Compte rendu

Commission
des affaires économiques

 Examen, pour avis, des articles délégués à la commission du chapitre Ier du titre II du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes (n° 529) (Mme Marie Lebec, rapporteure
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 Informations relatives à la commission...................12

 


Lundi 25 novembre 2024

Séance de 16 heures

Compte rendu n° 27

session ordinaire de 2024-2025

Présidence de Mme Aurélie Trouvé,

Présidente


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La commission des affaires économiques a examiné, pour avis, les articles délégués à la commission du chapitre Ier du titre II du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes (n° 529) (Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis).

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous sommes réunis pour examiner les articles du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne (Ddadue) en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes et dont la commission des affaires économiques a été saisie pour avis avec délégation au fond, à savoir les articles 20 à 22 et 26. Je vous rappelle que notre collègue Marie Lebec a été désignée rapporteure pour avis.

Les articles 20 à 22 visent à adapter le code de l’énergie et le code de la consommation pour les rendre conformes à la directive européenne 2019/944 du 5 juin 2019, qui refond le droit du marché intérieur de l’électricité, et au règlement 2024/1106 du 11 avril 2024, qui révise le règlement 1227/2011 relatif à l’intégrité et à la transparence du marché de gros de l’énergie. Ils prévoient notamment de doter la Commission de régulation de l’énergie (CRE) de pouvoirs de sanction accrus.

En accord avec la présidente de la commission du développement durable, j’ai souhaité que notre commission soit également saisie pour avis de l’article 26, qui tend à adapter certains régimes juridiques applicables aux énergies renouvelables.

Les évolutions touchent des domaines aussi variés que les obligations applicables aux parcs de stationnement, la prise en charge des frais de raccordement des constructions au réseau électrique ou le droit de visite des services de l’État concernant les installations photovoltaïques implantées sur les terres agricoles.

Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. Sur le fondement de ses compétences dans le domaine de l’énergie, la commission des affaires économiques a reçu délégation au fond de quatre articles de ce Ddadue, entre lesquels il est difficile de voir un fil rouge.

L’article 20 tend à parachever la transposition de la directive 2019/944 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité. En effet, la Commission européenne a estimé que les précédentes transpositions omettaient certains points, qu’elle a mis la France en demeure d’inscrire dans son droit interne. L’article regroupe neuf dispositifs assez divers. Le rapport pour avis en explique le contenu et détaille la portée des ajouts demandés : ils concernent les droits et la protection des consommateurs d’électricité, les missions du régulateur national de l’énergie et l’encadrement de la gestion des réseaux publics d’électricité. La transcription est très proche du texte de la directive, au point que je défendrai plusieurs amendements visant à clarifier certains énoncés.

Deux dispositifs constituent, à mon sens une avancée significative. Premièrement, le texte renforce la mission de surveillance de la Commission de régulation de l'énergie en matière de pratiques restrictives de concurrence et de libre choix des clients. Conformément à l’article 59 de la directive, la CRE devra désormais informer le ministre chargé de l’énergie de toute pratique de cet ordre, dans les secteurs de l’électricité et du gaz ; le ministre pourra, quant à lui, saisir la CRE de toute question relative à ces secteurs, y compris pour demander des éléments utiles à l’instruction d’une affaire. Il s’agit avant tout de permettre à la CRE de pleinement coopérer aux enquêtes de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), dans le respect des dispositions relatives aux échanges de données entre administrations inscrites dans le code des relations entre le public et l’administration.

Deuxièmement, le texte consolide juridiquement l’acquisition des services nécessaires au bon fonctionnement des réseaux publics d’électricité. En collaboration avec les gestionnaires des réseaux de distribution, l’opérateur national du réseau de transport, Réseau de transport d’électricité (RTE), doit s’assurer du bon équilibre permanent entre les flux d’électricité injectés et prélevés. Cela est nécessaire pour satisfaire les besoins en électricité, ainsi que pour maintenir la fréquence sur les réseaux au niveau pratiqué dans toute l’Europe. Plus ponctuellement, les gestionnaires des réseaux publics de transport et de distribution doivent garantir la qualité de l’électricité et corriger les problèmes locaux de tension. Cela nécessite de recourir aux capacités d’injection supplémentaires, de stockage ou de diminution de la production d’électricité, ou encore d’effacement des consommations d’autres acteurs.

