Compte rendu

Commission de la défense nationale
et des forces armées

–– Suite de l’examen, ouvert à la presse, du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense (n° 1033) (M. Jean-Michel Jacques, rapporteur).

 


Jeudi
11 mai 2023

Séance de 21 heures

Compte rendu n° 82

session ordinaire de 2022-2023

Présidence
de M. Thomas Gassilloud,
président

 


  1  

La séance est ouverte à vingt et une heure.

 

Article 2 : Approbation du rapport annexé (suite)

 

M. le président Thomas Gassilloud. Nous reprenons l’examen du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

Si l’on excepte les 38 amendements votés en commission des lois, dont l’adoption sera une formalité, 250 amendements environ restent à examiner. J’espère que nous parviendrons ce soir à en étudier une centaine de manière à ce que nous puissions achever l’examen du texte demain… avant minuit.

 

Amendement DN514 de M. Aurélien Saintoul.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Nous demandons au Gouvernement la remise d’un rapport sur les ambitions industrielles et opérationnelles françaises dans les fonds marins.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur de la commission de la défense nationale et des forces armées. Il est satisfait par le rapport d'information Saintoul-Métayer et la stratégie ministérielle de maîtrise des fonds marins.

M. Sébastien Lecornu, ministre des armées. Des rapports de grande qualité ont effet été publiés. Proposition de retrait.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Nous travaillerons à un amendement pour la séance publique afin d’intégrer au rapport annexé la référence au rapport parlementaire Saintoul-Métayer. Je suis certain que nous recueillerons un avis favorable.

L’amendement est retiré.

 

Amendement DN518 M. Bastien Lachaud.

M. Emmanuel Fernandes (LFI-NUPES). Le groupe LFI-NUPES demande un rapport du Gouvernement sur les évolutions et les leçons tirées depuis plus de vingt ans de lutte contre le terrorisme.

En deux décennies, la menace terroriste s’est transformée et les modes opératoires ont changé. Depuis 2002, l’arsenal législatif antiterroriste est complété chaque année par un nouveau texte, or, nous constatons de plus en plus fréquemment un détournement de ces lois contre des militants, notamment écologistes, des manifestants ou des citoyens qui se mobilisent dans le cadre des mouvements sociaux.

Si la menace djihadiste demeure importante, les services de renseignement indiquent que la menace terroriste la plus sérieuse provient de l’extrême droite. Au total, ils estiment à 3 000 le nombre de militants qui entrent dans ce spectre, dont plus de 1 300 sont fichés S. En témoignent les projets d’attentats d’un gendarme néonazi visant des mosquées, des dîners du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) et les meetings de Jean-Luc Mélenchon, tout comme l’incendie du domicile du maire de Saint-Brevin, lequel a démissionné car il craint pour sa vie et déplore le manque de soutien de l’État.

Ce rapport devra également se pencher sur le bilan de l’opération Sentinelle. Selon un rapport de la Cour des comptes du 12 septembre 2022 actant ce changement de typologie de la menace terroriste depuis les attentats de 2015, les forces militaires, qui ne disposent ni du renseignement intérieur, ni du pouvoir de police, ni des armements appropriés en zone urbaine, ne paraissent pas les mieux placées pour y faire face.

La Cour des comptes dénonce l’affichage de militaires dans les rues à des fins de tranquillité publique et de perception plus que d’efficacité militaire. S’appuyant sur un rapport de l’inspection des armées, la Cour note une banalisation du rôle des militaires et un amalgame avec les policiers et les gendarmes.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Nous disposons déjà de nombreux documents en la matière, le terrorisme est en effet polymorphe. Je suis moi-même très choqué par les exactions commises contre nos gendarmes de la part de certains groupes qui profitent des troubles sociaux pour s’infiltrer. Néanmoins, une mission d’information sur le sujet – peut-être de la commission des lois – me semblerait plus opportune. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Il convient de distinguer l’amendement et sa défense. Hors l’opération Sentinelle, vous avez évoqué nombre de questions qui ne concernent pas directement le ministère des armées mais la sécurité intérieure. Vous avez déploré que les forces armées se chargent de missions qui en relèvent mais c’est sur elles que vous avez concentré votre propos.

Des rapports ont été publiés sur les opérations extérieures (Opex) et il ne me paraît pas utile d’en demander un autre. Il appartient me semble-t-il au Parlement de porter un regard rétrospectif et prospectif sur ces questions, le pouvoir exécutif étant à sa disposition pour les auditions qu’il envisagerait.

L’amendement est retiré.

 

Amendement DN501 de M. Aurélien Saintoul.

Mme Martine Etienne (LFI-NUPES). Nous souhaitons mettre l’accent sur les évolutions de la menace cyber et sur la faible capacité de résilience et d’adaptation de l’État français dans son traitement. En effet, les nouveaux modes de conflictualité, particulièrement ceux liés à l’émergence du cyber, souffrent d’un sous-investissement chronique et d’un manque de planification de moyen et long termes.

Nous pensons notamment au développement d’armements spatiaux permettant d’infliger des dommages impossibles à attribuer à une puissance ennemie et face auxquels la France pourrait être mise devant le fait accompli sans être en mesure d’y riposter.

Les évolutions des technologies font craindre l’émergence de vulnérabilités dans le domaine informatique et des communications. Une loi de programmation militaire (LPM) doit en tenir compte en prévoyant une adaptation de la politique de formation et de sensibilisation du plus grand nombre, un recrutement massif dans les domaines du cyber, un renforcement du capital technique et opérationnel et un élargissement des espaces de stockage des données sensibles.

Les évolutions de la menace doivent forcer la nation à développer une culture cyber en direction de la population, des autorités publiques, des acteurs économiques et territoriaux afin d’augmenter la résilience globale de la société.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Frédéric Mathieu, membre de votre groupe, et Anne Le Hénanff ont été nommés co-rapporteurs d’une mission d’information à ce sujet, dont le Parlement a eu raison de se saisir. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je suis favorable à la remise d’un rapport mais à condition qu’il porte uniquement sur la contribution du ministère des armées – direction générale de l’armement (DGA), direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) – à l’effort cyber. La référence à « l’État français », outre qu’elle est malheureuse, pourrait en effet intégrer l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) et d’autres structures. Il me paraît également important d’envisager un délai non d’un an mais de deux, voire, un rapport tous les deux ans jusqu’à 2030.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Pourrions-nous nous mettre d’accord pour adopter l’amendement et le modifier en séance publique dans le sens que vous indiquez et que nous approuvons ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je m’en remets à la sagesse de la commission.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Je vous propose de remplacer « Dans un délai d’un an » par « Dans un délai de deux ans » et « de l’État français » par « du ministère des armées ».

M. Mounir Belhamiti (RE). La menace cyber est globale et ne concerne pas uniquement les armées, même si elles concourent à l’effort de cyberdéfense, comme en atteste d’ailleurs cette LPM.

Nous nous dirigeons vers la création d’un observatoire interministériel de la menace cyber. L’Anssi, le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), d’autres acteurs travaillent dans ce sens, y compris les assureurs et nombre d’acteurs économiques.

Je vous invite à retravailler la rédaction de cet amendement pour qu’il vise les seules affaires militaires, afin de parvenir à un accord.

La commission adopte l’amendement DN501 rectifié.

 

Amendements DN510 de M. Aurélien Saintoul et DN511 de M. Bastien Lachaud (discussion commune).

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Je m’étonne que ces amendements, déposés par le même groupe, soient en discussion commune.

M. le président Thomas Gassilloud. Les deux portent sur une demande de rapports à propos de la technologie quantique. En procédant autrement, nous introduirions une jurisprudence préjudiciable dans le travail réalisé par les fonctionnaires de l’Assemblée nationale. Je vous invite à examiner avant la séance le mode de discussion de vos amendements et, le cas échéant, à demander une modification.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Le premier amendement demande la remise d’un rapport sur la doctrine « Cloud au Centre », son application et son éventuelle extension pour les données issues du calcul intensif et de la technologie quantique au sein du ministère des armées. Nulle part il n’est dit explicitement que les données produites par ces nouveaux outils soient traitées comme les autres.

Le second demande un rapport sur les utilisations possibles de la technologie quantique dans les armées françaises.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. La création d’une mission d’information par la commission de la défense me semble préférable. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Nous avons prévu d’affiner la rédaction du rapport annexé sur les objectifs que nous nous fixons. Sans doute le Parlement serait-il mieux à même d’envisager la prospective et, peut-être, le benchmarking car il dispose sans doute en la matière d’une plus grande liberté que le pouvoir exécutif et les administrations.

M. le président Thomas Gassilloud. Le Parlement, de surcroît, dispose de cet outil maison qu’est l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), que nous avons missionné pour réaliser une étude sur les retombées de la LPM dans l’innovation civile. Son rapport devrait nous être présenté mercredi prochain.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). J’entends ces réponses à propos du second amendement mais je souhaiterais connaître le point de vue du ministère sur l’application de la doctrine « Cloud au Centre ».

M. Sébastien Lecornu, ministre. Vous pourriez auditionner le directeur général de l’armement et le nouveau directeur de l’Agence de l’innovation de défense (AID).

L’amendement DN511 est retiré.

La commission rejette l’amendement DN510.

 

Amendement DN504 de M. Aurélien Saintoul.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Nous demandons un rapport sur le surcoût financier que représenterait le fait de basculer les systèmes des armées sur un standard de cryptographie post-quantique ainsi que sur le délai nécessaire à un tel basculement. La plupart de ces standards, en effet, ne sont pas robustes face aux menaces plus traditionnelles. L’enjeu financier est donc réel.

J’ajoute que ce type de vulnérabilité pourrait s’étendre à d’autres domaines. Le ministère des armées doit être aux avant-postes pour pouvoir, ensuite, piloter la transformation numérique globale.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Ce serait là encore un bon thème pour une mission d’information. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. La question est immense.

La nouvelle direction générale du numérique et des systèmes d’information et de communication (DGNUM) a hérité de cette mission dans sa feuille de route.

Je ne doute pas que la revoyure prévue en 2027 portera largement sur la question du numérique et des nouvelles technologies. Cette LPM ne pourra qu’être actualisée.

Je suis plutôt réservé sur la remise d’un rapport dans un délai d’un an.

M. le président Thomas Gassilloud. Notre ancien collègue Cédric Villani a remis il y a à peine un an un rapport sur la stratégie quantique française, qui est toujours en ligne sur le site de l’Assemblée nationale et qui me semble encore très pertinent, même si, en la matière, les choses évoluent très rapidement.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Je crains que cette question, très technique, ne puisse relever d’une mission d’information de notre commission. Outre que nous avons besoin des services de la DGA et de la DGNUM, certaines informations relèvent du secret défense.

Nous demandons depuis plusieurs années des investissements massifs dans ce que nous appelons les nouvelles frontières de l’humanité, dont vous êtes manifestement conscients des enjeux.

Je retire l’amendement afin que nous puissions travailler ensemble, Parlement et exécutif, sur les évolutions structurantes en cours.

M. Jean-Louis Thiériot (LR). Cette question est en effet cruciale et je ne peux que me féliciter que l’on y travaille.

Néanmoins, nombre de demandes de rapports aboutiront à la création de missions par notre commission, à propos desquelles seul son bureau est à même de statuer, je le rappelle à nos collègues de La France insoumise. Je ne voudrais pas que nous soyons confrontés à un embouteillage pendant deux ans !

Nous avons besoin d’un État plus agile. Nous nous plaignons d’un État « Cerfa » qui produit toujours plus de papier et je ne voudrais pas que l’on mobilise trop les fonctionnaires du ministère des armées pour faire des rapports que liront mes collègues Lachaud et Saintoul, comme moi et quelques autres, mais qui serviront à caler les armoires. Prenons garde aux innombrables rapports !

M. Sébastien Lecornu, ministre. En séance publique, nous aurons l’occasion de préciser qu’un certain nombre de critères devront impérativement être pris en compte lors de la revoyure de 2027, en particulier les conséquences budgétaires du basculement que vous avez évoqué. C’est aussi le sens d’un rapport annexé concernant le format des armées.

L’amendement est retiré.

 

Amendement DN512 de M. Bastien Lachaud.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Nous demandons la nationalisation d’Alcatel Submarine Networks (ASN). Cette proposition est issue de la mission que j’ai co-rapporté avec ma collègue Métayer mais je suis le seul à y avoir souscrit.

Il est de notoriété publique qu’ASN est à vendre, que Nokia cherche un repreneur. Nous pouvons donc consolider la position française dans ce domaine. Avec la flotte câblière d’Orange, la France pourrait être l’un des rares État à être souverain sur l’ensemble de la chaîne et susceptible de discuter de manière crédible avec les Gafam. Nous serions coupables de ne pas saisir une telle opportunité, que nous formulons à partir de cet amendement d’appel.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Je laisse le ministre répondre à votre appel.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Si vous le souhaitez, nous pourrons revenir en commission sur quelques stratégies industrielles dans un certain nombre de secteurs, mais ce ne sera pas le cas dans le cadre du rapport annexé.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Je comprends, j’essaie de lire entre les lignes, mais je maintiens cet amendement pour que les collègues qui le souhaitent puissent manifester leur intérêt pour cette question.

M. Jean-Louis Thiériot (LR). L’entreprise Prysmian, dans ma circonscription, à Montereau, produit aussi des câbles sous-marins de grande qualité.

M. le président Thomas Gassilloud. Et des câbles de fibre optique pour les terriens !

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’article 2 modifié.

 

 

Article 3 : Moyens de la politique de défense

 

Amendement DN827 rectifié de M. Jean-Michel Jacques.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Cet amendement précise que la loi de programmation militaire vise à couvrir des besoins financiers, correspondant aux besoins physiques de nos armées.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Ce sera effectivement plus clair ainsi. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement DN199 de Mme Anna Pic.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Nous souhaitons extraire de ce budget les effets de l’inflation sur la programmation militaire et nous assurer, à la suite des travaux du Haut Conseil des finances publiques, que les montants programmés seront effectivement perçus. Nous proposons donc que les crédits ne soient pas exprimés en euros courants, mais constants.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. L’inflation prévisionnelle est prise en compte dans la programmation à hauteur de 30 milliards d’euros. Par ailleurs, des crédits supplémentaires peuvent abonder le budget de la mission Défense en cas de surcoûts liés à l’inflation – on l’a vu dans la pratique récente.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Les euros courants embarquent l’inflation, et on raisonne toujours ainsi en matière budgétaire. Quand on est passé aux euros constants, durant deux quinquennats, pour la définition des trajectoires des LPM, on a vu l’effondrement budgétaire qui a suivi pour nos armées. Je suis défavorable à cet amendement : ce serait une erreur. Il n’y a d’ailleurs plus grand monde qui formule une telle demande.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements DN31 de Mme Valérie Rabault, DN306 de M. Bastien Lachaud, DN422 de Mme Michèle Tabarot, DN304 de M. Bastien Lachaud, DN560, DN561 et DN563 de M. Jean-Louis Thiériot, DN305 de M. Aurélien Saintoul, DN36 de M. Julien Rancoule et DN568 de M. Jean-Louis Thiériot (discussion commune).

Mme Mélanie Thomin (SOC). L’amendement DN31 propose une trajectoire budgétaire alternative, sur laquelle notre collègue Valérie Rabault a plus particulièrement travaillé.

En valeur, l’effort budgétaire prévu par le Gouvernement est conséquent, voire historique, mais il doit être apprécié à l’aune des nouvelles réalités géopolitiques et de la forte inflation que nous connaissons. L’évolution du budget de la défense que demande le Gouvernement est inférieure aux prévisions d’inflation établies par l’Insee, et on constate une baisse des moyens malgré l’effort consenti dans le cadre de ce budget.

