Compte rendu

Commission d’enquête relative à l’identification des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations françaises de sport, du mouvement sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif ayant délégation de service public

– Table ronde, ouverte à la presse, réunissant des présidents de Conférences régionales du sport :

- Mme Évelyne Ciriegi, présidente de la Conférence régionale du sport d’Île-de-France et M. Pierre Rabadan, vice-président ;

- M. Pierre Pouliquen, président de la Conférence régionale du sport de Bretagne  2

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Gwenaëlle Noury, présidente de la Fédération française des sports de glace, et de Mme Nathalie Péchalat, ancienne présidente de la Fédération française des sports de glace              17

– Présences en réunion................................40


Vendredi
27 octobre 2023

Séance de 14 heures

Compte rendu n° 36

session ordinaire de 2023-2024

Présidence de
Mme Sabrina Sebaihi,
Rapporteure

 


  1 

La séance est ouverte à quatorze heures cinq.

 

La commission auditionne des présidents de conférences régionales du sport :

 Mme Évelyne Ciriegi, présidente de la conférence régionale du sport d’ÎledeFrance et M. Pierre Rabadan, vice-président ;

 M. Pierre Pouliquen, président de la conférence régionale du sport de Bretagne.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Nous accueillons Mme Évelyne Ciriegi, présidente de la conférence régionale du sport d’Île-de-France, M. Pierre Rabadan, vice‑président, et, en visioconférence, M. Pierre Pouliquen, président de la conférence régionale du sport de Bretagne. Soyez les bienvenus, madame et messieurs ; je vous remercie de votre disponibilité.

Nous avons entamé les travaux de cette commission d’enquête sur l’identification des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations françaises de sport, du monde sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif le 20 juillet dernier. L’Assemblée nationale a décidé de sa création à la suite de très nombreuses révélations publiques de sportives et sportifs et de diverses affaires judiciaires ayant trait à la gestion de certaines fédérations.

Nos travaux concernent trois axes : les violences physiques, sexuelles ou psychologiques dans le sport ; les discriminations sexuelles et raciales ; les problèmes liés à la gouvernance financière des organismes de gouvernance du monde sportif.

Pouvez-vous préciser le rôle et les missions des conférences régionales du sport (CRDS) et votre vision de la gouvernance du sport, qui paraît pour le moins complexe ? Pouvez‑vous également indiquer les faits dont vous avez eu connaissance dans le champ qui intéresse notre commission d’enquête ? Quels sont les leviers dont vous disposez pour faire progresser l’éthique du sport ? Le cadre existant et l’organisation des acteurs pour détecter, prévenir, sanctionner les faits relevant de notre commission, vous semblent-ils adaptés ?

Cette audition est ouverte à la presse. Elle est retransmise en direct sur le site de l’Assemblée nationale. L’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d’enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

(Mme Évelyne Ciriegi, M. Pierre Rabadan et M. Pierre Pouliquen prêtent serment.)

Mme Évelyne Ciriegi, présidente de la conférence régionale du sport d’Île-de-France. Merci de nous recevoir. La conférence régionale du sport d’Île-de-France, créée le 27 mai 2021, réunit les acteurs du secteur : l’État, le mouvement sportif, les collectivités territoriales, les entreprises et le monde social. Elle a réalisé un diagnostic visant à rédiger un projet sportif territorial, dont la réalisation s’appuie sur trois commissions, ayant pour objet respectif le développement durable de la pratique sportive sur les territoires et l’héritage des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) Paris 2024 ; le sport de haut niveau, le sport professionnel et la promotion de l’éthique du sport ; la pratique sportive comme facteur de cohésion sociale et déterminant de santé.

Les cinquante-six conseillers titulaires et les cinquante-six conseillers suppléants ont défini les objectifs de chaque commission, conformément à la volonté du bureau. Nous souhaitions que les acteurs déterminent eux-mêmes les orientations de notre travail dans le territoire francilien.

Nous avons également défini trois objectifs transversaux : développer une stratégie territoriale concertée ; construire l’articulation opérationnelle de la conférence régionale du sport et les engagements de ses cofinanceurs ; réduire les inégalités sociales et territoriales d’accès aux activités physiques et sportives.

Dès le début, nous avons jugé essentiel de travailler à prévenir les violences et les discriminations dans le sport. La conférence des financeurs a été installée un an après la CRDS ; nous les avons immédiatement engagés à nous y aider. En effet, le tabou en la matière reste fort. Les cas de violence et de discrimination ne sont pas toujours recensés, mais ils sont nombreux. Ils restent encore souvent ignorés, donc malheureusement impunis.

Nous souhaitons promouvoir le sport dans un espace sécurisé, en prévenant toute forme de violence et en accompagnant les victimes et leur entourage. D’après notre recensement, 13 % des jeunes victimes en parlent à leurs parents ; 17 % des athlètes interrogés déclarent avoir été victimes ou pensent avoir subi une forme de violence sexuelle.

Nous voulons soutenir les victimes d’agression et leur apporter l’aide nécessaire pour se reconstruire, sensibiliser à la thématique des violences au sein du sport et développer la prévention pour limiter au maximum les cas de violence. Le sport doit participer à la bonne santé physique et morale, aux relations sociales, dans un espace sécurisé.

Nous avons créé un maillage territorial de structures à même d’intervenir dans ce domaine. Le premier axe de notre démarche consiste à communiquer pour libérer la parole des sportifs et de leur famille, en diffusant l’information, pour lever le tabou sur les violences dans le milieu sportif. Le deuxième axe vise à protéger, en soutenant les victimes, mais aussi les témoins, victimes secondaires, en les accompagnant lors de leurs démarches. Le troisième axe concerne la formation et la sensibilisation des acteurs à la prise en charge et à la reconnaissance de certains signes.

Ainsi, la conférence régionale du sport agira pour mobiliser les acteurs et diffuser l’information auprès des différents publics que sont les clubs, les pratiquants, les collectivités. Il faut mobiliser toutes les structures concernées pour faire évoluer les comportements. Nous avons donc demandé aux cofinanceurs de contribuer à hauteur de 7 500 euros pour financer l’intervention d’un expert auprès de dix clubs sportifs. Nous sommes convaincus que le sport ne pourra évoluer que si le tabou est entièrement levé et que le respect de la personne devient le maître mot dans chaque club et dans chaque localité. Nous y veillerons, en maintenant notre engagement de faire en sorte que la pratique du sport soir un plaisir, que chacun réalise au mieux son potentiel et puisse, éventuellement, accéder au plus haut niveau.

M. Pierre Rabadan, vice-président de la conférence régionale du sport d’Île-de-France. La CRDS d’Île-de-France a mené un travail apolitique et a recueilli sur ce sujet un consensus. Sa volonté d’agir est forte, en lien avec la libération de la parole dans le monde du sport. Celle-ci était nécessaire à la prise de conscience et à la recherche de remèdes.

Je suis également adjoint à la maire de Paris en charge du sport, des Jeux olympiques et paralympiques et de la Seine, vice-président de l’Association nationale des élus en charge du sport (Andes) et coprésident de la commission sport de France urbaine. Dans ces structures, le sujet revient en permanence, car les cas sont nombreux. La gouvernance est un aspect central puisque l’organisation du secteur participe à libérer la parole et à prendre en charge des sujets communs.

Il convient désormais de trouver des solutions. La Ville de Paris a élaboré un plan de lutte contre les violences sexistes et sexuelles (VSS) qui comprend différentes mesures. Il deviendra de plus en plus contraignant puisque le fait d’agir dans ce domaine sera une condition pour l’attribution de la subvention publique prévue dans les prochains mois. Cette démarche nous paraît indispensable tant la prise de conscience dans le milieu sportif est hétérogène. Elle est majeure dans certaines structures et certains sports, mais d’autres se sentent moins concernés. On constate pourtant des cas de violence dans toutes les pratiques et à tous les niveaux.

En matière de gouvernance, l’encadrement, l’accompagnement et une certaine homogénéité dans les différentes structures favorisent la compréhension du sujet et permettent aux sportifs comme aux dirigeants de se sentir plus surveillés, plus concernés, et plus libres de prendre la parole. La CRDS a décidé de placer la question au centre des réflexions relatives à la pratique sportive ; les responsables sportifs, les fédérations, et les collectivités doivent tous participer à résoudre le problème. Il est donc primordial d’établir une ligne d’action claire, et de définir ce qui relève du service public et de ses obligations.

M. Pierre Pouliquen, président de la conférence régionale du sport de Bretagne. Je préside également Sport Bretagne, qui a remplacé le Creps (centre de ressources, d’expertise et de performance sportive), et je suis vice-président du conseil régional de Bretagne, chargé des sports, de la jeunesse, de l’égalité des droits et de la vie associative.

Nous avons été parmi les derniers à voter le projet sportif territorial. Nous avons souhaité prendre du temps pour établir le diagnostic, afin d’amener tous les acteurs à s’interroger sur le développement du sport. Nous avons ainsi organisé quatre rencontres départementales, réunissant en tout 500 à 600 participants, qui ont discuté des nouvelles modalités du sport, en lien avec la nouvelle gouvernance.

Le diagnostic a abouti au projet sportif territorial. La nouvelle gouvernance devait reposer sur deux blocs, celui des fédérations et celui des conférences régionales. Nous avons relevé l’insuffisance des liens avec les fédérations concernant l’investissement, en particulier pour déployer le plan 5 000 équipements. Nous avons éprouvé des difficultés à appliquer de manière transversale les décisions territoriales et les décisions nationales, lesquelles n’étaient pas transférées au niveau des ligues et des comités.

Le fil rouge de notre action tend à assurer un égal accès au sport, des femmes et des hommes, et de tous les publics. Nous nous sommes moins attardés que l’Île-de-France sur les questions d’éthique, en particulier sur l’organisation du mouvement sportif en Bretagne pour lutter contre les violences faites aux femmes et le harcèlement. Toutefois, nous estimons qu’il est primordial de définir un cadre légal national, qui sera ensuite décliné dans les territoires, au niveau des collectivités comme au niveau des ligues et des comités. Sans cela, il sera difficile de mettre en œuvre une action commune, chaque collège ayant ses propres attributions et façons de faire. La conférence régionale du sport ne dispose d’aucun statut juridique. Ainsi, l’Agence nationale du sport (ANS) décide du montant des fonds transférés du ministère des sports vers les délégations régionales académiques à la jeunesse, à l’engagement et aux sports (Drajes) et versés au comité régional olympique et sportif (Cros), responsable du financement de la conférence. En tant que président, je ne peux pas faire appel aux dons ni demander aux membres une cotisation. Ce vide juridique est problématique pour la bonne marche de la conférence et des réunions qui s’y rapportent.

Nous rencontrons également plusieurs autres difficultés. En effet, les conférences régionales ont été créées au moment de la refonte des anciennes directions régionales et départementales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DRDJSCS), transformées en Drajes, lesquelles sont pilotées d’une part par le recteur, d’autre part par le préfet de région. Chacun ignorant comment se situer vis-à-vis de la nouvelle gouvernance, il est difficile d’obtenir des réponses, ce qui nuit à la réalisation d’un projet politique et sportif territorial.

Par ailleurs, il aurait fallu confier le rôle de chef de file aux régions, par exemple. Les directives nationales et les actions régionales ne sont pas suffisamment liées, alors que tout fonctionne parfaitement dans le domaine de la jeunesse.

La conférence reste tout de même une bonne articulation. En revanche, nous rencontrons des difficultés pour financer le recrutement, notamment car nous ne pouvons pas demander de cotisation. Toutes les collectivités n’ont pas trouvé d’intérêt à participer financièrement. L’ANS a créé une aide à l’emploi, mais celle-ci est insuffisante.

Dans le cadre des contrats pluriannuels d’orientation et de financement (CPOF), nous avons retenu trois projets. Le premier vise à organiser des tiers-lieux itinérants, pour expliquer la nouvelle gouvernance, l’éthique du sport en France et comment promouvoir la pratique sportive dans la région de manière innovante. Le deuxième concerne le sport santé. Le troisième consiste à créer des ressourceries, car l’acquisition de matériel est de plus en plus difficile, notamment dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Nous estimons que chaque projet doit servir les considérations éthiques, mais nous manquons de leviers, juridiques ou réglementaires notamment.

S’agissant du modèle sportif, il est nécessaire de réformer le modèle des fédérations, notamment en matière de gouvernance. Les directeurs techniques nationaux (DTN) ont beaucoup trop de pouvoir et de responsabilités. Il faudrait détacher la fonction de responsable du développement sportif et de la politique de haut niveau de celle de responsable social. Il n’est pas possible de conserver ce modèle pyramidal. Sa réforme permettrait d’ailleurs à l’État de clarifier la notion de délégation de service aux fédérations.

Il faut un grand plan de formation des cadres. Le Centre national pour le développement du sport (CNDS), qui a disparu avec la création de l’ANS, disposait d’un volet sur la formation des bénévoles. Il existe un fonds pour le développement de la vie associative (FDVA), mais la Bretagne, par exemple, avait fait le choix de ne pas y recourir. En effet, nous disposons d’une délégation de compétence qui nous permet de choisir d’autres thématiques.

Au niveau des fédérations, il faudrait que les instances existantes fonctionnent, notamment le comité social et économique (CSE), qui n’est jamais installé, et encadrer le cumul des mandats de gouvernance. Il conviendrait aussi de s’interroger sur les raisons qui font qu’on a toujours affaire aux mêmes personnes – se demander pourquoi elles restent –, et sur la rémunération. Quelle que soit leur volonté, si les têtes des fédérations ne changent pas, nous aurons du mal à réaliser les projets sportifs territoriaux, en particulier s’agissant de la protection des personnes.

Sport Bretagne a reçu le label Engagé RSO (responsabilité sociale des organisations), certifiant le respect de la norme ISO 26 000. L’établissement concerné doit s’interroger sur la manière d’orienter les victimes, d’avoir des référents, d’apporter une réponse avant la procédure judiciaire et d’accompagner le personnel dans ses démarches.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Vous avez évoqué la prévention des VSS en Île-de-France. Sur combien de personnes ont été réalisées vos statistiques ?

