Compte rendu

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

 

–  suite de l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2023 (n° 273) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général).              2

  présences en réunion...........................52

 


Mercredi
5 octobre 2022

Séance de 15 heures

Compte rendu n° 05

session ordinaire de 2022-2023

 

 

Présidence de

 

M. Éric Coquerel,

Président

 

 


  1 

La commission poursuit l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2023 (n° 273) (M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général)

Après l’article 3 (suite)

Amendements I-CF211 de Mme Véronique Louwagie, I-CF363 de M. Marc Le Fur, I-CF28 de Mme Véronique Louwagie, I-CF86 de Mme Marie-Christine Dalloz, I-CF43 de Mme Véronique Louwagie, I-CF1406 de Mme Aurore Bergé, I-CF1233 M. Grégoire de Fournas (discussion commune).

Mme Véronique Louwagie (LR). L’amendement I-CF211 du groupe Les Républicains vise à réduire la fiscalité sur les donations afin de faciliter la transmission des patrimoines.

Sous l’effet de l’allongement de la durée de vie, l’âge moyen auquel on hérite ne cesse de reculer – 50 ans aujourd’hui et 58 ans en 2050. L’amendement a pour objet, d’une part, d’abaisser de quinze à dix ans le délai entre deux donations afin de pouvoir bénéficier d’un abattement ; d’autre part, de relever de 100 000 à 150 000 euros ledit abattement. Autrement dit, tous les dix ans, chacun des parents ou des grands-parents pourrait donner jusqu’à 150 000 euros à ses enfants ou petits-enfants sans avoir à payer de droits de donation.

Mme Marie-Christine Dalloz (LR). Pour soutenir les jeunes générations, il est préférable de faciliter la transmission intergénérationnelle par le biais de la fiscalité plutôt que de multiplier les aides. C’est le sens de l’amendement I-CF86.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Le I-CF1406 est un amendement d’appel, destiné à rappeler notre attachement à la promesse du Président de la République d’augmenter les abattements sur les droits de donation et de succession en ligne directe et indirecte.

Nous souhaitons que cette promesse soit tenue avant la fin du quinquennat, en donnant la priorité aux successions en ligne indirecte qui souffrent d’une grande disparité avec le régime applicable en ligne directe.

La hausse de l’espérance de vie incite à privilégier les donations. En outre, comme le montre le rapport « L’impôt sur les successions dans les pays de l’OCDE », la France est le troisième pays, après la Belgique et la Corée du Sud, dans lequel les recettes tirées des successions sont les plus importantes. De surcroît, les taux marginaux d’imposition sur les donations et les successions y sont parmi les plus élevés.

Dans l’attente d’une discussion avec le Gouvernement, je retire l’amendement.

M. Philippe Lottiaux (RN). L’amendement I-CF1233 tend à relever l’abattement sur les donations en ligne directe de 100 000 à 150 000 euros. En facilitant la transmission des entreprises, cette mesure peut aider à préserver la viticulture familiale, secteur dans lequel de nombreuses exploitations sont aujourd’hui reprises par des grands groupes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les amendements soulignent la nécessité de mener une réflexion sur la modernisation de la fiscalité des successions et des donations.

Il faut à la fois adapter les règles à l’évolution des familles ainsi qu’à la hausse de l’espérance de vie, veiller à leur effet redistributif compte tenu des inégalités croissantes liées au patrimoine hérité et garantir un rendement fiscal.

Notre majorité s’est engagée à adopter une réforme globale des droits de succession. Toutefois, les marges financières ne sont pas suffisantes pour prendre dès 2023 des mesures dont le coût pour le budget de l’État ne serait pas négligeable.

J’émets donc un avis défavorable mais j’invite à un travail collectif pour adapter notre droit aux évolutions de la société.

M. le président Éric Coquerel. Je suis opposé à toute réforme ayant pour but de faciliter encore la transmission.

Depuis trente ans, non seulement l’impôt est de moins en moins redistributif et préserve les revenus du capital, mais la part de l’héritage dans le patrimoine des grandes fortunes est toujours plus importante, et ce dans tous les pays industrialisés – les chiffres sont effarants. Les inégalités ne cessent de croître et la concentration des richesses entre les mains de quelques-uns est de plus en plus forte. La noblesse d’argent succède à la noblesse de sang. C’est insupportable.

On n’est pas responsable de la famille dans laquelle on naît. Il n’y a pas lieu de donner de tels avantages dès la naissance. L’organisation des successions a, en outre, été largement facilitée ces dernières années, notamment grâce aux donations.

La réforme que vous envisagez s’affranchit de l’égalité et des principes républicains. C’est la raison pour laquelle je m’opposerai aux amendements qui obéissent à cette philosophie.

Mme Lise Magnier (Dem). Nous soutenons évidemment l’engagement pris par le Président de la République devant les Français d’alléger la fiscalité sur les donations et les successions. J’entends l’argument du coût pour les finances publiques de notre pays. Mais, à choisir entre deux mesures coûteuses, sommes-nous certains que la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE) est la bonne priorité ?

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Aujourd’hui, 84 % des successions sont exonérées de droits. Est-il pertinent d’augmenter encore la proportion ? Si la fiscalité sur les successions en ligne indirecte pose en effet problème, la mesure permettant de donner 150 000 euros tous les dix ans serait loin de concerner tout le monde.

Avant toute réforme, nous devrions disposer d’un état des lieux pour savoir précisément quelles sont les personnes exonérées. Vous faites croire aux plus modestes qu’ils pourraient être taxés pour faire oublier que vous aidez les plus riches à s’enrichir encore.

Le groupe GDR s’opposera à ces amendements.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Je mets de côté le marchandage entre la majorité et Les Républicains auquel ces amendements participent.

La moitié des Français héritent de moins de 70 000 euros et nombre d’entre eux n’héritent de rien du tout.

En période de crise, il faut réfléchir au message que l’on adresse. Dans le cas de ces amendements, c’est celui du renforcement des inégalités, une tendance lourde depuis une trentaine d’années. En 1985, le patrimoine des plus fortunés représentait 15 % du patrimoine total ; en 2015, 25 % du patrimoine total est accaparé par les 1 % les plus riches.

Pendant la campagne présidentielle, nous proposions d’exonérer les successions dont l’actif est inférieur à 120 000 euros. En tout cas, le relèvement de l’abattement ne concerne absolument pas les classes populaires.

Les Républicains ont le mérite d’être cohérents dans leur démarche. Cette mesure est pour eux une revendication historique. En revanche, le message que la majorité envoie aux Français est catastrophique.

Mme Sophie Taillé-Polian (Écolo-NUPES). Nous sommes évidemment opposés à ces amendements qui visent à alléger les droits de succession des plus riches.

Une réforme juste de l’impôt sur les successions consisterait à supprimer toutes les niches qui ne profitent qu’aux 1 % les plus riches. Cela rapporterait plus de 20 milliards d’euros selon le Conseil d’analyse économique. La note « Repenser l’héritage » propose de nombreuses solutions pour alléger l’impôt sur les successions pour les classes moyennes et l’alourdir pour les plus riches. Aujourd’hui, c’est une société de rente qui s’installe.

M. Alexandre Holroyd (RE). Nous devons atténuer les disparités entre ligne directe et ligne indirecte sans accroître encore les avantages pour les catégories sociales les plus favorisées. La solution ne consisterait-elle pas à fixer un plafond pour l’ensemble des abattements ? Qu’en pensez-vous, monsieur le rapporteur général ?

Mme Véronique Louwagie (LR). Nous retrouvons là le clivage traditionnel entre la gauche et la droite. Je m’adresse à la majorité dont je n’ai pas bien compris la position. Vous savez très bien qu’une réforme de cette nature doit être faite dans les premiers mois du quinquennat. La refuser aujourd’hui, c’est y renoncer.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Évitons les caricatures. Les Français, quelle que soit leur catégorie sociale, sont très attachés à la possibilité de léguer leur patrimoine à leurs descendants.

Nous souhaitons une réforme globale, pas seulement paramétrique, qui prenne en considération l’évolution des structures familiales et de l’espérance de vie. Nous ne sommes pas prêts pour la faire en 2023, d’autant que nous sommes contraints par l’objectif de ramener le déficit à 5 %.

L’idée de M. Holroyd est intéressante, elle devra être versée à la réflexion.

L’amendement I-CF1406 est retiré.

La commission rejette successivement les amendements I-CF211, I-CF363, I-CF28, I-CF86, I-CF43 et I-CF1233.

Amendement I-CF1145 de Mme Charlotte Leduc.

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). Il s’agit d’instaurer une juste taxation de l’héritage, lequel est un facteur de plus en plus déterminant dans la constitution du patrimoine dans les pays industrialisés, ce qui contribue à creuser les inégalités.

L’héritage moyen des 0,1 % les plus riches représente environ 180 fois l’héritage médian tandis que 50 % des individus héritent de moins de 70 000 euros, et parmi eux, nombreux sont ceux qui n’héritent de rien.

L’amendement vise à renforcer la progressivité du barème, à plafonner à 12 millions d’euros l’actif d’une succession et à instaurer un abattement unique de 120 000 euros par enfant et par parent.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF1145.

Amendements identiques I-CF138 de Mme Marie-Christine Dalloz, I-CF200 de Mme Émilie Bonnivard, I-CF1242 M. Grégoire de Fournas.

Mme Marie-Christine Dalloz (LR). L’amendement a pour objet de rétablir le mécanisme d’indexation des plafonds d’exonération de droits qui s’appliquait jusqu’en 2012. François Hollande l’a supprimé, considérant que la transmission du patrimoine n’était pas digne de soutien.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements identiques I-CF138, I-CF200 et I-CF1242.

Amendement I-CF145 de M. Bryan Masson.

M. Bryan Masson (RN). Il s’agit de donner un coup de pouce raisonnable aux 60 % de familles françaises propriétaires de leur logement. La maison familiale est souvent le fruit d’une vie entière de travail et devient un patrimoine qui se transmet aux générations suivantes.

Nos parents ou nos grands-parents ont souvent acheté des terrains ou des biens à des coûts largement inférieurs à leur valeur vénale actuelle. Aujourd’hui, l’achat d’un terrain relève souvent de l’exploit pour bien des familles.

L’amendement vise à exonérer les héritiers en ligne directe de droits de succession sur les biens immobiliers du défunt jusqu’à 300 000 euros. L’objectif est de leur éviter d’avoir à vendre la maison familiale dans laquelle ils ont grandi pour s’acquitter des droits.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF145.

Amendements I-CF603 de M. Fabien Roussel, I-CF1142 de Mme Sophie Taillé-Polian. I-CF1158 de M. Éric Coquerel et I-CF1063 de M. Grégoire de Fournas (discussion commune).

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). L’amendement I-CF603, issu d’une proposition de loi du groupe GDR, vise à réformer la fiscalité des successions dans un double objectif : protéger les héritages modestes et moyens, quelle qu’en soit l’origine ; faire participer les contribuables les plus aisés qui parfois multiplient les donations pour échapper à l’impôt.

Il vise à calculer les droits de succession non plus sur les flux ponctuels mais sur le stock total reçu par une personne, et ce d’où qu’il vienne, avec un barème plus progressif. L’optimisation fiscale par le biais des donations ne sera ainsi plus possible.

L’amendement tend également à réserver le pacte Dutreil aux petites entreprises.

Mme Sophie Taillé-Polian (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF1142 s’inscrit dans la même logique. Il convient de mettre un terme à la stratégie d’optimisation fiscale fondée sur des donations régulières. Selon que vous recevez l’héritage en une seule fois ou par tranches, vous ne payez pas les mêmes droits – c’est totalement injuste. Les taxes doivent être calculées sur l’ensemble des flux successoraux. C’est ce que recommande le Conseil d’analyse économique.

M. Damien Maudet (LFI-NUPES). Nous sommes fidèles au candidat Emmanuel Macron qui, en 2016, disait préférer le risque à la rente et voulait réformer les droits de succession. Nous sommes partisans de taxer l’héritage tout au long de la vie, en l’occurrence pour les 10 % les plus riches. Les recettes pourraient ruisseler vers ceux qui n’ont pas la chance d’hériter d’un gros patrimoine – 87 % des Français héritent de moins de 100 000 euros.

M. Philippe Lottiaux (RN). L’amendement I-CF1063 vise à abaisser de quinze à dix ans le délai de rappel fiscal pour les donations.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Certains amendements tendent à alourdir la fiscalité sur les successions quand d’autres cherchent à l’alléger. Je serais donc surpris de voir les oppositions joindre leurs votes pour rejeter la position centrale que la majorité défend – la stabilité en 2023 et une réflexion globale sur les fondamentaux. Vos idées seront les bienvenues pour nourrir cette réflexion.

La commission rejette successivement les amendements I-CF603, I-CF1142. I-CF1158 et I-CF1063.

Amendement I-CF1143 de Mme Sophie Taillé-Polian.

Mme Sophie Taillé-Polian (Écolo-NUPES). L’amendement vise à supprimer le pacte Dutreil. Rien dans la littérature économique ne permet de conclure que ce dispositif sert à maintenir les entreprises à flot. C’était pourtant l’objectif initial de cette dépense fiscale lourde.

Faut-il aider les héritiers pour assurer la pérennité des entreprises ou faut-il aider directement les entreprises ? Nous privilégions la seconde option. La niche fiscale dont les héritiers profitent doit être supprimée pour financer d’autres dispositifs de soutien aux entreprises.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons là un désaccord important. Nous souhaitons garantir l’attractivité de notre pays – je sais que vous n’y attachez pas forcément la même importance – et le pacte Dutreil en est un élément. La transmission par ce biais est très encadrée ; elle est assortie d’obligations fortes de maintien des titres, de continuité de l’activité, etc. Il ne faut pas rompre l’équilibre actuel.

La commission rejette l’amendement I-CF1143.

Amendement I-CF509 de Mme Karine Lebon.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Dans le même esprit, l’amendement vise à plafonner l’exonération associée au pacte Dutreil à 2,5 millions d’euros. C’est une manière d’aider les petites entreprises mais aussi de limiter l’optimisation fiscale.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le pacte Dutreil n’est pas un outil d’optimisation fiscale. Il a pour but d’assurer la continuité des entreprises, quelle que soit leur taille. N’opposons pas petites et grandes entreprises.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Je suis atterrée par votre volonté d’attaquer le pacte Dutreil. L’industrie française peine à conserver des capitaux familiaux qui sont pourtant la garantie d’un pilotage industriel des entreprises.

L’Allemagne est très forte en la matière : les grandes entreprises sont détenues par des familles pour lesquelles le pilotage s’apprécie à plus long terme, au même titre que la rentabilité, et la sauvegarde de l’emploi est une préoccupation.

En France, faute de capitaux familiaux, nous assistons à une financiarisation du capital assortie d’exigences de court terme qui fragilisent notre tissu économique.

Votre proposition est aberrante ; elle affaiblit l’un des seuls outils dont nous disposons pour sauvegarder les entreprises familiales et lutter contre la financiarisation que vous dénoncez habituellement.

La commission rejette l’amendement I-CF509.

Amendement I-CF1156 de Mme Sophie Taillé-Polian.

Mme Sophie Taillé-Polian (Écolo-NUPES). L’amendement pourrait faire consensus puisqu’il s’inspire du modèle allemand dans lequel les dispositifs fiscaux en matière de transmission des entreprises varient selon la taille de l’entreprise.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.

M. Louis Margueritte (RE). Il n’est pas question de rente ou d’héritiers mais de transmission d’entreprises. Le pacte Dutreil compte de nombreux garde-fous qui ont été renforcés par la loi PACTE.

De trop nombreuses entreprises sont reprises par des fonds d’investissement qui ne sont pas toujours français. Nous souhaitons, à l’instar de l’Allemagne ou de l’Italie, promouvoir un capitalisme familial. Nous devons conserver ce bon outil de transmission des entreprises qu’est le pacte Dutreil.

La commission rejette l’amendement I-CF1156.

Amendement I-CF1252 de M. Daniel Labaronne et sous-amendement I-CF1483 de M. Denis Masséglia.

M. Daniel Labaronne (RE). Dans un souci de bonne gestion des finances publiques, il est proposé de limiter dans le temps – jusqu’au 31 décembre 2024 – des dépenses fiscales de soutien aux entreprises, des exonérations et tarifs réduits d’accises sur les énergies, ainsi que des crédits d’impôts culturels qui ne le sont pas encore. Dans le cas des dépenses fiscales défavorables au climat, comme les tarifs réduits d’accises, ce bornage peut être considéré comme un moyen d’encourager la transformation des niches fiscales en mesures de soutien à la transition des secteurs concernés.

M. Denis Masséglia (RE). Le crédit d’impôt en faveur des entreprises de création de jeux vidéo a permis de relocaliser une grande partie des productions. L’amendement aurait pour effet de mettre en péril une filière en forte croissance et qui soutient notre tissu culturel. Je vous incite à lire le rapport du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) qui démontre l’efficacité du crédit d’impôt.

En outre, six ans s’écoulent entre l’agrément provisoire et l’agrément définitif pour le crédit d’impôt. La date butoir de 2024 inscrite dans l’amendement pose donc problème au regard de la sécurité juridique.

Le sous-amendement vise à supprimer l’alinéa de l’amendement relatif aux jeux vidéo.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je salue le travail de Daniel Labaronne. Il faut sans doute revoir l’amendement, qui aurait entre autres effets de limiter dans le temps le pacte Dutreil, ce qui constituerait assurément un mauvais signal.

Avis défavorable.

Mme Véronique Louwagie (LR). Un amendement de cette nature, dont je partage l’objectif, réclame une étude d’impact car la date de 2024 est très proche. Le rapporteur général et M. Masséglia ont souligné des difficultés qu’il pose et ce ne sont probablement pas les seules.

M. Philippe Brun (SOC). Nous saluons les efforts de M. Labaronne pour réduire les dépenses fiscales en France et nous regrettons que le rapporteur général ne soit pas sur la même ligne. Plus on attend, plus les dépenses fiscales inefficaces perdurent. Nous voterons l’amendement.

La commission rejette successivement le sous-amendement I-CF1483 et l’amendement I-CF1252.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF27 de Mme Véronique Louwagie, I-CF652 de M. Nicolas Forissier, I-CF92 de Mme Marie-Christine Dalloz, I-CF45 de Mme Véronique Louwagie. I-CF81 de Mme Marie-Christine Dalloz ainsi que les amendements I-CF644 et I-CF641 de M. Nicolas Forissier.