Les articles 31 et 40 de la directive posent un principe fort : l’acquisition de ces services doit se faire dans le cadre de procédures concurrentielles, afin d’optimiser les prix que paient les gestionnaires de réseau et de permettre à tous les producteurs d’électricité, y compris ceux exploitant des sources renouvelables, de participer à ces services. Il s’agit, notamment, de faciliter l’intégration des énergies renouvelables dans les mécanismes chargés d’assurer le bon fonctionnement des réseaux. Or le principe de mécanismes fondés sur le marché et les dérogations prévues n’ont été, à ce jour, qu’imparfaitement transposés. Les 7° et 8° du I de l’article 20 tendent donc à clarifier les règles en matière d’acquisition des services nécessaires au fonctionnement des réseaux. Le gestionnaire de réseau pourra librement négocier les contrats nécessaires, dans le cadre de procédures concurrentielles. Néanmoins, la CRE pourra accorder des dérogations pour les services auxiliaires non liés au réglage de la fréquence, en particulier lorsque le recours au marché n’est pas économiquement efficace. Les procédures en vigueur n’en seront que peu affectées, mais les pratiques seront juridiquement consolidées, en particulier concernant la gestion dynamique de la tension – aujourd’hui rémunérée à un tarif régulé, elle ne concerne que les installations obligées.

Ces deux enjeux – donner à RTE les moyens d’équilibrer les flux sur le système électrique et permettre la participation de tous les producteurs d’électricité, y compris dans le renouvelable – se retrouvent dans l’article 21. Celui-ci ne transpose pas de disposition précise de la directive, mais s’attache à tirer les conséquences des exigences qu’elle pose en matière d’intégration des énergies renouvelables.

Il prévoit en premier lieu d’étendre l’obligation de participer au mécanisme d’ajustement auquel RTE a recours pour corriger les déséquilibres de fréquence de court terme. En l’état, cette obligation ne s’impose en effet qu’aux installations de production d’électricité directement raccordées au réseau de transport. Elle concernera désormais les installations raccordées aux réseaux de distribution, soit la majorité des producteurs d’énergies renouvelables. En second lieu, il permettra de contraindre ces installations à moduler leur production à la baisse, si nécessaire, afin d’éviter des situations comme celle que la France a connue cet été lorsque la production photovoltaïque a dépassé les besoins du système, obligeant les producteurs à céder leur électricité à des prix négatifs. L’article 21 autorisera donc RTE à recourir à la puissance disponible des installations de production non seulement à la hausse, mais aussi à la baisse.

Ces évolutions sont cruciales pour le bon fonctionnement du système électrique et pour le développement des énergies renouvelables dans le mix électrique. Toutefois, il n’est pas question d’imposer cette obligation à tous les producteurs, car tous n’ont pas les mêmes capacités d’adaptation, en particulier les autoconsommateurs individuels. Le nouveau dispositif ne s’appliquera donc qu’aux installations dont la puissance atteint ou dépasse un seuil donné, qui devrait être fixé à 12 mégawatts.

L’article 22 vise à transposer les nouvelles dispositions du règlement (UE) 1227/2011 concernant l’intégrité et la transparence du marché de gros de l’énergie, dit « Remit », issues du règlement (UE) 2024/1106 du 11 avril 2024. Il devrait satisfaire tous ceux qui craignent que des pratiques abusives ne se développent sur le marché de gros de l’électricité, au détriment des consommateurs.

Cet article étend donc les pouvoirs de surveillance et de sanction de la CRE à deux nouvelles obligations en matière de transparence, notamment celle qui impose à tous les acteurs concernés de fournir à l’Agence pour la coopération des régulateurs de l’énergie (Acer) des données relatives au marché du gaz naturel liquéfié. Il relève par ailleurs le niveau maximal des sanctions que le comité de règlement des différends et sanctions (Cordis) de la CRE peut infliger aux acteurs du marché de gros en cas de manquement aux dispositions du Remit.