Mme Évelyne Ciriegi. Fin 2023, 6 000 personnes auront été sensibilisées et formées à nos actions ; 17 % d’entre elles ont déclaré avoir subi une forme de violence sexuelle. La CRDS est chargée d’impulser la dynamique des formations consacrées à ce thème, mais chaque collège la reprend à son compte. Par exemple, le comité régional olympique et sportif d’Île-de-France, dont je suis la présidente, dispose d’une commission spécifique. Nous avons également demandé que chacune des quatre-vingt-quatre ligues adhérentes nomme un référent pour les violences et les discriminations. Pour ceux qui ne sont pas encore licenciés, nous organisons des actions de terrain dans les QPV pendant les vacances. Chaque activité que nous menons comprend ce forum de lutte contre les discriminations et les violences sexuelles, sous forme de jeux, de quiz, de questionnaire. Le but est que chacun prenne conscience de l’importance d’être respecté.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Nous vous remercions de nous transmettre les documents permettant d’établir les chiffres. Comment traitez-vous les témoignages ? Faites-vous des signalements ?

Mme Évelyne Ciriegi. Les signalements remontent par l’intermédiaire des référents sur ce sujet. Nous réalisons un accompagnement personnalisé. Des associations nous aident, comme Colosse aux pieds d’argile, LOG.in prévention, Stop aux violences sexuelles (SVS), Active ton potentiel par l’escrime (ATPE), La Voix de Sarah.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Ces associations vous accompagnent-elles pour assurer l’information, la sensibilisation et le soutien des victimes ?

Mme Évelyne Ciriegi. Oui. Je suis référente pour la natation en Île-de-France. Nous avons donné mandat pour garantir la confidentialité lorsque nous recevons les victimes, afin que leur démarche soit totalement protégée.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Connaissez-vous la cellule Signal-sports ?

Mme Évelyne Ciriegi. Non.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Le ministère des sports et des Jeux olympiques et paralympiques l’a créée pour recueillir les signalements de violences sexuelles et sexistes. Lorsque des témoignages vous parviennent, comment les transmettez-vous au ministère ?

Mme Évelyne Ciriegi. Nous les signalons par l’intermédiaire des Drajes.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Le ministère vous fait-il un retour ?

Mme Évelyne Ciriegi. Nous n’avons pas de retour direct du ministère, mais les Drajes nous tiennent informés. Nous travaillons régulièrement sur cette thématique, notamment lorsque la Drajes organise des formations. Nous avons constaté que les cas étaient plus nombreux qu’en 2021.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Les Drajes ont-elles déjà évoqué Signal-sports ?

Mme Évelyne Ciriegi. Non.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. En Bretagne, comment les signalements éventuels sont-ils traités et remontés ? Connaissez-vous la cellule Signal-sports ?

M. Pierre Pouliquen. Non, je ne la connais pas. Nous travaillons aussi avec Colosse aux pieds d’argile. La difficulté reste qu’en cas d’enquête de police ou de gendarmerie, la personne mise en cause n’est pas obligatoirement révoquée par le club, le comité ou la fédération. On leur demande de ne pas agir tant que l’enquête est en cours, ce qui soulève des questions. En Bretagne, le Cros participe aussi à la prévention.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Qui formule la demande de ne pas agir ?

M. Pierre Pouliquen. Elle provient sans doute de la gendarmerie ou de la police chargée de l’enquête. Des personnes incriminées peuvent donc continuer à agir tant que les conclusions ne sont pas émises.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. J’en déduis qu’il est par exemple demandé aux responsables de clubs de ne pas prendre de mesures conservatoires.

M. Pierre Pouliquen. Tout à fait.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Les enquêtes peuvent durer plusieurs mois.

M. Pierre Pouliquen. Exactement.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Les clubs seraient libres de prendre des mesures conservatoires.

M. Pierre Pouliquen. Il conviendrait de préciser aux clubs que les associations peuvent prévoir ce cas dans le règlement intérieur. Aujourd’hui, toutes ne prennent pas la mesure réelle de ce qui peut arriver en cas de problème.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Selon vous, qui devrait transmettre le message qu’il convient de changer les règlements ?

M. Pierre Pouliquen. Un club affilié doit appliquer le règlement fédéral, déployé par l’intermédiaire des ligues, puis des comités. Les règlements intérieurs devraient être davantage encadrés au niveau national, avant une déclinaison au niveau territorial.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Pouvez-vous citer des disciplines dans lesquelles vous avez observé de tels dysfonctionnements ?

M. Pierre Pouliquen. Toutes les disciplines sont concernées. Les clubs sont dirigés par des bénévoles. S’ils ne sont pas formés aux VSS, s’ils ne disposent pas d’un mode opératoire ou de ressources pour eux-mêmes contacter les personnes habilitées à accompagner les victimes, il est normal qu’ils rencontrent des difficultés. Colosses aux pieds d’argile intervient dans notre territoire, mais l’association sera rapidement débordée si les cas se multiplient. Nous restons donc dans le silence, sans percevoir ce qui se passe réellement au sein des clubs. J’ai noté le chiffre de 6 000 signalements en Île-de-France, alors que le nombre de licenciés doit être supérieur à 1 million. Ce chiffre me paraît faible.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Nous avons eu l’occasion d’auditionner Colosses aux pieds d’argile. Leur discours laissait plutôt penser que la tendance est favorable, que la parole circule. Il est toutefois intéressant pour nous de connaître les deux points de vue, celui des associations et celui des clubs. Nous avons besoin de connaître la demande réelle de ces derniers, en matière d’information, de formation, d’accompagnement pour travailler avec des associations et recueillir la parole des victimes.

M. Pierre Pouliquen. Colosse aux pieds d’argile intervient plus en zone urbaine qu’en zone rurale. Or nous sommes une région à dominance rurale, où les associations sportives sont parfois le seul endroit de vivre-ensemble. Vous pourriez auditionner les gendarmeries situées en milieu rural pour qu’elles vous indiquent tous les faits dont nous n’avons pas connaissance.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Comment ces affaires sont-elles transmises à la gendarmerie ? Les victimes portent-elles directement plainte ou les clubs disposent-ils de procédures spécifiques ?

M. Pierre Pouliquen. Les victimes portent plainte et nous les accompagnons. La structure que je préside a été confrontée à un cas précis. Nous avons accompagné la victime. Nous avons contacté Colosses aux pieds d’argile pour savoir comment nous y prendre et respecter les règles. Depuis, nous avons obtenu un label, car en interne, nous n’étions pas efficaces. Comme dans bien des cas, la victime n’a pas souhaité porter plainte, peut-être à cause du fait de devoir alerter immédiatement les autorités. L’affaire s’est arrêtée et nous n’avons pas eu de suivi.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. De quel type d’affaire parlez-vous ? S’agissaitil d’une agression sexuelle ?

M. Pierre Pouliquen. Oui.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Un signalement a-t-il été effectué ?

M. Pierre Pouliquen. Bien entendu. Nous avons pleinement agi dans les règles, mais il n’y a pas eu de poursuites.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Avez-vous fait un signalement en application de l’article 40 du code de procédure pénale ?

M. Pierre Pouliquen. Je suis désolé mais je ne suis pas aussi calé que vous en textes de loi.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Auprès de qui le signalement a-t-il été effectué ?

M. Pierre Pouliquen. Nous avons alerté la police nationale. La victime n’a ensuite pas souhaité porter plainte, même si nous l’avons accompagnée.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Connaissez-vous les raisons de son choix ?

M. Pierre Pouliquen. Elle s’est rétractée. Elle ne travaille plus dans notre structure. Nous n’avons pas eu plus d’informations par la suite. Il serait opportun d’avoir des interlocuteurs formés, à l’écoute, qui interviendraient avant d’alerter la gendarmerie ou la police nationale.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. L’association Colosse aux pieds d’argile ne vous a-t-elle pas parlé de signal-sports à ce moment-là ?

M. Pierre Pouliquen. Je n’ai pas directement suivi le dossier. La directrice s’en est chargée. Certains services de l’État peuvent être contactés, mais ils sont aussi très diminués.

Nous avons engagé un travail au niveau de la conférence régionale. Lors du diagnostic, nous avons constaté que ces sujets ne constituaient pas une priorité pour tous les acteurs. Je le regrette fortement.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Savez-vous si les acteurs de l’État de votre région ont informé le ministère des sports et des Jeux olympiques et paralympiques du signalement ?

M. Pierre Pouliquen. Je suppose que nous avons transmis un signalement. Nous sommes un groupement d’intérêt public (GIP) national, donc automatiquement lié au ministère des sports. Je ne dispose toutefois pas des détails précis relatifs à ce cas.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Savez-vous si le DTN a accompagné le club concerné ?

M. Pierre Pouliquen. La victime n’était pas un licencié, mais un membre de notre service. J’ajoute qu’un licencié d’une petite commune placé dans une situation identique ne pourrait pas être accompagné par le DTN.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. La situation pourrait être remontée à un niveau supérieur.

M. Pierre Pouliquen. Il existe un problème avec cette échelle. La réglementation sous-entend que la commune est compétente pour travailler avec les clubs, les départements avec les comités, les régions avec des ligues. Les licenciés n’ont pas de rapports transversaux avec les fédérations et avec nous : le système marche sur deux pieds et nous ne nous croisons jamais.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. La complexité de l’organisation du monde sportif a déjà été évoquée devant cette commission, y compris s’agissant d’autres structures telles que le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), l’ANS, le Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojop), et malgré le contrôle du ministère.

Par ailleurs, en matière de gouvernance, les collectivités territoriales sont le premier acteur du sport français. L’ANS a reconnu leur rôle. Si je me rappelle bien l’audition de ses représentants, vous y êtes présents à hauteur de 30 %. Quatre ans après la mise en place de ce nouvel opérateur de l’État, quel bilan dressez-vous ? Nous avons jusqu’à présent reçu tous les avis.

Mme Évelyne Ciriegi. Le bilan est pour nous positif. Nous avons le sentiment que les acteurs qui parlent du sport sont réunis dans la même maison, ce qui nous semble important. Nous avions besoin d’évoquer les mêmes thématiques, à travers le sport et par le sport. Le fait d’être ensemble nous permet de nous réunir très régulièrement.

Nous avons travaillé dès le départ de manière collégiale. Nous avons été accompagnés par le préfet de région, ce qui a développé une forte structuration de bureau. L’assemblée plénière se réunit tous les deux ou trois mois. Elle est plus difficile à organiser, car les acteurs sont très occupés par ailleurs, mais nous sentons l’intérêt de travailler ensemble. Dès l’origine, ce sont les conseillers qui ont élaboré les thématiques centrales de notre action. Avec l’aide d’experts, ils ont défini tous les projets que nous avons lancés par la suite. Nous nous appuyons sur ce fait, car nous sommes les acteurs du sport à notre niveau et la nouvelle gouvernance embarque toute la population francilienne.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Vous évoquez la conférence régionale, mais quel regard portez-vous sur l’ANS en tant que telle ?

Mme Évelyne Ciriegi. Je suis convaincue que l’ANS nous offre une nouvelle chance de travailler avec une gouvernance beaucoup plus ouverte, partagée, en lien avec les actions et projets de terrain. Du travail reste à accomplir, mais les relations sont plutôt faciles, ce qui est un avantage significatif.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. M. Pouliquen, vous avez indiqué regretter que le projet sportif territorial de la CRDS Bretagne ne contienne rien s’agissant des VSS. Avez-vous eu des débats sur le sujet ? Pour quelles raisons ce volet n’a-t-il pas été intégré ? Je rappelle qu’en principe, c’est obligatoire.

M. Pierre Pouliquen. Il est possible que nous ayons intégré ce volet dans le document, mais il n’est pas apparu comme une priorité majeure. Je le regrette. J’ai la chance de présider le conseil pour l’égalité entre les femmes et les hommes en Bretagne. Nous y avons déjà évoqué ces sujets. Nous devions même engager un projet de commission.

Je regrette que les VSS n’apparaissent pas dans le préambule, au même titre que l’égal accès au sport de tous les publics. Dans le document, des thématiques étaient imposées. Le long temps que nous y avons consacré nous a conduits à réécrire certains passages.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Savez-vous quelles perspectives ce projet définit concernant les VSS ?

M. Pierre Pouliquen. Non. Je ne peux pas vous donner de détails. En revanche, je pourrai vous transmettre le projet.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Quel regard portez-vous sur la création de l’ANS ?

M. Pierre Pouliquen. Je ne la vois pas d’un mauvais œil. Je siège dans son bureau et son conseil d’administration. Nous avons toutefois rencontré un problème, qui commence à se résoudre, concernant le manque de clarté dans la répartition des sujets entre l’ANS et le ministère. Sur le terrain, nous recevons des réponses imprécises car les représentants de l’État dans la région et l’ANS se renvoient parfois la patate chaude.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Pouvez-vous nous donner un exemple ?

M. Pierre Pouliquen. Le financement de l’animation et de la mise en œuvre des conférences régionales du sport en est un. Il n’est pas clairement dit que l’État s’en désengagera, alors que tel est le cas actuellement. Il est demandé aux collectivités locales, au monde de l’entreprise et au mouvement sportif de financer des postes. La compétence est déléguée, sans que des moyens spécifiques soient associés.

Sur les deux aspects dont l’ANS est responsable, celui relatif au sport de haut niveau fonctionne parfaitement en région, avec la maison régionale de la performance. L’accompagnement des athlètes au plus près de leur terrain d’entraînement est très efficace en Bretagne. En revanche, s’agissant des conférences régionales du sport, nous avons l’impression d’avoir l’obligation d’agir sans disposer des moyens nécessaires.

Par exemple, le projet emblématique est financé par l’ANS et des cofinanceurs, ce qui est très bien. En revanche, on nous demande de déployer parallèlement les CPOF, mais l’État ne contribue pas à leur financement. Je sais qu’il ne peut pas toujours intervenir. Je ne vois cependant pas comment des collectivités elles-mêmes en difficulté peuvent assumer tous les investissements relatifs au sport, notamment pour le fonctionnement de projets.

Je pense également que cette structuration a besoin de temps. Le monde économique n’a pas encore trouvé sa place dans la déclinaison territoriale, même s’il l’a trouvée au niveau national, dans le conseil d’administration de l’Agence. La situation est probablement différente en Île-de-France, où les acteurs nationaux sont également présents ; mais en Bretagne, ils sont absents. Les collectivités le sont aussi de plus en plus. J’avoue cependant que nous pouvons nous réjouir d’avoir le choix de bâtir un projet sportif territorial.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Les conférences régionales du sport sont désormais toutes installées en métropole. La plupart des projets sportifs territoriaux ont été adoptés. En revanche, à notre connaissance, aucun contrat pluriannuel d’orientation et de financement n’a été signé. Me confirmez-vous ce point ? Est-ce le cas pour vos CRDS ? Quelles en sont les raisons ?

