Compte rendu

Commission
des affaires économiques

 Suite de l’examen de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant programmation nationale et simplification normative dans le secteur économique de l’énergie (n° 463) (M. Antoine Armand, rapporteur)              2

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Mardi 3 juin 2025

Séance de 17 heures 30

Compte rendu n° 106

session ordinaire de 2024-2025

Présidence de Mme Aurélie Trouvé,

Présidente


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La commission des affaires économiques a poursuivi l’examen de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant programmation nationale et simplification normative dans le secteur économique de l’énergie (n° 463) (M. Antoine Armand, rapporteur).

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Nous en sommes à l’article 3 et, après avoir examiné 80 amendements, il nous en reste 418 en discussion.

 

Article 3 (articles L. 100-2 et L. 100-4 du code de l’énergie) : Définition des objectifs de politique énergétique liés à l’énergie nucléaire et à la décarbonation des mix électrique et énergétique

 

Amendements de suppression CE192 de M. Maxime Laisney, CE296 de M. Henri Alfandari et CE361 de Mme Julie Laernoes

M. Maxime Laisney (LFI-NFP). Avec cet article 3, on arrive au cœur de ce que j’appelle l’obsession nucléariste : la prolongation au-delà du raisonnable du nucléaire existant ; quatorze réacteurs de puissance – pourquoi pas six de plus ? – ; des réacteurs modulaires avancés (AMR) et des petits réacteurs modulaires (SMR) un peu partout sur le territoire.

Il est temps de dire la vérité. On nous dit que les réacteurs existants vont être prolongés jusqu’à 80 ans comme aux États-Unis. C’est faux ! Les États-Unis voudraient prolonger la durée de vie de leurs réacteurs jusqu’à 80 ans, mais, pour le moment, le plus vieux réacteur en service dans le monde a 55 ans et il est en Suisse. Nous n’avons aucun retour d’expérience pour aller au-delà. Pour la France, l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR) nous dit qu’elle regarde une prolongation jusqu’à 50 ans, peut-être 60 ans, peut-être au-delà pour certains réacteurs, mais pas davantage. On parle de quatorze réacteurs de type EPR 2. Pourquoi par vingt ? Personne n’y croit. J’invite les nucléocrates à lire le rapport publié en janvier par la Cour des comptes qui décrit l’EPR comme une catastrophe partout dans le monde, pas seulement à Flamanville, et qui est très sceptique sur l’avenir de l’EPR 2 dont on n’a toujours pas les plans. S’agissant des petits réacteurs de type SMR ou AMR, si nous avons deux ou trois prototypes en fonctionnement dans les années à venir, ce sera bien le maximum. En tout cas, l’ASNR n’envisage pas un déploiement à l’échelle industrielle pour deux raisons : d’une part, il y a des contraintes industrielles pour développer les usines qui fabriqueraient des modules pour l’amont et l’aval du combustible ; d’autre part, il faut répondre aux enjeux de sûreté et de sécurité, ces réacteurs étant destinés à être installés dans des sites Seveso, avec des habitations à proximité.

Nous ne disons pas qu’il faut fermer toutes les centrales existantes du jour au lendemain, mais qu’il est urgent de planifier la sortie du nucléaire parce que la question des déchets n’est toujours pas réglée, que l’uranium est importé à 100 %, et qu’il existe un risque d’accident – rappelons que l’accident de Fukushima aura causé 2 300 morts. Une chose est sûre : il ne faut pas mettre un centime dans le nouveau nucléaire.

Mme Julie Laernoes (EcoS). L’article 3 cumule tous les délires de la filière du nucléaire, qui n’ont plus leur place de nos jours. Nous travaillons à partir de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), qui comporte deux périodes successives de cinq ans, et des conclusions des groupes de travail mis en place par Mme Agnès Pannier-Runacher lorsqu’elle était ministre de la transition énergétique. Personne n’imaginant l’ouverture d’une nouvelle centrale avant 2040, le nouveau nucléaire ne jouera donc pas un rôle majeur de décarbonation.

De surcroît, ce texte étant une proposition de loi, il n’a pas donné lieu à une étude d’impact ou à un avis du Conseil d’État. Nous ne disposons d’aucune analyse de soutenabilité financière ou industrielle alors que la filière du nucléaire est en dérive permanente : les retards et les surcoûts s’accumulent. Même les scénarios les plus favorables, dont ceux d’EDF, ne prévoient pas de nouveau réacteur avant 2038.

Si nous sommes sérieux et que nous voulons une PPE cohérente, alignée sur les urgences climatiques de cette décennie, il faut supprimer cet article.

M. Antoine Armand, rapporteur. Une telle suppression reviendrait à se priver de débat sur ce qui représente les deux tiers ou les trois quarts de notre approvisionnement en électricité – qui plus est décarbonée. Que la proposition vienne de la France insoumise, cela ne me surprend un peu. Qu’elle vienne des écologistes, qui défendent la décarbonation, cela m’étonne plus ; d’autant que, madame Laernoes, lors du dépôt d’une récente proposition de loi, vous aviez fait un progrès très important par rapport aux positions historiques de votre mouvement concernant le nucléaire existant : vous commenciez à admettre que l’on n’allait peut-être pas éteindre tous les réacteurs nucléaires du jour au lendemain. Ne vous en déplaise, le nucléaire est la première force écologique, la plus grande réussite en termes d’énergie décarbonnée de notre pays et de l’Europe. Votre revirement m’étonne un peu. D’une part, il serait dommage de se priver d’un débat sur le nucléaire, que vous appelez si souvent de vos vœux. D’autre part, il me semble qu’un écologiste ne peut que voter contre la suppression de ces articles.

M. Matthias Tavel (LFI-NFP). Si l’objectif est la décarbonation, le nouveau nucléaire n’apportera aucune réponse. Premièrement, il sera hors délai : la première paire d’EPR 2 est annoncée pour 2038 – à supposer qu’il n’y ait aucun retard, contrairement à ce qui s’est passé à Flamanville. On perd donc dix ans si l’on attend cet horizon pour essayer d’atteindre nos objectifs climatiques. Deuxièmement, le coût de l’électricité produite sera vraisemblablement supérieur à 100 euros le mégawattheure (MWh) – en tout cas, c’est le niveau retenu par l’État. Tout est donc réuni pour que nous ayons non pas un programme EPR 2, mais un programme Flamanville 4 avec les mêmes problèmes.

Parlons de la méthode, monsieur le rapporteur. Vous avez déposé des amendements qui suppriment les objectifs chiffrés de développement des énergies renouvelables, que ce soit en puissance installée, en pourcentage de production ou en nombre d’installations. Or, vous proposez ici de conserver des objectifs chiffrés pour le nucléaire. Deux poids, deux mesures. C’est inacceptable. Vous êtes en train de faire ce que le RN rêvait de faire.