L’article 18 du règlement d’avril 2024 précité a sensiblement durci ces sanctions. En matière de délits d’initiés, par exemple, il a porté le plafond à 15 % au moins du chiffre d’affaires annuel des personnes morales et à 5 millions d’euros (M€) pour les personnes physiques. L’article 22 propose une grille de sanctions souvent nettement plus sévères que celles prévues dans la directive européenne. On ne peut toutefois parler de « surtransposition », puisque le droit européen autorise ces maxima et que le Cordis prononcera toujours les sanctions au vu des circonstances de l’espèce, en respectant le principe de proportionnalité.

L’article 26 tend à améliorer certains dispositifs issus de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, dite loi « Aper », afin notamment d’atteindre les objectifs de développement des énergies renouvelables révisés par la directive « RED III ». Il s’attache, en premier lieu, à améliorer la cohérence de deux grandes obligations imposées aux parcs de stationnement extérieurs, définies puis complétées sans s’assurer qu’elles étaient compatibles : réaliser des aménagements favorisant la perméabilité et l’infiltration des eaux pluviales dans les sols, d’une part ; équiper ces parcs d’ombrières photovoltaïques, d’autre part.

L’article 26 relève le seuil d’application de ces obligations aux parkings neufs d’une emprise de plus de cinq cents mètres carrés. Il s’agit de lever les contradictions entre les attendus de l’article L. 171-4 du code de la construction et de l’habitation et ceux de l’article L. 111-19-1 du code de l’urbanisme. En pratique, la restriction de la portée du premier sur l’équipement photovoltaïque sera en partie neutralisée par le maintien dans le second de l’obligation s’imposant aux parcs de plus de cinq cents mètres carrés.

L’obligation d’aménager les surfaces pour le passage des eaux pluviales sera restreinte de moitié, mais l’expérimentation menée montre que cela suffit. Nous y reviendrons lors de l’examen des amendements. Le transfert de l’obligation aux propriétaires et l’impossibilité pour les plans locaux d’urbanisme de s’opposer à ces aménagements participeront à sécuriser les dispositifs.

Enfin, l’article 26 étend le droit de visite inopinée des installations photovoltaïques implantées sur des terrains agricoles, ce que la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles a salué.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Nicolas Meizonnet (RN). On nous présente ce projet de loi comme une avancée majeure pour l’Europe de l’énergie. En réalité, il s’agit d’une régression pour notre filière énergétique. Toutes les lubies absurdes de l’Union européenne (UE) s’y trouvent compilées : accélération de la libéralisation du marché européen de l’électricité ; renforcement des pouvoirs d’une commission de régulation déjà défaillante ; course effrénée vers l’objectif délirant de porter à 42,5 % la part des énergies renouvelables dans la consommation finale d’ici à 2030.

Ce texte conforte la logique funeste du marché européen de l’électricité. Faut-il rappeler que, depuis sa libéralisation en 2007, le coût de l’énergie n’a fait qu’augmenter ? L’électricité, censée devenir plus accessible grâce à la sacro-sainte concurrence, est désormais un produit de luxe pour beaucoup de Français. Son prix a augmenté de plus de 137 % en quinze ans. La Commission européenne a réussi à inventer un nouveau principe économique : la concurrence qui fait augmenter les prix. Non contente d’échouer, elle persiste et signe en exigeant la transposition de sa directive.

Le projet de loi prévoit de renforcer les prérogatives de la CRE, qui, cette année encore, a montré son incapacité à gérer la situation. En 2024, le coût des aides aux énergies renouvelables sera six fois plus élevé qu’estimé. Une telle erreur de jugement ferait sourire si elle ne se traduisait par un gâchis financier immense que les Français sont, une nouvelle fois, tenus d’essuyer. Cette autorité mérite-t-elle qu’on lui accorde davantage de pouvoir ?

