Compte rendu

Commission
des affaires économiques

– Examen de la proposition de loi visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux (n° 790) (MM. Stéphane Vojetta et Arthur Delaporte,
co-rapporteurs)....................................2


Mercredi 22 mars 2023

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 51

session ordinaire de 2022-2023

Présidence de

M. Guillaume Kasbarian,

Président


  1 

La commission des affaires économiques a examiné la proposition de loi visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux (n° 790) (MM. Stéphane Vojetta et Arthur Delaporte, co-rapporteurs).

M. le président Guillaume Kasbarian. En examinant la proposition de loi visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux, rapportée par nos collègues Stéphane Vojetta et Arthur Delaporte, nous ferons œuvre pionnière en encadrant juridiquement une profession qui émerge, portée par le développement des nouveaux moyens de communication électronique. Cette législation protégera non seulement les victimes d’arnaques, mais aussi les influenceurs eux-mêmes, car elle balisera juridiquement leur champ d’activité, en les éclairant sur ce qui est autorisé et ce qui est interdit.

Pour permettre à chacun de mieux appréhender les enjeux, j’ai organisé en commission plénière deux tables-rondes, qui se sont tenues hier dans cette même salle.

Je salue l’élan transpartisan qui a permis de rassembler des députés de la majorité et de l’opposition pour l’élaboration de cette proposition de loi. Le 9 février dernier, Arthur Delaporte avait choisi de retirer sa propre proposition de loi, inscrite dans la niche parlementaire du groupe Socialistes et apparentés, afin de s’associer à ce travail collectif.

Preuve que le sujet intéresse : 200 amendements ont été déposés. J’en ai déclaré six irrecevables au titre de l’article 45 de la Constitution, car leur champ d’application visait toutes les pratiques commerciales ou tous les moyens de communication, alors que la proposition de loi se concentre sur les pratiques des seuls influenceurs.

Les rapporteurs ont choisi de déposer des amendements de rédaction globale sur plusieurs articles, ce qui devrait conduire à la chute de nombreux amendements. Plus de soixante-dix sous-amendements ont alors été déposés. Si je m’en étais tenu aux règles habituelles de recevabilité, la plupart d’entre eux auraient été irrecevables. J’ai toutefois décidé de n’écarter que les sous-amendements sans aucun lien avec l’amendement ou contredisant celui-ci, afin que les débats puissent se tenir en commission, et pas seulement en séance publique. En contrepartie, je n’accepte plus le dépôt de sous-amendements : il demeure possible d’amender en séance publique.

Il nous reste au total 173 amendements à examiner, mais nombre d’entre eux sont susceptibles de tomber après l’adoption d’un amendement proposant une nouvelle rédaction de l’article concerné.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. « C’est maintenant qu’il ne faut rien lâcher. » : ces mots sont ceux de Seb La Frite, 3,1 millions d’abonnés sur Twitter, influenceur qui, comme Léna Situations (4 millions d’abonnés sur Instagram) ou Inoxtag (2,7 millions sur Twitter) s’intéresse particulièrement, ces derniers jours, à la politique. Ils nous engagent à agir, notamment dans cette période parsemée de troubles politiques, pour réguler un lieu
– l’influence – dont la politique s’est peut-être trop longtemps désintéressée. Les initiatives visant à réguler la jungle de l’influence foisonnent néanmoins et il était temps de les faire converger. C’est dans cette perspective que j’avais déposé une proposition de loi, que j’ai accepté de retirer pour reprendre le travail et construire ce que mon collègue Stéphane Vojetta appelle une « bulle de paix » autour de ce texte transpartisan, rendu nécessaire par l’importance qu’ont prise ces jeunes femmes et ces jeunes hommes dans le quotidien des Français et par les dérives majeures qu’on a pu observer de la part d’une minorité d’entre eux.

Cette importance se mesure aussi à l’image unie qu’offre notre Assemblée pour faire collectivement évoluer notre droit – et j’espère qu’elle saura reproduire de telles initiatives jusqu’ici exceptionnelles.

Je suis donc fier de vous présenter, avec mon collègue Stéphane Vojetta, un texte qui répond à l’un des enjeux de notre époque, que certains d’entre nous voient de loin, mais qui a mobilisé de nombreux autres acteurs que je tiens à saluer en notre nom à tous deux. Je remercie tous les députés qui se sont engagés dans le groupe de travail transpartisan que nous avons lancé depuis maintenant deux mois pour coconstruire les amendements de consensus que nous vous présenterons au fil de l’examen de ce texte initialement bipartisan, mais que nous avons élargi à l’ensemble des groupes de l’arc républicain.

Ce texte vise à lutter efficacement contre les trop nombreuses dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux, dont nous avons eu hier soir des témoignages concrets et édifiants. Les exemples s’accumulent : Marc et Nadé Blata, accusés d’escroqueries aux cryptomonnaies ; Julien Tanti, qui faisait la promotion de maillots contrefaits – affaire à laquelle notre collègue Blanchet s’intéressera particulièrement ; Maeva Ghenam, qui a fait la promotion d’objets vendus sur des sites dépourvus de conditions générales de vente ou de cosmétiques non conformes au droit de l’Union européenne et provoquant, par exemple, des plaques urticantes ; Mila Jasmine, qui vante la pratique illégale de la médecine ; Kevin Guedj, qui promouvait du trading.

Ces influenceurs aux millions d’abonnés ne sont que la partie visible des dérives et d’autres abus ont pu être constatés de la part de plus petits acteurs, micro- ou nano-influenceurs n’ayant que quelques centaines ou quelques milliers d’abonnés, mais dont les taux de conversion vers une pratique, une dérive ou un acte de consommation sont diablement efficaces. Ce texte vient donc apporter des fondations à l’édifice de la régulation d’un milieu qui a multiplié les dérives, apparemment en toute impunité : cette impunité est finie.

Il répond aussi à la question de savoir comment ne pas stigmatiser les créateurs de contenus, ces centaines, ces milliers ou ces dizaines de milliers d’influenceurs qui font leur travail correctement, avec une éthique qui leur tient à cœur. Celles et ceux que j’ai mentionnés ou que nous avons reçus hier soir, comme Major Mouvement, Crazy Sally ou Squeezie, sont des femmes et des hommes talentueux produisant du divertissement ou des contenus pédagogiques qui touchent des millions de Françaises et de Français, et nous ne pouvons pas nous permettre d’avoir un jugement moral sur l’ensemble de cette activité. Pour ces vidéastes et ces influenceurs, ce texte est avant tout pédagogique. La promotion qu’ils pratiquent ne dépasse pas le cadre des droits des consommateurs et nous ne vivons pas sous un régime liberticide. Nous souhaitons valoriser leur travail, notamment lorsqu’il va dans le bon sens.

Ce texte s’adresse donc à la fois aux victimes, aux consommateurs et à tous les autres influenceurs, comme Roubaba, Melanight ou Noémie, qui n’étaient pas nécessairement conscients de toutes les règles, mais qui cherchent aujourd’hui un cadre de référence. Il s’agit ainsi d’un texte qui responsabilise, un texte pédagogique, mais un texte qui sanctionne aussi et exprime un équilibre que nous avons cherché à construire depuis plusieurs mois en rencontrant l’ensemble des acteurs du secteur, en les écoutant et en prenant en compte leurs suggestions et celles des parlementaires impliqués dans ce domaine.

Je remercie l’ensemble des personnes auditionnées, les administrations, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), les acteurs du milieu de l’influence et toutes nos équipes, ainsi que les lanceurs d’alerte qui nous ont accompagnés, les collectifs, Audrey, Kumba, Chris et Slim, que nous avons reçus hier, et Samira, qui m’a permis d’accéder à certains influenceurs et à une communauté qui s’intéresse à la question.

M. Stéphane Vojetta (RE). Dans les circonstances actuelles, certains pourraient penser que notre Assemblée n’est plus adaptée au monde d’aujourd’hui – trop lente, trop partisane, trop téléguidée, trop déconnectée. Pourtant, membre de la majorité et soutien assumé du Président de la République, je siège ici en qualité de co-rapporteur aux côtés de mon collègue Arthur Delaporte, du groupe Socialistes et apparentés (membre de l’intergroupe NUPES). Chacun connaît nos différences et celles de nos groupes respectifs sur bien d’autres sujets, notamment ceux qui ont fait vibrer l’hémicycle ces dernières semaines, et que je ne mentionnerai pas pour respecter l’esprit de la « bulle de paix » invoquée par M. Delaporte et dans laquelle nous avons, d’un commun accord, décidé de travailler.

Comme bien d’autres parlementaires sur notre continent, nous avons su créer une passerelle entre nos groupes et négocier des points de convergence en faisant de notre mieux pour ignorer les postures idéologiques et avancer vers le consensus qui, je l’espère, se matérialisera ce matin. Pour ce faire, il fallait notamment se faire confiance, s’écouter et oser se dire les choses en face. Merci donc, cher co-rapporteur, d’avoir saisi ma main tendue et d’avoir cru en la sincérité de ma démarche. J’espère que vous ne le regretterez pas.

Pour ce texte, nous avons voulu surmonter nos différences, dans l’intérêt des Français et des nombreuses victimes des dérives auxquelles nous souhaitons mettre fin. C’est aussi dans l’intérêt de l’immense majorité des influenceurs et créateurs de contenus, ceux qui ont un comportement responsable et respectueux des règles, et qui ne méritent pas de voir leur image polluée par une minorité irresponsable ou carrément malhonnête. Cette majorité d’influenceurs mérite également d’exercer son activité d’influence commerciale dans un cadre clarifié.

Je me réjouis donc de vous présenter notre proposition de loi, dans un format peut-être audacieux – le travail collectif nous a parfois conduits à improviser et nous amènera à le faire ce matin encore –, qui prouve que la représentation nationale a du ressort. Nous n’avons pas inventé le « transpartisanisme », mais nous espérons que ce processus pourra inspirer à l’avenir certains d’entre nous, issus de groupes différents, mais entre lesquels le compromis n’est pas impossible pour porter des textes différents et les porter ensemble. C’est notamment ainsi que nous parviendrons à rester des parlementaires efficaces dans les années à venir, en dépit de la configuration actuelle de notre vie politique.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. En écho aux questions que nous venons d’évoquer, le texte vise à traiter de la responsabilisation et de la sanction. Nous avons décidé de vous présenter des amendements de réécriture, notamment sur l’article 1er pour scinder les différents sujets qu’il contient. Nous avons aussi retravaillé collectivement cet article 1er, qui vise à définir l’influence commerciale, pour faire évoluer cette définition vers les notions d’activité et de pratique de l’influence commerciale.

Un article additionnel après l’article 1er rappellera les droits et les devoirs des influenceurs, dont celui de respecter les divers cadres légaux, notamment sur les réseaux sociaux – je pense en particulier à la loi Évin.

L’article 1er ter vise, quant à lui, à réguler et à sanctionner d’une manière plus effective certaines promotions, en raison d’intérêts d’ordre public ou en vue de la préservation de la santé publique. Nous y reviendrons.

Les posts relatifs à la chirurgie esthétique, aux investissements risqués et aux inscriptions à des formations « bidon » doivent être bannis de l’influence commerciale. Nous avons entendu hier des témoignages édifiants sur les conséquences de ces pratiques pour la vie des Françaises et des Français. Il s’agit donc de préserver et de protéger les consommateurs, notamment les publics vulnérables. De nombreux jeunes suivent ces influenceurs : il s’agit de personnes fragiles économiquement, qui leur font confiance, créent ou pensent créer avec eux un lien spécial et peuvent tomber dans des pièges, perdant des sommes d’argent considérables ou malmenant leur santé.

Nous proposerons des amendements de réécriture à propos de la question de la publicité, faisant évoluer la notion contraignante de « bandeau » vers un régime de mentions obligatoires, et renvoyons aussi au pouvoir réglementaire pour disposer d’une certaine souplesse dans la mise en place de ces régulations, élaborer des mécanismes d’exception et éviter au mieux les effets de bord.

Les règles issues de cette proposition de loi nous permettront de disposer d’une définition pour armer la base juridique, qui nous permettra aussi, au fil de la navette et de la commission mixte paritaire (CMP), de continuer à travailler ces définitions. Nous pensons cependant vous fournir ici une première base, fruit d’un consensus.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Le texte conjoint a évolué à la suite des rencontres informelles que nous avons eues et des auditions officielles que nous avons menées. Nous avons également été associés aux tables-rondes de Bercy et avons lu avec attention les conclusions de la consultation publique engagée par Bruno Le Maire, à laquelle des dizaines de milliers de Françaises et de Français ont contribué. En résultent les grands principes et objectifs que poursuit ce texte et que nous poursuivons : ne plus permettre que l’influence commerciale soit une manière de contourner les règles ; mettre fin à l’ambiguïté, parfois savamment entretenue, quant à la légitimité ou l’applicabilité de certaines lois à l’influence commerciale ; compléter, de manière très ciblée, certaines des restrictions actuelles – non pas pour « faire la morale », mais parce que nous estimons que ces restrictions ne garantissent pas assez la défense de la santé publique et celle des droits des consommateurs ou des investisseurs ; encadrer une activité qui devient prépondérante et très légitime dans les stratégies marketing des entreprises ; responsabiliser toutes les parties prenantes à l’influence commerciale – créateurs de contenus, apporteurs d’affaires, annonceurs et plateformes. Tout cela, bien sûr, sans vouloir d’aucune manière entraver la liberté d’expression ni vouloir faire peser des contraintes injustifiées sur les secteurs économiques concernés.

Dans l’examen du texte, j’interviendrai pour les articles 2 à 5. L’article 2 définit le statut d’agent influenceur et rend obligatoire l’établissement d’un contrat écrit entre l’influenceur et l’annonceur ou son agent, intermédiaire ou apporteur d’affaires. Les articles 3 et 4, quant à eux, visent à s’assurer de la responsabilisation des plateformes numériques en reprenant des éléments du règlement européen sur les services numériques (Digital Services Act, DSA). Enfin, gardant à l’esprit que nous légiférons pour l’avenir et en pensant donc à notre jeunesse, nous intégrerons, avec l’article 5, la notion de « sensibilisation aux risques d’ordre commercial » dans la formation aux risques numériques dispensée par les établissements scolaires et votée l’an dernier dans le cadre du projet de loi renforçant les principes de la République.

M. le président Guillaume Kasbarian. Nous en venons aux orateurs des groupes.

Mme Violette Spillebout (RE). Le sujet que nous abordons est très attendu par nos jeunes, mais aussi par l’ensemble de nos concitoyens et des consommateurs. Il suffit d’être un utilisateur régulier des réseaux sociaux ou de plateformes comme YouTube pour être régulièrement alerté par les dérives de l’influence en ligne. Nous voulons éviter de nouvelles victimes de ces placements financiers frauduleux, de ces produits de blanchiment dentaire dangereux ou de ces escroqueries au compte formation professionnel (CFP), promus bien trop souvent par des influenceurs à très forte notoriété et issus de la téléréalité. Au départ, c’est une promesse de beauté éternelle, de pilule miracle pour guérir le cancer, d’injection à moitié prix ou de placement financier hasardeux à taux positif qui vous rapportera 15 % par jour sur les six prochains mois.

Pour les annonceurs et les marques, ces prescripteurs 2.0 à forte notoriété sont les partenaires idéaux pour faire la promotion de leurs produits et développer leurs profits. Cependant, derrière les promesses de ces vendeurs de rêve, gare aux mirages et aux désillusions en cascade ! Les victimes sont vulnérables, naïves parfois : elles font confiance à leurs idoles.

Heureusement, pour les défendre et les protéger, de nombreux collectifs se sont organisés depuis quelques années. Nous les avons reçus hier soir et les avons attentivement écoutés. Le Gouvernement a aussi pris en considération cette urgence et créé le site signal.conso.gouv.fr, service public destiné aux consommateurs, rattaché à la DGCCRF et dont la mission s’articule autour de la régulation concurrentielle des marchés, de la protection économique des consommateurs et de leur sécurité.

Une grande consultation a été menée par le ministre Bruno Le Maire pour nourrir notre proposition de loi. Le groupe des députés Renaissance entend ces enjeux et souhaite, avec ce texte, alerter et protéger, afin que nos enfants et les moins jeunes d’entre nous ne se fassent plus avoir, que nul ne soit au-dessus des lois, qu’aucun influenceur ne puisse plus dire qu’il ne savait pas et qu’il n’y ait plus d’amendes du type de celle de Nabilla ou de condamnations telles que celle du couple Blata et, surtout, plus de victimes désabusées.

Notre proposition se fonde, certes, sur les dérives de la promotion agressive de produits et de pratiques interdits, mais cette préoccupation ne doit pas masquer le fait qu’heureusement, la majorité des influenceurs respectent les règles en vigueur et attachent une grande importance aux pratiques éthiques et responsables. En aucun cas elle n’a vocation à punir les créateurs de contenus et les agences qui véhiculent de belles valeurs auprès du jeune public, créent des emplois et sont des modèles pour notre jeunesse. C’est notamment le sens d’un amendement que je défendrai pour instaurer un label national « Relations influenceurs responsables », pour garantir la transparence des pratiques et le respect de la réglementation. Nous nous préoccuperons aussi, dans ce texte, de protéger davantage les relations entre les créateurs de contenus et les agents ou annonceurs, et les droits de l’influenceur.

