour acheter l’édition papier du Monde, des Échos ou du Figaro. Le modèle de la presse quotidienne régionale reposant encore sur les ventes des numéros en version papier, des suppressions de postes sont à craindre ; des dizaines d’emplois seraient ainsi menacés à La Voix du Nord. Toute une filière est ébranlée, l’avenir de la presse écrite est bousculé et, avec elle, c’est l’accès à une information et à un débat public de qualité qui pourrait être remis en cause.

Cette proposition de loi ne suffira pas à rééquilibrer le modèle économique d’un secteur en crise ; ce n’est d’ailleurs pas sa vocation. Reste que ce texte nous donne l’occasion d’aborder des sujets essentiels, en premier lieu celui de l’approvisionnement en papier de la presse. Selon l’auteur de la proposition de loi, la fusion entre les filières REP doit permettre de mieux prendre en compte les dynamiques d’évolution des tonnages de mise sur le marché des papiers et des cartons. Mais cela préservera-t-il la production du papier ? N’y a-t-il pas un risque de favoriser l’approvisionnement des emballages en carton et en papier au détriment du papier d’édition ?

La fin de la participation financière de la presse à la collecte et au tri des déchets fait également débat. Si ce texte était adopté, sa seule obligation serait de mettre à disposition des encarts publicitaires visant à informer le public sur la transition écologique. Nous partageons bien évidemment la volonté de soutenir les titres mis en danger par la hausse des prix, mais nous nous interrogeons sur les dispositions qui seront prises pour accompagner les collectivités territoriales, qui ont investi dans des dispositifs de tri et qui ne recevront plus de contribution financière. Ce n’est pas à elles de payer le prix des difficultés de la presse.

À ce stade de l’examen de la proposition de loi, le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires s’abstiendra.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis. Je remercie MM. Bataillon et Esquenet-Goxes d’avoir pris la défense de la presse et d’avoir rappelé les difficultés que rencontre ce secteur qui se trouve au centre de notre démocratie.

Madame Blanc, nous sommes en accord sur presque tous les sujets. Vous avez néanmoins dit que nous proposions de faire payer les collectivités territoriales, ce qui n’est pas tout à fait le cas : nous posons la question du payeur dans le cadre d’un débat général. Il y a effectivement un coût supplémentaire à améliorer le tri : qui le prendra en charge ? Nous nous interrogeons tous à ce sujet.

Monsieur Davi, votre prise de parole prouve la nécessité d’encarts dans la presse car vous avez souligné l’urgence à réduire la quantité de déchets, or c’est précisément la vocation d’une REP, qui vise à diminuer, tout au long du cycle de production, la masse de déchets émis par une filière. Les encarts dans la presse diffuseront des messages sur la transition écologique : vous voyez donc toute l’utilité du texte.

Monsieur Gaultier, je vous remercie de nous alerter sur la difficulté des éditeurs de presse à se fournir en matières premières. Il est de plus en plus ardu d’avoir accès à un papier qui réponde aux critères écologiques, même si, pour répondre à M. Raux qui s’inquiétait du respect de ces critères, tous les acteurs de la presse que nous avons auditionnés se sont engagés à ne pas reculer dans ce domaine.

Madame Descamps, vous avez pointé le problème qui pourrait se poser pour les collectivités territoriales et dont nous avons déjà parlé.

Monsieur Peu, nous sommes à peu près d’accord. Une éventuelle distinction entre les titres de presse poserait un problème de conformité à la Constitution car elle pourrait constituer une rupture d’égalité.

Mme la présidente Isabelle Rauch. La discussion générale est close, nous en venons à l’examen des articles.

 

Article 1er

Amendement AC1 de la rapporteure pour avis.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis. L’amendement vise à associer le ministre chargé des collectivités territoriales à la convention de partenariat, en plus du ministre chargé de l’environnement et celui chargé de la communication. L’objectif est de rapprocher les encarts publicitaires des contextes locaux.

Tous les élus locaux savent qu’il serait utile de passer certains messages ; ainsi, dans ma communauté de communes, des cotons ont été retrouvés dans les bacs jaunes et le recyclage des pots de yaourt a dû être repensé. Il serait opportun que ces informations soient diffusées dans la presse locale plutôt que d’être répétées à chaque cérémonie de vœux ! Associer le ministre chargé des collectivités territoriales permettrait d’intégrer ces dernières et d’être plus en phase avec le terrain.

Mme Véronique Riotton (RE). Ancienne rapporteure de la loi Agec, j’ai pu participer aux auditions préalables à l’élaboration de cette proposition de loi – j’en remercie M. Masséglia – et y poser des questions.

Bien que je soutienne l’idée de déployer des dispositifs qui aident la presse à adopter un modèle économique pérenne, je ne peux accepter que cela se fasse au détriment de la REP. Sous couvert d’aide à un secteur en difficulté, cette proposition de loi affaiblit le concept même de responsabilité élargie des producteurs. Avec ces mesures, on libère les entreprises de presse de leur responsabilité écologique et économique parce qu’elles ne se sont pas préparées à l’échéance du 1er janvier 2023.

Mme la présidente Isabelle Rauch. Madame la députée, vous avez la parole pour donner votre avis sur l’amendement.

Mme Véronique Riotton (RE). Je suis en train de le faire.

Mme la présidente Isabelle Rauch. Vous avez dépassé le temps qui vous était imparti. Êtes-vous pour ou contre l’amendement ?

Mme Véronique Riotton (RE). Résolument contre !

