Compte rendu

Commission
des lois constitutionnelles,
de la législation
et de l’administration
générale de la République

 Examen du projet de loi organique, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution (n° 2198) (M. Sacha Houlié, rapporteur)                            2

 Suite de l’examen de la proposition de loi visant à valoriser la réserve communale de sécurité civile (n° 2130) (M. Didier Lemaire, rapporteur)                             5

 Examen, en application de l’article 88 du Règlement, des amendements à la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant réparation des préjudices subis par les personnes condamnées pour homosexualité entre 1942 et 1982 (n° 2247) (M. Hervé Saulignac, rapporteur)                            13


Mercredi
6 mars 2024

Séance de 14 heures 45

Compte rendu n° 55

session ordinaire de 2023-2024

Présidence
de Mme Caroline Abadie,
Vice-Présidente


  1 

La séance est ouverte à 14 heures 50.

Présidence de Mme Caroline Abadie, vice-présidente.

La Commission examine le projet de loi organique, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, modifiant la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution (n° 2198) (M. Sacha Houlié, rapporteur).

 

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M. Sacha Houlié, rapporteur. Le projet de loi organique modifiant la loi organique du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution a été adopté par le Sénat le mois dernier. Il a pour objet de prendre en compte les conséquences juridiques du projet de loi relatif à la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection, examiné au fond par la commission du développement durable. Cela nous oblige donc à adapter la loi organique du 23 juillet 2010, qui dresse la liste des emplois et fonctions devant faire l’objet d’un avis public des commissions parlementaires compétentes.

Le projet de loi tend à rassembler l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) pour créer une nouvelle autorité administrative indépendante (AAI). Nous ne nous prononçons pas ici sur la pertinence de cette fusion.

Afin que le président de cette nouvelle entité soit nommé selon les mêmes modalités que ceux des deux organes qu’elle remplace – par décret du Président de la République, après avis des commissions compétentes des assemblées parlementaires –, l’article 1er du projet de loi organique que nous examinons modifie la loi organique de 2010. Je vous rappelle que l’alinéa 5 de l’article 13 de la Constitution prévoit que les commissions compétentes de chaque chambre peuvent s’opposer à une nomination à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés.

L’article 2 coordonne l’entrée en vigueur de cette disposition avec celle du projet de loi.

Le Sénat a adopté trois nouvelles dispositions.

En premier lieu, il a étendu le champ des nominations au titre de l’article 13 en y incluant le haut-commissaire à l’énergie atomique, considérant que cela allait de pair avec l’extension de ses compétences et son rattachement auprès du Premier ministre afin de mieux coordonner la politique nucléaire.

Si je comprends cet objectif, il existe une différence fondamentale entre ces deux fonctions ; la nomination du haut-commissaire relève de l’alinéa 3, et non de l’alinéa 5, de l’article 13 : il est placé dans une situation de subordination directe par rapport au Gouvernement. Je vous proposerai donc de supprimer cette disposition.

Le Sénat a supprimé la mention du Haut Conseil des biotechnologies de la loi organique de 2010. Cette instance a été supprimée par ordonnance à compter du 1er janvier 2022 : il était donc nécessaire de toiletter la loi organique de 2010 sur ce point.

Enfin, le Sénat a adopté un article 3 qui précise que la nouvelle procédure de nomination du haut-commissaire à l’énergie atomique ne s’applique pas au mandat en cours. Je vous proposerai de supprimer cette disposition.

Nous ne faisons, je le rappelle, que prendre en compte les conséquences de l’examen au fond du projet de loi.

Le bureau de la commission a, pour ces raisons, pris la décision qu’il n’y aurait pas de discussion générale sur ce texte.

 

Article 1er (tableau annexé à la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010) : Désignation selon la procédure prévue à l’article 13 de la Constitution du président de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) et du haut-commissaire à l’énergie atomique

 

Amendement de suppression CL2 de Mme Andrée Taurinya

M. Jean-François Coulomme (LFI-NUPES). La réforme du système de contrôle de la sûreté nucléaire vise principalement à répondre aux attentes en matière de délais et d’efficacité, à fluidifier – c’est-à-dire à accélérer – la relance du nucléaire avec moins de contraintes, dans la continuité du discours de Belfort d’Emmanuel Macron. Il s’agit donc d’adapter la sûreté afin de satisfaire les demandes de l’exploitant, donc de minimiser les coûts de la sécurité nucléaire dans le développement de projets, selon la volonté du Gouvernement de fournir de l’énergie à bas prix, au mépris de la sécurité et de la sûreté nucléaires.

