Compte rendu

Commission d’enquête relative à l’identification des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations françaises de sport, du mouvement sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif ayant délégation de service public

 Audition, ouverte à la presse, de M. Éric Borghini, membre du comité exécutif (Comex) de la Fédération française de football, président de la Commission fédérale de l’arbitrage              2

– Audition, ouverte à la presse, de M. Guy Drut, membre du Comité international olympique (CIO), ancien ministre chargé de la jeunesse et des sports              13

– Présences en réunion................................19


Jeudi
26 octobre 2023

Séance de 14 heures 30

Compte rendu n° 33

session ordinaire de 2023-2024

Présidence de
Mme Béatrice Bellamy,
Présidente de la commission

 


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La séance est ouverte à quatorze heures trente.

 

La commission auditionne M. Éric Borghini, membre du Comex de la Fédération française de football, président de la Commission fédérale de l’arbitrage.

Mme la présidente Béatrice Bellamy. Nous accueillons M. Éric Borghini, membre du comité exécutif (Comex) de la Fédération française de football (FFF), président de la commission fédérale de l’arbitrage.

Nous avons entamé les travaux de cette commission d’enquête sur l’identification des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations françaises de sport, du monde sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif le 20 juillet dernier. L’Assemblée nationale a décidé de sa création à la suite de très nombreuses révélations de sportifs et de diverses affaires judiciaires ayant trait à la gestion de certaines fédérations.

Nos travaux se déclinent autour de trois axes : les violences physiques, sexuelles ou psychologiques dans le sport, les discriminations sexuelles et raciales et les problématiques liées à la gouvernance financière des organismes de gouvernance du monde sportif.

Monsieur Borghini, vous avez été l’un des premiers à appeler publiquement au départ de l’ancien président de la FFF, M. Noël Le Graët. À partir de septembre 2022, des articles de presse ont fait état de graves difficultés de fonctionnement au sein de la Fédération. Les faits évoqués portent sur la gouvernance et le management de la Fédération et sur des faits de harcèlement ou ayant trait à des violences sexuelles et sexistes (VSS) au siège de la FFF, comme au Centre national du football de Clairefontaine.

Ces articles évoquent des textos que le président de la Fédération aurait adressés à des salariées du siège fédéral et qui comportaient des avances à caractère sexuel ou des comportements déplacés avec certaines collaboratrices. Aviez-vous eu connaissance de tels faits avant ces révélations par la presse ? Si tel est le cas, comment et à quel moment ? Quelle est votre vision de la gouvernance et du fonctionnement de la FFF, ainsi que de sa politique de lutte contre les violences sexuelles et sexistes, les violences psychologiques, les discriminations et le racisme ? Quelle appréciation portez-vous concernant la tutelle du ministère sur la Fédération ? Votre audition fournira aussi l’occasion de revenir sur le monde de l’arbitrage, qui a également été marqué par des dénonciations à propos desquelles nous souhaiterions vous entendre.

Cette audition est ouverte à la presse et elle est retransmise en direct sur le site de l’Assemblée nationale. L’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d’enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main et à dire : « Je le jure. »

(M. Éric Borghini prête serment.)

M. Éric Borghini, membre du Comex de la Fédération française de football, président de la commission fédérale de l’arbitrage. La première partie de votre question a déjà été traitée, d’une certaine manière, par la mission d’inspection générale du ministère de la jeunesse et des sports, précisément après les révélations dont vous faites état concernant le président Le Graët. Pour ma part, je n’ai jamais eu connaissance de ces faits avant ces révélations, ni remarqué quoi que ce soit à l’occasion des comités exécutifs. Je précise qu’à titre personnel, je n’avais pas de relations particulières avec le président en dehors de ces Comex.

Les difficultés de la gouvernance sont apparues quand des désaccords se sont fait jour entre la directrice générale de l’époque, Florence Hardouin, et le président. À partir de ce moment-là, si vous permettez l’expression, le bateau a commencé à tanguer : quand le binôme président-directeur général dysfonctionne, la gouvernance entière dysfonctionne. Lorsque la rupture avec le président a été consommée, quand il lui est apparu qu’elle ne pourrait plus travailler avec lui, c’est-à-dire à l’extrême fin, Florence Hardouin m’a parlé. Elle m’a raconté alors ce qu’elle a ensuite révélé dans la presse, notamment dans le journal L’Équipe.

Ensuite, je considère que le ministère est dans son rôle quand il exerce sa tutelle, puisque nous sommes délégataires d’une mission de service public. J’ajoute que la Cour des comptes nous contrôle également très régulièrement. Il est tout à fait normal et logique que cette tutelle s’exerce, et elle se déploie aussi dans les territoires, par le biais des directions départementales de la cohésion sociale, qui exercent une tutelle sur les districts et les directions régionales sur les ligues.

Je suis également président de la ligue Méditerranée de football, et à ce titre particulièrement impliqué dans le football amateur, c’est-à-dire le football de masse. Je rappelle que la FFF compte 2,2 millions de licenciés, dont 300 000 encadrants, 35 000 éducateurs, 25 000 arbitres, 400 000 bénévoles et 800 000 jeunes, qui évoluent dans 13 000 clubs. Environ 1 million de matchs sont organisés chaque année, soit 30 000 matchs par week-end. Je précise par ailleurs que nous manquons d’arbitres pour encadrer toutes ces rencontres.

En résumé, il est compliqué de gouverner un tel paquebot. Fort heureusement, notre organisation est bien fixée par la loi, par le code du sport. Ainsi, la crise de gouvernance que nous avons connue, puisque le président a été conduit à démissionner, a été résolue par l’application de nos statuts. À cette occasion, la Fédération a prouvé sa maturité.

Notre Comex réunit l’équipe dirigeante et notre assemblée fédérale – une assemblée délibérante – se réunit deux fois par an. Dans l’intervalle, de nombreux collèges se réunissent également, notamment les collèges de présidents de districts et ceux des présidents de ligue, mais aussi le collège des autres acteurs du football, qui regroupe les joueurs, les éducateurs et les arbitres. Par conséquent, la vie démocratique au sein de la Fédération est réelle et le débat permanent.

Le Comex comprend aujourd’hui quatorze personnes, élus et deux membres de droit, les présidents de la ligue du football professionnel et la ligue du football amateur. La gouvernance du football français a été modernisée à l’issue des états généraux du football, qui avaient eu lieu après les événements survenus à Knysna dans le cadre de la coupe du monde de football en 2010, en Afrique du Sud. Au-delà de ce Comex resserré, il existe une haute autorité, instance de contrôle, qui n’a peut-être pas toujours rempli son rôle. Nous nous sommes mis en conformité avec la loi de 2022 : le prochain comité exécutif qui sortira des urnes en décembre 2024 sera composé de vingt-huit membres, à parité totale. Surtout, ce que nous appelons les « familles » sont intégrées à l’organe exécutif, alors qu’aujourd’hui, elles figurent seulement dans la Haute autorité du football.