Nous avons ce matin une responsabilité et une chance inouïe de pouvoir protéger les victimes et structurer la nouvelle filière de l’influence sur les réseaux sociaux ou sur les plateformes. Merci à nos deux rapporteurs d’agir si concrètement, après plus de dix ans de vide juridique, avec cette très belle proposition de loi transpartisane, que le groupe Renaissance soutient et enrichira.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Je confirme que ce travail collectif impliquait également le Gouvernement, notamment les ministres de Bercy relevant de Bruno Le Maire, à savoir Olivia Grégoire et Jean-Noël Barrot. Cette proposition de loi s’inscrit dans un cadre de conclusions, dont une part prendra la forme de mesures d’ordre réglementaire, qui seront notamment annoncées par Bruno Le Maire ce vendredi. Elles s’inscriront dans une structuration d’ensemble du secteur, s’appuyant notamment sur des initiatives dont nous avons débattu avec l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), parmi lesquelles la création d’un « Certificat d’influence responsable ».

Doit être mené en parallèle tout un travail de régulation, d’autorégulation et d’organisation du secteur, que nous soutenons et auquel j’espère que cette proposition de loi apportera un cadre législatif nécessaire et utile.

Mme Christine Engrand (RN). Je ne redirai pas – car notre groupe l’a déjà dit – qu’une telle proposition de loi devrait être plus appropriée du point de vue politique et économique, surtout au vu des difficultés rencontrées par nos entreprises. Par cohérence, je ne m’attarderai pas non plus sur le caractère rébarbatif de certaines propositions de l’article 1er, que nous avions déjà longuement critiqué lors de l’examen de la proposition de loi en février. Je me pencherai plutôt sur les nouveautés de cette proposition, en commençant par saluer cette tentative de soumettre au droit français les influenceurs installés à l’étranger.

Cette proposition s’inscrit dans l’air du temps : le début de la fin du « village global », où une poignée de privilégiés apatrides peuvent se défaire de toute contrainte légale. Cependant, cette tentative, aussi louable soit-elle, est condamnée dès le départ à rester un vœu pieux, faute de moyens coercitifs concrets. Vous dites que les influenceurs qui proposent du contenu à destination de la population française doivent être représentés légalement en France, afin d’être indirectement soumis à notre droit par l’intermédiaire de leur représentant. Très bien ! Mais que proposez-vous pour les contraindre à désigner ce représentant légal ? Cette proposition ne changera pas grand-chose pour les influenceurs de demain, qui assument de piétiner le droit français : tant qu’ils ne daigneront pas se faire représenter, rien ne pourra leur arriver.

Des solutions concrètes existent, qui consistent à « taper là où ça fait mal », en entachant la réputation des fraudeurs et en limitant l’audience de leurs publicités. C’est ce que nous vous proposerons par nos amendements.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Vous taxez notre texte de « rébarbatif » : nous considérons, pour notre part, qu’il est très positif et touche divers pans du droit qui appelaient une régulation.

Vous affirmez qu’il ne changera pas grand-chose : nous pensons, au contraire, qu’il peut changer beaucoup, ne serait-ce qu’en définissant ce dont on ne parle pas.

Enfin, alors que nous avons réussi à construire cette bulle de paix, j’observe qu’un seul groupe fait preuve d’agressivité : le vôtre.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Je suis très fier de représenter des Français de l’étranger qui, dans leur immense majorité, s’expatrient pour de belles raisons et certainement pas pour échapper à la loi ou à l’impôt. Je déplore donc la qualification de « privilégiés apatrides », beaucoup trop générique et qui illustre la capacité de certaines brebis galeuses à contaminer l’image des influenceurs responsables, qui pâtit des agissements des autres.

Le texte propose des solutions concrètes pour que personne ne puisse recourir à des stratégies d’évitement de la loi en s’éloignant du territoire français et européen – car l’Europe nous protège aussi. Ce sera notamment le cas de la mention obligatoire dans le contrat, lui‑même obligatoire, de l’application du droit français à ces opérations de promotion commerciale, et de l’obligation de souscrire une police d’assurance en responsabilité civile pour les personnes agissant hors du territoire européen et dont les activités pourraient provoquer des dommages pour des consommateurs situés sur le territoire français.

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES). Cela faisait trop longtemps que les victimes d’arnaques d’influenceurs sur les réseaux sociaux attendaient des actes. La vidéo du ministre de l’économie et des finances appelant les influenceurs à la responsabilité n’a manifestement pas été suffisante, malgré la création du site SignalConso. C’est la raison pour laquelle François Piquemal, Aurélien Taché et moi-même avions lancé des pistes, avec deux propositions de loi. Le travail mené par Ségolène Amiot sur la protection des mineurs vient idéalement compléter notre réflexion collective.

De nombreuses associations de victimes, des collectifs, de nombreux lanceurs d’alerte et des internautes étaient mobilisés, mais ils étaient bien seuls. On peut citer à cet égard le collectif « Aide aux victimes d’influenceurs » (AVI) que vous avez reçu, Vos stars en réalité, ou Signal-Arnaques, ainsi que de nombreux internautes anonymes, fortement mobilisés sur les réseaux sociaux. Que cela plaise ou non, l’entrée en scène du rappeur Booba, aux méthodes certes contestées et contestables, a aidé à la prise de conscience médiatique.

Le sujet n’est pas anodin. Cryptomonnaies, dropshipping, arnaques au CPF, produits cosmétiques dangereux ou trading : au bout des arnaques ou des dérives, il y a parfois de la précarité et de la mise en danger physique ou psychologique. Il s’agit de réguler une activité qui attire. Il n’est pas question, certes, de jeter la pierre aux créateurs de contenus, mais cette démarche de régulation répond à un fort enjeu éthique. Le secteur de l’influence commerciale ne doit pas devenir synonyme d’argent facile sur le dos des consommateurs.

Toutefois, bon nombre de pratiques commerciales illégales et d’escroqueries en ligne tombent déjà sous le coup de la loi. Notre démarche consiste donc davantage à approfondir le cadre réglementaire et législatif et à démasquer les responsables dans le contexte spécifique et mouvant des réseaux sociaux. Il faut également souligner le rôle des plateformes et le manque de moyens systémique de l’État. Surtout, ce n’est pas aux plateformes seules, en tant qu’entreprises privées, qu’il revient de fixer des normes d’intérêt général. La clé réside dans l’implication totale de la justice et de l’administration de l’État, car aucun signalement n’aura jamais la force de la chose contrôlée et jugée.

Le marché de l’influence a été multiplié par dix depuis 2016, pour atteindre une valeur de 16 milliards d’euros. Or le renforcement des moyens de l’État prévu en parallèle est très modeste et les chartes, guides et labels de bonnes pratiques n’engagent que celles et ceux qui y croient. Notre triptyque est donc le suivant : protection des victimes, responsabilisation des plateformes et répression des fraudes.

De nombreuses mesures de ce texte vont dans le bon sens. Cependant, les moyens d’agir et de se défendre pour les citoyens doivent être musclés. Il y va de la crédibilité de tous les acteurs. Ce sera le sens de nos amendements.

À ce stade, nous ne savons pas quels seront les engagements du ministère de l’économie et des finances, dont les annonces ont été reportées. De ces annonces dépend la portée réelle de ce texte. Or, manifestement, les annonces du ministre seront plutôt axées sur la structuration de la filière. Nous avons, quant à nous, de grandes attentes du point de vue des droits des consommateurs et de la défense des victimes. C’est donc à l’issue du parcours démocratique de cette proposition de loi que nous nous prononcerons définitivement.

Pour conclure, je vous remercie de ce travail transpartisan, qui a vraiment été très inclusif.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Merci de saluer le caractère inclusif de notre travail. Vous avez évoqué les lanceurs d’alerte et les victimes, ainsi que le rôle de certains acteurs, comme le rappeur Booba, qui a été reconnu par la presse.

Il s’agit ici de réguler une activité qui fait l’objet, ces derniers temps, d’un grand nombre de campagnes et d’articles. Nous nous inscrivons dans le moment présent et espérons, par ailleurs, que le texte que votera notre Assemblée sera pionnier en Europe, où les autres pays sont confrontés aux mêmes problèmes que nous, cherchant en tâtonnant à réguler ce secteur.

Mme Virginie Duby-Muller (LR). Je tiens à saluer les récentes initiatives législatives visant à apporter davantage de régulation dans le secteur de l’influence, et qui se déroulent en parallèle de la grande consultation publique lancée par Bruno Le Maire. Il est en effet urgent d’agir, comme l’a montré l’étude accablante de la DGCCRF selon laquelle, sur la soixantaine d’influenceurs et agences visés depuis 2021, 60 % ne respectaient pas la réglementation relative à la publicité et aux droits des consommateurs.

Plus grave, certains d’entre eux ont trompé sciemment le consommateur. En matière de santé, d’abord, nombre d’influenceurs ont fait la promotion d’injections réalisées par des esthéticiens (et non par des professionnels de santé), de produits miracles prétendument capables de faire maigrir ou, pire, de guérir des cancers. Outre la beauté, la santé et le CPF, les influenceurs ont investi le secteur financier. Ils sont nombreux à vendre des services financiers risqués, tels que le trading de cryptomonnaies, ou à faire la promotion de paris aux résultats très aléatoires. Je pense notamment au candidat de téléréalité Julien Bert, qui réalise des vidéos de promotion pour le trading en promettant à ses followers 100 % de chances de gagner de l’argent avec lui, au moyen d’un robot de trading, outil automatisé qui ne nécessite aucune intervention humaine pour prendre des positions sur les marchés. Des sanctions sont certes prononcées, mais elles restent encore trop rares. Ainsi, la célèbre influenceuse Nabilla Benattia‑Vergara a été condamnée l’été dernier à une amende de 20 000 euros pour des pratiques commerciales trompeuses de promotion, sur le réseau social Snapchat, d’un site de formation au trading en ligne.

Si l’on peut se féliciter que ces arnaques soient de plus en plus dénoncées, ces influenceurs, majoritairement domiciliés à Dubaï, ont indéniablement profité des « zones grises » qu’il convient de clarifier. Il faut d’ailleurs distinguer les influenceurs issus de la téléréalité, comme Marc Blata, des autres.

Cette proposition apporte donc un cadre juridique nécessaire à la protection des consommateurs, d’autant que les marques utilisent aujourd’hui de nombreux créateurs de contenus et désertent les médias traditionnels. Afin d’éviter l’abus de confiance de la part des influenceurs auprès de leur communauté, le plus souvent composée en grande partie de mineurs facilement influençables, le texte crée et renforce un appareil juridique qui pourra à la fois responsabiliser et, le cas échéant, sanctionner tous les influenceurs, mais aussi leurs agences et annonceurs, ainsi que les plateformes de diffusion.

Il importe donc de responsabiliser l’ensemble de l’écosystème : les influenceurs, les agents et les plateformes. Celles-ci ont d’ailleurs commencé à agir car, devant la multiplication des plaintes à l’encontre des « influvoleurs », Meta, maison-mère de Facebook et Instagram, a fermé des comptes de personnes incriminées. Il faut néanmoins aller plus loin en instaurant une véritable régulation et en obligeant les plateformes à bloquer les contenus publicitaires définis comme mensongers.

Il s’agit également d’envoyer un message fort à notre jeunesse, qui peut être fascinée par le « bling-bling ». Cet argent semble facilement gagné par les influenceurs, mais il n’est pas permis de tout faire avec un smartphone et il est de notre devoir de protéger les victimes de ces abus, qui sont souvent des publics fragiles ou des jeunes.

Ce texte permettra donc de rétablir la confiance dans le secteur. Pour toutes ces raisons, Les Républicains le soutiendront, dans un esprit de consensus. Nous espérons que vous soutiendrez certains des amendements que nous avons déposés.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. J’abonderai dans votre sens. L’enjeu est concret, car les consommateurs et les investisseurs subissent vraiment des pertes. Dans le monde réel, les conseils d’investissement sont très encadrés et cet encadrement est respecté par tous les acteurs, notamment les conseillers financiers. Or, trop souvent, les conseils financiers prodigués sur les réseaux sociaux contournent ces dispositions, n’énonçant aucune des règles de prudence de base et ne donnant aucun des avertissements nécessaires pour permettre à des publics parfois peu formés de filtrer ces messages. Il est donc nécessaire d’agir et nous agissons.

Mme Louise Morel (Dem). L’avènement d’internet a donné naissance au plus grand réseau que l’humanité ait jamais connu. Nous faisons tous partie de réseaux dits « sociaux », qui relient les membres d’une même famille, des collègues, des amis, les membres d’une communauté. Le développement de ces réseaux a permis l’émergence d’un nouveau modèle social, économique, voire politique, fondé sur l’influence de nos pairs et l’appréciation collective. Certaines personnes, qui ont acquis le statut d’influenceurs, sont capables de modifier en profondeur les habitudes de consommation de leurs abonnés. La capacité à toucher un large public attire de plus en plus les entreprises et les marques, qui se tournent vers ces nouveaux vecteurs de publicité marketing. La plupart des influenceurs sont des créateurs de contenus artistiques ou de divertissements vidéos sur des plateformes comme YouTube, TikTok ou encore Twitch ; ils assurent la promotion de produits pour financer leurs activités. D’autres influenceurs, issus notamment de la téléréalité, font des réseaux sociaux leur principale activité et source de revenus. On dénombre actuellement en France cent cinquante mille influenceurs, tous profils confondus.

L’influence commerciale sur les réseaux sociaux fait désormais partie intégrante de notre quotidien, au même titre que les spots publicitaires à la télévision ou les panneaux publicitaires dans la rue. Lors de l’achat d’un produit, nous sommes influencés par un certain nombre de facteurs extérieurs : publicité, avis en ligne ou appréciations de nos amis. Le lien unissant les influenceurs à leurs abonnés repose non seulement sur la confiance, mais aussi sur l’adhésion à des valeurs communes, le sentiment d’appartenance à un groupe. En parallèle, des biais cognitifs, comme le biais de conformité, altèrent notre capacité à raisonner correctement sur les réseaux sociaux. Les influenceurs orientent ainsi fortement les comportements d’achat.

On estime que le marché de l’influence représentait 16,4 milliards de dollars dans le monde en 2022. Cette manne attire les vautours. Pratiques commerciales trompeuses, escroqueries, arnaques : en France, les affaires impliquant des influenceurs se multiplient. Face au vide juridique entourant ce marché, les victimes sont bien souvent démunies. C’est pourquoi le groupe Démocrate salue cette proposition de loi qui a vocation à encadrer le statut d’influenceur et à protéger les utilisateurs de dérives potentielles.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Comme à vous, il nous paraît nécessaire d’encadrer l’activité d’influenceur, qui n’est pas encore une profession mais qui va le devenir, à en croire l’attrait qu’elle a de plus en plus auprès des jeunes. Par la relation de confiance qu’ils nouent, les influenceurs et les créateurs de contenus ont un impact très important sur certaines décisions, qu’il s’agisse d’un choix de vie, d’achat, d’investissement. C’est pourquoi il faut parfois envisager des réponses différentes de celles qui s’appliquent à la publicité.

M. Dominique Potier (SOC). Le travail transpartisan qui a été mené est exemplaire de ce que me semble devoir être le travail parlementaire. Merci pour ce texte qui participe d’un combat de société, celui de la régulation de la servitude marchande par le biais de la publicité. Un collectif d’ONG a pointé que, chaque année, 31 milliards d’euros sont investis en France dans la publicité sous toutes ses formes – et je ne suis pas sûr que les influenceurs aient été intégrés dans l’étude. Ces milliards auxquels nous consentons servilement sont à rapprocher du maximum de 3,7 milliards d’euros que la puissance publique consacre à la prévention en matière de santé publique.

Les termes que vous employez – « idolâtrie », « emprise » ou « influence » – sont les mêmes qui décrivent les dérives sectaires et ils s’inscrivent dans un mouvement de libération des consciences. J’annonce d’ailleurs que nous soutiendrons la proposition de loi de notre collègue Delphine Batho sur l’interdiction de la publicité numérique et lumineuse dans l’espace public, qui participe du même mouvement de régulation des abus de la publicité.

Vous avez pointé fort justement la responsabilité des plateformes numériques, mais je m’interroge sur celle des donneurs d’ordre. N’est-ce pas le bénéficiaire économique qui doit être juridiquement inquiété et comment ?

Alors que les médias traditionnels sont relativement régulés, internet constitue toujours une sorte de jungle. Comptez-vous poursuivre votre travail pour que, dans une nouvelle civilisation de l’internet, on ménage, au milieu du village global, un espace public, celui de la République ?

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Nous nous efforçons en effet de placer la République au centre du village du numérique. Nous travaillerons avec tous ceux de nos collègues qui souhaiteront s’engager pour renforcer la régulation.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Nous souhaitons, par ce texte, responsabiliser les plateformes, qui jouent un rôle fondamental dans le secteur de l’influence, en particulier commerciale. Au-delà de la menace de la sanction pesant sur les influenceurs, l’arme ultime est la modération de leurs contenus, voire la fermeture de leur compte. À cet effet, en reprenant dans le texte les termes du DSA, nous donnons aux plateformes toute légitimité pour intervenir en présence d’un contenu manifestement illicite.