Mme Julie Laernoes (EcoS). Monsieur le rapporteur, les écologistes ont toujours été constants en matière de transition énergétique, de climat et de prévision. Vous pouvez reprendre chacune de nos déclarations. Nous allons être confrontés à un effet falaise car bon nombre de réacteurs ont été construits à la même époque. Il ne sera donc pas possible de maintenir la part du nucléaire dans le mix électrique à 60 %. On ne peut pas prédire ce taux à l’avenir, puisqu’il est soumis aux conditions de sûreté des centrales, ce qui dépend en particulier du vieillissement d’installations qui ne sont normalement pas prévues pour durer au-delà de 40 ans. Emmanuel Macron déclarait d’ailleurs ne pas vouloir mettre tous ses œufs dans le même panier car en cas de défaillances en série, la production d’électricité serait à l’arrêt. En 2022, nous parlions beaucoup et avec inquiétude de la sécurité de notre approvisionnement en électricité. Il s’agit désormais de sécuriser cet approvisionnement en ne le faisant pas totalement dépendre du nucléaire.

M. Maxime Amblard (RN). L’extrême gauche et les écologistes affirment avec la plus grande assurance que la France ne pourra plus faire ce qu’elle a réussi à faire depuis les années 1970 : augmenter sa production d’électricité décarbonée – même si la décarbonation n’était pas l’objectif premier à l’époque. Dès lors, il faudrait nous lancer dans l’aventure du 100 % renouvelable. L’histoire nous donne la preuve que c’est faux. Vous soulevez des arguments de principe, réglementaires ou même faux. Le coût de l’électricité nucléaire n’a rien d’une fatalité, puisqu’il dépend du taux d’actualisation. Vous n’avancez aucun argument physique. Or, ce sont les rapports physiques qui sont immuables, pas les euros et la Cour des comptes.

M. Karim Benbrahim (SOC). Nous sommes opposés à l’article 3 dans sa rédaction actuelle : il place le nucléaire dans une position centrale et excessive dans le mix énergétique, au mépris des réalités financières d’EDF et des capacités industrielles à réaliser ce programme, sans parler de l’effet non mesuré sur le coût final de l’énergie. Néanmoins, nous ne voterons pas pour ces amendements de suppression. Par le biais de l’amendement suivant, nous proposons une vision plus raisonnable, dans laquelle le développement des énergies renouvelables n’est pas condamné pour assurer une primauté au nucléaire. Il s’agit de réaliser un mix énergétique plus équilibré et en cohérence avec les défis à relever en matière d’efficacité économique et de souveraineté industrielle.

M. Antoine Armand, rapporteur. Pour le cas où ce ne serait pas clair pour tout le monde, je précise que l’adoption des amendements de suppression ferait aussi sauter l’amendement visant à maintenir en fonctionnement le parc nucléaire existant, sous réserve des autorisations de l’ASNR, sans que nous ayons le moindre débat sur la sûreté nucléaire. Premièrement, ce serait laisser le code de l’énergie vierge de toute mention du nucléaire, de ce que nous allons en faire au cours des cinq ou dix prochaines années, alors que nous réclamons tous une position quelle qu’elle soit sur le sujet. Deuxièmement, ce serait une régression pour ceux qui défendent le niveau de décarbonation de l’énergie atteint en France. Si je peux comprendre que certains veuillent supprimer certains alinéas, il ne me paraît vraiment pas approprié de vouloir supprimer toute existence du parc nucléaire actuel.

L’amendement CE296 est retiré.

La commission rejette les amendements CE192 et CE361.

 

Amendement CE246 de M. Karim Benbrahim

M. Karim Benbrahim (SOC). Notre stratégie énergétique doit avant tout reposer sur des objectifs de sobriété et d’efficacité énergétiques, sur un développement massif des énergies renouvelables. Mais s’il faut réaffirmer que l’objectif est de converger vers un mix énergétique 100 % renouvelable, il est nécessaire de maintenir des capacités de production nucléaire, notamment pour garantir la sûreté du système électrique.

Cet amendement de réécriture de l’article propose, d’une part, de prolonger la durée de vie des centrales nucléaires existantes sous contrôle de l’ASNR afin de porter leur durée d’exploitation jusqu’à 60 ans, et, d’autre part, de construire de nouveaux réacteurs nucléaires pour compenser l’arrêt à venir des centrales les plus anciennes dans la mesure où le développement des énergies renouvelables n’a pas été assez rapide au cours des dernières années – sur le plan technique, il est encore difficile d’envisager un mix avec davantage d’énergies renouvelables. Cela étant, nous refusons d’inscrire tout objectif chiffré du développement des SMR, considérant que la dissémination du nucléaire pose des problèmes de sûreté et d’acceptabilité. En résumé, notre amendement prend en compte la capacité financière d’EDF et les moyens d’atteindre un prix de l’énergie accessible.

M. Antoine Armand, rapporteur. Commençons par les points d’accord : le maintien des capacités du parc nucléaire existant, tant que l’ASNR le permet ; le lancement d’un projet de nouveau nucléaire, dont nous pourrons ensuite définir les capacités en gigawatts (GW) ou en réacteurs ; le maintien des installations du combustible afférentes.

Cet amendement comporte cependant deux points de désaccord majeurs qui me conduisent à en demander le retrait et à vous proposer de le retravailler ensemble d’ici à l’examen du texte en séance. À défaut d’un retrait, j’émettrais un avis défavorable.

Premier point de désaccord : vous fixez la durée de vie des réacteurs à 60 ans. Contrairement à ce qu’a dit Julie Laernoes, les réacteurs nucléaires français n’ont pas été prévus pour durer quarante ans. Comme tout outil industriel, ils ont été conçus pour fonctionner le plus longtemps possible, avec l’idée que des pièces fondamentales pourraient nécessiter un changement au bout d’une quarantaine d’années. En réalité, les pièces des réacteurs construits il y a plus de quarante ans ont quasiment toutes été changées, modernisées, adaptées ou réparées, comme dans la plupart des outils industriels. Seules les cuves se changent difficilement – inutile de vous faire un dessin –, mais il est établi qu’elles n’ont pas subi de vieillissement ou de transformation. Nos voisins nord-atlantiques réfléchissent d’ailleurs à prolonger la durée de vie de leurs réacteurs jusqu’à 80 ans.