Au passage, hier, la commission du développement durable a adopté les amendements de suppression de l’article 1er du projet de loi créant la nouvelle autorité, en dépit d’un comportement étrange de la présidence.

La logique politique, économique et industrielle primera sur la sécurité. C’est une orientation particulièrement dangereuse. Entendu en 2018 par la commission d’enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires, Nicolas Hulot, alors ministre de la transition écologique et solidaire, déclarait : « La sécurité prime sur tout : vouloir à tous crins un prix de l’énergie bas, quitte à transgresser certaines règles de sécurité, est un mauvais calcul. […] Aucun argument économique ne peut venir interférer dans cette priorité. »

Cette réforme constitue une rupture avec la structuration historique de notre système dual de sûreté nucléaire, pourtant particulièrement performant. L’exposé des motifs du projet de loi reconnaît que le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection s’est développé et renforcé selon un processus d’amélioration continue après la création de l’IRSN.

Nous proposons, par cohérence avec le vote de la commission du développement durable – suivi, je l’espère d’un vote identique en séance –, de supprimer cet article.

M. Sacha Houlié, rapporteur. Avis défavorable.

Nous serons d’accord pour supprimer les alinéas 3 et 4, je le disais. En revanche, nous différons sur la suppression de l’ensemble de l’article. Ces questions sont traitées au fond par la commission du développement durable. Vous avez cité le vote survenu hier en commission : il n’est pas évident que l’article 1er ne sera pas rétabli en séance publique. Je vous propose donc d’adopter un projet de loi organique en quelque sorte prêt à ; il reviendra au Gouvernement, le cas échéant, de tirer les conclusions de l’examen du projet de loi en séance.

À titre personnel, il me semble que la fusion de l’ASN et de l’IRSN est intéressante : ces agences travaillent main dans la main au quotidien, et les activités de l’IRSN sont préservées au sein de la nouvelle entité. Le fait que celle-ci soit une AAI est aussi une garantie : cette commission apprécie les garanties d’indépendance et d’impartialité qu’offre ce statut. Cela doit écarter une partie des craintes que vous avez exprimées.

M. Didier Paris (RE). J’irai dans le même sens que notre rapporteur. Nous sommes dans une situation rare : nous dépendons de décisions prises dans une autre commission, mais nous traitons d’un projet de loi organique qui, du point de vue de la procédure législative, est indépendant. Quel que soit le sort du projet de loi en séance, nous devons nous prononcer au cas où le vote différerait de celui de la commission – ce que j’espère, puisqu’il s’agit de favoriser l’indépendance énergétique de la France et de rassembler deux organismes dans une autorité indépendante plus efficace.

Nous ne voterons pas cet amendement de suppression ; nous voterons en revanche les deux amendements suivants.

M. Paul Molac (LIOT). Je voterai l’amendement de La France insoumise.

Je regrette que le Gouvernement nous demande à nouveau de voter sur cette fusion de l’ASN et de l’IRSN. Déjà refusée par notre assemblée, cette opération provoque un certain émoi dans une partie de la population : l’énergie nucléaire, à tort ou à raison, a une aura quelque peu sulfureuse. Elle est sans doute plus dangereuse que les autres et nos concitoyens sont très sourcilleux quant à la sûreté. Je suppose que le retour de la volonté de fusion est dû à la découverte de corrosion dans nos centrales… Mais nous n’avons, je crois, aucun intérêt à faire perdre de la clarté à notre dispositif, car nos concitoyens auront peur, et cela jouera finalement contre la filière nucléaire.

Mme Raquel Garrido (LFI-NUPES). Le législateur s’est déjà prononcé sur la fusion de l’IRSN et de l’ASN. Pourtant, l’exécutif remet le sujet sur le tapis – un peu comme quand nous avions voté « non » à un référendum, mais que, chassé par la porte, le sujet était revenu par la fenêtre.

La commission des lois se penche ainsi sur une prérogative présidentielle : celle de nommer certains hauts commis de l’État. C’est là un cas d’école du trop-plein de pouvoir de nomination du Président de la République : est-il justifié que le chef de l’État ait le pouvoir personnel – certes encadré par l’article 13 – de nommer plus de cinquante commis de l’État, notamment les dirigeants des autorités administratives indépendantes ? Cela renforce encore le nombre de gens qui ne doivent leur existence économique, juridique, politique qu’au Président de la République.