M. Xavier Albertini (HOR). La proposition de loi prévoit la création d’un statut d’influenceur, ce qui mettra fin au vide juridique actuel, et le renforcement de la régulation de l’activité d’influence. Elle vise à interdire la promotion, par les influenceurs, de produits, dispositifs ou actes comportant un risque pour la santé ou de placements ou investissements risqués, notamment dans le domaine des cryptomonnaies. Face aux nombreux cas de dissimulation du caractère commercial des publications faites par certains influenceurs, une obligation d’information du public sur le type de vente pratiquée permettra d’éviter la surfacturation d’un produit vendu beaucoup moins cher sur le marché.

L’actualité a révélé nombre de cas choquants : tel influenceur a trompé sa communauté d’abonnés au profit de marques peu scrupuleuses ; de faux traitements médicamenteux ont été commercialisés ; des produits existant sur le marché ont été revendus plus cher ; des achats risqués et des jeux d’argent ou de hasard ont fait l’objet d’une promotion auprès de communautés à forte composante de mineurs. Ces nombreux agissements sont insuffisamment traités par les services de la répression des fraudes.

Le groupe Horizons et apparentés s’associera à la proposition de loi, qui est équilibrée et s’attache à séparer le bon grain de l’ivraie. En impliquant les plateformes dans la régulation des publicités, elle permettra de protéger un public souvent peu éclairé. L’important est d’éviter les messages dolosifs et de laisser aux clients potentiels la capacité de se prononcer en toute conscience.

Notre groupe partage la volonté de mieux encadrer ce domaine d’activité et de mieux faire appliquer les règles commerciales. Il votera en faveur de cette version retravaillée dans un esprit transpartisan d’une première proposition de loi d’Arthur Delaporte, que nous avions adoptée à l’unanimité le 1er février au sein de la commission.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Il arrive que des consommateurs ayant passé des commandes sur internet ne reçoivent aucun produit ou des produits défectueux, non conformes à la réglementation européenne, voire contrefaits. Nous cherchons à lutter contre cette pratique, le dropshipping, qui est un véritable fléau. À cet égard, le moins que l’on puisse demander aux influenceurs est qu’ils fassent preuve de transparence et de responsabilité.

M. André Chassaigne (GDR-NUPES). Le travail transpartisan nous permet d’être beaucoup plus utiles, malgré les divergences politiques.

Une phrase de l’exposé des motifs de la proposition de loi résume bien les enjeux : « La relation faussement intimiste développée par ces influenceurs rassure ceux qui les suivent grâce au ressenti parfois trompeur de transparence, d’honnêteté, de proximité et de bienveillance à leur égard, et les place ainsi dans la situation de voir leurs décisions d’achat déterminées par les indications des influenceurs. ».

Dans une enquête publiée en janvier 2023 et portant sur soixante influenceurs très actifs, la DGCCRF a constaté que 60 % d’entre eux ne respectent pas la réglementation sur la publicité et les droits des consommateurs. Elle a également relevé le non-respect des règles de transparence relatives au caractère commercial des publications, notamment l’absence de la mention obligatoire précisant que la publication est sponsorisée. Elle a encore mis en évidence des pratiques illégales de promotion de produits ou de services risqués, des opérations de promotion non autorisées pour le compte personnel de formation (CPF) aux fins de détournement des fonds, ou encore la promotion d’interventions de chirurgie esthétique par des non-professionnels de santé. La DGCCRF estime que les influenceurs doivent être considérés comme des publicitaires de droit commun et respecter les mêmes règles. Elle affiche sa volonté de multiplier les contrôles.

Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine soutient cette proposition de loi transpartisane et estime que la définition des influenceurs proposée est cohérente. Cela étant, plutôt que de créer une sous-section au sein du code de la consommation, pourquoi ne pas considérer les influenceurs comme des agents publicitaires à part entière et les soumettre exactement aux mêmes obligations et responsabilités dans une section déjà existante ?

Par ailleurs, les effectifs de la DGCCRF sont passés de 3 723 à 2 812 équivalents temps plein (ETP) entre 2007 et 2022. Avez-vous conscience que pour mener la politique de contrôle que vous appelez de vos vœux, il faut des effectifs dans la fonction publique ?

M. Arthur Delaporte, rapporteur. L’enquête de la DGCCRF a relevé que trente‑six influenceurs sur les soixante qu’elle avait ciblés avaient publié des contenus problématiques. Cela ne concerne donc pas, tant s’en faut, l’ensemble des personnes pratiquant une activité d’influence commerciale. Par ailleurs, les problèmes détectés étaient parfois mineurs. J’ajoute que la plupart des influenceurs vivent et exercent en France – et non à Dubaï, comme on l’entend parfois.

Nous nous sommes demandé si nous devions insérer les dispositions relatives aux influenceurs dans le code de la consommation ou le code de commerce, voire ne viser aucun code. Nous avons choisi le code de la consommation parce que la proposition de loi a pour principal objet de protéger les consommateurs et les victimes de l’influence. Par ailleurs, un créateur de contenu peut exercer l’activité d’influence à titre accessoire ; il ne s’agit pas, en ce cas, d’un agent publicitaire au sens strict.

Mme Béatrice Descamps (LIOT). Tous les influenceurs n’ont pas le même profil. La blogueuse Julie Bourges, qui apprend à vivre avec un corps de grande brûlée, et Léna, qui sensibilise sa communauté au harcèlement en ligne et à la santé mentale, n’ont rien à voir avec Nadé et Marc Blata, ni avec Dylan qui, en novembre 2022, faisait la promotion de gélules censées guérir les cellules cancéreuses auprès de son 1,5 million d’abonnés sur Instagram. Ces derniers sont des influenceurs truands qui jouent sur des ressorts vieux comme le monde. Ils choisissent des cibles souvent jeunes et crédules et tirent profit de leur naïveté.

La loi permet de sanctionner ces abus. Ceux liés aux cryptoactifs, par exemple, relèvent de l’abus de confiance, du vol ou de l’escroquerie. Les publicités non identifiées comme telles peuvent être sanctionnées comme pratiques commerciales trompeuses. Pourtant, les sanctions sont rares, en raison du manque de moyens des services de l’État et d’une insuffisante formation aux nouvelles technologies et à la lutte contre ces formes d’arnaque, à quoi s’ajoutent des règles de droit inadaptées à la spécificité de ces nouvelles activités. C’est pourquoi nous sommes favorables à un encadrement plus strict du statut d’influenceur et d’agent d’influenceur. Nous soutenons également une clarification en matière de placement de certains produits.

Nous souhaiterions toutefois que ces restrictions soient étendues à la malbouffe, de plus en plus promue sur les réseaux sociaux, alors même que ses effets sur la santé des adolescents sont désastreux.

La sensibilisation aux risques d’escroquerie en ligne dans les établissements scolaires est une bonne initiative, mais n’oublions pas que l’école ne peut pas tout faire. La famille joue un rôle fondamental dans le rapport aux écrans et la protection des enfants.

Nous nous interrogeons sur les sanctions applicables aux influenceurs qui ne respecteraient pas l’obligation d’affichage d’un bandeau signalant que le contenu est réservé aux majeurs ou qui ne se conformeraient pas à leurs obligations en matière de dropshipping.

En outre, comment ces nouvelles obligations s’articuleront-elles avec le droit européen, notamment le DSA ?

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Nous pourrons débattre de tous ces sujets lors de l’examen des amendements.

Les 1 800 agents et inspecteurs de la DGCCRF chargés de la régulation ont effectivement parfois l’impression de devoir vider l’océan à la petite cuillère. Cela étant, notre texte n’est pas le cadre adéquat pour augmenter les moyens budgétaires de ce service. Bercy aura certainement l’occasion de faire des annonces à ce sujet.

Mme Julie Laernoes (Écolo-NUPES). Dylan Thiry qui vante des produits tuant les cellules cancéreuses, Julien Tanti (6 millions d’abonnés sur Instagram) qui vend de la poudre de charbon censée blanchir les dents mais reconnue comme dangereuse pour la santé, des jeunes ruinés par les arnaques aux cryptomonnaies de Marc Blata : la liste des tromperies de ceux que nous appelons aujourd’hui les influenceurs est longue et nous n’en connaissons certainement qu’une partie.

Depuis des mois, dans sa circonscription, mon collègue Aurélien Taché est interpellé par des jeunes sur l’ampleur des arnaques liées aux influenceurs. Ce sujet fait écho à son travail sur les abus publicitaires des paris sportifs en ligne : dans les deux cas, les principales victimes sont souvent des jeunes des quartiers populaires. Il a d’ailleurs déposé, en novembre dernier, une proposition de loi visant à réguler l’activité des influenceurs.

Les pouvoirs publics, et notamment le Gouvernement, ont tardé à réagir, sans compter que la DGCCRF n’est pas dotée des moyens financiers et techniques suffisants. Il est primordial de les augmenter. De très nombreuses escroqueries restent impunies, alors que des sanctions pourraient être prises s’il existait une véritable volonté en ce sens. Tout semble permis sur un marché sans foi ni loi. Depuis des mois, le célèbre couple formé par Marc et Nadé Blata, entre autres personnalités, pratique l’arnaque au trading. Le trading de cryptomonnaies, qui attire de plus en plus d’investisseurs, est devenu un domaine très favorable aux escroqueries. En août dernier, un youtubeur se faisant appeler « Crypto Gouv » aurait arnaqué près de 300 personnes et détourné 4 millions d’euros en proposant des investissements dans une cryptomonnaie. Ces escroqueries touchent de plus en plus de jeunes. D’après un récent sondage Opinion Way, 14 % des 18-25 ans déclarent envisager d’investir dans les cryptomonnaies ou déjà en posséder. Il faut agir !

La proposition de loi va dans ce sens en interdisant aux influenceurs de promouvoir un investissement dans une cryptomonnaie contre rémunération, ce que le groupe écologiste salue. Mais pour sécuriser encore davantage ces activités et, surtout, protéger les consommateurs, il est urgent de mieux réguler l’activité des influenceurs. Cette régulation doit être adaptée à la réalité économique et permettre un développement sain et responsable de la filière. Aurélien Taché considère qu’il faut trouver un équilibre entre régulation et sanction. Les auteurs d’arnaques, de délits ou de mauvaises pratiques constituent une minorité dans le monde des créateurs de contenus. De nombreux jeunes, notamment issus des quartiers populaires, ont des pratiques saines et ne doivent pas être sanctionnés. Ce texte contient nombre de mesures intéressantes, que nous soutiendrons. Cependant, ne pourrions-nous pas envisager l’élaboration d’un cadre de référence avec les parties prenantes du secteur, tout en menant une réflexion sur le rôle et les obligations des plateformes de contenu ?

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Dylan Thiry ne parlait même pas des cellules cancéreuses, mais des cellules « cancérigeuses » – c’est dire l’absurdité et les dérives de l’influence. Vous avez évoqué les arnaques au copy trading, que nous allons essayer de réguler. S’agissant du cadre de référence, Bercy a lancé des consultations, notamment avec les plateformes. Le ministre de l’économie va faire des annonces dans les prochains jours. Nous serons heureux de discuter, la semaine prochaine en séance, de la manière dont on peut intégrer la charte envisagée à destination, en particulier, des plateformes pour encadrer le secteur de façon renforcée mais souple.

M. le président Guillaume Kasbarian. Nous en venons aux questions individuelles.

M. Dino Cinieri (LR). La proposition de loi vise à protéger nos concitoyens des influenceurs sur les réseaux sociaux et médias en ligne comme YouTube. Si, la plupart du temps, il s’agit de vidéos anodines présentant du maquillage, des vêtements, des objets de décoration ou des exercices sportifs, malheureusement certaines vidéos sont parfois de la publicité déguisée pour des médicaments, des opérations chirurgicales ou des placements financiers douteux. Les communautés sont souvent composées de jeunes facilement influençables. Afin d’éviter que leur confiance ne soit abusée, le texte propose de responsabiliser et, le cas échéant, de sanctionner les influenceurs, leurs agences, les annonceurs ainsi que les plateformes de diffusion. J’y suis favorable, car il est urgent que les influenceurs assument la responsabilité des contenus qu’ils produisent et diffusent et pour lesquels ils sont rémunérés. Protéger nos concitoyens doit toujours être notre priorité. J’espère que ce texte recueillera l’unanimité.

M. Jean-Pierre Vigier (LR). Depuis une dizaine d’années, le marché des influenceurs connaît une croissance exponentielle. Toutefois, l’image du secteur a été ternie par des pratiques frauduleuses qui peuvent mettre en danger la santé des consommateurs. La promotion de produits contrefaits ou ne respectant pas les normes s’est généralisée, mais la loi semble impuissante face à ces dérives. Depuis 2020, l’État mobilise de nombreux services pour lutter contre ces pratiques, notamment la répression des fraudes et les douanes. Je suis favorable à la création d’un statut d’influenceur mais, en parallèle, ne faut-il pas aussi mieux former et donner plus de moyens aux autorités et aux services de l’État ?

M. Vincent Rolland (LR). Les personnes que nous avons auditionnées hier ont mis en avant la lenteur de la réponse judiciaire et administrative. Que proposez-vous pour accélérer les procédures ? N’est-il pas opportun de prévenir avant de guérir et de mener des campagnes dans les établissements scolaires, pour informer le jeune public du danger que peuvent représenter certains influenceurs ?

M. Arthur Delaporte, rapporteur. La DGCCRF compte aujourd’hui 1 800 agents chargés de mener des enquêtes. Nous avons constaté sur place que ceux-ci remplissent de multiples tâches ; il n’y a pas de spécialités. Peut-être conviendrait-il de spécialiser une partie des agents dans l’influence et de revoir la manière de conduire les investigations, qui prennent la forme de campagnes annuelles. Aussi, lorsqu’un internaute effectue un signalement sur Signal Conso, cela ne se traduit pas nécessairement par une action administrative ; le signalement informe la DGCCRF et lui permet de cibler ses contrôles l’année suivante. Ce décalage peut donner l’impression que l’État ne fait rien.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Nous proposerons, à l’article 5, que les élèves de CM2 et de cinquième soient sensibilisés aux enjeux de l’influence commerciale et qu’on leur mette en main les outils qui leur permettront de mieux discerner les risques potentiels. Il est également important de former les influenceurs et les créateurs de contenus. C’est au secteur de s’autoréguler et de mettre à la disposition des acteurs tous les outils, tant juridiques que liés à la formation. Nous saluons la création, par l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité, du certificat de l’influence responsable, ce qui permettra de sensibiliser une partie du secteur. D’autres institutions, comme l’Union des métiers de l’influence et des créateurs de contenu (Umicc), contribueront à la mise en place de formations et d’outils qui permettront aux acteurs de se familiariser avec la loi et de la respecter.

 

 

Avant l’article 1er

 

La commission adopte l’amendement rédactionnel CE46 de M. Arthur Delaporte, rapporteur.

 

 

Article 1er : Création au sein du code de la consommation d’une définition de l’influenceur et renforcement de la régulation de la publicité en ligne et des pratiques de dropshipping mises en œuvre par ces mêmes influenceurs

 

Amendement CE44 de M. Arthur Delaporte et sous-amendements CE166 de M. Xavier Albertini, CE196 de Mme Violette Spillebout, CE150 de Mme Louise Morel et CE139 de Mme Christine Engrand, amendements CE117 de M. Aurélien Taché et CE63 de Mme Virginie Duby-Muller (discussion commune).

M. Arthur Delaporte, rapporteur. L’amendement CE44, qui vise à réécrire l’article 1er, est issu de la concertation que nous avons menée avec nos collègues, les administrations et les agences. Il modifie la définition juridique de l’activité d’influence commerciale par voie électronique en conservant les éléments cardinaux qui étaient prévus dans le texte initial, à savoir l’inclusion des personnes physiques ou morales, la communication au public d’un contenu par voie électronique et l’existence d’une contrepartie économique ou de toute nature. L’un des problèmes que l’on rencontre est que les avantages en nature ne sont pas considérés comme une forme de rémunération de l’activité de promotion. Les ajouts proposés concernent la qualification des contenus promus portant sur les biens, les services ou une cause quelconque.

Cette nouvelle rédaction exclut, en revanche, la notion de notoriété, trop difficile à qualifier pour le juge, et qui impliquerait d’entrer dans une logique de seuil qui n’est pas efficiente, puisque les micro-influenceurs, malgré une audience réduite, peuvent avoir un fort impact sur les comportements de consommation des consommateurs.

M. Xavier Albertini (HOR). Le sous-amendement CE166 vise à distinguer l’activité d’influence commerciale par voie électronique d’une activité commerciale traditionnelle, en rédigeant ainsi le début de l’amendement CE44 : « Toute personne physique ou morale qui mobilise sa notoriété pour communiquer au public par voie électronique… ».

Mme Violette Spillebout (RE). Il ne faudrait pas que l’on entrave l’activité d’entreprises qui envoient des échantillons de produits ou proposent des dons en nature de faible valeur sans demander, en contrepartie, la promotion de leurs produits. Cela se fait dans la presse traditionnelle, par exemple féminine, pour que les journalistes puissent tester les produits et en parler. Le sous-amendement CE196 exclut certains avantages en nature lorsque leur valeur est inférieure à un montant défini par décret. Cela permettrait à de nombreuses entreprises en création, innovantes, responsables socialement et écologiquement et ne disposant pas de moyens publicitaires, de faire ces dons à des influenceurs plus ou moins connus.