En matière de lutte contre les violences sexistes et sexuelles, vous rencontrerez demain le président de la Fédération et son directeur général ; ils vous donneront bien entendu encore plus d’informations que moi. Malgré tout, je vous informe que nous avons adopté jeudi dernier un vaste plan d’engagement sur trois ans. Jusqu’à maintenant, la FFF reposait essentiellement sur deux piliers : un pilier sportif et un pilier économique. À ce titre, il faut rendre justice à Noël Le Graët, qui a remis la Fédération en ordre de marche à partir de 2011 et après les événements de Knysna, autour de ces deux piliers. Sur le plan sportif, nos vingt-trois sélections nationales se hissent toutes dans le dernier carré des grands tournois européens et mondiaux dans lesquels elles sont engagées. Sur le plan économique, M. Le Graët est parvenu à stabiliser les finances de la Fédération. Aujourd’hui, sur un budget de 264,6 millions d’euros, 104 millions d’euros, soit 37 %, sont consacrés au football amateur, le football de masse, le service public sportif. À ce titre, la FFF est la première fédération européenne à consacrer un tel budget à son secteur amateur.

En revanche, il manquait un troisième pilier, qui a été adopté jeudi dernier en Comex, à l’initiative de M. Philippe Diallo. Ce troisième pilier repose lui-même sur trois axes : le premier axe concerne la lutte contre les VSS et d’une manière générale, toutes les discriminations, comme l’homophobie et le racisme ; le deuxième axe promeut la citoyenneté ; la diversité et l’inclusion par le football ; et le troisième axe porte sur l’adaptation face aux défis climatiques. Six millions d’euros seront consacrés sur trois ans à ce plan, qui débutera en novembre et sera placé sous la responsabilité nouvelle d’une direction de l’engagement.

Mme la présidente Béatrice Bellamy. Vous estimez que la nomination de Noël Le Graët à la tête du bureau parisien de la Fédération internationale de football association (Fifa) constitue une manière d’adoucir son départ. Comprenez-vous que cette nomination puisse choquer l’opinion publique et qu’elle puisse renvoyer une mauvaise image du football, en France et à l’étranger ?

M. Éric Borghini. Dans le football, comme dans toutes les institutions, des amitiés peuvent se nouer et je crois que Gianni Infantino, le président de la Fifa, et Noël Le Graët ont des relations d’amitié très marquées. Il lui a été très difficile de quitter la présidence et il m’en a d’ailleurs beaucoup voulu. Cette nomination peut effectivement nuire à l’image du football. Mais l’image de la Fifa est-elle à ce point reluisante ? La question se pose.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Pouvez-vous revenir sur les causes du départ de M. Le Graët ?

M. Éric Borghini. Lorsque la presse a révélé des comportements déplacés dont le président se serait rendu coupable, nous avons évidemment réuni un comité exécutif. À cette occasion, le président nous a dit, droit dans les yeux, qu’il n’avait jamais adressé le moindre texto déplacé à quiconque. Il a également affirmé que, durant toute sa vie, il n’avait jamais eu un comportement déplacé envers une femme. Nous l’avons cru d’autant plus facilement que le président Le Graët n’était pas vraiment un adepte des textos.

Par la suite, une jeune femme a déclaré avoir été invitée à plusieurs reprises à boire du champagne chez lui. D’autres déclarations de Florence Hardouin sont allées dans le même sens. Peu à peu, l’étau s’est resserré.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Les témoignages se sont ensuite accumulés. Mais je reviens à la question de Mme la présidente Bellamy. Comprenez-vous que la nomination de M. Le Graët à la Fifa choque l’opinion publique, qui peut y voir la traduction d’une forme d’impunité ? Il n’a pas été réellement sanctionné pour les faits qui lui étaient justement reprochés au moment de son départ.

M. Éric Borghini. Il ne faut pas minimiser le coût de ce départ en cours de mandat, qui représente en soi une forme de sanction, même s’il ne s’agit pas d’une sanction judiciaire. S’il avait quitté ses fonctions lors de l’assemblée générale de janvier 2023, après la finale de la coupe du monde disputée au Qatar, il aurait été considéré comme l’un des plus grands dirigeants de tous les temps de notre fédération. Son départ forcé a donc constitué pour lui une véritable sanction, d’autant plus qu’il nie toujours aujourd’hui les faits qui lui sont reprochés. Je rappelle qu’il a déposé plainte contre Mme la ministre des sports. Sa défense extrêmement active repose sur une contestation formelle des faits.

Ensuite, nous n’avons aucune prise sur la gouvernance de la Fifa et les nominations auxquelles elle procède. Je reconnais avec vous que cette nomination est choquante, mais je pense que le président de la Fifa a voulu tenir compte de l’immense carrière de M. Le Graët. Ce faisant, il n’a pas renvoyé une image très saine de son institution.

Mme Claudia Rouaux (SOC). Ne pensez-vous pas que cette affaire fragilise malgré tout la présidence de Philippe Diallo ? Dans le monde du football, nombreuses sont les personnes qui estiment que M. Le Graët est toujours le dirigeant officieux de la FFF.

M. Éric Borghini. Je peux répondre sans ambiguïté par la négative. Il a complètement quitté la Fédération. Au même titre que les autres anciens présidents de la Fédération en vie, il assiste aux assemblées générales s’il le souhaite. Mais il n’y a plus d’influence sur quiconque.

Vous avez également évoqué l’affaiblissement éventuel de Philippe Diallo. La question s’est posée d’une démission collective du comité directeur, après celle de M. Le Graët. Elle n’a pas eu lieu, car nous avons appliqué nos statuts : le vice-président est devenu président par intérim et lors de l’assemblée générale, il a été massivement élu par l’ensemble du football français, amateur et professionnel. Depuis qu’il exerce la fonction de président, il renvoie une belle image de notre football. Il s’agit d’un homme calme, posé, qui met en œuvre un plan magnifique répondant aux exigences de l’audit du ministère des sports.

Notre fédération agit en effet dans le respect absolu de la tutelle et a agi en l’espace de quelques mois, alors même qu’il n’est pas facile de manœuvrer un tel paquebot, comme je l’ai précédemment indiqué. Je pense que le président est en train de relever ce défi, en compagnie d’un directeur général, grand serviteur de l’État, qui a assumé de très grandes responsabilités au sein du ministère de la jeunesse et des sports, puisqu’il était directeur de cabinet de M. Jean-François Lamour, lorsque celui-ci était ministre. Il connaît donc parfaitement cette matière et met en œuvre les préconisations nécessaires.

En effet, une lutte transversale beaucoup plus approfondie contre les VSS ; l’homophobie et le racisme était nécessaire, non seulement au siège parisien de la FFF, mais également dans les ligues et les districts. Ne nous voilons pas la face : si le racisme et l’homophobie ne sont pas le quotidien de notre discipline, ils existent dans le football et la Fédération a trop longtemps été en retrait sur ces questions. Aujourd’hui, cela n’est plus le cas, nous sommes déterminés à lutter contre ces fléaux, qui ternissent l’image de notre sport et ses valeurs.

Mme la présidente Béatrice Bellamy. Je rappelle que M. Le Graët était plus laconique : il disait que le « phénomène raciste dans le football n’existe pas ou peu ».

M. Frédéric Zgainski (Dem). Je souhaite revenir sur vos propos introductifs. Le football est un sport extrêmement populaire. Se pose aujourd’hui la question du caractère démocratique des organisations qui portent ce sport. La Fifa a embauché M. Le Graët, mais elle ne fait l’objet d’aucun contrôle international.