Mme Évelyne Ciriegi. Je ne suis pas une spécialiste de ce sujet. Nous avons eu la chance de créer notre conférence très en amont, puis la conférence des financeurs. Celle-ci est présidée par le monde de l’entreprise, ce qui constitue une particularité francilienne. Aujourd’hui, nous travaillons avec la Fondation du sport français pour financer les projets adoptés et validés par les conseillers de la CRDS.

M. Pierre Rabadan. Il est évident que la création de l’ANS a permis une clarification qui était nécessaire dans la gouvernance du sport. En revanche, elle ne peut pas réaliser tout ce qui est attendu, le sport ayant un rôle éducatif et inclusif majeur. Malheureusement, les moyens alloués ne sont pas toujours à la hauteur des attentes. Ce constat peut se vérifier au niveau national comme au niveau local, mais aussi dans le monde de l’entreprise.

L’ANS a offert une grande chance, celle de rapprocher le monde privé des acteurs du sport public, en leur donnant un autre outil que le simple sponsoring pour s’intégrer dans la vie sportive du quotidien. Il faut que les entreprises aussi y trouvent leur compte, or elles ont parfois des difficultés à s’implanter localement. Les déclarations d’intention sont nombreuses, mais la mise en œuvre réelle est plus complexe.

La situation est plus simple avec le sport de haut niveau, qui produit un résultat immédiat ou permet une médiatisation intéressants pour l’entreprise ou la structure. Néanmoins, à plus long terme, il est difficile d’impliquer des acteurs privés pour atteindre des objectifs territoriaux de structuration du sport. L’identité de certaines entreprises est liée à leur territoire, mais tel n’est pas le cas en Île-de-France, même si elles y sont plus présentes.

Pour ma part, je connaissais Signal-sports. Nous nous sommes appuyés sur ce dispositif plutôt que de créer le nôtre, lorsque nous avons lancé le plan contre les violences sexistes et sexuelles à Paris. Nous l’avons rendu visible dans les équipements sportifs, notamment à hauteur d’enfant. Nous avons rencontré des difficultés opérationnelles, car nous possédons quasiment 500 équipements. Je constate que les réponses de mes collègues montrent un déficit de connaissance de ce dispositif.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. L’affichage et la communication ont donc été réalisés par la Ville de Paris.

M. Pierre Rabadan. Tout à fait. Nous avons repris la signalétique utilisée par le ministère. Notre objectif était de la rendre visible à l’entrée de chaque équipement sportif, voire dans les vestiaires, à hauteur d’enfant, pour éviter qu’un enfant de dix ans ne puisse pas lire le panneau d’affichage. Nous avons tenté de conserver une cohérence dans l’ensemble des équipements de la ville.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. La signalétique que vous évoquez correspond-elle à la plaquette qui se trouve sur le site internet du ministère ?

M. Pierre Rabadan. Je pourrai vous en transmettre un exemplaire. Je ne sais pas s’il s’agit exactement de la même. La plaquette était très descriptive. Elle mentionnait le 119 et incitait toute victime ou témoin d’une agression et toute personne ayant une suspicion à appeler ce numéro pour exposer le cas.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. La plaquette renvoie-t-elle vers le 119 ou vers signal-sports ?

M. Pierre Rabadan. Il me semble que les deux dispositifs sont mentionnés, mais je n’en suis pas certain. Notre travail date d’il y a un an et demi. Nous nous sommes appuyés sur le dispositif du ministère. Il ne nous a pas paru pertinent de créer une nouvelle organisation ad hoc.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Je vous demande ces précisions parce que nous avons regardé le site du ministère et d’autres endroits où Signal-sports était cité. Le fonctionnement de la cellule ne semble pas évident à comprendre. En outre, il n’est pas clair qu’une victime peut elle-même saisir la cellule. La communication mentionne le renvoi vers le 119, alors que les victimes peuvent directement alerter Signal-sports.

M. Pierre Rabadan. Il me semble que le 119 est censé orienter vers ce dispositif.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. La victime peut directement écrire à Signal-sports.

M. Pierre Rabadan. Je ne sais pas si l’affiche est explicite sur ce point. En revanche, elle mentionne un dispositif d’appel et de recours au 119. Je n’ai jamais testé moi-même ce numéro, mais je suppose qu’il a cette fonction d’orienter vers signal-sports.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Pourriez-vous nous envoyer un exemplaire de votre plaquette ? Le matériel de la Ville de Paris peut être plus pédagogique que celui du site du ministère des sports et des Jeux olympiques et paralympiques.

M. Pierre Rabadan. Nous vous enverrons ce que nous avons affiché.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Certaines des plaquettes évoquées lors de nos auditions ne précisaient pas que les victimes pouvaient saisir la cellule. Elles indiquaient même que d’autres acteurs devaient s’en charger. Il est important de savoir si nous transmettons la bonne information aux victimes. Si elles ont le sentiment de devoir passer par un filtre avant de pouvoir signaler un fait de violence, elles peuvent juger la démarche trop complexe.

Monsieur Pouliquen, vous avez abordé la question des DTN et le fait qu’ils détenaient trop de pouvoirs. Vous avez aussi mentionné le développement sportif et le développement social. Pouvez-vous préciser votre point de vue s’agissant de la répartition des compétences et des missions ?

M. Pierre Pouliquen. Les DTN sont très puissants. Je ne sais pas si eux-mêmes veulent s’en détacher. Un sportif de haut niveau rattaché à une fédération et qui vit constamment avec son DTN peut ne pas pouvoir parler comme il le souhaiterait. Si les fédérations pouvaient disposer d’interlocuteurs ressources autres que le DTN, en lien avec les présidents, il s’agirait d’une réelle avancée.

En outre, toutes les fédérations n’ont pas la même culture et ne déploient pas les projets de la même manière. Il serait préférable de mieux répartir le pouvoir au sein des fédérations. Il faut au moins réfléchir à leur gouvernance.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. On nous a proposé de dissocier le mandat du DTN de celui du président de la fédération. Qu’en pensez-vous ?

M. Pierre Pouliquen. Chez moi, le responsable de la maison régionale de la performance n’est pas un DTN. Nous avons choisi de ne pas adopter le même fonctionnement puisque nous essayions d’innover. Auparavant, il faisait partie de la DRDJSCS ; il est désormais totalement autonome. Je ne peux donc qu’être favorable à la proposition que vous formulez.

Les DTN sont rattachés au ministère et affectés à une fédération. Cela ne remet pas en cause la notion de gouvernance. En revanche, il n’est pas possible d’être personne sociale, morale et physique en pyramide. Il est essentiel de dissocier les pouvoirs au sein des fédérations.

Aujourd’hui, nous distribuons des fonds aux fédérations. En créant des labels et des contraintes financières, je pense que la situation évoluera plus rapidement, notamment dans les grandes fédérations.

Voilà ce que nous avons en Bretagne. (M. Pierre Pouliquen montre une plaquette d’information.) Elle a été copiée sur celle de Paris et mentionne tous les numéros d’appel, mais pas la cellule Signal-sports. Elle a été éditée avec les services de l’État en région. Il faut diffuser l’information partout. Je constate que beaucoup d’annonces ne sont pas suivies d’actions.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Merci de nous la transmettre. La plaquette de Paris évoque-t-elle Signal-sports ?

M. Pierre Rabadan. Je ne peux pas vous le dire. Elle ne comprend qu’une feuille recto verso. Je pense qu’elle est moins fournie que celle que M. Pouliquen a montrée. Nous vous l’enverrons.

En ce qui concerne les DTN, il me paraît difficile d’avoir la même organisation dans une fédération qui compte plusieurs centaines de milliers de licenciés que dans une fédération beaucoup plus modeste, ou dont le sport moteur est plus médiatique, par exemple. On demande à un DTN d’être fort dans les domaines de la formation et des performances de haut niveau, mais aussi de dicter une politique sociale et environnementale à la fédération, de gérer les salariés, d’infuser une politique à tous les niveaux. Le travail ne peut pas être le même s’il y a 60 000 ou 600 000 participants en bas de la pyramide.

Toutes les fédérations ne sont pas traitées de la même manière. Elles n’ont pas les mêmes ressources, le même fonctionnement, les mêmes objectifs, ni la même visibilité médiatique. Ce point doit être pris en considération dans la manière d’organiser la gouvernance. L’uniformisation de la gouvernance ne peut pas apporter des résultats satisfaisants quand les enjeux ne sont pas identiques.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Ce sujet a été évoqué au sein de notre commission. Nous avons reçu des fédérations très différentes. Ce matin, nous avons auditionné celles du tennis et du football, hier celles de l’escrime et de la gymnastique. Les échelles ne sont pas les mêmes, qu’il s’agisse du nombre de licenciés ou du financement. La question de l’opportunité d’une équité de traitement se pose, y compris pour les moyens humains et les financements. Il faudra également prendre en considération la lutte contre les VSS et d’autres problématiques du monde sportif.

Vous avez évoqué des associations avec lesquelles vous travaillez. Signez-vous des conventions avec elles ? Comment le partenariat se déroule-t-il ? Avez-vous établi un accord de partenariat avec Colosse aux pieds d’argile, que vous avez tous mentionné ? Qu’y avez-vous inscrit ? Quel en est le coût ?

Mme Évelyne Ciriegi. La Drajes a signé un partenariat avec Colosse aux pieds d’argile pour la sensibilisation et les formations. Elle participe ensuite à élaborer des conventions avec les ligues qui le souhaitent ; il est aussi possible de faire appel à d’autres associations. Les partenariats sont alors établis entre les ligues et les prestataires. Chaque structure décide de ses propres financements. Colosse aux pieds d’argile, qui est référencé, pratique des tarifications connues.

Auparavant, nous disposions de Comité éthique & sport, mais cette association a malheureusement été dissoute. Elle apportait une autre facette.

Solliciter plusieurs prestataires nous offre une ouverture plus grande et nous permet d’adapter les avancées aux ligues, dont les échelles et les attentes ne sont pas identiques.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Pouvez-vous nous apporter des précisions sur le Comité éthique & sport ?

Mme Évelyne Ciriegi. Il a été dissous il y a environ un an. Il était à nos côtés, notamment au niveau du Cros. Il intervenait gratuitement, ce qui constituait un avantage. Malheureusement, il n’a pas été reconduit avec sa présidence.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. S’agissait-il d’une structure associative ?

Mme Évelyne Ciriegi. Oui. Il recueillait aussi des témoignages et accompagnait les victimes. Un médecin était à sa tête. Il travaillait avec des avocats.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Je comprends qu’aujourd’hui, vous mettez des associations à disposition auprès des ligues. Ces dernières choisissent avec lesquelles elles souhaitent travailler.

Mme Évelyne Ciriegi. Tout à fait. La Drajes propose aussi beaucoup de formations gratuites, dont peuvent bénéficier un maximum de personnes.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Monsieur Pouliquen, quel est le fonctionnement en Bretagne ?

M. Pierre Pouliquen. Nous rencontrons des difficultés avec la Drajes. Elle ne sait pas comment se positionner, d’autant qu’elle avait été présentée en opposition à la réforme.

Au sein du GIP Sport Bretagne, nous disposons d’une convention d’accompagnement. Il me semble qu’une autre convention permet d’intervenir auprès des apprentis, puisque nous avons également un centre de formation d’apprentis (CFA) du sport. Il faut absolument intégrer le sujet aux contenus pédagogiques, et non créer des commissions d’enquête.

Un fait de plus en plus fréquent m’amène à m’interroger sur le financement indirect des fédérations par les collectivités locales, territoriales et régionales, notamment lors de grands événements sportifs. Certaines fédérations demandent des tickets d’entrée à des organisateurs de championnats comme les championnats de France, avec des demandes d’hôtels quatre étoiles dans le cahier des charges ; dans certaines fédérations, on observe une augmentation du train de vie. Nous sommes en difficulté, car les collectivités, les organisateurs, le monde de l’entreprise, qui sponsorise près de 70 % de nos clubs et du mouvement sportif, et nous-mêmes risquons de ne plus pouvoir continuer ainsi.

Par exemple, pour une manifestation à 300 000 euros, la fédération fixe le ticket d’entrée à 110 000 euros. J’aimerais savoir si, en application du code du sport, de telles pratiques ne constituent pas des financements déguisés. Les élus sont souvent pointés du doigt, mais nous, nous dormons parfaitement bien dans un hôtel deux étoiles.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Pouvez-vous nous expliquer le fonctionnement de ces pratiques ? Nous sommes plusieurs à ne pas appartenir au monde sportif. Pouvez-vous aussi nous donner des exemples de fédérations ?

M. Pierre Pouliquen. Dans ma position, je ne peux pas vous donner d’exemples, j’aurais ensuite trop de problèmes. Plusieurs fédérations ont ces pratiques. Il est facile de les trouver.

Un organisateur a envie d’accueillir en région un championnat de France. Il propose sa candidature à travers la ligue, qui la transmet à la fédération. Le calendrier est ensuite établi. Un ticket d’entrée est discuté, c’est-à-dire que la fédération demande à l’organisateur de lui verser par exemple 110 000 euros pour un événement de 280 000 euros. En parallèle, normalement, la fédération apporte des équipements ou des ressources humaines à l’organisateur, mais cela se fait très peu. L’organisateur dispose d’un budget. Une fois le choix effectué, il sollicite les collectivités, qui se retrouvent à devoir payer, le couteau sous la gorge. Je me demande comment nous pourrons demain financer les grands événements.

Ces pratiques sont relativement nouvelles, elles datent de deux à trois ans. Le droit d’entrée est identique en Île-de-France, en Bretagne et en Occitanie. Nous risquons de ne plus pouvoir accompagner les structures organisatrices, qui se placeront elles-mêmes en difficulté en s’engageant sur le budget. Il serait opportun de solliciter la conférence des financeurs pour ces grands événements, afin que d’évoquer les budgets en amont avec les cofinanceurs. Cette démarche éviterait des problèmes à l’avenir. Cela créerait du lien entre les fédérations et les conférences régionales du sport.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Nous prenons note de vos remarques, que nous ferons remonter. Ce matin, nous avons évoqué la délégation de service public qui concerne l’organisation des grands événements et des événements sportifs. En schématisant, vous nous indiquez qu’il est demandé aux collectivités de financer les événements sportifs qui se déroulent en région. La situation est-elle identique en Île-de-France ?