Mme Louise Morel (Dem). Le sous-amendement CE150 tend à préciser que ne relèvent pas de l’activité de l’influence commerciale par voie électronique les personnes physiques ou morales qui assurent uniquement la promotion de biens ou services qu’elles produisent directement. Il s’agit de réintroduire la proposition que vous aviez faite à l’origine.

Mme Christine Engrand (RN). Les influenceurs, toujours en quête de diversification de leurs sources de revenus, sont de plus en plus nombreux à lancer leur commerce. Caroline Receveur et Jeanne Damas, qui totalisent à elles deux 6,5 millions d’abonnés sur Instagram, possèdent chacune une entreprise dont elles n’hésitent pas à faire la promotion auprès d’eux. Par le sous-amendement CE139, nous proposons d’étendre le cadre juridique applicable aux promotions réalisées pour autrui à celles effectuées pour son propre compte.

Mme Julie Laernoes (Écolo-NUPES). L’amendement CE117 vise à définir la pratique du marketing d’influence plutôt qu’un statut ou une profession. L’activité d’influenceur ou de créateur de contenu étant bien plus large que la simple promotion publicitaire, il serait plus juste, opérationnel et robuste juridiquement de définir la pratique de l’influence commerciale afin de viser véritablement les pratiques commerciales et les dérives en cause. Cette définition permettrait d’appréhender l’ensemble des pratiques commerciales des personnes se livrant au marketing d’influence, qu’il s’agisse de leur activité principale ou secondaire, ce qui englobe des artistes et des personnalités médiatiques, mais aussi des personnes exerçant des métiers plus traditionnels comme des boulangers ou des médecins. La définition de la pratique du marketing d’influence serait un ajout pertinent et nécessaire au code de la consommation pour renforcer la régulation et la protection du consommateur.

Mme Virginie Duby-Muller (LR). L’activité d’influenceur ou de créateur de contenus étant bien plus large que la simple promotion publicitaire, il serait plus opérationnel de définir la pratique de l’influence commerciale afin de viser véritablement les pratiques commerciales et les dérives en cause. Cette définition permettrait d’appréhender l’ensemble des pratiques commerciales des personnes effectuant du marketing d’influence au titre de leur activité principale ou secondaire. La définition que je propose d’introduire par l’amendement CE63 serait un ajout pertinent et nécessaire au code de la consommation pour renforcer la régulation et la protection du consommateur.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Pour le sous-amendement CE166, demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable. Je l’ai dit, la notoriété n’est pas nécessairement le meilleur moyen de caractériser l’influenceur : commence-t-elle à 100, 500, 1 000 abonnés, plusieurs millions ? Le critère n’est-il pas plutôt la personnalité ? J’aimerais que ce point soit rediscuté en vue de la séance et que les échanges avec les différentes administrations soient approfondis.

S’agissant du sous-amendement CE196, le critère est la contrepartie : il faut que de la publicité soit faite en échange du don ; l’envoi d’un échantillon gratuit, hors d’un partenariat spécifique, ne relève a priori pas du champ de la proposition de loi. Nous sommes défavorables à la fixation de seuils de valeur, car des produits de faible valeur peuvent être très dangereux – une bouteille d’alcool ne vaut que 4 euros.

Le sous-amendement CE150 porte sur une mesure que nous avions évoquée en préparant le texte, mais que nous avons supprimée à la suite de nos échanges avec les administrations – notamment, les services juridiques des ministères – pour éviter des effets de bord. Elle ferait courir un risque juridique. Demande de retrait ou avis défavorable.

Le sous-amendement CE139 est satisfait par la rédaction que nous proposons : nous avons opté pour la notion plus large de « bénéfice économique », qui intègre votre sujet de préoccupation, Madame Engrand. Demande de retrait ou avis défavorable.

Les amendements CE117 et CE63 tendent à réécrire entièrement l’article, ce qui reviendrait à écraser les travaux que nous avons menés de façon collégiale. La rédaction de ces amendements, proposée par l’Umicc avec qui nous avons d’ailleurs échangé, va bien au-delà du champ de l’article et est contraire à l’esprit de ce que nous faisons. Avis défavorable, ou demande de retrait si vous voulez repréciser votre proposition de réécriture en vue de la séance à partir des suggestions de l’Umicc.

M. Éric Bothorel (RE). Je salue le caractère transpartisan de votre travail et sa qualité, mais je voterai contre les définitions qui nous sont proposées ici, même sous-amendées.

La semaine dernière, j’ai rendu visite à l’entreprise Exail, qui réalise de très beaux simulateurs de vol et a remporté un appel d’offres pour fournir celui de l’Awacs ; j’ai fait un tweet sur le sujet ; j’ai déjeuné sur place – contrepartie en nature. Si on applique strictement votre texte, en pareil cas, je serai probablement obligé de mettre un bandeau sur l’image.

Comme président d’un groupe d’amitié, je me rends dans un pays qui va payer en partie le voyage ; il a une position particulière sur l’échiquier politique ; je vais sans doute défendre sa cause. D’après votre définition, une communication de ma part au sujet de ce déplacement devrait entrer dans le champ de l’influence.

Mme Ségolène Amiot (LFI-NUPES). Ces deux exemples ne relèvent pas de la pratique commerciale. La définition qui nous est ici proposée circonscrit l’influence commerciale. Si vous avez encore besoin d’être rassuré, des amendements ultérieurs permettront d’en exclure les activités de représentants élus.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Cher collègue Bothorel, vous n’êtes pas concerné par la définition, qui vise une pratique commerciale, car vous ne retirez aucun bénéfice économique de ce type de promotion. Si la valeur du déjeuner auquel l’entreprise vous invite dépasse une certaine somme, vous êtes obligé de la déclarer, mais cela relève des règles déontologiques relatives à l’exercice du mandat de député. Si vous souhaitez éviter des effets de bord pour les parlementaires, nous pourrons réfléchir à un sous-amendement d’ici à la séance.

M. Éric Bothorel (RE). Ici, nous écrivons le droit – et vous l’écrivez avec soin. Dans le texte, vous définissez d’abord l’action ; ensuite seulement, vous abordez l’aspect commercial de l’activité. Or nous, parlementaires, menons ce type d’action, de la même manière que certains influenceurs.

Successivement, la commission adopte les sous-amendements CE166 et CE196 et rejette les sous-amendements CE150 et CE139.

Elle adopte l’amendement sous-amendé, et l’article est ainsi rédigé

En conséquence, les autres amendements tombent.

 

 

Après l’article 1er

 

Amendement CE114 de M. Laurent Esquenet-Goxes

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Demande de retrait au profit de l’amendement CE107 de M. Studer, qui nous paraît mieux formulé. Je remercie l’ensemble des parlementaires qui ont travaillé sur le sujet essentiel de la protection des mineurs. L’activité d’influence commerciale, que nous définirons en droit, offre de nouvelles perspectives, mais les mineurs doivent en être protégés sur les plateformes concernées. C’est ce que vous proposez et nous le soutenons.

L’amendement est retiré.

 

Amendements CE107 de M. Bruno Studer et CE32 de Mme Ségolène Amiot (discussion commune)

Mme Louise Morel (Dem). L’amendement proposé par notre Bruno Studer, qui a en effet beaucoup travaillé sur le sujet, tend à actualiser la loi du 19 octobre 2020 sur les « Enfants influenceurs » afin de garantir une protection maximale aux mineurs concernant l’utilisation de leur image en ligne et de tirer les conclusions de la définition en droit de l’activité d’influence commerciale par voie électronique.

Il accroît la portée des obligations relatives à l’exploitation de l’image des mineurs en ligne en les étendant à l’ensemble des plateformes en ligne, alors qu’elles ne concernaient précédemment que les plateformes de partage de vidéos. Il tend également à préciser que le contrat qui lie l’annonceur, la personne exerçant une activité d’influence commerciale par voie électronique et son représentant légal lorsqu’elle est mineure est soumis aux dispositions définies à l’article 2 de la présente proposition de loi.

Mme Ségolène Amiot (LFI-NUPES). Par l’amendement CE32, nous souhaitons protéger nos enfants, en nous assurant qu’un enfant de moins de 16 ans ne puisse être, à quelque titre que ce soit, engagé par un influenceur sans autorisation individuelle préalable accordée par l’autorité administrative. Il s’agit de reprendre le dispositif existant de protection des enfants, applicable notamment aux activités de cinéma ou de spectacle.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Avis favorable au CE107.

Le CE32 propose d’étendre la portée de la loi « Studer » au-delà des contenus publicitaires mobilisant un enfant à titre principal. Nous avons eu l’occasion d’en discuter dans le cadre des groupes de travail sur le sujet : nous sommes sensibles à cette approche, mais peut‑être devrait-elle être réétudiée. Demande de retrait dans le but de revoir la rédaction de l’amendement d’ici à la séance, en lien notamment avec M. Studer, compte tenu de l’adoption attendue de l’amendement CE107. À défaut, avis défavorable.

La commission adopte l’amendement CE107.

En conséquence, l’amendement CE32 tombe.

 

La commission adopte l’amendement rédactionnel CE47 de M. Arthur Delaporte.

 

Amendement CE45 de M. Arthur Delaporte et sous-amendement CE179 de Mme Louise Morel, amendement CE26 de M. Éric Girardin (discussion commune)

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Notre amendement vise à rappeler que le cadre juridique classique relatif à l’encadrement de la promotion de biens et de services et de la publicité est applicable à l’activité d’influence commerciale par voie électronique telle que définie à l’article 1er de la présente proposition de loi. Autrement dit, les influenceurs sont soumis au droit commun.

Ce rappel est destiné aux influenceurs, mais aussi aux consommateurs. Il relève de la vertu pédagogique de la loi.

Parmi l’ensemble des obligations qui pèsent sur les influenceurs figure le respect de la loi Évin, qui inclut des dispositions spécifiques concernant la protection des mineurs.

Mme Louise Morel (Dem). Notre sous-amendement vise à sécuriser le statut juridique des influenceurs de moins de 16 ans afin que la rémunération qu’ils perçoivent pour leur activité fasse l’objet de la même réglementation que celle issue de la loi « Enfants influenceurs » : les représentants légaux peuvent disposer d’une partie des sommes, mais la plus grande partie doit être versée à la Caisse des dépôts, qui en assure la gestion jusqu’à la majorité de l’enfant.

M. Éric Girardin (RE). Inutile de rappeler l’importance de la filière vitivinicole pour l’économie française, notamment par sa contribution à la balance de notre commerce extérieur.

La loi Évin avait pour objectif de réduire la consommation de tabac et d’alcool, d’informer sur les risques et de protéger les mineurs. Elle a interdit la publicité en faveur du tabac et de l’alcool, faisant de la France l’un des pays les plus réglementés en la matière. Modifiée en 2016, elle permet de distinguer information et promotion.

En parallèle, un cadre réglementaire existe pour protéger les mineurs des boissons alcoolisées : il interdit la publicité sur tous les sites dédiés à la jeunesse et sur ceux des clubs et associations sportives.

Enfin, la consultation publique organisée du 8 au 31 janvier 2023 par le ministère de l’économie n’a toujours pas rendu ses conclusions. Il est nécessaire d’en attendre le résultat avant toute démarche législative.

Dans ce contexte, nous proposons de rappeler que les personnes exerçant une activité d’influence au sens de l’article 1er de la présente proposition de loi sont soumises aux obligations de la loi Évin en matière de communication publicitaire et non publicitaire sur les boissons alcoolisées. Cette précision se révèle nécessaire pour éviter toute incitation à une consommation excessive et assurer un encadrement efficace de l’activité des influenceurs eu égard aux enjeux de santé publique.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Avis favorable au sous-amendement CE179, qui permet de clarifier le cadre juridique s’appliquant aux mineurs.

En ce qui concerne l’amendement CE26, je vous remercie, cher collègue, d’avoir rappelé le cadre de la loi Évin. La protection des mineurs est effectivement essentielle. Fort heureusement, nous adoptons une approche similaire dans notre amendement CE45. Si celui-ci est adopté, le vôtre sera satisfait. Demande de retrait.

L’amendement CE26 est retiré.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement CE45 ainsi sous-amendé.

 

Amendement CE48 de M. Arthur Delaporte

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Cet amendement tend à réécrire, pour les compléter, les dispositions relatives à l’encadrement de la promotion de certains biens et services et figurant initialement à l’article 1er de la proposition de loi, que nous avions votée à l’unanimité. Il s’agit donc simplement de reprendre les différentes interdictions, dont nous pourrons discuter au cas par cas.

Quatre domaines sont concernés : les produits de santé, les produits et services financiers, les jeux de hasard et d’argent et les jeux vidéo mettant en œuvre des mécanismes identiques.

L’interdiction de la publicité en ligne dans le cadre de l’influence commerciale porterait d’abord sur les produits et substances pharmaceutiques réglementés, inscrits au livre Ier de la cinquième partie du code de la santé publique – à l’exception des produits cosmétiques et des dispositifs médicaux classés I ou II a (lunettes correctrices, aides auditives, etc.) – et sur toutes les opérations chirurgicales, à visée esthétique ou non, dont nous avons pu voir hier les ravages. Le relais des campagnes institutionnelles de santé par des personnes exerçant l’activité d’influence commerciale ferait également l’objet d’une exception – on a vu, à propos de la covid-19, l’importance des influenceurs pour la promotion des bonnes pratiques.

La présente rédaction prévoit également l’interdiction de la publicité ciblant les produits et services financiers qui présentent un risque spécifique pour le consommateur, afin de faire face aux dérives constatées sur les réseaux sociaux et relayées notamment par les collectifs de victimes d’influenceurs. Nous avons ainsi entendu hier soir le collectif AVI, représentant de victimes du copy trading qui ont perdu entre 1 500 et 50 000 euros.

La rédaction du champ de l’interdiction est adaptée à l’état actuel du droit et compatible avec le périmètre de l’article L. 222-16-2 du code de la consommation. Elle ne permet la publicité pour des cryptoactifs qu’aux opérateurs bénéficiant d’un agrément de l’Autorité des marchés financiers.

L’amendement actualise également la rédaction de l’interdiction aux influenceurs commerciaux de faire de la publicité contre rémunération pour les jeux d’argent et de hasard, ainsi que pour les jeux vidéo comprenant une fonctionnalité essentielle assimilable à ces derniers – en ce qui concerne les jeux vidéo, je remercie les représentants de l’association qui nous a accompagnés pour procéder à cette régulation.

Pour conserver de la souplesse, l’édiction d’exceptions à ces différentes interdictions est renvoyée au pouvoir réglementaire, qui pourra veiller à éviter les effets de bord.

Enfin, l’amendement prévoit que la violation de ces interdictions soit punie d’une peine de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende, ainsi que d’une peine complémentaire – elle nous paraît essentielle –, qui pourra être prononcée par le juge, d’interdiction d’exercice de l’activité d’influence commerciale. L’évolution proposée par rapport au texte initial se justifie par la nécessité de recourir à des peines respectant le principe de proportionnalité.

M. le président Guillaume Kasbarian. Cet amendement fait l’objet de nombreux sous-amendements. Pour que la discussion soit claire, nous les traiterons un par un.

Sous-amendement CE134 de Mme Christine Engrand

Mme Christine Engrand (RN). Nous sommes gênés que la définition des exceptions soit renvoyée à l’autorité réglementaire sans autre forme de procès. Par précaution, nous proposons donc de préciser ces exceptions, qui doivent être strictement limitées aux campagnes d’information et de prévention.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette le sous-amendement.

 

Sous-amendement CE197 de Mme Violette Spillebout

Mme Violette Spillebout (RE). Ce sous-amendement a pour but de supprimer l’interdiction de la promotion de médicaments, produits pharmaceutiques et dispositifs médicaux. Si l’intention de l’amendement est louable, le champ qu’il définit nous semble beaucoup trop large : il conduirait à interdire la promotion des compléments alimentaires, des vitamines, des préservatifs ou des tests de grossesse, tous en vente libre.

Certes, des dérives sont constatées – on pense notamment à la naturopathie ou à la vente pyramidale de certains produits alimentaires, impliquant l’embrigadement sur les réseaux sociaux. Rappelons à ce propos que les influenceurs sont concernés, dans le cadre de la proposition de loi, par l’interdiction de la publicité mensongère mentionnée aux articles 121-1 et 121-7 du code de la consommation.

Il s’agit d’éviter que soient empêchées de s’exprimer nombre d’entreprises du secteur, notamment de petites entreprises, qui commercialisent en particulier des compléments alimentaires, souvent recomposés en fonction du profil de la personne.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Nous partageons votre intention d’éviter les effets de bord, mais la suppression de la fin de l’alinéa risque d’être contre-productive : les éléments relatifs aux campagnes de santé publique du Gouvernement, mais aussi les prothèses auditives, par exemple, se trouveraient inclus dans le périmètre de l’influence commerciale.

Je suis membre du Conseil national du sida ; nous ne souhaitons pas empêcher les campagnes de santé publique ou relatives aux droits contraceptifs.