S’agissant de la gouvernance de la FFF, il est par exemple de notoriété publique que l’entraîneur de l’équipe de France, Didier Deschamps, s’est rendu au domicile personnel du président Le Graët, qui a décidé seul de le renouveler, sans en référer au Comex. Vous nous confirmerez ou non cette information.

Par ailleurs, jusqu’au mois de juin dernier, j’étais licencié au club de football de ma ville, Cestas. Je connais les coprésidents de ce club et le président de la ligue d’Aquitaine, l’ancien arbitre international Saïd Ennjimi. En revanche, le président de district est peu connu, nous ignorons la manière dont il est élu et le programme qu’il porte. Cet exemple illustre le fait qu’au-dessus des clubs et jusqu’à la Fifa, la chaîne décisionnelle n’est pas claire ; des responsables sont élus sans que l’on ne sache par qui.

Il semble y avoir un problème de gouvernance dans ce sport, qui est le sport le plus populaire au monde. Quelle analyse faites-vous de cette situation ? Quelles pistes de réforme envisagez-vous pour rendre cette infrastructure plus légitime dans ses décisions ?

M. Éric Borghini. L’organisation de la gouvernance territoriale des ligues et des districts est claire. Les présidents de district sont élus par l’assemblée générale des clubs, au suffrage universel direct, généralement sur un scrutin de liste.

Ensuite, certaines ligues privilégient le suffrage universel direct. Il en va ainsi à la ligue de Paris-Île-de-France, où plus de 1 200 clubs élisent le président de la ligue et son équipe sur la base d’un scrutin de liste. Dans la plupart des ligues, le suffrage est mixte, avec, d’une part, des grands électeurs – soit 55 à 60 % des voix – qui représentent les clubs de niveau amateur de district et, d’autre part, les clubs de ligue qui évoluent au niveau régional.

Ce système est aujourd’hui en vigueur, mais il peut tout à fait être revu : demain, la loi pourrait décider d’imposer dans les statuts types des fédérations le suffrage universel direct, pour tous les échelons. Personnellement, j’y suis favorable, d’autant plus que les moyens électroniques le permettent aisément. Ce mode de scrutin sera d’ailleurs employé au niveau fédéral, en 2024, quand l’ensemble des 13 000 clubs voteront à l’assemblée fédérale pour élire le président de ma fédération.

S’agissant de Saïd Ennjimi, ancien arbitre international et consultant pour L’Équipe, tous les présidents de ligue et de district ne bénéficient pas de la même exposition médiatique que certains d’entre nous. De fait, le football amateur n’intéresse pas vraiment les médias. Cependant, ils tirent tous leur légitimité de l’élection et ils travaillent tous pour encadrer notre jeunesse et lui apprendre à jouer au football. De fait, le premier élément indiqué dans la délégation de service public qui est confiée à la Fédération concerne le rôle social et sociétal du football.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Vous êtes président de la commission fédérale des arbitres. Je souhaiterais revenir avec vous sur l’affaire Galletti. Elle concerne des faits de chantage et de harcèlement sexuel d’arbitres mineurs, qui ont été dévoilés par Romain Molina, qui a récupéré des messages Facebook où M. Daniel Galletti proposait des masturbations et des fellations aux jeunes arbitres s’ils voulaient obtenir un bon rapport. L’ancien responsable des arbitres à Paris était même prêt à payer 1 000 euros un arbitre de seize ans pour arriver à ses fins. L’ex-arbitre Nicolas Pottier dit avoir entendu parler de cette affaire dès 2014 et il semble que le milieu de l’arbitrage était au courant. Un signalement a-t-il été fait à l’époque ?

M. Éric Borghini. À l’époque, aucun signalement n’a été fait. Au niveau de la Fédération, deux échelons doivent être distingués : l’échelon fédéral et l’échelon de la ligue. M. Galletti était président de la commission des arbitres de la ligue de Paris-Île-de-France. Parallèlement, il était observateur d’arbitres pour la Fédération en catégorie F4, c’est-à-dire la première division des arbitres de la Fédération, mais également référent d’un groupe de F4.

J’ignorais tout de cette affaire et j’ai appris le 9 juillet 2022 que Daniel Galletti avait été écarté de la présidence de la commission des arbitres de la ligue de Paris-Île-de-France. J’étais surpris. Le lendemain, j’ai téléphoné à Jamel Sandjak président de la ligue de Paris-Île-de-France, qui était à l’époque mon collègue au Comex pour m’enquérir de la situation et savoir si je devais en tirer des conséquences pour la Fédération. Il m’a finalement rappelé le 11 juillet – je me souviens très bien de la date puisque mon anniversaire est le 12 juillet –, la veille d’une commission des arbitres prévue de longue date, et m’a révélé les faits que vous venez de mentionner. Ahmed Bouajaj, le secrétaire général de la ligue de Paris-Île-de-France, qui avait été chargé de conduire une enquête interne, avait récupéré les sms et avait interrogé le conseiller technique régional en arbitrage, Éric Poulat, un ancien très grand arbitre international. Ce dernier lui avait confirmé que M. Galletti lui avait demandé de modifier le classement des arbitres. Mis face aux preuves, M. Galletti a immédiatement démissionné.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. En dépit de toutes ces preuves, je constate que vous n’avez pas effectué de signalement. Nous disposons du procès-verbal de la commission du 12 juillet, lequel indique qu’il est mis fin aux fonctions de M. Galletti, sans cependant en préciser les raisons. Quelles étaient-elles ?

M. Éric Borghini. Mon vice-président, qui le connaissait pour avoir travaillé avec lui, l’a appelé et lui a demandé si des arbitres de la Fédération étaient concernés par ces textos. Celui-ci lui a répondu par la négative et a même nié les faits. Le 12 juillet, sur la foi de l’enquête menée par la ligue de Paris-Île-de-France, nous avons décidé de mettre un terme à toutes les fonctions de M. Galletti. En séance, j’ai adressé un message WhatsApp à Jamel Sandjak, que j’ai par ailleurs fourni aux inspecteurs. Dans celui-ci, je lui indiquais que, puisque l’affaire concernait la ligue de Paris-Île-de-France, qui avait d’ailleurs mené l’enquête, il lui revenait d’effectuer le signalement, au titre de l’article 40 du code de procédure pénale. Mais il ne l’a pas fait.

Le message adressé à M. Sandjak était le suivant : « Salut Jamel, Patrick a eu Galletti, qui devait nous faire parvenir sa démission d’observateur fédéral avant neuf heures. Il ne l’a pas fait. Au contraire, il nous adresse une lettre minimisant les faits et ne décrivant pas du tout les mêmes faits que ceux que tu m’as indiqués. Nous, on met fin à ses fonctions ce matin, en CFA. Il n’y a pas de sujet. En revanche, l’avocat que je suis pense que tu devrais faire un signalement article 40. Je pense que ça sent mauvais et que ça va se savoir. Autant te protéger, ainsi que la Ligue. Demande à tes avocats ».