Dans la réflexion sur l’équilibre entre législatif et exécutif, c’est un sujet important ; je ne voulais pas manquer de le souligner.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements identiques CL5 de M. Sacha Houlié et CL3 de M. Antoine Armand

M. Antoine Armand (RE). Nous proposons de supprimer les alinéas 3 et 4, qui sont probablement inconstitutionnels : le haut-commissaire à l’énergie atomique étant placé sous l’autorité hiérarchique directe du Gouvernement qui, aux termes de l’article 20 de la Constitution, « dispose de l’administration », sa nomination ne peut pas relever de la procédure prévue à l’alinéa 5 de l’article 13.

Cela ne correspond pas non plus aux fonctions du haut-commissaire, qui est un conseil à la disposition du Gouvernement, avec toute la confidentialité que cela implique, notamment en matière de défense et de sécurité nationales.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’amendement CL1 de M. Nicolas Dragon tombe.

 

La commission adopte l’article 1er modifié.

 

Article 2 (tableau annexé à la loi organique n° 2010‑837 du 23 juillet 2010) : Date d’entrée en vigueur de la création de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection et de la suppression de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire

 

La commission adopte l’article 2 non modifié.

 

Article 3 (nouveau) : Précision quant au mandat en cours du haut-commissaire à l’énergie atomique

 

Amendements de suppression CL6 de M. Sacha Houlié et CL4 de M. Antoine Armand

M. Sacha Houlié, rapporteur. Là encore, il s’agit d’éliminer le risque juridique résultant des alinéas 3 et 4 de l’article 1er.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 3 est supprimé.

 

La commission adopte l’ensemble du projet de loi organique modifié.

*

*     *

Puis, la commission poursuit l’examen de la proposition de loi visant à valoriser la réserve communale de sécurité civile (n° 2130) (M. Didier Lemaire, rapporteur).

 

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Mme Caroline Abadie, présidente. Nous continuons la discussion générale commencée ce matin.

M. Emmanuel Mandon (Dem). Le groupe Démocrate se félicite de l’initiative de Didier Lemaire et du groupe Horizons. Bâties sur le bénévolat, facultatives pour les communes qui en assument la charge financière et ont la liberté de les organiser comme elles l’entendent, les réserves communales constituent à l’évidence une réponse concrète aux problèmes de terrain. Elles demeurent toutefois insuffisamment connues.

La création de ces réserves, il y a déjà une vingtaine d’années, résultait de retours d’expérience, la gestion de catastrophes majeures et d’autres crises ayant montré la nécessité de disposer, lors d’opérations de secours, d’un soutien logistique. Les bonnes volontés deviennent alors des auxiliaires efficaces de nos sapeurs-pompiers et des services d’urgence. L’épisode de la covid-19 nous a depuis livré ses enseignements ; nous gardons aussi en tête les mégafeux de Gironde. Il convient sans aucun doute de renforcer les moyens alloués à la gestion de crises graves.

La commune, échelon de proximité par excellence, est à même de recenser les personnes désireuses de s’engager en cas de crise, leurs compétences et leurs disponibilités, de les informer et de les encadrer. Il s’agit de se doter au niveau communal, voire intercommunal, d’un instrument permanent de mobilisation civique. Les réserves ont fait leurs preuves ; elles ne demandent qu’à être soutenues et développées. Le texte entend soutenir tous les acteurs de la réserve communale : la commune et ses élus, l’employeur et le salarié, l’élève ou l’étudiant.

La proposition de loi accorde au maire, autorité de gestion, plus de latitude pour mobiliser la réserve en supprimant la limite de durée des activités instituée initialement. L’assouplissement proposé à l’article 1er nous semble donc utile.

L’article 2 prévoit de ramener à vingt-quatre heures en cas de crise majeure la durée pendant laquelle l’employeur peut notifier son refus. Nous entendons la difficulté que l’absence de salariés peut provoquer pour certaines entreprises. Il ne s’agit pas ici de compliquer leur tâche à l’excès, mais de donner un cadre juridique à des situations exceptionnelles, tout en permettant la réactivité qui s’impose.

Enfin, l’élève ou l’étudiant pourra faire reconnaître et valider les compétences acquises au sein de la réserve communale grâce à la validation des acquis de l’expérience (VAE).