Vous avez assisté comme moi, hier soir, aux auditions des représentants des victimes et des lanceurs d’alerte : la pratique de l’influence commerciale concernant les produits de santé pose de nombreux problèmes et les exemples s’accumulent. Le microneedling consiste ainsi à faire passer sous la peau une aiguille, souvent à l’aide de produits cosmétiques, dans le but d’obtenir une peau parfaite : ce mélange de pratique illégale de la médecine, de promotion de soins et d’un dispositif médical « fait un carton », mais il est interdit dans les salons esthétiques ; de nombreux influenceurs en font la promotion.

Nous ne sommes évidemment pas fermés à une évolution du texte et nous vous proposerons de le retravailler ensemble, si mes arguments ne vous ont pas convaincue. Sachez toutefois que l’Ordre des médecins adhère pleinement à ce que nous préconisons.

Enfin, pour éviter des effets de bord, la rédaction proposée a été travaillée avec les services juridiques du ministère de la santé.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

Mme Violette Spillebout (RE). Je maintiens le sous-amendement : il importe de protéger tous ceux qui ont une activité légale et conforme à ce qui se passe sur le marché en dehors des réseaux sociaux. Je suis disposée à le retravailler pour la séance.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Nous devons envoyer un message à ceux qui nous regardent. Or la suppression de cet alinéa pourrait représenter un message négatif pour les influenceurs, mais aussi pour les victimes, notamment celles de la promotion néfaste de faux dispositifs médicaux.

La commission adopte le sous-amendement.

En conséquence, les sous-amendements CE161 de Mme Laurence Cristol et CE190 de Mme Ségolène Amiot tombent.

 

Sous-amendement CE156 de M. Denis Masséglia

M. Denis Masséglia (RE). Il y a quelques années, le Roi des rats, influenceur, avait fait une enquête sur la promotion du casino en ligne par des influenceurs sur Twitch, destinée à attirer des jeunes vers cette pratique interdite en France. L’objectif de mon sous-amendement est que ce qui est interdit en France ne puisse – logiquement – être promu sur les réseaux sociaux, afin que des personnes fragiles, surtout si elles sont mineures, ne contournent pas l’interdiction par l’intermédiaire d’un VPN.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Défavorable.

M. Denis Masséglia (RE). J’aurais aimé connaître les raisons de cet avis. Ne vous dérange-t-il pas que des mineurs puissent voir sur Twitch des casinos en ligne opérés depuis Malte ? Il me semblait que nous étions là pour protéger les mineurs de pratiques abusives.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Merci de souligner la nécessité de réguler les casinos en ligne, mais cette pratique est déjà prohibée. L’insertion que vous souhaitez ne nous semble donc pas utile, en particulier dans le présent article, qui vise non à rappeler les règles en vigueur mais à en créer de nouvelles. Naturellement, il faut absolument protéger les publics vulnérables, notamment les mineurs ; je vous sais gré de votre soutien à ce propos.

La commission rejette le sous-amendement.

 

Sous-amendement CE173 de Mme Nadège Abomangoli

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES). Le collectif AVI a démontré la nocivité de nombreux placements financiers dont certains influenceurs ont fait la promotion. Des victimes ont perdu plusieurs milliers d’euros à cause de ces pratiques. Santé publique France relève que les jeunes sont six fois plus susceptibles que les adultes de développer une addiction aux jeux d’argent et que 70 % des joueurs sont endettés auprès des banques. Certains services ont fait du ciblage des jeunes et des plus précaires une véritable stratégie commerciale, avec des slogans comme « Grosse cote, gros gain, gros respect » ou « Tout pour la daronne ».

Nous souhaitons interdire sans exception la promotion par les influenceurs des produits et services financiers, dont les paris sportifs. Il y va de la protection des plus jeunes de nos concitoyens.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment : il faut conserver de la souplesse ; nous renvoyons la définition des exceptions à un décret et nous pourrons tous participer à la consultation.

La commission rejette le sous-amendement.

 

Sous-amendement CE133 de Mme Charlotte Goetschy-Bolognese

Mme Charlotte Goetschy-Bolognese (RE). On assiste à une diversification des produits immobiliers proposés aux investisseurs, dont certains comportent un risque de perte en capital. C’est le cas des sociétés civiles de placement immobilier (SCPI), qui ont connu un développement exponentiel depuis les années 2010, du fait d’un rendement plus intéressant que celui de produits d’épargne plus classiques. De manière générale, nous entendons protéger les consommateurs des publicités faisant la promotion de dispositifs immobiliers légaux, mais à but dolosif – qui omettent les clauses, sous-estiment l’apport ou surestiment les rendements.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Demande de retrait.

Nous ne sommes pas défavorables sur le fond au sous-amendement, mais il faut trouver le juste équilibre entre encadrement et interdiction ; c’est ce que nous avons chaque fois tenté de faire. Or la rédaction est ici trop large : elle vise l’ensemble du régime, et non les seules SCPI présentant des risques. Nous pouvons en rediscuter en vue de la séance.

Le sous-amendement est retiré.

 

Sous-amendement CE200 de Mme Olga Givernet

Mme Olga Givernet (RE). Ce sous-amendement vise à supprimer l’interdiction de principe de la promotion des jeux d’argent et de hasard par les influenceurs.

Parce qu’il faut protéger les joueurs, notamment les mineurs, je propose d’appliquer la loi relative à la publicité commerciale pour ces jeux, en vérifiant la présence de bandeaux de prévention et en évitant toute mise en scène de mineurs.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Nous avons auditionné les représentants du secteur des jeux, mais aussi ceux de l’Autorité nationale des jeux (ANJ) ; tous les membres de la commission étaient conviés à ces auditions. L’ANJ nous a indiqué que, lors des grands événements sportifs, les promotions d’influenceurs bondissent et que les risques pour les jeunes sont considérables. Avis défavorable.

M. Denis Masséglia (RE). Il y a un point à propos duquel je suis d’accord avec cette proposition de loi, dont j’espère qu’elle sera bien plus transpartisane : la vision du jeu vidéo. Celui-ci est une passion et un objet culturel ; il ne doit pas devenir un travestissement du jeu d’argent. C’est ce qui ressort des échanges qui ont eu lieu entre les rapporteurs et les représentants du secteur des jeux vidéo, et je m’en réjouis. Je suis donc défavorable au sous‑amendement, même si je ne peux pas voter.

Mme Olga Givernet (RE). Je maintiens que les règles qui s’appliquent aux influenceurs n’ont pas à être plus contraignantes que celles qui s’appliquent aux autres acteurs économiques.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Les représentants des sociétés de jeux nous ont montré des publicités, sur lesquelles figure un bandeau informatif. Sur un écran de téléphone portable, ce bandeau fait 5 millimètres de haut : je doute que les jeunes y prêtent attention.

Les chercheurs en marketing ont par ailleurs montré que les messages préventifs ont une influence assez faible sur la confiance que leur communauté accorde aux influenceurs. C’est d’ailleurs ce qui a conduit l’Espagne à interdire aux influenceurs de faire de la publicité pour les jeux d’argent.

Pendant la Coupe du monde, une centaine d’influenceurs ont été mobilisés pour promouvoir les paris sportifs, notamment sur Instagram, YouTube et Twitter. Or 80 % du public de ces influenceurs ont moins de 34 ans et 50 %, moins de 25 ans – sachant, en outre, que des mineurs déclarent parfois avoir plus de 18 ans. La mise moyenne est de 230 euros, ce qui représente une somme considérable pour des gens de cet âge.

L’objet de cette loi est de protéger les consommateurs. C’est pourquoi nous nous sommes inspirés de ce qui a été fait en Espagne, sans pour autant interdire de manière générale la promotion.

La commission adopte le sous-amendement.

En conséquence, le sous-amendement CE198 de Mme Violette Spillebout tombe.

Sous-amendement CE172 de Mme Nadège Abomangoli.

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES). Il s’agit d’interdire aux influenceurs de faire la promotion d’abonnements à des pronostics sportifs. La publicité pour les paris sportifs en ligne vise prioritairement les plus jeunes et les plus précaires, qui sont la cible des opérateurs de jeux comme Winamax, ZeBet, Unibet, FDJ, etc.

Les dépenses en paris sportifs en ligne des 18-24 ans ont connu une hausse de 127 % au cours de la première moitié de l’année 2021, et de 30 % sur la seule période correspondant à l’Euro de football. Les 18-24 ans seraient désormais la tranche de la population qui effectue le plus de transactions liées aux paris sportifs en ligne, suivis des 24-35 ans.

Par ailleurs, beaucoup de sites de pronostics sont intimement liés à des services de paris sportifs en ligne. SportyTrader propose, par exemple, de faire des paris sur Betclic.

Contre l’avis du rapporteur, la commission rejette le sous-amendement.

 

Sous-amendement CE174 de Mme Mathilde Hignet.

Mme Mathilde Hignet (LFI-NUPES). Il importe d’interdire la promotion, par les influenceurs, des produits et équipements cosmétiques non certifiés par les institutions françaises et européennes. C’est un enjeu de santé publique.

Les réseaux sociaux ont ouvert la voie à la promotion, par les influenceurs, de produits et d’équipements cosmétiques. Or de nombreuses personnes ayant acheté ces produits ont fait état de problèmes de santé : perte de cheveux, migraines ou brûlures après l’utilisation de produits capillaires ; brûlures, encore, après l’utilisation de patchs brûleurs de graisse… Au mois de janvier, le site 60 millions de consommateurs épinglait ces cosmétiques qui contiennent des produits nocifs, allergisants, irritants, et des molécules interdites en Europe.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. La publicité pour les produits et équipements cosmétiques non certifiés par les institutions françaises et européennes est d’ores et déjà interdite, dans la mesure où ces produits sont interdits à la vente s’ils ne respectent pas la législation de l’Union européenne.

Par ailleurs, nous ne sommes pas favorables à l’interdiction de la publicité pour les cosmétiques.

La commission rejette le sous-amendement.

 

Sous-amendement CE135 de Mme Christine Engrand.

Mme Christine Engrand (RN). Sur les réseaux sociaux, on ne trouve pas que des photos de plats végétariens, de la tour Eiffel ou de vos dernières visites en circonscription. Il s’y glisse aussi des clichés plus osés. Des photos en maillot de bain sont parfois un prétexte pour faire la promotion d’activités moins avouables, accessibles moyennant quelques euros sur des plateformes plus intimistes, comme OnlyFans.

Nous proposons d’endiguer ce phénomène en interdisant la promotion, par des influenceurs, de photographies et vidéos à caractère pornographique.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Avis défavorable. Une loi a été votée à ce sujet au Sénat et ce n’est pas l’objet de la présente proposition de loi.

La commission rejette le sous-amendement.

 

Sous-amendements CE167 de Mme Aurélie Trouvé, CE151 de Mme Louise Morel et CE163 de Mme Laurence Cristol (discussion commune).

Mme Ségolène Amiot (LFI-NUPES). Il s’agit d’interdire aux influenceurs de faire la promotion de produits alimentaires trop riches en sucre, en sel ou en matières grasses. C’est un enjeu de santé publique, notamment pour les plus jeunes. On constate en effet une forte augmentation du nombre de cas d’obésité infantile liée à la malbouffe.

Mme Louise Morel (Dem). L’interdiction faite aux influenceurs concernerait les produits alimentaires trop gras, trop sucrés ou trop salés dont le nutri-score serait classé D ou E. L’obésité est un problème de santé publique mondial, dont l’incidence ne cesse d’augmenter. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le nombre de cas d’obésité a presque triplé à l’échelle planétaire depuis 1975, et la France n’est pas épargnée par cette évolution puisque, d’après une étude de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), 47,3 % des adultes français seraient obèses ou en surpoids.

Les chiffres du surpoids et de l’obésité sont aussi en constante augmentation chez les jeunes. Sachant que 95 % des 16-25 ans vont quotidiennement sur les réseaux sociaux et que ces réseaux influencent 87 % des acheteurs dans leurs décisions d’achat, l’interdiction sur les réseaux sociaux de la publicité pour les produits cités plus haut semble être un bon levier de lutte.

Mme Laurence Cristol (RE). Il y a un consensus scientifique sur l’inefficacité des messages sanitaires appelant, par exemple, à manger cinq fruits et légumes par jour. En revanche, l’interdiction de la publicité pour certains aliments a montré son efficacité. Plusieurs pays ont ainsi lancé des politiques ambitieuses interdisant la publicité pour les boissons et les aliments à faible qualité nutritionnelle, sur certains supports ou à certaines tranches horaires.

Dans cet esprit, nous proposons d’interdire aux influenceurs de faire la promotion des boissons avec ajouts de sucre, de sel ou d’édulcorants de synthèse et des produits alimentaires manufacturés.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Nous sommes particulièrement sensibles à cette question et c’est la raison pour laquelle nous donnerons un avis favorable au sous-amendement CE193 de Dominique Potier, tendant à favoriser les messages à caractère informatif, du type « Manger, bouger. »

À ce stade, nous ne sommes pas favorables à un principe d’interdiction stricte, auquel nous préférons une logique de prévention. Avis défavorable aux trois sous-amendements.

M. le président Guillaume Kasbarian. Des influenceurs que nous avons auditionnés hier nous ont dit qu’ils ne comprendraient pas qu’on leur interdise de faire la promotion, par exemple, des bonbons Haribo, alors qu’elle est autorisée sur tous les autres canaux de communication. Soit on interdit toute publicité pour les bonbons Haribo, y compris de la part de Michel-Édouard Leclerc, soit on l’autorise partout.

Mme Ségolène Amiot (LFI-NUPES). Je suis d’accord avec vous, il n’y a pas lieu d’imposer des règles plus strictes aux influenceurs. Reste qu’il serait pertinent de réfléchir à une interdiction pure et simple de la publicité pour les produits trop gras, trop sucrés ou trop salés, et c’était le sens de notre sous-amendement d’appel. Les spots publicitaires entrent dans la tête des gens et les Français y sont tellement sensibles qu’ils sont les premiers consommateurs mondiaux de Nutella.

Mme Virginie Duby-Muller (LR). Le dispositif proposé par notre collègue Dominique Potier, qui entend favoriser la prévention de l’obésité et la lutte contre la sédentarité, me paraît plus pertinent que ces sous-amendements, plutôt excessifs.

S’agissant du nutri-score, il me semble qu’il souffre d’imperfections – il classe tout de même le Coca Zero et les céréales Chocapic en A –, qui pourraient nuire injustement à de nombreux produits traditionnels, par exemple nos fromages, qui font la fierté de nos terroirs et qui sont souvent classés D ou E, parce que les portions ne sont pas prises en compte. Par ailleurs, la Commission européenne doit proposer prochainement la révision du règlement concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires. Il semble préférable d’attendre l’examen de ce texte.

Mme Louise Morel (Dem). Mon sous-amendement a été travaillé avec la Direction générale de la santé et le professeur Serge Hercberg, l’inventeur du nutri-score. Je comprends qu’on ne veuille pas soumettre les influenceurs à des règles plus contraignantes, mais cette proposition de loi pourrait être l’occasion de mettre un pied dans la porte.

M. Dominique Potier (SOC). Monsieur le président, j’aime votre appel à la cohérence : si l’on interdit aux influenceurs un certain type de publicité, il faut l’interdire à tout le monde. Mais j’entends aussi l’appel de nos autres collègues.

Dans son rapport sur la « malbouffe », notre collègue Loïc Prud’homme a montré à quel point les publicitaires ciblent les enfants. Le diabète de type 2, qui touchait 2 % de la population il y a une vingtaine d’années, en touche 5,4 % aujourd’hui : c’est une bombe à retardement sanitaire.

J’aime l’idée de « mettre un pied dans la porte » : il faut que cette discussion sur les influenceurs ouvre un débat plus large sur la publicité. La régulation de la publicité n’est pas suffisante. Il y a un rapport d’un à dix entre les moyens mis par la puissance publique dans les politiques de prévention en santé publique et les sommes dépensées par le secteur privé dans la publicité. Les premières victimes sont les plus pauvres, ceux qui n’ont pas de bagage culturel et économique. Face à ce qui est un scandale sanitaire, je ne crois pas que l’on puisse défendre la modération et la liberté.

M. le président Guillaume Kasbarian. On peut faire preuve de cohérence dans les deux sens. On peut tout interdire ou autoriser beaucoup de choses.

M. Julien Dive (LR). C’est une question de santé publique, mais aussi d’éducation alimentaire, et c’est au sein du foyer que celle-ci doit se faire. Ces sous-amendements, même s’ils sont pétris de bonnes intentions, me semblent perfectibles. La fiabilité du nutri-score étant de plus en plus discutée, il ne me semble pas souhaitable d’asseoir la loi sur cet outil.

Mme Violette Spillebout (RE). Le groupe Renaissance se préoccupe, comme vous, des questions de santé publique et il importe d’adresser à nos enfants des messages promouvant une alimentation saine et équilibrée. Toutefois, il importe aussi que les règles qui s’appliquent aux influenceurs soient les mêmes que celles qui régissent le monde du marketing et de la publicité. Il faut aider les influenceurs à devenir les véhicules de pratiques responsables et éthiques. Il faut sans doute travailler sur les labels, qui sont très peu utilisés.