Vous avez fait adopter mardi un amendement, Monsieur le ministre, qui fixe l’objectif de porter notre effort en matière de défense à 2 % du PIB entre 2025 et 2027. À cette date, sur la base des prévisions pour le PIB transmises à la Commission européenne, cela impliquerait un budget de 64,94 milliards d’euros, alors que vous prévoyez 56 milliards dans ce texte. Il manque donc 9 milliards dans vos projections. Comment le Gouvernement entend-il respecter son propre amendement ?

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Nous proposons, par l’amendement DN306, de prendre en compte une inflation de 5,4 % dans le budget des armées dès 2023 et jusqu’en 2026. Les ressources propres du ministère pourront naturellement servir en complément, comme dans le cadre des précédentes LPM.

M. Jean-Louis Thiériot (LR). Nous sommes un peu contrariés que les marches les plus importantes soient prévues lorsque M. Macron devra de toute façon quitter, pour des raisons constitutionnelles, la présidence de la République. Il aurait été plus cohérent, ne serait-ce qu’à l’égard de nos compétiteurs stratégiques, à un moment où les enjeux géopolitiques sont absolument considérables, de lisser davantage l’effort dans le temps. Nos différents amendements proposent des marches plus importantes, allant de 3,1 à 3,5 milliards d’euros par an jusqu’en 2027. Ce serait un symbole fort.

Nous avons fait attention à ne pas demander des explosions capacitaires qui sortiraient de l’enveloppe de 413 milliards d’euros. Nous proposons des marches raisonnables qui permettront de traiter la question du taux d’entraînement des forces sans déséquilibrer l’ensemble du système. Nous devons nous assurer que nos forces ont dès maintenant les moyens dont elles ont besoin.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). L’amendement DN304 prévoit un montant de 4,3 milliards pour commencer, au lieu de 3,1 milliards. C’est presque du pur bon sens, car vous annoncez dès cette année une hausse de 1,5 milliard : on est déjà dans le même ordre de grandeur.

Une telle évolution serait utile, l’inflation étant là. On peut espérer qu’on parviendra à la juguler dans les années qui viennent, et donc se contenter de marches plus modestes, mais il faut traduire rapidement les ambitions de la LPM en inversant l’ordre des marches, si je puis dire. Nous ne croyons évidemment pas à ce que pourrait faire M. Macron après son mandat.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Nous sommes quasiment tous certains, au vu des projections, y compris celles du Gouvernement, que l’inflation perdurera au moins jusqu’en 2024. L’amendement DN305 vise donc à prendre en compte l’inflation jusque-là et à ouvrir la voie à des évolutions pour les années suivantes.

M. Laurent Jacobelli (RN). Nous sommes effectivement étonnés que le gros des marches soit prévu à la fin de la période. Si on veut que les investissements attendus aboutissent dans le cadre de cette LPM, il vaut mieux les réaliser au début. Nous vous remercions, néanmoins, pour votre confiance : les marches les plus importantes sont prévues après 2027 ; nous saurons en prendre grand soin. En attendant, l’amendement DN36 propose un rééquilibrage.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Je pense, Madame Thomin, que votre amendement repose sur une confusion. L’effort national de défense dans le cadre de l’Otan inclut non seulement les crédits budgétaires prévus dans la LPM mais aussi d’autres dépenses, notamment les charges de pensions, qui représentent entre 9 et 10 milliards d’euros par an durant la période considérée. Par conséquent, avis défavorable à votre amendement.

Pour le reste, les marches prévues visent à apporter une réponse cohérente aux besoins physico-financiers des armées. L’évolution envisagée correspond à l’augmentation des besoins en fin de période, notamment en matière de dissuasion. Je rappelle aussi que ces marches sont des planchers et que l’inflation a été prise en compte. Nous nous adapterons aux évolutions économiques : les lois de finances annuelles le permettront.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Madame Thomin, sans vouloir être polémique, je comprends encore moins, après votre amendement, le débat de l’autre soir sur l’amplification : votre amendement tend à ce que le budget annuel des armées soit de 64,95 milliards d’euros la dernière année, contre 68,91 milliards dans les autres amendements et la copie du Gouvernement. Il manquerait donc 4 milliards d’euros : c’est un amendement diminuant le budget annuel des armées. Non seulement tous les amendements par lesquels vous souhaitiez plus de bateaux, plus d’activité ou plus de moyens pour le plan « famille » tombent à l’eau, mais il faudrait aussi enlever beaucoup de choses que nous avons prévues.

Cet amendement, que je vous invite à retirer, me conduit à réexpliquer ce que sont les marches. Vous nous avez reproché lors de la discussion générale, avec d’autres, de prévoir les mêmes marches, de 3 milliards, chaque année. Lorsqu’on monte un escalier, les marches sont cumulatives. J’ai été un élu municipal et départemental, et j’ai joué, moi aussi, avec les chiffres quand j’étais dans l’opposition. C’est de bonne guerre, mais je vais quand même redonner les chiffres : nous prévoyons en 2017 32,3 milliards d’euros, en 2018 34,1 milliards, soit + 1,8 milliard, en 2019 35,8 milliards, soit + 3,5 milliards, en 2020 37,5 milliards, soit + 5,2 milliards, en 2021 39,2 milliards, soit déjà + 6,9 milliards d’euros par an depuis 2020, en 2022 40,9 milliards, soit + 8,6 milliards, et en 2023 43,9 milliards, soit cumulativement + 11,6 milliards par rapport à 2017.

J’observe au passage qu’il y avait moins de débats à la commission de la défense quand les moyens militaires diminuaient ! Mes prédécesseurs étaient plus questionnés sur les ressources extrabudgétaires que lorsqu’ils fermaient des régiments. Mais revenons aux chiffres : en 2024, nous prévoyons 47 milliards d’euros, soit + 14,7 milliards, en 2025 +17,7 milliards, en 2026 + 20,7 milliards, en 2027, fin du quinquennat, + 23,7 milliards d’euros d’effort, en 2028 + 28 milliards, en 2029 + 32,3 milliards et en 2030 + 36,6 milliards.

L’amendement du groupe socialiste donne l’impression qu’on pourrait avoir une progression très rapide au début, mais il aboutit à un budget militaire moins important à la fin. Il faut regarder les effets physiques que cela induit, comme le groupe LFI nous invite à le faire à chaque fois. La progression que nous proposons ne vise pas à émettre des signaux politiques ou stratégiques : elle correspond à des effets physiques.

J’en viens aux trois amendements du groupe La France insoumise. Vous nous dites que vous ne croyez pas à nos prévisions d’inflation, qui sont celles de Bercy, et que vous avez donc appliqué vos propres critères. Vous demandez des rapports, parce que vous n’auriez pas suffisamment de moyens, mais vous arrivez à redresser vous-mêmes l’inflation le soir dans vos chambres… Je conteste vos chiffres. Puisque vous avez évoqué le Haut Conseil des finances publiques, je suis curieux de connaître son avis sur vos projections.

Je sais que La France insoumise a parfois des problèmes de connexion quand il est question de dépenses publiques, mais vous arrivez, dans vos différents amendements, à un total de 413, 411 ou 403 milliards, auquel il faudra continuer à ajouter 13 milliards de recettes extrabudgétaires, à moins que vous ne les supprimiez, comme certains amendements le demandent – je ne souhaite pas, pour ma part, qu’on supprime des ressources affectées au ministère de la défense. Même s’il y a toujours des marges frictionnelles et des retards, l’augmentation du budget militaire que vous prévoyez est donc très importante. Vous proposez une copie entièrement nouvelle, qui n’est absolument pas compatible avec les finances publiques, ni réaliste. On ne sait toujours pas à quelle armée, à quelles alliances, ni à quelle dissuasion nucléaire cela correspondrait, mais peu importe, puisque vous proposez des marches…

Je vous ai trouvé bien taquin, Monsieur Jacobelli, quand vous avez évoqué les efforts en début de période et que vous avez dit que vous prendriez soin de la question quand vous seriez aux affaires. Mme Le Pen, qui avait un programme, proposait un budget annuel pour le ministère des armées de 55 milliards d’euros en 2027. Le Président de la République et les députés élus sous les couleurs de la majorité présidentielle proposent 56 milliards, soit 1 milliard de plus. Si vous aviez dû faire des marches à l’époque, elles auraient furieusement ressemblé aux nôtres.

Quand on prévoit des marches aussi importantes au début, comme vous le faites dans l’amendement que vous avez déposé, et qu’on termine par des marches de 900 millions d’euros, cela veut dire qu’on décide d’acheter sur étagère, donc pas forcément en France – on n’accélère pas ainsi la production des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins, des sous-marins nucléaires d’attaque ou plus généralement les grands programmes. Ou alors on fait de l’affichage, en prévoyant des AE – autorisations d’engagement – plutôt que des CP – crédits de paiement.

Vous voulez peut-être acheter en Allemagne ou aux États-Unis ; si vous voulez le faire en France, la courbe que vous proposez n’est pas soutenable. Ce n’est donc qu’un amendement d’appel, à caractère politique : cela ne peut pas correspondre avec ce que vous proposez fondamentalement. Ce n’est compatible ni avec le programme de Mme Le Pen, même en prenant en compte l’inflation, ni avec vos orientations industrielles.

Les amendements des députés Les Républicains vont de 403 à 411 milliards d’euros sur l’ensemble de la période, auxquels il faut ajouter les 13 milliards déjà évoqués. Votre propos est qu’il faut faire plus en début de période, et donc prévoir une répartition différente – c’est ce qu’a demandé le président Marleix hier soir, sur Twitter. Il faudrait, cependant, nous dire pour quels effets sur le plan militaire et « caper » l’ensemble, pour assurer la soutenabilité budgétaire, et on revient aussi à la question de la cohérence d’ensemble. J’émets donc un avis défavorable à ces amendements, comme aux précédents, s’ils ne sont pas retirés.

Je le redis s’agissant des marches : il faut que l’effort soit soutenable sur la durée, sans quoi on sait bien comment cela se terminera, en particulier après 2027 : en cas de retournement de situation, le ministère des armées sera encore le premier à trinquer. C’est sur lui qu’on fera des économies parce qu’on n’aura pas veillé à définir une pente soutenable. Je souhaite donc qu’on trouve un équilibre.

Mme Anne Genetet (RE). Merci, Monsieur le ministre, pour votre précieux éclairage. Je crois que nous sommes tous d’accord pour assurer la soutenabilité de la trajectoire budgétaire de nos armées. Un équilibre est difficile à trouver, nous en convenons tout à fait, et il faut définir des marches. Durant le précédent mandat, les augmentations ont été de l’ordre de 4,5 % par an. Nous avons franchi cette année une marche très importante, avec une augmentation d’à peu près 7 %, et l’effort sera globalement constant dans la trajectoire proposée jusqu’en 2030.

Nous avons vu lorsque nous avons travaillé sur les moyens capacitaires proposés pour nos armées que certains grands projets nécessitent pour la phase des études en amont des crédits qui ne sont pas du tout du même niveau que ceux à mettre sur la table quand on passe à la phase de production et de mise en service des équipements. La trajectoire envisagée est soutenable, réaliste et transparente, elle correspond aux ambitions de nos armées, et elle nous permettra de ne pas être trop gourmands au départ, afin d’atteindre au bout du compte les objectifs fixés.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Vous deviez être un excellent élu d’opposition, Monsieur le ministre, vu la manière dont vous jouez avec les chiffres. En 2018, nous avons voté des marches de 3 milliards pour les années 2023, 2024 et 2025. Or vous nous demandez maintenant de voter pour ces mêmes années des marches de 3 milliards, en disant que vous tenez compte de l’inflation. Si on l’inclut, ces marches sont inférieures à ce qui était prévu en 2018. C’est tellement vrai que vous proposez pour 2023 un budget rectificatif de 1,5 milliard pour tenir compte de l’inflation. Anticipons tout de suite ce qui va se passer en 2024 et 2025 en ajoutant 1,5 milliard.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Notre contre-trajectoire budgétaire n’a qu’une vocation : montrer que la vôtre ne correspond pas à certaines ambitions affichées pour nos militaires et nos forces armées, que nous partageons. Elle nous semble insincère, et vous n’avez pas réussi à nous convaincre du contraire pour l’instant. Nous poursuivrons donc le débat en séance avec le groupe socialiste. Vous vous souvenez que nos collègues ont été pleins de ressources pour mener des investigations lors du débat sur la réforme des retraites. S’agissant de cette trajectoire budgétaire, nous serons également au rendez-vous.

M. Loïc Kervran (HOR). La série d’amendements concernant les aspects capacitaires et celle-ci portant sur les marches montrent la difficulté extrême de l’exercice. Nos décisions engagent en effet à la fois notre capacité à produire, à entretenir, à armer et à équiper les matériels, à leur fournir des équipages et à acheter français. Je tiens à cet égard à saluer l’excellence du travail réalisé par le ministre, par le secrétariat général pour l’administration (SGA) et par les états-majors pour construire une masse cohérente, avec efficacité et sincérité.

Je rappelle qu’on sera passé de 32 milliards de crédits en 2017 à 69 milliards à la fin de la LPM, en 2030. On a le sentiment un peu étrange – mais qui doit correspondre à une réalité physique – qu’il est plus facile de descendre les escaliers que de les monter…

Mme Josy Poueyto (Dem). Je dois dire que j’ai écouté avec délectation la démonstration du ministre… J’invite tout le monde ici – en particulier certains collègues – à la réécouter.

Je tiens à rappeler que les dépenses liées à l’Ukraine sont sorties du budget de la LPM. Et si l’inflation diminue, chers collègues des oppositions, diminuerez-vous aussi les marches ?

M. Jean-Louis Thiériot (LR). Le ministre sait effectivement être brillant et taper juste quand les calculs montrent qu’on va dépenser moins alors qu’on avait annoncé qu’on allait dépenser plus – ce qui est une vieille habitude remontant au temps de François Hollande…

Plus sérieusement, il y a là une dimension symbolique importante. Il est vrai que nous n’avons pas tenu compte dans nos amendements de l’effet cumulé que vous évoquez, Monsieur le ministre ; nous les réécrirons.

Nous sommes plus généralement pris dans un dilemme qui oppose les besoins de nos forces armées et la situation économique. Je n’oublie pas que la dette publique atteint 115 % du PIB et que sa charge est plus importante que le budget des armées, ce qui limite considérablement notre liberté de manœuvre. Il faut trouver le bon équilibre. Nous en rediscuterons en séance.

M. Laurent Jacobelli (RN). Il est traditionnel, de la part de l’opposition, d’utiliser les chiffres pour attaquer la majorité et, de la part de la majorité, de se moquer de l’opposition pour ne pas avoir à répondre. Les deux techniques ont été utilisées ce soir. Merci pour cette leçon de politique.

Le sujet est néanmoins sérieux. Vous avez, Monsieur le ministre, cité l’excellent programme de Marine Le Pen. Il ne vous aura néanmoins pas échappé qu’entre-temps, grâce à vos collègues, la situation économique ne s’est pas améliorée. Et puis, ne le prenez pas mal, mais vous ne partez pas de rien : il y avait une LPM en cours. Comme l’ont souligné certains collègues, la marche sera de 3 milliards alors qu’elle aurait dû être de 4,5 milliards. En outre, des programmes ont déjà été engagés et vont être livrés. Remettre à plus tard, c’est une astuce bien connue que nous avions détectée dès l’annonce du budget de la nouvelle LPM – 400 ou 413 milliards, c’était déjà flou : nous avions anticipé que les principales marches seraient programmées après 2027. Tel est bien le cas.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Je peux vous retourner la question, Madame Poueyto. Dans le projet de loi, il est prévu 30 milliards pour contrebalancer les effets de l’inflation : qu’en ferez-vous si elle n’atteint pas ce niveau ?