Le texte impose une nouvelle marche forcée vers les énergies renouvelables, avec l’objectif quasi-obsessionnel de 42,5 % de la consommation finale brute de l’UE en 2030. Rappelons modestement que la France est déjà exemplaire : notre mix électrique historique, dominé par le nucléaire et l’hydraulique, pilotable et décarboné, est l’un des moins chers du monde. Ce modèle fait notre force depuis le général de Gaulle – mais, plutôt que de le conforter et de l’entretenir soigneusement, on préfère dilapider des milliards d’euros dans des énergies intermittentes, coûteuses et inadaptées à nos besoins. Nous aurions pu investir cet argent dans le parc nucléaire de demain et dans des projets d’avenir, comme Iter (réacteur thermonucléaire expérimental international) ou Astrid (réacteur rapide refroidi au sodium). Mais la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen considère que nous en avons suffisamment pour continuer de le gaspiller.

Ce texte ne permettra de relever aucun des défis que le XXIe siècle impose à la France. Il ne soulagera pas les ménages, n’aidera pas les entreprises à rester compétitives face aux concurrences chinoise et américaine et n’assurera pas notre indépendance énergétique. Il n’est qu’une succession des pires injonctions de la technocratie bruxelloise, de celles qui affaiblissent la France en la soumettant à un cadre européen totalement inadapté. Au Parlement européen comme à l’Assemblée nationale, nous nous y opposerons fermement.

M. Paul Midy (EPR). Le projet de loi « Ddadue » de l’an dernier nous a permis de nous intéresser à la loi « Influenceurs » et à la faculté, pour le préfet, de déléguer sa signature au président du conseil régional et aux agents placés sous sa responsabilité concernant les décisions relatives aux aides de la politique agricole commune ; celui de cette année tend à assurer la conformité de notre droit avec la législation européenne dans le domaine de l’énergie.

Le texte prévoit notamment de confier à la Commission de régulation de l'énergie de nouvelles missions en matière de pratiques restrictives dans les secteurs du gaz et de l’électricité. Elle devra informer le ministre chargé de l’économie de toute pratique concurrentielle restrictive et le ministre, lui, pourra la saisir de toute question relative auxdits secteurs. Le texte prévoit également d’étendre aux installations de production raccordées au réseau public d’électricité l’obligation de participer au mécanisme d’ajustement du système électrique – en l’état, seules les installations raccordées au réseau de transport d’électricité sont tenues de mettre à disposition leur puissance non utilisée et techniquement disponible. Il renforce également les sanctions encourues en cas de méconnaissance des règles relatives à l’intégrité et à la transparence des marchés de gros de l’énergie.

Enfin, l’article 26 harmonise les dispositions de la loi « Energie-climat » et de la loi Aper concernant les parcs de stationnement non couverts, en matière de perméabilité aux eaux pluviales et d’équipements en ombrières photovoltaïques.

Les membres du groupe Ensemble pour la République voteront en faveur de ces dispositions, qui amélioreront la transparence et le contrôle du marché de gros de l’énergie.

M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). Le présent projet de loi concerne des enjeux fondamentaux pour la vie de tous – économie, énergie, environnement, santé, transports. La transposition des directives européennes, essentielle, devrait offrir aux membres de cette assemblée une occasion de dialoguer. Or il semble que le Gouvernement ne soit pas assez transparent s’agissant des négociations qu’il mène au niveau européen, privant le Parlement d’une vue d’ensemble nécessaire pour défendre au mieux les intérêts des citoyens. Les mesures adoptées affecteront des millions de Français ; cela requiert un débat démocratique.

Les articles 20 à 22 obéissent une fois de plus à la logique ultralibérale de l’Europe de la concurrence libre et non faussée. Dans cette Europe, en réalité, la puissance publique met ses installations à disposition du privé et privatise les bénéfices en nationalisant les pertes.