Alors que la sécurité civile rencontre des difficultés, nous pourrons grâce à ces dispositions augmenter les moyens et développer une culture de la sécurité civile à l’échelle de la commune, ce qui sera utile face à des catastrophes qui mettent en danger les populations et qui imposent de mobiliser pour prévenir, informer, alerter.

Ce renforcement de la présence de la réserve communale dans le continuum de sécurité locale est également pertinent au plan national. Plus largement, la diffusion de la culture du risque et de la résilience dans la population française constitue, à n’en point douter, un enjeu majeur en ces temps troublés où, hélas, nous voyons bien les menaces s’accumuler.

Il faut donc inciter nos concitoyens à s’informer, à mieux connaître les comportements de sauvegarde et les bons réflexes, tout comme les modalités d’alerte en cas d’événement grave, de crise naturelle ou technologique. Je mentionne l’objectif ambitieux de maillage du territoire avec l’application des plans communaux de sauvegarde (PCS) et la mise en place de la journée nationale de la résilience, qui dessine un nouveau modèle de sécurité civile.

Nous voterons cette proposition de loi, qui engage une démarche vertueuse.

Mme Sandra Regol (Écolo-NUPES). Merci de me permettre de prendre la parole maintenant, car je dois me rendre en séance pour y intervenir sur un autre texte – situation très inconfortable.

Nous voterons ce texte.

Néanmoins, il manque des mots dans votre texte, notamment ceux de « réchauffement climatique » ; or c’est bien celui-ci qui rend plus difficile et plus dangereux, au quotidien, le travail de notre sécurité civile. Si tout est bon pour les aider, soyons conscients que nous ne faisons que compenser les effets du réchauffement du climat.

Notre sécurité civile a besoin de moyens humains et matériels, et l’organisation de notre système de secours doit être améliorée : trop souvent, nos pompiers se trouvent coincés aux urgences pendant des heures parce que les prises en charge y sont trop lentes. Cela pèse sur le reste de leur activité ; ils sont moins disponibles. En zone urbaine en particulier, ils n’ont souvent plus le temps de faire autre chose que de l’aide à la personne, aux malades, c’est-à-dire ce qui n’est plus fait ailleurs. Toute aide supplémentaire est donc bonne à prendre, mais la priorité doit être de donner les moyens aux services publics de protéger la population.

C’est une goutte d’eau que vous nous proposez : nous voterons la goutte d’eau.

Mme Marietta Karamanli (SOC). Ce texte vise à encourager nos concitoyens, notamment les plus jeunes, à rejoindre les réserves communales de sécurité civile. C’est un objectif que nous partageons. La proposition de loi supprime aussi le plafond annuel de quinze jours ouvrables imposé aux réservistes, et renvoie le soin de fixer la durée des activités à une convention conclue entre l’autorité de gestion de la réserve et le réserviste. Elle pose aussi le principe d’une validation des compétences acquises dans l’enseignement supérieur, mais aussi secondaire.

Vous dites qu’il existe 679 réserves communales. C’est peu, par rapport à nos quelque 35 000 communes. Combien y a-t-il de réservistes ? Vous ne parlez pas de campagne d’information en direction du grand public, comme cela a pu exister pour la réserve sanitaire auprès des professionnels de santé. Vous ne dites rien non plus du profil des personnes aujourd’hui engagées : avez-vous des éléments à nous communiquer sur ce sujet ?

Il est nécessaire de mener une politique transversale, notamment auprès des jeunes. Au sein du système éducatif, de nombreux dispositifs existent déjà mais nous disposons de peu de données sur leur efficacité. Un rapport de France Stratégie notait, il y a quelques années, de grandes disparités dans la connaissance des possibilités de bénévolat.

Si votre proposition de loi va dans le bon sens, il s’agit à notre sens d’une politique qui nécessite une mobilisation forte et des moyens adaptés. Nous soutiendrons néanmoins cette initiative.

M. Didier Lemaire, rapporteur. Merci à tous ceux de nos collègues qui sont intervenus.

M. Pradal a eu raison de souligner l’importance de l’échelle communale : c’est tout l’objet de cette proposition de loi, pensée pour répondre efficacement aux besoins du terrain.

Monsieur Chenevard, je connais votre engagement au sein de la protection civile. Les crises sont en effet multiples : naturelles, technologiques, sanitaires, sécuritaires. Il faut valoriser l’ensemble des acteurs des réserves communales de sécurité civile : les sapeurs-pompiers et les associations agréées de sécurité civile constituent, vous l’avez bien dit, un vivier de 500 000 citoyens. C’est une force.