Mon collègue Lachaud l’a démontré : vous présentez une nouvelle LPM pour ne pas avoir à respecter celle en cours. Cela se vérifie sur le plan capacitaire mais aussi pour ce qui concerne la hausse : les marches de 3 milliards prévues en 2018 ont été grignotées par l’inflation et elles le seront encore, sans que vous prévoyiez aucune compensation.

Vous nous demandez à quoi correspondent les marches que nous proposons. Je crois que nous avons passé assez de temps sur d’autres amendements pour que vous sachiez qu’il y a bien du physique derrière. On nous a suffisamment reproché d’être dépensiers.

Vous prétendez que nos propositions ne sont pas compatibles avec les finances publiques – curieuse formulation. Si, elles le sont, parce que nous savons aller chercher les ressources correspondantes : nous, nous ne faisons pas 156 milliards de cadeaux fiscaux aux entreprises, en pure perte.

Certes, nous présentons un modèle alternatif au vôtre, mais il est cohérent. Ne mettez pas en doute notre sérieux et notre rigueur intellectuelle, merci.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement DN924 de M. Jean-Michel Jacques.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Cet amendement vise à préciser que les crédits budgétaires prévus à l’alinéa 3 constituent des planchers, et non des plafonds.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Autrement dit, c’est le corollaire de l’exécution à l’euro près – même si nos opposants ont du mal à nous l’accorder. Avis favorable.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). « Cette trajectoire de ressources budgétaires s’entend comme un minimum », est-il précisé dans l’amendement. Or le PLPM prévoit déjà 13 milliards de recettes extrabudgétaires. Est-ce à dire que le Gouvernement se réserve le droit d’augmenter encore les ressources budgétaires, en plus des recettes extrabudgétaires ?

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Oui, les ressources budgétaires se cumuleront.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Cela peut paraître incroyable, mais c’est ce qui se fait déjà. Le rapporteur propose de l’inscrire dans la loi. Ce n’est pas sur les questions budgétaires qu’il faut essayer de nous coincer ; si j’étais mon propre opposant, j’utiliserais un autre angle d’attaque…

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement DN307 de M. Bastien Lachaud.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Il ne faudrait pas que la loi nous contraigne à remplacer un canon Caesar que nous aurions cédé à l’Ukraine et qui aurait été détruit. La formulation de l’alinéa 4 ne nous semblant pas très claire sur ce point, nous proposons de préciser que le recomplètement s’entend « au sein de l’armée française ». L’exécutif conserverait ainsi la possibilité de remplacer le matériel détruit au sein de l’armée ukrainienne, mais ce ne serait pas une obligation légale.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Ce qui est donné est donné : la précision est superfétatoire. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Pour être honnête, je n’avais pas très bien compris le sens de cet amendement à sa lecture…

Non, il n’est absolument pas question d’un recomplètement automatique des matériels donnés à l’Ukraine. Une telle précision dans la partie normative de loi de programmation militaire s’appliquant aux armées françaises serait bizarre !

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Ce n’est pas clair : la preuve.

M. Sébastien Lecornu, ministre. C’est parce que vous avez parfois l’esprit taquin…

Une loi ne peut pas imposer une cession d’armes automatique – vous l’avez suffisamment répété pour les exportations de matériels de guerre. Cela me semble relever de l’évidence. Sagesse.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN284 de M. José Gonzalez.

M. José Gonzalez (RN). La contribution de la France à la Facilité européenne pour la paix (FEP), à hauteur de 100 millions d’euros fin 2023, devrait servir à promouvoir notre industrie de défense nationale plutôt que permettre aux États européens bénéficiaires d’acheter du matériel étranger. En effet, il semblerait que les versements français – vraisemblablement plus de 1 milliard d’euros sur la période couverte par la nouvelle loi de programmation – permettront à des pays comme la Pologne ou les Pays baltes de continuer à acheter en grande proportion du matériel américain au détriment du matériel français. À l’heure où l’on parle d’économie de guerre et de conflits de haute intensité, la France bénéficie-t-elle d’une telle avance dans son effort de défense pour financer indirectement l’industrie de défense américaine ?

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Avis défavorable : la contribution française à la FEP ne vise pas à promouvoir notre base industrielle et technologique de défense (BITD), reconnue pour son savoir-faire, elle permet à la FEP de remplir son rôle, à savoir notamment renforcer les capacités de nos partenaires.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Avis défavorable

Mme Stéphanie Galzy (RN). J’abonde dans le sens de mon collègue Gonzales : il est frustrant de verser 100 millions à la Facilité européenne pour la paix alors que nos partenaires européens achètent du matériel étranger, d’autant plus que cette somme correspond aux projections des députés Dhuicq et Bays en 2015 en vue de la relance de la filière française de production de petites munitions que nous évoquions tout à l’heure. Certes, comparaison n’est pas raison et l’inflation est telle qu’il faudrait abonder ce montant, mais il est primordial de promouvoir la base industrielle et technologique française par le fléchage de financements.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). S’il est évident qu’il faut soutenir la BITD, il faut aussi prendre en considération le contexte. La seule utilité de la FEP, aujourd’hui, est d’aider les Ukrainiens à résister à l’invasion russe. C’est à cela qu’elle doit servir, non à promouvoir la BITD.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN795 de M. Bastien Lachaud.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Compte tenu du caractère exceptionnel et imprévisible des cessions à l’Ukraine et de leur montant, nous proposons qu’elles fassent l’objet, à l’instar des surcoûts des opérations extérieures (Opex), d’un financement interministériel. Nous ne voulons pas que ce choix, qui engage la nation et qui est politique au sens le plus noble du terme, affecte spécifiquement le ministère des armées. Les crédits utilisés seraient ponctionnés sur le programme 552, consacré aux dépenses accidentelles et imprévisibles.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Avis défavorable : le périmètre des missions budgétaires relève du ministère des comptes publics et de la loi de finances, non du ministère des armées et de la loi de programmation militaire.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je considère qu’il s’agit d’un amendement d’appel. La construction des projets de loi de finances dépend de Bercy et des ministres concernés. Ce qui compte, c’est que, dans la programmation militaire, la distinction soit clairement faite. Demande de retrait.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Je ne suis pas convaincu. On pourrait très bien affirmer dès maintenant que les dépenses de ce genre relèvent de l’interministérialité. On ne sait pas combien de fois nous serons conduits à utiliser de tels dispositifs.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN413 de M. Olivier Marleix.

M. Jean-Louis Thiériot (LR). Cet amendement du groupe LR vise à obtenir une information du Parlement sur l’aide fournie à l’Ukraine. Afin que nous ne nous soyons pas empêchés par la nécessaire discrétion concernant le contenu de cette aide, je pourrais user de mon droit de rectification pour exclure de cette information ce qui relève du secret-défense.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Le contrôle parlementaire du soutien à l’Ukraine existe. Je rappelle d’ailleurs que nos collègues Lionel Royer-Perreaut et Christophe Naegelen sont les corapporteurs de la mission d’information flash sur le bilan du soutien militaire à l’Ukraine. L’amendement est donc satisfait. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. L’amendement est en effet satisfait. Il y aura en juillet des auditions sur les exportations d’armes devant les commissions des affaires économiques, des affaires étrangères et de la défense. Tout don d’armes à l’Ukraine donne lieu à une licence. Vous trouverez donc le détail de l’aide à l’Ukraine pour l’année 2022 dans le rapport annuel sur les exportations d’armements par la France – nous ferons en sorte de le faire ressortir. Inutile de créer une autre obligation.

M. Jean-Louis Thiériot (LR). Comme il s’agit d’un amendement du groupe, je le maintiens. Peut-être serait-il intéressant de prévoir que la communication sur 2022 sera amenée à se prolonger si la guerre dure.

M. Jean-Charles Larsonneur (HOR). Un conseil spécial d’information réunit en outre les ministres concernés et les responsables du Parlement, dont les présidents de groupe. Il procure une information de bon niveau. Le président Marleix y a d’ailleurs assisté.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN309 de M. Aurélien Saintoul.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Nous estimons que les ressources extrabudgétaires du ministère des armées n’ont pas à figurer dans la LPM – elles ne figuraient d’ailleurs pas dans la précédente.

Nous considérons que le budget de la programmation militaire doit s’entendre hors ressources extrabudgétaires : est-il de 413 milliards ou de 400 milliards d’euros ?

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Les ressources extrabudgétaires ont toujours figuré dans les LPM. En l’espèce, leur proportion est inférieure à celle de la LPM pour 2019-2025. Il s’agit de recettes récurrentes et connues. En les supprimant, vous retireriez d’un trait de plume 5,9 milliards de ressources au budget de la défense. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. On voit qu’il y a une difficulté politique à prendre acte de l’effort consenti par la majorité présidentielle… Je suis de bonne foi mais à force, il devient évident qu’il s’agit de manœuvres politiciennes.

Les ressources extrabudgétaires, le retour du produit des cessions immobilières du ministère, cela figurait dans la précédente LPM. Vous avez déposé je ne sais combien d’amendements pour réclamer plus de transparence et maintenant il faudrait supprimer l’alinéa qui apporte de la transparence ? Je n’arrive plus à vous suivre ! Avis défavorable.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). La bonne foi, Monsieur le ministre, on en jugera en séance. Il y a des engagements que vous avez pris en séance lors de l’examen de projets de loi de finances et dont on n’a toujours pas vu la couleur – par exemple, concernant les cuisines…

M. Sébastien Lecornu, ministre. Nous l’avons fait : mauvais exemple !

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Au temps pour moi. En revanche, pour ce qui est du service de santé des armées (SSA), ça traîne.

Mais j’en reviens aux ressources extrabudgétaires. Êtes-vous certain qu’elles seront stables ? D’autre part, si l’on ajoute les cessions et les revenus du SSA, cela représente, grosso modo, 7 milliards. Il en manque 6 : ce n’est pas une paille.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Voyez, Monsieur Saintoul : vos questions ne sont pas dans le même registre que la défense de l’amendement. Si des parlementaires, quelle que soit leur sensibilité, ont des doutes concernant le montant des ressources extrabudgétaires, on peut en discuter. Si c’est pour jouer sur l’argument de la sincérité – 400 ou 413 milliards – c’est inutile.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN124 de M. Jean-Pierre Cubertafon.

Mme Josy Poueyto (Dem). Amendement rédactionnel.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Demande de retrait : les services du ministère m’ont confirmé que « ministère de la défense » était bien le terme consacré par le code de la défense.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je le confirme.

L’amendement est retiré.

 

Amendement DN421 de M. Olivier Marleix.

M. Jean-Louis Thiériot (LR). Je souhaite revenir sur la question des ressources extrabudgétaires, qu’il est possible de traiter avec sérieux et bonne foi. Vous avez dit que ce PLPM était fondé sur des besoins physiques et sur du concret. Comment fera-t-on si les recettes extrabudgétaires sont insuffisantes ?

L’objet de l’amendement est d’inscrire noir sur blanc qu’elles seront compensées en loi de finances par des ressources budgétaires.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Sagesse.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Il paraît vraiment curieux, quand on fait partie de la majorité, de devoir donner autant de gages concernant la trajectoire alors que la précédente LPM, votée en 2018, a été exécutée à l’euro près, voire surexécutée, et que l’inflation a été traitée. Il semblerait qu’on prenne plus de précautions lorsqu’il s’agit d’augmenter les crédits que lorsqu’il s’est agi de les diminuer…

J’ai reçu le président Marleix pendant plus d’une heure et demie. Il m’a posé la même question que vous. Je lui ai longuement expliqué les choses. Comme j’ai lu ensuite dans la presse que, globalement, il n’accordait pas de crédit à mes propos, j’ai pris ma plume et j’ai mis l’ensemble des membres du groupe Les Républicains en copie du courrier – étant entendu que je suis à la disposition de tous les groupes pour donner des explications. Désormais, le groupe LR souhaite inscrire dans la loi ce que j’ai déjà dit des dizaines de fois, en commission de la défense, en commission des finances, en commission des affaires étrangères, au Sénat. Je ne peux pas faire mieux. Par conséquent, si tel est vraiment le souhait du groupe LR, j’émettrai un avis favorable sur cet amendement. J’espère que, du coup, les ressources extrabudgétaires ne feront plus l’objet de polémiques.

On me renvoie sans cesse à l’insincérité de ma copie – je ne parle pas pour vous, Monsieur Thiériot –, sans jamais la démontrer. J’espère que cet ajout sera de nature à rassurer l’ensemble des groupes politiques. La majorité présidentielle n’a rien à cacher.

 

 

Mme Anne Genetet (RE). L’amendement explicite ce qui s’est toujours fait naturellement et qui, en tout cas dans la précédente LPM, n’avait rien à voir avec de l’insincérité. Nous n’avons pas de doute sur le fait que nous pourrons trouver ces 13 milliards de recettes extrabudgétaires, mais nous n’avons pas d’objection à écrire ce qui se fait déjà.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Votre soutien à l’amendement de M. Marleix est un choix important, Monsieur le ministre. Ne devrions-nous pas planifier d’ores et déjà les 13 milliards d’euros en faisant apparaître les moments auxquels cette enveloppe sera dépensée ? C’est le principe d’une loi de programmation. Si l’amendement est adopté, l’existence des 13 milliards d’euros est garantie – sans prendre en compte les lois de finances initiales, comme vous ne cessez de le rappeler, Monsieur le ministre –, donc pourquoi ne planifierions-nous pas ce montant dans les marches puisque l’éventuelle absence des ressources extrabudgétaires sera compensée par des crédits budgétaires ? Cela apporterait de la visibilité aux industriels, aux soldats et aux citoyens.

M. Christophe Blanchet (Dem). Le groupe Démocrate soutiendra l’amendement, l’explication du ministre ne faisant qu’entériner ce qu’il avait déjà dit à six reprises. Inscrivons dans le marbre cet engagement et sanctuarisons ces ressources budgétaires pour éviter toute polémique ou quiproquo.

M. Sébastien Lecornu, ministre. En tant que militant politique, j’admire la rhétorique de La France insoumise : nous examinons des sujets très techniques sur lesquels je pense qu’aucune génération de parlementaires ne s’est penchée depuis 1960, mais nous ignorons toujours vos idées sur les contours de l’armée une fois la France sortie de l’Otan, vos orientations en matière de politique étrangère ou votre conception du système aérien de combat du futur (Scaf) : nous avons juste compris que vous aviez failli sortir l’Allemagne de nos partenariats stratégiques et que l’Otan était la source de toutes les guerres.

C'est bien joué parce que nous passons beaucoup de temps sur cette question et d’autres oppositions sont tombées dans le panneau – c’est vous qui avez soulevé le sujet les premiers –, mais au bout d’un moment, il faut revenir sur l’essentiel. Espérons que l’adoption de cet amendement nous en donne l’occasion !

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement DN683 de M. Jean-Louis Thiériot.

M. Jean-Louis Thiériot (LR). L’adoption de l’amendement précédent satisfait celui-ci, dont je le retire.

L’amendement est retiré.

 

Amendement DN198 de Mme Anna Pic.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Adopté par la commission des affaires étrangères, l’amendement vise à compléter le volet des engagements budgétaires, en inscrivant dans la loi l’atteinte des objectifs de dépenses. Il propose de recourir à des crédits déterminés en loi de finances tout au long de la période de la LPM car nous pensons que les besoins programmés ne correspondent pas aux crédits documentés pour la période 2024-2030. L’amendement souligne nos doutes sur le respect de cette programmation budgétaire.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. La formulation de votre amendement pose problème car elle ne fait référence qu’aux ressources budgétaires.