Mme Évelyne Ciriegi. Oui. Les collectivités territoriales sont précieuses, mais nous sommes soumis au même problème que la Bretagne. Le sujet a été abordé lors de la dernière réunion du bureau de la CRDS, il y a huit jours. Nous avons envisagé d’établir un budget spécifique pour que les championnats se déroulent dans de bonnes conditions.

En Île-de-France, avec la nouvelle gouvernance de l’ANS, nos quatre-vingt-quatre ligues adhérentes ont perdu du financement. Le budget est attribué aux fédérations, qui les répartissent aux différentes ligues. L’Île-de-France a été malmenée. Le train de vie francilien est très onéreux par rapport au train de vie provincial. Nos ligues nous ont donc sollicités, car les sommes que la fédération leur reverse ne suffisent pas. Aucune n’a été bénéficiaire. Ce constat est partagé par l’ensemble du mouvement sportif francilien, qui compte 20 000 clubs et 2 500 000 licenciés. Il est difficile de comprendre comment la répartition a été réalisée. L’ANS délivre les financements, mais sur proposition fédérale. L’organisation des championnats de France nous met en difficulté.

M. Pierre Pouliquen. J’entends les mêmes interrogations des ligues en région. Je pense qu’il faut réfléchir à une péréquation qui tiendrait compte du nombre d’habitants et de licenciés, ainsi que des critères sociaux de chaque région. Nous avons procédé ainsi pour l’accompagnement des ligues, avec un montant fixe et un montant soumis à des critères.

Par ailleurs, une ligue, missionnée par sa fédération, nous a très récemment contactés pour savoir si nous pouvions mettre en place des dispositifs d’aide à l’emploi. Il s’agit de pallier les inquiétudes relatives au devenir des conseillers techniques sportifs (CTS), en nous demandant de les financer.

Je rappelle que les collectivités locales financent déjà le sport à hauteur de 80 %.

M. Pierre Rabadan. Si le coût de l’organisation d’un événement national ou international dépasse le montant des recettes, on demandera aux pouvoirs publics de combler la différence. Les collectivités sont face à une demande croissante, alors qu’elles sont diverses et qu’elles ont de moins en moins de moyens.

Les collectivités financent le sport à hauteur de 80 %, ce qui a des conséquences sur la pratique au quotidien et sur les compétitions. C’est en soi un sujet de réflexion. Des propositions ont été transmises dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2024. Nous demandons seulement que le sport soit financé par les recettes qu’il produit. Nous en sommes très loin. Tous les sujets que nous avons évoqués – la gouvernance, la répartition des compétences – nécessitent des moyens. Les fédérations n’en ont pas suffisamment, c’est pourquoi personne n’est capable de traiter les problèmes des VSS à un niveau adéquat. D’autres actions sont considérées comme prioritaires.

Dans notre société, le sport est un majeur outil d’inclusion et d’éducation. Il est clairement sous-investi, ce qui a des conséquences. Il est le reflet de la société, et il peut faire beaucoup avec peu de moyens. Il en reçoit très peu, alors qu’on lui demande énormément. Cette inégalité devrait être résorbée, ne serait-ce qu’en lui permettant de subvenir à ses besoins grâce à ce qu’il produit, et en lui accordant plus de moyens.

Cela n’empêche pas que la gouvernance pose un problème majeur. Il est primordial qu’elle traite les problèmes sociaux tels que les VSS. Il est indispensable d’encourager la libération de la parole. Le milieu sportif repose en grande partie sur la bonne volonté et sur le temps que les bénévoles y consacrent. La structuration est nécessaire, mais elle demande des moyens. Nous avons beaucoup d’idées, de volontés souvent partagées, mais elles ne suffisent pas si nous n’avons pas les moyens de les accomplir.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Merci à vous trois. N’hésitez pas à nous transmettre tous les documents dont nous avons parlé.

La commission auditionne Mme Gwenaëlle Noury, présidente de la Fédération française des sports de glace, et Mme Nathalie Péchalat, ancienne présidente de la Fédération française des sports de glace.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Nous auditionnons Mme Gwenaëlle Noury, présidente de la Fédération française des sports de glace (FFSG) depuis juin 2022, et Mme Nathalie Péchalat, présidente de la FFSG de 2020 à 2022.

Notre commission d’enquête a entamé ses travaux le 20 juillet dernier. L’Assemblée nationale a décidé de sa création à la suite de très nombreuses révélations publiques de sportives et de sportifs, et de diverses affaires judiciaires relatives à la gestion de certaines fédérations.

Nos travaux portent sur trois axes : les violences physiques, sexuelles ou psychologiques dans le sport ; les discriminations sexuelles et raciales ; les problèmes de gouvernance financière des organismes de gouvernance du monde sportif.

La gestion de l’ancien président, M. Gailhaguet, a été abondamment critiquée. L’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGÉSR), dans un rapport récent, a relevé des manquements graves.

Pouvez-vous revenir sur les constats que vous avez pu faire sur la gouvernance et la gestion de la FFSG lorsque vous avez pris vos fonctions ? Comment sa gouvernance a-t-elle évolué auparavant ? Quels sont les faits dont vous avez eu connaissance dans le champ qui intéresse notre commission ? Comment la FFSG a-t-elle réagi ? Quels changements chacune d’entre vous a-t-elle initiés dans les domaines intéressant notre commission ? Le cadre existant pour prévenir, détecter, signaler et sanctionner les violences sexuelles et sexistes, le racisme et les discriminations et les atteintes à la probité vous semble-t-il adapté ?

Cette audition est ouverte à la presse. Elle est retransmise en direct sur le site de l’Assemblée nationale.

L’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d’enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

(Mme Gwenaëlle Noury et Mme Nathalie Péchalat prêtent serment.)

Mme Gwenaëlle Noury, présidente de la Fédération française des sports de glace (FFSG). J’ai été élue en juin 2022 avec l’ambition de donner un nouvel élan à la FFSG et de répondre aux attentes des clubs, qui souhaitaient qu’elle soit plus proche de leurs préoccupations, tout en poursuivant la démarche de transformation, tant sur les questions éthiques que sur les violences.

Après une phase de diagnostic largement éclairé par l’enquête de l’IGÉSR, j’ai souhaité m’emparer des questions d’organisation de la gouvernance et des questions financières, dans une perspective de bonne gestion. Rien ne m’a été épargné par ces chantiers colossaux mais, grâce à une belle équipe, que j’ai souhaité faire correspondre à mon image et à mes valeurs, nous avançons.

Les résultats se mesurent chaque jour sur le terrain. J’ai obtenu une certaine sérénité, comme en témoignent tous les acteurs. Les retours les plus satisfaisants sont ceux de nos sportifs. Ils disent se sentir en sécurité et respectés. Leurs bons résultats sont peut-être l’illustration de ce bien-être retrouvé.

Je ne verse pas dans l’angélisme, car rien n’est jamais acquis. Notre engagement doit rester entier. J’ai conscience que nous devons maintenir un haut degré de vigilance. Notre espoir ne doit pas cacher les craintes exprimées par celles et ceux qui ont subi des traumatismes marquants. Notre travail consiste à leur prouver que cette transformation n’est pas éphémère et que nous ne reviendrons pas en arrière.

L’année passée fut riche et tourmentée. J’ai trouvé une fédération avec beaucoup de vides en matière de personnel fédéral et technique. Nous avons dû malgré tout assurer des événements, avec des échéances très courtes et des financements à trouver. Nous avons dû répondre à la décision de Mme la ministre de diligenter une inspection générale, dont les conclusions ont conforté mon analyse. Ce fut un audit tous azimuts mené en un temps record. Je salue ce travail méthodique et minutieux qui a confirmé mes doutes et interrogations et m’a surtout évité toute marque de complicité avec le passé. Je reste fidèle à mes valeurs et à celles du sport, tout en privilégiant l’intérêt fédéral.

Nous avons ensuite connu une phase de turbulences, avec un bureau exécutif divisé, paralysé. J’ai dû marquer une réelle rupture. Pressions, chantage, menaces, effraction de mon bureau, lettres anonymes, attaques personnelles, campagnes de diffamation, humiliations, intimidations, vol de données : tout était permis. Heureusement, avec le directeur technique national (DTN), M. Djamel Cheikh, et la secrétaire générale, Mme Stéphanie Daval, nous faisons preuve d’unité et de force. Ils partagent avec moi le souci de l’intérêt fédéral, avec la volonté et l’ambition de faire briller notre fédération.

Nous avons dû rassurer, fédérer, dialoguer, rassembler et expliquer. Nous avons affronté la défiance de certains, qui refusaient les changements. Nous avons commencé par revoir nos processus de contrôle, de contractualisation et de facturation. Nous avons organisé des consultations avec des appels d’offres.

La refonte des textes fédéraux par une commission dédiée a été entamée, conformément à la loi du 2 mars 2022 visant à démocratiser le sport en France. Cette commission a travaillé sur la mise à jour des statuts et sur le règlement intérieur, ainsi que sur les aspects financiers, disciplinaires et éthiques. Nous avons envisagé la création d’une commission des agents sportifs et préparé un règlement incluant une convention d’hébergement des sportifs. Avec le soutien des autorités de tutelle, nos nouveaux statuts et règlement intérieur sont prêts. Ils seront soumis à l’approbation de l’assemblée générale fin novembre.

Par ailleurs, j’ai souhaité que le DTN occupe désormais ses fonctions en conformité avec ses attributions. Je veille à travailler en lien constant avec lui, dans une relation de totale confiance qui s’est instaurée. Elle est la clé de notre réussite.

Nous avons engagé de nombreuses actions, notamment sur la formation continue des entraîneurs et des dirigeants. Nous avons retrouvé la confiance des partenaires institutionnels, notamment l’Agence nationale du sport (ANS), le Comité national olympique et sportif français (CNOSF), la direction des sports (DS), le ministère et Signal-sports. Mme la ministre et son administration sont attentives à notre démarche de transformation et la soutiennent.

J’ai mis en œuvre des changements importants. Nous avons instauré des procédures de mise en concurrence en l’absence de ressource en interne, dans le respect de notre règlement financier. Celui-ci offre un cadre que nous ferons évoluer.

J’ai mis un terme au recours à des entreprises extérieures lorsque les prestations sont réalisables en interne. Ces prestataires ont représenté des coûts colossaux. Ils étaient installés sans remise en question. J’ai procédé à des recrutements, notamment pour la communication interne et externe, ainsi que l’événementiel et la direction des opérations. Les effets sont immédiats sur l’économie générale de la FFSG et sur l’efficacité dans la conduite des dossiers.

J’ai ouvert les bras à toutes les bonnes volontés, notamment à certains champions tels que Surya Bonaly, Philippe Candeloro et Sarah Abitbol. Ils reviennent à la FFSG avec enthousiasme. Nous avons entamé avec eux des collaborations prometteuses.

Le DTN est toujours en phase de recrutement de son équipe, avec le soutien de la DS et de l’ANS. Il a rendu confiance aux cadres et insuffle un nouvel élan, dans un bel esprit d’équipe.

Ma porte reste ouverte, hors de toute considération partisane, à toutes les énergies souhaitant s’investir sincèrement dans le sport pour une transformation durable et dans cette belle fédération, à laquelle nous sommes attachés. En revanche, je n’accepterai aucun retour vers les pratiques du passé. Nous irons de l’avant. Nos sportives et nos sportifs, quel que soit leur niveau, méritent cet engagement sans faille.

Je tiens à assurer également une communication accrue, en toute transparence, notamment en réunissant plus régulièrement le bureau exécutif et le conseil fédéral pour y rendre compte de mon action, et en numérisant la communication avec les clubs, qui contribuent à assurer une proximité à laquelle je tiens.

Je réalise de nombreux déplacements sur le territoire national, à la rencontre des bénévoles, des dirigeants, des entraîneurs, des officiels et des licenciés, que nous devons tous écouter.

S’agissant de la lutte contre les violences, j’évoquerai le projet SAYES, mené en collaboration avec l’association Colosses aux pieds d’argile, engagée par Nathalie Péchalat. Ce projet européen de protection des jeunes patineurs bénéficie du soutien du programme Erasmus +, de Colosses aux pieds d’argile, de l’université de Lyon, de la Fédération internationale de patinage, et plus spécialement des fédérations de Hongrie et des Pays-Bas. Je salue l’investissement de nos deux référents intégrité, de l’élu référent en matière de lutte contre les violences sexuelles (LVS) et de notre rapporteur.

Dès le début du mandat, nous avons refondu le règlement éthique et disciplinaire et instauré la déclaration des intérêts particuliers. Nous sommes l’une des premières fédérations à l’avoir fait, avec l’aide du CNOSF et de la DS.

Nous travaillons à la mise en œuvre d’un projet novateur, le projet Sentinelle. Il s’agit d’identifier, dans chaque club et dans chaque ligue, un référent de la lutte contre les violences, qui sera formé puis accompagné par la Fédération. Il participera ensuite à la formation des pratiquants. Il recueillera la parole. Il fera le lien avec les associations idoines et les référents intégrité. Il s’agit d’un outil précieux de prévention. Nous y travaillons avec Colosses aux pieds d’argile, La Voix de Sarah, Second souffle, parmi d’autres.

Tout cela ne fonctionnerait pas si ces sujets n’étaient pas en permanence au cœur de nos actions quotidiennes. Elles le seront durablement, car le risque, dans le monde du sport, est permanent. Nous en sommes parfaitement conscients.

Nous avons décidé d’agir en prévention, de manière récurrente, avec des sensibilisations obligatoires des clubs pour l’obtention du label « école française de glace ». Nous traquerons, débusquerons et punirons les prédateurs. Dans chaque prise de parole, nous montrerons notre détermination et notre fermeté.

Le projet Sentinelle s’inscrit pleinement dans l’ambition de protéger nos licenciés de toute forme de violence. L’omerta institutionnalisée est terminée. Nous avons fait de gros progrès sur la libération de la parole grâce aux actions de nos référents intégrité et à celles des associations, notamment Colosses aux pieds d’argile et La Voix de Sarah.