Monsieur Rancoule, je me réjouis comme vous que nous parlions ici de sécurité civile. Vous dites que les actions du Gouvernement sont insuffisantes ; il ne m’appartient pas de commenter vos propos, mais je souligne que des moyens ont été dégagés. On l’a vu à l’occasion des mégafeux comme des inondations dans le Pas-de-Calais. Le ministre de l’intérieur a évoqué un Beauvau de la sécurité à partir du mois d’avril.

Il faut, c’est vrai, que les réserves communales soient mieux connues.

Le sujet est en effet transpartisan, nous l’avons vu à l’occasion de la mission d’information ; nous le voyons encore avec l’examen de cette proposition de loi. Soyez-en tous remerciés.

Monsieur Coulomme, j’ai compris que vous partagez l’esprit de cette proposition de loi, mais qu’elle vous paraît insuffisante. Nous nous voulons pragmatiques, efficaces : s’agissant d’une PPL inscrite dans une niche parlementaire, il nous a paru inopportun de rédiger un texte trop large. Voyez-la comme une amorce. Cela a été dit, il y a moins de 700 réserves dans notre pays : il y a donc un travail considérable à mener.

M. Pauget évoquait les réserves des Alpes-Maritimes et demandait plus de flexibilité. Les réserves n’ont en effet pas les mêmes missions que les sapeurs-pompiers ; leurs missions sont plutôt de soutien et d’accompagnement de la population.

Monsieur Mandon, je vous rejoins sur l’importance de l’acculturation, des élus comme de la population. Ce sont eux les premiers acteurs, avant même les sapeurs-pompiers et les associations agréées.

Mme Regol a parlé de « goutte d’eau » ; disons que c’est un début. Cette proposition de loi apporte une réponse cohérente à des besoins locaux. Elle nous reprochait aussi de ne pas évoquer le réchauffement climatique : on ne peut pas citer toutes les causes des crises. Elles sont multiples, multifactorielles. Elles sont aussi sécuritaires.

Madame Karamanli, l’implication des jeunes est cruciale. Nous y reviendrons dans la discussion. Ils doivent être récompensés de leur acte citoyen. Ce sont, vous avez raison, des sujets interministériels.

 

Avant l’article 1er

 

Amendement CL10 de M. Yannick Chenevard

M. Yannick Chenevard (RE). L’article L. 724‑2 du code de la sécurité intérieure dispose que les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) peuvent signer une convention avec le maire afin d’assurer la gestion des réserves communales. Cela a été rappelé, peu de communes ont organisé ces réserves. Certes, cela n’a rien d’obligatoire, mais s’il y en a si peu, c’est sans doute aussi parce qu’encadrer des bénévoles prend beaucoup de temps – temps que vous n’aurez pas lorsqu’il faudra gérer une crise.

L’amendement propose que les associations agréées de sécurité civile puissent, comme les SDIS, passer une convention avec les communes pour gérer la réserve de sécurité civile.

M. Didier Lemaire, rapporteur. Je comprends le sens de votre amendement. Mais les réserves communales restent dans la sphère publique, puisqu’elles dépendent des communes ou des EPCI. Nous devons encore mener un long travail pour les faire mieux connaître des citoyens mais aussi des élus. Or, dans le cadre de la niche parlementaire, il me semble qu’il faut nous concentrer sur l’essentiel.

Sur le fond, je vous rejoins. La mission d’information sur les capacités d’anticipation et d’adaptation de notre modèle de protection et de sécurité civiles rendra bientôt son rapport, qui traitera de l’ensemble de la sécurité civile. Dans ce cadre, nous pourrons travailler ensemble sur ces sujets.

Mme Marietta Karamanli (SOC). Nous ne disposons pas de données sur ce qui a été fait dans l’éducation nationale pour faire des propositions efficaces. Serait-il possible de disposer d’éléments factuels d’ici à la séance ?

M. Jean-François Coulomme (LFI-NUPES). Nous étudions ici cette proposition de loi sur les réserves communales ; au même moment est débattu en séance un autre texte très important, portant sur les discriminations raciales et religieuses, sur lequel la commission des lois est également saisie au fond. Il nous est impossible de nous dédoubler. Cette organisation est une anomalie totale, qui nuit à la qualité et à la cohérence du travail parlementaire. Je vous rappelle que, ce matin encore, vous avez voté une proposition de loi visant à autoriser le cumul des mandats : or, avec un seul mandat, il est déjà matériellement impossible d’assister à ces deux débats, ici et en séance ! Je rappelle aussi que, pour s’être plaint d’un dysfonctionnement similaire, Ugo Bernalicis a été sanctionné par la présidence.