L’ASNR, qui n’est pas sujette à politisation au grand dam de certains, ne raisonne pas en durée de vie. D’après les textes, les réacteurs obtiennent une autorisation de fonctionnement, sous réserve de vérifications et d’exercices réguliers de la part de l’exploitant, et, tous les dix ans, de la part de l’ASNR. C’est elle le juge de paix. Ce n’est pas vous, madame Laernoes, qui pensez : 40 ans, c’est assez vieux. Ce n’est pas moi, M. Armand, qui me dis : j’aimerais bien les pousser jusqu’à 80 ans. Fort heureusement ! Revenons à la durée de vie de 60 ans, que vous proposez. Est-ce un objectif indicatif ? Est-ce le minimum souhaité ? Vous conviendrez que si un réacteur doit s’arrêter avant pour des questions de sûreté, personne ne s’y opposera. Est-ce à dire qu’à la soixante et unième année, si tout fonctionne et si l’ASNR a donné son feu vert pour continuer, on va se priver d’un tel moyen de production ?

Deuxième point de désaccord : vous prévoyez 29 GW de capacité installée en 2050, ce qui correspond à l’un des scénarios de Réseau de transport d’électricité (RTE) tablant sur la fermeture de certains réacteurs qui auraient atteint un âge limite. Or, comme je viens de le dire, on ne ferme pas un réacteur parce qu’il a 38 ou 42 ou 61 ans, mais parce qu’il ne peut plus fonctionner dans des bonnes conditions de sûreté et d’exploitation. Étant donné les besoins d’énergie, et notamment d’électricité décarbonée, il faut maintenir le parc nucléaire en fonctionnement aussi longtemps que l’ASNR nous autorise à le faire. Sur les plans industriel et écologique, fermer avant l’heure reviendrait à se tirer une balle dans le pied.

M. Maxime Laisney (LFI-NFP). Si nous avions supprimé l’article 3, toutes les centrales existantes fermaient du jour au lendemain ? Ne racontez pas des salades, monsieur le rapporteur ! Nous devrions déjà nous assurer que nos présents travaux servent à quelque chose en ce qui concerne la modification de la PPE 3.

En réponse à nos collègues socialistes, j’aimerais aussi revenir sur ce concept de nouveau nucléaire de transition. Lisez le rapport de la Cour des comptes. L’EPR est un fiasco partout dans le monde, pas seulement à Flamanville : les difficultés technologiques et industrielles entraînent systématiquement des retards et de surcoûts. Après douze ans de retard, celui de Flamanville n’alimente encore personne en électricité. Or, il faudrait déjà changer le couvercle et même la cuve – puisque ce n’est pas possible, on va apporter quelques petites modifications en introduisant une pièce supplémentaire dans le fond de la cuve. Nous n’avons toujours pas les plans de l’EPR 2, et nous ne savons pas s’il va mieux fonctionner que l’EPR que nous avons galéré à construire et à mettre en service partout dans le monde. Quant à la corrosion sous contrainte, l’ASNR indiquait encore la semaine dernière que l’on n’en connaît pas la cause et que l’on ignore si elle va se reproduire.

Mme Julie Laernoes (EcoS). Le groupe Écologiste votera contre cet amendement de réécriture. Je m’étonne de voir mes collègues socialistes de Loire-Atlantique, qui ont manifesté contre de nouvelles centrales nucléaires, approuver la relance de huit centrales – l’article 3 est encore pire dans sa version actuelle, certes, mais je tiens à souligner ce revirement.

Marcel Boiteux, président d’EDF jusqu’en 1979, disait que les centrales avaient été conçues pour 12 000 cycles, un nombre largement dépassé. Rappelons que la moitié du parc a été à l’arrêt en 2022, et cela pourrait se reproduire. En outre, la dissolution de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) a affaibli les instances de sûreté, alors que la France est le pays le plus nucléarisé au monde.

M. Karim Benbrahim (SOC). Nous sommes là pour élaborer une loi de programmation et planifier des investissements, pas pour écrire l’avenir ad vitam aeternam. Monsieur le rapporteur, vous n’ignorez pas que la loi de programmation est révisée tous les cinq ans. Nous proposons de prolonger la durée d’exploitation des réacteurs jusqu’à 60 ans. Cette hypothèse doit nous permettre de décider des investissements dans le nucléaire, mais aussi, par voie de conséquence, des investissements dans le développement des énergies renouvelables, afin d’arriver à équilibrer la production et la consommation. Je maintiens l’amendement.

M. Maxime Amblard (RN). Madame Laernoes, je confirme les propos du rapporteur : les réacteurs nucléaires ont été conçus pour fonctionner au moins quarante ans. Arrêter un réacteur au bout de quarante ans, comme dans le cas de Fessenheim, c’est comme jeter votre ordinateur parce que la date de garantie est dépassée. Ce n’est pas très intelligent. N’importe quel physicien travaillant sur le sujet vous le dira.

Quant à vous, monsieur Laisney, je vous invite à ne pas confondre la technologie nucléaire en elle-même et les soucis que nous avons lors de la construction d’un réacteur. Ce type de bijou technologique et industriel nécessite une capacité de production importante que nous avons eue dans les années 1970 et qui s’est dégradée au fil du temps, sous les différents gouvernements de droite, de gauche ou macroniste. Nous en sommes arrivés au point d’avoir des difficultés à mener de grands projets industriels. Est-ce irrémédiable ? Non. Il ne faut donc pas confondre la technologie nucléaire qui fonctionne et nos difficultés à construire des réacteurs. Les Chinois, eux, n’ont pas rencontré ces difficultés et ils ont construit deux EPR en huit ans.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE362 de Mme Julie Laernoes

Mme Julie Laernoes (EcoS). Cet amendement vise à supprimer les alinéas 2 et 3, qui renforcent encore le soutien public à la recherche sur le nucléaire alors que celle-ci a déjà concentré 45 % de l’effort en 2023. Elle a ainsi bénéficié de 1,23 milliard d’euros – en hausse de 40 % par rapport à 2022 –, contre seulement 78 millions pour le solaire et 18 millions pour l’éolien.

Et pour quels résultats ? Encore et toujours plus d’argent public pour de technologies qui enchaînent les échecs depuis des décennies – Superphénix a été abandonné après avoir englouti des milliards, Astrid, le réacteur rapide refroidi au sodium à visée industrielle, a été enterré en 2019 faute de viabilité, et le projet de fusion Iter – réacteur thermonucléaire expérimental international –, qui a pris dix ans de retard et dont le budget a été multiplié par cinq, n’apportera rien avant 2080 au mieux – que fait-on, d’ici là ? Sans parler de Cigéo – centre industriel de stockage géologique –, à Bure, toujours inabouti trente ans après son lancement, ou de la prétendue fermeture du cycle, laquelle, loin de permettre un recyclage, produit des déchets encore plus complexes à gérer.