M. Denis Masséglia (RE). Je m’interroge sur la cohérence de ces trois sous‑amendements. Kameto n’aura plus le droit d’avoir une bouteille de Red Bull à côté de lui lorsqu’il prendra la parole sur Twitch ; mais quand on regardera la Formule 1 sur Canal +, on pourra toujours voir Daniel Ricciardo buvant un Red Bull dans sa voiture Red Bull. Il faut un peu de cohérence : soit on interdit tout, soit on n’interdit rien, mais on ne peut pas faire de telles différences, selon le média utilisé !

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Il faut réfléchir à la manière de mieux réguler la publicité, sur les réseaux sociaux comme à la télévision, notamment la publicité pour les produits alimentaires, car elle a des conséquences majeures sur la santé publique.

Toutefois, l’objet de notre proposition de loi n’est pas d’ouvrir le champ miné de la régulation de la publicité pour l’alimentation. Nous souhaitons simplement appliquer à l’influence des règles qui pèsent sur d’autres secteurs, notamment l’obligation de diffuser des messages à caractère informatif de santé publique. C’est pourquoi, je le répète, nous donnerons un avis favorable au sous-amendement de Dominique Potier.

La commission rejette successivement les sous-amendements.

 

Sous-amendements identiques CE155 de Mme Virginie Duby-Muller et CE168 de M. Christophe Blanchet.

Mme Virginie Duby-Muller (LR). Nous proposons d’interdire aux influenceurs de faire la promotion de produits contrefaits. Bien qu’il existe déjà des lois relatives à la propriété intellectuelle pour interdire la détention, l’achat et la vente de contrefaçons, il semble opportun de préciser que la promotion de tels produits ou de sites vendant des produits contrefaisants est également interdite et couverte par la présente loi.

M. Christophe Blanchet (Dem). J’ai rédigé ce sous-amendement, comme tous les amendements que j’ai déposés sur ce texte, avec l’Union des fabricants pour la protection internationale de la propriété intellectuelle (Unifab) et le Comité national anti-contrefaçon (Cnac), dont je suis le président.

Nous proposons d’ajouter la promotion des produits contrefaisants aux interdictions prévues au II de l’article additionnel créé par l’amendement CE48. Ce qui est interdit dans le commerce physique doit l’être aussi dans le monde virtuel. Dans le rapport que Pierre-Yves Bournazel et moi-même avons consacré à cette question, nous avons montré combien la contrefaçon est un phénomène complexe ; il faut savoir que quatre personnes sur dix qui achètent une contrefaçon le font sans le savoir et se font arnaquer. Les influenceurs pourraient très bien, eux-mêmes, se faire arnaquer en faisant la promotion de produits contrefaits.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. L’amendement CE51, que je défendrai un peu plus tard, me paraît plus opérationnel. Il impose à l’influenceur de vérifier, entre autres choses, que le produit dont il fait la promotion n’est pas contrefaisant. Je vous invite donc à retirer vos sous-amendements afin d’éviter, en cas d’adoption de l’amendement CE51, que deux dispositions relatives à la contrefaçon figurent dans le texte, ce qui le rendrait redondant. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. Christophe Blanchet (Dem). Je maintiens mon sous-amendement, qui est placé avant le vôtre. Si votre amendement est adopté, nous trouverons une solution en séance. En matière de contrefaçon, les influenceurs ont une capacité de nuisance, mais aussi d’information, notamment vis-à-vis des jeunes. C’est pourquoi ce sous-amendement me paraît important.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Vous voulez envoyer un signal qui me semble utile : je m’en remettrai donc finalement à la sagesse de la commission sur ces sous‑amendements. J’aurais aimé que nous envoyions aussi un signal au sujet des jeux d’argent et des produits de santé : j’espère que vous voterez les amendements qui s’y rapportent en séance.

La commission adopte les sous-amendements.

 

Sous-amendement CE187 de Mme Ségolène Amiot.

Mme Ségolène Amiot (LFI-NUPES). Il s’agit de protéger les enfants des pratiques des parents influenceurs en s’assurant qu’un enfant de moins de 16 ans ne puisse être utilisé dans des contenus à but commercial sans autorisation individuelle préalable accordée par l’autorité administrative.

Dans son rapport sur les parents influenceurs de février 2023, l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique révèle que 85 % des parents influenceurs publient des contenus concernant leurs enfants au moins une fois par semaine et que seuls 44 % d’entre eux déclarent obtenir un consentement de leur part avant de le faire. C’est déjà, en soi, une atteinte au droit à l’image des enfants, mais cela va plus loin, puisque 60 % des parents déclarent jusqu’à une heure de temps de préparation et que deux à dix prises de vue sont nécessaires avant la publication d’une photo ou d’une vidéo.

Cette nouvelle forme d’activité professionnelle doit être encadrée plus rigoureusement et les parents influenceurs doivent se plier au dispositif de protection des enfants s’appliquant notamment aux activités de cinéma ou de spectacle.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. J’estime que les amendements que nous avons adoptés, qui permettent d’appliquer la loi Studer à l’influence en ligne, constituent déjà une avancée importante. Nous ne sommes pas défavorables, sur le principe, à votre proposition, mais je préférerais qu’on en reste là. Je vous invite donc à retirer votre sous-amendement.

La commission rejette le sous-amendement.

 

Sous-amendement CE157 de M. Denis Masséglia.

M. Denis Masséglia (RE). Chaque semaine, sur YouTube, sort un nouvel épisode de la série Dans la tête d’un pro : on y suit un influenceur qui participe à des compétitions de poker et qui explique la manière dont il mène ses parties.

Dans sa rédaction actuelle, la proposition de loi interdirait ce type de contenu, ce qui ne me paraît pas souhaitable. L’objectif initial du texte était de lutter contre les escroqueries et il me semble qu’on s’en éloigne. Il me paraîtrait utile de préciser que ne sont interdits que les contenus où l’influenceur fait la promotion directe d’un produit ou d’une activité. Les contenus comme celui que j’ai décrit, qui ont une visée pédagogique ou qui permettent à des gens de progresser dans des domaines d’activité qui les passionnent, n’ont pas de raison d’être interdits.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Il me semble que les gamers qui participent à des événements ne sont pas concernés : s’il n’y a pas de contrepartie économique ou en nature, l’influenceur n’entre pas dans le cadre de la présente loi. Avis défavorable.

M. Denis Masséglia (RE). Le programme que j’évoquais ne concerne pas le gaming, mais le poker. Il est soutenu par une entreprise française dont le nom commence par Wi- et finit par -ax. Des joueurs français sont filmés en compétition et expliquent leur stratégie. Cela n’a strictement rien à voir avec le jeu vidéo, mais cela permet aux personnes qui jouent au poker de progresser. Or votre proposition de loi va interdire ce genre de contenu.

M. le président Guillaume Kasbarian. Si je comprends bien, un influenceur qui fait des contenus sur le poker peut publier la vidéo d’un événement, tant qu’il ne fait pas la promotion du produit vendu dans le cadre de cet événement.

M. Denis Masséglia (RE). Exactement. Si les personnes se filment en train de jouer au poker en expliquant leur stratégie, mais sans faire la promotion du poker et sans faire de publicité pour Winamax, je ne vois pas le problème. Il faut trouver un compromis pour que l’on puisse continuer à faire des vidéos sur le poker, si l’on ne fait pas la promotion d’une entreprise en particulier.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Je conçois qu’il puisse y avoir un effet de bord et je vous propose d’en rediscuter en vue de la séance. À ce stade, je ne suis pas convaincu par votre rédaction : je crois qu’il faut la simplifier. Il reste toujours la solution des exceptions prévues par décret, qui visent justement à éviter ces effets de bord indésirables.

La commission rejette le sous-amendement.

 

Sous-amendement CE181 de M. Laurent Esquenet-Goxes.

M. Laurent Esquenet-Goxes (Dem). Nous proposons que le montant de l’amende encourue par un influenceur pour non-respect des interdictions de promotion mentionnées à cet article puisse être majoré. Cette majoration pourrait atteindre 100 % des dépenses consacrées à la promotion, afin que l’amende ait un caractère vraiment dissuasif.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. La rédaction actuelle nous paraît plutôt équilibrée. Nous avons cherché à respecter le principe de proportionnalité et, avec la peine complémentaire que nous vous proposerons d’adopter, l’ensemble devrait être assez dissuasif. Le risque, avec ce que vous proposez, c’est que l’amende ne soit pas adaptée : soit trop élevée, soit pas assez.

La commission rejette le sous-amendement.

 

Sous-amendement CE136 de Mme Christine Engrand.

Mme Christine Engrand (RN). Les peines prévues nous paraissent insuffisantes, compte tenu de la variété des infractions possibles et de leur intensité. Imposer une peine fixe, c’est mettre sur un pied d’égalité l’influenceur un peu maladroit ou malhabile avec la loi et celui qui abuserait éhontément de son audience. C’est pourquoi nous proposons que les peines infligées aux influenceurs qui fraudent soient plus lourdes lorsque les victimes sont des personnes en état d’ignorance ou de faiblesse, au sens du code pénal, et selon que ces abus sont organisés ou non.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Avis défavorable. Il convient de respecter le principe de proportionnalité des délits et des peines. Par ailleurs, le juge pourra toujours choisir de requalifier les faits s’il s’avère que les personnes sont en situation de faiblesse et qu’il y a un abus de faiblesse manifeste.

La commission rejette le sous-amendement.

 

M. le président Guillaume Kasbarian. Je rappelle que la commission a adopté les sous-amendements CE197, CE200, CE155 et CE168.

La commission adopte l’amendement CE48 sous-amendé.

 

Elle adopte l’amendement rédactionnel CE49 de M. Arthur Delaporte, rapporteur.

 

Amendement CE50 de M. Arthur Delaporte.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Cet amendement vise à compléter la rédaction relative à la promotion, par des personnes agissant dans le cadre d’une activité d’influence commerciale par voie électronique, d’offres de formation professionnelle, ainsi que de contenus ayant fait l’objet de retouches à l’aide d’un logiciel de traitement. Nous avons travaillé sur les dispositions relatives à la formation professionnelle en lien avec le ministère concerné.

Ce nouvel article prévoit, d’abord, que toute promotion de produits, d’actes ou de prestations réalisée par les personnes mentionnées à l’article 1er de la présente proposition de loi doit être indiquée par une mention claire, lisible et identifiable sur l’image ou la vidéo durant l’intégralité de la promotion, obligation prévue par le DSA. Il s’agit de lutter contre les publicités déguisées ou subreptices.

S’agissant, ensuite, de la publicité relative aux formations professionnelles, devra être mentionné le nom de l’organisme de formation à l’origine de la publicité ainsi que celui référencé sur MonCompteFormation, en cas de sous-traitance lorsque la publicité de l’influenceur porte sur des formations éligibles au compte personnel de formation. La diffusion d’annonces pour de fausses ou de mauvaises formations constitue un sujet important. Cet affichage responsabilisera les organismes de formation ; en outre, la Caisse des dépôts et consignations pourra ainsi diligenter, le cas échéant, un contrôle auprès de l’organisme de formation responsable de la publicité et éligible au financement du CPF.

Enfin, les contenus créés et diffusés par les influenceurs devront être accompagnés de la mention « image retouchée ». Cette disposition vise à lutter contre la diffusion des stéréotypes de genre.

Toute violation de ces dispositions sera sanctionnée d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 4 500 euros d’amende.

M. le président Guillaume Kasbarian. Nous traiterons également les nombreux sous-amendements déposés sur cet amendement un par un.

Sous-amendement CE137 de Mme Christine Engrand.

Mme Christine Engrand (RN). Ce sous-amendement a pour objet d’imposer la mention claire, lisible et identifiable à la diffusion d’une promotion et non à sa réalisation. Un influenceur peut effectuer toutes les promotions qu’il veut sans jamais commettre un acte illégal dès lors qu’il ne les diffuse pas. S’il ne réalise pas ses promotions mais diffuse celles de la marque qui le rémunère, sort-il du cadre de la rédaction de l’alinéa ?

Afin d’éviter aux juges d’inutiles nœuds au cerveau, il conviendrait de privilégier le critère de diffusion à celui de réalisation.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette le sous-amendement.

 

Sous-amendement CE138 de Mme Christine Engrand.

Mme Christine Engrand (RN). Ce sous-amendement étend aux supports audio et textuels la liste des supports qui doivent mentionner le caractère promotionnel d’un contenu. Les moyens employés par les influenceurs pour promouvoir un produit ne sont pas exclusivement visuels, et nous ne sommes pas à l’abri de les voir évoluer : l’essor des spaces sur Twitter doit nous inciter à étendre ces interdictions aux supports audio. De la même façon, les influenceurs sont parfois les administrateurs de groupes semi-publics qu’ils organisent sur des applications telles que Discord, où ils peuvent faire la promotion de produits à l’aide d’un hyperlien auprès d’un cercle privilégié de leur public, qui sera d’autant plus enclin à acheter qu’il aura l’illusion de la proximité.

Le but de ce sous-amendement est d’empêcher le contournement de la loi par des méthodes de promotion aujourd’hui marginales mais susceptibles de se développer.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette le sous-amendement.

 

Sous-amendement CE175 de M. Laurent Esquenet-Goxes.

M. Laurent Esquenet-Goxes (Dem). Ce sous-amendement vise à imposer la diffusion d’un message de prévention en amont de certaines publicités, en plus des mentions obligatoires que vous avez bien voulu substituer aux bandeaux, mal perçus par les créateurs de contenus.

Le sous-amendement complète ainsi le dispositif écrit d’avertissement par une mise en garde orale, énoncée par le créateur du contenu. Celle-ci sera diffusée immédiatement avant le message publicitaire ou promotionnel.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Cela me semble trop contraignant. Nous avons rédigé l’amendement en nous appuyant sur les résultats des concertations menées par Bercy ; il nous semble proportionné et applicable. Avis défavorable.

La commission rejette le sous-amendement.

 

Sous-amendement CE192 de Mme Ségolène Amiot.

Mme Ségolène Amiot (LFI-NUPES). Il s’agit d’ajouter à la dénomination sociale du prestataire responsable de la formation faisant l’objet d’une promotion, le numéro du système d’identification du répertoire des entreprises (Siren). Deux organismes de formation peuvent porter le même nom, l’un étant parfaitement en règle, l’autre l’utilisant à des fins d’arnaque – plusieurs personnes en ont été victimes. La DGCCRF a eu bien de la peine à retrouver de faux organismes de formation du fait de cette confusion. Puisque les organismes de formation sont identifiés par le numéro de déclaration d’activité (NDA), rattaché à une personne morale qui dispose d’un Siren, nous proposons que ce numéro apparaisse dans le descriptif d’une vidéo promouvant un organisme de formation. Cette disposition protégerait les consommateurs et les organismes en règle, en permettant d’identifier facilement les contrevenants.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Je n’ai pas d’avis particulier sur la question, donc je m’en remets à la sagesse de la commission. Il ne faut pas multiplier les règles, d’autant que je ne suis pas sûr que tous les organismes de formation aient un numéro de Siren.

Mme Ségolène Amiot (LFI-NUPES). Si, c’est obligatoire.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Alors, avis favorable.

La commission rejette le sous-amendement.

 

Sous-amendements CE132 et 193 de M. Dominique Potier (discussion commune).

M. Dominique Potier (SOC). Dans la population française, une personne sur deux est en surpoids et une sur six est obèse. Les chiffres sur le diabète de type 2 sont terrifiants. La consommation d’aliments de mauvaise qualité nutritionnelle augmente de 61 % le risque de maladies cardiovasculaires, de 40 % celui de syndrome métabolique et de plus de 60 % celui d’obésité chez l’homme. Le coût global de la « malbouffe » dépasse les 50 milliards d’euros par an, celui du diabète de type 2 représentant à lui seul 19 milliards d’euros.

Pour la santé publique et l’équilibre des comptes de la sécurité sociale, une politique de prévention est indispensable. L’OMS, le ministère de la santé et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) y sont tous favorables.

Le sous-amendement vise à appliquer aux influenceurs les règles qui prévalent par ailleurs. Nous avons déjà quelques outils : pour les aliments salés, gras, sucrés et remplis d’édulcorants, le nutri-score et les allégations nutritionnelles encadrées par la loi ; pour les boissons sursucrées, des dispositifs d’alerte incitant à bouger plus et à manger mieux. Insérer ces informations dans les contenus promouvant des denrées alimentaires est le minimum : nous avons déjà défendu des positions plus dures, mais nous jouons le jeu du compromis transpartisan, même si l’on sait que ces alertes sont insuffisantes pour les enfants les plus défavorisés. Au moins, prévenons les consommateurs.

J’ai cru comprendre que le déploiement du nutri-score rencontrait des problèmes techniques, plus que politiques. À la demande du Gouvernement, vous préférez ne pas insérer le nutri-score dans le texte et conserver toutes les autres allégations de santé publique : je le regrette, mais j’y vois une invitation à retravailler l’application de cet indicateur. Quels problèmes pose-t-il ? Un approfondissement de la question est sans doute nécessaire, si bien que je suis prêt à retirer le sous-amendement CE132 au profit du CE193, qui recueille l’assentiment du Gouvernement et des rapporteurs. Mais, comme pour les questions techniques et constructives de nos collègues de La France insoumise, je souhaiterais que l’examen du texte en séance publique apporte des réponses et permette d’aller le plus loin possible.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Je vous remercie pour votre sagesse. Après discussion avec les autorités compétentes, le nutri-score ne nous semble pas adapté, notamment pour des raisons juridiques. Le second sous-amendement va dans le bon sens en matière de lutte contre la malbouffe et pour la santé publique.