L’article 26 s’attache à atteindre l’objectif européen, ambitieux et nécessaire, de 42,5 % d’énergies renouvelables dans la consommation d’ici à 2030. Le gouvernement agit là en hypocrite : dans ce domaine, la France accuse un retard important – en 2023, la part des énergies renouvelables se montait à 22,2 %, loin des 33 % initialement prévus pour 2030. C’est le résultat d’un manque de planification et de la relance massive du nucléaire voulue par le président Macron, au détriment des énergies renouvelables. Concrètement, comment expliquer à nos concitoyens qu’ils doivent contribuer à atteindre les objectifs européens quand la politique nationale reste insuffisante pour y parvenir ?

Plus précisément, cet article concerne l’enjeu crucial de la transition énergétique. Il vise à renforcer l’intégration des énergies renouvelables, notamment en plaçant des installations photovoltaïques sur les parcs de stationnement et dans des exploitations agricoles. Les mesures imposant des aménagements écologiques et photovoltaïques sur les parcs de stationnement vont dans le bon sens, mais elles souffrent d’un manque de clarté législative. Les acteurs concernés ont du mal à suivre des règles qui changent trop souvent pour être pleinement efficaces. Le Conseil d’État a estimé que les lois Aper et « Climat et résilience » prévoyaient des obligations difficilement conciliables, voire contradictoires, et que les modifications prévues dans ce texte sont de nature à mieux assurer les exigences de clarté et d’intelligibilité de la loi. Nous aurions souhaité que les seuils soient plus ambitieux et que toute la surface des parcs intègre des dispositifs écologiques. S’agissant de l’agrivoltaïsme, nous émettons des réserves sur certaines pratiques, mais nous considérons qu’il est en effet nécessaire d’étendre le droit de visite pour garantir que les installations respectent les fonctions écologiques et agricoles des terrains concernés.

Ainsi, l’article 26 constitue une avancée, mais il faut améliorer la planification et la cohérence de son application. Nous souhaitons aller plus loin pour accélérer la transition énergétique. La France est en retard pour développer les énergies renouvelables, en grande partie à cause de la vision libérale que défend le Gouvernement et de la priorité donnée au nucléaire, malgré les limites que sont la corrosion sous contrainte, l’indisponibilité du parc et les risques accrus par le changement climatique. Contrairement à ce qu’affirme le Président, le mix 100 % énergies renouvelables est possible – d’ailleurs, RTE le recommande.

Mme Julie Ozenne (EcoS). La France accuse un retard inquiétant dans la transposition du paquet « Une énergie propre pour tous les Européens », qui constitue un pilier essentiel de notre transition énergétique et climatique. Ce retard n’est pas une simple contrariété administrative, mais une omission majeure dans les outils nécessaires pour préserver l’état de notre système énergétique et garantir sa résilience. Cela révèle des failles profondes dans l’exécution de nos engagements.

Le règlement (UE) 2023/857 sur la répartition de l’effort (RRE) impose un objectif contraignant de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour les secteurs qui ne relèveront pas du marché carbone d’ici à 2030. Dans son évaluation du plan intégré « énergie-climat » français, la Commission européenne souligne que l’écart avec la trajectoire prévue est préoccupant. Nos émissions dans ces secteurs dépassent déjà les plafonds fixés, ce qui compromet sérieusement les chances de respecter nos engagements pour 2025 et 2030. Par ailleurs, la part des énergies renouvelables dans notre consommation finale brute reste très en deçà de notre objectif pour 2030.

La France est à la traîne, alors que d’autres États membres montrent qu’une transition accélérée est non seulement possible, mais aussi bénéfique. Ce retard structurel freine l’innovation, détruit des opportunités économiques et renforce notre dépendance aux énergies fossiles importées. Dans ce contexte, la volonté de modifier l’article 40 de la loi Aper, complété par le décret d’application publié le 15 novembre, constitue un recul : en augmentant le nombre des exemptions, nous compliquons et retardons encore l’atteinte de nos objectifs climatiques. Ces exemptions affaiblissent la portée de la mesure et compromettent la massification de l’autoconsommation énergétique, pourtant essentielle pour réduire notre dépendance aux énergies fossiles. Pire, en transférant l’obligation aux seuls propriétaires, nous excluons les locataires des décisions. Ce choix, injuste, prive les PME des avantages économiques et environnementaux de l’autoconsommation, tout en limitant leur capacité à remplir les obligations du décret « tertiaire ». Cette approche contrevient aux objectifs que nous nous sommes fixés. La présenter comme une adaptation au droit de l’Union européenne est cavalier, pour ne pas dire inapproprié.

Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. Le présent texte, très technique, vise à compléter de précédentes transpositions. Certains d’entre vous ont commenté la stratégie en matière d’énergie ; au regard de l’enjeu du texte, il est difficile de répondre à ces interventions générales.

 

 

Article 20 : Achèvement de la transposition de la directive (UE) 2019/944 sur le marché intérieur de l’électricité

 

Amendement CE3 de Mme Marie Lebec

Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. Le présent amendement vise à réécrire les alinéas 12 à 15 de l’article 20, afin de supprimer le terme « indépendant » pour qualifier les agrégateurs autorisés à intervenir sur les marchés. Il s’agit de ne pas cantonner les fournisseurs ou les agrégateurs liés à un fournisseur aux seuls effacements indissociables de la fourniture à leurs clients, et de ne pas les exclure de l’effacement supplémentaire que ces derniers peuvent proposer sur les marchés. La filière pratique déjà cette activité sans que cela soulève de difficultés.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE4 de Mme Marie Lebec

Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. L’amendement vise à clarifier les dispositions introduisant aux articles L. 321-11 et L. 322-9 du code de l’énergie le principe consistant à fonder sur des procédures concurrentielles l’acquisition des services nécessaires au fonctionnement des réseaux publics d’électricité et/ou les dérogations à ce principe, qui peuvent être accordées par la Commission de régulation de l’énergie s’agissant des services auxiliaires non liés au réglage de la fréquence.

La commission adopte l’amendement.

 

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CE5 et CE6 de Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis.

 

Amendement CE7 de Mme Marie Lebec

Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à expliciter sur quelles installations de stockage d’énergie portera la consultation publique organisée par la CRE. Il définit par ailleurs le point de départ du délai de dix-huit mois laissé aux gestionnaires de réseaux publics d’électricité pour céder leurs installations, si d’autres acteurs sont disposés à les reprendre.

La commission adopte l’amendement.

 

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 20 modifié.

 

 

Article 21 : Extension du mécanisme d’ajustement du système électrique

 

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 21 non modifié.

 

 

Article 22 : Renforcement des sanctions et des exigences en matière d’intégrité et de transparence des marchés de gros

 

La commission adopte l’amendement rédactionnel CE8 de Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis.

 

Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 22 modifié.

 

 

Article 26 : Adaptation de dispositifs législatifs visant à favoriser le développement des énergies renouvelables

 

Amendement CE1 de Mme Sylvie Ferrer

M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). Actuellement, les parcs de stationnement non couverts de plus de 500 mètres carrés associés à des bâtiments à usage commercial, industriel ou artisanal, aux constructions de bâtiments à usage d’entrepôt dont l’emprise au sol est de 500 mètres carrés ou à des bâtiments à usage de bureaux dont l’emprise au sol est de 1 000 mètres carrés, doivent intégrer, sur au moins la moitié de leur surface, des revêtements de surface, des aménagements hydrauliques ou des dispositifs végétalisés favorisant la perméabilité et l’infiltration ou l’évaporation des eaux pluviales. Nous souhaitons que cette obligation s’étende à la totalité de leur surface.

Nous proposons également de réintégrer la formule « en préservant les fonctions écologiques des sols », dont nous nous demandons pourquoi elle a été supprimée alors qu’elle figure dans la rédaction de l’article L. 171‑4 du code de la construction et de l’habitation issue de la loi Aper.

Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. Je rappelle que l’article 26 doit mettre fin aux incohérences entre l’article L. 171‑4 du code de la construction et de l’habitation et l’article L. 111-19-1 du code de l’urbanisme. Or votre amendement recrée une incohérence.