Pascal Garibian, à l’époque directeur de l’arbitrage, est commandant fonctionnel de la police nationale. Il nous a indiqué que le signalement devait effectivement être réalisé par la ligue de Paris-Île-de-France et que, si elle ne le faisait pas, la Fédération prendrait le relais. C’est exactement ce qui s’est passé : devant l’inaction de la ligue, nous avons procédé au signalement.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Ce sms est instructif, dans la mesure où vous évoquez la nécessité de protéger la Ligue, sans mentionner à un seul moment les victimes. De quelle manière ces dernières ont-elles été prises en charge par la ligue ?

M. Éric Borghini. Je ne peux pas vous répondre à la place de la ligue. De son côté, la Fédération dispose d’une convention avec France Victimes. Le plan d’engagement que j’ai évoqué précédemment amplifiera d’ailleurs ce dispositif. La Fédération a notamment décidé de se constituer systématiquement partie civile à chaque fois que des agressions seront révélées.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. M. Galletti a-t-il conservé sa licence lui permettant de rester au contact des jeunes ?

M. Éric Borghini. Je l’ignore, mais cela m’étonnerait. Pour nous, il est radié du football. Si les choses ont été bien faites, il ne devrait plus avoir de licence. De toute manière, le contrôle d’honorabilité que nous pratiquons devrait empêcher un tel contact avec les jeunes. Je précise que 88 000 contrôles d’honorabilité ont été conduits, à ce jour. M. Galletti était par ailleurs enseignant, mais j’ignore également s’il a quitté l’éducation nationale.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. D’après les informations dont nous disposons, il a conservé sa licence.

M. Éric Borghini. Vous me l’apprenez et j’en prends note.

Mme la présidente Béatrice Bellamy. Je vous demande de nous confirmer cette information lorsque vous aurez réalisé les démarches nécessaires.

M. Éric Borghini. Je vous le confirmerai.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Vous présidez la commission fédérale de l’arbitrage. Nicolas Pottier, président du district de football de la Mayenne, a formulé en juin dernier, dans le magazine So Foot, de graves accusations contre le monde de l’arbitrage du football. Selon lui, l’homosexualité pouvait être considérée, à la fin des années 2000, comme une « anomalie dans le système ». Partagez-vous ce constat ? La situation a-t-elle évolué ? M. Pottier explique également que la FFF ne l’a pas soutenu, qu’il a subi des menaces et des pressions et a finalement été mis au ban de l’arbitrage français.

M. Éric Borghini. La Fédération l’a particulièrement soutenu puisqu’elle l’a recruté comme coordinateur national de notre politique de recrutement d’arbitres. Il exerce cette fonction rattachée à la ligue du football amateur (LFA). Je précise que je n’étais pas aux affaires dans les années 2000, puisque je ne suis devenu président de la commission fédérale des arbitres qu’en 2013. Lorsque l’article de So Foot est paru, nous avons appris – parce que nous l’ignorions – que M. Pottier avait déposé deux plaintes : l’une pour un viol qui se serait produit en 2009, l’autre pour harcèlement moral et sexuel au travail à partir de 2022, année de son embauche.

Conformément au droit du travail, le Comex a décidé de mener l’enquête interne obligatoire, qui a été confiée à un cabinet extérieur, le cabinet Alcens. Celui-ci a restitué ses travaux devant le Comex jeudi dernier et a conclu qu’à ce stade il n’y avait pas de suspicion de harcèlement moral et sexuel au travail dans le cas de M. Pottier. Néanmoins, le cabinet a également effectué une série de préconisations concernant les risques psychosociaux liés à l’activité d’arbitre. Le Comex a décidé de reprendre intégralement toutes ces recommandations, qui sont mises en œuvre dès maintenant.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Vous êtes mentionné dans cet article, qui parle de vous dans les termes suivants : « Dans l’une de ces discussions, il reconnaît se montrer ‘terriblement indiscret et intrusif’ et parfois se ‘laisser aller avec [ses] arbitres’ ». Il est question d’une multiplication de marques d’affection et d’attitudes ambiguës avec certains arbitres. Pouvez-vous nous en dire plus ?

M. Éric Borghini. Ce ne sont pas mes propos. Je n’ai pas souvenance d’avoir prononcé ou écrit de telles phrases. En revanche, il est vrai que ma présidence pourrait être qualifiée de « paternaliste », ce qui n’est peut-être pas adapté au monde d’aujourd’hui.

Je ne suis pas un ancien arbitre de haut niveau, mais un ancien arbitre de niveau régional. Personnellement, je ne procède pas aux évaluations des arbitres, aux observations d’arbitres, aux notations d’arbitres. Le règlement ne le permet pas : n’ayant pas moi-même été arbitre en professionnel, je ne peux pas contrôler des arbitres professionnels. Ma présidence a consisté, au niveau humain, à mettre ce groupe d’arbitres dans les meilleures dispositions possibles sur le plan mental, affectif et humain, afin qu’ils puissent arbitrer en ayant la certitude absolue que leur président est avec eux.

Dans ce cadre-là, pendant une dizaine d’années et jusqu’à très récemment, j’ai adressé un texto d’encouragement aux arbitres avant chaque match de ligue 1 et de ligue 2, en effectuant un commentaire sur le match à venir et en leur apportant mon soutien et celui de la commission. J’ai cessé de le faire après en avoir discuté avec le cabinet Alcens. Ils m’ont en effet indiqué que cette démarche, qui part d’un bon sentiment, peut être considérée comme du harcèlement moral de niveau 2 au sens du code du travail, même si les arbitres ne sont pas des employés de la Fédération. Le cabinet a ajouté que cette attitude pouvait être vue comme une forme d’emprise, ce que j’ai découvert à cette occasion.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Pourrez-vous nous transmettre ce rapport ?

M. Éric Borghini. Je ne dispose pas de ce rapport, qui a simplement été restitué au Comex, sans être rendu public.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Nous pouvons l’obtenir dans le cadre de commission d’enquête. Nous effectuerons donc une demande officielle.

M. Éric Borghini. Je n’ai pas ce rapport. Il est entre les mains de la Fédération.

Mme la présidente Béatrice Bellamy. L’Union des associations européennes de football (UEFA) a adopté en 2013 une résolution qui établit un protocole de gestion des incidents racistes survenus en cours d’une rencontre sportive. Les arbitres doivent d’abord mettre en garde le public, puis éventuellement suspendre la rencontre. Enfin, ils peuvent décider d’arrêter définitivement le match. Dix ans après son adoption, quel regard portez-vous sur l’application de ce protocole ? Il semble que la troisième étape du protocole, c’est-à-dire l’arrêt définitif, n’a été activée qu’une seule fois. Comment l’expliquer ? Seriez-vous favorable à un durcissement de l’attitude des arbitres ?

M. Éric Borghini. Ce protocole a été mis en œuvre la semaine dernière, lors d’une rencontre de la coupe Gambardella, épreuve qui réunit des équipes de moins de 18 ans des clubs de football français, par un jeune arbitre de 19 ans, Maximilien Girard, de la ligue du Centre-Val de Loire. Nous l’avons d’ailleurs reçu avec le président Diallo en marge du Comex de jeudi dernier pour le féliciter. Il a ainsi sanctionné les « cris de singe » émis en tribune. Ce comportement exemplaire m’a rendu très fier d’être le président de la commission des arbitres.