Nos organes disciplinaires ont été renforcés pour que le temps de la décision soit efficace et contribue à rendre nos actions crédibles. Le rôle des services déconcentrés de l’État dans les enquêtes est fondamental. Les fédérations doivent prendre leurs responsabilités. Je m’y suis engagée. Elles doivent être soutenues pour réussir leurs transformations et neutraliser les mauvaises pratiques. Nous devons tous rester vigilants.

Après toutes ces turbulences, mon équipe et moi-même avons apporté la sérénité attendue par la communauté fédérale et par nos clubs. Une peur du retour d’anciennes pratiques est largement exprimée, mais ce sentiment, me semble-t-il, disparaît au profit d’une confiance qui s’installe peu à peu, au gré des rencontres que nous multiplions. Nous devions l’instaurer et donner de vrais signes de transformation. Tel est le cas.

Le rapport de l’IGÉSR nous est utile. Il nous guide chaque jour. Depuis sa publication il y a cinq mois, ses trente-quatre recommandations ont toutes été suivies. Certaines sont devenues réalité. Nous devons certes faire preuve d’humilité, mais notre détermination est intacte. L’incroyable créativité de notre équipe et notre refus du renoncement seront le moteur de notre réussite.

Mme Nathalie Péchalat, ancienne présidente de la Fédération française des sports de glace (FFSG). J’ai été convoquée au titre d’ancienne présidente de la Fédération française des sports de glace, mais je suis aussi une ancienne sportive de haut niveau, en danse sur glace, qui est l’une des disciplines du patinage artistique.

J’ai commencé ma carrière à l’âge de 7 ans et l’ai poursuivie jusqu’à l’âge de 30 ans. Pendant ces vingt-trois années, j’ai vu et vécu des violences morales, physiques et sexuelles, ainsi que la corruption et le dopage – la part d’ombre du sport de haut niveau. Je me suis toujours sentie impuissante.

Heureusement, le sport comporte aussi une part lumineuse. J’ai vécu ma passion et de ma passion. J’ai fait des études et obtenu un diplôme d’une école supérieure de commerce. J’ai vécu en Russie et aux États-Unis. J’ai fait de belles rencontres et décroché quelques médailles, notamment deux titres de championne d’Europe et deux médailles de bronze aux championnats du monde. J’ai participé trois fois aux Jeux olympiques et paralympiques (JOP), en 2006, en 2010 et en 2014. Je considère que j’ai eu la chance de mener à bien mon projet, de définir des objectifs à court terme, de sélectionner des experts, d’obtenir des financements privés, de prendre les décisions et de les assumer.

Je me suis construite dans l’adversité. Je n’attendais rien de la Fédération française des sports de glace, sinon des sélections internationales. La première fois que ses représentants sont venus nous voir pour nous demander ce dont nous avions besoin, nous étions déjà champions d’Europe – applaudir quelqu’un qui est en haut de l’affiche et lui dérouler le tapis rouge est si facile !

En 2014, j’ai mis fin à ma carrière de sportive de haut niveau. Je suis devenue consultante dans les médias, conférencière et entraîneuse, notamment pour la FFSG lors des regroupements des équipes de France novices et juniors de danse sur glace.

Quelques années avant d’arrêter la compétition, je me suis engagée dans les instances, non pour rendre ce que le sport m’avait apporté – tout ce que j’ai gagné, je suis allée le chercher à la sueur de mon front, avec l’aide de mon partenaire et de l’équipe d’entraîneurs, de chorégraphes et de préparateurs mentaux et physiques –, mais pour construire un avenir meilleur pour les générations d’aujourd’hui et de demain. Je ne suis pas naïve : je sais le travail que cela exige. La première chose à faire est d’ouvrir les yeux et de prendre conscience de ce qui se passe sur le terrain.

Au début des années 2010, j’ai rejoint la commission des athlètes de haut niveau du CNOSF, et quelques années plus tard le comité technique de la Fédération internationale de patinage. En 2017, j’ai demandé à rencontrer Sébastien Boueilh, fondateur et directeur de Colosses aux pieds d’argile, dont je suis devenue ambassadrice.

J’ai pris la parole sur le sujet des violences sexuelles dans le cadre de la commission des athlètes de haut niveau du CNOSF aux alentours de 2017, quelques années après #MeToo et les premières prises de parole dans le milieu artistique, notamment aux États-Unis. Nous étions un peu plus de vingt anciens athlètes de haut niveau, de disciplines très diverses. J’ai dit que, statistiquement, au moins quatre ou cinq des participants avaient subi ce genre de violences, tout le monde a baissé la tête. À l’issue de la réunion, j’ai discuté avec quatre ou cinq femmes. Nous avions toutes des choses à nous dire.

En 2019, nous avons publié une tribune pour dénoncer les violences sexuelles dans le milieu sportif. En 2020, lorsque le scandale des violences sexuelles a largement éclaboussé le monde des sports de glace après la publication du livre de Sarah Abitbol, Didier Gailhaguet, mon prédécesseur, a démissionné. Considérant qu’il fallait, pour modifier un système, en faire partie, j’ai proposé ma candidature.

Certains élus et salariés ont démissionné, d’autres sont restés. Le noyau de l’équipe était intègre pour l’essentiel, et précieux, car la FFSG ne conserve pas d’archives. Les informations importantes étaient détenues par un noyau dur, qui fort heureusement était parti. Cette équipe m’a donné l’historique des dernières années, du moins ce que M. Gailhaguet a bien voulu leur transmettre verbalement.

Trois jours après les élections, la crise sanitaire a éclaté, suivie du confinement et d’une crise économique. Nous avons dû trouver des financements pour poursuivre nos actions de développement et de performance en vue de l’organisation des JOP et des championnats du monde, d’autant que nous n’externalisons pas l’organisation des événements internationaux, ni d’ailleurs celle des événements nationaux.

J’ai donné la priorité à l’éthique, notamment la lutte contre les violences sexuelles et contre toutes les violences. Je voulais de l’éthique dans les choix afin que les décisions prises soient toutes justifiées et justifiables. Notre fédération est devenue exemplaire sur la lutte contre les violences sexuelles – je tiens à votre disposition le détail de nos actions sur le terrain. Nous avons modifié les statuts. Nous avons été la première fédération à voter la limitation du nombre de mandats.

Deux inspections générales ont été diligentées en 2020, dont l’une sur les violences sexuelles – je n’en ai jamais obtenu les conclusions, au motif qu’elle concernait mon prédécesseur, qui en a été seul destinataire. L’inspection portant sur la gestion administrative et financière m’a auditionnée deux fois, ainsi que d’autres membres et élus de la FFSG, à l’automne 2020 et à l’automne 2021. Nous leur avons remis tous les nombreux documents demandés.

Je me suis étonnée de n’avoir jamais reçu les conclusions de cette inspection, engagée avant mon arrivée. J’ai relancé le ministère plusieurs fois, à l’oral et par écrit, en précisant que le risque d’un retour de M. Gailhaguet n’était pas nul. Mme la ministre Amélie Oudéa-Castéra a relancé l’inspection en 2022, avec une autre équipe.

J’ai découvert l’envers du décor de la FFSG. Ce que je vais décrire ne concerne pas tous les présidents de club. J’ai découvert le clanisme, les intérêts personnels et les petits arrangements entre amis, ainsi que les lettres anonymes envoyées régulièrement aux élus, dont certaines allaient jusqu’à menacer mes deux filles. Ces deux ans de mandat ont été un défi permanent, sur tous les plans.

Deux ans et trois mois après mon élection, l’ancien monde a repris ses droits. Didier Gailhaguet a trouvé son cheval de Troie en la personne de Gwenaëlle Noury. Il a fait sa campagne, rédigé sa profession de foi et mené les tractations. Je le dis d’autant plus aisément que le rapport de l’IGÉSR l’indique, preuves à l’appui. Didier Gailhaguet n’a sans doute pas supporté que la FFSG fonctionne sans lui, après vingt ans passés à sa tête.

En 2021, je suis entrée au conseil d’administration du CNOSF. J’y ai rencontré des personnes valeureuses et intègres, que je ne mêle pas à mon histoire personnelle. Avec quelques présidents jeunes non par l’âge mais par l’expérience, nous avons souhaité rédiger un rapport faisant état de notre étonnement sur la gouvernance, le management, l’événementiel et les relations avec les autres instances sportives nationales. Malheureusement, le projet n’a pas pu être mené, faute de temps et en raison de la forte activité du CNOSF depuis 2022.

Pour le CNOSF, je m’occupe du Club France, qui sera l’épicentre du mouvement sportif français pendant les JOP 2024. Par ailleurs, je préside l’association Premiers de cordée, qui encourage la pratique sportive dans les services pédiatriques des hôpitaux.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. L’ancien président de la FFSG a été abondamment critiqué. Il serait intéressant de connaître l’évolution depuis son départ. Madame Noury, vous avez évoqué des appels d’offres. Faut-il comprendre qu’ils n’existaient pas auparavant ? Vous avez indiqué avoir mis à jour la fiche de poste du DTN en conformité avec ses attributions. Pouvez-vous préciser votre propos ? Faut-il comprendre qu’il occupait auparavant des fonctions qui n’étaient pas les siennes ?

Vous avez dit avoir instauré la formation des entraîneurs et d’autres personnes. Comment se déroulait la formation précédemment ? Vous avez évoqué l’instauration d’une procédure de mise en concurrence. N’existait-elle pas avant votre arrivée ? Pouvez-vous préciser les montants des prestations extérieures, notamment dans le domaine de la communication et de l’événementiel ?

Vous avez parlé d’omerta institutionnalisée. Qu’entendez-vous par là ? Nous avons reçu de nombreux témoignages de victimes évoquant l’omerta régnant au sein du mouvement sportif, dans plusieurs fédérations et plusieurs clubs.

Madame Péchalat, quand avez-vous rejoint le CNOSF ?

Mme Nathalie Péchalat. En juin 2021.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. La réunion au cours de laquelle vous avez dit que quatre ou cinq participants avaient subi des violences a-t-elle été tenue dans le cadre du CNOSF ? Pouvez-vous dire qui y assistait ?

Mme Nathalie Péchalat. Il s’agissait de la commission des athlètes de haut niveau. Six ans plus tard, je ne sais plus qui était autour de la table, mais cette information se trouve dans le procès-verbal. Cette commission est indépendante. J’espère que ses échanges sont transmis au plus haut niveau. À l’époque, les violences étaient un tabou. Je me contente de relater la réaction des participants, qui a été de baisse les yeux.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. M. Masseglia était-il présent ?

Mme Nathalie Péchalat. Non. Il n’y avait que d’anciens athlètes.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Qui a eu accès au compte rendu de vos échanges ?

Mme Nathalie Péchalat. Je l’ignore. J’étais simple membre de la commission. Je n’en fixais pas l’ordre du jour. J’ignore si mes propos figurent à son compte rendu. J’ai simplement voulu donner l’alerte à l’heure où des statistiques dramatiques commençaient à être publiées sur les violences sexuelles dans le sport.

Mme Gwenaëlle Noury. Mme Péchalat a dit que je suis un pion de l’ancien président de la FFSG. Très honnêtement, j’ai cru à son rôle de conseiller. Certes, il a soutenu ma campagne. J’ai cru à son expertise sportive. J’ai eu tort. Les choses ont changé, largement et rapidement. Je tenais à préciser ce point. Tout a été arrêté. J’ai eu le courage de mettre un terme à la situation.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Je déduis de vos propos que M. Gailhaguet n’a plus aucun rôle, même officieux, au sein de la FFSG.

Mme Gwenaëlle Noury. Tel est bien le cas.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Le rapport de l’IGÉSR déplore à plusieurs reprises la place prépondérante de l’ancien président, alors même qu’il n’a plus de poste à la FFSG.

Mme Gwenaëlle Noury. Je le considérais comme un conseiller. Je souhaitais réunir le plus grand nombre de compétences possible autour de moi. Ma marque de fabrique est de gouverner avec une équipe unifiée.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Quand avez-vous cessé de faire appel à ses services ?

Mme Gwenaëlle Noury. Dès l’été suivant mon élection, la situation est devenue difficile. J’ai dû adopter une stratégie pour reprendre les rênes de la FFSG. Je me suis réjouie de l’arrivée, en novembre, de M. Djamel Cheikh, dont je salue la compétence, et de la secrétaire générale. À nous trois, nous constituons une équipe forte et unie, qui a bravé les tempêtes.

Mme Nathalie Péchalat. Consultante pour Eurosport, j’assiste aux grands événements sportifs. À la finale du Grand Prix de patinage artistique, en décembre 2022, j’ai croisé M. Gailhaguet portant une accréditation officielle de la FFSG.

Six membres proches de M. Gailhaguet ont été éjectés du bureau il y a quelques mois. Je m’étonne que Mme Stéphanie Daval, secrétaire générale, et Mme Gwenaëlle Noury soient encore à la FFSG. Le mot d’ordre était d’en faire sortir les proches de M. Gailhaguet. Chacun sait, et j’en ai des preuves, qu’ils étaient très proches avant les élections et au moins jusqu’en décembre 2022. J’appelle cela le bal des faux-culs.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Le rapport de l’IGÉSR a été publié en juin 2023. Il indique clairement que M. Gailhaguet a encore une forte présence. Madame Noury, vous dites avoir mis un terme rapidement à son rôle de conseiller. Pourtant, il disposait d’une accréditation de la FFSG en décembre 2022. Comment cela se fait-il ?

Mme Gwenaëlle Noury. Je n’ai jamais donné cette accréditation, comme je l’ai indiqué aux inspecteurs. En raison de dysfonctionnements de notre système informatique, mes codes d’accès ont sans doute été utilisés.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Avez-vous entamé une procédure en interne pour savoir qui aurait pu utiliser vos codes ?

Mme Gwenaëlle Noury. Non. Lors de l’éviction des six proches de M. Gailhaguet, dont je considère ne pas faire partie, nous avons constaté un vol de données. Une plainte a été déposée.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Le rapport de l’IGÉSR date de juin 2023. Pourquoi ses auteurs considèrent-ils à cette date que M. Gailhaguet est encore très présent au sein de la FFSG ? Pourquoi l’ont-ils écrit si tel n’était plus le cas ?