Amendement I-CF171 de Mme Marie-Christine Dalloz, amendements identiques I-CF125 de Mme Chantal Jourdan et I-CF172 de Mme Marie-Christine Dalloz (discussion commune).

Mme Marie-Christine Dalloz (LR). Il s’agit d’un sujet qui m’est cher : l’avenir de la forêt. Afin de rapprocher la sylviculture des cycles naturels, je propose de réduire la part de la valeur des propriétés exonérée de droits de mutation à titre gratuit (DMTG) de 75 % à 50 % s’agissant des bénéficiaires présentant des garanties de gestion durable, et d’introduire une exonération de 75 % pour les bénéficiaires contribuant de façon significative à la préservation de la biodiversité et à la conservation des puits de carbone. Il s’agit de rendre à nos sols forestiers toute leur dimension de biodiversité, tout en garantissant un écosystème.

M. Philippe Brun (SOC). L’amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à moderniser le régime dit Sérot-Monichon issu de la loi du 16 avril 1930, qui prévoit une exonération des DMTG de 75 % de la valeur des propriétés forestières. Nous proposons de ramener cette exonération à 50 % et d’en introduire une de 75 % pour ceux qui contribuent de façon plus significative à la préservation de la biodiversité.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable. L’exonération de 75 % est assortie de conditions strictes de respect d’engagements de gestion durable, avec des renvois adaptés au code forestier. Les amendements sont satisfaits, au moins en partie.

La commission rejette successivement l’amendement I-CF171 et les amendements identiques I-CF125 et I-CF172.

Amendements I-CF1074 de M. Benjamin Dirx et I-CF82 de Mme Marie-Christine Dalloz (discussion commune).

Mme Marie-Christine Dalloz (LR). Il s’agit de protéger les exploitations agricoles et viticoles familiales, en allégeant la fiscalité des donations et successions si un ou plusieurs héritiers souhaitent reprendre l’exploitation, et si les autres héritiers s’engagent à conserver les biens transmis et à les laisser à disposition des repreneurs pendant dix-huit ans. Dans certains territoires, il faut garantir la fluidité des transmissions de terres agricoles et vinicoles. À défaut, certaines d’entre elles passeront sous contrôle étranger.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends l’esprit des amendements. Toutefois, une exonération de 100 % me semble excessive.

Avis défavorable.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1074 et I-CF82.

Amendement I-CF425 de M. Charles de Courson, amendements identiques I-CF95 de Mme Marie-Christine Dalloz et I-CF220 de M. Charles de Courson, amendements I-CF224 et I-CF227 de M. Charles de Courson, et I-CF1451 de M. Jean-Paul Mattei (discussion commune).

M. Charles de Courson (LIOT). Après plusieurs années de discussions, un certain consensus s’est dessiné au sujet de la transmission à titre gratuit d’une entreprise. Il en est résulté la loi dite Dutreil, qui prévoit une exonération de 75 % dans la limite d’un plafond de 300 000 euros, et de 50 % au-delà, s’il s’agit de parts de société, à l’exclusion des biens détenus en propriété individuelle. Il y a donc une disparité selon la nature de l’entreprise.

L’amendement vise à faire en sorte que tout le monde soit traité de la même façon et bénéficie d’une exonération de 75 %, ce qui évitera aux intéressés de monter des sociétés ad hoc qui font la fortune des experts-comptables et des notaires. Bien entendu, la contrepartie exigée du maintien des biens dans le cadre familial grâce à un bail de long terme est conservée.

Mme Marie-Christine Dalloz (LR). Il s’agit de rehausser le plafond de 300 000 euros. Il ne s’agit pas d’une exonération de 100 %, et il s’agit toujours d’assurer la stabilité du foncier dans nos exploitations agricoles et viticoles.

M. Charles de Courson (LIOT). Les amendements I-CF220, I-CF224 et I-CF227 sont des amendements de repli.

L’amendement I-CF220 vise à porter le plafond à 500 000 euros si les bénéficiaires s’engagent à doubler la période de détention.

L’amendement I-CF224 vise à raccourcir de quinze ans à dix ans le délai de rappel fiscal des donations antérieures pour les exploitations agricoles et viticoles. Cet aménagement fiscal contribue à améliorer la fiscalité de la transmission pour les exploitants. Une révision de ce cadre est nécessaire pour protéger les exploitations familiales et lutter contre leur démantèlement, voire leur disparition.

L’amendement I-CF227 compose un juste équilibre pour éviter tout effet d’aubaine. Il vise à faire bénéficier de l’exonération de 75 % les biens agricoles et viticoles transmis, sans limite concernant leur valeur totale, à condition que les héritiers s’engagent à conserver les exploitations pendant au moins dix-huit ans, soit la durée du bail à long terme.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). S’agissant de la différence de taxation entre les transmissions d’entreprises et celles de terres agricoles, on tourne autour du pot ! Je ne comprends pas que les terres agricoles n’aient jamais été alignées sur le régime du pacte Dutreil, dans la mesure où elles sont destinées à l’exploitation. Nous devons sortir de cette situation.

Mon amendement de repli prévoit de relever le plafond à 500 000 euros en cas d’allongement de la condition de détention à sept ans.

Donner des terres à destination agricole à des agriculteurs, fût-ce dans le cadre d’un bail rural ordinaire, n’ouvre pas droit aux mêmes avantages, en matière de traitement fiscal, qu’une transmission d’entreprise. Il s’agit d’un bien d’intérêt général, qui favorise la biodiversité et l’aménagement des territoires. Je n’ai jamais compris ce qui justifie une telle différence.

Il en résulte, pour certaines opérations, l’inscription des terres à l’actif des sociétés agricoles, ce qui leur fait courir un risque de rachat par des fonds. Même si une disposition a été adoptée lors de la précédente législature, il importe de se poser les bonnes questions. Il faut aligner la fiscalité des transmissions des terres agricoles sur celle du pacte Dutreil.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Un alignement parfait est impossible, les terres agricoles données à bail à long terme bénéficiant, selon les cas, d’une exonération ou d’un abattement d’impôt sur la fortune immobilière (IFI). En 2019, l’adoption d’un amendement de Joël Giraud, alors rapporteur général, a eu pour effet de tripler le plafond de l’exonération de 75 %. Faut-il aller au-delà ? Le débat est ouvert, nous l’aurons dans l’hémicycle. Avis défavorable.

M. Charles de Courson (LIOT). L’exonération d’IFI ne s’applique qu’aux propriétaires exploitants, qui sont un cas tout à fait particulier. Les deux tiers des terres agricoles ne sont pas la propriété de leur exploitant. Le système d’exonération n’est pas cohérent. Il faut aligner le régime de l’entreprise individuelle et celui des sociétés.

La commission rejette successivement l’amendement I-CF425, les amendements identiques I-CF95 et I-CF220, ainsi que les amendements I-CF224, I-CF227 et I-CF1451.

Article additionnel après l’article 3: Aménagement des conditions d’exonération de droits de mutation à titre gratuit des immeubles classés ou inscrits au titre des Monuments historiques

Amendement I-CF1089 de M. Daniel Labaronne.

M. Daniel Labaronne (RE). Les monuments historiques sont exonérés de DMTG si une convention signée avec le ministère de la culture et de la communication prévoit leur ouverture au public ad vitam aeternam. Cette convention est très peu utilisée, car les propriétaires de monuments historiques ne veulent pas s’engager pour toujours.

Il en résulte trois conséquences négatives. Les monuments historiques sont fermés au public mais ouverts à quelques privilégiés. Ils sont inertes sur le plan économique, alors qu’ils pourraient être des moteurs du développement économique local, rural le plus souvent, et constituer un facteur d’attractivité. Leur fermeture représente une perte de recettes fiscales et sociales pour le budget de l’État et celui de la sécurité sociale.

Je propose de borner cette convention à vingt-deux ans, pour inciter les propriétaires de monuments historiques à la signer.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement I-CF1089 (amendement I-3137).

Après l’article 3 (suite)

Amendements I-CF1034 de Mme Charlotte Leduc, I-CF664 de Mme Eva Sas et I-CF1231 de M. Philippe Brun (discussion commune).

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). Il s’agit de rétablir et de renforcer l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

D’après un rapport de France Stratégie, la suppression de l’ISF ne présente aucune contrepartie positive en matière de création d’emplois ou d’investissement. Ses seuls effets ont été un accroissement du niveau d’inégalités et un affaiblissement du budget de l’État. L’Institut des politiques publiques (IPP) relève l’absence de rentrées fiscales occasionnées par le retour d’exilés fiscaux, contrairement aux annonces du Gouvernement justifiant la suppression de l’ISF.

Par ailleurs, le patrimoine des 500 plus grandes fortunes a quasiment doublé au cours du premier quinquennat. Il dépasse 1 000 milliards d’euros. Si l’ISF avait été maintenu tel quel, il n’aurait rapporté que 12 milliards d’euros sur la même période, ce qui aurait été insuffisant pour corriger cette accumulation excessive. Il convient donc de renforcer la progressivité de l’ISF pour en faire un impôt plus juste.

L’amendement I-CF1034 prévoit un barème plus progressif, soutenu par la fondation Copernic. Depuis 2018, l’ISF a été évalué à plusieurs reprises. Il est désormais bien établi que sa réforme n’a eu aucun effet économique bénéfique.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF664 se fonde sur une proposition centrale des écologistes : l’ISF climatique. Nous déposerons une proposition de loi en ce sens.

Nous proposons de rétablir un impôt de solidarité sur la fortune incluant les placements financiers pour les patrimoines supérieurs à 1,3 million d’euros, et d’y adjoindre un bonus-malus climatique, un bonus-malus sur le patrimoine immobilier indexé sur la performance énergétique et un bonus-malus sur les portefeuilles de placements indexé sur l’adéquation des investissements aux critères de la taxonomie européenne, notamment l’atténuation du changement climatique, l’adaptation au changement climatique, la transition vers une économie circulaire et la protection de l’eau et de la biodiversité.

Le patrimoine des soixante-trois milliardaires français émet autant de carbone que celui de 50 % de la population française. Les 10 % de Français les plus aisés en émettent cinq fois plus que les 50 % les plus pauvres. Chacun doit prendre sa part à la lutte contre le dérèglement climatique. On ne peut pas demander aux ménages de réduire leur consommation d’énergie, d’enfiler un col roulé et de couper le Wifi si les plus aisés continuent à avoir des comportements irresponsables.

M. Philippe Brun (SOC). Il s’agit de rétablir l’impôt sur la fortune en France. De notre point de vue, l’ISF n’a pas besoin d’être climatique pour être légitime. Il est légitime en tant qu’outil de redistribution.

Le rapport publié cinq ans après sa suppression par le comité d’évaluation des réformes de la fiscalité du capital est sans appel. Rien ne permet d’affirmer que la suppression de l’ISF a orienté l’épargne des contribuables vers le financement des entreprises. La fortune des 0,1 % de Français les plus riches a augmenté de 25 % en 2020. Dans la période actuelle, il faut rétablir l’ISF.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’ISF n’a pas disparu. Il a été transformé en IFI, qui rapporte 2,2 milliards d’euros par an.

L’augmentation des patrimoines concerne principalement des patrimoines économiques, qui échappaient déjà à l’ISF.

Par ailleurs, nous avons souhaité envoyer un message très clair en matière d’investissement dans notre pays, en alignant notre fiscalité, de façon générale, sur la moyenne de la fiscalité européenne.

Certes, on peut toujours isoler une mesure et tenter de décortiquer son effet particulier, mais ces mesures, dans leur ensemble, ont permis d’inverser la courbe en matière de réindustrialisation de notre pays et d’investissement productif. Il y a dans tout cela une logique dont nous ne souhaitons pas sortir, pour rester dans la moyenne européenne.

M. Damien Maudet (LFI-NUPES). Je vais donner une chance à notre amendement et tenter de convaincre nos collègues des Républicains, qui plaidaient ce matin en faveur d’un rehaussement du plafond des dons aux associations exonérés d’impôt.

Après la suppression de l’ISF, les dons aux associations ont diminué de 20 %. Chers collègues, si vous voulez vraiment qu’ils remontent, il faut rétablir l’ISF. Nos concitoyens les plus fortunés pourront, en donnant un peu d’argent aux associations, échapper à cet atroce impôt.

Mme Nadia Hai (RE). Je note une divergence d’opinions au sein même de la gauche, entre ceux qui veulent rétablir l’ISF et ceux qui veulent introduire un ISF climatique. Il faudrait vous mettre d’accord, chers collègues !

Sur le fond, deux modèles s’opposent : vous voulez imposer les riches, nous sommes pour la société productive, qui produit des richesses pour notre économie et obtient des résultats en matière de réindustrialisation et de baisse du taux de chômage. Il est très clair que nous ne voterons pas vos amendements.

S’agissant du rapport de France Stratégie, il faut arrêter de raconter des bêtises et de proférer des mensonges : il se contente de conclure à l’absence de lien de cause à effet entre la réforme de la fiscalité du capital et les résultats économiques que nous obtenons, faute notamment du recul nécessaire. Il n’en résulte pas que ces effets n’existent pas. Faites donc attention à ce que vous dites ! Vous pouvez raconter des bêtises sur les plateaux de télévision, pas à la commission des finances. Soyez bien plus sérieux que vous ne l’êtes !

M. le président Éric Coquerel. Vous ne pouvez pas non plus tirer du rapport la conclusion que la réforme de la fiscalité a eu un effet économique. Sans préjudice de l’étude des chiffres, vous vous fondez sur ce rapport pour dire que cette réforme explique la réindustrialisation du pays et l’amélioration de l’emploi. Rien ne le prouve. D’autres études, notamment celles publiées par l’Institut des politiques publiques, n’ont pas davantage trouvé de lien.

En revanche, cette réforme a un effet très clair : depuis que vous êtes arrivés aux affaires, les inégalités et la concentration des richesses dans les mains de quelques-uns n’ont cessé de s’accroître dans ce pays. Oxfam et ATTAC organisent la publication annuelle d’une étude mondiale sur la concentration des richesses. En 2017, soixante-sept personnes possédaient autant que la moitié la plus pauvre de l’humanité. Cette année, elles sont vingt-six.

En 2017, la France était plutôt bien classée en matière d’inégalités. Vous avez rattrapé le retard, en faisant en sorte que les plus riches soient toujours plus riches dans ce pays, à tel point que nous battons des records en matière de dividendes et de nombre de milliardaires. Voilà un effet très concret de la réforme de la fiscalité. Rien n’étaye vos affirmations.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). L’un des problèmes soulevés par l’ISF était la distinction entre patrimoine privé et patrimoine professionnel. Il est exact que l’accumulation de richesses est réalisée pour l’essentiel dans le cadre professionnel, qui échappait à l’ISF. Rien ne nous empêche de débattre de l’imposition du patrimoine non productif, mais il ne faut pas oublier que nous avons conservé un impôt sur la fortune, l’IFI.

Les auteurs des amendements taxeraient tous les patrimoines, professionnels ou non : l’attractivité de notre pays en souffrirait. Des industries quitteraient la France. Il faut parvenir à un juste milieu. Je ne suis pas un fanatique de la suppression complète de tout impôt sur la fortune, mais ne revenons pas trop en arrière, au détriment de l’attractivité de notre territoire. Les patrimoines industriels et commerciaux sont constitutifs de l’activité économique.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Plusieurs propos m’ont fait sursauter.

On ne peut pas comparer l’ISF et l’IFI, dont les assiettes respectives sont très différentes. L’un rapportait 5 milliards d’euros, l’autre 1,5 milliard d’euros.

S’agissant de l’ISF, ni les uns ni les autres ne peuvent tirer de leçons indiscutables de sa suppression. Ce qui est sûr, c’est qu’elle nous a privés de 3,5 milliards d’euros de recettes fiscales.

Dans la période actuelle, tandis que les collectivités locales manquent cruellement d’argent, considérer que se priver de 3,5 milliards d’euros n’est pas un problème, c’est faire fi des difficultés que connaissent les Françaises et les Français.

Enfin, l’ISF, comme son nom l’indique, avait pour finalité la solidarité.

Mme Nadia Hai (RE). Après la suppression de l’ISF, les investissements dans les entreprises ont fait un bond de 2 milliards, ce qui ne s’était pas produit au cours des dix années précédentes. Je veux bien que l’on s’entête à ne pas établir de lien de cause à effet, mais les résultats sont là. Le taux de chômage a atteint dans notre pays un niveau jamais atteint pendant quinze ans. Ma génération a toujours connu le chômage de masse ; aujourd’hui, le taux de chômage est à peine supérieur à 7 %. Le même constat peut être dressé s’agissant de l’économie productive et de la réindustrialisation de nos territoires.

Je veux bien que l’on n’y voie aucun rapport avec la réforme de la fiscalité, mais alors quel heureux hasard ! Nos résultats économiques sont à des niveaux jamais atteints depuis plus de quinze ans. Notre pays est le plus attractif d’Europe. Sa compétitivité s’est améliorée. Ce débat peut durer longtemps, et nous l’aurons en séance publique. Il importait de rétablir quelques vérités.

M. Charles de Courson (LIOT). Je nourris des doutes sur la constitutionnalité des amendements. L’application d’un taux d’imposition de 1,5 % et d’un autre à 3 % fait peser sur des logements un taux marginal d’imposition à 4,5 %. En y ajoutant la contribution sociale généralisée (CSG), la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) et l’impôt sur le revenu (IR), on aboutit à des taux d’imposition confiscatoires, susceptibles comme tels d’annulation par le Conseil constitutionnel.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1034, I-CF664 et I-CF1231.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF662 de M. Nicolas Forissier.

Amendement I-CF849 de M. Jean-Philippe Tanguy.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Il s’agit d’établir un impôt sur la spéculation financière, dans le cadre d’une réforme fiscale porteuse de la vision que la France veut donner de la justice fiscale, de la répartition des richesses sur notre territoire et de la façon dont on peut la former.

La Macronie a choisi, il y a cinq ans, de taxer le patrimoine, donc l’enracinement, et de détaxer parallèlement la spéculation et les revenus financiers, donc les revenus déracinés. Le Rassemblement national a une vision inverse : nous devons favoriser ceux qui choisissent d’investir dans les territoires, dans le patrimoine, l’outil productif et l’avenir de la France, et sanctionner ceux qui s’enrichissent sur le déracinement, l’appauvrissement de la France et la spéculation.