M. Sébastien Lecornu, ministre. J’ai répondu plusieurs fois : avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN106 de Mme Caroline Colombier.

Mme Caroline Colombier (RN). Il reprend la recommandation d’un rapport du Sénat de juin 2021 sur l’actualisation de la LPM 2019-2025, en ajoutant dans le texte que les ressources budgétaires seront complétées par un retour intégral du produit de cession à l’export de matériels d’occasion.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. L’amendement est satisfait : la vente de Rafale d’occasion à la Grèce et à la Croatie a directement abondé le budget de la mission Défense.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je me tue à expliquer que le ministère des armées a des recettes propres, comme la vente de matériels d’occasion. L’amendement est satisfait, donc je vous demande de le retirer.

L’amendement est retiré.

 

Amendement DN310 de M. Bastien Lachaud.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Le texte apporte peu de précisions sur la ventilation des crédits, donc nous vous avons pisté sur Twitter pour obtenir des informations. L’amendement retranscrit des fléchages de crédits que vous avez indiqués sur votre compte pour garantir l’attribution de ces sommes, modestes pour l’instant : 35 millions d’euros investis au profit du premier régiment de tirailleurs, 20 millions pour le régiment de marche du Tchad, 692 millions investis pour la base aérienne 125, etc. L’adoption de l’amendement serait de nature à nous rassurer puisque vous nous avez sentis soupçonneux.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Vous le savez bien, ce genre de précisions n’a jamais eu sa place dans une LPM. Ces annonces avaient une visée pédagogique, utile à nos concitoyens pour comprendre l’effort de défense.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Encore un peu de militantisme politique ! Le ministre est ordonnateur des dépenses : quand vous serez ministre chargé de la défense de M. Ruffin ou de M. Mélenchon, vous le serez également. Il faudra néanmoins revoir toute la loi de programmation militaire. Quand la France sera sortie de l’Otan, se sera fâchée avec tout le monde et n’aura plus de dissuasion nucléaire, il faudra en effet concevoir un modèle différent et acheter sans doute beaucoup de chars…

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Il est étrange que vous vous livriez à ce genre de caricature quand nous avons des discussions informées et sérieuses sur le quantique ou la cryptographie. Je pensais que vous aviez compris notre doctrine en faveur de la dissuasion et du désarmement, les deux n’étant pas incompatibles puisqu’ils figurent en toutes lettres dans le traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).

On peut regretter que vous n’ayez pas donné ces éléments précis de ventilation à la représentation nationale, mais vous en avez publiquement fait état, donc je ne vois pas de raison de retirer l’amendement même si nous savons qu’il s’agit de petites sommes. Cet amendement n’aurait pas été nécessaire si le rapport annexé avait été plus détaillé.

M. Sébastien Lecornu, ministre. La territorialisation de la LPM est un sujet essentiel : chaque parlementaire recevra un portrait des effets du projet de loi de programmation dans son territoire ; ce tableau abordera les conséquences sur la BITD, les infrastructures – bases des régiments et bases navales – et le capacitaire. Ce portrait manquait et il sera utile pour susciter l’appropriation par les citoyens des dépenses militaires. Le ministre est dans son rôle lorsqu’il explique, à l’occasion d’un déplacement dans une unité pour rencontrer la troupe, ce que la LPM prévoit pour celle-ci ; la presse est dans son droit de le relayer comme mon compte Twitter.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Nous avons mis le doigt sur quelque chose d’important, et il aurait été très utile d’avoir ce rapport avant l’examen du projet de loi pour que nous nous prononcions de manière éclairée.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’article 3 modifié.

 

 

Après l’article 3

 

Amendement DN32 de Mme Valérie Rabault.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Il a trait à la transparence de l’exécution budgétaire et il définit une trajectoire d’autorisations d’engagement et de restes à payer, dans le but de sécuriser la trajectoire budgétaire présentée à l’article 3. Dans son analyse de l’exécution budgétaire de la mission Défense publiée en avril 2023, la Cour des comptes a alerté les parlementaires sur la soutenabilité de la trajectoire des restes à payer de la mission, lesquels atteignaient 91 milliards d’euros en 2022 contre 52 milliards en 2017. Nous souhaitons suivre les préconisations de la Cour des comptes et inscrire une trajectoire d’autorisation.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Les notes d'exécution budgétaires de la Cour des comptes documentent très bien l'évolution des restes à payer et sont suffisantes. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Même avis. Je suis néanmoins favorable à ce que l’on élabore un document présentant une visibilité à deux ans. Les restes à payer sont élevés, parce que le ministère investit énormément. Plus il y a de factures de capacitaire et d’infrastructures à payer, plus il y a d’étalement – cela se vérifie par exemple pour les Rafale. Il est impossible de donner une visibilité à cinq ans pour les programmes parce que la nature juridique des contrats – verticaux ou par tranches – n’est pas connue. En revanche, nous pouvons nous engager en séance publique à prévoir une projection à deux ans : je suis disponible pour y travailler avec Mme Rabault. En attendant, je vous demande de retirer l’amendement.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Nous le maintenons mais nous sommes ouverts à en redessiner les contours.

La commission rejette l’amendement.

 

 

Article 4 : Provision au titre des surcoûts OPEX et MISSINT

 

Amendement DN311 de M. Aurélien Saintoul.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Notre groupe est particulièrement attaché à la notion de financement interministériel des surcoûts des opérations extérieures (Opex) et des missions intérieures (Missint). L’amendement vise à plafonner le montant provisionné au sein du budget des armées, des crédits provenant d’autres ministères pouvant éventuellement les abonder – nous pensons notamment au programme 552 dont je vous ai déjà parlé. Une provision de 350 millions nous paraît plus raisonnable que celle de 750 millions inscrite dans le projet de loi.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Il convient de trouver un juste équilibre, mais les principes de sincérité, de bonne gestion et de prudence imposent de prévoir une provision réaliste par rapport aux prévisions de dépenses. Ce n’est pas le cas de votre amendement, donc l’avis est défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Le projet de loi affiche déjà une diminution importante de la provision annuelle au titre des Opex et des Missint, rendue possible par la fin de Barkhane. Nous avons également intégré une réflexion sur l’avenir de Sentinelle après les Jeux olympiques. La proposition me semble équilibrée parce que l’activité peut vite avoir un coût élevé – on l’a vu avec la mission réassurance à l’Est après l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Nous maintenons l’amendement. Le gouvernement précédent avait choisi de présenter une enveloppe de provisions sincère : nous n’étions pas favorables à cette présentation car nous préférons le programme 552 qui garantit le caractère interministériel de l’enveloppe.

Mme Lysiane Métayer (RE). La France est l’un des rares pays à déployer des forces à l’extérieur de ses frontières : ces opérations sont extrêmement importantes, donc il ne faut pas trop réduire leurs crédits pour ne pas pénaliser nos efforts pour la stabilité et contre le terrorisme.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Nous ne souhaitons pas baisser le budget des Opex ou des Missint, nous voulons réduire la provision annuelle du ministère des armées pour ce poste, afin que le supplément soit financé en interministériel. Les armées n’agissent pas en Opex ou en Missint pour le seul compte de leur ministère, mais pour la nation tout entière : c’est donc à la solidarité nationale de s’exprimer. D’ailleurs, le montant de 350 millions d’euros que nous proposons correspond à celui de 2017 et de 2018, juste avant la LPM en cours d’exécution.

Mme Lysiane Métayer (RE). J’avais bien compris votre amendement, mais ce sont les surcoûts que peut reprendre l’interministériel.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN892 de M. Jean-Michel Jacques.

M. Jean-Michel Jacques (RE). Il a pour objet de fixer au 30 juin au plus tard la communication au Parlement du rapport sur le bilan des Opex et des Missint, comme le prévoyait la LPM 2019-2025.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

 

La commission adopte l’amendement rédactionnel DN828 de M. Jean-Michel Jacques, rapporteur.

 

Amendement DN669 de Mme Delphine Lingemann.

Mme Delphine Lingemann (Dem). Il propose de fixer la même échéance pour la communication du bilan opérationnel et financier des Opex et des Missint que celle de la transmission du rapport sur le bilan de l’exécution de la programmation militaire, prévue à l’article 8, à savoir avant le 30 avril.

Suivant les avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN245 de Mme Anna Pic.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Il s’agit d’un amendement de confort pour le travail des parlementaires : il a pour objet de donner à ceux-ci au moins quinze jours pour examiner le bilan opérationnel et financier des Opex et des Missint. Ce délai servira à examiner les documents avant leur discussion dans notre assemblée.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. La Constitution donne déjà au Parlement un rôle en matière d’Opex : il faut s’y tenir et en rester là, d’autant que les articles 8 et 9 du projet de loi prévoient la transmission au Parlement d’un rapport dressant le bilan de l’ensemble de l’exécution de la programmation militaire. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Même avis.

M. le président Thomas Gassilloud. Si le bureau de la commission le souhaite, la présentation du rapport pourra faire l’objet d’une réunion destinée à faire le point annuel sur les Opex et les Missint.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Je n’ai pas compris pourquoi vous étiez défavorable à l’amendement, Monsieur le ministre.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je n’ai pas d’avis particulier, donc je me range derrière celui du rapporteur. Les documents seront de toute façon prêts.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Monsieur le rapporteur, faites-vous le porte-étendard du parlementarisme !

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’article 4 modifié.

 

 

Article 5 : Carburants opérationnels

 

Amendement DN314 de M. Aurélien Saintoul.

Mme Martine Etienne (LFI-NUPES). Il vise à élargir la mesure prévue à l'article 5, à savoir une dotation de crédits budgétaires supplémentaires en cas de hausse des prix des carburants opérationnels, à toutes les énergies nécessaires au fonctionnement des armées. Le texte propose une ventilation budgétaire qui omet les effets de l’inflation sur toute la trajectoire, ce que nous n’acceptons pas. La Banque centrale européenne (BCE) ne cesse de prendre des mesures pour limiter l’inflation, mais celles-ci ne doivent pas grignoter les augmentations de crédits promises. Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2023, nous avions soulevé l’insincérité budgétaire des crédits de la mission Défense, dans laquelle ne figurait pas l’inflation des prix des carburants. Si l’article 5 la prend en compte, il omet toutefois l’augmentation drastique des prix de l’énergie, qui affecte pourtant fortement nos armées.

Le prix du baril de pétrole n’est pas la seule variable à avoir un impact sur le présent budget. Protéger l’ensemble des énergies utiles aux armées, et non les seuls carburants, est indispensable pour compenser l’inflation et garantir l’annualité effective de la programmation. Vous l’aurez compris, la modification que nous proposons n’est pas simplement sémantique : ne prendre en compte que la seule hausse des prix des carburants irait à rebours de la juste part que prennent les armées dans la transition écologique et de la stratégie de diversification énergétique entreprise.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Je comprends votre souci d'élargir la mesure à l'ensemble des énergies, mais c’est essentiellement le coût des carburants opérationnels qui est susceptible d’affecter l’activité de nos armées, et non celui des autres énergies. C'est donc faire preuve de transparence et de sincérité que de faire référence aux seuls carburants opérationnels.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je vous remercie d’être restée dans le champ de l’opérationnel et de respecter la philosophie de l’article 5 – il y a d’autres mécanismes de gestion de l’inflation pour les aspects non opérationnels, que l’on croit ou non à leur efficacité.

L’essentiel de la dépense est dû au carburant opérationnel et les autres postes énergétiques sont très résiduels : je ne réfute pas votre intuition, mais en termes budgétaires, c’est sur le carburant qu’il faut porter notre effort. Avis défavorable.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). J’entends votre argument, mais le service des essences des armées est devenu le service des énergies opérationnelles : là encore, le changement n’est pas que sémantique, il y a bien une bascule. Bientôt, la moitié des carburants des avions sera des carburants durables d’aviation (SAF) : là, ce n’est pas le baril de brut qui entre en jeu. Les cours varient et il y a des flottes de véhicules blancs dans les armées qui sont électriques : nous devons dès maintenant anticiper les ruptures technologiques d’avenir, surtout dans une loi qui couvre une période de sept ans. L’adoption de l’amendement serait bénéfique pour nos armées.

M. Frank Giletti (RN). Derrière les mots, il y a des réalités : je vois le Charles-de-Gaulle tous les jours et il ne me semble pas qu’il se déplace à la voile. Cet amendement n’a pas de sens.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je vous propose de retirer l’amendement et je vais demander aux services d’évaluer, d’ici à la séance, le coût budgétaire de l’extension que vous proposez – cela m’intéresse de connaître ce montant.

Il ne faut inscrire dans le texte que des éléments imputables budgétairement : le parallèle avec le changement du nom du service n’est pas pertinent car l’électricité, l’énergie nucléaire, l’hydrogène et le carburant sont différents et n’ont pas la même imputation budgétaire ; or l’article 5 est normatif, nous ne sommes plus dans le rapport annexé.

L’avis est défavorable car j’ignore en l’état l’impact de l’amendement, mais je vais faire chiffrer le différentiel, qui, à mon avis, n'est pas très élevé.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). J’entends votre proposition, Monsieur le ministre. L’écart entre les deux périmètres ne doit en effet pas être très grand actuellement, mais les carburants actuels seront peut-être minoritaires dans sept ans. Nous retirons l’amendement et nous le redéposerons en séance publique.

L’amendement est retiré.

 

Amendement DN313 de Mme Martine Etienne.

Mme Martine Etienne (LFI-NUPES). Comme votre projet de loi est incomplet, nous souhaitons élargir la mesure prévue à l'article 5 à toutes les matières premières nécessaires au fonctionnement et à l'emploi des forces, afin de les protéger de la volatilité des prix. Le baril de pétrole n’est en effet pas le seul paramètre affectant les prévisions budgétaires.

Les crédits en loi de programmation militaire sont en euros constants, donc exposés à l’inflation. Cette dernière peut remettre en cause l’augmentation des crédits dans l’ensemble des trajectoires car ne prendre en compte que la seule hausse du prix des carburants reviendrait à omettre les changements de prix dus à l’évolution du contexte international, comme l’ont rappelé la pandémie de covid-19 et la guerre en Ukraine.

L’inflation touche concrètement le fonctionnement des armées, tant pour l’acquisition d’équipements que pour le maintien en condition opérationnelle. Intégrer l’ensemble des matières premières utiles aux armées – et pas seulement les énergies – dans le périmètre de l’article 5 est indispensable pour compenser l’inflation et garantir l’annualité d’une programmation juste pour nos militaires.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. L’évolution générale des prix est prise en compte dans la LPM, à travers l’inflation. Par ailleurs, cet article porte sur les problèmes spécifiques des carburants utilisés dans un contexte opérationnel. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Les crédits sont en euros courants. Je suis défavorable à l’amendement : la réflexion qui sous-tendait la proposition précédente était intéressante, mais celle-ci est moins pertinente.

Plus largement, le système de l’article 5 fonctionne – je le dis d’autant plus facilement que c’est le Parlement qui l’a imposé au Gouvernement il y a quelques années ; par conséquent, je m’opposerai à tout ce qui peut l’affaiblir, y compris en interministériel, car ce ne serait pas une bonne nouvelle pour les armées. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN312 de M. Bastien Lachaud.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Le diable se cachant dans les détails, nous avons repéré les mots « si la hausse est durable ». Ils prêtent à interprétation, donc nous proposons de les supprimer pour éviter une version défavorable et assurer une réelle compensation de l’augmentation des prix, qui soit immédiate et qui ne dépende pas des acceptions différentes que l’on peut donner à l’adjectif « durable ».