Mme Gwenaëlle Noury. Le rapport a été publié tardivement, juste avant notre assemblée générale, début juin. Il était attendu. Il y a eu des faits marquants, notamment un voyage au Japon. Les personnes concernées ont exprimé très clairement leur souhait que M. Gailhaguet revienne. Je m’y suis fermement opposée. J’ai consulté le bureau exécutif, qui était divisé, et proposé au conseil fédéral d’exclure six personnes. Cette proposition a été adoptée par 80 % de ses membres.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Madame Péchalat, pouvez-vous confirmer ce qu’indique le rapport sur la présence de M. Gailhaguet ?

Mme Nathalie Péchalat. Je n’ai pas eu connaissance de l’intégralité du rapport, mais seulement des passages me concernant, soit environ 120 pages sur plus de 800. Je peux confirmer que je l’ai vu en décembre 2022 avec une accréditation. Je connais le système. Le président est la seule personne qui peut délivrer une accréditation. Un seul membre de la FFSG peut aller sur le terrain. La Fédération internationale est très claire sur ce point. Par ailleurs, les membres du bureau exécutif qui en ont été évincés sont ceux qui y sont entrés à la suite des élections de juin 2022.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Mesdames, je suggère que vous continuiez à répondre à mes questions liminaires.

Mme Gwenaëlle Noury. Les appels d’offres sont désormais systématiques, ce qui n’était pas le cas auparavant, à partir d’un certain montant fixé par le règlement financier.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Dans un entretien à L’Obs daté de mai 2023, vous indiquez : « Je n’imaginais pas un univers aussi catastrophique et corrompu. » Vous venez d’évoquer la question des marchés publics. Avez-vous signalé tous les manquements que vous avez dénoncés ?

Mme Gwenaëlle Noury. J’ai constaté énormément de copinage, notamment pour l’événementiel, sans réels appels d’offres. Le mieux était de le dire. Nous avons rétabli la situation au plus vite.

Concernant le rôle du DTN, il n’était pas prévu dans nos statuts. Jusqu’à présent, le « turn-over » des DTN était élevé. Ils ne restaient jamais en poste plus de deux ans, sans doute parce que la gouvernance précédente était centrée autour d’une personne. Tel n’est plus le cas. J’avance main dans la main avec le DTN, ce qui est la clé de la réussite. Il en résulte une sérénité et un bien-être pour nos sportifs. Leurs résultats en sont les meilleures preuves.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Vous avez inscrit le rôle du DTN dans le règlement. Qu’avez-vous modifié dans ses attributions ?

Mme Gwenaëlle Noury. Nous avons indiqué les attributions normales du DTN, ce qui faisait défaut. Nous avons rétabli le rôle du DTN : s’occuper des sportifs de haut niveau.

Nous avons rétabli la formation continue, notamment pour les entraîneurs, conscients de la nécessité de sensibiliser les acteurs aux violences.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. J’en déduis que la formation continue avait été supprimée.

Mme Gwenaëlle Noury. Je manque de recul pour le dire. J’imagine qu’elle a toujours été prévue, tant le métier d’entraîneur exige d’être à la page. On ne peut pas se contenter d’un diplôme. Il est essentiel, d’autant que la société évolue en ce sens, de continuer à sensibiliser et à former nos entraîneurs. Je suis très fière que le volet sur les violences, qui inclut la sensibilisation et la formation, ait été inclus pour nos jeunes au niveau des brevets fédéraux.

Ces brevets initiateurs touchent nos premiers bénévoles dans les clubs. L’école française de glace est la première strate de labellisation. Elle est reconduite pour 2022-2026. La condition sine qua non pour l’obtenir est que tout dirigeant et toute personne en contact avec nos licenciés suive cette formation sous forme de webinaire. La démarche est une réussite. De nombreux clubs sont labellisés, et ce n’est pas fini.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Madame Péchalat, quelle était la situation de la formation sous votre présidence ?

Mme Nathalie Péchalat. La formation continue des entraîneurs s’est arrêtée avec la crise sanitaire, la fermeture des patinoires et l’incapacité de se regrouper. Elle a repris, si je me souviens bien, au second semestre 2021, avec un point d’orgue lors des championnats du monde que nous avons organisés fin mars 2022.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Madame Noury, si la formation a repris en 2021, elle existait à votre arrivée.

Mme Gwenaëlle Noury. Je n’ai pas fait ce constat. Au demeurant, l’Institut national de formation aux métiers de la glace (INFMG) est en sommeil depuis un certain temps. Nous nous interrogeons sur l’utilité de le réactiver. Nous devrons reprendre tout ce qui concerne les certifications, notamment Qualiopi.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Madame Péchalat, si les formations n’existaient pas à l’arrivée de Mme Noury, comment expliquez-vous qu’elles aient redémarré avant ? Nous devons parvenir à nous entendre sur le moment auquel les formations ont repris.

Mme Nathalie Péchalat. Je n’ai rien inventé. La formation continue des entraîneurs a eu lieu, avec comme point d’orgue les championnats du monde, en mars, à Montpellier. Vous pouvez interroger les entraîneurs et l’ancien DTN.

Mme Gwenaëlle Noury. Quelles étaient ces formations ?

Mme Nathalie Péchalat. Il s’agissait de la formation continue des entraîneurs de patinage artistique et de danse sur glace.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Ces formations continues intégraient-elles un volet de lutte contre les violences sexistes et sexuelles (VSS) ?

Mme Nathalie Péchalat. Le contenu des formations relève du DTN et du pôle formation. À mon arrivée, nous avons rapidement signé une convention avec l’association Colosses aux pieds d’argile. Des formations ont été dispensées pendant plusieurs jours à tous les cadres techniques sportifs de la FFSG. Cinq sensibilisations ont été organisées pour les jeunes lors des regroupements fédéraux. Il me semble aussi que nous avons déployé entre dix et quinze sensibilisations dans les territoires. Ces derniers avaient la possibilité de s’organiser, de choisir l’association avec laquelle ils voulaient travailler pour sensibiliser les encadrants, les présidents et les entraîneurs. La démarche était couplée à une formation technique.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. À quel moment avez-vous conclu le partenariat avec Colosses aux pieds d’argile ?

Mme Nathalie Péchalat. Au début de l’été 2020.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Madame Noury, vous dites avoir rétabli des formations. Mme Péchalat précise qu’elles existaient. S’agissait-il de formations différentes ? L’incompatibilité de vos propos a de quoi surprendre.

Mme Gwenaëlle Noury. J’aimerais savoir quelles formations continues ont été ouvertes. Avec mon équipe, j’en ai ouvert plusieurs, en donnant la priorité à la lutte contre les VSS et contre la violence en général. J’ai aussi des propositions techniques. Nous avons également un projet de reconversion de nos sportifs de haut niveau. Nous souhaitons proposer à nos licenciés des passerelles vers le volet spectacle. J’aimerais apporter cette compétence à nos entraîneurs.

Par ailleurs, nous devons les aider à faire face au fléau des patinoires qui ferment pour des raisons énergétiques, avec des délais sans glace qui s’allongent. Nous ne devons pas laisser les entraîneurs sans solution. Nous rédigeons cette formation en la matière, avec en vue la licence « In-line », que nous avons rétablie.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Lorsque vous prenez la présidence de la FFSG, le partenariat avec Colosses aux pieds d’argile était acquis ?

Mme Gwenaëlle Noury. Oui.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Cette association faisait-elle de l’information, de la formation et de l’accompagnement des victimes ?

Mme Gwenaëlle Noury. Oui. Elle fait un très bon travail. D’autres associations aussi, notamment dans le cadre du projet Sentinelle. Je suis ravie que des volontaires se proposent pour renforcer l’équipe de terrain pour aider les référents intégrité.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. L’une et l’autre, vous avez évoqué, après les victimes que nous avons auditionnées, l’omerta qui règne dans le monde du sport. Pouvez-vous préciser ?

Mme Gwenaëlle Noury. C’est un ressenti. Il est temps de mettre en lumière ce qui a été caché. Certaines affaires restent à élucider. J’ai contacté le cabinet de Mme la ministre à ce sujet.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Ces affaires concernent-elles des VSS ou d’autres violences ? S’agit-il d’affaires qui n’ont pas été traitées et dont vous avez hérité ?

Mme Gwenaëlle Noury. Certaines affaires sont toujours en cours. Mme Péchalat en avait connaissance, notamment celle qui comporte une dimension transatlantique. Nous avons changé d’avocat. J’attends le retour du procès. Nous avons eu gain de cause en plaidant l’incompétence de territoire. J’ai contacté le cabinet de Mme la ministre, qui n’était pas informé de cette affaire.

Mme Nathalie Péchalat. J’ai hérité de ce dossier de mon prédécesseur. L’affaire s’est déroulée en 2017, sur le territoire américain. Elle a été rendue publique en 2019.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. De quelle affaire s’agit-il ?

Mme Nathalie Péchalat. Il s’agit de l’affaire Morgan Ciprès. Sportif de haut niveau, il s’entraînait en Floride, avec des entraîneurs américains. Sa partenaire était française. Ils représentaient la France et préparaient les JOP de Pyeongchang de 2018.

M. Gailhaguet aurait été informé de sextos envoyés par Morgan Ciprès à une jeune patineuse américaine âgée de 13 ans. Il lui aurait demandé de se taire en disant qu’il allait s’en occuper. Deux ans plus tard, la victime a porté plainte et alerté SafeSport Center, qui est un comité éthique.

Quand j’étais à la FFSG, nous nous sommes occupés de cette affaire avec un cabinet d’avocats. Les dommages et intérêts pouvaient dépasser 5 millions de dollars. Nous avons donc pris l’affaire très au sérieux. La principale source de problème était que la FFSG rémunérait les entraîneurs américains, ce qui induit une sorte de hiérarchie. L’entraîneur américain aurait aussi été au courant.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Quelles mesures ont été prises en interne ?

Mme Nathalie Péchalat. Je connaissais cette affaire. Je savais que des lettres du cabinet américain arrivaient régulièrement pour nous demander de la prendre au sérieux en raison du montant potentiel des dommages et intérêts.

J’ai été contactée à l’été 2020 par SafeSport Center, qui me demande de communiquer les coordonnées de la référente intégrité de la FFSG, ce que je fais. En décembre 2020, l’attaché de presse m’indique que plusieurs médias évoquent cette affaire. Sollicitée pour répondre aux journalistes, je n’étais au courant de rien. J’ai alors constaté que la référente intégrité avait reçu un mail de SafeSport Center en septembre, avec des preuves assez éloquentes. L’affaire était déjà passée en commission disciplinaire, à l’été 2020. Je ne pouvais pas la saisir à nouveau puisqu’il n’est pas possible de juger deux fois une même personne pour les mêmes faits.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Qu’a décidé la commission disciplinaire ?

Mme Nathalie Péchalat. Comme la plupart des affaires, voire toutes, celle-ci a été classée sans suite. Au sein d’une fédération, la commission disciplinaire n’a pas le pouvoir de mener une instruction avec les moyens permettant de recueillir des éléments. Dans le meilleur des cas, le chargé d’instruction présente une sorte de revue de presse. Les membres de la commission, qui étaient des avocats honoraires, ont indiqué qu’ils ne disposaient pas d’éléments en nombre suffisants pour donner suite.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Un signalement a-t-il été transmis au ministère des sports ? Un signalement au titre de l’article 40 du code de procédure pénale a-t-il été transmis pour protéger la victime ? Une plainte a-t-elle été déposée ?

Mme Nathalie Péchalat. Non. Ces procédures en étaient à leurs débuts.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Vous étiez présidente de la FFSG. Je n’arrive pas à comprendre pourquoi, lorsque vous avez été informée par les États-Unis de cette affaire, personne n’a prévenu le ministère des sports. Rien n’empêche de compléter les mesures disciplinaires par des enquêtes administrative et judiciaire.

Mme Nathalie Péchalat. Une instruction judiciaire était ouverte aux États-Unis.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Le ministère français était-il prévenu ?

Mme Nathalie Péchalat. Oui, compte tenu du montant potentiellement élevé des dommages et intérêts étaient élevés.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Comment est-il possible que la référente intégrité n’ait pas vu le mail ?

Mme Nathalie Péchalat. Je me suis posé la même question. Elle m’a dit qu’elle ne parlait pas anglais. Je lui ai indiqué qu’elle aurait dû me l’envoyer, d’autant que Morgan Ciprès s’écrit de la même manière en français et en anglais. Cette personne, soit dit sans vouloir faire un procès d’intention, était proche de Didier Gailhaguet. J’ignore si elle a agi de manière intentionnelle ou non, ni si elle s’est rendu compte de la gravité du problème. J’ajoute que les élus au sein des fédérations sont des bénévoles. Il est difficile de bousculer quelqu’un qui donne de son temps.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Comment avez-vous réagi au mail ?

Mme Nathalie Péchalat. Nous avons dû trouver une autre instance que la commission disciplinaire pour instruire à nouveau cette affaire. Je me suis tournée vers le CNOSF, mais il n’a pas d’organe disciplinaire. J’ai demandé son aide à Denis Masseglia. Je ne voulais pas rester sans réagir, mais il n’y avait rien à faire. Les faits s’étant produits aux États-Unis, j’ai contacté la Fédération internationale de patinage pour qu’elle juge l’affaire dans le cadre de sa commission disciplinaire.

Elle m’a opposé une fin de non-recevoir, au motif que je l’avais contactée plus de soixante jours après avoir reçu les éléments de preuve. Or, je ne les avais pas reçus en mains propres. J’ai insisté. L’affaire a fini par être instruite, mais la commission disciplinaire a abouti à la même conclusion que la nôtre : classement sans suite faute d’éléments.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Vous nous avez indiqué que le mail contenait des éléments probants.

Mme Nathalie Péchalat. Je ne suis pas membre de la commission disciplinaire de la Fédération internationale.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Ces éléments étaient-ils des captures d’écran de messages à caractère sexuel ?

Mme Nathalie Péchalat. Oui. Il y avait aussi des échanges entre la mère de la victime et Morgan Ciprès.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Lorsque vous avez alerté Denis Masseglia, vous a-t-il dirigé vers quelqu’un d’autre ? Le ministère a-t-il été alerté à ce moment-là ?

Mme Nathalie Péchalat. Non. Les dispositifs n’existaient pas. C’est Roxana Maracineanu qui a lancé la lutte contre les violences. En 2019, nous étions au tout début de la prise de conscience. Les fédérations doivent se mettre en conformité, comme tout le mouvement sportif. Trois ans, dans ces affaires, c’est long.