Soutenir ces programmes, c’est prolonger une fuite en avant technologique et financière, alors que l’urgence climatique impose des solutions concrètes, disponibles, sobres, renouvelables et à l’efficacité prouvée.

M. Antoine Armand, rapporteur. La rédaction de l’alinéa 3 n’est certes pas satisfaisante – l’amendement suivant en propose une autre –, mais je suis défavorable à la suppression de l’objectif de recherche dans les technologies décarbonées, car je souhaite que nous décarbonions notre pays et que nous réussissions la transition écologique.

Mme Dominique Voynet (EcoS). Voilà un point sur lequel nous sommes d’accord, monsieur le rapporteur : cet alinéa a été rédigé par-dessus la jambe, pour reprendre une expression dont vous avez vous-même usé hier. On dirait une liste au Père Noël – une liste qui souffre d’un biais important, puisque n’y figurent que des projets dans le domaine nucléaire. Il y manque, par exemple, des projets liés à la recherche dans le domaine du stockage de l’énergie, quelle qu’en soit l’origine.

En outre, ces projets ne sont pas chiffrés. Le projet Iter a été officiellement estimé à 25 milliards mais, selon un rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), personne n’en connaît réellement le coût. Il en va de même de la plupart des projets qui figurent sur cette liste.

M. Matthias Tavel (LFI-NFP). Cet alinéa est une liste à la Prévert. Il y a de tout, des choses intéressantes et du n’importe quoi.

Soutenir des projets de recherche comme Iter peut sembler légitime à certains, et ce sujet mériterait au moins qu’on en débatte. Mais enfouir profondément des déchets qui resteront radioactifs et dangereux pendant des dizaines – voire des centaines – de milliers d’années n’est pas très intelligent, car il n’est pas certain que ceux qui les trouveront sauront pourquoi ils ont été enfouis et ce qu’ils doivent en faire. Plutôt que de se débarrasser des matériaux radioactifs – par le passé, on les a largués au large de la Loire-Atlantique, et on les cherche encore –, mieux vaudrait soutenir la recherche pour trouver comment les décontaminer.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE222 de Mme Marie-Noëlle Battistel et sous-amendement CE620 de M. Antoine Armand

M. Antoine Armand, rapporteur. L’amendement CE222 réécrit l’alinéa 3 pour recentrer le dispositif sur des projets clairs en matière de recherche. Mon sous-amendement vise à supprimer la référence à Cigéo.

Contrairement à ce que M. Tavel a affirmé avec une certaine légèreté, ce projet n’a pas été décidé du jour au lendemain sans que personne y réfléchisse. Il a fait l’objet de décennies de recherche et de travail avec des experts nationaux et internationaux – y compris des philosophes et des sociologues – s’agissant de la question de la transmission des déchets. Affirmer qu’enfouir les déchets est l’idée la plus bête du monde prouve seulement que vous n’avez sans doute pas lu la moindre ligne du travail sur le stockage en couche géologique profonde mené depuis le plan Messmer, et que vous n’êtes pas capable de faire la différence entre taux de radioactivité et durée de vie des déchets.

Mme Dominique Voynet (EcoS). Si le projet Cigéo a réellement été pensé dans ses moindres détails, comme vous le prétendez, monsieur le rapporteur, comment justifiez-vous que sa descenderie soit à cheval sur deux départements, sinon par la volonté de partager la valeur ajoutée du chantier ? Cela vous semble-t-il vraiment la solution technique la plus raisonnable, la plus responsable et la plus efficace ?

M. Jérôme Nury (DR). Cet amendement tend seulement à maintenir l’effort de recherche et d’innovation en matière de nucléaire, alors que nous sommes nombreux à vouloir l’intensifier. À cet égard, la rédaction initiale, qui permet une approche globale des efforts de recherche pour l’ensemble de la filière grâce à une liste de projets ciblés, me paraît plus appropriée que celle proposée par l’amendement. Nous ne le voterons donc pas, même si le sous-amendement était adopté.

M. Maxime Laisney (LFI-NFP). Il y a un an, je suis allé visiter le site de Cigéo : je suis descendu à 500 mètres sous terre, j’ai rencontré des acteurs du projet, des opposants, des riverains.

Premièrement, s’il doit voir le jour dans la Meuse, c’est parce que d’autres, ailleurs, n’en voulaient pas.

Deuxièmement, le concept a évolué : il devait s’agir d’un coffre-fort, et on parle désormais d’organiser la compétition entre la migration des radionucléides et la décroissance radioactive. Bref, la radioactivité finira par remonter à la surface.

Troisièmement, ce projet a entraîné l’expropriation des agriculteurs de certaines parcelles.

Depuis le début, la stratégie du fait accompli s’applique à chaque étape. Il y a un an, j’ai demandé au directeur du projet ce qui se passerait si l’ASNR refusait la demande d’autorisation de création du site. Il m’a répondu : « Si on nous pose des questions, on y répondra. » Tout est dit.

M. Antoine Armand, rapporteur. Madame Voynet, la descenderie – la piste de descente des déchets – est à cheval sur deux départements pour que les deux y soient associés. Si c’est là le seul problème du projet, ce sera la preuve que Cigéo a été bien mieux pensé que vous le dites.

Successivement, la commission adopte le sous-amendement et rejette l’amendement.

 

Amendement CE424 de M. Julien Brugerolles

M. Julien Brugerolles (GDR). Si je regrette moi aussi l’inventaire à la Prévert de l’alinéa 3, il me semble important de rappeler que le soutien à l’effort de recherche et d’innovation passe par le renforcement des financements publics adaptés, notamment pour éviter les investissements privés – je suis particulièrement inquiet à l’idée que des start-up investissent dans les petits réacteurs modulaires. D’où cet amendement.

M. Antoine Armand, rapporteur. Je ne sais pas quelle est la portée d’un tel amendement en dehors d’une loi de finances, mais je partage votre objectif. Avis favorable.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE212 de M. Matthias Tavel

M. Matthias Tavel (LFI-NFP). Au milieu de cet article consacré exclusivement au nucléaire, cet amendement vise à rappeler qu’il existe d’autres sources d’énergie. Comme toujours, c’est deux poids, deux mesures : des milliards d’euros d’argent public sont investis dans la recherche dans le nucléaire, mais celle dans les énergies renouvelables (EnR) et leur stockage mériteraient un effort au moins équivalent. On n’est même plus dans le « en même temps » macroniste : c’est tout pour le nucléaire, rien pour les EnR !

Complété par les amendements proposés par le rapporteur, ce texte n’est ni plus ni moins qu’une nouvelle proposition de loi d’accélération du nucléaire.