Nous quittons donc cette commission et irons nous plaindre à la présidente de l’Assemblée nationale de cette situation inacceptable.

 

Mme Caroline Abadie, présidente. Monsieur Coulomme, nous partageons avec vous la difficulté du moment. Nous avions, ce matin, à examiner trois propositions de loi et le président Houlié avait prévenu que nous serions dans cette situation. Malheureusement, l’agenda de la commission est élaboré sans que nous connaissions les textes examinés en séance, et tous ceux qui le seront jusqu’à minuit relèvent de la commission des lois.

Nous n’avons pas d’autre solution que d’étudier ce texte, car il n’est pas question pour moi de dire au groupe Horizons : « Tant pis pour votre niche ! » Les amendements ne sont pas si nombreux et, en faisant preuve d’un peu de discipline sans pour autant censurer les prises de parole, nous pourrons y arriver.

M. Yannick Chenevard (RE). Compte tenu des propositions émises par le rapporteur, notamment dans le cadre de la mission d’information sur les capacités d’anticipation et d’adaptation de notre modèle de protection et de sécurité civiles dont il est également rapporteur, je retire mon amendement.

L’amendement est retiré.

 

Article 1er (art. L. 724-4 du code de la sécurité intérieure) : Suppression du plafond d’emploi annuel des réservistes communaux de sécurité civile

 

Amendement CL9 de M. Yannick Chenevard

M. Yannick Chenevard (RE). Les associations agréées de sécurité civile (AASC) sont l’équivalent du pilier que constituent les sapeurs-pompiers professionnels et volontaires. Les 250 000 membres de ces associations sur le territoire sont organisés, hiérarchisés, entraînés, diplômés et équipés au même titre que les sapeurs-pompiers, dont ils diffèrent dans la mesure où ils sont tous bénévoles. Ils ont une capacité opérationnelle immédiate, grâce à une parfaite maîtrise de l’ensemble des techniques d’organisation des secours et du retour à la vie normale – que l’on oublie souvent mais qui dure longtemps.

L’amendement propose que les AASC, par l’intermédiaire de leurs présidents départementaux ou locaux, puissent signer des contrats « en bloc » avec les maires qui le souhaitent, afin que ces derniers disposent de machines organisées et entraînées.

M. Didier Lemaire, rapporteur. Tout a été dit. Je suis favorable à l’addition, plutôt qu’à la division des forces. Mon avis est donc également favorable.

M. Julien Rancoule (RN). J’ai plusieurs réserves. Du fait du retrait de votre amendement CL10, monsieur Chenevard, je ne sais pas si celui-ci, qui avait vocation à le compléter, a un sens. Sa rédaction est brouillonne et présente la conclusion de contrats avec les AASC comme une règle plutôt que comme une exception, les réserves communales que gère directement le maire passant au second plan. Il aurait été plus judicieux d’insérer l’ajout que vous proposez à la fin de la phrase.

M. Yannick Chenevard (RE). Il ne s’agit pas de créer une exception ; il s’agit seulement de permettre aux maires, en plus des contrats qu’il aura signés avec des bénévoles engagés dans la RCSC, d’en signer également avec les AASC afin de pouvoir les faire intervenir rapidement en bloc au moment voulu.

La commission adopte l’amendement.

 

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL16 et CL17 de M. Didier Lemaire, rapporteur.

 

La commission adopte l’article 1er modifié.

 

Article 2 (art. L. 724-7 du code de la sécurité intérieure) : Réduction des délais sous lesquels l’employeur peut s’opposer à la mobilisation d’un réserviste en cas de crise majeure

 

Amendement CL3 de M. Florian Chauche

M. Jean-François Coulomme (LFI-NUPES). L’amendement vise à consacrer une autorisation d’absence de droit pour les personnes souhaitant s’engager dans les RCSC. Aux termes de l’article L. 724-7 du code de la sécurité intérieure, le salarié doit obtenir l’accord de son employeur. Afin de faciliter et d’encourager un tel engagement bénévole, nous proposons de renverser cette logique en prévoyant que l’autorisation d’absence soit de droit, tout en conservant la possibilité pour l’employeur de la refuser par une décision motivée.