Mme Gwenaëlle Noury. En tant que présidente de la FFSG, l’été dernier, j’ai été contactée plusieurs fois. J’ai reçu des relances car, en raison de problèmes informatiques, des mails ne m’étaient pas parvenus. La situation s’est rétablie.

Dès l’été dernier, j’ai pu échanger avec l’avocat de la FFSG aux États-Unis. Il était ravi de voir sa cliente pour la première fois. J’ai organisé une visioconférence, devant témoins. J’ai été très étonnée de constater que la FFSG avait dépensé plus de 250 000 euros en frais d’avocats aux États-Unis. L’avocat aux États-Unis était en lien avec le cabinet Racine, chargé des aspects juridiques de la FFSG. Il ne parlait pas français, ce qui, avec d’autres considérations, notamment les honoraires, qui nous semblaient exorbitants, nous a incités à changer d’avocat.

À la suite de ce contact, l’affaire a repris. Les plaignants ont voulu poursuivre. En Floride, dans le comté de Pasco, ces faits peuvent être punis très sévèrement. Le risque financier était compris entre 5 et 20 millions d’euros, ce qui induirait une disparition de la FFSG. J’ai immédiatement contacté le ministère. Je confirme qu’il n’était pas informé de cette affaire.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Si le cabinet américain n’a eu aucun contact avec la FFSG, comment 250 000 euros ont-ils été dépensés en frais d’avocats aux États-Unis ?

Mme Gwenaëlle Noury. J’ai constaté que les factures arrivaient et que rien ne se passait, ce qui était intolérable pour moi. Nous avons rapidement décidé de changer d’avocat. En seulement un mois, nous avons largement diminué les frais d’honoraires, avec des sommes plus acceptables. La provision sur nos comptes est descendue à 150 000 euros, qui n’ont finalement pas été utilisés.

Une échéance était fixée fin août. À l’issue du procès, nous avons gagné cette partie en plaidant l’incompétence de territoire. Le délai de trente jours pour faire appel touche à sa fin. J’attends l’ordonnance de jugement écrite. Nous pourrons alors envisager la fin de cette affaire la plus favorable possible pour la FFSG.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. J’espère qu’elle sera également favorable pour la victime, ce qui est le plus important. La FFSG n’est pas sans responsabilité.

Mme Gwenaëlle Noury. Vous avez complètement raison. Nous évoquions l’aspect financier, qui m’a révoltée, mais nous sommes bien d’accord que la priorité reste la sécurité et le bien-être de nos licenciés et de la population en général.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Madame Péchalat, que pouvez-vous dire sur les frais d’avocat et l’absence de contacts ?

Mme Nathalie Péchalat. Le ministère des sports a été informé. La ministre n’était pas Amélie Oudéa-Castéra, mais Roxana Maracineanu.

Lorsque j’ai quitté la FFSG, j’ai pris trois jours pour clore les dossiers.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Certes, les ministres changent, mais la DS reste. Qui était informé au ministère des sports ?

Mme Nathalie Péchalat. Fabienne Bourdais, qui était DS.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Elle l’est toujours. A-t-elle dit qu’elle n’a pas été prévenue ?

Mme Nathalie Péchalat. Elle faisait partie des destinataires des mails que j’ai envoyés lorsque j’ai clos mes dossiers. Il y avait notamment un mail éthique, que j’ai adressé à Mme Noury et aux membres du conseil d’administration pour que tout le monde ait les bonnes informations, en précisant les urgences, où nous en étions et les contacts. J’ai procédé ainsi pour tous les sujets portés par la FFSG.

J’ai également transmis en mains propres à Mme Noury le dossier de l’affaire Morgan Ciprès. Il est incompréhensible qu’elle ait mis un an et demi à se souvenir de son existence. Le dossier comprenait tout – photos et textes – dans un grand classeur.

Mme Gwenaëlle Noury. Le classeur existe, mais il n’explique en rien le traitement de l’affaire ni les démarches sur le continent américain.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Le ministère des sports vous a-t-il indiqué qu’il n’était pas informé ?

Mme Gwenaëlle Noury. Tout à fait.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Pouvez-vous nous transmettre les échanges par mail ?

Mme Nathalie Péchalat. Non. Ma boîte mail de la FFSG a été fermée à la fin de mon mandat.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Nous solliciterons donc le ministère des sports.

Au moment du traitement de l’affaire, le ministère des sports a-t-il ouvert une procédure au titre de l’article 40 du code de procédure pénale ? Il est difficile d’identifier le début de l’affaire. Lorsque vous êtes informée, aucun procès n’est intenté aux États-Unis. Vous avez lancé une procédure disciplinaire interne à la FFSG, mais vous auriez pu faire ouvrir une enquête administrative ou judiciaire. Où commence cette affaire et où s’arrête-t-elle ?

Mme Nathalie Péchalat. Où elle s’arrête, je l’ignore. J’ai été élue à la tête de la FFSG le 14 mars 2020. Je ne me souviens plus de la façon dont j’en ai été informée. Nous avons dû réactiver la commission disciplinaire avant l’été. J’ai dû être prévenue par courrier. Il ne provenait pas de SafeSport Center, qui nous a sollicités au second semestre 2020.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Nous tâcherons d’obtenir les informations pour comprendre les dysfonctionnements, conformément à l’objet de notre commission d’enquête. Votre prédécesseur a manifestement choisi de n’informer personne. Vous avez, l’une puis l’autre, hérité du dossier.

Dans le cadre de vos fonctions, vous est-il arrivé de procéder à un signalement au titre de l’article 40 du code de procédure pénale ou de procéder à des signalements de faits de violences sexuelles, de harcèlement, de violences physiques ou de racisme ?

Mme Nathalie Péchalat. À mon arrivée, l’éthique, à la FFSG, était une page blanche. Tout était à construire. Nous avons nommé deux référentes intégrité, une élue et la DTN. Nous avons créé un comité éthique. Nous avons réactivé la commission disciplinaire.

La FFSG s’est portée partie civile dans deux affaires de violences sexuelles. Avec Colosses aux pieds d’argile, nous avons développé la formation des cadres techniques sportifs. Nous avons réalisé une sensibilisation lors des regroupements équipe de France, auprès des jeunes, et quinze actions de sensibilisation dans les territoires.

Nous avons créé des outils de communication à destination des clubs pour que les témoins ou les victimes puissent témoigner auprès de la cellule Signal-sports et connaissent les coordonnées de la référente intégrité. Nous avons donc créé deux canaux de traitement des témoignages. Nous avons créé des codes de bonne conduite pour les sportifs de haut niveau et pour les encadrants. J’ai lancé le projet SAYES de lutte contre les violences sexuelles en Europe.

Pendant mon mandat de deux ans, nous avons clos quinze affaires de violences sexuelles, physiques ou morales, dont six relevant d’un arrêté préfectoral. À mon départ, huit affaires étaient encore en cours, dont cinq concernant des entraîneurs, une un patineur et deux des dirigeants. Nous avons mené onze médiations avec le comité éthique et dix interventions d’associations spécialisées pour suivre et aider les victimes. Neuf cartes professionnelles ont été suspendues ou retirées. Cinq affaires ont fait l’objet d’un passage devant la commission disciplinaire, et quatre d’une saisine.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Les quinze affaires que vous avez closes étaient-elles ouvertes avant votre arrivée ou s’agissait-il d’affaires que vous avez décidé de traiter ?

Mme Nathalie Péchalat. Les trois quarts étaient d’anciennes affaires ressorties à la faveur de la libération de la parole.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Les enquêtes étaient-elles en cours ? Des signalements avaient-ils été transmis ?

Mme Nathalie Péchalat. Non. Nous étions vraiment au tout début de la lutte contre les violences. La parole s’est libérée. Des gens nous ont envoyé des témoignages, dix, quinze, vingt ou trente ans après les faits.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Savez-vous si votre prédécesseur était informé de ces affaires ?

Mme Nathalie Péchalat. À mon avis, non. L’omerta régnait. Ce n’est pas si lointain, mais ce n’était pas la même époque. On ne savait pas à qui s’adresser.

Mme Gwenaëlle Noury. La FFSG est partie civile dans le cadre des procédures ouvertes par l’IGÉSR au titre de l’article 40 du code de procédure pénale. Une plainte contre X est en cours d’examen. L’un de nos référents intégrité a transmis un signalement au titre de l’article 40 du code de procédure pénale.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Pour quelle raison certaines procédures relevant de l’article 40 ont-elles été déclenchées par l’IGÉSR ?

Mme Gwenaëlle Noury. Le travail de l’IGÉSR, titanesque et mené en un temps record, a été bénéfique. Je n’ai pas encore eu le temps d’en examiner le détail, d’autant que je n’ai eu connaissance que des passages concernant les quelques mois de mon début de mandat. J’en saurai davantage une fois les procédures closes. Je garantis que la FFSG adoptera une attitude adéquate.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. En août 2023, l’ancien champion du monde de patinage artistique Brian Joubert a été accusé de violences dans son club de Poitiers. Par ailleurs, il est soupçonné d’avoir entretenu une liaison avec une patineuse mineure. Comment la FFSG a-t-elle traité cette affaire ?

Mme Gwenaëlle Noury. Je reçois une synthèse des signalements transmis à la FFSG. J’en ignore les détails. Les référents intégrité et le rapporteur peuvent demander une saisine de la commission disciplinaire. Sept dossiers sont en cours d’examen.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Sur une affaire comme celle que j’ai évoquée, prenez-vous des mesures à titre conservatoire ?

Mme Gwenaëlle Noury. La commission disciplinaire peut en prendre, pour protéger tout le monde. Ce dossier sera traité début novembre. La commission disciplinaire est constituée d’avocats, en disponibilité ou actifs.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Avez-vous déjà transmis des signalements à Signal-sports ?

Mme Nathalie Péchalat. Je ne l’ai jamais fait directement. Pour moi, cette mission incombe à la référente intégrité, en lien avec Fabienne Bourdais.

L’éthique est un sujet complexe. Le président doit rester hors de la boucle. Nous avions adopté un processus de traitement selon la gravité et l’urgence des signalements. Le comité éthique peut saisir directement la commission disciplinaire. Le président en est informé. À défaut, il n’a pas le détail des signalements.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Les signalements n’ont pas forcément une origine extérieure. Certaines personnes auditionnées nous ont dit avoir recueilli des témoignages directs de victimes, ce qui offre la possibilité de transmettre un signalement au titre de l’article 40 ou à Signal-sports. Avez-vous été dans cette situation, en tant que présidente de la FFSG ou au cours de votre carrière ?

Mme Nathalie Péchalat. Une sportive de haut niveau m’a contactée pour m’informer. Les violences n’avaient pas eu lieu dans le cadre de sa pratique sportive, mais je l’ai quand même orientée, à titre personnel, vers l’association Colosses aux pieds d’argile. La mère d’une victime m’a signalé des agissements d’une entraîneuse déjà placée sous arrêté préfectoral.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Avez-vous signalé les faits, même si une procédure était en cours ?

Mme Nathalie Péchalat. Non. La procédure était en cours et concernait un entraîneur qui était à l’étranger, mais nous ne savions pas dans quel pays.

De même, j’ai considéré que la première personne dont j’ai parlé m’avait appelée à titre personnel. Il ne m’incombait pas de décider des suites qu’elle voulait donner. Je l’ai orientée vers l’association, qui réalise toujours un suivi de longue durée.

Mme Gwenaëlle Noury. Les référents intégrité procèdent à des signalements auprès de Signal-sports dès que les cas entrent dans leurs prérogatives. Sinon, ils sont systématiquement redirigés vers le comité éthique. Tout cela obéit à des règles précises.

Le comité éthique peut saisir la commission disciplinaire. Parmi les améliorations que je souhaite apporter, j’aimerais instaurer une mesure conservatoire d’urgence. Seule la commission disciplinaire peut la prendre, dans le délai de huit à dix semaines qu’il lui faut pour statuer. Lorsqu’il y a urgence, tout délai est trop long.

La réforme que nous proposons prévoit de solliciter le président de la FFSG, celui du conseil fédéral et un élu pour mettre aux voix en urgence une mesure conservatoire. Les textes ont été proposés au ministère et validés. J’ai bon espoir qu’ils soient adoptés le 25 novembre prochain.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. À titre personnel, en tant que présidente ou personne au contact de pratiquants des sports de glace, avez-vous été informée de faits exigeant un signalement au titre de l’article 40 ?

Mme Gwenaëlle Noury. Non.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Pouvez-vous nous expliquer comment sont menées les enquêtes du comité d’éthique et de la référente intégrité, chargés d’enquêter une fois les violences signalées ?

Mme Nathalie Péchalat. De 2020 à 2022, la référente intégrité recevait le témoignage du témoin ou de la victime. Elle suivait une liste de questions auxquelles elle devait apporter des réponses afin de constituer un dossier transmis au comité éthique. En fonction de la gravité ou de l’urgence, celui-ci saisissait la commission disciplinaire, proposait une médiation ou poursuivait l’enquête.

Mme Gwenaëlle Noury. Ce processus n’a guère changé. Les faits relevant de l’éthique sont signalés au comité éthique, les faits de violence à Signal-sports. En première ligne, nos référents intégrité sont très réactifs. Ils s’assurent de la bonne écoute des victimes. Ils prennent attache avec les personnes ou les structures concernées. Ils n’hésitent pas à orienter les victimes ou les témoins vers d’autres structures, par exemple pour un accompagnement psychologique. Les associations, notamment Colosses aux pieds d’argile et La Voix de Sarah, ont été sollicitées à plusieurs reprises. Je souhaite compléter le panel d’associations à même d’écouter, de répondre et de faire la prévention, afin d’offrir un bon suivi. Nous sommes soucieux de l’accompagnement et du rétablissement de nos sportifs.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Je comprends que sous vos deux présidences, une enquête est lancée pour entendre la victime et la personne mise en cause en cas de signalement.

Mme Nathalie Péchalat. Si la victime est mineure ou très jeune, ce sont les parents qui sont entendus. Généralement, la référente intégrité n’appelle pas le prédateur potentiel. C’est le comité éthique qui s’en charge. Lors de la saisine de la commission disciplinaire, nous nommons un chargé d’instruction. Il a pour rôle d’étoffer le dossier des deux parties.