M. le président Guillaume Kasbarian. Vous connaissez mon amour de la cohérence : les informations que votre sous-amendement propose d’imposer valent-elles aussi pour d’autres canaux que celui des influenceurs ?

M. Dominique Potier (SOC). Nous avons le même amour de la cohérence et de la justice, j’espère ! Ce sont les mêmes canaux. L’extension du nutri-score est compliquée, nous disent des autorités qui ne sont ni ultralibérales, ni aux mains des intérêts privés. Je retire donc, dans un esprit constructif, le sous-amendement CE132 au bénéfice du CE193.

Je souhaite d’ailleurs rendre hommage à Guillaume Garot, ancien président du Conseil national de l’alimentation (CNA), qui a élaboré ces sous-amendements avec moi et qui les soutient vivement. Ceux-ci reprennent les préconisations de la comitologie sur la santé et l’alimentation.

Le sous-amendement CE132 est retiré.

La commission adopte le sous-amendement CE193.

 

Sous-amendement CE160 de Mme Laurence Cristol.

Mme Laurence Cristol (RE). Rapporteure du texte qui est devenu la loi du 9 mars 2023 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans les domaines de l’économie, de la santé, du travail, des transports et de l’agriculture (Ddadue), j’ai été interpellée, en me penchant sur la question des denrées alimentaires, par la dérive de la vente des compléments alimentaires sur internet et les réseaux sociaux. En raison de ces nouveaux canaux de vente, souvent promus par des influenceurs, la consommation des compléments alimentaires a doublé ces dernières années, alors qu’une infime partie de la population en a réellement besoin et que leur consommation, voire leur surconsommation, peuvent avoir des effets secondaires parfois graves. L’Anses et les académies de médecine et de pharmacie alertent depuis des années sur ce problème.

Ce sous-amendement vise à ce que la promotion de compléments alimentaires soit obligatoirement accompagnée d’un message à caractère sanitaire rappelant les dangers liés à leur consommation.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Inclure les compléments alimentaires dans l’obligation d’information sur les produits alimentaires faisant l’objet de promotion de la part des influenceurs va dans le sens de ce que nous souhaitons collectivement défendre. Je vous demande néanmoins de retirer le sous-amendement, quitte à le redéposer en séance publique, car nous sommes en train de travailler sur le sujet. L’objectif est d’aboutir à une rédaction qui convienne à tous.

Mme Ségolène Amiot (LFI-NUPES). Nous soutiendrons ce sous-amendement qui va dans le sens de ceux que nous avons déposés à l’article 1er et qui sont tombés. Une consommation excessive de compléments alimentaires peut provoquer de gros dégâts sur certains organes : les reins pour les protéines, le foie, la rate ou le cerveau pour certaines vitamines. Pourtant, il ne s’agit que de vitamines dont la présence est vantée sur les paquets de céréales. Les vitamines et les compléments en métaux – fer, magnésium – sont présentés comme très profitables à la santé, alors que leur consommation doit répondre à une carence identifiée par un médecin ou un nutritionniste et respecter certaines limites. Promouvoir des compléments alimentaires d’apparence anodine peut être néfaste, car leur consommation peut se révéler très dangereuse, voire mortelle.

Mme Laurence Cristol (RE). Je souhaiterais que l’on travaille sur le sujet, car les oncologues craignent que la surconsommation de compléments alimentaires ait des effets négatifs dans l’évolution du cancer, notamment à cause d’interactions avec des traitements de chimiothérapie. Si vous me confirmez que nous pouvons revoir la rédaction du sous‑amendement d’ici à la séance publique, je le retirerais mais je souhaite défendre cette disposition dans l’hémicycle.

M. le président Guillaume Kasbarian. Si les compléments alimentaires posent problème, on peut réfléchir à réguler leur promotion, mais pourquoi ne parler que des influenceurs ? Les spots audiovisuels, la publicité dans les journaux, les affiches et tout autre support devraient également être concernés. Allons-nous plus loin pour les influenceurs que pour les autres canaux de publicité ?

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Votre interrogation a le mérite de pointer le véritable sujet. Avec l’influence, n’importe qui peut faire de la publicité n’importe comment. Voilà la distinction principale entre la publicité sur les réseaux sociaux et la publicité diffusée par d’autres canaux de communication. Nous avons discuté tout à l’heure de l’interdiction de la publicité pour les jeux d’argent et les paris sportifs : la publicité dans ce secteur est régulée et les campagnes doivent être soumises à l’ANJ. Or la multiplicité des producteurs de contenus rend impossible une vérification exhaustive des promotions.

Par ailleurs, des motifs de santé publique peuvent permettre de réguler spécifiquement certains secteurs : l’Espagne a saisi cette opportunité pour aller plus loin dans la régulation. L’impact des influenceurs peut être supérieur à celui d’un simple message publicitaire. Une entreprise connue et reconnue – on citait tout à l’heure Haribo – n’aura pas le même impact que Mme Tout-le-monde que vous ne connaissez pas : cette différence peut légitimer des interdictions spécifiques pour des raisons de santé publique.

Les vigies citoyennes, la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes), la direction générale de la santé (DGS), tous, ici relayés par Mmes Cristol et Amiot, nous alertent sur les compléments alimentaires, qui constituent donc un sujet majeur. Néanmoins, la rédaction du sous-amendement n’est pas assez aboutie ; il faut absolument trouver la bonne formulation d’ici à la séance, afin d’élaborer une régulation efficace de la publicité pour les compléments alimentaires. Le droit reste flou sur ceux-ci, si bien que nous devons nous pencher sérieusement sur la question.

M. le président Guillaume Kasbarian. Il y a un sujet sur les compléments alimentaires, mais il y en a également un sur l’alcool, sur le sucre, sur le gras, sur les jeux vidéo, sur les jeux en ligne et sur les jeux d’argent, mais la vocation de votre proposition de loi, telle que je la comprends et la soutiens, est d’appliquer aux influenceurs une réglementation qui existe pour les autres.

S’il faut mieux réglementer l’utilisation des compléments alimentaires, déposons une proposition de loi spécifique qui visera à mieux encadrer leur promotion, quel que soit le canal : si les compléments alimentaires sont dangereux, il faut réguler leur promotion sur tous les supports. Dans ma circonscription, un agriculteur produit de la spiruline : si la promotion de la spiruline pose problème, il n’y a pas lieu de l’encadrer uniquement pour les contenus des seuls influenceurs.

Si nous ne prenons pas garde à cela, nous risquons de surréglementer l’activité des influenceurs et de passer à côté d’un vrai problème. Si les compléments alimentaires sont dangereux, il faut déposer une proposition de loi portant sur les messages sanitaires, quel que soit le canal de diffusion.

Mme Olga Givernet (RE). On peut également parler des jeux d’argent, secteur dans lequel la publicité est très régulée. Les opérateurs doivent fournir chaque année à l’ANJ un plan de publicité – j’imagine que des règles identiques doivent s’appliquer dans d’autres domaines. Les opérateurs fournissant les services ou les produits doivent justifier leur publicité, et non les canaux, audiovisuels ou autres, qui la diffusent.

Les influenceurs ont une éthique, et nous pouvons travailler à la renforcer, mais la responsabilité doit peser sur les fournisseurs des produits ou des services.

Mme Louise Morel (Dem). Devons-nous nous aligner vers le haut ou vers le bas ? Il faut certes assurer une cohérence dans la réglementation des différents secteurs, mais le sujet de la proposition de loi nous tient tous à cœur parce qu’il n’est pas anodin : 95 % des jeunes adultes âgés de 16 à 25 ans fréquentent quotidiennement les réseaux sociaux et 87 % des personnes qui achètent des produits après avoir vu des contenus publiés sur ces réseaux, disent être inspirées par des influenceurs. Les chiffres sont massifs, et la publicité audiovisuelle ou dans la presse touche moins les plus jeunes d’entre nous. Ne faudrait-il pas mettre un pied dans la porte avant de procéder à des harmonisations dans d’autres textes de loi ?

Mme Ségolène Amiot (LFI-NUPES). Mettre le pied dans la porte me semble en effet pertinent pour légiférer ensuite plus facilement, puisque nous n’aurions plus qu’à étendre à d’autres supports de publicité des restrictions que nous aurions déjà inscrites dans la loi.

Il est grand temps de remettre la loi Évin sur la table, afin de protéger les gens des addictions, en songeant à interdire les publicités pour les produits qui les génèrent.

M. le président Guillaume Kasbarian. Une question constitutionnelle de rupture d’égalité pourrait se poser si nous imposions des règles différentes à certains acteurs faisant de la publicité.

Mme Violette Spillebout (RE). Il est vrai que ce sujet nous émeut tous, compte tenu de la portée des conseils de santé et d’alimentation qui fleurissent sur les réseaux sociaux. Les rapporteurs ont déposé plusieurs amendements dans la partie du texte relative aux contrats entre les agences d’influenceurs et les influenceurs ou entre les marques et les influenceurs. C’est peut-être dans la partie qui traite du certificat d’influence responsable qu’il faudrait poser l’obligation d’information et de responsabilité éthique.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Cette discussion nous offre l’occasion d’évoquer quelques principes généraux de notre droit. Peut-on avoir des règles distinctes pour les différents canaux de communication ? La réponse est oui ! La loi Évin, qui est une belle loi même si elle peut faire l’objet de certaines évolutions qui sont d’ailleurs à l’étude, prévoit des interdictions spécifiques à la télévision. Celles-ci n’ont pas été déclarées contraire à la Constitution, au nom du principe supérieur de protection de la santé publique et des mineurs.

On peut considérer que ces derniers sont, comme d’autres publics vulnérables, particulièrement exposés à l’influence commerciale en ligne ; or on ne peut restreindre leur accès aux contenus, d’où le travail que mène actuellement M. Studer sur le sujet. C’est pourquoi il faut renforcer certaines interdictions et c’est d’ailleurs ainsi que nous avons conçu le texte : l’article 1er bis rappelle que les régimes d’interdiction généraux, notamment la loi Évin, s’appliquent aux influenceurs et l’article 1er ter précise les contours de plusieurs interdictions, car le droit actuel est flou sur certains points. Notre texte vise à combler ces lacunes, par exemple dans les domaines de la chirurgie esthétique et de la formation professionnelle que nous avons évoqués tout à l’heure. L’existence de canaux différents ne doit pas nous contraindre à appliquer le même régime juridique partout.

Enfin, l’influenceur ne fait pas de publicité classique. La publicité est réalisée par des gens formés, qui travaillent dans des agences et en lien avec les marques ; en outre, un contrôle assez strict s’exerce sur le contenu produit. En revanche, n’importe qui peut être influenceur.

M. le président Guillaume Kasbarian. Excusez-moi, mais le métier de publicitaire n’entre pas dans la catégorie des professions réglementées. Vous pouvez diffuser de la publicité à la télévision ou à la radio sans avoir de diplôme d’État.

M. Arthur Delaporte (SOC). Oui, mais une réglementation importante encadre l’activité publicitaire. N’importe qui peut devenir influenceur, activité qui peut être accessoire pour ceux qui la pratiquent. La proposition de loi cherche à réglementer le canal, nouveau et spécifique, de l’influence.

Je m’en remets à la sagesse de la commission sur ce sous-amendement.

La commission rejette le sous-amendement.

 

Sous-amendement CE176 de M. Laurent Esquenet-Goxes.

M. Laurent Esquenet-Goxes (Dem). Ce sous-amendement étend l’obligation d’information sur les retouches aux vidéos et il apporte une précision garantissant que le dispositif s’applique bien au logiciel de traitement d’image – dont le nom commence et finit par un P – et aux filtres, dès lors que leur utilisation modifie l’apparence du produit promu.

Selon des documents internes du groupe Meta, qui possède Facebook, 32 % des adolescentes ont déclaré que lorsqu’elles se sentaient mal dans leur corps, le réseau Instagram renforçait ce sentiment. Dans de nombreux pays, le métier d’influenceur représente la première aspiration professionnelle des jeunes qui regardent les créateurs de contenus comme leurs nouvelles idoles. La morale devrait imposer à ces stars d’internet de rappeler que leurs corps et leurs publications sont améliorés par des filtres et des retouches informatiques, mais l’immense majorité d’entre elles n’apportent pas ces précisions à leur communauté.

Si l’intérêt de la première disposition du sous-amendement est d’apporter une sécurité juridique, celui de la seconde me paraît essentiel. L’explosion des demandes de chirurgie esthétique liées aux filtres de Snapchat, TikTok ou Instagram est très documentée. Elle a notamment fait l’objet d’un très bon reportage sur la dysmorphophobie Snapchat, à savoir la peur de sa propre image nourrie par les filtres des réseaux sociaux.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Je vous demande de retirer ce sous-amendement au profit du suivant qui nous semble plus complet, et que nous pourrions retravailler dans la perspective de la séance publique.

La commission rejette le sous-amendement.

 

Sous-amendement CE188 de Mme Ségolène Amiot.

Mme Ségolène Amiot (LFI-NUPES). Mon sous-amendement aborde également les problèmes de dysmorphophobie, qui se manifestent par une détestation de son apparence ou de celle de quelqu’un d’autre, et de dépression que rencontrent notamment certaines jeunes filles. Près de 50 % des adolescentes qui passent cinq heures sur un réseau social présentent des symptômes de dépression ou de dysmorphophobie. Il s’agit d’une question de santé publique.

Nous proposons que les plateformes permettent à tout utilisateur de signaler une photo ou une vidéo qui lui semble « photoshoppée ».

M. Arthur Delaporte (SOC), rapporteur. Avis favorable. Ce sous-amendement complète utilement notre amendement, en élargissant le champ de celui-ci aux filtres alors que notre rédaction ne couvrait que les logiciels. La formulation « tous procédés » nous semble donc opportune. Nous soutenons également le fait que l’avertissement figure en permanence sur le contenu modifié, car les spectateurs et les visionneurs doivent être sensibilisés aux retouches qui altèrent la perception des corps ; cette obligation rejoint ce que nous avons dit sur la publicité.

Nous pourrons retravailler légèrement le quatrième alinéa du sous-amendement en séance publique, même s’il est conforme à l’esprit du DSA et des mécanismes en cours d’élaboration à l’échelle européenne.

La commission adopte le sous-amendement.

 

Sous-amendement CE180 de M. Laurent Esquenet-Goxes.

M. Laurent Esquenet-Goxes (Dem). Ce sous-amendement ouvre la possibilité de majorer le montant de l’amende en cas de non-respect des obligations de mention du caractère promotionnel d’un message à 50 % du coût de ladite promotion. Cette possibilité s’appliquera également aux informations spécifiques relatives aux publicités pour les formations professionnelles.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. Pour les mêmes raisons qu’évoquées tout à l’heure, l’avis est défavorable.

La commission rejette le sous-amendement.

 

M. le président Guillaume Kasbarian. Je rappelle que la commission a adopté les sous-amendements CE193 et CE188.

La commission adopte l’amendement CE50 sous-amendé.

 

Amendement CE106 de Mme Violette Spillebout.

Mme Violette Spillebout (RE). En travaillant sur la structuration de la filière des influenceurs, nous avons constaté qu’il existait plusieurs types de certificat ou d’agrément. Le plus connu dans le domaine du marketing est le « certificat d’influenceur responsable » ; pour l’obtenir, l’influenceur doit se soumettre à un test. Il présente deux inconvénients : il est payant et son audience est très faible, puisque seuls 150 influenceurs ont passé le test. D’autres agréments sont en cours d’établissement, notamment dans le domaine monétaire et dans celui des jeux en ligne.

Nous proposons de créer un label national « Relations influenceurs responsables », qui regrouperait l’ensemble des secteurs de l’influence. L’octroi de ce label reposerait sur des critères liés à l’éthique, à la responsabilité sociale et environnementale et à la protection de la santé publique. Ce label national organisé par l’État serait un référent pour l’ensemble de la filière : entreprises, marques et agences conseil.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. La création d’un label ne me semble pas devoir passer exclusivement par la loi. Par ailleurs, le Gouvernement devrait annoncer, entre autres, l’édiction d’une charte de l’influence responsable. Le label que vous proposez pourrait s’inscrire dans ce cadre. Nous aurons donc l’occasion d’y revenir en séance. Néanmoins, il va de soi que l’influence doit être responsable et éthique. Sagesse.

M. Dominique Potier (SOC). Je suis pour le moins étonné par l’appétence pour les labels publics dont témoigne cet amendement, alors même que le monde du commerce équitable et celui de l’économie sociale et solidaire s’inquiètent des progrès du libéralisme autorisés par Bercy, consistant à mettre au même niveau toutes les allégations des opérateurs, quelles qu’elles soient. La reconnaissance des labels est une vraie question – pour ma part, je suis partisan de leur certification publique.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE51 de M. Arthur Delaporte.

M. Arthur Delaporte, rapporteur. À la suite de la modification de l’article 1er, cet amendement vise à réintroduire les dispositions relatives à l’encadrement du dropshipping. Cette pratique a fait l’objet de plusieurs reportages et a été dénoncée par certains influenceurs. Nous prévoyons de faire peser sur les personnes exerçant une activité d’influence commerciale ou sur leurs agents une obligation de vérification de la disponibilité du produit faisant l’objet de l’opération de commercialisation.