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Nous avons repris la même rédaction que celle de la précédente LPM, parce que le dispositif fonctionne – en 2022, 152 millions d’euros ont été ouverts, pour vous donner un chiffre. Je vous demande de retirer l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements DN145 de M. Frank Giletti et DN35 de Mme Valérie Rabault (discussion commune).

M. Frank Giletti (RN). La forte hausse du coût des carburants du fait de l’inflation, pourrait affecter notre préparation opérationnelle. Comme la précédente loi de programmation militaire, le texte indique que les dépenses de carburants opérationnels bénéficient de crédits supplémentaires en cas de hausse durable, sans préciser de seuil ni de principe de compensation.

Le présent amendement prévoit que des crédits supplémentaires correspondant au surcoût soient ouverts en cas de hausse sur plus de trois mois consécutifs de 10 % du prix moyen constaté des carburants opérationnels par rapport à la moyenne des prix des trois années précédentes.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Chaque année, le groupe Socialistes et apparentés dépose des amendements sur la loi de finances pour tenir compte de l’inflation des coûts du carburant ; le Gouvernement et la majorité les rejettent systématiquement. Nous souhaitons que les dispositions de l’article correspondent à des engagements réels. La notion de « hausse durable » paraît trop floue, d’autant que le ministre a souhaité que chaque élément du texte renvoie à une imputation budgétaire concrète. Notre amendement a donc pour objet de préciser que la hausse doit dépasser 50 millions d’euros sur une année.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Ce que vous dites n’est pas tout à fait exact : dès lors que ces provisions sont inscrites, on rouvre des crédits. Le Gouvernement l’avait proposé, lors de discussion sur la loi de finances.

Rien ne sert de rigidifier le mécanisme : il fonctionne, du moins avec ce Gouvernement, car il est souple. Il repose sur le principe que l’on ne reporte jamais une activité opérationnelle pour un problème lié au coût du carburant.

Avis défavorable aux deux amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

 

M. le président Thomas Gassilloud. Il est vingt-trois heures. Je vous propose de prolonger la séance jusqu’à une heure. Tous les groupes, sauf un, y sont favorables.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je suis à la disposition du Parlement, hormis dimanche soir et lundi, où je me rendrai en Guyane pour les obsèques d’un soldat français.

 

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement DN125 de M. Jean-Pierre Cubertafon.

 

Amendement DN34 de Mme Valérie Rabault.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Cet amendement de repli de l’amendement DN35 vise à compléter l’article par la phrase : « Les hausses de prix de carburants opérationnels sont documentées par l’Institut national de la statistique et des études économiques. »

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Ces hausses de prix sont déjà parfaitement documentées. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Il ne faut pas s’acharner sur un mécanisme qui fonctionne bien. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN687 de M. Jean-Louis Thiériot.

M. Jean-Louis Thiériot (LR). Il s’agit de compléter l’article pour sécuriser le montant budgétaire dans l’hypothèse où l’inflation serait supérieure à l’estimation de 30 %. Vous rouvrez habituellement des crédits lors de la loi de finances rectificative de juillet, mais l’amendement sécuriserait encore plus le dispositif.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Il était question de garder de la souplesse : prévoir un seuil prédéterminé ne le permet pas. Je vous suggère de retirer l’amendement.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Même avis que pour les amendements précédents.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN315 de M. Bastien Lachaud.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). L’amendement remédie au fait que les armées ne bénéficient pas du tarif régulé de l’électricité : elles lancent des appels d’offres comme toute autre entreprise. Il est paradoxal qu’elles ne soient pas protégées des surcoûts d’électricité par le tarif régulé. La disposition pourra figurer dans un autre article, si le ministre le juge bon.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Je fais confiance aux services du ministère pour déterminer la solution optimale.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Ce sujet n’entre pas dans le périmètre de la loi de programmation militaire mais renvoie à la loi portant nouvelle organisation du marché de l’électricité du 7 décembre 2010. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’article 5 non modifié.

 

 

Après l’article 5

 

Amendement DN316 de Mme Martine Etienne.

Mme Martine Etienne (LFI-NUPES). Il vise à ouvrir des crédits supplémentaires en loi de finances initiale si les prix des matières premières augmentent. Les explications du ministre butent sur la réalité d’une programmation en euros courants, exposée à l’inflation. C’est particulièrement le cas pour les premières marches d’augmentation, entre 2024 et 2026, qui ne prennent pas en compte la hausse générale des prix. Or on peut calculer qu’avec l’inflation de 7,2 % estimée pour 2023, il y aura une baisse mécanique ou, au mieux, une stagnation du budget des armées.

Accepter une planification financière qui ne prend pas en compte l’inflation, c’est prendre le risque de renier ou de reporter certains engagements. Au contraire, inscrire la protection budgétaire de l’ensemble des matières premières de la mission Défense garantirait l’annualité des engagements. Refuser toute mesure de gel des prix serait accepter le risque d’exposer nos armées à l’inflation.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Je ne crois pas au gel général des prix. Quant à la possibilité de crédits supplémentaires, elle est déjà garantie par nos amendements à l’article 3. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

 

Article 6 : Effectifs

 

Les amendements DN128 et DN129 de M. Jean-Pierre Cubertafon sont retirés.

 

Amendement DN318 de M. Aurélien Saintoul.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Cet amendement d’appel vise à faire figurer dans la LPM un tableau des cibles d’augmentation, voire de l’affectation des augmentations d’effectifs, employeur par employeur. Nous regrettons que le tableau présenté ne soit pas aussi détaillé.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Nous sommes dans une démarche de sincérisation. C’est pourquoi j’émettrai un avis défavorable sur l’amendement.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je propose de conserver cette présentation. Les LPM précédentes ne fournissaient pas les cibles d’ETP (équivalents temps plein). Nous sommes aujourd’hui confrontés au défi d’une LPM qui s’achève et d’une autre qui commence. Les auditions budgétaires de fin d’année comprennent désormais un chapitre T2 « Qualité quantité ». On revient aux réserves, évoquées hier soir, ainsi qu’aux postes civils, dont on parle trop peu. C’est sur ce point que porteront les efforts pour rendre compte dans la LPM, ainsi que sur les chantiers indiciaire et indemnitaire, et sur l’évolution des cibles.

Une certaine souplesse d’affectation existe entre les grands employeurs du ministère. Et pour cause, car il y a des évolutions, des pivots. À titre d’exemple, selon le seuil de militarité et le nombre de militaires requis, le nombre de civils affectés en nouveaux ETP évolue. C’est une matière vivante.

Un débat budgétaire n’est pas possible sans une discussion sur les ressources humaines (RH). J’en prends l’engagement, pour répondre à votre amendement d’appel. C’est un combat collectif : être attractif n’est pas qu’une affaire de normes ou de lois.

L’amendement est retiré.

 

Amendement DN319 de M. Bastien Lachaud.

Mme Murielle Lepvraud (LFI-NUPES). Cet amendement d’appel vise à agir pour fidéliser les personnels civils et militaires des armées. Il semble urgent de procéder à une réforme du point d’indice, puis de rattraper le gel indiciaire des dernières années. Pour fidéliser et attirer les futurs personnels, il est nécessaire que ces hommes et ces femmes puissent construire des objectifs de carrière solides et disposer d’un pouvoir d’achat à la hauteur de leur engagement pour la nation. Il faut agir contre le tassement des grilles indiciaires, qui remet en cause l’ascenseur social dans nos armées.

Face à la nouvelle politique de rémunération du Gouvernement consistant à agir prioritairement sur l’indemnitaire, non l’indiciaire, nous nous interrogeons sur les moyens que se donne l’État à court et moyen termes pour fidéliser ses troupes. Ouvrir des postes ne remplira pas le ministère et ne comblera pas les manques affichés ces dernières années.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Attaché à l’ascenseur social, je considère qu’il faut éviter tout tassement des grilles. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Il n’est pas exact de parler d’un gel du point d’indice puisque celui-ci a récemment été revalorisé de 3,5 %.

Je vous renvoie aux discussions que nous avons eues avec Bastien Lachaud et Aurélien Saintoul hier : le traitement indiciaire s’additionne à l’indemnitaire, dans des proportions de deux tiers un tiers.

Je vous propose donc de retirer l’amendement, afin de le retravailler d’ici à la séance à partir de ce qui a dit.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN320 de M. Aurélien Saintoul.

Mme Martine Etienne (LFI-NUPES). Il vise à supprimer l’alinéa 7. Vous proposez d’adapter vos objectifs de recrutement « en fonction de la situation du marché du travail ». S’agit-il, en période de chômage, de recruter avec de moins bons salaires ? De diminuer les recrutements lorsque le taux de chômage baissera ?

Selon le Conseil d’État, l’alinéa est « obscur » et envisage « la non-réalisation des objectifs fixés », ce qui est contraire à l’esprit de la programmation. Si l’on souhaite réellement recruter, il convient de partir des besoins des armées, de se fixer des objectifs et de tout mettre en œuvre pour les atteindre, en appliquant des politiques salariale et de fidélisation attrayantes.

On l’a dit, votre projet de LPM ne chiffre pas les dépenses RH et ne détermine en rien ce qu’une bonne programmation devrait définir – les effectifs dont chaque corps d’armée a besoin, le nombre de personnes nécessaires au bon fonctionnement des armées, la façon de s’assurer de la bonne réalisation des objectifs. Si vous prévoyez d’atteindre vos objectifs, commencez par retirer l’alinéa 7, comme le préconise le Conseil d’État.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. L’alinéa 7 est clair : il prévoit la faculté d’adapter la réalisation des cibles d’effectifs et la politique salariale du ministère « en fonction de la situation du marché du travail ». J’émets donc un avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. La phrase est claire. Avis défavorable

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). L’alinéa 7 dispose : « Le ministère adaptera la réalisation des cibles d’effectifs fixées par le présent article et sa politique salariale en fonction de la situation du marché du travail ». Vous prévoyez donc d’ajuster la rémunération des soldats en fonction de la disponibilité et de la fluidité du marché du travail. Vous nous serinez régulièrement que nous atteignons le plein emploi : cet argument vous servira-t-il pour baisser les soldes ? Si vous n’avez pas voulu dire cela, c’est que la phrase n’est pas claire.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je dois prévenir une possible désinformation du groupe La France insoumise. Plusieurs auditions ont traité du sujet et tous les commissaires comprennent de quoi il s’agit. Des secteurs civils, comme le cyber, qui attirent beaucoup de personnes posent un problème en matière de fidélisation. Les employeurs du ministère pourront adapter les politiques salariales et de recrutement pour les postes sur lesquels il est difficile d’embaucher.

Vous y avez vu une tentative d’expliquer que nous comptions baisser les soldes et les traitements alors que nous expliquons le contraire depuis hier. En le disant, j’aurai du moins évité toute contrevérité.

Avis défavorable.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Je n’ai évoqué que la politique salariale mais l’alinéa vise aussi la réalisation des cibles d’effectifs fixées par l’article. À quelle condition déciderez-vous de renoncer aux cibles définies ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. La souplesse est de mise : si les cibles ne sont pas atteintes en annualités budgétaires, pourquoi geler les postes, alors que l’on peut les redonner à d’autres employeurs du ministère ? On peut l’interdire, ce qui est ridicule.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Alors, formulez-le !

M. Sébastien Lecornu, ministre. C’est ce que cela signifie. Si, de bonne foi, vous ne l’avez pas compris, dont acte. La formulation tend à ne pas rigidifier et à permettre, en gestion, de ventiler les ETP. C’est ce qui a déjà été fait, entre certains employeurs qui n’arrivent pas à atteindre leurs cibles : on ne gèle pas budgétairement les ETP, pour permettre à un autre employeur d’en bénéficier.

L’amendement est retiré.

 

Amendement DN565 de M. Laurent Jacobelli.

M. Michaël Taverne (RN). Cet amendement a pour objet d’inscrire dans la LPM la nécessité de revaloriser la part indiciaire de la solde des militaires et de préciser les modalités de cette revalorisation. Un décrochage s’opère par rapport aux civils : malgré des efforts, il reste la question de la fidélisation à résoudre. Comme le Sénat l’a montré, les entreprises privées n’hésitent pas à débaucher.

Nous proposons une revalorisation annuelle, qui devra être égale ou supérieure à la moyenne nationale d’augmentation des salaires.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. L’amendement n’est pas clair. En évoquant la revalorisation annuelle de la part indiciaire, vous parlez peut-être de celle du point d’indice. Cette politique ne dépend pas du seul ministre des armées mais s’applique à toute la fonction publique. C’est pourquoi je donne un avis défavorable à l’amendement.

M. Sébastien Lecornu, ministre. En effet, parlez-vous du point d’indice ou de la grille indiciaire ? Je me suis engagé hier soir à lancer prochainement un chantier de revalorisation des grilles indiciaires. Vous retrouverez mes propositions en séance.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN321 de M. Bastien Lachaud.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Cet amendement reprend une proposition issue d’un rapport de M. François Cormier-Bouligeon, que la majorité sera heureuse d’appliquer – d’autant que le CEMAT (chef d’état-major de l’armée de terre) en a exprimé le besoin.

Il s’agit de porter les effectifs de la FOT, la force opérationnelle terrestre, de 77 000 à 80 000 d’ici à 2030.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Défavorable. On revient au choix de la cohérence avant la masse et du modèle d’armée, que nous avons évoqué au début de nos débats.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Pour quelle mission et quel modèle d’armée ? La FOT a augmenté, pour les raisons que j’ai présentées hier, s’agissant de l’opération Sentinelle. On ne peut pas déconnecter du tableau des contrats opérationnels souhaités. Avis défavorable.

M. Aurélien Saintoul (LFI-NUPES). Le rapporteur Cormier-Bouligeon pourrait donner les raisons de sa proposition, mais il est apparemment enfermé dans son mutisme.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’article 6 non modifié.

 

 

Article 7 : Actualisation

 

Amendement DN201 de Mme Anna Pic.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Cet amendement de réécriture de l’article 7 vise à actualiser deux fois la présente programmation : d’abord, en 2026, pour nous adapter au nouveau contexte stratégique et sécuritaire, en nous appuyant sur un Livre blanc qui définirait nos objectifs opérationnels et capacitaires ; ensuite, en 2028, pour adapter la programmation aux priorités des autorités issues des échéances électorales de 2027. Cette seconde actualisation aura l’ambition de préparer la modernisation de nos armées à l’horizon de 2035.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Deux actualisations semblent excessives.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Avant-hier, vous vous inquiétiez d’un manque de visibilité pour nos industriels. Vous disiez que les commandes par tranche de la DGA (Direction générale de l’armement) créent des difficultés pour la base industrielle et technologique de défense. Aujourd’hui, vous proposez de faire plusieurs LPM dans la LPM, en la coupant en morceaux. S’il y a une chose que la BITD ne veut pas, c’est bien cela !

Certes, des remises à jour annuelles sont possibles mais produire un Livre blanc en 2026 revient à concevoir une nouvelle LPM. C’est le contraire de ce que vous souhaitiez !

Mme Mélanie Thomin (SOC). Je ne vois pas de contradiction avec les propositions que j’ai faites tout au long de l’examen du texte. Il s’agit d’appeler l’attention sur ce sujet, pour disposer de points d’étape réguliers, dans un contexte stratégique particulier.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN414 de M. Olivier Marleix.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Amendement superfétatoire. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

L’amendement est retiré.

 

Amendements DN690 de M. Jean-Louis Thiériot, DN799 de M. Jean-Charles Larsonneur, DN415 de M. Olivier Marleix, DN322 de M. Bastien Lachaud et DN868 de M. Jean-Michel Jacques (discussion commune).