L’amendement porte création d’une nouvelle forme d’ISF excluant tout ce qui permet de produire de la richesse en France et taxant lourdement tout ce qui ne le permet pas. Il a aussi pour objet l’envoi d’un signal politique à nos concitoyens, qui sont favorables à l’établissement d’un impôt sur la fortune spéculative.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous sommes opposés à la reconstitution d’un impôt de ce type. Nous considérons que, globalement, les effets de sa suppression sont là.

Par ailleurs, le sens de l’amendement m’échappe un peu. L’immobilier fait partie de la fortune, il n’y a pas de raison de l’en faire sortir. Enfin, dans la spéculation financière, vous intégrez les avoirs de nos concitoyens tels que les SICAV et les assurances vies. Cela ne me semble pas la bonne solution.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF849.

Amendements identiques I-CF225 de Mme Véronique Louwagie, I-CF380 de M. Charles de Courson et I-CF719 de Mme Marie-Christine Dalloz.

M. Charles de Courson (LIOT). Il existe deux types de plan d’épargne retraite (PER), le PER assurance et le PER compte titres. Le premier est exonéré d’IFI, le second l’est à l’exception des fonds placés dans l’immobilier. Je propose de traiter les deux PER à l’identique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ces deux produits ne sont pas de même nature. Le PER compte titres est intégralement rachetable. Il est logique que l’IFI en frappe les actifs immobiliers. Le PER assurantiel n’est pas rachetable avant la retraite. Il est donc indisponible pour l’épargnant. Il est logique de l’exclure de l’assiette imposable à l’IFI.

Au départ à la retraite, le traitement fiscal devient le même.

La commission rejette les amendements identiques I-CF225, I-CF380 et I-CF719.

Amendement I-CF1315 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Cet amendement vise à inclure les jets privés et les yachts dans l’assiette de l’IFI qui, exclusivement assis sur les actifs immobiliers, permet aux plus fortunés d’échapper à l’imposition sur leurs biens de luxe ultra consommateurs en énergie. À titre d’exemple, le yacht Idol de Thomas Leclercq aurait, pour le seul mois de septembre 2022, consommé plus de 70 000 litres de carburant et émis autant de CO2 qu’un Français moyen n’en émet en plus de vingt ans. Le même constat vaut pour les jets privés. Au cours du même mois, cinq avions de milliardaires français ont émis, en quarante-huit heures de vol, l’équivalent de vingt années de pollution d’un Français moyen.

Les petits gestes recommandés à chacun de nos concitoyens sont importants, mais sont peu à l’échelle des quantités inimaginables d’énergie consommées par les milliardaires. Chacun doit prendre ses responsabilités et contribuer à la lutte contre le dérèglement climatique.

L’amendement permet de responsabiliser les super-consommateurs, en mettant à contribution les propriétaires de jets privés et de yachts.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable. Les biens visés ne sont pas constitutifs d’une fortune immobilière. On peut souhaiter alourdir la taxation pesant sur leurs propriétaires, mais l’IFI n’est pas le bon cadre pour ce faire.

La commission rejette l’amendement I-CF1315.

Amendements identiques I-CF159 de M. Stéphane Peu et I-CF1355 de M. Aurélien Taché.

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). Depuis quelques années, l’usufruit locatif social (USL) permet d’accélérer la production de logements sociaux grâce à un démembrement de propriété entre nu-propriétaire et usufruitier social, pour une durée d’environ quinze ans.

Dans la plupart des cas, les promoteurs sont nus-propriétaires et vendent au bout des quinze ans, mais il arrive que les bailleurs sociaux, pour accélérer la production de logements sociaux, endossent la nue-propriété. Le régime fiscal applicable à la cession n’est pas le même dans les deux cas. Nous proposons d’aligner les régimes d’imposition applicables.

M. Aurélien Taché (Écolo-NUPES). Cette différence empêche les bailleurs sociaux de construire eux-mêmes des logements sociaux et d’y mener des opérations, ce qui laisse tout entre les mains des promoteurs immobiliers. Il est souhaitable de rétablir un équilibre.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements identiques I-CF159 et I-CF1355.

Amendements I-CF1049 de M. Marc Le Fur, I-CF1385 de Mme Sophie Mette et I-CF175 de M. Philippe Lottiaux (discussion commune).

M. Marc Le Fur (LR). Les propriétaires des monuments historiques affectés à la visite une partie de l’année sont imposables à l’IFI – ils ne le sont pas si leur exploitation commerciale constitue leur activité principale. L’idée est d’exclure ces bâtiments de la base de calcul de l’IFI, dans le cadre d’obligations très précises de propriété – quinze ans au moins – et d’ouverture au public – cinquante jours par an.

Ces propriétaires ont le mérite d’entretenir un patrimoine qui certes est le leur, mais qui est également celui de la nation – et nous sommes très heureux que certains acceptent de l’entretenir. Il s’agit aussi d’encourager l’ouverture de ce patrimoine à la visite de tout un chacun.

M. Philippe Lottiaux (RN). Notre amendement est un peu plus inconditionnel.

Il s’agit d’exonérer d’IFI les monuments classés ou inscrits au titre des monuments historiques pour en favoriser l’ouverture à la visite, sans prévoir de condition particulière. L’ouverture à la visite exige parfois des travaux, donc des moyens, donc des exonérations d’impôt. C’est un peu le serpent qui se mord la queue !

Notre patrimoine est considéré comme en mauvais état, voire en péril, dans une proportion comprise entre 25 % et 30 %. Il faut dynamiser l’investissement et permettre aux propriétaires d’entreprendre des travaux de rénovation. Ce sujet est essentiel. Plusieurs rapports, publiés notamment par la Cour des comptes et le Sénat, démontrent à quel point il est urgent d’intervenir massivement pour notre patrimoine.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je partage l’objectif de préserver le patrimoine français, mais pas l’idée que l’exclure de l’IFI serait une solution.

Il existe de nombreuses incitations fiscales, notamment l’imputation sans limite de montant des déficits fonciers pour les immeubles procurant un revenu et la déduction sans limite des charges foncières sur le revenu global s’il n’en procure aucun – la dépense fiscale correspondante est d’environ 35 millions d’euros. De surcroît, les crédits du programme 175 Patrimoines, de l’ordre de 40 millions d’euros, permettent de verser des subventions pour travaux dans les propriétés privées.

Monsieur Le Fur, votre amendement, tel qu’il est rédigé, aurait pour effet de rendre éligibles à l’IFI les monuments historiques ayant une activité commerciale.

M. Marc Le Fur (LR). Le critère que je mets en avant est celui de l’ouverture au public, avec une exigence forte, car les bâtiments doivent être ouverts au moins cinquante jours dans l’année. Même s’il s’agit de propriétés privées, voire de bâtiments d’habitation, leurs propriétaires sont donc soumis à des contraintes. Il faut encourager la pratique, car ces visites sont l’occasion, pour de nombreux Français de découvrir ces bâtiments, et ils en sont très heureux.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je comprends parfaitement l’idée, mais tel que l’amendement est rédigé, des châteaux tels que Chenonceau et Vaux-le-Vicomte, qui sont des entreprises commerciales et sont donc exonérés de l’IFI, seraient assujettis à cet impôt. Je vous invite donc simplement à retravailler le texte d’ici à la séance.

M. Marc Le Fur (LR). Je veux bien le retravailler, mais arrêtons les sophismes, monsieur le rapporteur général !

La commission rejette successivement les amendements I-CF1049, I-CF1385 et I-CF175.

Amendement I-CF1019 de Mme Marie Pochon et amendement I-CF126 de Mme Chantal Jourdan (discussion commune).

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Le premier amendement vise à diminuer l’exonération d’IFI sur la valeur des propriétés en nature de bois et forêts de 75 % à 50 %. Si, en effet, pour bénéficier de cette exonération, le bénéficiaire doit présenter une garantie de gestion durable prévue par le code forestier, c’est-à-dire disposer d’un document de gestion forestière, celui-ci ne permet de prendre en compte les enjeux liés à la biodiversité et au climat que de manière très limitée.

Il s’agit, par ailleurs, d’instaurer une exonération de 75 % pour les propriétaires respectant des écoconditions plus strictes relatives aux puits de carbone et à la biodiversité, en insistant sur le rôle des sols forestiers et en s’appuyant sur les méthodologies et sur les critères fixés, notamment, par le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Les économies réalisées permettront de créer une exonération de 100 % pour les terrains en libre évolution, qui sont très intéressants pour la capture de carbone et la biodiversité.

M. Philippe Brun (SOC). Le second amendement vise lui aussi à moderniser le régime d’exonération de l’IFI pour les propriétés en nature de bois et forêts, actuellement fixé à 75 % de la valeur des biens.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Comme vous l’avez reconnu, l’exonération de 75 % est déjà conditionnée au respect d’engagements en matière de gestion durable. Plutôt que de modifier le code général des impôts (CGI) et le complexifier, il me paraîtrait plus efficace de définir dans le code forestier de nouveaux critères déterminant ce qu’est une véritable gestion durable.

Avis défavorable.

M. Charles de Courson (LIOT). Mme Sas vise en réalité le plan simple de gestion, le règlement type de gestion (RTG) et le code des bonnes pratiques sylvicoles. Chère collègue, avez-vous seulement déjà examiné un plan simple de gestion ? Il faut perfectionner cet instrument et non inscrire une nouvelle disposition fiscale dans la loi pour ensuite prévoir des conventionnements – comme c’est le cas actuellement – car on ne bénéficie de l’abattement que si l’on est détenteur de deux des documents à jour.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1019 et I-CF126.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette successivement les amendements I-CF13 et I-CF11 de Mme Véronique Louwagie ainsi que les amendements en discussion commune I-CF97 de Mme Marie-Christine Dalloz et identiques I-CF353 de Mme Véronique Louwagie, I-CF479 de M. Marc Le Fur et I-CF1317 de M. Charles de Courson.

Amendement I-CF1265 de Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Il s’agit d’un amendement de repli par rapport à celui qui visait à instaurer un ISF climatique. Il a pour objet d’inciter les ménages soumis à l’IFI à décarboner leur patrimoine immobilier, à le rénover afin de le rendre plus performant sur le plan énergétique. Pour ce faire, nous proposons d’instaurer un bonus-malus climatique sur le patrimoine immobilier fondé sur la classe énergétique des bâtiments.

Le bâtiment est le deuxième secteur le plus émetteur de gaz à effet de serre dans notre pays : il représente à lui seul 27 % des émissions de CO2 et près de 45 % de la consommation d’énergie finale. Il a donc un rôle central à jouer si nous voulons atteindre la neutralité carbone à l’horizon de 2050. C’est pourquoi nous devons parvenir à décarboner massivement le patrimoine immobilier. Même si les propriétaires les plus fortunés peuvent aisément financer des travaux de rénovation énergétique, il faut les inciter à réaliser des travaux d’économies d’énergie, non seulement dans les logements qu’ils occupent, mais aussi dans ceux qu’ils louent.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne suis pas certain qu’il faille passer par un allégement de l’IFI pour ces propriétaires. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1265.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette successivement les amendements I-CF657 de M. Nicolas Forissier, I-CF646 et I-CF-650 de M. Nicolas Forissier, et I-CF96 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Amendement I-CF672 de M. Paul-André Colombani.

M. Michel Castellani (LIOT). Sur proposition du président de l’Office foncier de la Corse, et sous la forme d’un rapport à l’assemblée de Corse, une définition des zones soumises à la sur-spéculation immobilière pourrait être envisagée. Ce rapport serait ensuite transmis au Gouvernement afin de lui proposer d’instaurer dans ces zones une majoration du dispositif de taxation des plus-values immobilières. L’objectif est d’essayer de tempérer le déchaînement de la spéculation sur l’île.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne suis pas certain qu’une taxe sur les cessions les plus importantes soit de nature à réduire la pression sur les prix de l’immobilier en Corse. Cela dit, je partage votre préoccupation, et il en va de même pour le Gouvernement, qui a l’intention de modifier le zonage de la taxe sur les logements vacants afin d’élargir le dispositif à toute la Corse.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Le problème ne se pose pas seulement en Corse : toutes les zones tendues sont concernées. Faut-il modifier le zonage ? Peut-être, mais celui-ci ne concerne que le « stock », alors que c’est le « flux » qu’il faudrait taxer, c’est-à-dire les sur-plus-values, le résultat pouvant alimenter un fonds qui permettrait de trouver des solutions pour le logement social. En tant que parlementaires, nous faisons passer des messages : il faut qu’ils soient entendus.

La commission rejette l’amendement I-CF672.

Amendement I-CF673 de M. Paul-André Colombani.

M. Michel Castellani (LIOT). Il s’agit d’un amendement de repli.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF673.

Article additionnel après l’article 3 : Relèvement temporaire de 3 000 euros du plafond des avantages à l’impôt sur le revenu, au titre de la réduction d’impôt pour investissement dans les entreprises solidaires d’utilité sociale et les foncières solidaires chargées d’un service économique d’intérêt général

Amendement I-CF263 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson (LIOT). L’ensemble des avantages fiscaux dont peuvent bénéficier nos concitoyens en matière d’impôt sur le revenu est plafonné à 10 000 euros. Une dérogation avait été accordée pour l’année 2021, à la demande de Finansol, en ce qui concerne le financement de certaines entreprises solidaires : le plafond avait été relevé à 13 000 euros. Cette décision était soumise à l’autorisation de Bruxelles, qui ne l’a donnée qu’en mai 2021. L’amendement vise à maintenir cette mesure exceptionnelle : si nous ne l’adoptions pas, la mesure visée n’aurait eu pratiquement aucune conséquence.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement I-CF263 (amendement I-3138).

Article 4 : Aménagement du régime fiscal des grands événements sportifs

Amendement I-CF60 de M. Charles de Courson, amendements I-CF637 de M. Stéphane Peu et I-CF1115 de M. Jean-Claude Raux.

M. Charles de Courson (LIOT). L’amendement I-CF60 vise à supprimer l’article, mais je souhaite en réalité obtenir des éclaircissements de la part du rapporteur général sur le dispositif.

L’article 4 modifie le régime fiscal de certains événements sportifs, notamment celui des prochains Jeux olympiques. Or les bornages temporels s’entremêlent au point d’être difficilement intelligibles, ce qui est paradoxal car l’exposé des motifs précise que l’objectif est précisément d’assurer « la clarté du cadre fiscal ». Ces dispositions doivent également nous conduire à nous interroger sur le coût des Jeux : les dispositions fiscales favorables, et même souvent très avantageuses accordées dans le cadre de l’organisation de compétitions internationales ont un coût pour l’État. Les Jeux sont souvent présentés comme l’occasion de retombées économiques importantes pour l’État, mais c’est plutôt leur coût pour les finances publiques qui l’est.

M. Stéphane Peu (GDR-NUPES). L’amendement I-CF637 vise à supprimer la prorogation des exonérations d’impôts consenties aux organisateurs de grands événements sportifs, tout en maintenant les dispositions évitant la double imposition des athlètes. La disposition en question a été introduite en 2016, à la demande de l’UEFA, à l’occasion de l’organisation en France de l’Euro. Cela nous avait privés de 60 millions d’euros d’impôts, alors que l’événement avait coûté cher à la collectivité publique. Nous proposons de conserver la disposition pour les Jeux olympiques mais d’y mettre un terme par la suite.

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF1115 tend à soumettre les compétitions sportives internationales à une fiscalité écologique.

L’argument consistant à rendre la France attractive pour l’accueil des compétitions sportives internationales ne justifie pas, à lui seul, le maintien d’un régime fiscal comme celui qui nous est proposé. En outre, le Gouvernement ne saurait se targuer d’élaborer un budget vert si l’ensemble des activités responsables de fortes émissions ne sont pas réglementées, voire encadrées.

Il n’est pas admissible que les sociétés organisatrices d’événements sportifs internationaux dégagent des bénéfices aussi importants sans s’engager à limiter leur impact environnemental à l’échelle tant nationale qu’internationale. L’amendement vise donc à rétablir l’imposition des organismes chargés de l’organisation en France de compétitions sportives internationales et à conditionner un dégrèvement de 50 % à l’organisation d’événements écoresponsables. Nous nous appuyons pour cela sur la charte des quinze engagements écoresponsables érigée par le ministère des sports et le WWF.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il serait vraiment dommage de supprimer cet article : il y va de l’image de la France et de l’attractivité de notre pays pour ce type d’événements. Certes, le régime fiscal est adapté, et cela a un coût, mais les retombées de ces événements sont extrêmement importantes. Du reste, ces compétitions sont très peu nombreuses : il y en a au maximum deux par an. Il faut donc pérenniser ce régime fiscal.

En ce qui concerne la critique de M. Raux, la notion de budget vert consiste à identifier les dépenses vertes et celles qui ne le sont pas. Cela ne veut pas dire que le budget de la France en tant que tel est vert. À cet égard, la majorité ne pratique pas le greenwashing.

Avis défavorable. Que les Jeux olympiques soient beaux !

La commission rejette successivement les amendements I-CF60, I-CF637 et I-CF1115.

Elle adopte l’article 4 non modifié.

Après l’article 4

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF117 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Amendement I-CF1042 de M. Julien Bayou.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Airbnb a créé une pénurie de logements et une flambée des loyers dans de nombreuses grandes villes, en particulier à Paris. Il est urgent d’engager un débat politique sur la régulation de cette plateforme qui pénalise les habitants des grandes villes, lesquels ne peuvent plus accéder au marché locatif. Tel est l’objet de cet amendement.

Nous souhaitons rééquilibrer le marché par une mesure fiscale simple. Les offres sur Airbnb consistent, en majorité, dans des locations de logements meublés de courte durée. La fiscalité de droit commun, à savoir celle qui touche les revenus fonciers, doit s’appliquer à ces biens. Or les propriétaires bénéficient du régime de l’imposition des bénéfices industriels et commerciaux, et reçoivent à ce titre des avantages fiscaux, ce qui ne fait qu’accroître l’intérêt fiscal de ce type de locations et donc augmenter la pression dans les zones tendues.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’amendement est trop large : il intégrerait tous les meublés de tourisme, et non pas seulement ceux que vous condamnez. Cela provoquerait une hausse d’impôts pour une grande partie des détenteurs de ces logements, ce que nous ne souhaitons pas. Par ailleurs, nous avons suffisamment encadré la location de meublés touristiques dans la loi Élan : la limite a été fixée à 120 jours par an dans les métropoles, tout loueur de meublé touristique doit être enregistré et les plateformes sont tenues de déclarer au fisc les revenus réalisés par leurs utilisateurs.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1042.