Mon propos vaut également défense de l’amendement CL1.

M. Didier Lemaire, rapporteur. Sur les amendements CL3 et CL1, mon avis est défavorable. Ils ne me semblent pas respecter un juste équilibre.

Instaurer une autorisation d’absence de droit pour les réservistes rendrait leurs employeurs potentiels aussi réticents à leur embauche qu’à celle des pompiers volontaires. Il faut, en outre, garder en tête les conséquences économiques qu’elle pourrait avoir sur les artisans ou sur les entreprises.

L’article 2 ramène à vingt-quatre heures le délai dans lequel un employeur peut notifier son refus à son salarié désireux d’exécuter ses missions de réserviste pendant son temps de travail, uniquement en cas de crise majeure, étant entendu que les RCSC peuvent aussi mener des actions de prévention, ne nécessitant pas forcément des réservistes qu’ils s’absentent de leur travail.

M. Julien Rancoule (RN). Les pompiers volontaires ne sont pas automatiquement autorisés à s’absenter de leur travail : ils ne peuvent le faire que sur le fondement d’un accord prévoyant un délai. Je ne vois pas pourquoi les membres des RCSC pourraient le faire sans l’accord de leur employeur.

La rédaction de la proposition va dans le sens de l’amendement, en limitant drastiquement le délai de notification du refus de l’employeur pour le ramener à vingt-quatre heures, et en imposant à l’employeur de le justifier par une nécessité de service. Nous voterons donc contre l’amendement CL3.

Quant à l’amendement CL1, il tend à ramener le délai de notification du refus de l’employeur d’une semaine à quarante-huit heures, alors que la proposition de loi vise à le fixer à vingt-quatre heures. Cela semble contredire l’amendement CL3, dont le but est d’autoriser presque immédiatement l’absence des réservistes.

M. Jean-François Coulomme (LFI-NUPES). Les deux sujets sont différents. L’un a trait, en quelque sorte, à l’ordre hiérarchique de la réquisition, l’autre, aux délais.

La gravité des événements nécessitant l’intervention des réservistes n’est pas toujours connue avec certitude. Il faut privilégier l’urgence de la réaction et la disponibilité des réservistes, et ne pas laisser à l’employeur la latitude de l’évaluation du risque.

Quant aux délais de réaction, ils doivent être adaptés à la violence et à la rapidité des événements concernés.

La commission rejette l’amendement.

 

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette l’amendement CL1.

 

Amendement CL15 de M. Vincent Bru

M. Vincent Bru (Dem). L’amendement accorderait à l’employeur un délai de notification de refus de quarante-huit heures plutôt que de vingt-quatre heures, comme le prévoit la proposition. Il s’agit d’un délai maximum, susceptible d’être réduit à une heure ou moins.

Les employeurs concernés sont souvent de petites entreprises, notamment artisanales, auxquelles il serait difficile de respecter un délai de vingt-quatre heures, en particulier en période de vacances ou lors de week-ends ou de jours fériés.

M. Didier Lemaire, rapporteur. Un délai maximum de quarante-huit heures serait en effet plus acceptable pour les employeurs. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

 

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL18 de M. Didier Lemaire, rapporteur.

 

La commission adopte l’article 2 modifié.

 

 

Article 3 (art. L. 333‑5 [nouveau] du code de l’éducation) : Validation des compétences acquises par les lycéens engagés au sein d’une réserve communale de sécurité civile au titre de leur formation

 

Amendement CL20 de M. Didier Lemaire

M. Didier Lemaire, rapporteur. L’amendement fait suite à l’audition d’acteurs de l’éducation nationale proposant de substituer la notion de « valorisation », plus consensuelle, à celle de « validation », dont l’application est trop complexe.

La commission adopte l’amendement.

 

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL19 de M. Didier Lemaire, rapporteur.

 

La commission adopte l’article 3 modifié.

 

Article 4 (art. L. 611-9 du code de l’éducation) : Validation des compétences acquises par les étudiants engagés au sein d’une réserve communale de sécurité civile au titre de leur formation

 

La commission adopte l’article 4 non modifié.