M. Antoine Armand, rapporteur. Je reconnais à M. Tavel une certaine faconde, mais je rappelle que l’article 3 est consacré au nucléaire. D’autres – notamment l’article 5 – nous offriront l’occasion de discuter des énergies renouvelables. Avis défavorable.

M. Charles Fournier (EcoS). J’ai justement déposé, après l’article 5, des amendements portant article additionnel qui tendent à favoriser et soutenir l’innovation dans les énergies renouvelables. J’imagine que vous émettrez un avis favorable.

Il est un peu simpliste de considérer que les énergies renouvelables appartiennent au passé et que le nucléaire incarne la modernité et la seule perspective pour l’avenir. L’innovation existe aussi en matière d’énergies renouvelables, donc montrons-le : dans mon département, des gens ont inventé des éoliennes mobiles et sans béton. Et il existe encore de nombreuses voies à explorer, comme l’énergie osmotique et l’énergie marémotrice.

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Nous voterons également cet amendement. Il est important d’équilibrer les efforts de recherche, d’autant qu’il reste de nombreuses pistes d’innovation à explorer dans le domaine des énergies renouvelables.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE124 de M. Jean-Luc Fugit

M. Jean-Luc Fugit (EPR). Afin de refléter la complémentarité des différentes sources d’hydrogène nécessaires pour la transition énergétique, cet amendement vise à élargir l’effort de recherche et d’innovation à l’hydrogène renouvelable.

La Stratégie nationale pour le développement de l’hydrogène décarboné en France, récemment révisée, souligne l’importance de développer à la fois l’hydrogène bas-carbone et l’hydrogène renouvelable, et la directive européenne RED III – Renewable Energy Directive –, qui devrait être transposée en 2025, fixe des objectifs ambitieux de consommation d’hydrogène renouvelable dans l’industrie. Il est donc essentiel que la programmation énergétique soutienne l’innovation dans ce domaine, comme elle le fait déjà pour les technologies nucléaires.

M. Antoine Armand, rapporteur. Votre proposition complexifie la rédaction de l’article, mais j’en partage l’ambition. Sagesse.

M. Matthias Tavel (LFI-NFP). Nucléaire, renouvelable : depuis la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables (Aper) et le début de l’examen de cette proposition de loi, tout est noyé dans les termes « décarboné » ou « bas-carbone ». Je tiens donc à saluer l’effort de clarification du collègue Fugit : il existe bien un hydrogène renouvelable, qui n’a rien à voir avec l’hydrogène bas-carbone, qu’on pourrait opportunément rebaptiser « hydrogène issu du nucléaire ».

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE480 de M. Maxime Amblard

M. Maxime Amblard (RN). L’objectif du Rassemblement national est de réduire l’empreinte carbone de la France sans réduire le niveau de vie des Français. Cela nécessite de décarboner notre mix énergétique, tout en maintenant un niveau de production suffisant pour réindustrialiser, relocaliser la production de valeur ajoutée dans le pays, donc réimporter les émissions exportées avec la mondialisation. Même si certains restent bloqués dans leurs dogmes au détriment de toute raison et, surtout, de la prospérité future de la France et des Français, cela ne saurait se faire sans énergie nucléaire – beaucoup d’énergie nucléaire, donc de combustible.

Pour garantir un nucléaire français durable et autonome, il est crucial de fermer le cycle du combustible et de développer des réacteurs à neutrons rapides – isogénérateurs ou surgénérateurs – permettant de transmuter en matière fissile les 350 000 tonnes d’uranium appauvri stockées dans les entrepôts en France, donc d’exploiter les milliers d’années de réserve de combustible dont nous disposons déjà sans même avoir à creuser.

À la vue de cet intérêt stratégique majeur, il ne semble pas excessif de faire de cet objectif une priorité de la politique énergétique nationale et de l’inscrire explicitement dans la loi.

M. Antoine Armand, rapporteur. Les réacteurs de quatrième génération ont un rôle majeur à jouer dans le développement de l’industrie nucléaire en France, mais je vous invite à retirer votre amendement au profit de mon amendement CE548, plus précis, qui prévoit notamment la construction d’un démonstrateur.

M. Maxime Amblard (RN). Votre amendement ne prévoit pas de faire du développement de ces réacteurs une priorité stratégique pour la France. Je lui préfère ma rédaction.

Mme Julie Laernoes (EcoS). La situation est éloquente : pour le Rassemblement national, la priorité est de développer ce qui a conduit la filière nucléaire dans l’impasse. Voilà quelques années que l’on parle de la quatrième génération, mais, pour l’heure, aucun pays n’a réussi à fermer le cycle de combustible.

Quant aux centrales nucléaires construites en cinquante-six mois, ce sont des centrales chinoises, et non françaises. Votre position est donc incohérente. D’ailleurs, même si les Chinois construisent plus rapidement que nous, ils n’ont pas pour autant fermé le cycle de combustible.

M. Maxime Laisney (LFI-NFP). Nos collègues du Rassemblement national entretiennent un des mythes de la pensée nucléocrate au motif que c’est de la physique. Vous nous faites rêver en parlant d’exploiter le nucléaire pour des milliers d’années grâce à un combustible déjà disponible mais, pour l’instant, la quatrième génération n’est toujours pas au point. Et il reste le risque d’un accident nucléaire : quand ça nous pète à la figure, c’est aussi de la physique.

M. Maxime Amblard (RN). Vous avez visiblement oublié l’origine du problème. Je me permets de rappeler que se cache ici une ministre qui a sabordé le nucléaire de quatrième génération en arrêtant préventivement Superphénix, alors que nous avions vingt ans d’avance sur le reste du monde, que nous étions sur le point de réussir la transmutation et de fermer le cycle, dans la continuité du plan Messmer.

À cause de votre trahison envers les intérêts de la France, nous avons désormais vingt ans de retard. Mais ce n’est pas une fatalité : on peut encore se donner les moyens de nos ambitions et rattraper les bêtises faites dans le passé.

M. Antoine Armand, rapporteur. Contrairement à ce que certains affirment, un réacteur de quatrième génération a bien fonctionné en France. Surtout, il y en a aujourd’hui en Chine, en Inde et en Russie. Il est malheureux que d’autres pays aient pris de l’avance.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE544 de M. Antoine Armand

M. Antoine Armand, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer les alinéas 5 et 6, qui fixent une part de nucléaire dans le mix énergétique et électrique. La dernière fois que nous avons eu cette bonne idée, elle n’a pas été couronnée de succès – c’était la fameuse loi de 2015, qui tendait à réduire à 50 % la part du nucléaire dans le mix.