Au niveau professionnel, les consignes sont légèrement différentes de celles que vous venez de mentionner. En réalité, la décision dépend du délégué de la rencontre et non de l’arbitre. En effet, au centre du terrain, l’arbitre n’entend qu’un brouhaha. À la télévision, le son est bien meilleur en raison des micros que les chaînes disposent dans les stades. Il ne voit pas non plus les banderoles. En revanche, le délégué de la rencontre voit et entend tout. C’est lui qui indique à l’arbitre de mettre en œuvre le protocole que vous venez de décrire.

Cependant, il est nécessaire de réfléchir de manière approfondie sur ce sujet. Le racisme est un cancer absolu et nous devons être intransigeants. Ces aspects ne dépendent pas uniquement de la Fédération, mais également de la ligue professionnelle de football. Les clubs professionnels agissent pour lutter contre le racisme et contre l’homophobie. Ils luttent, mais ne peuvent pas contrôler tous les groupes de supporters. Le club de Montpellier vient d’être sanctionné par la commission de discipline par un point de retrait au classement, un point avec sursis et un match à rejouer à huis clos. Les clubs subissent leurs supporters, quand ils dysfonctionnent de cette manière. De nombreux paramètres doivent être pris en considération. Je ne peux pas apporter une réponse définitive. Par pétition de principe, j’estime qu’il faut naturellement être intransigeant. Ce jeune arbitre nous a donné l’exemple.

Mme la présidente Béatrice Bellamy. En septembre 2019, interrogé par Ouest France sur l’arrêt de matchs en raison de chants et de banderoles jugés homophobes, Noël Le Graët déclarait : « Pour être clair, je trouve qu’on arrête trop de matches. » Qu’en pensez-vous ?

M. Éric Borghini. C’était le point de vue de Noël Le Graët ; ce n’est pas le mien.

Mme Claudia Rouaux (SOC). Il faudra prendre des mesures, qui ne peuvent pas reposer uniquement sur les arbitres. Dans de nombreux matchs, il n’existe pas de délégués. Existe‑t-il une véritable volonté de priver de stade ceux qui se rendent coupables de tels agissements ?

M. Éric Borghini. Il est certain que les interdictions administratives et judiciaires de stade constituent un moyen très efficace pour progressivement éliminer tous ces fauteurs de troubles. Ces gens ne viennent pas au stade pour voir des matchs de football ou pour supporter une équipe, mais pour développer leur idéologie de haine. Ils n’ont rien à faire dans une enceinte sportive. L’arsenal législatif existe, comme vous le savez. La technologie permet aujourd’hui de repérer, à l’aide des caméras, le supporter qui commet de tels désordres. Ces éléments doivent être approfondis, en lien avec la sécurité des clubs, les pouvoirs publics et, bien sûr, le ministère de la jeunesse et des sports. Ces dossiers sont extrêmement complexes.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Nous avons entendu de nombreux témoignages concernant le racisme et l’homophobie, dans de nombreux sports. Le football n’est pas le seul sport concerné. Malgré tout, je pense qu’une fédération comme la FFF dispose des moyens pour pouvoir travailler, proposer et avancer dans ce domaine. Le précédent président niait l’existence du racisme dans le sport ; nous pouvons espérer que, désormais, des progrès seront accomplis. Cependant, les responsables du football ne peuvent pas tenir un discours de détachement. Vous êtes aussi acteurs. Par ailleurs, connaissez-vous la cellule Signal-sports, son périmètre et son fonctionnement ?

M. Éric Borghini. Je n’en ai pas connaissance.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Cette cellule a été mise en place par le ministère des sports pour recenser notamment les violences sexuelles et sexistes. Elle peut transmettre des signalements à une fédération ou en recevoir de sa part, mais également déclencher la procédure de l’article 40 du code de procédure pénale. Elle souffre encore d’un déficit de notoriété.

Le 13 octobre, L’Équipe a publié un article sur une ligne téléphonique mise en place par la FFF pour recueillir les témoignages des victimes de violences. Apparemment, lors de deux Comex, les tentatives d’appel sur cette ligne n’ont jamais abouti, dans la mesure où elle était en fait rattachée à une structure qui n’existait plus. Avez-vous eu connaissance de cet article ?

M. Éric Borghini. Je n’ai eu connaissance ni de cet article ni de cet incident. À partir du mois de novembre 2023, la Fédération disposera de sa propre plateforme de signalement ouverte à tous les acteurs du football, y compris les tiers, dont les parents. Tout le monde aura accès à cette plateforme de signalement, qui fait partie du plan d’engagement que j’ai mentionné précédemment.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Pour le moment, comment se déroule la procédure de signalement ? Si quelqu’un souhaite effectuer un tel signalement à la FFF, comment peut-il agir ?

M. Éric Borghini. Nous avons un contrat avec France Victimes, qui offre un service d’écoute. France Victimes écoute les victimes, les oriente, leur fournit toutes les informations nécessaires et leur propose de déposer plainte. France Victimes continuera à nous assister dans le cadre de notre nouvelle plateforme. Celle-ci sera spécifiquement dédiée au football et pourra orienter les personnes qui la solliciteront vers France Victimes, pour une prise en charge et un accompagnement spécifiques.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. De quand date ce partenariat avec France Victimes ? Dans l’article de L’Équipe, il est indiqué qu’entre avril et octobre 2022, le numéro vert de la FFF dédié aux victimes de violences a sonné dans le vide. Vous avez évoqué votre contrat avec France Victimes et la création de votre plateforme, qui vient s’ajouter à la cellule Signal-sports du ministère des sports. Cette plateforme concernera-t-elle tous les faits de violence, de discrimination et de racisme ?

M. Éric Borghini. Je n’ai pas la date précise en tête, mais je pense que nous travaillons depuis plusieurs années avec France Victimes.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Apparemment, votre partenariat date de la fin de l’année 2022. Simultanément, cette ligne téléphonique ne fonctionnait pas. Dès lors, il est difficile de comprendre à qui les victimes pouvaient s’adresser au préalable. Quel était le fonctionnement avant 2022 ?

M. Éric Borghini. Je ne saurais vous le dire, mais je peux évoquer un exemple qui s’est produit sur la Côte d’Azur et qui peut fournir matière à réflexion pour votre commission, sur le lien avec l’État. Un formateur d’arbitres est accusé de viol par le grand-père d’un jeune arbitre de 17 ans. Le président du district de la Côte d’Azur et moi-même, en tant que président de ligue, nous nous sommes constitués partie civile.

Notre constitution de partie civile a été rejetée par le juge d’instruction. Nous avons ensuite fait appel, mais la chambre de l’instruction l’a également rejeté, au motif que ce viol ne se serait pas déroulé à l’occasion d’un acte de football. Concrètement, dès que nous avons connaissance de tels faits, nous sommes aux côtés des victimes. Je pense qu’il en est de même pour mes collègues présidents de districts et de ligue. Nous ne laissons pas une victime se débrouiller seule.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. De ce que nous savons, la cellule Signal-sports n’a reçu aucun témoignage de France Victimes sur le football. Pourtant, dans le cadre de cette commission d’enquête, nous avons lancé une plateforme pour recueillir des témoignages, et nous en avons reçu plusieurs concernant le football. Cela signifie bien que, jusqu’à présent, les dispositifs ont failli. La FFF a-t-elle communiqué sur cette plateforme Signal-sports pour permettre aux victimes d’effectuer des signalements auprès du ministère des sports ?