M. Jean-Louis Thiériot (LR). Mon amendement et celui de M. Marleix ont pour objectif de placer dans la partie législative les dispositions que nous avons adoptées dans le rapport annexé et de prévoir un vote du Parlement sur l’actualisation. Je vous laisse choisir la rédaction la plus opportune.

M. Jean-Charles Larsonneur (HOR). Le groupe Horizons souligne le contexte géostratégique changeant et la nécessité d’actualiser la présente LPM, tout en assurant une visibilité pour les acteurs de la BITD. Nous ne faisons pas de la date d’actualisation un point de fixation.

Quant au passage devant le Parlement, il éviterait les polémiques qui ont éclos lors de la précédente LPM. Peu clair, le texte avait été contesté.

M. Emmanuel Fernandes (LFI-NUPES). Il s’agit de s’assurer que le Parlement sera consulté à l’occasion de l’actualisation de cette future LPM, qui ne saurait être un blanc-seing accordé au Gouvernement pendant sept ans. Le Parlement doit pouvoir se prononcer en toute transparence sur le budget des armées, en plus du vote de la loi de finances. M. le ministre s’est montré favorable à cette mesure lorsque nous avons discuté du rapport d’information sur le bilan de la LPM pour la période allant de 2019 à 2025. Elle permettrait une coconstruction, un terme qui vous est cher, même si nous en avons rarement vu la couleur.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Mon amendement, qui pourra satisfaire chacun, vise à garantir que l’actualisation se matérialisera par un vote du Parlement, contrairement à l’actualisation de 2021. La disposition est importante pour renforcer le contrôle du Parlement sur l’évolution qu’apportera l’actualisation de la loi de programmation.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Monsieur Fernandes, il est exagéré de dire que vous ne voyez pas la couleur de la coconstruction. En revanche, nous ne vous avons jamais vu dans les groupes de travail pour préparer la LPM.

Ce débat sur l’association du Parlement est important. Je vous propose de retirer l’ensemble des amendements au bénéfice de celui du rapporteur, qui deviendra l’amendement de la commission de la défense en séance, puis au Sénat. Il semble logique que la commission dise comment elle souhaite être associée.

Les amendements DN690, DN799, DN415 et DN322 sont retirés.

La commission adopte l’amendement DN868.

 

Amendements DN87 de M. Laurent Jacobelli et DN567 de M. Jean-Charles Larsonneur (discussion commune).

Mme Caroline Colombier (RN). L’inflation aura consommé intégralement l’augmentation prévue lors de la première variation budgétaire, en 2024. Alors que la majorité des variations budgétaires est prévue à compter de 2028, une réactualisation en 2027 interviendrait trop tard pour corriger un éventuel effet délétère de l’inflation. C’est pourquoi il apparaît nécessaire d’actualiser plus tôt la LPM, en 2025.

M. Jean-Charles Larsonneur (HOR). Je retire mon amendement, par cohérence avec le précédent.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. L’année 2025 est une échéance trop proche pour une actualisation. Défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. L’amendement qui a été adopté précédemment est un bon équilibre. Avis défavorable.

L’amendement DN567 est retiré.

La commission rejette l’amendement DN87.

 

Amendement DN108 de Mme Caroline Colombier.

Mme Caroline Colombier (RN). Il s’agit de préciser que l’actualisation aura « notamment pour objet de consolider la trajectoire financière, l’évolution des effectifs, l’amélioration de la préparation opérationnelle et la disponibilité technique des équipements jusqu’en 2030. »

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Il ne faut pas encadrer l’actualisation : tous les sujets doivent être abordés. Dresser une liste revient à exclure certains éléments. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN200 de Mme Anna Pic.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Le présent amendement vise à inscrire dans la loi la nécessité d’élaborer un nouveau Livre blanc sur la défense, avant toute nouvelle actualisation. Cette élaboration semble un exercice incontournable : dans un contexte stratégique en rapide mutation, il faut définir les enjeux de nos capacités militaires et les défis liés à la sécurité.

Selon le rapport du Sénat sur les enseignements d’un an de guerre en Ukraine, la Revue nationale stratégique n’apporte qu’un éclairage partiel sur les défis de nos armées. Le Livre blanc représente un travail collectif de réflexion, pour associer chacun à la redéfinition de nos enjeux de défense.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Le travail que représente l’élaboration d’un Livre blanc semble disproportionné. Une actualisation de la Revue nationale stratégique est suffisante. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Avis très défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte les amendements rédactionnels DN829 et DN864 de M. Jean-Michel Jacques, rapporteur.

 

Amendement DN152 de M. Frank Giletti.

M. Frank Giletti (RN). L’amendement vise à préciser le contexte dans lequel l’actualisation est réalisée. Outre les enjeux de sécurité et les avancées technologiques, l’inflation, qui augmentera dans les prochaines années, doit entrer en compte dans les débats. Elle recouvre 7 % des 413 milliards de la LPM, soit près de 30 milliards sur la période.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. L’inflation est bien prise en compte dans la loi de programmation militaire, sur des bases annuelles. L’actualisation traduit avant tout une évolution du contexte stratégique mais n’aborde pas l’inflation. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. De façon globale, le champ de l’actualisation ne doit pas être limité. Après le rapport annexé, nous discutons de la partie normative et créons de la norme. Ces ajouts reviennent à enfermer : plus le texte est sobre, plus le Parlement, comme l’exécutif, est libre d’actualiser la loi. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN323 de Mme Martine Etienne.

Mme Murielle Lepvraud (LFI-NUPES). Par cet amendement, le groupe La France insoumise s’assure de prendre en compte les conséquences du changement climatique pour l’actualisation de la présente loi de programmation. Notre défi est d’inscrire l’activité humaine dans le cadre des limites planétaires.

Pour le relever, nous devons procéder à une bifurcation écologique de notre économie, changer la façon dont nous produisons, consommons et échangeons, pour nous mettre en harmonie avec la nature tout en garantissant des conditions de vie dignes pour tous. Pour cela, il faut planifier, grâce à ce que nous appelons la règle verte, qui concerne tous les secteurs, y compris la défense.

L’amendement permettra d’identifier les conséquences du bouleversement climatique sur les armées, notamment sur ses infrastructures critiques, de Brest à la Nouvelle-Calédonie en passant par les opérations extérieures, avec la base militaire de Djibouti. Le bouleversement climatique impacte et impactera profondément le fonctionnement des armées, jusqu’à modifier leur mission. Elles devront s’impliquer de plus en plus pour protéger le territoire français et les populations face aux variations extrêmes du climat. Depuis 1984, avec l’opération Héphaïstos, les armées sont mobilisées pour lutter contre les feux de forêt de grande ampleur dans le sud de la France.

Le présent projet de loi ne programme pas d’accélérer cette mobilisation, alors que les feux de forêt se multiplient et s’intensifient dans l’ensemble du territoire et durant bientôt toute l’année. L’amendement propose de revenir sur les importants manquements du texte, en intégrant la prise en compte de ces bouleversements lors de sa future actualisation.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Le changement climatique créera des mouvements qui affecteront le contexte stratégique et sécuritaire, de sorte qu’ils seront traités dans l’actualisation de la LPM. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Le réchauffement climatique et ses effets sont traités dans le rapport annexé, il n’est pas nécessaire de les faire figurer ailleurs. Si l’on commence à enrichir le texte, on pourrait ajouter d’autres contextes, notamment sanitaire. Tout dépend donc de la façon dont le sujet a été traité précédemment. Défavorable.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). J’entends la remarque. Le terme « sécuritaire » pourrait être remplacé par « stratégique », qui inclut les questions écologiques et climatiques.

M. Sébastien Lecornu, ministre. En effet, ce mot est adéquat car il englobe de nombreux aspects. Partie normative : pas de bavardages !

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Nous maintenons l’amendement en l’état et le redéposerons en séance après l’avoir retravaillé.

La commission rejette l’amendement.

 

Suivant l’avis du rapporteur, la commission rejette les amendements DN324 et DN325 de Mme Martine Etienne.

 

Elle adopte l’article 7 modifié.

 

 

Après l’article 7

 

Amendements identiques DN830 de M. Jean-Michel Jacques et DN131 de M. Jean-Pierre Cubertafon.

M. Jean-Michel Jacques (RE). L’amendement a pour objet de mettre en exergue, à l’instar de la distinction opérée au sein du titre Ier de la LPM pour la période 2019 à 2025, que les dispositions qui figurent après l’article 7 sont relatives au contrôle parlementaire de l’exécution de la loi de programmation militaire.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Avis favorable.

La commission adopte les amendements.

 

 

 

Article 8 : Rapport sur le bilan de l’exécution de la programmation

 

Amendements DN834 de M. Jean-Michel Jacques et DN213 de Mme Mélanie Thomin (discussion commune).

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Il a pour objet d’inclure, dans le rapport du Gouvernement sur le bilan de l’exécution de la programmation militaire, outre ce qui était déjà prévu dans la LPM 2019-2025 : un bilan d’exécution des objectifs concernant les effectifs et les réserves ; un bilan des grandes orientations de la politique industrielle de défense ainsi que des coopérations européennes en la matière ; un bilan des actions liées aux partenariats et aux alliances stratégiques ; un bilan de la politique environnementale du ministère.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Nous proposons également de détailler le contenu du rapport du Gouvernement, tout en étant ouverts à une rédaction différente. Nous souhaitons, sinon rétablir le niveau de détail exigé dans la LPM de 2018, du moins trouver le bon niveau de détail pour permettre au Parlement de se saisir de l’exécution de la nouvelle LPM.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Mon amendement prend en compte toutes les discussions ayant eu lieu en amont, contrairement au vôtre. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. L’amendement du rapporteur fait la synthèse de la plupart des demandes émanant des groupes. Il est donc plus complet.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). L’amendement du rapporteur est intéressant en ce qu’il précise le contenu du rapport. Je regrette toutefois qu’il en réserve l’examen aux seules commissions permanentes. Étant donné l’importance du sujet, l’ampleur des dépenses et le peu de temps dont nous disposons en hémicycle pour traiter de ces affaires, il aurait été plus intéressant que cet examen se fasse en séance, par exemple sous la forme d’une communication du Gouvernement, suivie d’un vote.

La commission adopte l’amendement DN834 et l’article 8 est ainsi rédigé.

En conséquence, l’amendement DN213 ainsi que les amendements DN285 de M. Julien Bayou, DN326 de M. Bastien Lachaud et DN747 de M. Jean-Marie Fiévet tombent.

 

 

Article 9 : Rapport sur les enjeux et l’évolution de la programmation

 

Amendement de suppression DN327 de M. Aurélien Saintoul.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Nous souhaitons la suppression de cet article car il prévoit la remise d’un rapport annuel qui remet en question le principe de la programmation pluriannuelle des crédits, le Gouvernement y présentant les principales évolutions adoptées en loi de finances initiale.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Si la loi de programmation a une vision globale, sur du long terme, il est cependant possible de revoir annuellement certains points, à la marge, sans que cela remette en cause le principe de la programmation. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Alors que vous passez votre temps à nous demander la plus grande transparence, vous voulez la suppression de ce rapport. Les évolutions en question peuvent porter sur de nombreux sujets : les programmes, l’inflation, les réserves, les ETP – équivalents temps plein… Avis défavorable.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Si le ministre nous réaffirme clairement que c’est juste une information au Parlement sur la manière dont il a exécuté la LPM, nous pourrions retirer l’amendement.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Si vous voulez le supprimer, faisons-le ! Cela fera un rapport de moins à rédiger pour les équipes du ministère. La majorité pourrait être joueuse et supprimer le rapport pour que vous puissiez ensuite mieux redéposer l’amendement en séance, pour mieux expliquer que le Gouvernement cache des choses !

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Je considère que la réponse du ministre est un engagement. Je retire donc l’amendement.

L’amendement est retiré.

 

Amendement DN748 de M. Jean-Marie Fiévet.

M. Jean-Marie Fiévet (RE). Il vise à s’assurer de la prise en compte de la dimension environnementale et énergétique dans la programmation budgétaire de la mission Défense. Alors que nos armées se sont d’ores et déjà engagées au profit de la transition écologique et énergétique, avec un premier plan d’action environnemental interarmées datant de 2007, il est nécessaire que l’exécution de la LPM poursuive cette logique.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Votre vigilance sur l’environnement est satisfaite par l’amendement que nous avons adopté à l’article 8. Demande de retrait.

M. Sébastien Lecornu, ministre. L’activisme dont vous faites preuve sur le sujet a été entendu par le rapporteur dans son amendement. Demande de retrait

L’amendement est retiré.

 

Amendements identiques DN562 de M. Jean-Charles Larsonneur et DN715 de Mme Anne Genetet.

M. Jean-Charles Larsonneur (HOR). Il vise à organiser chaque année un débat au Parlement sur l’actualisation en gestion de la loi de programmation militaire.

Mme Anne Genetet (RE). Nous souhaitons que, avant le 15 juillet de chaque année, le Gouvernement présente au Parlement un rapport retraçant les inflexions éventuelles à la trajectoire que nous nous sommes fixée.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Avis favorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Ces deux amendements me semblent équilibrés. Sagesse.

La commission adopte les amendements.

 

Elle adopte l’article 9 modifié.

 

 

Après l’article 9

 

Amendement DN75 de la commission des affaires étrangères, amendements identiques DN833 de M. Jean-Michel Jacques et DN203 de Mme Anna Pic (discussion commune).

M. Jean-Louis Bourlanges, président de la commission des affaires étragères. L’amendement DN75 a suscité une émotion qui ne me paraît absolument pas justifiée. Le souhait de la commission des affaires étrangères de disposer de tous les moyens d’information et de contrôle nécessaires ne met en aucune façon en cause la commission de la défense, qui n’est pas concernée par cet amendement.

La politique militaire d’un pays est faite pour mettre en œuvre sa politique étrangère. Nous avons fait le choix dans cette assemblée d’avoir deux commissions distinctes, ce qui pose des problèmes car les différentes crises qui ont eu lieu depuis deux ou trois ans ont toutes associé des enjeux militaires et des enjeux diplomatiques. Nous avons besoin, les uns et les autres, de disposer du maximum d’informations. Je sais que cela vous a un peu irrités mais c’est simplement le souhait de vos collègues des affaires étrangères de pouvoir faire leur métier en toute connaissance de cause. Je vous demande donc une modeste égalité d’information dans l’exercice du mandat qui est le nôtre. N’y voyez aucune manifestation d’hostilité ni d’impérialisme. Permettez-nous, chers collègues, de faire notre métier !

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. L’amendement DN833 vise à introduire un article relatif au pouvoir des commissions permanentes chargées de la défense dans leur mission de contrôle et d’évaluation de l’exécution de la loi de programmation militaire. Il rappelle notamment les pouvoirs d’investigation sur pièces et sur place des rapporteurs pour avis et des membres de ces commissions spécialement désignés pour contrôler l’application de la programmation.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Il s’agit de formaliser l’indispensable rôle des commissions du Parlement dans le contrôle des engagements pris dans le cadre de la LPM, et de rappeler que la programmation financière est susceptible d’amélioration, même à budget constant.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Il me paraît important de conserver la différence entre nos deux commissions, même si nos collègues des affaires étrangères seront toujours les bienvenus pour participer à nos travaux. Avis défavorable à l’amendement du président Boulanges.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Ce n’est pas à l’exécutif de définir les règles de contrôle du Parlement. Je m’en remets donc à la sagesse des commissions.

M. Jean-Louis Bourlanges président de la commission des affaires étrangères. Si votre commission devait suivre l’avis défavorable du rapporteur, ce serait une tristesse pour nous.

M. le président Thomas Gassilloud. Nos rapporteurs ne revendiquent pas l’examen du budget des affaires étrangères.

M. Jean-Louis Bourlanges président de la commission des affaires étrangères. Monsieur le président, ce que vous venez de dire est très grave : si la politique de défense est l’expression de la politique étrangère, l’inverse n’est pas vrai !