Certains verront dans cette suppression une démarche antinucléaire, les autres craindront un objectif caché, mais il ne s’agit pas ici d’être pro ou antinucléaire ; seulement, on ne construit pas un mix énergétique et on ne détermine pas des objectifs industriels en fonction de pourcentages que quiconque ici serait bien en peine de justifier, mais en s’appuyant à la fois sur l’industrie décarbonée existante et sur celle qu’il est possible de développer pour atteindre la résilience énergétique, en particulier électrique.

Commençons par décarboner notre mix, qui repose encore aux deux tiers sur les énergies fossiles, et maintenir autant que possible nos capacités de production électrique existantes – hydroélectricité, nucléaire –, puis développons en complément les énergies renouvelables.

M. Karim Benbrahim (SOC). Je souscris à votre analyse : il vaudrait mieux exprimer les objectifs de production en puissance plutôt qu’en pourcentages. Mais nous débattons d’une loi de programmation : si nous supprimons ces deux alinéas, que nous reste-t-il en termes d’objectifs, sinon celui de tendre vers 27 GW de nouvelles capacités de production électronucléaires installées ?

Nous aurions pu souscrire à la suppression des alinéas 5 et 6 si, parallèlement, vous aviez proposé de réintroduire des objectifs de développement du nucléaire ailleurs dans le texte. Ce n’est pas le cas, nous voterons donc contre cet amendement.

M. Jérôme Nury (DR). Je ne suis pas très à l’aise avec cet amendement : j’ai le sentiment qu’on joue petit bras et qu’on n’ose pas afficher clairement notre ambition de maintenir une filière électronucléaire performante et d’en faire une priorité pour les décennies à venir.

Au reste, supprimer les objectifs de production enverrait un mauvais signal à EDF. Son facteur de charge pourrait être augmenté, mais encore faut-il la mettre au défi de maintenir la part du nucléaire dans le mix à au moins 60 % – voire plus, comme le proposent certains amendements. À travers ces objectifs, affichons clairement notre ambition pour le nucléaire d’ici à 2050.

M. Jean-Luc Fugit (EPR). Mon amendement CE116, qui vient plus loin, est en quelque sorte de repli. Il prévoit de « viser un mix de production d’électricité majoritairement nucléaire à l’horizon 2050 », ce qui laisse une latitude suffisante.

En effet, comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, nous souhaitons sortir plus vite des énergies fossiles en nous appuyant à la fois sur la relance de l’énergie nucléaire et sur l’accélération du déploiement des énergies renouvelables. Contrairement à d’autres groupes, nous pensons que ces technologies sont complémentaires.

L’amendement du rapporteur est très intéressant, car les pourcentages et les puissances relèvent davantage du domaine réglementaire. Nous voterons donc pour cet amendement et, s’il n’était pas adopté, nous inviterions à voter pour le CE116.

M. Julien Brugerolles (GDR). Je soutiens également l’amendement du rapporteur. Tout d’abord, nous avons fait l’erreur d’inscrire dans la loi un objectif de 50 % de nucléaire dans la production d’électricité qui était intenable ; ensuite, on observe chaque année des fluctuations de la production d’électricité d’origine nucléaire ou renouvelable, ce dont les objectifs en pourcentage ne tiennent pas compte.

Je suis moi aussi partisan d’un mix associant le nucléaire et les énergies renouvelables, en prévoyant les moyens nécessaires à leur développement. L’amendement qui nous est proposé prend en compte ces objectifs.

M. Maxime Amblard (RN). Je suis partagé. Il est exact que les pourcentages ne signifient pas grand-chose, d’autant que le texte mentionne ensuite des puissances installées, ce qui est beaucoup plus concret. Dans ces conditions, on peut effectivement supprimer l’alinéa 5.

En revanche, je m’interroge davantage sur la suppression des objectifs de décarbonation qui figurent à l’alinéa 6. Ces derniers font l’objet d’un consensus, car nous voulons réduire la dépendance aux énergies fossiles.

M. Matthias Tavel (LFI-NFP). Il y a quelque chose que je ne comprends pas, monsieur le rapporteur. Vous proposez de supprimer des pourcentages tout en proposant de conserver l’alinéa 7, qui prévoit des objectifs non seulement en matière de puissance des capacités installées de production d’électricité nucléaire, mais aussi s’agissant du nombre de réacteurs. Or, la PPE sera fondée sur des hypothèses de production d’électricité. Vous dites qu’on ne doit pas faire figurer des pourcentages dans la loi, mais n’importe qui pourra les calculer à partir des puissances fixées par la proposition. Il y a quand même une forme d’hypocrisie dans vos arguments.

Par ailleurs, vous proposez de supprimer l’ensemble des éléments programmatiques concernant les puissances installées pour toutes les énergies renouvelables, alors que vous maintenez ces éléments lorsqu’il s’agit du nucléaire. Pourquoi n’appliquez-vous pas le même raisonnement à toutes les formes de production d’énergie ? Il y a là manifestement une volonté de plaire au Rassemblement national et d’écrire une loi de sabotage des énergies renouvelables. Tout pour le nucléaire, rien pour les énergies renouvelables : voilà votre loi.

M. Antoine Armand, rapporteur. Je me serai bien passé de ce procès d’intention, même si vous êtes coutumier du fait, monsieur Tavel.

Mais, sans rancune, je vais commencer par vous expliquer ce que vous n’avez pas compris. Cela vient sans doute de ce que vous n’avez pas voulu écouter ce que j’ai dit lors de la présentation du texte. Une loi, surtout de programmation, est destinée à fixer des grands objectifs. Peut-être êtes-vous capable de déterminer au point de pourcentage près quelle sera l’origine de la production d’énergie dans cinq ou dix ans, mais tel n’est pas mon cas. Je n’ai pas l’impression de rendre service à mes électeurs si je leur dis que le nucléaire représentera 62 % de la production d’électricité en 2035, parce que c’est ce qui figure dans la loi et que l’intendance suivra. Je tiens d’ailleurs le même raisonnement pour l’ensemble de la production d’énergie décarbonée, qu’il s’agisse d’énergies renouvelables ou de nucléaire.

Pourquoi conserver dans le texte des objectifs de production en térawattheures (TWh) pour la production d’électricité d’origine nucléaire ? Tout simplement parce que fixer un cadre général pour les appels d’offres destinés à installer des panneaux photovoltaïques sur votre toit n’est pas exactement du même ordre pour la puissance publique que de s’engager dans la construction de réacteurs nucléaires – vous en convenez d’ailleurs, puisque vous estimez qu’il s’agit de projets extrêmement importants qui doivent être débattus au Parlement.