M. Éric Borghini. Des informations ont certainement été transmises, mais elles ne l’ont pas été de manière systématique et massive, comme cela sera le cas avec le nouveau plan d’engagement que nous allons mettre en place.

Je crois aussi également qu’un certain nombre de victimes hésitent à témoigner ; elles peuvent avoir honte. Nous voulons également travailler sur cet aspect. Nous avons prévu des modules de formation pour sensibiliser l’ensemble des acteurs du football à ces questions de violences sexistes et sexuelles et permettre de libérer la parole. Un numéro vert et une plateforme ne suffisent pas à mon avis ; il faut également mener un travail pédagogique, explicatif et bienveillant envers toutes ces personnes.

Mme Claudia Rouaux (SOC). Pourquoi avez-vous choisi de passer par France Victimes et non par Signal-sports, qui fonctionne bien ? Travaillez-vous avec Colosse aux pieds d’argile ? Pourquoi ne pas promouvoir Signal-sports au sein de votre fédération ?

M. Frédéric Zgainski (Dem). Je souhaite revenir sur le sujet de l’homophobie. Certaines fédérations ont prévu le port de brassards arc-en-ciel. Je ne reviendrai pas sur le triste épisode du Qatar – il me semble que Noël Le Graët avait demandé au capitaine de l’équipe de France de ne pas le porter, contrairement à l’équipe d’Allemagne, qui a eu le courage de le faire. En France, lors de certaines journées du championnat de Ligue 1 et de Ligue 2, les joueurs devaient porter ces brassards, ce que certains joueurs ont refusé. Je crains qu’ils n’aient pas été pour autant sanctionnés. Le confirmez-vous ?

M. Éric Borghini. Il ne s’agissait pas d’un brassard, mais d’un maillot avec un flocage arc-en-ciel. Les arbitres et délégués portaient en revanche un brassard arc-en-ciel et aucun n’a refusé de le faire. Je rappelle que seuls les arbitres sont sous l’autorité directe de la Fédération. Le port du maillot avec le flocage arc-en-ciel relève de la Ligue professionnelle de football, qui est très engagée dans cette opération, depuis cinq ans. Je ne peux donc pas vous faire part des suites que la Ligue a souhaité donner à cette affaire. En ce qui concerne la Fédération, la commission nationale d’éthique a demandé des explications à certains joueurs qui n’avaient pas participé à l’opération.

Ensuite, je n’en suis pas sûr, mais je crois que Colosse aux pieds d’argile va travailler avec la Fédération. Un certain nombre d’associations de lutte contre l’homophobie, comme Colosse aux pieds d’argile ou Foot ensemble ont été reçues la semaine dernière à la Fédération, en lien avec le plan que nous allons déployer. Des personnalités extérieures qualifiées seront ainsi intégrées au comité stratégique pour l’engagement.

Personnellement, je travaille davantage avec Foot ensemble et son président Yoann Lemaire, que j’ai invité à notre assemblée générale d’été de la ligue Méditerranée le 24 juin dernier. Il est venu passer le week-end avec nous et s’est adressé à tous les clubs de la Méditerranée pour délivrer son message. Pour le moment, ces initiatives sont éparses et émanent de présidents qui, comme moi, sont engagés dans la lutte contre le racisme, l’homophobie et les discriminations.

Colosse aux pieds d’argile est une très grosse structure, qui emploie quarante-sept personnes, et dispose d’une logistique suffisante. Elle travaillera certainement avec la Fédération et les ligues. Dans le plan, il est prévu de désigner un référent engagement dans chaque ligue régionale et, si possible, dans chaque district. Idéalement, nous souhaitons mettre en place un binôme dirigeant-éducateur engagé dans cette démarche.

Si le ministère dispose d’une plateforme qui fonctionne, la Fédération doit lui transmettre des informations. Dans ce domaine, plus il existe de moyens pour signaler et faire remonter des faits VSS ou d’autres discriminations, plus la situation pourra s’améliorer.

Mme la présidente Béatrice Bellamy. Je vous remercie. N’hésitez pas à revenir vers nous, pour nous transmettre des informations complémentaires.

La commission auditionne M. Guy Drut, membre du Comité international olympique (CIO), ancien ministre chargé de la jeunesse et des sports.

Mme la présidente Béatrice Bellamy. Nous accueillons M. Guy Drut, membre du Comité international olympique (CIO) et ancien ministre chargé de la jeunesse et des sports.

Notre commission d’enquête sur l’identification des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations françaises de sport, du monde sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif a entamé ses travaux le 20 juillet dernier. L’Assemblée nationale a décidé de sa création à la suite de très nombreuses révélations de sportifs et de diverses affaires judiciaires ayant trait à la gestion de certaines fédérations.

Nos travaux se déclinent autour de trois axes : les violences physiques, sexuelles ou psychologiques dans le sport, les discriminations sexuelles et raciales et les problématiques liées à la gouvernance financière des organismes de gouvernance du monde sportif.

Après une brillante carrière d’athlète, monsieur le ministre, vous êtes entré en politique. Vous avez été ministre de la jeunesse et des sports de mai 1995 à juin 1997.Vous êtes membre du CIO depuis 1996. Vous avez été suspendu par la commission d’éthique en décembre 2005, en raison d’une condamnation pour laquelle vous avez bénéficié d’une amnistie de la part du président Jacques Chirac. À la suite de cette amnistie, vous avez réintégré le CIO et avez participé à la campagne de soutien à la candidature de Paris à l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 et êtes membre du Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojop).

Pouvez-vous nous présenter, dans un bref propos liminaire, les faits dont vous avez eu connaissance entrant dans le champ de cette commission d’enquête ? Le cadre existant pour prévenir détecter, signaler et sanctionner ces actes, et pour garantir l’éthique du sport, vous paraît-il adapté ?

Je rappelle que cette audition est ouverte à la presse et qu’elle est retransmise en direct sur le site de l’Assemblée nationale. L’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d’enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main et à dire : « Je le jure ».

(M. Guy Drut prête serment.)

M. Guy Drut, membre du Comité international olympique et ancien ministre chargé de la jeunesse et des sports. Je vous remercie pour votre accueil dans cette maison que j’ai fréquentée pendant une vingtaine d’années. Je suis particulièrement heureux de la tenue de cette audition, dans la mesure où j’ai conscience de la nécessité d’inscrire dans un cadre républicain les règles du développement de l’organisation sportive en France.

Bien évidemment, la situation a évolué depuis le temps où j’étais ministre il y a vingt-sept ans. Les services déconcentrés du ministère étaient à l’époque bien plus développés. Je m’étais efforcé, dans mon action, de lutter contre le dopage, contre les sectes et contre les violences. J’avais également fait de l’aménagement des rythmes scolaires, souhaitée par le président Chirac lors de sa campagne électorale, l’une de mes priorités.