Amendement I-CF5 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie (LR). Les bénéfices des entreprises individuelles soumises à l’impôt sur le revenu sont imposés en totalité et soumis aux cotisations sociales, même s’ils ne sont pas appréhendés en totalité par le chef d’entreprise. Alors que de nombreuses entreprises sont en difficulté et se trouvent dans l’incertitude, il serait intéressant, pour les aider à investir, de leur permettre de constituer un compte d’attente, une sorte de réserve, dans une limite fixée à 13 % du résultat fiscal et 7 000 euros par exercice, et sous un plafond de bénéfices de 35 000 euros. Les sommes en question seraient imposées au moment de leur utilisation ; le dispositif n’aurait donc pas de coût pour l’État dans le temps.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’amendement aurait pour effet de soustraire à l’impôt une partie importante du bénéfice. Au-delà du principe même, le coût de la mesure risque d’être élevé, car les entreprises sans salarié sont les plus nombreuses dans le tissu français : elles représentent six entreprises sur dix.

Avis défavorable.

Mme Véronique Louwagie (LR). Je ne suis pas du tout d’accord avec votre argumentaire : il n’y aurait pas de coût pour l’État sur le temps long, car la déduction ne serait accordée qu’à un moment donné, à charge pour l’entreprise de réintégrer plus tard les sommes dans ses résultats.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). L’amendement est intéressant mais, depuis l’an dernier, les entrepreneurs individuels peuvent choisir d’être soumis à l’impôt sur les sociétés à hauteur de 15 % jusqu’à 38 000 euros de bénéfices, ce dont on ne parle pas assez – nous défendrons par ailleurs des amendements visant à rehausser ce plafond. Il vaudrait mieux encourager les entreprises individuelles à utiliser ce nouveau régime plutôt que d’entrer dans une mécanique comptable et fiscale aussi complexe.

La commission rejette l’amendement I-CF5.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette successivement les amendements I-CF10 de Mme Véronique Louwagie, I-CF108 de Mme Marie-Christine Dalloz et I-CF585 de Mme Véronique Louwagie.

Amendement I-CF295 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie (LR). Nous proposons d’étendre aux fonds libéraux la possibilité de déduction fiscale de l’amortissement comptable ouverte pour les fonds commerciaux par la loi de finances de 2022.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les fonds libéraux, contrairement aux fonds commerciaux, ne sont pas reconnus par la loi. Il s’agit d’une construction purement jurisprudentielle.

Avis défavorable.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Excusez-moi, monsieur le rapporteur général, mais une patientèle ou une clientèle constituent des valeurs incorporelles. L’amendement de Véronique Louwagie me semble plein de bon sens : il n’y a pas de raison de traiter de manière différente un fonds commercial et un fonds libéral. Il existe des valeurs incorporelles qui entrent dans l’actif et sont considérées dans le bilan comme des immobilisations. Je ne comprends pas votre argumentaire.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Dans de nombreuses professions libérales, la patientèle n’est pas transmissible.

M. Charles de Courson (LIOT). Mme Louwagie et M. Mattei ont raison. Votre argument, monsieur le rapporteur général, revient à dire que ce qui n’est pas transmissible ne vaut rien. Dans quelles professions n’y a-t-il pas de fonds libéral ? Vous savez bien, d’ailleurs, comment les choses se passent, et M. Mattei, en tant que notaire, peut l’attester : la clientèle est inscrite à l’actif du bilan et possède une valeur de marché. Il pourrait même vous dire combien se vend un office notarial – cher. Le fonds libéral d’un médecin, en revanche, ne vaut rien.

La commission rejette l’amendement I-CF295.

Amendement I-CF794 de M. Mohamed Laqhila.

M. Mohamed Laqhila (Dem). Nous avons autorisé la déduction fiscale de l’amortissement pour les fonds commerciaux acquis entre janvier 2022 et décembre 2025. C’est une bonne mesure pour encourager la transmission d’entreprises et la cession de fonds de commerce. L’amendement vise à étendre le dispositif au-delà du 31 décembre 2025, sachant que la durée d’amortissement d’un fonds de commerce est réputée être de dix ans.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avant de pérenniser le dispositif, il faut attendre le rapport que nous a promis le Gouvernement en 2024. Il n’y a pas d’urgence, de mon point de vue : l’exonération court jusqu’à la fin de l’année 2025.

Avis défavorable.

L’amendement I-CF794 est retiré.

Compte tenu de l’avis défavorable du rapporteur général, l’amendement I-CF792 de M. Mohamed Laqhila est retiré.

Amendements I-CF1040 de M. Dominique Potier et I-CF461 de Mme Eva Sas (discussion commune).

M. Mickaël Bouloux (SOC). Il s’agit de lutter contre les écarts de revenu excessifs au sein des entreprises en s’appuyant sur l’outil fiscal. Nous proposons de limiter à un rapport d’un à douze l’écart entre les rémunérations. Autrement dit, il ne faudrait pas que, dans une même entreprise, une personne gagne plus en un mois que d’autres en un an.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Nous proposons, nous aussi, de réduire les inégalités salariales dans l’entreprise en rendant non déductibles les rémunérations supérieures à vingt fois le SMIC. Nous avons bien pris note des récentes déclarations présidentielles sur la fin de l’abondance. Tout le monde doit prendre sa part dans la nouvelle ère de frugalité qui nous est annoncée. Or, entre 2019 et 2021, les patrons du CAC40 ont vu leur rémunération moyenne progresser de 37 %. Nous proposons donc d’inciter les entreprises pratiquant des écarts de salaires déraisonnables à mieux partager la valeur et à réduire les inégalités de salaire.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable. Les entreprises paient déjà plus de cotisations sociales sur les hauts salaires et l’abattement est limité à quatre fois le plafond de la sécurité sociale.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1040 et I-CF461.

Amendement I-CF1005 de M. Julien Bayou.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). En un mois, Bernard Arnault, première fortune de France, a émis autant de CO2 avec son jet qu’un Français moyen en dix-sept ans. Certaines personnes sont totalement déconnectées et prennent l’avion comme d’autres le métro. Les plus riches polluent terriblement car les vols en jet privé émettent dix fois plus de dioxyde de carbone que les vols en avion de ligne, comme le souligne l’ONG Transport et Environnement.

Sont déjà exclues des charges déductibles de l’assiette de l’impôt dû par les entreprises les dépenses de toute nature liées à certains biens somptuaires, tels que les yachts ou les bateaux de plaisance, mais la liste ne comprend pas les jets privés, alors que leur utilisation est dramatique pour l’environnement. L’amendement vise donc à ajouter les aéronefs privés aux dépenses non déductibles. Cette mesure profite à l’environnement et à la justice fiscale et envoie à la population le signal que tout le monde doit agir face à l’urgence climatique.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les yachts et autres bateaux de plaisance ne sont pas directement liés à l’activité économique de l’entreprise, mais ce n’est pas le cas des jets privés.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1005.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF851 de M. Mohamed Laqhila.

Amendement I-CF24 de Mme Émilie Bonnivard.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Cet amendement d’appel vise à accompagner les stations de ski dans la transition écologique. Cet hiver, les domaines skiables, plus encore que les autres secteurs, seront confrontés aux effets de la crise de l’énergie. Il faut donc accélérer la transition écologique du parc de remontées mécaniques. Aussi, l’amendement a pour objet de créer un dispositif de suramortissement ; je le retravaillerai d’ici à la séance, car il est assez large. Cette industrie est très capitalistique : la moindre remontée mécanique coûte au minimum 5 millions d’euros. Les investissements permettant à ces équipements de consommer moins d’énergie sont donc importants, mais les solutions techniques existent.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Vous l’avez reconnu vous-même : l’amendement est trop large et il n’y est pas question de transition écologique. Je vous invite effectivement à retravailler le texte en vue de la séance. Par ailleurs, le Gouvernement a beaucoup aidé le secteur de la montagne pendant la crise, à raison de 650 millions d’euros.

Avis défavorable.

Mme Émilie Bonnivard (LR). Je vais le retravailler, mais je tiens à souligner que le dispositif de suramortissement a été mis en place par un ministre de l’économie du nom d’Emmanuel Macron.

L’amendement I-CF24 est retiré.

Amendements identiques I-CF1475 de la commission du développement durable et I-CF1004 de M. Jean-Luc Fugit, amendement I-CF700 de Mme Marie-Christine Dalloz (discussion commune).

M. Jean-Luc Fugit (RE), rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Les amendements identiques visent à étendre la possibilité pour les entreprises de prendre en compte, dans le suramortissement prévu à l’article 39 decies A du code général des impôts, les véhicules relevant de la catégorie des poids lourds dont la motorisation thermique, diesel ou essence, fait l’objet d’une transformation en motorisation électrique, à batterie ou à pile à combustible.

Cette technique, que l’on appelle plus communément le rétrofit, contribue à diminuer les émissions de gaz à effet de serre comme le CO2, à l’amélioration de la qualité de l’air – car les véhicules émettent moins d’oxydes d’azote et de particules fines – et participe au développement de l’économie circulaire. Elle s’inscrit dans une logique de sobriété, puisque la structure du véhicule est conservée : seul le moteur change.

La loi de finances pour 2019 avait étendu le suramortissement aux véhicules équipés de motorisations électriques et au biogaz ; nous proposons d’en faire bénéficier également les véhicules rétrofités.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je vous propose de le retirer à ce stade et d’en discuter dans l’hémicycle avec le ministre.

M. Jean-Luc Fugit (RE), rapporteur pour avis. La commission du développement durable a adopté très largement la disposition. Je ne souhaite donc pas retirer ces amendements.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Les personnes ayant fait transformer leur moteur depuis moins d’un an bénéficient déjà d’une prime dont le montant varie selon le revenu fiscal et les kilomètres parcourus. Par ailleurs, le Gouvernement a décidé de prolonger le bonus écologique pour l’achat d’un véhicule électrique jusqu’à la fin de 2022, alors qu’il devait s’interrompre le 1er juillet. Ce bonus peut atteindre jusqu’à 50 000 euros pour un poids lourd électrique.

La commission rejette successivement les amendements identiques I-CF1475 et I-CF1004 et l’amendement I-CF700.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette successivement l’amendement I-CF586 de Mme Véronique Louwagie, les amendements identiques I-CF121 de Mme Véronique Louwagie et I-CF269 de M. Marc Le Fur, ainsi que l’amendement I-CF122 de Mme Véronique Louwagie.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements I-CF124 et I-CF123 de Mme Véronique Louwagie.

Amendements identiques I-CF387 de M. Robin Reda et I-CF685 de M. Mohamed Laqhila.

M. Robin Reda (RE). Cet amendement concerne la transition écologique dans le secteur aérien. Il s’éloigne des polémiques un peu stériles sur les jets privés et porte sur l’aviation civile. Il vise à inciter les compagnies aériennes à investir dans des flottes d’avions plus modernes et moins polluantes, en accord avec les stratégies bas-carbone européenne et nationale.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’instauration d’un suramortissement pour les avions émettant moins de CO2 est redondante avec les mesures déjà prises. Les carburéacteurs seront considérés comme une catégorie fiscale pour le calcul de la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergies renouvelables dans les transports (Tiruert) à compter du 1er janvier prochain. Le projet de loi de finances pour 2023 augmente dans ce domaine l’objectif d’incorporation de biocarburants, pour le porter à 1,5 % en 2024. Sur le plan juridique, un suramortissement réservé aux compagnies aériennes françaises ferait courir un lourd risque de sanction européenne sur le fondement du droit européen des aides d’État.

Enfin, accorder le suramortissement à toute société soumise à l’impôt en France attirerait sur notre territoire l’ensemble des compagnies aériennes étrangères qui, au moyen d’une filiale à fiscalité française, pourraient organiser des montages permettant de bénéficier du dispositif lors de l’achat de leurs appareils. Les effets de bord sont plus importants que vous ne le pensez.

Avis défavorable.

M. Robin Reda (RE). Je vais retirer cet amendement d’appel. Il s’agit d’un enjeu environnemental majeur, mais aussi d’équité fiscale pour les compagnies sous pavillons européens et français au vu des avantages dont bénéficient d’autres compagnies – en particulier au Moyen-Orient.

M. Mohamed Laqhila (Dem). L’adoption du dispositif proposé était subordonnée à sa validation par la Commission européenne.

Les amendements identiques I-CF387 et I-CF685 sont retirés.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements I-CF85 de Mme Marie-Christine Dalloz et I-CF1246 de M. Grégoire de Fournas.

Article additionnel après l’article 4 : Prorogation du dispositif des jeunes entreprises innovantes et réduction de la durée d’exonération fiscale

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement I-CF1411 de M. Paul Midy (amendement I-3139).

Après l’article 4 (suite)

Amendement I-CF350 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie (LR). Il concerne le seuil du passage du régime des microbénéfices agricoles (BA) au régime réel simplifié. De manière plus générale, il permet d’aborder la question des seuils qui ne font pas l’objet de modifications régulières.

En l’occurrence, le plafond en dessous duquel il est possible de bénéficier du régime des micro-BA a été fixé il y a seize ans et il n’a jamais été révisé depuis. Il faut se poser la question de la pertinence de ce seuil au vu de l’évolution des prix et des chiffres d’affaires agricoles.

L’amendement propose de réviser le plafond du régime des micro-BA et celui du régime réel normal dans des proportions limitées. Le premier passerait de 85 800 euros de chiffre d’affaires à 100 000 euros, tandis que le second passerait de 365 000 euros de recettes à 450 000 euros.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le régime des micro-BA est extrêmement favorable. Augmenter le plafond aurait un coût pour les finances publiques. Avis défavorable.

M. Charles de Courson (LIOT). Comme le précise l’auteur de l’amendement, le seuil du passage du régime des micro-BA au régime réel simplifié, fixé actuellement à 85 800 euros, était de 76 300 euros en 2004. Si l’inflation cumulée depuis était de seulement 10 %, cela se saurait !

Aller plus loin en indexant tous les seuils serait la meilleure solution. On oublie souvent qu’il s’agit de la position de la commission des finances : indexons les seuils pour éviter de constater, dix ans plus tard, qu’ils se sont effondrés en euros constants.

Mme Véronique Louwagie (LR). L’évolution des seuils est un véritable sujet. Selon le rapporteur général, sous prétexte qu’un dispositif fiscal est favorable on ne doit pas réviser son seuil d’application. Cette réponse n’est pas pertinente. Cela signifie qu’à terme vous voulez en finir avec le régime des micro-BA. Si nous souhaitons maintenir ce dispositif, il faut l’adapter à la réalité. Ce régime fiscal n’est pas forcément plus favorable, mais il correspond à la situation des petites exploitations agricoles.

La commission rejette l’amendement I-CF350.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette les amendements I-CF105 de Mme Marie-Christine Dalloz et I-CF320 de Mme Véronique Louwagie.

Amendements identiques I-CF243 de Mme Lise Magnier, I-CF276 de M. Charles de Courson et I-CF340 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Lise Magnier (HOR). Cet amendement porte sur la déduction pour épargne de précaution (DEP), outil bien utilisé par les agriculteurs qui leur permet de faire face aux aléas économiques de leur exploitation.

Il s’agit d’ouvrir le débat sur l’adéquation des plafonds fixés lors de la création de la DEP. L’amendement propose de les augmenter tout en les rendant plus progressifs, afin qu’ils répondent à la volatilité grandissante des résultats agricoles en fonction des prix et des aléas climatiques.

M. Charles de Courson (LIOT). La création de la DEP avait été votée à l’unanimité. Le problème est que l’on a limité le flux annuel à 40 000 euros et le stock à 150 000 euros. Il est proposé d’augmenter ces plafonds afin de pouvoir profiter d’une très bonne année pour constituer des réserves pour les années suivantes. Il s’agit simplement de différer le paiement de l’impôt, puisque l’épargne de précaution sera utilisée lors d’une mauvaise année et augmentera de ce fait aussi bien le revenu que l’impôt à acquitter. Le dispositif est donc neutre à moyen terme.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous pouvons collectivement être fiers d’avoir voté la création de la DEP en 2019. Vous souhaitez augmenter de manière significative les seuils et plafonds attachés à cette déduction. Cela va au-delà d’une indexation sur l’inflation, car le dispositif porte sur le bénéfice et non pas sur le chiffre d’affaires. Le lien avec l’inflation est donc beaucoup plus ténu.

La DEP est un instrument très dérogatoire du droit commun qui permet de ne pas fiscaliser certains revenus. C’est un bon dispositif, mais je souhaite qu’un bilan en soit dressé avant de modifier ses critères.

La commission rejette les amendements identiques I-CF243, I-CF276 et I-CF340.

Article additionnel après l’article 4 : Indexation annuelle des seuils et plafond de la déduction pour épargne de précaution sur l’indice du coût de la construction

Amendements identiques I-CF136 de Mme Marie-Christine Dalloz, I-CF199 de Mme Émilie Bonnivard, I-CF369 de M. Charles de Courson, I-CF678 de M. Mohamed Laqhila, I-CF1080 de M. Benjamin Dirx et I-CF1240 de M. Grégoire de Fournas.

Mme Véronique Louwagie (LR). Cet amendement va dans le même sens que les précédents, mais de manière plus raisonnable. J’espère donc qu’il recevra un avis favorable. Il s’agit simplement d’indexer chaque année le plafond de la DEP sur l’inflation. Cela correspond à une volonté partagée, et une telle indexation a été votée pour le barème de l’impôt sur le revenu (IR). Pourquoi ne pas le faire pour d’autres dispositifs, tels que la DEP ?

M. Charles de Courson (LIOT). Indexons les seuils ! C’est la position de la commission des finances. Appliquons-la.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je ne pense pas que l’indexation automatique soit par construction la position de la commission des finances. En tout cas, ce n’est pas la mienne.

Avis favorable à ces amendements qui prévoient d’indexer le plafond de la DEP.