Monsieur Amblard, je propose de supprimer l’alinéa 6 pour une raison simple. D’une part, l’objectif de décarboner le mix électrique à plus de 90 % est déjà atteint. D’autre part, l’objectif qui consiste à décarboner le mix énergétique à plus de 50 % à l’horizon 2030 figure aussi à l’article 8.

Monsieur Nury, je me suis posé la même question que vous. Le texte prévoit de maintenir la part du nucléaire dans la production d’électricité à plus de 60 % à l’horizon 2030. En pratique, un gouvernement pourrait donc décider, à l’avenir, d’arrêter des réacteurs si cette part s’élève à 62 %, alors même que le parc installé permettrait d’atteindre les 75 %. Je n’y suis évidemment pas favorable, mais je donne cet exemple pour montrer que l’inscription d’un pourcentage dans la loi n’est pas une garantie.

Monsieur Benbrahim, l’article 5 fixe à l’industrie un objectif de production d’électricité décarbonée d’au moins 560 TWh, mais aussi un objectif de production nationale de chaleur renouvelable et de récupération.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, les amendements CE196 à CE484 tombent.

 

Amendement CE543 de M. Antoine Armand, sous-amendement CE563 de M. Karim Benbrahim, sous-amendements en discussion commune CE583 de Mme Julie Laernoes et CE562 de Mme Marie-Noëlle Battistel

M. Antoine Armand, rapporteur. Je propose de déplacer l’alinéa 8, qui porte sur le maintien en fonctionnement des installations nucléaires existantes, avant les alinéas relatifs au déploiement de nouvelles capacités nucléaires.

M. Karim Benbrahim (SOC). Le sous-amendement CE563 précise que la prolongation jusqu’à soixante années de la durée d’exploitation du parc électronucléaire historique doit permettre d’atteindre l’objectif de production de 63 GW.

Mme Julie Laernoes (EcoS). Le sous-amendement CE583 vise à supprimer l’objectif d’atteinte d’une capacité installée de production d’électricité d’origine nucléaire d’au moins 63 GW en 2035. Fixer l’objectif de cette manière revient à entériner la prolongation des réacteurs existants, indépendamment de leur état.

Une telle mesure est discutable tant du point de vue de la sûreté que du point de vue industriel. Des incertitudes techniques entourent la prolongation des réacteurs exploités par EDF et font peser un risque sur la sécurité d’approvisionnement électrique de notre pays. Qu’on se rappelle que la moitié du parc a été mise à l’arrêt en 2022 en raison d’un phénomène de corrosion sous contrainte lié au vieillissement.

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Le sous-amendement CE562 vise à tenir compte de la mise en service du réacteur n° 3 de Flamanville, qui a porté la capacité installée du parc à la cible de 63 GW. Il convient désormais de fixer un objectif de maintien de cette capacité, en particulier par la prolongation à soixante années du parc nucléaire historique, sous réserve de l’avis de l’ASNR.

M. Antoine Armand, rapporteur. Nous ne sommes pas forcément en désaccord, monsieur Benbrahim. Considérez-vous que la prolongation jusqu’à soixante années est une limite à ne pas dépasser ? Mon avis sur votre sous-amendement dépendra de votre réponse.

Le sous-amendement de Mme Laernoes est satisfait. Le texte prévoit de maintenir en fonctionnement toutes les installations de production d’électricité d’origine nucléaire, sous réserve de la protection des intérêts mentionnés au premier alinéa de l’article L. 593-1 du code de l’environnement. Il reviendra bien entendu à l’ASNR de décider si l’on continue de faire fonctionner un réacteur. Sous réserve de son autorisation, tous les réacteurs existants pourront fonctionner, ce qui permettrait d’atteindre une puissance de 63 GW.

Avis favorable au sous-amendement CE562, qui améliore la rédaction.

M. Maxime Laisney (LFI-NFP). Nous allons voter pour le sous-amendement de Mme Laernoes et contre le reste.

Notre parc de réacteurs nucléaires a été construit progressivement, et la prolongation des réacteurs occasionnera des visites décennales lorsqu’ils atteindront 40 ou 50 ans. De ce fait, treize réacteurs en moyenne, soit 25 % du parc, seront à l’arrêt pendant plusieurs mois au cours de chacune des dix prochaines années.

Comme l’avait indiqué M. Doroszczuk, dernier président de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), « la durée d’exploitation des réacteurs existants ne saurait être la variable d’ajustement d’une politique énergétique mal calibrée ». J’ai bien peur que ce soit le chemin sur lequel vous souhaitez nous emmener.

M. Karim Benbrahim (SOC). Cela fait deux fois que l’on ne se comprend pas, monsieur le rapporteur.

Nous proposons d’inscrire dans cette loi de programmation l’objectif qui consiste à porter à soixante ans la durée d’exploitation des réacteurs nucléaires, sous le contrôle de l’ASNR – et donc de procéder aux investissements nécessaires pour atteindre cet objectif. Cette loi de programmation est destinée à être révisée tous les cinq ans.

Tout en s’appuyant sur l’exploitation des réacteurs pendant soixante ans, il convient de procéder à d’autres investissements, notamment pour développer les énergies renouvelables, afin d’assurer une production répondant aux besoins.

Mme Dominique Voynet (EcoS). Dans chacun de ses rapports annuels, l’autorité de sûreté rappelle avec constance que les réacteurs existants ont été conçus pour quarante ans. Un certain nombre d’arrêts sont programmés pour leur maintenance et, comme l’a relevé Maxime Laisney, de nombreux réacteurs pourraient ne pas fonctionner simultanément.

Il me paraît plus prudent de s’en tenir à un objectif de maintien en fonctionnement des installations, plutôt que de prévoir de manière dangereuse d’atteindre un objectif de production, quoi qu’il en coûte.

Dans tous les cas, je vous invite à voter le sous-amendement de Julie Laernoes.

M. Antoine Armand, rapporteur. La durée de vie des centrales nucléaires est un sujet important, qui mérite que nous nous y attardions. C’est pourquoi je pose de nouveau la question à M. Benbrahim : la rédaction que vous proposez signifie-t-elle que vous souhaitez l’arrêt des réacteurs au bout de soixante ans, ou bien que leur exploitation reste envisageable passé ce délai ?

M. Karim Benbrahim (SOC). Procédons aux investissements nécessaires pour atteindre une prolongation de soixante ans. L’autorité de sûreté pourra le cas échéant décider qu’il faut arrêter les réacteurs auparavant. Cette loi de programmation sera révisée tous les cinq ans, et nous verrons comment il convient de l’ajuster en fonction des informations disponibles. Mais l’objectif fixé par la loi reste d’atteindre soixante ans.