Je n’ai jamais eu de responsabilité fédérale, pas même au sein de la Fédération française d’athlétisme – que j’aide toutefois régulièrement, car elle est un peu ma famille. Je suis aujourd’hui membre du CIO et siège, à ce titre, au conseil d’administration du Comité national olympique et sportif français (CNOSF) et au comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024. À l’époque où j’étais ministre, conscient des problèmes qui se présentaient, j’avais entamé la rédaction d’un projet de loi que j’aurais aimé soumettre au Parlement si j’en avais eu le temps. Les responsables en étaient François Werner, mon directeur de cabinet, et François Alaphilippe, secrétaire général du CNOSF alors présidé par Henri Sérandour.

Les fédérations sont difficilement comparables, leurs tailles et leurs budgets étant fort différents, mais sur le principe les règles doivent être les mêmes pour toutes. Le CNOSF devrait selon moi être l’organisation faîtière du sport, celle qui aide les fédérations à travailler ensemble, qui coordonne leurs activités et qui les représente.

En 2017, il m’est apparu important de profiter de l’attribution des Jeux olympiques à la ville de Paris pour remettre à plat et refonder toute la gouvernance du mouvement sportif français. Cette idée avait d’ailleurs été reprise et défendue par Thierry Rey, autre champion olympique, durant sa campagne pour la présidence du CNOSF. J’avais suggéré à l’époque à Tony Estanguet de devenir président car Denis Masseglia, atteint par la limite d’âge, ne pouvait plus poursuivre son action et son mandat. J’estimais en effet que M. Estanguet était le mieux placé, étant déjà président du Cojop, et qu’il pourrait assumer cette double casquette. Mais ce n’est pas ce qui s’est passé.

Qu’en est-il aujourd’hui ? Je ne souhaite dire du mal de personne, mais simplement établir un constat des faits. Je connais le CNOSF depuis longtemps et j’observe qu’il a toujours adopté une position de suivisme plutôt qu’il ne cherchait à prendre des initiatives. Cette attitude a des conséquences non négligeables. Après l’élection de Brigitte Henriques, toutes les fédérations qui soutenaient la candidature de Thierry Rey ont été exclues du conseil d’administration du CNOSF, annihilant toute possibilité d’opposition. Cela ne me paraît pas normal.

Le sport français est aussi victime de comitologie – un constat que la Cour des comptes a établi devant vous me semble-t-il. Il existe effectivement un enchevêtrement de comités et de commissions, qui contribue à diluer les responsabilités. Ces commissions étant généralement nommées par l’équipe fédérale en place, elles ne sont pas un lieu d’expression pour l’opposition. De plus, elles ne dialoguent pas nécessairement entre elles. Si un grand nombre de fédérations ou d’organismes sportifs instaurent des commissions d’éthique, par exemple, celles-ci font rarement appel aux commissions disciplinaires. En résumé, le millefeuille n’a cessé de s’accroître, complexifiant par là même un peu plus le système.

Le dernier exemple en date est celui de l’Agence nationale du sport (ANS), qui remplace le Centre national du développement du sport (CNDS), un organisme public créé en 2002. On assiste en réalité à un déplacement budgétaire associant à parts égales l’État, le mouvement sportif – englobant le secteur privé – et les collectivités locales et territoriales, qui conduisent déjà leurs propres initiatives ciblées auprès des concitoyens dont elles ont la responsabilité. Or l’État assure aujourd’hui la quasi-totalité des responsabilités et des initiatives de l’ANS, ne serait-ce qu’en nommant son président et son exécutif opérationnel. J’ai beaucoup d’estime et de respect pour Michel Cadot, qui réalise un excellent travail en tant que délégué interministériel aux Jeux olympiques et paralympiques, mais c’est un préfet. S’agissant de l’ANS, je ne dispose d’aucun élément de jugement. Par ailleurs, le nombre d’initiatives prises ça et là contribue à rendre l’action plutôt confuse. Par exemple les contrats d’objectifs des fédérations sont négociés avec l’ANS tandis que les contrats de délégation le sont avec les ministères.

Mme la présidente Béatrice Bellamy. Je me permets de vous poser à nouveau la question que je vous ai posée lors de mon propos liminaire. Avez-vous eu connaissance de faits entrant dans le champ de cette commission d’enquête ? Dans vos différentes fonctions, avez-vous eu connaissance de faits de violences sexuelles et sexistes (VSS) ?

M. Guy Drut. Non. À l’époque, il y a vingt-sept ans, il était davantage question de dopage. Je témoigne sous serment et n’essaye aucunement de me défiler. Je sais que Mme Moyon de Baecque s’était exprimée...

Mme la présidente Béatrice Bellamy. Nous l’avons auditionnée dans le cadre de cette commission d’enquête.

M. Guy Drut. Je l’ai connue par la suite, au CNOSF. J’ai eu connaissance de problèmes de dopage, mais pas de violences sexuelles et sexistes.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Sur certains aspects, le mouvement sportif a peu évolué. Beaucoup demeure à faire en matière de lutte contre les VSS, le racisme, l’homophobie et les autres formes de discrimination.

Vous êtes membre du CIO, au moment où la France s’apprête à accueillir dans quelques mois les Jeux olympiques et paralympiques. Avez-vous connaissance de dispositifs mis en place pour travailler avec les fédérations afin de lutter contre les violences sexuelles et sexistes ? Nous avons auditionné le CNOSF et avons saisi la complexité de ses liens avec fédérations. La même complexité existe au sein de l’ANS, et le ministère de tutelle doit normalement exercer son contrôle sur les fédérations. Nous nous efforçons de comprendre les dysfonctionnements et de formuler des propositions pour essayer précisément d’améliorer le fonctionnement de la relation entre le ministère de tutelle et les fédérations. Qu’avez-vous pu observer dans le cadre de la préparation des prochains Jeux olympiques et paralympiques ?

M. Guy Drut. Vous me mettez en difficulté. Je sais que des mesures ont été prises pour lutter contre ce genre d’excès ou de déviances au sein du CIO, mais ce n’est pas l’objet de cette commission. Je suis moins au fait de ce qui a été réalisé au niveau français car depuis un certain temps, je ne suis plus qu’auditeur au sein du CNOSF. J’y reviens désormais plus souvent car j’ai confiance en David Lappartient qui, j’en suis sûr, se mettra à la tâche dans les meilleurs délais et travaillera avec vous sur ces sujets de façon intelligente et productive.

Pour le reste, je n’ai été informé que par des articles de journaux ou des discussions. Au Cojop, je suis auditeur, c’est-à-dire que je suis convoqué aux différents conseils d’administration ainsi qu’aux réunions du bureau exécutif ; mon rôle se limite à cela.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Vous avez mentionné Catherine Moyon de Baecque. Pouvez-vous revenir sur les faits qu’elle a évoqués et sur la manière dont vous en avez pris connaissance ?