La commission adopte les amendements identiques I-CF136, I-, I-CF199, I-CF369, I-CF678, I-CF1080 et I-CF1240 (amendement I-3140).

Après l’article 4 (suite)

Amendements identiques I-CF342 de Mme Véronique Louwagie, I-CF582 de M. Charles Sitzenstuhl, I-CF665 de M. Fabien Di Filippo, I-CF931 de M. Charles de Courson et I-CF1330 de M. Luc Lamirault.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Le Président de la République a confirmé qu’un projet de loi d’orientation agricole sera présenté l’année prochaine. Il a rappelé toute l’attention que la majorité présidentielle porte à la profession agricole dans son ensemble. Beaucoup de sujets seront discutés, notamment celui, majeur, de la transmission des exploitations et du renouvellement des générations.

Cet amendement d’appel, destiné à souligner notre attachement aux agriculteurs et à entamer les réflexions en vue de l’examen du projet de loi d’orientation agricole, a pour objet d’encourager la contractualisation entre les éleveurs d’animaux et les producteurs de végétaux.

M. Fabien Di Filippo (LR). Chacun connaît les difficultés rencontrées par la filière de l’élevage. L’objectif est de favoriser la contractualisation entre les éleveurs et les producteurs spécialisés dans les cultures végétales grâce à une incitation fiscale forte – la déduction fiscale supplémentaire de 30 000 euros est un levier économique important. Cela leur donnera de la visibilité et de la sécurité, en garantissant aux producteurs un prix de vente minimum pour une partie de leur récolte.

C’est nécessaire dans cette période difficile d’inflation. Chaque jour, des exploitations maraîchères, des élevages et des fermes disparaissent. Il est temps de tirer très fort la sonnette d’alarme.

M. Charles de Courson (LIOT). L’amendement propose de majorer la DEP de 30 000 euros au maximum, sous réserve que les exploitants agricoles souscrivent un engagement contractuel pluriannuel. Cette incitation à la contractualisation fonctionnera-t-elle ? On en fera le bilan et le coût budgétaire dépendra de la réussite de cette expérimentation. Certaines filières ont réussi à organiser la contractualisation, d’autres toujours pas.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous venons d’indexer la DEP sur l’inflation. Je donnerai un avis favorable aux amendements qui prévoient la prorogation de ce mécanisme. Mais je souhaite que la DEP fasse l’objet d’une évaluation avant d’en modifier les critères. Il ne faut pas que ce dispositif devienne un cheval de Troie qui permette une défiscalisation généralisée.

Avis défavorable.

La commission rejette les amendements identiques I-CF342, I-CF582, I-CF665, I-CF931 et I-CF1330.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette successivement les amendements I-CF315 de Mme Véronique Louwagie et I-CF103 de Mme Marie-Christine Dalloz.

Amendement I-CF260 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson (LIOT). Le dispositif en vigueur prévoit que la DEP expire au 31 décembre 2022. Sa création avait fait l’unanimité et l’expérience est encourageante. Par chance les récoltes s’annoncent bonnes cette année pour une partie des exploitations, notamment viticoles. L’amendement propose de prolonger la DEP pendant trois années.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis favorable au principe de prolongation de la DEP, mais pour des raisons rédactionnelles je préfère les autres amendements qui viendront en discussion.

Demande de retrait.

L’amendement I-CF260 est retiré.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF316 de Mme Véronique Louwagie.

Amendement I-CF1452 de M. Mohamed Laqhila.

M. Mohamed Laqhila (Dem). Cet amendement du groupe Démocrate concerne le régime d’imposition des rémunérations perçues par les associés des sociétés d’exercice libéral. Il permet de mettre fin à l’insécurité juridique et préserve la situation des contribuables concernés. Il ne coûte rien au budget.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons adopté hier soir, contre mon avis, un dispositif similaire en ce qui concerne les sociétés ayant pour objet l’exercice d’une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1452.

Amendements identiques I-CF56 de Mme Véronique Louwagie et I-CF1456 de M. Jean-Paul Mattei.

Mme Véronique Louwagie (LR). Cet amendement permet de réduire la plus-value dont l’imposition est placée en report du montant de la moins-value réalisée lors de la cession, du rachat ou de l’annulation des droits sociaux reçus en rémunération de l’apport de l’entreprise.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Il s’agit encore une fois de la sécurisation fiscale de la réforme sur l’entreprise individuelle, notamment lors de l’apport de l’entreprise individuelle à une société. Cela ne concerne que les petites entreprises.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous en avons déjà discuté à plusieurs reprises et nous n’avons pas la même interprétation. Il existe une différence de nature fiscale entre les plus-values professionnelles et les moins-values particulières. Cela ne permet pas l’imputation de l’éventuelle moins-value réalisée lors de la cession des titres de la société soumise à l’impôt sur les sociétés (IS) sur la plus-value d’apport professionnelle dont l’imposition est placée en report. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements identiques I-CF56 et I-CF1456.

Amendements identiques I-CF312 de Mme Marie-Christine Dalloz, I-CF338 de M. Charles de Courson et I-CF345 de M. Pierre Cordier.

Mme Marie-Christine Dalloz (LR). La suppression par la loi de finances pour 2021 de la majoration d’impôt pour non adhésion à un organisme de gestion agréé (OGA) a été relativement brutale. Ces organismes, qui emploient des collaborateurs, n’ont pas forcément pu réorienter leur activité. J’ai déposé plusieurs amendements au sujet des OGA. En l’occurrence, je propose de proroger d’un an la majoration d’impôt de 10 % pour non adhésion à un OGA.

M. Charles de Courson (LIOT). Une majoration d’impôt s’applique en cas de non adhésion à un OGA. Il a été décidé de supprimer cette majoration en réduisant progressivement son taux, qui doit passer à 10 % pour les revenus de 2022.

L’amendement propose de maintenir cette majoration de 10 % pour les revenus de 2023, afin de faciliter la transition vers la disparition complète du dispositif.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.

La suppression de cette majoration d’impôt a été progressive : elle s’élevait à 25 % et a été réduite à 15 % pour les revenus de 2021 puis à 10 % pour les revenus de 2022.

En proposant de maintenir ce dispositif de majoration pendant un an, vous augmentez les impôts pour les assujettis qui n’ont pas adhéré à un OGA. Vous vous opposez de fait à une baisse d’impôt.

La commission rejette les amendements identiques I-CF312, I-CF338 et I-CF345.

Amendement I-CF1118 de M. Jean-Claude Raux.

M. Jean-Claude Raux (Écolo-NUPES). L’économie sociale et solidaire mérite une attention particulière dans le contexte que nous connaissons. L’amendement tend à mettre à jour les seuils d’assujettissement à la TVA et à l’IS des associations et fondations dont les activités lucratives sont limitées – comme y invite le 1 bis de l’article 206 du CGI, qui prévoit que la limite de ces activités « est indexée, chaque année, sur la prévision de l’indice des prix à la consommation, hors tabac, retenue dans le projet de loi de finances de l’année ».

Alors que l’inflation est forte, nous souhaitons donner davantage de lisibilité au tiers secteur, socle social de notre pays. Aucun glissement d’imposition ne doit affecter le monde associatif, pilier des territoires. C’est la raison pour laquelle le groupe Écologiste-NUPES propose d’actualiser les seuils en vigueur en fonction de l’inflation réelle.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’augmentation de ces seuils est effectuée par décret. L’amendement est donc inutile.

La commission rejette l’amendement I-CF1118.

Amendement I-CF1186 de M. Paul-André Colombani.

M. Michel Castellani (LIOT). Son objet est de renforcer les incitations à investir dans les installations de production d’hydroélectricité d’une puissance inférieure ou égale à 10 mégawatts dans les zones non interconnectées (ZNI). Il s’agit de limiter plus efficacement et plus rapidement les surcoûts de production dans ces zones et de réaliser des économies de contribution au service public d’électricité (CSPE) dans le cadre de la compensation territoriale opérée par la Commission de régulation de l’énergie (CRE).

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il n’y a pas de raison d’exonérer d’IS les installations hydroélectriques situées en Corse. Les zones non interconnectées bénéficient déjà de la solidarité nationale puisque le mécanisme de péréquation permet que tous les consommateurs payent l’électricité au même prix, alors que les coûts de production sont en moyenne six fois plus élevés dans ces régions.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF1186.

Article additionnel après l’article 4 : Exonération de cotisation foncière des entreprises et d’impôt sur les sociétés pour les organismes fonciers solidaires exploités sous la forme de sociétés coopératives d’intérêt collectif

Amendements identiques I-CF156 de M. Stéphane Peu, I-CF240 de M. Charles de Courson et I-CF1334 de M. Aurélien Taché.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Cet amendement reprend l’une des propositions figurant dans le rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) et de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur les sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC).

Il propose d’exonérer d’IS et de contribution économique territoriale (CET) l’activité en bail réel solidaire des organismes de foncier solidaire (OFS), au même titre que les associations. Cela permettrait de financer des projets d’accession sociale à la propriété.

M. Charles de Courson (LIOT). Je précise que cet amendement ne concerne que les OFS constitués sous forme de SCIC.

Mme Eva Sas (Écolo-NUPES). Si les organismes HLM et les associations peuvent bénéficier des régimes d’exonération prévus respectivement pour les organismes de logement social et pour les organismes sans but lucratif, les OFS constitués sous forme de SCIC n’y ont pas accès. L’amendement propose de mettre fin à cette différence de traitement en reprenant la proposition du rapport de l’IGF et de l’Igas.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Ces amendements ne sont-ils pas satisfaits ? Les organismes sans but lucratif sont en principe exclus du champ de l’IS et de la cotisation foncière des entreprises (CFE).

M. Charles de Courson (LIOT). Si vous avez raison, adoptons ces amendements. Le Gouvernement pourra confirmer votre analyse en séance publique, nous rassurer et les amendements seront retirés.

Je crains cependant que vous n’ayez que très partiellement raison et que des difficultés subsistent, comme le relève le rapport de l’IGF et de l’Igas de 2020.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Cette question a déjà été abordée l’année dernière, avec la même incertitude. Il est tout de même bizarre qu’en un an la réponse n’ait pas été trouvée. Si l’amendement était satisfait, il n’y aurait pas eu lieu de le déposer de nouveau. Le bail réel solidaire est un dispositif qui a permis de réaliser des constructions immobilières.

La commission adopte les amendements identiques I-CF156, I-CF240 et I-CF1334 (amendement I-3141).

Après l’article 4 (suite)

Amendements I-CF825 de M. Éric Coquerel et I-CF490 de Mme Karine Lebon (discussion commune).

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Certains sujets devraient normalement tous nous rassembler.

Même si elle est difficile à estimer, la sous-déclaration fiscale des entreprises multinationales représente un manque à gagner de 36 milliards d’euros pour la France en 2015, d’après une étude du centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII). Lutter contre cette évasion fiscale est un enjeu patriotique.

Il faut aussi changer de logique. En juillet 2022, le ministre Bruno Le Maire a annoncé 2 milliards d’euros de recettes fiscales imprévues, liées aux amendes infligées à Google et à McDonald’s. Ne vaudrait-il pas mieux légiférer pour disposer de recettes fiscales sûres et prévisibles ? Cela offrirait davantage de lisibilité et de clarté, tout en permettant de mieux piloter les politiques publiques.

L’amendement I-CF825 est donc d’intérêt général.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). L’amendement I-CF490 a un objet similaire. Il propose de modifier l’assiette de l’IS sur les sociétés des multinationales, afin qu’elle soit déterminée non plus par les bénéfices déclarés par les entreprises en France, mais par la part des bénéfices mondiaux qui y sont réellement réalisés, en utilisant la clé de répartition du chiffre d’affaires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Des amendements similaires ou identiques ont déjà été débattus et rejetés depuis 2019.

Les dispositifs proposés se heurtent aux conventions fiscales internationales, qui les priveront d’effet s’ils étaient adoptés.

Depuis 2017, la majorité se focalise sur des réalisations concrètes qui concourent à la lutte contre l’évasion fiscale. Le contrôle fiscal a battu des records ces dernières années. Des transactions avec des géants du numérique ont rapporté plus d’un milliard d’euros. La création d’une taxe sur les services numériques – qui a constitué une première dans le monde – permet enfin de toucher les géants du numérique.

En outre, des avancées très importantes ont été enregistrées au sein du G20 et de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) au printemps 2021. Cela a permis, d’une part, d’instaurer l’imposition minimale de 15 %, d’autre part, de prévoir la répartition mondiale des bénéfices au plus près de la création de valeur. La France a joué un rôle moteur dans cette évolution. L’application de ces mesures va demander du temps : elles ne prendront pas leur plein effet avant juillet 2023.

Avis défavorable.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Des désaccords importants se manifestent en matière de fiscalité. Mais il faut aussi reconnaître que depuis cinq ans nous avons progressé sur la taxation des grandes entreprises multinationales. Nous pouvons collectivement être fiers du rôle moteur joué par la France. Car c’est bien elle, présidée par Emmanuel Macron, qui a fait avancer au sein de l’Union européenne et de l’OCDE les débats pour une meilleure justice fiscale.

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). On ne peut pas se contenter de l’argument selon lequel les conventions fiscales s’opposeraient à ce qui est proposé par les amendements. Elles peuvent être renégociées et nous pourrions être le fer de lance de la lutte contre l’évasion fiscale à l’échelle européenne.

Les pertes de recettes sont colossales. Elles affectent cruellement le budget et conduisent à l’austérité à laquelle nous soumet ce projet de loi de finances.

Plus largement, il s’agit aussi d’un débat sur le consentement à l’impôt et la justice fiscale, qui touche donc à l’intégrité même de notre société.

Les arguments qui nous sont opposés ne tiennent pas.

M. le président Éric Coquerel. Le débat qui vient de s’amorcer pourrait être utilement prolongé au sein d’une mission d’information sur la fiscalité des entreprises.

La commission rejette successivement les amendements I-CF825 et I-CF490.

Amendement I-CF1264 de M. Philippe Brun.

M. Philippe Brun (SOC). L’amendement prévoit de supprimer le dispositif dérogatoire de taxation au tonnage dont bénéficie le secteur du transport maritime. L’excellente communication des rapporteurs de la mission flash sur les entreprises pétrolières et gazières et celles du secteur du transport maritime qui ont dégagé des profits exceptionnels pendant la crise a mis en évidence cette niche fiscale dont bénéficient les armateurs. Accordé par la plupart des États européens depuis 2003, cet avantage fiscal permet de calculer l’assiette de l’IS à partir du tonnage de la flotte et non des bénéfices réels de la compagnie. Cette mesure de soutien, qui avait pour but de défendre les armateurs européens, n’a pas apporté les résultats espérés : le pourcentage de la flotte mondiale battant pavillon européen a reculé.

L’avantage fiscal permet aux armateurs de payer très peu d’impôts. Leur contribution à la solidarité nationale est insuffisante. On peut y remédier de plusieurs manières. La taxe sur les superprofits en est une, mais nous pourrions aussi faire œuvre utile en remettant en cause cet avantage fiscal injustifié.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Bien entendu, je ne partage pas votre analyse. L’homogénéité de la fiscalité du transport maritime à l’échelle européenne est cruciale, faute de quoi on assisterait rapidement à des délocalisations. Les trois premiers armateurs mondiaux sont européens. Le choix fiscal qui a été fait a donc porté ses fruits.

La taxation au tonnage ne doit pas être considérée comme une niche fiscale. C’est surtout une adaptation au métier spécifique des armateurs. Leur activité a connu une croissance extrêmement forte après la crise du covid, ce qui explique leurs résultats exceptionnels ; mais ils payaient aussi cette taxe lorsqu’ils perdaient de l’argent.

Il est indispensable de rester cohérent avec les décisions prises à l’échelle européenne.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Si les armateurs de la société CMA CGM font plus de 30 milliards d’euros de profits, ce n’est pas lié à la reprise économique, mais à la spéculation sur les prix des containers, dont ils ont incroyablement augmenté le tarif ! Sans parler de taxation des surprofits, imaginez s’ils étaient taxés comme les autres entreprises, avec 32 milliards d’euros de profits…

M. David Amiel (RE). La mission flash, qui a entendu certains acteurs du transport maritime, a abouti à un diagnostic consensuel sur l’origine des profits exceptionnels des armateurs : c’est bien la reprise économique, qui fait suite à la crise sanitaire et à l’engorgement du transport maritime, qui a suscité ces bénéfices très élevés. En outre, le prix du fret baisse depuis plusieurs mois et la tendance se confirme pour les prochaines années.

Les armateurs paient la taxe au tonnage durant les bonnes mais aussi les mauvaises années, quand ils ne font pas de bénéfices, contrairement à ce qui se passerait s’ils payaient l’IS. Enfin, le transport maritime est un secteur très concurrentiel, et les géants asiatiques sont fortement soutenus par leurs États, par des impôts très bas, voire par des subventions directes.

Pour conclure, quasiment aucun acteur auditionné par la mission flash n’a proposé d’abolir la taxe au tonnage, en vigueur dans vingt pays européens sur vingt-sept.

La commission rejette l’amendement I-CF1264.

Amendements identiques I-CF99 de Mme Marie-Christine Dalloz, I-CF1085 de M. Benjamin Dirx et I-CF1245 de M. Grégoire de Fournas

M. Benjamin Dirx (RE). Nous venons de voter l’indexation de la déduction pour épargne de précaution, ce qui illustre bien l’importance d’une telle déduction. La possibilité est ouverte aux structures agricoles imposées à l’IR. Le présent amendement vise à étendre son bénéfice aux sociétés soumises à l’IS dont le chiffre d’affaires agricole représente 90 % du chiffre d’affaires, car de plus en plus d’exploitations sont obligées de se transformer en sociétés anonymes.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable. Chacun des régimes fiscaux a ses propres avantages et contraintes. Les exploitations peuvent opter pour l’un ou l’autre. Votre proposition, c’est un peu « fromage et dessert » !

La commission rejette les amendements identiques I-CF99, I-CF1085 et I-CF1245.