Pour mémoire, le dropshipping consiste à faire la promotion de certains produits via une plateforme, laquelle se contente en fait de passer une commande massive à un fournisseur lorsqu’elle a enregistré un nombre de demandes suffisant. Il s’agit d’une forme de commande groupée qui n’est pas déclarée comme telle par l’influenceur. C’est une tromperie. Souvent, les consommateurs ne reçoivent pas le produit commandé. Celui-ci peut aussi se révéler défectueux ou non conforme aux normes européennes. Il importe donc de responsabiliser les influenceurs : lorsqu’ils se livrent à cette pratique, ils doivent indiquer la disponibilité du produit, vérifier l’existence d’un certificat de conformité aux normes européennes et s’assurer qu’il ne s’agit pas d’une contrefaçon.

La commission adopte l’amendement.

 

 

Avant l’article 2

 

La commission adopte l’amendement rédactionnel CE52 de M. Arthur Delaporte, rapporteur.

Article 2 : Définition en droit de l’activité d’agent d’influenceur et de la nature des contrats afférents à cette activité

 

Amendement CE53 de M. Arthur Delaporte.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. L’amendement vise à actualiser la définition de l’agent d’influenceur donnée dans l’article. Il s’agit de fixer en droit la définition de cette activité. Nous proposons d’indiquer également que les agents d’influenceur mettent en œuvre toutes les mesures nécessaires pour garantir la défense des intérêts des personnes exerçant l’activité d’influence commerciale.

La commission adopte l’amendement et l’article 2 est ainsi rédigé.

En conséquence, les autres amendements tombent.

 

Après l’article 2

 

Amendement CE54 de M. Arthur Delaporte et sous-amendements CE140 de Mme Christine Engrand, CE169 de M. Christophe Blanchet, CE158 de Mme Virginie DubyMuller, CE170 de M. Christophe Blanchet, CE177 de M. Laurent Esquenet-Goxes, CE199 de Mme Violette Spillebout et CE131 de Mme Virginie Duby-Muller.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. L’amendement vise à garantir le caractère écrit du contrat liant les influenceurs commerciaux, leurs agents et les annonceurs. Il s’agit également d’assurer un équilibre entre les parties, notamment en précisant les modalités de rémunération envisagées et le fait que le contrat est soumis au droit français. Ces dispositions représentent des avancées indispensables : les pratiques sont très variées et certaines sont préjudiciables aux influenceurs.

Mme Louise Morel (Dem). Le sous-amendement CE169 vise à renforcer les obligations contractuelles, notamment en ce qui concerne la propriété intellectuelle. Certains influenceurs mandatent des agents pour les représenter et les assister dans leurs activités de marketing d’influence. Or aucune règle n’organise leurs relations contractuelles, contrairement à ce qui se passe pour les mannequins, les artistes-interprètes ou encore les sportifs. Ces relations peuvent se nouer de manière informelle, par un accord oral, parfois dans une certaine opacité.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Je suis défavorable à l’ensemble de ces sous‑amendements, à l’exception du CE169.

Successivement, la commission rejette le sous-amendement CE140, adopte le sousamendement CE169, faisant tomber le sous-amendement CE158, rejette les sousamendements CE170 et CE177, adopte le sous-amendement CE199 et rejette le sousamendement CE131.

Elle adopte l’amendement sous-amendé.

Amendement CE56 de M. Stéphane Vojetta et sous-amendements CE178 de M. Laurent Esquenet-Goxes, CE141 et CE142 de Mme Christine Engrand, CE159 de Mme Virginie Duby-Muller, CE171 de M. Christophe Blanchet et CE143 de Mme Christine Engrand.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. L’amendement vise à réécrire la section III de l’article 2, consacrée à la représentation légale. Il s’agit notamment de rattacher au droit français les influenceurs qui exercent en dehors du territoire de l’Union européenne, en particulier au regard de leur responsabilité civile.

Mme Louise Morel (Dem). Le sous-amendement CE178 a pour objet de préciser qu’un créateur de contenus qui n’est pas établi dans l’Union européenne ne peut conclure de contrats de promotion de biens, de services ou d’une cause quelconque tant qu’il n’a pas de représentant légal en Europe.

Mme Christine Engrand (RN). L’amendement ne mentionne ni le destinataire de la désignation ni la marche à suivre en cas de modification du représentant légal. Le sous‑amendement CE141 vise à combler ces lacunes.

Mme Virginie Duby-Muller (LR). La responsabilité des représentants légaux des influenceurs doit être engagée au même titre que celle des personnes qu’ils représentent. Tel est l’objet du sous-amendement CE159.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Je suis défavorable à l’ensemble des sous‑amendements. Nous continuons de travailler avec l’administration sur la représentation légale, car la question est complexe ; nous proposerons une nouvelle formulation d’ici à la séance.

La commission rejette successivement les sous-amendements et adopte l’amendement.

 

Amendement CE86 de Mme Christine Engrand.

Mme Christine Engrand (RN). Du fait de ces dispositions, n’importe quel influenceur spécialisé serait en mesure de refuser que son agence contracte avec la multitude d’influenceurs ayant la même spécialité, sous le prétexte qu’il s’agirait de concurrents. Or, sur le marché de l’influence, la concurrence est très relative. Par cet amendement, nous proposons de désamorcer toute interprétation extensive de cette notion, afin de ne pas entraver la liberté de contracter des agences.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. La précision n’est pas nécessaire. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

 

Avant l’article 3

 

La commission adopte l’amendement rédactionnel CE55 de M. Stéphane Vojetta, rapporteur.

 

 

Article 3 : Responsabilisation des opérateurs de plateforme en ligne contre la diffusion de contenus illicites

 

Amendement CE57 de M. Stéphane Vojetta et sous-amendements CE144 et CE145 de Mme Christine Engrand, CE185 de Mme Nadège Abomangoli, CE149 de Mme Christine Engrand, CE183, CE184 et CE186 de Mme Nadège Abomangoli.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. La nouvelle rédaction que nous vous proposons vise à assurer la conformité de l’article avec les dispositions du DSA que nous voulons incorporer. Le texte constitue un signal politique important et un outil de responsabilisation des plateformes, mais nous tenons absolument à garantir sa solidité juridique. Nous nous attacherons donc à ne pas dévier de la rédaction du DSA ; je serai défavorable à l’ensemble des sous-amendements, qui auraient pour effet de nous en éloigner.

Mme Christine Engrand (RN). Le sous-amendement CE145 a pour objet d’étendre les exigences en matière de signalement aux fournisseurs de services intermédiaires, dont font partie les réseaux sociaux, où est commis l’essentiel des fraudes des influenceurs.

Par ailleurs, le contrôle privé organisé par les fournisseurs de services intermédiaires et les services d’hébergement ne saurait se substituer à celui de la puissance publique. Dès lors qu’une publication illégale a été mise en ligne, ses effets sont irréversibles pour les personnes qui y ont été exposées, même si elle est supprimée instantanément. Son auteur doit donc être sanctionné par l’État. Nous proposons donc que les publications sanctionnées par les services en ligne soient systématiquement transférées à la plateforme d’harmonisation, d’analyse, de recoupement et d’orientation des signalements (Pharos).

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES). À travers le sous-amendement CE185, nous souhaitons faire la lumière sur le harcèlement dont seraient victimes les personnels des opérateurs de plateformes. Ce faisant, nous ne nous éloignons pas vraiment du DSA ; il s’agit au contraire de l’améliorer dans le sens du bien-être de ces travailleurs.

Le sous-amendement CE183 vise à permettre une application optimale de la loi : laisser aux créateurs de contenus la responsabilité de la maquette et de la position des bandeaux et mentions obligatoires nuit à l’uniformité des messages de prévention, donc à leur efficacité. De plus, cela crée une inégalité de traitement entre les créateurs amateurs et ceux dont c’est l’activité principale. D’ailleurs, les plateformes ont largement les moyens de mettre directement de tels outils à la disposition de leurs utilisateurs.

Le sous-amendement CE184 a pour objet d’interdire l’achat de certification : ce mécanisme est trompeur pour les consommateurs, car il peut donner indûment une image de respectabilité à certains services.

Le sous-amendement CE186 vise à instaurer une logique de name and shame pour que les influenceurs qui viendraient à enfreindre le code de la consommation soient bien identifiés. L’apposition d’une bannière sur les comptes Instagram ou TikTok, entre autres, d’influenceurs ayant fait l’objet de condamnations pour pratiques commerciales illégales répond à cet enjeu et permet d’avertir les utilisateurs. Il s’agit, en quelque sorte, d’un parallélisme des formes avec ce qui existe pour la presse à scandale.

La commission rejette successivement les sous-amendements.

Elle adopte l’amendement et l’article 3 est ainsi rédigé.

En conséquence, les autres amendements tombent.

 

 

Après l’article 3

 

Amendement CE58 de M. Stéphane Vojetta et sous-amendements CE147 de Mme Christine Engrand, CE194, CE189 et CE195 de Mme Ségolène Amiot et CE148 de Mme Christine Engrand.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. L’amendement vise, une fois encore, à appliquer le DSA, tout en restant fidèle à l’objectif du texte. Cette préoccupation explique également mon avis défavorable sur les sous-amendements, même si certains partent d’une bonne intention.

La commission rejette successivement les sous-amendements et adopte l’amendement.

 

Amendement CE112 de Mme Louise Morel.

Mme Louise Morel (Dem). Il s’agit de faire en sorte que les opérateurs de plateforme en ligne qui mettent en œuvre un mécanisme de certification du profil de l’utilisateur à titre onéreux le distinguent clairement du mécanisme de certification à titre gratuit. Sur Twitter, la « coche bleue » permettait de distinguer les comptes d’intérêt public, notoires et authentiques ; désormais, il est possible de l’acheter pour 7 ou 8 euros par mois. La disposition que nous vous proposons a pour objet de garantir une bonne information des utilisateurs des réseaux.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Une fois encore, dans cette partie du texte, tout écart par rapport au DSA nous fait courir un risque juridique. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Article 4 : Coopération des opérateurs de plateforme en ligne avec l’administration contre la diffusion de contenus illicites

 

Amendement CE125 de M. Stéphane Vojetta et sous-amendement CE164 de Mme Virginie Duby-Muller.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Cet amendement vise à actualiser la rédaction de l’article 4 pour assurer sa conformité au DSA. L’article a pour objet, notamment, de garantir le retrait effectif de contenus par les opérateurs de plateforme dans les meilleurs délais, à la suite d’une demande motivée de l’autorité administrative. Cet article sera très dissuasif pour les influenceurs qui seraient tentés de poster des contenus illicites.

Mme Virginie Duby-Muller (LR). Le sous-amendement porte sur la procédure de notification : nous demandons d’ajouter des signaleurs de confiance.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Je suis favorable au sous-amendement.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement ainsi sous-amendé.

En conséquence, l’amendement CE110 de Mme Louise Morel, les amendements identiques CE23 de M. Christophe Blanchet et CE75 de Mme Virginie Duby-Muller, et l’amendement CE24 de M. Christophe Blanchet tombent.

 

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement CE92 de Mme Christine Engrand.

 

L’amendement CE59 de M. Stéphane Vojetta, rapporteur, est retiré.

 

La commission adopte l’article 4 modifié.

 

 

Avant l’article 5

 

La commission adopte l’amendement de précision rédactionnelle CE61 de M. Stéphane Vojetta, rapporteur.

 

 

Article 5 : Renforcer l’éducation des jeunes publics face aux risques d’escroqueries en ligne

 

Amendement CE60 de M. Stéphane Vojetta et sous-amendement CE165 de Mme Virginie Duby-Muller.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Amendement de précision réactionnelle.

Je suis défavorable au sous-amendement : il n’est pas adapté au public visé, à savoir des élèves de CM2.

La commission rejette le sous-amendement et adopte l’amendement.

 

Contre l’avis du rapporteur, la commission adopte l’amendement CE105 de Mme Violette Spillebout.

 

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement CE77 de Mme Virginie Duby-Muller.

 

Amendement CE93 de Mme Christine Engrand.

Mme Christine Engrand (RN). Nous demandons que l’État s’engage dans la sensibilisation du grand public par l’intermédiaire de campagnes axées sur les escroqueries organisées par des influenceurs peu scrupuleux et sur les autres dangers que présentent les réseaux sociaux.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Il s’agit d’une injonction au Gouvernement. Par ailleurs, la rédaction est beaucoup trop large pour être opérationnelle. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette les amendements en discussion commune CE94 et CE95 de Mme Christine Engrand.

 

La commission adopte l’article 5 modifié.

 

 

Après l’article 5

 

Amendement CE38 de Mme Ségolène Amiot.

Mme Ségolène Amiot (LFI-NUPES). Il s’agit de s’assurer que le Gouvernement applique au mieux le DSA.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Le DSA sera transposé à travers le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne que nous examinerons dans le courant du printemps. La disposition que vous proposez, qui fait référence à la date de promulgation du présent texte, n’a donc aucun rapport avec ce véhicule. Vous aurez l’occasion de redemander ce rapport à l’occasion de l’examen du projet de loi Ddadue. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements CE39 et CE40 de Mme Nadège Abomangoli.

Mme Nadège Abomangoli (LFI-NUPES). À travers l’amendement CE39, nous demandons la remise d’un rapport relatif à la lutte contre les addictions et à l’accompagnement des victimes. Les auditions ont montré que l’addiction était un enjeu crucial : c’est la dépendance qui pousse certaines personnes à faire des achats dangereux.

La DGCCRF joue un rôle majeur dans le contrôle et la sanction des pratiques illicites. Les moyens dont elle dispose sont le cœur de la question. Tel est l’objet de l’amendement CE40.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Je suis défavorable à l’amendement CE39 : nous disposons déjà des éléments demandés grâce au travail des autorités publiques compétentes ainsi que des autorités sectorielles spécifiques.

Je suis favorable, en revanche, à l’amendement CE40.

La commission rejette l’amendement CE39 et adopte l’amendement CE40.

 

Amendement CE43 de Mme Ségolène Amiot.

Mme Ségolène Amiot (LFI-NUPES). Il s’agit d’une demande de rapport visant à aider la DGCCRF dans son travail.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

 

Titre

 

Amendement CE42 de Mme Ségolène Amiot.

Mme Ségolène Amiot (LFI-NUPES). L’influence des créateurs de contenus ne se limite pas aux réseaux sociaux. Nous proposons donc d’élargir la rédaction du titre, de manière à ce qu’il soit un peu plus congruent au contenu du texte.

M. Stéphane Vojetta, rapporteur. Nous avons, nous aussi, l’intention de rendre le titre du texte plus adéquat, mais nous y reviendrons en séance. À ce stade, avis défavorable.

Mme Ségolène Amiot (LFI-NUPES). En somme, vous me donnez raison…

M. Arthur Delaporte, rapporteur. La modification sera plus large que celle que vous proposez.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

 


Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du mercredi 22 mars 2023 à 9 h 35

Présents.  M. Xavier Albertini, M. Laurent Alexandre, M. Antoine Armand, Mme Anne-Laure Babault, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Thierry Benoit, M. Philippe Bolo, M. Éric Bothorel, M. Bertrand Bouyx, Mme Maud Bregeon, M. André Chassaigne, M. Dino Cinieri, M. Romain Daubié, M. Arthur Delaporte, M. Frédéric Descrozaille, M. Julien Dive, Mme Virginie Duby-Muller, M. Inaki Echaniz, Mme Christine Engrand, M. Grégoire de Fournas, M. Éric Girardin, Mme Olga Givernet, Mme Florence Goulet, Mme Géraldine Grangier, Mme Mathilde Hignet, M. Alexis Izard, M. Guillaume Kasbarian, Mme Julie Laernoes, M. Maxime Laisney, M. Luc Lamirault, M. Pascal Lavergne, Mme Annaïg Le Meur, Mme Nicole Le Peih, M. Hervé de Lépinau, M. Aurélien Lopez-Liguori, Mme Jacqueline Maquet, M. Bastien Marchive, Mme Sandra Marsaud, M. Éric Martineau, M. William Martinet, M. Nicolas Meizonnet, Mme Yaël Menache, M. Paul Midy, Mme Louise Morel, M. Jérôme Nury, Mme Francesca Pasquini, Mme Anne-Laurence Petel, M. René Pilato, M. Dominique Potier, M. Richard Ramos, M. Vincent Rolland, Mme Danielle Simonnet, Mme Violette Spillebout, M. Stéphane Travert, M. André Villiers, M. Stéphane Vojetta

Excusés.  Mme Anne-Laure Blin, Mme Sophia Chikirou, M. Perceval Gaillard, Mme Hélène Laporte, M. Max Mathiasin, Mme Anaïs Sabatini, M. Matthias Tavel, M. Lionel Tivoli, Mme Aurélie Trouvé, M. Jiovanny William

Assistaient également à la réunion.  Mme Nadège Abomangoli, Mme Ségolène Amiot, M. Christophe Blanchet, M. Jean-Luc Bourgeaux, Mme Mireille Clapot, Mme Laurence Cristol, Mme Béatrice Descamps, M. Laurent Esquenet-Goxes, Mme Charlotte Goetschy‑Bolognese, M. Denis Masséglia, M. Benjamin Saint-Huile