Le recueil des informations est difficile. Par exemple, dans un dossier mettant en cause un cadre technique de la FFSG, la délégation régionale académique à la jeunesse, à l’engagement et aux sports (Drajes) était informée et menait son enquête. Elle attendait les conclusions de la commission disciplinaire, et nous celles de la Drajes, qui avait les moyens de recueillir plus d’éléments. Nous sommes dans un système qui attend de nous que nous prenions des décisions fondées sur des éléments alors que nous n’avons pas autorité pour les obtenir. Personnellement, je me suis sentie très démunie.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Qui a pris la décision en premier ?

Mme Nathalie Péchalat. J’ai indiqué à la Drajes qu’elle était compétente pour recueillir des informations en tant qu’organe déconcentré du ministère. J’ai rappelé le sens de cette enquête. À mon départ, il me semble que l’affaire était en appel ou que la commission disciplinaire n’avait pas encore statué.

Mme Gwenaëlle Noury. Depuis mon arrivée, nous sommes un peu plus incisifs. Les référents intégrité appellent les deux parties. Après évaluation de la situation, ils peuvent saisir la commission disciplinaire et orienter la victime, toujours avec bienveillance. Au sein de Colosses aux pieds d’argile, les mineurs peuvent s’exprimer, sous contrôle des parents.

Mme Nathalie Péchalat. Ils peuvent certes l’être, mais par des personnes formées à recueillir leur témoignage. Tout référent intégrité ne l’est pas. De 2020 à 2022, la référente intégrité de la FFSG ne l’était pas. Il était donc préférable qu’elle n’intervienne pas.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. La référente actuelle est-elle formée au recueil de la parole des victimes mineures ?

Mme Gwenaëlle Noury. Nos référents intégrité suivent des formations à cette fin auprès d’organismes habilités. Si nous ne disposons pas de cette compétence, nous orientons les victimes le plus rapidement possible vers des structures adéquates.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. À quelle fréquence contrôlez-vous l’honorabilité de vos entraîneurs ? Si une incompatibilité est mise en lumière par le contrôle, la FFSG met-elle systématiquement un terme au recrutement ?

Mme Nathalie Péchalat. Le contrôle d’honorabilité a lieu à chaque renouvellement de la carte professionnelle.

Le recrutement des entraîneurs des clubs relève de ces derniers. La FFSG ne peut pas intervenir, sauf en cas d’arrêté préfectoral ou d’éléments probants.

Mme Gwenaëlle Noury. Le contrôle d’honorabilité est effectué au renouvellement annuel de licence. Les délais de renouvellement de carte professionnelle sont bien trop longs. Parmi les améliorations à apporter, il serait opportun de prévoir une fréquence plus régulière. Il serait même utile de disposer de fichiers croisés avec l’international.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Que fait la FFGS en cas d’incompatibilité ?

Mme Nathalie Péchalat. Il n’est pas nécessaire d’être titulaire d’une licence pour obtenir une carte professionnelle. Certains éducateurs ont une carte professionnelle sans avoir de licence.

Mme Gwenaëlle Noury. Nous avons créé une licence entraîneur, qui est obligatoire, au même titre que la carte professionnelle. Il existe un code de bonne conduite des entraîneurs. Son équivalent pour les licenciés est en cours d’élaboration.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Lors du contrôle d’honorabilité des entraîneurs, des bénévoles et des sportifs, quelle est la procédure en cas d’incompatibilité ?

Mme Gwenaëlle Noury. Les bénévoles au contact de nos licenciés sont également soumis au contrôle d’honorabilité. En cas de problème, nous inscrivons les gens sur une blacklist.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Tous les bénévoles sont-ils soumis au contrôle d’honorabilité ?

Mme Gwenaëlle Noury. Nous contrôlons les titulaires de la licence encadrant. Toutefois, la définition du mot bénévole est très vaste. Nous cherchons à en inclure autant que possible dans le système pour sécuriser au maximum nos structures.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Vous dites avoir une blacklist en cas d’incompatibilité. Quels sont les outils dont vous vous dotez pour assurer un suivi ?

Mme Nathalie Péchalat. On ne peut pas mettre les gens dans une liste. Nous avons réfléchi à ce sujet lorsque nous avons mis en place le programme informatique visant à contrôler l’honorabilité des bénévoles. Nous pouvions seulement établir une blacklist sous forme de fichier Excel enregistré dans le serveur fédéral, dont la diffusion est interdite par la loi.

Les équipes de la FFSG doivent s’assurer mécaniquement que les dix ou douze noms blacklistés ne font pas partie des licenciés. Il n’est pas possible d’interdire automatiquement la prise de licence, conformément au code de déontologie.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Lorsqu’une incompatibilité vous est signalée, informez-vous le club ? Je dois mal comprendre en quoi consiste le contrôle d’honorabilité.

Mme Nathalie Péchalat. Lorsqu’un entraîneur fait l’objet d’un arrêté préfectoral, nous savons qu’il ne peut pas exercer. Nous l’inscrivons donc sur une blacklist pour six mois, neuf mois ou un an. Il faut ensuite vérifier s’ils sont toujours sur le terrain, en écrivant aux présidents de club sans donner de détails, pour respecter l’exigence de confidentialité, pour qu’ils nous signalent la présence dans les patinoires d’un entraîneur qui n’a pas vocation à s’y trouver.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Nous avons autant de versions du contrôle d’honorabilité que de fédérations que nous avons auditionnées.

Mme Nathalie Péchalat. Chaque fédération a le sien.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Il devrait, me semble-t-il, être centralisé. Tout le monde devrait entrer les mêmes données dans un tableau Excel, pour qu’elles soient rassemblées, recroisées et renvoyées. Une fois le contrôle d’honorabilité effectué par les clubs, soit la Fédération est informée d’un problème, auquel cas j’aimerais savoir comment la vôtre agit, soit l’information n’est pas transmise, ce qui est étrange.

Mme Nathalie Péchalat. De 2020 à 2022, le contrôle d’honorabilité, instauré sous ma présidence, en était à ses débuts. Aucune alerte n’a été transmise à la FFSG, qui elle, en revanche, en a transmise.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Nous avons auditionné la Fédération française de football (FFF) ce matin. Les contrôles d’honorabilité auxquels ils ont procédé ont permis d’identifier 21 personnes à interdire. Je ne comprends pas pourquoi les vôtres n’ont identifié personne, sauf à considérer que nul n’a rien à se reprocher au sein de la FFSG.

Mme Nathalie Péchalat. Le problème se pose lorsque nous entrons les données dans le logiciel.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. C’est autre chose.

Mme Nathalie Péchalat. En cas de dysfonctionnement, le référent digital devait vérifier chaque document nécessaire à l’obtention d’une licence. Par exemple, inscrire le nom marital au lieu du nom de jeune fille pouvait bloquer le système. Aucune alerte relevant de l’extrait de casier judiciaire B2, relatif à des faits de violence, n’est apparue.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. L’important est de croiser les données avec le fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (Fijaisv).

Mme Gwenaëlle Noury. Si un contrôle d’honorabilité détecte un problème, je m’adresse rapidement au ministère.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Avez-vous eu à le faire ?

Mme Gwenaëlle Noury. Pas au cours des derniers mois.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Nous voici avec une nouvelle version du contrôle d’honorabilité ! À défaut de retours, quels moyens vous permettent de faire en sorte que des prédateurs ou des personnes mises en cause ne changent pas de club à plusieurs reprises ?

Mme Gwenaëlle Noury. Si une situation se présente, nous essayons de croiser nos dossiers. Nous signalons à Signal-sports les problèmes.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Signal-sports permet uniquement de signaler des faits de violence, pas des doutes nés d’un contrôle d’honorabilité. Par ailleurs, quid des bénévoles ?

Mme Gwenaëlle Noury. J’ai mis le service juridique de la FFSG à la disposition des clubs. Un avocat conventionné leur répond et leur offre une assistance gratuite.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Je ne parle pas du conseil juridique, ni des signalements des VSS, des discriminations et des violences, mais du contrôle d’honorabilité, qui ne relève pas de Signal-sports. Comment se déroule-t-il dans les clubs et au sein de la FFSG ?

Mme Gwenaëlle Noury. J’avoue une lacune à ce sujet. Je regrette que Stéphanie Daval ne soit pas à mes côtés. Elle s’occupait de ces questions en tant que présidente du comité éthique. Je me tiens à votre disposition pour vous fournir des précisions, car je vois que vous attendez des réponses concrètes.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Le contrôle d’honorabilité est essentiel pour contrôler les bénévoles encadrants au sein des clubs et de la FFSG. Que vous ne connaissiez pas la procédure dans son intégralité, soit, mais vous ne pouvez pas en ignorer les tenants et les aboutissants – qui s’en charge, comment, qui connaît les conclusions et quels sont les retours.

Mme Gwenaëlle Noury. Un référent s’occupe de ces contrôles. Il remplit pleinement ses fonctions et nous informe en cas d’alerte. Heureusement, à ce jour, nous n’en avons pas eu.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Si vous ignorez le fonctionnement du contrôle d’honorabilité, comment vous assurez-vous qu’il est effectué au sein des clubs ?

Mme Gwenaëlle Noury. Une personne est chargée de cette procédure. Elle contrôle les processus et surtout l’absence de retour négatif ou de problème particulier avec un de nos licenciés.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Comment traitez-vous l’affaire Brian Joubert ?

Mme Gwenaëlle Noury. Elle est traitée par la commission disciplinaire. Deux dossiers seront instruits en novembre. D’après mes informations, certains signalements sont parvenus à la FFSG, d’autres à Signal-sports, voire en préfecture.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Vous ou une personne du club étiez-vous informés des accusations avant que l’affaire ne soit rendue publique ? Vous êtes-vous assurée que des signalements avaient été transmis et que le club avait correctement traité cette affaire ?

Mme Gwenaëlle Noury. J’en ai eu connaissance par le rapport du comité éthique, qui a reçu des signalements.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. À quelle date ?

Mme Gwenaëlle Noury. Je ne m’en souviens pas. Je pense que les signalements auprès du comité éthique datent de mai. J’ai reçu le rapport avant l’assemblée générale.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Comment travaille le comité éthique ? Comment avez-vous eu l’information ?

Mme Gwenaëlle Noury. Le comité a un rapporteur, qui m’informe des signalements déposés. Je ne les lis pas. Je ne peux donc pas vous apporter de précisions, d’autant que cette affaire est confidentielle.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Nous ne vous demandons pas d’entrer dans le détail de l’affaire, au demeurant publique. Nous essayons de comprendre comment fonctionne la transmission des informations et des signalements. Si je comprends bien, les signalements sont adressés au comité d’éthique.

Mme Gwenaëlle Noury. De mémoire, un signalement a dû parvenir à l’un de nos référents intégrité, deux autres au comité éthique.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Que se passe-t-il alors ? Un signalement est-il effectué auprès de Signal-sports ? Une procédure au titre de l’article 40 est-elle ouverte ?

Mme Gwenaëlle Noury. Si une situation entre dans les prérogatives de Signal-sports, elle est systématiquement signalée dans ce cadre. Si elle relève du comité d’éthique, le référent intégrité le saisit.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Être soupçonné d’avoir entretenu une liaison avec une patineuse mineure entre dans les prérogatives de Signal-sports.

Mme Gwenaëlle Noury. Je n’ai jamais émis un tel soupçon. Il est le fait d’une journaliste de L’Obs, qui a mené une enquête auprès de divers publics.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Certes. Je me contente de faire observer que la gravité des faits allégués les inscrits pleinement dans le champ de Signal-sports. Lors du signalement, le club ou le référent intégrité a-t-il transmis un signalement à Signal-sports ?

Mme Gwenaëlle Noury. Oui. Il a aussi transmis un signalement au titre de l’article 40.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Merci de votre réponse.

J’en attends toujours une sur ce que vous attendez par « omerta institutionnalisée ».

Mme Gwenaëlle Noury. J’emploie le mot « institutionnalisée » au sens d’habituelle. Face à des signalements de faits, parfois graves, chacun préférait se taire en les minimisant. Cette attitude n’est plus tolérable ni supportable.

En guise de conclusion, je tiens à dire que j’ai lu, dans les passages du rapport de l’IGÉSR me concernant, que celle-ci est prête à faire confiance à la nouvelle gouvernance et a observé un réel changement. Grâce au travail en équipe, nous sommes un noyau dur. Nous avançons. Nous ne sommes affranchis de personne.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Nous examinons les dysfonctionnements dans le mouvement sportif, mais nous sommes heureux que des choses se passent bien. Notre objectif est de formuler des propositions concrètes pour en améliorer le fonctionnement et clarifier les dispositifs.

L’existence de plusieurs versions du contrôle d’honorabilité, ainsi que de processus et de plateformes de signalement divers, en l’absence d’homogénéité, prouve qu’il est difficile, pour les présidents de fédérations, qui ne sont pas toujours formés à ces questions, de travailler dans de bonnes conditions. Notre but est aussi de permettre aux jeunes et moins jeunes de pratiquer une activité physique en étant protégés.

Mme Nathalie Péchalat. L’éthique n’est pas seulement la lutte contre les violences. Il faut aussi s’assurer que les bonnes personnes sont au bon endroit et bien outillées. Il faut s’assurer de la compétence et de l’expérience des personnes de la gouvernance des fédérations aux trois postes clés de président, de trésorier et de secrétaire général. Il est souvent demandé deux ans de licence, ce qui ne me semble pas suffisant.

Une connaissance du terrain est nécessaire, ainsi qu’une formation nous permettant d’assumer notre mission le plus rapidement possible. Le fonctionnement avec les instances extra-fédérales est aussi important, de même qu’un éclairage un peu solide sur l’événementiel, s’agissant notamment des subventions accordées pour les grands événements organisés sur notre territoire et du contrôle de la billetterie.

Il faut accompagner, outiller et former les garants du monde sportif d’aujourd’hui et de demain, qui gèrent des millions et engagent l’État dans leurs sélections internationales.

Mme Sabrina Sebaihi, rapporteure. Nous vous remercions de vos réponses. N’hésitez pas à nous faire parvenir toute information et complémentaire et toute proposition qui vous semblerait utile à nos travaux.

 

La séance s’achève à dix-sept heures trente.

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Membres présents ou excusés

 

Présents. – Mme Sabrina Sebaihi

Excusée. – Mme Béatrice Bellamy, Mme Claudia Rouaux