M. Quentin Bataillon (RE). L’amendement est logique puisque ce sont les collectivités territoriales qui financent et qui gèrent les organismes de collecte. Le ministère qui les représente a donc toute sa place dans ce dispositif. Nous voterons donc en faveur de l’amendement.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AC2 de la rapporteure pour avis.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis. Peut-être cet amendement apaisera-t-il l’inquiétude de Mme Riotton. Il vise à ajouter une mention relative à la convention de partenariat conclue entre l’État et les organisations professionnelles d’entreprises de presse représentatives afin de préciser que les conditions dans lesquelles les publications de presse mettent gratuitement à disposition des espaces de communication destinés à informer le public sur la transition écologique sont, notamment, de nature environnementale. Cette dimension fait écho aux cinq critères que doit respecter la presse dans l’actuelle écocontribution en nature ; pour que ceux-ci soient repris dans la convention de partenariat, il importe que la loi apporte cette précision.

Mme Véronique Riotton (RE). Les conventions de partenariat ne sont pas une solution pour la presse, qui a besoin d’entrer dans la dynamique de la contribution REP. La voie des engagements volontaires ne me semble pas très crédible. Autoriser la presse à échapper à ses obligations est tout à fait injuste pour les autres secteurs qui se sont, eux, préparés à la bascule numérique et économique.

Les différentes auditions conduites par M. Masséglia et Mme Bannier ont été très instructives, notamment celle de l’association Amorce : alors que les éco-organismes ne financent pas assez la collecte et le ramassage, est-il opportun de réduire encore les transferts financiers de la presse vers ces éco-organismes et vers les collectivités territoriales ? Je ne le crois pas.

L’inconvénient d’une proposition de loi tient à l’absence d’étude d’impact. Il me paraît donc nécessaire de trouver d’autres dispositifs d’aide à la presse, lesquels pourraient être examinés à l’occasion du prochain projet de loi de finances.

M. Denis Masséglia (RE). Si je pouvais voter, j’approuverais des deux mains cet amendement très intéressant. Il représente une petite partie du dispositif qui sera examiné demain en commission du Développement durable et de l’aménagement du territoire. Tout le monde l’a dit, il faut accompagner la presse dans la transition écologique.

En entrant dans la REP, la presse se trouve déliée de toutes ses obligations écologiques – pourcentage de fibres recyclées, utilisation des encres… –. Nous étudierons des amendements visant à ce qu’elle puisse communiquer beaucoup plus largement sur l’écologie et doive remplir des exigences beaucoup plus élevées que celles de la REP et celles actuellement en vigueur.

Monsieur Raux, votre exposé contient une erreur car la presse peut signer la convention de partenariat : si elle le fait, elle pourra choisir le paiement en nature ; dans le cas contraire, elle restera dans la REP et n’en sera pas exonérée. On conserve le système qui prévalait jusqu’à l’année dernière mais on en renforce la dimension écologique et le poids des collectivités territoriales.

La commission adopte l’amendement.

 

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 1er modifié.

 

Article 2

Amendement AC3 de la rapporteure pour avis.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis. Cet amendement technique prévoit une mise en conformité de l’agrément des éco-organismes avec le texte de la proposition de loi. Les agréments sont revus tous les six ans, et la prochaine révision aura lieu l’année prochaine.

M. Denis Masséglia (RE). Nous examinerons demain un amendement précisant le régime de la convention. Celle-ci sera signée pour trois ans et sera donc régulièrement rediscutée par le Gouvernement, les collectivités territoriales et les représentants de la presse. Les obligations environnementales seront donc revues tous les trois ans, dans le but d’accompagner le plus loin possible la filière de la presse, laquelle ne s’oppose pas à l’écologie et peut aider toutes les Françaises et tous les Français à adopter les bons gestes de tri.

Mme Véronique Riotton (RE). Les auditions ont montré que la presse n’avait de cesse depuis 2006 de s’extraire de ses obligations écologiques. Le véhicule de la convention lui permettra d’esquiver encore sa transformation, alors qu’elle n’a pas changé son modèle économique pendant les trois ans de transition prévus par la loi Agec de 2020. L’Alliance de la presse d’information générale, qui représente le secteur, n’a pas compris ce qu’était la responsabilité élargie du producteur et n’a pas du tout entamé sa conversion écologique. Je ne vois pas comment une convention pourrait entraîner le moindre changement. Ce texte n’est pas une bonne réponse au retard de la presse en matière de transformation écologique.

Mme Géraldine Bannier, rapporteure pour avis. La presse réserve des encarts aux messages relatifs à la transition écologique, ce qui représente des pertes de recettes publicitaires pour elle. Elle a conscience de l’engagement écologique qui doit être le sien, puisqu’elle répond favorablement à 85 % des demandes en la matière.

La commission adopte l’amendement.

 

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 2 modifié.

 

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

 

 

 

 

 

 

La séance est levée à vingt-deux heures quarante.


Présences en réunion

 

 

Présents. - Mme Ségolène Amiot, Mme Géraldine Bannier, M. Quentin Bataillon, M. Belkhir Belhaddad, Mme Béatrice Bellamy, Mme Sophie Blanc, Mme Céline Calvez, Mme Agnès Carel, Mme Fabienne Colboc, M. Hendrik Davi, Mme Béatrice Descamps, M. Laurent Esquenet-Goxes, M. Philippe Fait, M. Jean-Jacques Gaultier, M. Christophe Marion, Mme Sophie Mette, M. Stéphane Peu, Mme Béatrice Piron, Mme Isabelle Rauch, M. Jean-Claude Raux, Mme Véronique Riotton, Mme Violette Spillebout

Excusés. - Mme Aurore Bergé, M. Frantz Gumbs, M. Stéphane Lenormand, M. Frédéric Maillot, M. Boris Vallaud

Assistait également à la réunion. - M. Denis Masséglia