Amendement I-CF813 de M. Éric Coquerel

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). Notre amendement vise à aboutir sur un sujet qui doit nous réunir, après de multiples tentatives infructueuses : la taxation des géants du numérique, dits Gafam. Les négociations internationales dont parlait M. Sitzenstuhl, visant à taxer les bénéfices issus de leurs activités numériques dans les pays où ils sont générés, sont au point mort. Or la progression des Gafam dans notre économie entraîne un manque à gagner fiscal indéniable pour l’État, mais pose également la question de leur prise de contrôle de nombreux secteurs, où ils sont souvent en situation de position dominante. Ainsi la Banque centrale européenne (BCE) vient-elle de confier à Amazon le projet de création de l’euro numérique. Il faut défendre notre souveraineté contre l’extension de ces géants étrangers qui n’ont aucun respect pour les principes les plus élémentaires, que doivent pourtant suivre les entreprises françaises.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable. À travers l’encadrement international en cours de mise en œuvre, les entreprises du numérique seront imposées à l’IS au lieu de création de la valeur, c’est-à-dire là où se situent les utilisateurs, ce qui satisfait votre amendement.

En outre, votre dispositif est inopérant car neutralisé par les conventions fiscales.

Enfin, il ne ferait qu’ajouter de la confusion quant à la détermination des nouvelles règles fiscales applicables aux entreprises du numérique qui sont en cours de définition. La réforme du pilier 1 de l’OCDE, qui revoit de fond en comble la répartition des droits à imposer, couvre la problématique de l’établissement stable des entreprises du numérique.

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Madame Dufour, contrairement à ce que vous venez d’affirmer, la taxation des géants du numérique est une réalité en France depuis 2019 puisque notre Assemblée a adopté, à une très large majorité, la taxe sur les services numériques à l’initiative d’Emmanuel Macron et de Bruno Le Maire. C’est une grande fierté car nous avons fait œuvre de justice fiscale au cours de la précédente législature.

La commission rejette l’amendement I-CF813.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement I-CF194 de M. Philippe Lottiaux.

Amendement I-CF803 de M. Mohamed Laqhila

M. Mohamed Laqhila (Dem). Il s’agit de simplifier les obligations déclaratives des entreprises. Cet amendement est sans conséquence budgétaire.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je reconnais que le régime mère-fille est avantageux dans la majorité des cas, mais pas nécessairement dans 100 %. Cette option est déjà très simple à mettre en œuvre, par simple mention par l’entreprise dans sa déclaration de résultat. En outre, les entreprises qui la choisissent disposent de l’ingénierie juridique suffisante pour que cela n’entraîne pas de complexification excessive de leur activité.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement I-CF803.

Amendements I-CF491 et I-CF492 de M. Jean-Marc Tellier et amendement I-CF995 de M. Éric Coquerel (discussion commune)

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Il s’agit de revenir sur la baisse du taux d’IS. L’amendement I-CF491 instaure une progressivité en fonction du chiffre d’affaires et des bénéfices, en revenant au taux de 33,3 %. L’amendement I-CF492, revient uniquement à 33,3 %.

Mme Alma Dufour (LFI-NUPES). L’impôt sur les sociétés doit être plus juste et plus efficace, et le taux d’imposition doit être modulé en fonction de l’allocation des bénéfices. Il s’agit de rendre l’IS progressif, en favorisant les PME et les très petites entreprises (TPE) qui ne versent pas leurs bénéfices à des actionnaires, mais qui les utilisent pour recruter de nouveaux salariés ou réaliser des investissements.

À l’inverse, en l’état du droit, la fiscalité des entreprises est dégressive : plus vous êtes une grosse entreprise, plus vous échappez à l’impôt. Les PME sont, depuis trop longtemps, écrasées par un taux d’imposition bien trop élevé par rapport à celui des multinationales, ce qui les rend non compétitives.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le taux d’imposition des sociétés est le même quelle que soit la taille de l’entreprise. Pourquoi l’avons-nous baissé à 25 % ? Pour être dans la norme européenne et renforcer l’attractivité de notre pays. C’était une bonne idée puisque le rendement de l’impôt a doublé entre 2016 et aujourd’hui, passant de 30 à 60 milliards.

M. le président Éric Coquerel. Ce n’est pas la question. Où est la justice fiscale quand les plus grosses sociétés, grâce à l’optimisation fiscale, ne versent pas les mêmes impôts que les autres ? La dernière étude – qui doit être bientôt réactualisée – souligne que les 300 plus grosses entreprises paient en moyenne 17 % d’IS quand les PME sont taxées à 25 %. Certaines entreprises du CAC40 sont même à 0… J’espère donc que l’amendement sera adopté, mais nous l’évoquerons de toute façon lors de la mission d’information sur la fiscalité des entreprises.

M. Manuel Bompard (LFI-NUPES). Je demande à nos collègues de faire preuve d’un peu de cohérence. Une des conclusions de la mission flash sur les entreprises pétrolières et gazières et celles du secteur du transport maritime qui ont dégagé des profits exceptionnels pendant la crise faisait consensus : ce n’est pas tant les superprofits qu’il faut interroger, mais la façon dont les entreprises les utilisent.

En l’espèce, nous vous proposons de moduler l’imposition sur les sociétés en fonction de l’utilisation des profits, selon qu’ils sont réinvestis dans l’entreprise ou versés aux salariés ou sous forme de dividendes. Nous devrions tous être d’accord !

M. Mathieu Lefèvre (RE). Monsieur Bompard, il ne vous aura pas échappé que nous poursuivons depuis 2017 une trajectoire de baisse de l’impôt sur les sociétés. Ce n’est pas pour l’augmenter en 2022 ! Nous avons obtenu des résultats et attiré 1,3 million d’emplois sur le territoire. En outre, nous sommes le premier pays en matière d’investissements en Europe. Ne changeons pas à nouveau les règles.

M. le président Éric Coquerel. Il s’agit de créations d’emplois, pas d’emplois attirés en France. En outre, cela concerne entre autres 240 000 apprentis, devenus salariés.

La commission rejette successivement les amendements I-CF491, I-CF492 et I-CF995.

Amendement I-CF214 de Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie (LR). Il vise à baisser de 15 à 10 % le taux réduit d’impôt sur les sociétés et à revoir le plafond global du dispositif pour l’indexer sur l’inflation – le plafond de 38 120 euros, qui correspondait à 150 000 francs de l’époque, existe depuis très longtemps. Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit de nombreuses dispositions visant à soutenir les grandes entreprises – la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) notamment. En revanche, aucune ne vise à aider les PME familiales, dont le chiffre d’affaires ne dépasse pas 10 millions d’euros et dont le capital est détenu par des personnes physiques à hauteur de 75 %, pourtant affaiblies.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les entreprises dont le chiffre d’affaires atteint 500 000 euros vont déjà bénéficier de la suppression de la CVAE. L’effort est important. Ne modifions pas les autres paramètres de l’IS.

M. Charles de Courson (LIOT). Pourtant, quand nous avons réduit le taux de l’IS de 33,3 % à 25 %, nous avons déjà évoqué une baisse proportionnelle pour le taux d’IS réduit. Or, faites le calcul, cela correspond bien à un taux d’IS réduit à 10-11 %.

En outre, le seuil qui fait basculer une entreprise vers le taux d’IS de droit commun n’a pas été réévalué depuis des années. La proposition de notre collègue, de passer de 38 120 à 40 180 euros, est parfaitement raisonnable.

Enfin, monsieur le rapporteur général, vous évoquez la suppression de la CVAE. Mais je vous rappelle que l’État prend déjà en charge près de 2 milliards d’euros sur les 8 milliards qu’elle rapporte.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). Votre amendement poursuit le même objectif que les nôtres, précédemment rejetés. Un soutien de votre part aurait donc été appréciable.

Mme Véronique Louwagie (LR). Nos amendements ne sont pas comparables – nous ne demandons aucune augmentation d’impôt. Nous souhaitons que le projet de loi de finances pour 2023 apporte un soutien aux petites et moyennes entreprises, la suppression de la CVAE concernant les grandes. Les PME sont au cœur du maillage du territoire. Nous pourrions a minima nous entendre sur la révision du plafond ; il n’a pas été réévalué depuis que l’on calculait encore en francs !

La commission rejette l’amendement I-CF214.

Amendements identiques I-CF197 de Mme Émilie Bonnivard, I-CF365 de M. Charles de Courson, I-CF675 de M. Mohamed Laqhila et I-CF1237 de M. Grégoire de Fournas

M. Charles de Courson (LIOT). Il s’agit d’indexer sur l’inflation le plafond du taux réduit d’IS.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’impôt sur les sociétés frappe les bénéfices et non le chiffre d’affaires. Le profit n’est pas corrélé à l’inflation, sa volatilité est beaucoup plus importante. Avis défavorable.

La commission rejette les amendements identiques I-CF197, I-CF365, I-CF675 et I-CF1237.

Article additionnel après l’article 4 : Hausse du plafond de chiffre d’affaire soumis à l’impôt sur les sociétés à taux réduit et exclusion des sociétés à prépondérance immobilière du bénéfice de ce taux réduit

Amendements I-CF1458, I-CF1459 et I-CF1460 de M. Jean-Paul Mattei.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Ils poursuivent le même objectif que les précédents. Le taux réduit d’IS, à 15 %, existe depuis le 1er janvier 2002 et le seuil pour en bénéficier n’a jamais été revalorisé. Je propose de passer de 38 120 à 60 000 euros.

Cela permettrait aux entreprises concernées de s’autofinancer, d’évoluer, de se structurer, en renforçant leurs fonds propres. Je partage l’analyse de Véronique Louwagie ; il faut envoyer des signaux forts de soutien aux petites entreprises. L’entrepreneur ne met pas l’argent dans sa poche ; il peut investir et, éventuellement, créer des emplois.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Un tel niveau de relèvement du seuil me paraît excessif.

M. Mathieu Lefèvre (RE). Je propose de sous-amender, par un sous-amendement I-CF1494, l’amendement I-CF1458 en substituant le montant « 40 180 » aux deux occurrences du montant « 60 000 ».

La commission adopte le sous-amendement I-CF1494, puis elle adopte l’amendement I-CF1458 ainsi sous-amendé (amendement I-3176).

En conséquence, les amendements I-CF1459 et I-CF1460 tombent.

Après l’article 4 (suite)

Amendement I-CF852 de M. Jean-Philippe Tanguy

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Pour faire suite aux conclusions de la mission flash et dans le droit fil des positions défendues par le groupe RN et Marine Le Pen depuis la présidentielle, je persiste : de nombreuses entreprises – et pas uniquement les pétrogaziers et les transporteurs maritimes – ont profité des financements du plan de relance et de la spéculation malheureusement liée à la guerre en Ukraine pour s’enrichir indûment. Il faut donc largement taxer les surprofits. Nous proposons que les bénéfices de toutes les entreprises qui réalisent plus de 100 millions d’euros de chiffre d’affaires et dont les profits sont supérieurs à ceux de 2019 soient taxés à 50 %, soit le double du taux normal.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’assiette de votre amendement est très large car il concerne toutes les entreprises, y compris celles qui n’ont pas bénéficié de la crise et celles dont les profits ont baissé. En outre, vous proposez que l’impôt soit rétroactif sur le second semestre 2021. C’est impossible. Enfin, le semestre n’a aucune réalité fiscale. Nous sommes opposés à une telle imposition qui créerait une grande instabilité fiscale dont notre tissu économique n’a pas besoin.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Le record de bénéfices, de 60 milliards, est passé à 150 milliards. N’est-ce pas ce qui a contribué à l’instabilité des économies occidentales ? Ces bénéfices ne sont pas simplement extraordinaires, ils sont désordonnés et absurdes. Il faut le corriger et ce ne sont pas de petites mesures ponctuelles qui le permettront. Les contribuables occidentaux ont dépensé beaucoup d’argent pendant cette période et vous vous demandez encore où trouver l’argent !

Enfin, vous savez très bien qu’il est possible de déroger au principe de non-rétroactivité pour un motif d’intérêt général exceptionnel.

M. Charles de Courson (LIOT). La proposition de règlement du Conseil relatif à un instrument d’urgence en matière d’électricité et à une contribution de solidarité du secteur des combustibles fossiles ne vise que le secteur énergétique. Il s’agirait de plafonner à 180 euros le mégawattheure (MWh) d’électricité produite dans toute l’Europe et d’imposer à 33 % les bénéfices de 2022 excédant de plus de 20 % les bénéfices moyens des trois années précédentes. C’est une proposition sage ; une initiative purement nationale serait malvenue. Même si les discussions se poursuivent, ne serait-il pas préférable de déposer un amendement allant dans ce sens ?

M. David Amiel (RE). Nous traversons une crise énergétique grave, provoquée par l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Notre économie doit continuer à se mobiliser et cela passe à la fois par la protection des entreprises affectées par la hausse très importante des prix de l’énergie et la mise à contribution des producteurs d’énergie – c’est la proposition de la Commission européenne.

Vous voulez confisquer les profits de toutes les entreprises qui ont eu le malheur de résister à la crise au cours des deux dernières années. C’est exactement ce qu’il faut faire si on veut affaiblir l’appareil industriel français !

La commission rejette l’amendement I-CF852.

Suivant l’avis du rapporteur général, elle rejette l’amendement I-CF798 de M. Mohamed Laqhila.

Amendement I-CF1468 de M. Mickaël Bouloux

M. Mickaël Bouloux (SOC). Il s’agit de favoriser la pratique du vélo pour les déplacements du quotidien. Le dispositif actuel mérite d’être reconduit, mais également élargi afin d’autoriser l’usage du vélo en dehors des trajets entre le domicile et le lieu de travail.

M. Jean-René Cazeneuve (RE), rapporteur général. Le dispositif est opérationnel jusqu’en 2024. Il n’y a donc pas urgence à le proroger jusqu’en 2030. En outre, le plan Vélo et mobilités actives est doté de 250 millions d’euros. Le soutien à la filière est donc extrêmement fort.

La commission rejette l’amendement I-CF1468.

Amendement I-CF390 de Mme Sophie Taillé-Polian

Mme Sophie Taillé-Polian (Écolo-NUPES). Il vise à augmenter le taux et à élargir les dépenses éligibles au crédit d’impôt spectacle vivant pour les productions de petites structures afin de soutenir le spectacle vivant, durement touché par les conséquences de la pandémie de covid.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je suis défavorable à l’augmentation du taux. Je serai favorable à l’amendement suivant, qui devrait vous satisfaire.

La commission rejette l’amendement I-CF390.

Article additionnel après l’article 4 : Prorogation d’un an du crédit d’impôt au titre des dépenses de création, d’exploitation et de numérisation d’un spectacle vivant musical ou de variétés

Amendement I-CF1403 de Mme Aurore Bergé.

Mme Constance Le Grip (RE). Il s’agit de proroger jusqu’au 31 décembre 2023 l’assouplissement introduit dans la loi de finances pour 2021 concernant le nombre minimal de représentations – de quatre à deux – et le nombre minimal de lieux de représentation – de trois à deux lieux différents. La pandémie a entraîné de graves difficultés pour les entreprises de spectacle vivant et une telle prorogation leur permettrait de poursuivre leur redressement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je vous remercie pour votre travail sur le sujet. Effectivement, la reprise est difficile pour les entreprises du spectacle vivant. Avis favorable.

Mme Véronique Louwagie (LR). J’entends que la situation est difficile pour ces entreprises, mais il y a deux poids et deux mesures ! De nombreuses PME sont également en difficulté après la période de covid et du fait de la crise énergétique. Pourtant, vous avez rejeté ma proposition de passer le taux d’IS réduit de 15 à 10 %.

La commission adopte l’amendement I-CF1403 (amendement I-3142).

Après l’article 4 (suite)

Amendements identiques I-CF1166 de Mme Christine Arrighi, I-CF510 de M. Nicolas Sansu et I-CF890 de M. Manuel Bompard, amendements I-CF14 de M. Olivier Faure, I-CF921 de M. Éric Coquerel, I-CF900 de Mme Charlotte Leduc, I-CF934 de M. David Guiraud, I-CF960 et I-CF968 de M. Manuel Bompard, I-CF1223 de Mme Christine Pires Beaune, I-CF1056 de M. Michel Sala, I-CF938 de Mme Christine Arrighi et I-CF458 de M. Bertrand Pancher (discussion commune)

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). La BCE, la Commission européenne, le Fonds monétaire international (FMI), le secrétaire général des Nations unies, tous plaident pour une taxe additionnelle sur les bénéfices exceptionnels des grandes entreprises. Le Royaume-Uni, la Roumanie, l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie l’ont mise ou vont la mettre en œuvre.

Quelques chiffres, qui donnent le tournis : 5,6 milliards d’euros au premier trimestre, soit un résultat net de 18,8 milliards pour le premier semestre… Les entreprises ne sont pas les seules à faire des profits. Ainsi, la fortune de M. Saadé, patron de CMA CGM, a augmenté de plus de 30 milliards sur la période !

« Ce gouvernement ne va pas tolérer qu’il y ait des entreprises qui profitent de la crise pour s’enrichir » a déclaré Pedro Sanchez, premier ministre espagnol. « Redistribuons cet argent aux entreprises et aux familles en grande difficulté » a dit Mario Draghi. Je pourrais également citer Robert Habeck en Allemagne.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Notre amendement est identique à celui des autres groupes de la NUPES. Il est essentiel d’envoyer un signal en faveur de la justice fiscale. On demande beaucoup à nos concitoyens, la crise est bien réelle – écologique, sociale, démocratique – et la guerre en Ukraine aussi. Beaucoup de Français sont dans la peine ou la souffrance et il est normal que les profiteurs de crise mettent au pot afin de les soulager, ainsi que les entreprises et les collectivités territoriales. Il s’agit de « récupérer » une partie des profits indus pour les remettre dans le circuit, afin que chacun contribue équitablement aux charges communes.

M. Manuel Bompard (LFI-NUPES). Dans la droite ligne des recommandations que j’ai formulées hier dans le cadre de notre mission flash, il s’agit de taxer les superprofits des entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 750 millions d’euros et dont les profits sont 25 % supérieurs à la moyenne des profits réalisés entre 2017 et 2019. Trois taux s’appliquent – 20, 25 puis 33 %.

Contrairement à la Commission européenne, nous ne prenons pas en compte 2020, et les deux premiers taux sont inférieurs à celui qu’elle a choisi. La proposition est donc raisonnable et pourrait rapporter 20 milliards d’euros. Je vous invite à la voter !