 

Après l’article 4

 

Amendement CL5 de M. Florian Chauche

M. Jean-François Coulomme (LFI-NUPES). Notre groupe souhaite que celles et ceux de nos concitoyens qui donnent de leur temps au sein d’une RCSC voient cet engagement reconnu par la nation. Bien qu’il ne s’agisse que d’une reconnaissance symbolique, il apparaît important de les distinguer et de leur rendre hommage, en leur disant notre reconnaissance et notre considération. Des dispositions similaires ont été appliquées pour reconnaître et saluer l’engagement des bénévoles des AASC. Faire de même pour les bénévoles des RCSC semble dès lors pertinent et permettra de mettre sur un pied d’égalité tous les acteurs de la sécurité civile.

M. Didier Lemaire, rapporteur. Une telle distinction inciterait les citoyens à s’engager dans les RCSC, en particulier les jeunes, étudiants et élèves, qui seraient ainsi reconnus pour leur action citoyenne. C’est l’objectif de la proposition. Avis favorable, donc.

La commission adopte l’amendement.

 

Article 5 : Gage financier

 

La commission adopte l’article 5 non modifié.

 

Après l’article 5

 

Amendement CL7 de M. Julien Rancoule

M. Julien Rancoule (RN). L’amendement vise à lancer une campagne de communication et de sensibilisation relative aux RCSC, afin d’informer la population et les élus de l’existence de ces dispositifs et de les développer. Les RCSC sont un bon vecteur d’acculturation aux risques relevant de la sécurité incendie en particulier et de la sécurité civile en général. M. le rapporteur et la NUPES ont évoqué l’importance de communiquer à leur sujet.

M. Didier Lemaire, rapporteur. De fait, 679 RCSC pour 35 000 communes en France, c’est bien trop peu. Mon avis est bien sûr favorable.

M. Romain Baubry (RN). Lancer une telle campagne est une très bonne chose. Je le vois dans ma circonscription : seule une poignée de citoyens, souvent retraités, s’engagent dans les RCSC. Une sensibilisation les ferait connaître à davantage de jeunes, auxquels elle pourrait donner le goût de l’engagement, l’envie de les intégrer et de se mettre au service de la collectivité.

La commission adopte l’amendement.

 

La commission adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

 

*

*     *

Puis, la commission examine, en application de l’article 88 du Règlement, des amendements à la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant réparation des préjudices subis par les personnes condamnées pour homosexualité entre 1942 et 1982 (n° 2247) (M. Hervé Saulignac, rapporteur).

 

Article

Amendement

Auteur

Groupe

Sort

1er

30

M. SAULIGNAC Hervé

Socialistes et apparentés

Accepté

1er

22

M. GÉRARD Raphaël

Renaissance

Accepté

1er

31

M. SAULIGNAC Hervé

Socialistes et apparentés

Accepté

3

23

M. GÉRARD Raphaël

Renaissance

Accepté

3

33

M. SAULIGNAC Hervé

Socialistes et apparentés

Accepté

4

34

M. SAULIGNAC Hervé

Socialistes et apparentés

Accepté

4

10

M. KERBRAT Andy

La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale

Accepté

4

40

M. SAULIGNAC Hervé

Socialistes et apparentés

Accepté

ap. 4

35

M. SAULIGNAC Hervé

Socialistes et apparentés

Accepté

Titre

19

M. GÉRARD Raphaël

Renaissance

Accepté

 

Tous les autres amendements qui n’ont pas été examinés lors de la réunion tenue en application de l’article 86 du Règlement ont été repoussés.

 

La séance est levée à 15 heures 45.

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Membres présents ou excusés

 

 

Présents. – Mme Caroline Abadie, M. Henri Alfandari, M. Romain Baubry, M. Florent Boudié, M. Xavier Breton, M. Yannick Chenevard, M. Jean-François Coulomme, M. Philippe Dunoyer, Mme Raquel Garrido, M. Jordan Guitton, M. Sacha Houlié, M. Timothée Houssin, Mme Marietta Karamanli, M. Didier Lemaire, Mme Marie-France Lorho, Mme Aude Luquet, M. Emmanuel Mandon, Mme Élisa Martin, M. Paul Molac, M. Didier Paris, M. Rémy Rebeyrotte, Mme Sandra Regol, M. Thomas Rudigoz, M. Hervé Saulignac, Mme Andrée Taurinya

Excusés. - M. Éric Ciotti, Mme Mathilde Desjonquères, Mme Élodie Jacquier-Laforge, Mme Emeline K/Bidi, M. Mathieu Lefèvre, Mme Naïma Moutchou, M. Davy Rimane, M. Olivier Serva, M. Jean Terlier

Assistaient également à la réunion. - M. Antoine Armand, M. Vincent Bru, M. Julien Rancoule