Par ailleurs, selon les études et expérimentations dont nous disposons, il n’est pas nécessaire d’imposer des aménagements permettant l’infiltration des eaux pluviales sur l’intégralité de la surface des parcs : l’infiltration sur la moitié de la superficie permet généralement de gérer la totalité des eaux tombées sur l’ensemble.

Quant à l’exigence de préserver les fonctions écologiques des sols, supprimée par l’article 26, elle serait quasiment impossible à respecter. En effet, l’aménagement d’un parc de stationnement nécessite des travaux de compactage et de terrassement du sol, par nature difficiles à concilier avec des fonctions écologiques. Et les dispositifs d’évaporation envisagés par la loi actuelle sont parfaitement incompatibles avec cet objectif. Demande de retrait, ou avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CE9 et CE10 de Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis.

 

Amendement CE2 de M. Bérenger Cernon

M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). Nous souhaitons rehausser les ambitions de déploiement des énergies renouvelables dans les parcs de stationnement.

Le gouvernement dit souhaiter accélérer le déploiement des énergies renouvelables, notamment de l’éolien en mer. De fait, leur part atteint difficilement 22,2 % de notre consommation finale brute d’énergie en 2023. Dans le document « Chiffres clés des énergies renouvelables », le ministère de la transition écologique précise que « cette part reste […] bien inférieure à l’objectif de 33 % à atteindre en 2030 » et que cet objectif « fixé en 2019 devrait par ailleurs être revu à la hausse pour tenir compte de la révision récente de l’objectif européen ».

Aux termes de la loi Aper, « les parcs de stationnement extérieurs d’une superficie supérieure à 1 500 mètres carrés sont équipés, sur au moins la moitié de cette superficie, d’ombrières intégrant un procédé de production d’énergies renouvelables sur la totalité de leur partie supérieure assurant l’ombrage ». Nous proposons d’abaisser ce seuil à 500 mètres carrés.

Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. Nous comprenons très bien l’urgence de la transition écologique et donc la nécessité d’accélérer le développement des énergies renouvelables. Néanmoins, l’extension proposée risque de poser un problème d’approvisionnement, dans la mesure où les fournisseurs de panneaux solaires européens ont déjà du mal à répondre à la demande.

Pour garantir la pleine efficacité des dispositifs existants et éviter que les propriétaires de parkings ne se tournent vers des panneaux d’origine non européenne, je demande le retrait de l’amendement. À défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Elle adopte successivement l’amendement rédactionnel CE11 et l’amendement de coordination CE12 de Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis.

 

Amendement CE13 de Mme Marie Lebec

Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis. Cet amendement vise à expliciter la nature de la contribution prévue à l’article L. 342-2 du code de l’énergie et mentionnée par le nouvel article L. 332‑17 du code de l’urbanisme.

Il s’agit de la contribution couvrant les coûts d’un raccordement au réseau public d’électricité qui ne sont pas déjà financés par le tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité.

La commission adopte l’amendement.

 

Elle adopte successivement les amendements de clarification CE14 et CE15 de Mme Marie Lebec, rapporteure pour avis.

 

La commission émet un avis favorable à l’adoption de l’article 26 modifié.

Elle émet un avis favorable à l’ensemble des articles du projet de loi dont elle est saisie pour avis.

 

 

 

 

 

 

 


 

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Informations relatives à la commission

 

La commission a désigné Mme Nicole Le Peih comme rapporteure sur la proposition de loi relative à l’exercice de la démocratie agricole (n° 584).

 

 


Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

Réunion du lundi 25 novembre 2024 à 16 h 05

Présents. – M. Maxime Laisney, Mme Annaïg Le Meur, Mme Marie Lebec, M. Nicolas Meizonnet, M. Paul Midy, Mme Aurélie Trouvé

Excusés.  M. Philippe Bolo, M. Harold Huwart, M. Pascal Lecamp, M. Max Mathiasin, M. Philippe Naillet, M. Joseph Rivière

Assistaient également à la réunion. – M. Bérenger Cernon, Mme Julie Ozenne