M. Philippe Brun (SOC). Le dispositif que nous vous proposons impliquerait une imposition de 43,8 % pour la tranche supérieure. Il ne s’agit donc pas d’une taxe confiscatoire. Au contraire, elle répare une injustice : le retrait des amendements sur lesquels nous nous étions accordés cet été lors de la discussion du projet de loi de finances rectificative.

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). L’amendement I-CF921 est un amendement de repli, d’application uniquement en 2023.

M. Damien Maudet (LFI-NUPES). L’amendement I-CF900 est également de repli. Il s’agit de limiter la taxe aux superprofits réalisés par les pétroliers, le transport maritime et les autoroutes. C’est presque une plaisanterie car nous ne cessons de vous proposer une taxe sur les superprofits, qui serait de bon sens. Mais votre majorité refuse sans aucun motif valable. Si l’inflation concerne les prix à la pompe, elle touche aussi les profits. Ainsi, le PDG de Total s’est augmenté de 52 % et a versé un acompte de 2 milliards d’euros aux actionnaires la semaine dernière. Or une étude récemment publiée le souligne : les profits sont responsables à 53 % de la hausse des prix. Il faut que ces entreprises participent au pot commun. Entendez notre requête car c’est surtout celle de tous les Français !

Mme Charlotte Leduc (LFI-NUPES). L’amendement I-CF934 vise à appliquer aux sociétés pétrolières, aux transporteurs maritimes et aux sociétés concessionnaires d’autoroutes la taxe sur les superprofits en 2023.

M. Manuel Bompard (LFI-NUPES). L’amendement I-CF960 a pour objet de taxer les superprofits de 30 à 50 %, pour la fraction qui dépasse de plus de 75 % les profits réalisés sur une période d’activité normale. Il convient de reverser au peuple ces bénéfices illégitimes.

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). L’amendement I-CF968 vise à soumettre les superprofits des producteurs et distributeurs d’énergie à une taxation assise sur les ventes effectuées en France.

M. Mickaël Bouloux (SOC). L’amendement I-CF1223 a pour objet d’appliquer la contribution exceptionnelle décidée au niveau européen le 30 septembre 2022.

M. Manuel Bompard (LFI-NUPES). Il s’agit, par l’amendement I-CF1056, de taxer les superprofits réalisés par les banques grâce au système européen d’aide à la refinanciarisation, dit TLTRO (opération ciblée de refinancement à long terme).

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). L’amendement I-CF938 a pour objet d’instituer une contribution exceptionnelle de solidarité sur les entreprises des secteurs de l’énergie, du transport maritime, de l’industrie pharmaceutique, de l’agroalimentaire et sur le produit net bancaire. Un clapet fiscal déclencherait une taxation progressive des bénéfices exceptionnels. En effet, la situation affecte le consentement à l’impôt des citoyens, compte tenu du décalage qu’ils perçoivent entre leur contribution et celle de ces entreprises.

M. Charles de Courson (LIOT). Par l’amendement I-CF458, nous entendons créer une contribution européenne, à condition qu’un accord ne soit pas conclu dans le cadre de l’Union avant le 1er septembre 2023. Cette contribution ne viserait que les entreprises réalisant plus de 750 millions d’euros de chiffre d’affaires dans les domaines de l’énergie, du transport de marchandises, de l’industrie pharmaceutique et dans les secteurs bancaires et assurantiels. La taxation frapperait à hauteur de 25 % le surplus de bénéfice constaté en 2022 et 2023, par rapport à la moyenne des trois exercices précédents. Il s’agit d’engager le débat en séance publique pour voir où en est le Gouvernement. À l’heure actuelle, le projet de texte européen concerne le seul secteur électrique, les États ne s’étant pas mis d’accord sur le gaz.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. En quelques semaines, ce qui devait être une contribution sur les profits exceptionnels réalisés par un certain nombre d’acteurs économiques du secteur de l’énergie est devenu une taxation à peu près généralisée, tous domaines confondus. Nous n’approuvons évidemment pas cette approche.

Vous affirmez qu’il ne s’agit pas d’une taxation confiscatoire mais, si l’on ajoute 25 % à 33 %, on arrive tout de même à un prélèvement de 58 %. Or, l’environnement économique des entreprises est en train de se retourner. Elles font face, elles aussi, au renchérissement de l’énergie, auquel s’ajoutent des problèmes de viabilité de leurs sites industriels. Je ne crois pas que ce soit le moment d’envoyer un message aussi négatif à l’ensemble des sociétés.

Vous proposez de comparer les profits qu’elles ont réalisés en 2022 avec ceux qu’elles ont obtenus au cours des trois années précédant la crise du covid. Or, par cette méthode, vous ne mesurerez aucunement les surprofits. Si l’on met en regard, par exemple, les profits réalisés en 2018 et ceux obtenus au cours des trois années précédentes, on constate que la règle que vous proposez conduirait à taxer 40 % des entreprises, pour la simple raison que leurs résultats ont été très volatils. Plus une société aura éprouvé des difficultés pendant les trois années de référence, plus haute sera son imposition, ce qui est assez paradoxal. Vous ne mesurerez absolument pas la surprofitabilité des entreprises mais uniquement la volatilité de leurs résultats, qui dépendent des caractéristiques de leur marché – elles connaissent de bonnes et de moins bonnes années. L’instauration d’une taxation supplémentaire sur l’activité économique contredirait tout ce que nous faisons depuis plusieurs années.

Vous vous êtes éloignés de l’idée initiale, que nous avons retenue, consistant à soumettre à contribution toutes les entreprises du secteur énergétique, au sens large, qui ont bénéficié de l’envolée des prix. Nous estimons qu’il faut appliquer cette mesure à l’échelle de l’Union car nous nous inscrivons, fondamentalement, dans une perspective européenne et souhaitons éviter les distorsions de concurrence entre les entreprises. Le Gouvernement a pris des engagements en la matière ; je veux en prendre à mon tour, en tant que rapporteur général, au nom de la majorité, et vous dire que nous transposerons rapidement les deux mesures proposées par le Conseil européen. Nous n’avons pas encore les amendements en main car la recommandation du Conseil date du 30 septembre, le règlement a été voté vendredi dernier et la Commission n’a pas encore publié ses lignes directrices. Néanmoins, je vous confirme que la contribution frappera le chiffre d’affaires de tous les énergéticiens au-delà d’un certain prix de vente de l’électricité. Cela concernera les grands acteurs de l’électricité en France que sont TotalEnergies, Engie ou encore EDF. Nous transposerons également le texte prévoyant l’imposition des bénéfices de 2022 – rapportés, même si j’ai exposé les limites de cette méthode, à une moyenne triennale – des producteurs d’hydrocarbures et des raffineurs. Aller au-delà serait se mentir et mettre à contribution l’ensemble des entreprises : ce n’est pas ce que nous voulons.

M. le président Éric Coquerel. Monsieur le rapporteur général, vous estimez que la taxation des superprofits serait difficilement acceptable car elle frapperait l’activité économique, alors même que la conjoncture pourrait se retourner. Or, dans le même temps, vous défendez une taxation européenne ciblée, ce qui vous place quelque peu en contradiction avec vos principes. Ce matin, vous avez rappelé qu’on ne saurait augmenter les dépenses que si l’on trouve des recettes en parallèle. Hier, vous avez affirmé – au sujet des collectivités locales – que tout le monde doit faire des efforts ; or, malgré le caractère exceptionnel de la crise, c’est loin d’être le cas. Aussi devons-nous aller chercher les recettes auprès des entreprises qui ont réalisé des profits exceptionnels. Cela ne revient pas à taxer l’activité économique mais seulement les profits qui, pour une bonne moitié d’entre eux, sont distribués sous la forme de dividendes au lieu d’être réinvestis. Il paraît plus logique de prélever l’argent auprès de ces entreprises que de le chercher dans les poches des salariés ou des collectivités. Je ne considère pas la taxation des superprofits d’un point de vue moral mais sous l’angle de l’efficacité. Je rappelle que l’impôt sur le revenu est né pendant la guerre de 1914-1918 pour faire face aux besoins du pays et non à des fins redistributives.

Les amendements proposés permettraient de faire un premier pas. Certains, qui découlent de la proposition de loi que nous souhaitons soumettre au référendum d’initiative partagée, visent à taxer toutes les entreprises ayant réalisé des bénéfices exceptionnels en comparaison de ceux obtenus avant la crise du covid. D’autres amendements ciblent les énergéticiens, d’autres encore prévoient l’application en France des mesures proposées au niveau européen dans l’hypothèse où elles ne seraient finalement pas adoptées par l’Union. Le premier pas consiste à aller chercher l’argent où il est. M. Le Maire s’est déclaré favorable à des amendements ciblés sur la rente des énergéticiens : or, certains des amendements proposés vont dans ce sens. Il serait osé de refuser l’ensemble de ceux qui vous sont présentés.

M. David Amiel (RE). Nous avons une divergence d’analyse profonde avec les auteurs de ces amendements, qui sont inspirés par le principe selon lequel toute augmentation substantielle de la profitabilité est, par elle-même, illégitime. Nous percevons une différence essentielle entre les profits issus de la rente – en l’occurrence, celle de l’énergie –, qu’il faut récupérer – le rapporteur général a souligné que nous transposerons intégralement l’accord européen de vendredi dernier – et les profits découlant du risque, de l’innovation, d’une stratégie d’entreprise ou d’un redressement, qu’il faut au contraire encourager, car ils contribuent à la santé de notre économie et à la réalisation des investissements. Je reproche aux auteurs de ces amendements d’avancer masqués. Nous débattons depuis plusieurs mois de ces questions. Par ces amendements, nos collègues affirment répondre à la crise alors que ces initiatives visent tous les secteurs. Ils prétendent s’appuyer sur l’exemple de pays européens, alors que tous ceux qui ont adopté des dispositifs de cette nature n’ont visé que certains secteurs, comme l’a montré la mission flash que j’ai conduite avec Manuel Bompard. La Commission européenne a logiquement préconisé, dans ses recommandations de septembre, de cibler le secteur de l’énergie : c’est la position que nous soutiendrons.

M. Charles de Courson (LIOT). Il paraît opportun de se caler sur la position européenne. Le règlement européen, qui ne concerne que l’électricité, fixe un plafond de 180 euros par mégawattheure et prévoit une taxation de 33 % des surprofits, c’est-à-dire des profits excédant de 20 % la moyenne triennale. Les États membres se sont accordés sur le caractère exceptionnel de la contribution, la limitant à une année, mais n’ont pas réussi à s’entendre sur le gaz. S’agissant du taux, je rappelle qu’il fut un temps où l’IS atteignait 50 %.

Mme Christine Arrighi (Écolo-NUPES). L’amendement que j’ai présenté prévoit que « la contribution est due lorsque le montant des ventes nettes […] est supérieur à la moyenne du montant des ventes nettes déclarées au titre de la TVA réalisées du 1er janvier au 31 décembre des quatre meilleurs exercices précédant l’exercice de réalisation des bénéfices excessifs. » Par ailleurs, la taxation serait progressive ; un taux de 0 % serait appliqué à la fraction du bénéfice supplémentaire inférieure ou égale à 1 500 000 euros. Grâce au mécanisme du clapet fiscal, nous ne taxerions donc pas les bénéfices non excessifs.

M. Manuel Bompard (LFI-NUPES). Monsieur le rapporteur général, vous ne pouvez pas vous dire favorable au dispositif européen, qui caractérise les profits exceptionnels comme étant supérieurs de 20 % à la moyenne des quatre années précédentes, et nous reprocher de définir les superprofits par une augmentation de 25 % par rapport aux trois années précédentes, abstraction faite de l’année du covid : il y a là une contradiction majeure. Vous nous opposez également la volatilité des résultats, mais le texte européen frappe les secteurs qui sont, par définition, les plus volatils. J’observe, par ailleurs, que la Belgique va instituer une mesure complémentaire à l’initiative européenne, qui rapportera près de 5 milliards. Le texte européen, notons-le au passage, ne traite pas du transport maritime. Enfin, additionner les taux de 33 % et de 25 % n’a pas grand sens.

M. Nicolas Sansu (GDR-NUPES). Monsieur le rapporteur général, vous ne pouvez pas dire que vous vous appuyez sur ce que fait l’Europe alors que, dans le cadre du PLF, vous taxez à hauteur de 19 milliards les surprofits des énergéticiens produisant des ENR (énergies renouvelables) et ayant bénéficié de dispositifs de soutien. Cela reviendrait, en effet, à taxer ce que vous avez déjà taxé ! L’objectif est de s’accorder sur une taxation provisoire des superprofits, due à une situation exceptionnelle. Par ailleurs, on ne peut pas prétendre qu’en dehors des énergéticiens, toutes les entreprises prennent des risques : les armateurs profitent surtout de leur monopole.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). On fait face à la coalition des hypocrites. D’abord, la majorité relative nous explique que l’on n’a pas qualifié les surprofits alors qu’elle-même refuse de travailler sur leur définition. Ensuite, on ne saurait parler de taxation des surprofits sur l’électricité à l’échelle européenne, alors qu’il s’agit d’un système de péréquation consistant à taxer nos champions nationaux, producteurs d’électricité bas carbone, subventionnés par le contribuable, pour permettre aux consommateurs et aux entreprises d’alimenter les marges des gaziers, des pétroliers et des producteurs de charbon. C’est un système de spoliation des Français destiné à financer les erreurs des Allemands. Enfin, je suis heureux que la NUPES ait changé d’avis. Cet été, nous étions de dangereux fascistes lorsque nous disions qu’il fallait s’intéresser à toutes les entreprises et pas seulement aux pétrogaziers et aux concessionnaires d’autoroutes.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Vos amendements ne permettront pas d’atteindre les résultats escomptés, car des groupes de sociétés réalisent leurs profits à l’étranger et mettent en avant la notion d’établissement stable – à cet égard, il faudrait prendre en compte les prix de transfert. J’ai beaucoup plus confiance dans la contribution exceptionnelle à l’échelle européenne.

Par ailleurs, si les superprofits sont réinvestis dans l’entreprise, ils créent de l’emploi et de l’investissement. En revanche, on peut s’interroger sur les superdividendes, car l’entreprise n’en profite pas.

Veillons à ce que la taxation des superprofits ne casse pas l’outil industriel français.

Mme Véronique Louwagie (LR). Les conclusions de la mission flash avaient mis en lumière de grandes différences d’appréciation entre les rapporteurs. Je ne suis pas certaine que, par vos amendements, vous parveniez à atteindre votre cible car un grand nombre d’activités ne sont pas réalisées en France. Par ailleurs, des sociétés investissent en faveur de la transition énergétique, ce dont il faut tenir compte. Il faut continuer à travailler sur la position européenne afin, éventuellement, de l’étendre à d’autres activités.

Mme Christine Pires Beaune (SOC). Nous sommes attachés à ce que l’on envoie un signal. En dehors des ressources qu’ils pourraient procurer au budget de l’État, ces amendements constituent un symbole fort au regard des efforts demandés à tous les Français. Une partie de nos compatriotes doivent quémander un chèque de 200 euros pour remplir leur cuve de fioul, tandis que des entreprises distribuent des dividendes d’un montant vertigineux. Comment peut-on encore se demander si on doit appeler ces dernières à contribuer à l’effort national ? Il y va de la cohésion de la nation, et cela justifiera que l’on s’accorde sur un amendement, mais j’attends de connaître les arguments de Bercy. Lorsque le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) avait été discuté, nous avions voulu circonscrire ce dispositif au périmètre industriel, ce à quoi Bercy nous avait répondu que ce serait inconstitutionnel et que l’avantage devait être inconditionnel et concerner tout le monde. Aujourd’hui, on entend la musique inverse. À partir du moment où l’Europe définira les superprofits, nous pourrons avancer.

M. François Jolivet (HOR). J’ai été étonné de constater, lors des auditions de la mission flash, qu’une multinationale française bien connue payait la quasi-totalité de ses impôts, dont le montant avoisine 30 milliards, hors de France, dans les pays où se situe sa production. Son résultat en France est de l’ordre de 700 millions cette année mais, compte tenu de la remise que le groupe a consentie sur le carburant, il sera sans doute bien inférieur. Les États européens ne se sont pas accordés sur le carburant et le gaz, qui monopolisent pourtant l’attention des Français. Il est difficile d’estimer l’impact de la taxation que vous proposez dans vos amendements. Je crains que ce ne soit un coup d’épée dans l’eau. Il convient de voir si l’ensemble des pays européens peuvent trouver un accord.

La commission rejette successivement les amendements identiques I-CF1166, I-CF510 et I-CF890, ainsi que les amendements I-CF14, I-CF921, I-CF900, I-CF934, I-CF960 et I-CF968, I-CF1223, I-CF1056, I-CF938 et I-CF458.

M. le président Éric Coquerel. Que les amendements soient ciblés ou pas, je constate qu’une majorité s’oppose à toute taxation.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Nous avons dit extrêmement clairement que nous étions favorables à une double contribution, qui sera la déclinaison de ce qui sera décidé en Europe : la première devrait rapporter près de 20 milliards, la seconde, quelques centaines de millions.

M. le président Éric Coquerel. L’amendement de Mme Pires Beaune était rédigé exactement en ces termes !

Amendements I-CF1234 de M. Philippe Brun et I-CF898 de M. David Guiraud (discussion commune).

M. Philippe Brun (SOC). Par cet amendement de repli, nous vous proposons de circonscrire la taxation des superprofits à quatre secteurs : les sociétés pétrolières et gazières, de transport maritime de marchandises, de biologie médicale et les concessionnaires d’autoroutes.

Mme Marianne Maximi (LFI-NUPES). L’amendement CF898 vise à instaurer une taxation des producteurs de gaz et de pétrole ainsi que des sociétés de transport maritime de marchandises. Il est conforme à celui qui avait été déposé par plusieurs députés de la majorité cet été, avant d’être discrètement retiré.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Il avait été retiré de manière tout à fait publique. La majorité de la commission est favorable à la transposition des dispositifs européens ; nous disposerons des amendements lors de la discussion dans l’hémicycle.

M. Manuel Bompard (LFI-NUPES). Considérez-vous qu’une augmentation des profits de plus de 20 % par rapport à la moyenne des quatre années précédentes définit de manière pertinente les superprofits ?