M. le président Thomas Gassilloud. C’est votre avis. Pour ma part, je pense que la défense du territoire national se fait indépendamment de la politique étrangère.

Mme Josy Poueyto (Dem). Le groupe Modem apporte son soutien à l’amendement du président Bourlanges. L’objectif n’est pas de fusionner les deux commissions mais de rappeler qu’elles peuvent être complémentaires dans leur travail de contrôle et d’évaluation.

Mme Anne Genetet (RE). Je rejoins le président Bourlanges sur un point : la politique de défense est au service de la politique étrangère de notre pays. Néanmoins, connaissant le volume de travail de nos deux commissions, je vois mal comment on pourrait les associer. De plus, il arrive très régulièrement que plusieurs commissions soient concernées par des sujets transversaux, ce n’est pas propre à celles des affaires étrangères et de la défense. Enfin, l’organisation de notre assemblée permet à chaque commission de se saisir pour avis. Ayant été auparavant commissaire aux affaires étrangères, je suis plus à l’aise avec le fonctionnement actuel.

Successivement, la commission rejette l’amendement DN75 et adopte les amendements identiques.

 

Amendement DN92 de M. Laurent Jacobelli.

M. Laurent Jacobelli (RN). Nous souhaitons pouvoir sortir d’une coopération européenne si cela devient nécessaire. Pour cela, il faut avoir une vision très claire de l’avancement des programmes concernés. Il est donc proposé de créer des jalons décisionnels permettant de faire le point à chaque phase du développement d’un projet et de prendre une décision sur sa poursuite.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Ces jalons décisionnels existent déjà dans le cadre de la coopération entre le ministère, la DGA – direction générale de l’armement – et les états-majors. Votre amendement est donc satisfait.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Votre formulation me paraît trop générale car les programmes en coopération européenne peuvent concerner de tout petits projets. Il serait préférable de cibler certains programmes dans le rapport annexé.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Je ne vois pas l’intérêt d’un tel amendement, dès lors qu’il ne donne pas au Parlement le pouvoir de contrôler les jalons. Si vous en laissez la responsabilité à l’exécutif, cela ne changera rien à la situation actuelle.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN204 de Mme Anna Pic.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Il vise à demander un rapport détaillant en quoi la LPM inscrit dans les faits la coopération européenne et en quoi elle participe à la stratégie française d’autonomie dans un nouveau contexte européen. Dans sa version actuelle, la LPM manque d’informations précises concernant la participation à des projets en coopération européenne. Nous souhaitons mettre en place des moyens de redéfinir rapidement nos moyens de coopération européenne.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Votre amendement est satisfait par celui que adopteé à l’article 8. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Avis défavorable car l’amendement du rapporteur permet de traiter ce sujet. Si cela concerne des sujets très précis, il faut le prévoir dans le rapport annexé.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Il serait intéressant de disposer d’une évaluation des programmes en coopération européenne financés par la LPM et d’organiser un débat et un vote au Parlement sur ce sujet.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN264 de Mme Anna Pic.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Il vise à demander un rapport évaluant l’état actuel ainsi que les perspectives de développement de la base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE). Avant d’élaborer une stratégie industrielle forte en matière de défense au niveau européen, nous souhaitons qu’une cartographie claire soit établie et que des scénarios de synergie et des partenariats soient envisagés, permettant de soutenir une véritable autonomie stratégique européenne.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Avis défavorable car le Gouvernement n’est pas le mieux placé pour faire de la prospective industrielle.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Même avis que précédemment.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Les perspectives de développement de la BITDE ne sont pas si roses que cela. Nous aurions intérêt à défendre notre BITD en créant des coopérations européennes avec des nations avec lesquelles nous travaillons déjà – Royaume-Uni, Italie, Allemagne. Il serait intéressant d’obtenir un rapport sur ce sujet de la part du Gouvernement puisqu’il est, selon le rapporteur, le mieux placé pour faire de la prospective.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN416 de M. Olivier Marleix.

M. Jean-Louis Thiériot (LR). Il vise à demander un rapport sur les grands programmes d’armement européens. Ce sujet est certes évoqué dans le rapport annexé mais il peut être utile de le demander dans la partie législative, même si la rédaction de cet amendement mériterait d’être revue.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Il est satisfait par mon amendement à l’article 8. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. C’est l’intérêt de l’amendement du rapporteur, qui remet dans la partie normative un certain nombre de points qui ont été évoqués hier et aujourd’hui. Votre amendement est donc satisfait.

L’amendement est retiré.

 

Amendement DN258 de Mme Isabelle Santiago.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Il a pour objet la remise d’un rapport sur la faisabilité d’un projet de char de nouvelle génération en partenariat avec des pays non engagés dans le programme MGCS franco-allemand, en particulier l’Italie et l’Espagne.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Il est satisfait par l’amendement adopté à l’article 8.

M. Sébastien Lecornu, ministre. L’intérêt du rapport annexé est d’éviter de remettre dans chaque article normatif tout ce qui figure déjà dans ledit rapport. Avis défavorable.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Les socialistes sont d’accord avec nous pour dire que le MGCS est mal engagé et qu’il est nécessaire de penser une alternative. Nous soutenons donc cet amendement, même si nous aurions souhaité élargir l’objet du rapport à l’étude d’une solution purement française.

M. Laurent Jacobelli (RN). Le nombre d’amendements déposés sur ce sujet montre que le doute est partagé par l’ensemble des groupes d’opposition. Cette inquiétude est de plus partagée par ceux qui portent l’uniforme et par la BITD. La LPM doit en tenir compte.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN259 de Mme Isabelle Santiago.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Il a pour objet la remise d’un rapport étudiant la possibilité de remplacer progressivement le char Leclerc par le char E-MBT.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Avis défavorable car des auditions régulières du ministre et des industriels peuvent permettre de satisfaire ce besoin.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Avis défavorable.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Nous n’avons pas de solution pérenne pour remplacer le char Leclerc. Si sa rénovation devrait accroître sa durée de vie, c’est maintenant que nous devons penser à l’avenir de notre cavalerie. Vous avez refusé l’amendement du groupe socialiste qui proposait une solution européenne ; la logique voudrait que vous soyez favorables à une solution française.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN216 de Mme Isabelle Santiago.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Nous demandons un rapport visant à évaluer l’opportunité de l’élaboration d’un second porte-avions et à chiffrer son coût de construction afin de pouvoir envisager toutes les perspectives d’économie d’échelle et d’amortissement des coûts.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Avis défavorable sur cette question déjà évoquée lors de la discussion du rapport annexé.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Je vous donne acte de la définition du modèle d’armée à partir des questions opérationnelles. Vous avez ainsi fait part de cet objectif qu’est le déploiement d’une division mais quel est-il s’agissant du porte-avions ? Est-ce la permanence à la mer ? Dans ce cas, nous avons besoin de deux porte-avions. D’ici à la revoyure de 2027 et l’évaluation d’une telle construction, vous pouvez prendre quelques minutes pour préciser la nature de cet objectif opérationnel.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN668 de Mme Josy Poueyto.

Mme Josy Poueyto (Dem). Nous demandons un rapport évaluant les conséquences de la sujétion militaire sur les carrières des conjoints dans le cadre des mobilités du soldat, sur leur pension de retraite ainsi que sur leur protection sociale. Ce rapport s’intéresse aux cas de mobilités en métropole, dans les outre-mer et à l’étranger.

Selon l’association d’épouses de militaires « Women Forces », 85 % des conjoints de militaires sont des femmes, ce qui montre combien cette problématique relève aussi de l’égalité femmes-hommes. Ces difficultés sont connues mais nous ne disposons pas d’un état des lieux précis de la situation.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Cette importante question a déjà été évoquée dans le rapport annexé. Nous porterons une attention particulière à la question du rapprochement des conjoints dans le cadre des mutations militaires. Demande de retrait, sinon, avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. C’est une question de fond sur laquelle le Haut Comité d’évaluation de la condition militaire (HCECM) a travaillé. La commission a-t-elle auditionné l’un de ses membres ? Le rapport du HCECM est remis au Président de la République, chef des armées, puis au ministre des armées et au chef d’état-major des armées (Cema). Je suis favorable à ce que le Haut Comité puisse travailler avec votre commission et le Parlement.

Je ne souhaite pas de remise de rapport dans la partie normative du texte mais il est possible de réfléchir, d’ici à la séance publique, à l’inclusion de la question de la sujétion militaire dans le rapport annexé en renvoyant aux travaux du HCECM.

M. le président Thomas Gassilloud. Le HCECM, qui conseille en effet le Président de la République, m’a également remis son rapport.

Mme Josy Poueyto (Dem). La question précise que j’ai soulevée, qui excède celle du rapprochement entre conjoints, l’est-elle aussi dans le rapport du HCECM ? Je n’en suis pas certaine.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Nous allons regarder ce qu’il en est dans la revue annuelle du Haut Conseil.

L’amendement est retiré.

 

Amendement DN317 de Mme Martine Etienne.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Un rapport doit être remis sur les conséquences de l’inflation sur le financement des armées afin de les prémunir de toute baisse éventuelle de leur budget en cas d’augmentation continue et généralisée.

Ce projet de loi tient compte, certes, de l’augmentation de l’inflation, qui pèsera à hauteur de 30 milliards sur un budget de 413 milliards, mais le montant des deux premières marches est identique à celui de 2018.

Il s’agit d’un amendement de repli puisque nos amendements précédents sur la prise en compte de l’inflation dans les marches n’ont pas été adoptés. Nous vérifierons ainsi si nous avions tort ou raison, si l’inflation a eu ou non des conséquences sur l’exécution de la loi de programmation militaire.

Je rappelle que vous avez refusé de prendre en compte l’inflation sur le coût des matières premières alors qu’il explose, notamment pour le service d’infrastructure de la défense (SID).

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. L’article 9 prévoit déjà un rapport sur l’évolution de la programmation budgétaire, qui fera état des conséquences de l’inflation. Avis défavorable.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Confirmez-vous que ce rapport prendra bien en compte les questions liées à l’inflation et que nous disposerons de toutes les informations nécessaires ? Si tel est le cas, je vous fais confiance et je retire l’amendement.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Le projet de loi de finances permettra également de disposer de toutes les informations nécessaires.

L’amendement est retiré.

 

L’amendement DN684 de M. Jean-Louis Thiériot est retiré.

 

Amendements DN420 de M. Olivier Marleix et DN571 de M. Jean-Louis Thiériot (discussion commune).

M. Jean-Louis Thiériot (LR). Nous proposons la remise d’un rapport afin de nous assurer que les recettes d’exécution extrabudgétaires seront bien garanties suite à la décision prise par notre commission après avis favorable du ministre. Le second amendement va dans le même sens.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Votre demande me paraît satisfaite par les notes d’exécution budgétaire de la Cour des comptes. Je vous suggère donc de retirer ces amendements.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Comme je l’ai indiqué au président Marleix, tout cela figure dans les PAP – projets annuels de performances – et les RAP – rapports annuels de performances. Les recettes extrabudgétaires ne sont pas une nouveauté, et une sécurisation a été adoptée. Votre demande étant satisfaite, j’émets une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.

Les amendements sont retirés.

 

Suivant l’avis du rapporteur, l’amendement DN206 de Mme Anna Pic est rejeté.

 

Amendement DN202 de Mme Anna Pic.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Nous demandons un rapport sur les voies et moyens qui permettraient d’exclure du calcul du déficit public les dépenses et investissements en matière de défense, notamment au regard des traités et règlements européens.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. C’est une compétence européenne. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Même avis.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). J’aimerais bien savoir en quoi c’est une compétence européenne. Ce que demandent nos collègues socialistes, c’est que le Gouvernement essaie de trouver les voies et moyens de désobéir, d’une certaine manière, aux règles européennes. Je ne peux qu’être favorable à une telle volonté.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Cela doit faire l’objet, excusez-moi, d’une négociation européenne.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN257 de Mme Isabelle Santiago.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport examinant la possibilité de créer une ligne budgétaire dédiée à la transition écologique dans le cadre de la mission Défense. Nous faisons ainsi écho à une mission d’information menée par Mme Santiago et M. Fiévet. C’est une mesure essentielle pour mettre en application la volonté, que j’imagine commune, de préserver l’environnement, y compris dans nos armées et sur nos bases militaires.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. C’est présent dans toutes les lignes budgétaires du ministère, je me suis déjà exprimé à ce sujet. Créer une ligne spécifique reviendrait à faire de l’affichage.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Je vous rejoins sur ce point. La lutte contre le réchauffement climatique et l’engagement des armées d’atteindre l’objectif, nécessaire, de sobriété énergétique doivent s’inscrire dans l’ensemble des programmes et des lignes budgétaires. Je crains qu’il ne soit contre-productif de se limiter à une seule ligne.

La commission rejette l’amendement.

 

 

Article 10 : Abrogation du titre Ier de la LPM 2019-2025

 

Amendement de suppression DN328 de M. Bastien Lachaud.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). À partir du moment où l’on considère qu’il n’était pas urgent d’examiner une nouvelle LPM, il n’est pas davantage urgent d’abroger la loi précédente.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Ne refaisons pas ce débat. Avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Un amendement qui aurait présenté une proposition de format d’armées et d’alliances pour la France aurait été préférable, mais supprimer ce qui existe résume bien, au fond, la politique de La France insoumise. Avis défavorable.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Je pensais, Monsieur le ministre, que vous aviez compris certaines de nos propositions, notamment au sujet de la dissuasion. Le débat en séance, à l’occasion duquel nous déposerons des amendements supplémentaires, devrait vous permettre de mieux saisir notre programme et d’avoir une discussion de fond sur ces questions.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’article 10 non modifié.

 

Article 11 : Assurer la continuité des missions de l’Ordre de la Libération

 

Compte tenu de l’avis défavorable du rapporteur, l’amendement DN134 de M. Jean-Pierre Cubertafon est retiré.

 

La commission adopte l’article 11 non modifié.

 

Article 12

 

Amendement DN855 de M. Jean-Michel Jacques.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. C’est un amendement miroir, qui reprend la rédaction du nouvel article L. 4123‑2‑2 du code de la défense, relatif à la réparation intégrale des préjudices subis par les réservistes.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement DN332 de M. Bastien Lachaud.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Il est tard et nous allons vite, mais j’aimerais que nous prenions vraiment le temps de traiter de la question, importante, de nos blessés. Nous demandons la suppression de l’alinéa 8 de cet article, que je trouve particulièrement injuste : il vise à entériner la non-rétroactivité des bonnes mesures prises par le Gouvernement dans ce domaine. Je trouve regrettable que des personnes, parce qu’elles ont été blessées avant l’adoption de cette loi, ne puissent pas bénéficier des mesures de justice qui sont prévues. Il faut élargir le champ d’application de ces dernières pour qu’elles s’appliquent à l’ensemble des personnes blessées au service de la France. Je sais que vous allez nous dire que la chose a été jugée, mais ce que la loi a fait, elle peut le défaire. Nous devons regarder ce qu’il est possible de faire – il ne suffit peut-être pas de supprimer l’alinéa 8 – pour garantir l’égalité de toutes et tous devant cette loi et surtout face aux blessures.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Cet article n’est pas rétroactif et la réparation intégrale qui est prévue ne s’appliquera qu’aux demandes n’ayant pas donné lieu à une décision passée en force de chose jugée.