M. Guy Drut. Non, je ne pourrai pas revenir sur ces faits qui datent d’il y a vingt-sept ans. Je connais Mme Moyon de Baecque mais nous n’avons pas de relations suivies. Je sais qu’à l’époque, elle était assez proche de Maurice Herzog, qui fut l’un de mes prédécesseurs au CIO, mais cela s’arrête là. Je l’ai surtout connue par la suite, lorsque j’ai rejoint le CNOSF. J’ai eu l’occasion de la voir lors des réunions, des assemblées générales et des colloques, mais rien de plus.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Le 18 octobre dernier, le Cojop a été perquisitionné dans le cadre d’une enquête préliminaire de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales pour prise illégale d’intérêts, favoritisme et recel. Une autre perquisition avait déjà eu lieu au mois de juin 2023. Que pouvez-vous nous dire de cette affaire ? Nos collègues Stéphane Mazars et Stéphane Peu, dans leur rapport d’information sur les retombées des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 sur le tissu économique et associatif local, avaient appelé le Cojop à renforcer la direction de l’audit, de la conformité et du cadre public. Ils avaient notamment jugé que la bonne application des règles du code de la commande publique devait être contrôlée. Cette recommandation a-t-elle été prise en compte ?

M. Guy Drut. Il est difficile de dire les choses sans apparaître comme un râleur, un aigri ou un grincheux. Je souhaite à cet égard vous faire part d’une anecdote. Le projet d’une cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques sur la Seine a été présenté en décembre 2021. À cette occasion, j’ai demandé s’il avait fait l’objet d’une évaluation budgétaire et sécuritaire et s’il existait un plan B. Il m’a été répondu d’une part que cette évaluation n’avait pas encore eu lieu mais qu’elle serait réalisée ultérieurement, d’autre part qu’il n’était pas nécessaire d’envisager un plan de secours. En tant que membre du CIO, je ne pouvais pas voter contre ce projet, même s’il n’avait pas fait l’objet d’études préalables suffisantes ; mais en tant que citoyen, je ne pouvais pas non plus voter pour. Lorsqu’il était préfet de police de Paris, le préfet Lallement m’avait d’ailleurs confirmé que l’organisation de cette cérémonie ne lui paraissait pas raisonnable. En conséquence, je n’ai pas pris part au vote. À partir de ce moment-là, j’ai été traité de râleur – ce que je veux bien accepter, car ce n’est pas toujours faux –, mais aussi d’aigri et de grincheux, ce que je ne suis pas. J’avais simplement posé les questions qu’il me semblait responsable de poser. Le sujet n’a plus été évoqué par la suite mais il est à nouveau sur le devant de la scène. Il a notamment été soulevé hier par David Douillet, qui fut l’un de mes successeurs au ministère des sports.

Cet exemple illustre le fait que, quoi que je dise, je ne suis pas écouté. Désormais, je me rends aux réunions du Cojop en tant que simple auditeur. J’ai été très actif durant la période de candidature et pendant la mise en place du comité d’organisation. Ensuite, je me suis rapidement rendu compte que j’étais de trop. Pardonnez mon franc-parler ; on ne se refait pas.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. En votre qualité de membre du CIO, vous siégez au conseil d’administration de Paris 2024. Il y a un peu plus d’un an, dans un entretien au Journal du dimanche, vous aviez plaidé en faveur d’un plus grand investissement du monde politique dans l’organisation des Jeux et d’une plus grande coordination entre la Ville de Paris, la région Île-de-France et l’État. Feriez-vous le même constat aujourd’hui ? Vous expliquiez également craindre d’importants dérapages budgétaires. Qu’en est-il aujourd’hui ?

M. Guy Drut. Je vais revenir également sur la question précédente, qui concernait mon avis sur les perquisitions intervenues au Cojop, en vous faisant une réponse très classique : ce dossier est désormais entre les mains de la justice et j’ignore si des dysfonctionnements sont intervenus. Le responsable du parquet a indiqué que sa mission ne consistait pas à perturber l’organisation des Jeux olympiques ; je croyais quant à moi qu’elle consistait à faire en sorte que tout se passe bien…

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Je vous ai posé cette question car nos collègues avaient émis une alerte sur le Cojop dans leur rapport, notamment sur la commande publique. Nous souhaitons savoir si les alertes sont suivies ou non d’effets.

M. Guy Drut. Je ne peux vous dire. Il faut interroger les lanceurs d’alertes. Je sais qu’au sein du Cojop, certains ont lancé des alertes mais que celles-ci n’ont pas toujours été suivies d’effets.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Ce ne sont pas des lanceurs d’alerte qui ont émis une alerte mais deux parlementaires, dans le cadre de leur rapport d’information.

M. Guy Drut. Leur alerte est venue en plus. J’ai toujours entretenu d’excellentes relations avec Maïa Wirgin, aujourd’hui secrétaire générale de la Cour des comptes, et avec Marie-Emmanuelle Assidon, préfète. Toutes deux ont été en charge des relations institutionnelles du Cojop et ont quitté leurs fonctions pour des raisons qui leur appartiennent, mais qui traduisent un dysfonctionnement. S’agissant du budget, il faudra juger à la fin des Jeux olympiques. J’ai pleinement confiance dans le travail que réalisera la Cour des comptes pour déterminer leur coût.

M. Frédéric Zgainski (Dem). Je souhaite vous interroger sur la gouvernance des organisations internationales comme le CIO, la Fédération internationale de football (Fifa) ou la Fédération internationale de basket-ball (Fiba). Nous avons en effet le sentiment que ces fédérations vivent en autarcie, en dehors du droit international, et ne font l’objet d’aucun contrôle. Quelles sont votre expérience et votre vision personnelle à ce sujet ?

M. Guy Drut. Comme je vous l’ai indiqué, je n’ai jamais exercé de responsabilité fédérale ; je connais cependant certains dirigeants de fédérations internationales. Il est vrai que le fonctionnement de certaines d’entre elles est difficile à cerner. Je me souviens que dans un éditorial du Figaro, Yves Thréard avait établi un parallèle entre les marchands du temple et les dieux de l’Olympe. Dans certaines fédérations, notamment dans le football, les premiers l’ont emporté sur les seconds. Je reproche au mouvement sportif actuel de mettre trop en exergue l’aspect commercial ; cela en devient parfois insupportable.

Je ne peux vous en dire plus sur le fonctionnement des fédérations internationales, que je ne connais guère.

Mme la présidente Béatrice Bellamy. Je vous remercie. N’hésitez pas à nous fournir des informations complémentaires si vous le souhaitez.

M. Guy Drut. Je souhaite vous faire part d’une anecdote. Jeune adjoint chargé des sports à la mairie de Paris, j’avais rendu visite à Jacques Chirac pour évoquer un certain nombre de problèmes. Celui-ci m’avait rétorqué qu’il était préférable de venir avec des solutions ! À ce sujet, il me semble important d’accorder une attention particulière aux commissions d’éthique. Pourquoi ne pas créer une commission d’éthique totalement indépendante et autonome qui serait la même pour tous les sports et qui pourrait siéger au CNOSF ?

Il me semble aussi nécessaire de clarifier la délégation de service public (DSP). J’ai écouté avec beaucoup d’attention l’intervention de Médéric Chapitaux, fonctionnaire du ministère, concernant l’entrisme de l’islamisme dans le sport, en particulier dans le football et les sports de combat. Une fédération sportive est délégataire pour l’organisation des compétitions mais ce qui se passe dans les clubs et sur les terrains d’entraînement est tout aussi important.

 

La séance s’achève à dix-huit heures quarante-cinq.


Membres présents ou excusés

 

Présents.  Mme Béatrice Bellamy, Mme Claudia Rouaux, Mme Sabrina Sebaihi, M. Frédéric Zgainski