M. Charles Sitzenstuhl (RE). Je regrette que l’on parle si peu de l’avancée européenne que pourrait représenter la proposition des chefs d’État. On a l’habitude d’entendre, dans la bouche de nombreux responsables politiques, qu’il faut renforcer la convergence fiscale européenne. La proposition qui est faite est de nature à changer les débats que nous avons depuis l’été. Il serait regrettable que notre réflexion se limite à la sphère nationale. On a beaucoup parlé de la taxe sur les géants du numérique, dite Gafa, que nous avions votée en 2019 à la suite d’un échec européen. En l’occurrence, le débat européen ne fait que commencer ; il ne me paraît pas cohérent de le préempter.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Les entreprises paieront cette année, dans notre pays, un volume inédit d’impôt sur les sociétés – de près de 60 milliards d’euros – qui reflète la reprise de l’activité. Le rendement de l’impôt sera donc record. Monsieur Bompard, je vous invite à examiner les résultats des 500 plus grosses entreprises françaises et à les comparer à ceux qu’elles ont obtenus au cours des trois ou quatre dernières années : vous constaterez que 40 % d’entre elles ont connu une croissance de leurs résultats supérieure de 25 % à la moyenne des années précédentes. Cela ne constitue pas une définition des superprofits : c’est la simple résultante de la volatilité de l’activité.

M. le président Éric Coquerel. Monsieur le rapporteur général, je vous propose un autre exercice : je vous invite à regarder le montant des dividendes versés par les entreprises du CAC40 au cours des dernières années. Vous constaterez qu’ils ont connu une augmentation record.

M. François Jolivet (HOR). Il est vrai que des députés, dont certains de la majorité, avaient déposé un amendement comparable au vôtre cet été, mais c’était avant que les exécutifs des États de l’Union européennes se réunissent et trouvent un accord sur l’électricité. Or votre amendement ne parle pas de l'électricité, mais seulement de secteurs sur lesquels il y a des désaccords. Il est voué à l’échec.

M. Philippe Brun (SOC). Quand on veut enterrer une taxe, on la propose au niveau européen. La taxe européenne que vous nous vendez n’a rien à voir avec le dispositif que nous avions imaginé cet été. D’abord, elle ne concerne que le secteur de l’énergie. Ensuite, elle se fonde uniquement sur les bénéfices. Enfin, elle n’entrerait en application que l’an prochain. Pour toutes ces raisons, elle n’est pas satisfaisante.

Les amendements que nous vous proposons sont identiques à celui du groupe Les Républicains : ce ne sont pas des délires d’extrême-gauche.

La commission rejette successivement les amendements I-CF1234 et I-CF898.

Amendement I-CF858 de M. Jean-Philippe Tanguy.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Une grande majorité de Français est favorable à la taxation des surprofits. M. Macron l’a bien compris, qui a qualifié de taxe sur les surprofits – ce qu’il n’est absolument pas – le mécanisme de péréquation sur le marché européen de l’électricité. Je ne comprends pas que les députés du groupe Les Républicains ne s’expriment pas à ce sujet, alors que M. Olivier Marleix s’est élevé contre le démantèlement d’EDF. Je ne comprends pas non plus que les communistes, qui ont toujours défendu l’intégrité d’EDF, ne condamnent pas ce mécanisme, qui consiste à faire payer les Français pour les Allemands.

Quant à nos collègues de la NUPES, ils ne nous aiment pas ; nous ne les aimons pas beaucoup non plus, la plupart du temps, mais il est incroyable que nous n’arrivions pas à travailler ensemble pour répondre au souhait d’une majorité de Français, au-delà des clivages politiques.

Les Français ont choisi d’avoir à l’Assemblée nationale une majorité relative, ils ont choisi une nouvelle forme de démocratie et on n’en tire pas les conséquences ! Certains groupes, par sectarisme, nous empêchent de trouver des solutions consensuelles.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Avis défavorable.

M. Manuel Bompard (LFI-NUPES). Monsieur le rapporteur général, j’ai du mal à comprendre la réponse que vous m’avez faite il y a un instant. Vous venez vous-même de critiquer la disposition prévue dans l’accord européen, que vous soutenez.

Mme Nadia Hai (RE). Nous débattons des superprofits mais, en réalité, ce sont les profits réalisés par les entreprises qui vous posent un problème. Vous mélangez tout : les rentes indues créées par les énergéticiens en pleine crise – qui vont faire l’objet d‘une contribution exceptionnelle – et les profits des entreprises ! Soyez honnêtes intellectuellement ! Quand il s’est agi d’aider les entreprises au cœur de la crise du covid, vous avez rejeté toutes les mesures que nous proposions. Et à présent qu'elles se portent bien, vous voulez les taxer.

La commission rejette l’amendement I-CF858.

Amendement I-CF1397 de Mme Stella Dupont.

Mme Stella Dupont (RE). Avec d’autres collègues, j’ai cherché à concrétiser les propositions faites, au niveau européen, de créer une contribution de solidarité exceptionnelle sur les bénéfices excédentaires générés par des activités dans le secteur des combustibles fossiles. Mais nous avons finalisé cet amendement avant les annonces de vendredi dernier.

Monsieur le rapporteur général, vous nous avez invités à revenir en séance avec des propositions formalisées. Je note qu’à l’issue de la mission flash, le groupe Démocrate a proposé de se pencher sur les dividendes versés à titre exceptionnel. Il me semble que ce serait une piste à creuser.

Je sais que vous allez m’inviter à retirer cet amendement, et je vais le faire. Mais je le déposerai à nouveau si nous n’arrivons pas à un accord collectif. Ce qui est clair, en tout cas, c’est que nous sommes tous soucieux de concrétiser cette contribution.

M. Philippe Brun (SOC). Je reprends cet amendement.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. La transposition dans notre droit de la décision prise au niveau européen ressemblera à la rédaction que vous proposez. Hélas, la Commission européenne n’a pas calé son agenda sur l’examen du PLF, mais le Gouvernement s’est engagé à transposer les dispositions relatives aux activités de raffinage : TotalEnergies sera donc concernée – puisque c’est bien là le sujet.

La commission rejette l’amendement I-CF1397.

Amendement I-CF1263 de M. Éric Coquerel.

M. Damien Maudet (LFI-NUPES). Nous proposons d’instaurer une taxe de 10 % sur les dividendes distribués par les entreprises du CAC40.

Ils ont atteint 44 milliards d’euros au deuxième trimestre 2022 : c’est un record, et c’est plus que la moyenne européenne. Bruno Le Maire a dit qu’il serait irresponsable de faire peser toutes les dépenses liées au bouclier tarifaire sur le budget de l’État. Pour ma part, je lui propose de les faire peser sur les ultrariches et sur les actionnaires, en taxant les dividendes. Ils ont assez d’argent pour en partager une petite partie.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. L’année 2022 est exceptionnelle à tout point de vue : le rendement de l’impôt sur le revenu, le chiffre d’affaires d’un certain nombre d'entreprises et les dividendes qu’elles ont versés. Mais, sur le long terme, on ne constate pas d’augmentation du montant des dividendes.

Du reste, ces dividendes sont déjà taxés : ceux qui les perçoivent paient la flat tax et, avant d’être distribués, ils sont taxés au sein de l’entreprise via l’impôt sur les sociétés. Je ne crois pas qu’il faille aller au-delà de cette double imposition. Avis défavorable.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Je suis tout à fait favorable à cette disposition et notre groupe déposera également un amendement en ce sens – si je ne l’ai pas fait, c’est parce que j’ai attendu sagement les conclusions de la mission flash. Certaines entreprises optimisent le contrôle de la chaîne de valeur ajoutée pour ne pas payer leur juste part à la France et cette mesure correctrice me semble un bon moyen de récupérer l’argent qui revient aux Français. Nous voterons cet amendement.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Je vous invite à prêter attention à la rédaction de l’amendement. J’ai le souvenir d’une taxe de 3 % qui a été annulée, parce qu’elle a été jugée anticonstitutionnelle, et qui a coûté 10 milliards d’euros au budget de l’État. On peut réfléchir à une taxation des dividendes, mais cet amendement ne me semble pas le bon outil.

La commission rejette l’amendement I-CF1263.

Amendement I-CF1480 de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire.

M. Jean-Luc Fugit, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire. Compte tenu de l’intérêt patrimonial des gares françaises et de leur importance pour l’aménagement du territoire, il est proposé d’accorder une réduction d’impôt aux entreprises qui font un don pour la préservation du patrimoine remarquable des gares ferroviaires.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je n’ai pas eu le temps de prendre connaissance de cet amendement, qui a été déposé tardivement. Je vous propose d’y revenir en séance publique.

L’amendement I-CF1480 est retiré.

Amendement I-CF256 de M. Fabien Di Filippo.

M. Fabien Di Filippo (LR). Il s’agit d’encourager le mécénat sportif, en portant à 80 % les réductions d’impôt pour les entreprises qui font un don à des organismes qui promeuvent la pratique sportive.

Nos associations sportives ont connu une période difficile, après la crise liée au covid, et il faut les soutenir car elles jouent un rôle majeur dans l’épanouissement des plus jeunes. Cette disposition aurait un effet positif sur l’emploi, la vie sociale, la consommation de biens d’équipement, mais aussi la santé publique, car la sédentarité est un vrai problème et représente un poids de 17 milliards pour nos comptes sociaux.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le système de mécénat est déjà très favorable, avec un taux de déduction fiscale de 60 %. Le porter à 80 %, comme vous le proposez, me paraît excessif, même si votre objectif est louable.

La commission rejette l’amendement I-CF256.

Amendements I-CF986, I-CF1030 et I-CF1146 de Mme Francesca Pasquini (discussion commune).

Mme Francesca Pasquini (Écolo-NUPES). Mes deux premiers amendements proposent de conditionner le crédit d’impôt pour les dons alimentaires des entreprises à la qualité des denrées, selon trois critères : le critère sanitaire ; la traçabilité ; l’emballage et la date de péremption. Nous proposons également d’octroyer un délai aux associations pour signer les attestations de don.

Cet avantage fiscal est faiblement encadré et les critères d’éligibilité sont trop flous. Les dons de mauvaise qualité représentent une charge de travail supplémentaire pour les associations et leurs bénévoles, qui doivent prendre le temps de trier les denrées alimentaires avant de les distribuer. Il n’y a pas lieu d’attribuer un crédit d’impôt à une entreprise qui donne des aliments impropres à la consommation.

L’amendement I-CF1146, de repli, laisse le soin à un décret de définir les critères de qualité des dons alimentaires à respecter pour bénéficier de la réduction d’impôt.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Votre demande est légitime, mais il me semble que vos amendements sont satisfaits. Le décret du 20 octobre 2020 oblige les structures à adopter un plan de gestion de la qualité des dons avec des procédures de suivi et de contrôle de leur qualité. Ces dons ont par ailleurs été encadrés plus précisément, avec des exigences de traçabilité nouvelles qui figurent au Bulletin officiel des finances publiques (Bofip) depuis le 8 juin 2022.

La commission rejette successivement les amendements I-CF986, I-CF1030 et I-CF1146.

Amendement I-CF1442 de M. Quentin Bataillon.

Mme Constance Le Grip (RE). Il s’agit de proroger de trois ans la déduction fiscale dont bénéficient les entreprises qui achètent des œuvres originales d’artistes vivants ou des instruments de musique. Elle doit arriver à échéance à la fin de l’année 2022.

Contre l’avis du rapporteur, la commission rejette l’amendement I-CF1442.

Amendement I-CF796 de M. Mohamed Laqhila et I-CF1448 de M. Jean-Paul Mattei (discussion commune).

M. Mohamed Laqhila (Dem). Il s’agit de réparer une erreur introduite par l’article 19 de la loi de finances initiale pour 2022, qui a relevé le seuil d’exonération des plus-values professionnelles de 300 000 à 500 000 euros, et le seuil d’exonération partielle de 500 000 à un million d’euros. Or cet article a également modifié la définition de la valeur des éléments transmis pour l’appréciation du seuil. Sont pris en compte, pour la détermination du seuil d’exonération des plus-values, les immeubles et les stocks, ce qui entraîne des distorsions de traitement entre les contribuables. Il est donc proposé d’exclure de la définition de la valeur des éléments transmis les immeubles et les stocks éventuellement cédés.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Mon amendement est assez similaire mais il n’inclut pas l’immobilier. Nous proposons d’exclure formellement les stocks du calcul du plafond ouvrant droit à exonération pour revenir à l’assiette qui prévalait jusque-là.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Si les plus-values sur stocks ne sont pas imposées en tant que telles, cette non-imposition n’est que la conséquence du fait que la valorisation des stocks – ou plus-value latente – est imposée chaque année dans le résultat, du fait des règles comptables et fiscales. Autrement dit, au jour de la cession, il n’existe normalement pas de plus-values sur les stocks, celles-ci ayant été comprises chaque année, y compris celle de la cession, dans le résultat imposable de l’entreprise.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Ce qui pose un problème, c’est la prise en compte des stocks dans le calcul du seuil. L’ancienne rédaction excluait les stocks et la nouvelle les inclut. Cela signifie qu’une entreprise qui a peu de valeur, mais qui a un gros stock, sera plus fortement taxée qu’une entreprise qui n’a pas de stock. Or les stocks ne sont pas un élément de valorisation de l’entreprise en tant que tels.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Je vous remercie pour ces précisions. Nous pourrons y revenir en séance publique.

La commission rejette successivement les amendements I-CF796 et I-CF1448.

Amendement I-CF827 de M. David Guiraud.

M. David Guiraud (LFI-NUPES). Nous proposons de supprimer le crédit d’impôt recherche (CIR), qui est devenu, en 2020, la première dépense fiscale de l’État – avec 6,6 milliards d’euros – sans que l’on perçoive bien son intérêt pour notre économie et notre recherche. Alors qu’on est à l’euro près pour certaines exonérations fiscales, on fait preuve, à propos du CIR, de la plus grande mansuétude.

Au cours des dix dernières années, Sanofi a reçu plus d’un milliard au titre du CIR et l’entreprise a procédé à 1 000 licenciements en France, dont 400 dans la recherche et développement (R&D). Et je note qu’elle n’a toujours pas trouvé de vaccin contre le covid ! Le CIR sert davantage à alimenter les caisses des actionnaires que la recherche en France.

M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général. Le reproche que vous faites à Sanofi ne me paraît pas fondé : chacun sait qu’il n’y a pas de certitudes en matière de recherche. Vos propos témoignent d’une certaine méconnaissance des réalités de l’entreprise.

Le CIR est un outil essentiel pour soutenir la recherche. Depuis sa création, 120 000 emplois ont été créés dans le domaine de la recherche et du développement ; et ce sont souvent des emplois à très forte valeur ajoutée. Il y a plus de chercheurs en France que dans les autres pays européens : nous le devons à cette mesure.

Le CIR coûte cher et il conviendrait peut-être de le recalibrer, mais il n’y a pas lieu de le remettre totalement en cause. Il est un de nos atouts et contribue à la compétitivité de nos entreprises. Avis défavorable.

M. le président Éric Coquerel. Monsieur le rapporteur général, on peut avoir été salarié et connaître l’entreprise.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Il serait très maladroit de toucher au CIR, qui est un élément essentiel de l’attractivité de notre territoire et un outil exceptionnel. Il est très encadré et très contrôlé. Il va de soi que si des entreprises le détournent de son objectif, il faut les recadrer.

M. Mickaël Bouloux (SOC). Je remercie notre collègue David Guiraud d’avoir mis d’emblée les pieds dans le plat. Je crois vraiment qu’il faut faire évoluer le CIR, car il n’atteint plus ses objectifs, et nous proposerons des amendements en ce sens. Mais nous n’allons pas jusqu’à demander sa suppression : je ne voterai donc pas cet amendement.

M. le président Éric Coquerel. Je suis surpris de l’intervention de M. Jean-Paul Mattei car il m’avait semblé que, même au sein de la majorité, on reconnaissait que le CIR avait besoin d’être révisé.

M. Daniel Labaronne (RE). Pour ma part, je suis attaché au crédit d’impôt recherche, mais je considère que ce n’est ni une vache sacrée, ni une vache à lait. Il a contribué à l’attractivité de notre territoire en matière de recherche, d’investissement et d’implantations industrielles, c’est absolument indéniable. Cela étant, il pourrait sans doute faire l’objet de contrôles accrus. Nous devons faire en sorte qu’il atteigne sa cible.

La commission rejette l’amendement I-CF827.

 


Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

 

 

Réunion du mercredi 5 octobre 2022 à 15 heures

 

Présents. - M. Éric Alauzet, M. Franck Allisio, M. David Amiel, M. Christian Baptiste, M. Karim Ben Cheikh, M. Manuel Bompard, Mme Émilie Bonnivard, M. Mickaël Bouloux, M. Philippe Brun, M. Frédéric Cabrolier, M. Michel Castellani, M. Thomas Cazenave, M. Jean- René Cazeneuve, M. Florian Chauche, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, M. Dominique Da Silva, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jocelyn Dessigny, M. Fabien Di Filippo, M. Benjamin Dirx, Mme Alma Dufour, Mme Stella Dupont, M. Luc Geismar, Mme Félicie Gérard, M. Joël Giraud, Mme Perrine Goulet, M. David Guiraud, Mme Nadia Hai, M. Alexandre Holroyd, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, M. Emmanuel Lacresse, M. Mohamed Laqhila, M. Marc Le Fur, Mme Constance Le Grip, Mme Karine Lebon, M. Pascal Lecamp, Mme Charlotte Leduc, M. Mathieu Lefèvre, Mme Patricia Lemoine, M. Philippe Lottiaux, Mme Véronique Louwagie, Mme Lise Magnier, M. Louis Margueritte, M. Éric Martineau, M. Denis Masséglia, M. Bryan Masson, M. Jean-Paul Mattei, M. Damien Maudet, M. Kévin Mauvieux, Mme Marianne Maximi, M. Benoit Mournet, Mme Christine Pires Beaune, M. Christophe Plassard, M. Robin Reda, M. Sébastien Rome, M. Xavier Roseren, M. Alexandre Sabatou, M. Michel Sala, M. Emeric Salmon, M. Nicolas Sansu, Mme Eva Sas, M. Charles Sitzenstuhl, M. Jean-Philippe Tanguy, M. Jean-Marc Tellier

 

Assistaient également à la réunion. - M. Jean-Luc Fugit, Mme Francesca Pasquini, M. Stéphane Peu, Mme Béatrice Piron, M. Jean-Claude Raux, M. Aurélien Taché, Mme Sophie Taillé-Polian