M. Sébastien Lecornu, ministre. S’agissant des blessures subies avant la promulgation de la loi, le dispositif de réparation s’appliquera. Un problème se pose pour les faits ayant donné lieu à une décision passée en force de chose jugée, avec des exceptions concernant les faits non prescrits et les premières demandes non définitivement examinées. Il s’agit d’une question d’ordre constitutionnelle, qui a fait l’objet d’un travail en amont avec le Conseil d’État de manière à retenir la meilleure formulation. Demande de retrait – non que je sois en désaccord avec l’objectif de l’amendement mais il convient de veiller à la solidité juridique du dispositif.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Si votre seule crainte est une décision du Conseil constitutionnel, je pense que l’ensemble des groupes peuvent s’engager à ne pas le saisir ! Au pire, prenons le risque. Adoptons cet amendement, et voyons collectivement d’ici à la séance ce qu’on peut faire pour résoudre le problème.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’article 12 modifié.

 

 

Article 13

 

La commission adopte l’article 13 non modifié.

 

Article 14

 

L’amendement DN135 de M. Jean-Pierre Cubertafon est retiré.

 

Amendement DN268 de Mme Isabelle Santiago.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Cet amendement du groupe socialiste vise à réparer le préjudice que risquent de subir les militaires qui cessent temporairement leur travail pour élever leur enfant dans le cadre d’un congé parental. Nous souhaitons qu’ils conservent l’intégralité de leurs droits à avancement, dans la limite d’une durée de cinq ans pour l’ensemble de leur carrière.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Rassurez-vous, le droit à l’avancement des militaires placés en congé parental n’est pas supprimé par le projet de loi. Si la mention est supprimée de l’article L. 4138-14 du code de la défense, elle est insérée à l’article L. 4138-17 du même code, comme le prévoit l’alinéa 11 de l’article 14 du PLPM. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Même avis : l’amendement est satisfait.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte l’amendement rédactionnel DN905 de M. Jean-Michel Jacques, rapporteur.

 

Amendement DN525 de M. Jean-Charles Larsonneur.

M. Jean-Charles Larsonneur (HOR). Nos compatriotes qui vivent à l’étranger constituent pour la réserve un vivier précieux, étant susceptibles de collaborer à diverses activités : assistance aux missions militaires de défense, participation au soutien des forces prépositionnées, rôle de liaison dans les salons d’armement… Or ils font depuis longtemps les frais d’une bizarrerie administrative : ils ne peuvent être engagés directement dans le pays où ils résident. Ils sont obligés d’être affectés fictivement en métropole pour être ensuite envoyés en mission dans leur pays de résidence.

Le projet de loi prévoit une réserve « plus nombreuse et mieux équipée, pleinement intégrée à l’active et polyvalente dans ses missions », avec un objectif ambitieux de doublement de ses effectifs. Dans cette optique, supprimer cette bizarrerie serait une bonne chose.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Sagesse.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Le problème avait été identifié par le groupe de travail sur l’avenir de la réserve militaire et la rédaction que vous proposez paraît satisfaisante. Avis favorable.

M. Christophe Blanchet (Dem). Je confirme qu’il en a été question au sein du groupe de travail. Je remercie notre collègue Larsonneur pour son amendement.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement DN269 de Mme Isabelle Santiago.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Vous affirmez vouloir élargir les possibilités d’affectation des réservistes, y compris à l’étranger, mais, dans le même temps, vous supprimez la possibilité pour un volontaire engagé dans la réserve opérationnelle d’exercer ses fonctions dans un établissement public à caractère scientifique, culturel et professionnel. N’est-ce pas contradictoire ?

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel ainsi que les établissements publics administratifs sont compris dans la catégorie des établissements publics inscrite à l’article 14 du projet de loi. L’amendement est donc satisfait. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Recourir à la catégorie générique des « établissements publics » permet de toucher l’ensemble de la galaxie, par exemple les établissements publics de coopération culturelle (EPCC). Si l’on commence à préciser leur nature, on exclura tous ceux qu’on n’aura pas cités. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Je maintiens l’amendement.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Vous souhaitez donc exclure les réservistes qui souhaitent servir dans un EPCC ?

Mme Mélanie Thomin (SOC). L’éclairage qui m’a été apporté n’est pas suffisant pour que je retire l’amendement.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je viens de vous expliquer le droit. Si vous précisez la nature des établissements publics, vous excluez ceux qui ne sont pas cités. Vous souhaitez donc, au nom du groupe socialiste, que les réservistes ne participent pas à un EPCC.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Ce n’est absolument pas ma conception de la réserve. Je souhaite en discuter avec mon groupe. Je maintiens l’amendement et nous reprendrons ce débat en séance.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN340 de M. Bastien Lachaud.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Avec cet amendement, nous voulons encadrer la nomination et l’avancement des réservistes spécialistes, en cohérence à la fois avec leurs compétences et avec l’évolution des militaires d’active.

Il nous semble juste de permettre aux réservistes spécialistes d’avancer dans leur grade, au même titre que les militaires de carrière et les réservistes opérationnels. L’avancement vient récompenser et signifier une montée en compétences et une certaine loyauté envers l’institution militaire. Cependant, afin d’éviter des nominations complaisantes qui récompenseraient plutôt des amitiés que des compétences réelles, nous proposons que cet avancement soit soumis à ces critères d’âge et de compétences.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. L’alinéa 28 de l’article 14 du projet de loi précise bien que les réservistes spécialistes peuvent être promus dans des conditions définies par décret en Conseil d’État lorsque leur activité dans la réserve opérationnelle les fait progresser en niveau d’expertise et de responsabilité. Je pense que vos craintes ne sont pas fondées. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Cette question renvoie à la confiance que l’on a dans le commandement et dans les directeurs des ressources humaines (DRH) de chaque armée. Comme je suis ministre, je suis passé, pour des raisons juridiques et parce que je n’exerce plus de mission d’encadrement militaire, du statut de réserviste opérationnel (R01) à celui de réserviste spécialiste. L’adoption de votre amendement créerait de la rigidité, alors que l’idée est d’avoir de la souplesse ; sur le critère de l’âge – même si je ne suis pas le mieux placé pour en parler –, on peut rencontrer des problèmes avec, par exemple, un bon combattant cyber âgé de 25 ans qui peut être un petit génie : on va vouloir le faire entrer dans la réserve et il recevra des galons de lieutenant ou de capitaine alors qu’il a peut-être un savoir-faire qui pourrait le propulser commandant et qu’une asymétrie se créera par rapport à son âge.

Je tiens à cette souplesse, même si tout ne doit pas être possible bien entendu. La réserve experte ne peut pas se massifier, elle possède par définition quelque chose de rare. Le commandement doit pouvoir employer facilement des personnes qui possèdent un savoir-faire civil utile pour lui. Tel que votre amendement est rédigé, on se demande quel sera le critère : le niveau de diplôme ? Il faudra avoir un master, un doctorat, l’agrégation ? Votre proposition instille de la rigidité au système.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). J’entends vos arguments, ainsi que ceux du rapporteur, mais le problème est inverse et lié aux promotions trop rapides. Je pense à quelqu’un d’assez célèbre, le lieutenant-colonel Benalla, qui a obtenu son grade à 25 ans. Accroître l’encadrement des évolutions pour éviter ce genre de dérive me paraît opportun.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je suis tellement de bonne foi que je n’ai pas vu le coup arriver. Il faut faire confiance au commandement ; s’il y a des abus, celui-ci impose la discipline, il n’est pas nécessaire d’insérer une norme législative. Cela irait en outre à l’inverse de nos efforts pour attirer et fidéliser. L’avis est défavorable.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). J’entends, Monsieur le ministre, mais je pense aux militaires de carrière : le saint-cyrien, lui, ne deviendra pas colonel à 25 ans, même s’il est aussi brillant que l’officier spécialiste.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Je peux vous rassurer, les textes le prévoient déjà : quand on est dans la réserve experte, on ne peut pas encadrer d’autres militaires – d’ailleurs, les petits chevrons disparaissent des fourreaux des gendarmes – et on sort du cadre de commandement classique sur le terrain. Je compte sur la réserve pour limiter les externalisations et le recours à des cabinets de conseil.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement DN341 de M. Aurélien Saintoul.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Il vise, dans le même esprit, à encadrer l’avancement des réservistes spécialistes.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Nous avons eu le débat, l’avis est défavorable.

M. Sébastien Lecornu, ministre. J’espère avoir éclairé la commission sur ce beau sujet lié à la doctrine d’emploi des forces à l’avenir.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements DN342 de M. Bastien Lachaud et DN270 de Mme Isabelle Santiago (discussion commune).

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Les réservistes peuvent actuellement servir cinq jours par an sans l’autorisation de leur employeur. Le projet de loi prévoit d’augmenter ce quota à dix jours : si nous cherchons réellement à développer une économie de guerre, ce nombre nous paraît trop faible et les employeurs pourraient faire le sacrifice de vingt jours. Il s’agit, d’une certaine manière, d’un amendement de cohérence avec les objectifs du Gouvernement.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Nous souhaitons faire passer le nombre de jours de dix à douze. Notre raisonnement est pragmatique et repose sur l’idée de consacrer une journée par mois à la réserve.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Ce choix de dix jours permet d'augmenter la disponibilité des réservistes, mais également de l'aligner sur celle des réservistes opérationnels de la police nationale, qui est de dix jours depuis le 24 janvier 2022

M. Sébastien Lecornu, ministre. Nous avons en effet choisi dix jours par souci d’homogénéisation. Sous le contrôle de celles et de ceux qui n’ont pas boycotté le groupe de travail sur les réserves, les partenaires sociaux et les associations de réservistes ont fait part d’un problème de progressivité. Je m’en tiens à ce qui est sorti de ce groupe par respect pour le travail qui y a été fait.

M. Christophe Blanchet (Dem). Ayant participé aux six réunions du groupe de travail, je suis convaincu que passer à douze ou à vingt jours recèle plusieurs dangers. Nous voulons inciter les TPE et les PME à embaucher des réservistes, mais une très petite entreprise de dix salariés mourra si on lui enlève un employé pendant vingt jours. C’est peut-être possible pour les grands groupes, mais pas pour les autres structures. L’adoption de l’amendement tuerait toute perspective de doubler les réserves dans les entreprises de toutes les tailles.

La commission rejette successivement les amendements.

 

La commission adopte l’amendement rédactionnel DN906 de M. Jean-Michel Jacques, rapporteur.

 

Amendements DN343 de M. Aurélien Saintoul et DN617 de M. Christophe Blanchet (discussion commune).

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Il s’agit d’augmenter la durée maximale de convocation des militaires de la réserve opérationnelle de deuxième niveau (RO2) pour la porter à cinquante jours, soit dix jours par an puisqu’ils sont convocables pendant cinq ans. L’objectif est de garantir l’entretien des compétences et des aptitudes opérationnelles. Avec dix jours sur une période de cinq ans, on est vraiment très loin du compte : compte tenu de l’évolution des armées, une durée de deux jours par an est loin d’être à la hauteur des enjeux, d’autant que la RO2 constitue un vivier essentiel pour doubler les effectifs de la réserve.

M. Christophe Blanchet (Dem). Le texte prévoit la possibilité de convoquer les réservistes RO2 pour une durée qui ne peut excéder dix jours pendant une période de cinq ans. Le risque est que les réservistes ne se déclarent pas à leur entreprise. L’amendement fixe la durée à cinq jours par an pendant cinq ans parce que la loi les autorise à demander à leur entreprise de bénéficier de ces cinq jours : le but est d’éviter qu’ils restent invisibles et de les aider à s’intégrer totalement à la réserve.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. L’adoption du premier amendement ferait porter une charge trop importante à un ancien militaire passé à la RO2, notamment pour son employabilité. S’il souhaite en faire davantage, il pourra toujours s’engager dans la réserve opérationnelle de premier niveau. L’avis est donc défavorable. S’agissant du deuxième amendement, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Le débat est très intéressant sur ce sujet de fond. Celui qui a envie d’en faire plus y parviendra toujours. Le texte dispose que l’on ne peut pas excéder dix jours dans le cadre de la RO2, mais il suffit de passer en RO1 pour dépasser cette durée. Je n’avais pas vu l’argument évident du député Blanchet sur l’homogénéisation derrière lequel je me range. Je vous demande de retirer votre amendement, Monsieur Lachaud, au profit de celui de M. Blanchet auquel je donne un avis favorable. Le sujet reviendra dans une prochaine LPM, me semble-t-il.

M. Bastien Lachaud (LFI-NUPES). Je vais me ranger aux arguments du député Blanchet et retirer mon amendement en faveur du sien, en présumant que la révision de la LPM en 2027 sera l’occasion de remettre le sujet sur la table.

L’amendement DN343 est retiré.

La commission adopte l’amendement DN617.

 

La commission adopte l’amendement rédactionnel DN907 de M. Jean-Michel Jacques, rapporteur.

 

L’amendement rédactionnel DN908 de M. Jean-Michel Jacques, rapporteur, est retiré.

 

Amendement DN909 de M. Jean-Michel Jacques.

M. Jean-Michel Jacques, rapporteur. Il propose d’intégrer, parmi les informations publiées dans la déclaration de performance extrafinancière annuelle des entreprises concernées, des éléments relatifs à leurs actions en faveur du lien entre la nation et l’armée, et de leur soutien à l’engagement dans les réserves. Les réservistes sont en effet de véritables atouts pour les entreprises et en valorisant leur engagement, celles-ci améliorent leur valeur immatérielle.

M. Sébastien Lecornu, ministre. Cette mesure est également le fruit de la réflexion du groupe de travail. On touche là à un combat culturel : la responsabilité sociale des entreprises (RSE) a produit des avancées, et l’on considère aujourd’hui que l’engagement des salariés a une valeur pour la société, pour la nation et pour l’entreprise. J’ai été frappé par le besoin de reconnaissance exprimé par les syndicats de salariés et d’employeurs : l’amendement y répond, donc j’émets un avis favorable.

M. Christophe Blanchet (Dem). Je confirme qu’à chacune des six réunions du groupe de travail, la quarantaine d’intervenants ont tous décliné le mot « reconnaissance » sous toutes ses formes. Je soutiens évidemment l’amendement car les réservistes ont besoin de reconnaissance.

La commission adopte l’amendement.

 

Elle adopte l’article 14 modifié.

 

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La séance est levée à une heure dix.

 

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Membres présents ou excusés

Présents. - M. Jean-Philippe Ardouin, M. Xavier Batut, M. Mounir Belhamiti, M. Pierrick Berteloot, M. Christophe Bex, M. Christophe Blanchet, M. Yannick Chenevard, Mme Caroline Colombier, M. François Cormier-Bouligeon, Mme Martine Etienne, M. Emmanuel Fernandes, M. Jean-Marie Fiévet, Mme Stéphanie Galzy, M. Thomas Gassilloud, Mme Anne Genetet, M. Frank Giletti, Mme Charlotte Goetschy-Bolognese, M. José Gonzalez, M. Laurent Jacobelli, M. Jean-Michel Jacques, M. Loïc Kervran, M. Bastien Lachaud, M. Fabien Lainé, M. Jean-Charles Larsonneur, Mme Anne Le Hénanff, Mme Patricia Lemoine, Mme Murielle Lepvraud, Mme Delphine Lingemann, Mme Lysiane Métayer, M. Emmanuel Pellerin, Mme Josy Poueyto, Mme Natalia Pouzyreff, M. Aurélien Saintoul, M. Philippe Sorez, M. Bruno Studer, M. Michaël Taverne, M. Jean-Louis Thiériot, Mme Sabine Thillaye, Mme Mélanie Thomin, Mme Corinne Vignon

Excusés. - M. Steve Chailloux, Mme Cyrielle Chatelain, M. Yannick Favennec-Bécot, M. Christian Girard, M. Olivier Marleix, Mme Valérie Rabault, M. Fabien Roussel