M. Antoine Armand, rapporteur. Si cela avait été possible, j’aurais sous-amendé en précisant « jusqu’à soixante années au moins » – ce qui correspond à votre souhait, si j’ai bien compris. Je suggère donc le retrait, afin de nous accorder sur une rédaction d’ici à l’examen en séance

M. Karim Benbrahim (SOC). Adoptons plutôt mon sous-amendement et travaillons à une rédaction en vue de la séance.

Successivement, la commission rejette le sous-amendement CE563 ainsi que le sous-amendement CE583 et adopte le sous-amendement CE562.

Elle adopte l’amendement CE543 sous-amendé.

En conséquence, les amendements CE206 à CE255 tombent.

 

Amendement CE30 de M. Joël Bruneau

M. Joël Bruneau (LIOT). Cet amendement vise à inscrire la continuité du parc nucléaire parmi les objectifs de la politique énergétique nationale, afin d’éviter toute rupture de capacité d’ici à la mise en service des nouveaux EPR, prévue à l’horizon 2038-2040. Dès lors que les conditions de sécurité sont remplies, il est justifié d’effectuer une révision du parc pour permettre une production d’électricité décarbonée et à moindre coût, puisque ces équipements sont amortis.

M. Antoine Armand. Votre amendement est satisfait par l’amendement CE543. Demande de retrait.

L’amendement est retiré.

 

Amendements identiques CE203 de M. Maxime Laisney et CE 364 de Mme Julie Laernoes

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NFP). Cet amendement tend à supprimer l’alinéa 7, qui prévoit la construction de pas moins de vingt nouveaux EPR et le lancement de quatorze d’entre eux d’ici à 2030.

Je ne comprends même pas qu’on puisse écrire une chose pareille dans une loi de programmation après que la Cour des comptes – qui n’est pas un repère d’écologistes ayant un couteau entre les dents – a annoncé dans un rapport que la filière EPR était un fiasco. On ne maîtrise pas la technologie à ce stade. On sait déjà que les chantiers enregistreront des retards phénoménaux, comme on a pu le constater à Flamanville, mais aussi en Finlande et au Royaume-Uni. Les nouveaux réacteurs seraient aux mieux disponibles en 2038, mais ce sera certainement plus tard.

La Cour a relevé que leur coût prévisionnel atteindrait 100 milliards d’euros, soit une augmentation de 30 % en un an. Le coût du mégawattheure issu de ces réacteurs pourrait s’élever à 92,9 euros, ce qui est exorbitant. Autrement dit, ça ne sera même pas rentable.

Les objectifs affichés dans cette proposition sont le reflet d’une confiance délirante dans une technologie qu’on ne maîtrise pas. Ce n’est pas sérieux.

Mme Julie Laernoes (EcoS). Il faut supprimer l’alinéa 7 si l’on tient à une trajectoire énergétique crédible. Ce texte n’est pas un projet de loi de programmation mais une proposition de loi du Sénat, laquelle n’a pas fait l’objet d’une étude d’impact.

On assiste à une fuite en avant industrielle complètement déconnectée des réalités techniques, financières et climatiques. Faut-il rappeler que le chantier de l’EPR de Flamanville dure depuis dix-huit ans et que le réacteur n’est toujours pas en service ? Le coût de ce projet est passé de 3,3 à 24 milliards d’euros. Même chose pour la centrale nucléaire d’Hinkley Point, dont la mise en service a été repoussée à 2030, avec un coût qui s’élève à 54 milliards – dont 85 % sont à la charge d’EDF, donc du contribuable français.

En 2021, le coût annoncé des six EPR 2 était de 51,7 milliards. EDF l’estimait à 67,4 milliards à la fin de 2023, avant même la pose d’une première pierre. Et le nouveau PDG de cette entreprise a indiqué qu’il fournirait une nouvelle estimation à la fin de l’année.

On inscrit dans la loi un programme de création de nouveaux réacteurs, alors que l’on n’en connaît ni le coût, ni l’impact. C’est détonant. Si l’on est attaché à la sécurité d’approvisionnement électrique et à un coût de l’énergie raisonnable pour nos concitoyens, il faut supprimer l’alinéa 7.

M. Antoine Armand, rapporteur. Je constate que l’attention aux finances publiques n’est jamais aussi aiguë que lorsqu’on parle de nucléaire. Vous avez fait, à juste titre, l’éloge des travaux de la Cour des comptes. Comme il ne peut pas y avoir deux poids, deux mesures, vous pourriez également vous référer à ses rapports sur la réforme des retraites, sur le transport sanitaire et sur les dépenses des collectivités locales.

Je suis évidemment défavorable à ces amendements car ils s’opposent à la construction de nouveaux réacteurs nucléaires. Nous considérons pour notre part que c’est important.

Vous avez mentionné l’absence d’étude d’impact. Mais RTE a évalué plusieurs scénarios de production d’électricité, dont celui qui figure dans cette proposition. Même si l’on est pour le nucléaire, il faut bien entendu se pencher sur les questions relatives au financement des investissements et de prix de revient de l’énergie produite. Mais, en l’occurrence, il s’agit de choisir une direction importante pour le pays et de pouvoir en débattre en examinant les amendements suivants.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Saluons en effet le travail de la Cour des comptes, qui a remis en cause les chiffres délirants avancés par le Premier ministre au sujet du coût de la réforme des retraites…

Mme Dominique Voynet (EcoS). Monsieur le rapporteur, vous veillez de manière sourcilleuse, nous le savons, à l’efficacité de la dépense publique. Or, s’agissant du nucléaire, nous voyons bien qu’on joue avec l’argent magique, par milliards qui plus est, sans que les frais financiers soient même pris en compte, comme si les centrales pouvaient être opérationnelles du jour au lendemain.

C’est sur le caractère surréaliste de la rédaction du septième alinéa que je veux ici insister. Sans être physiciens nucléaires, nous savons tous faire une règle de trois. Pour tendre d’ici à 2050 vers 27 GW de nouvelles capacités d’origine nucléaire, seraient mobilisés, d’ici à 2026, 10 GW produits par six réacteurs de grande puissance – le calcul est à peu près juste – puis – et là, le compte n’y est pas – 13 GW supplémentaires issus de huit réacteurs électronucléaires de 1 670 MW de puissance et d’un petit réacteur modulaire. Il faut apprendre à compter !

M. Matthias Tavel (LFI-NFP). Je me souviens, monsieur le rapporteur, d’une personnalité peu suspecte d’être antinucléaire, très investie dans les questions énergétiques, ayant utilisé en ma présence l’expression de « Flamanville 4 » au sujet du projet d’EPR 2 afin de dénoncer les risques financiers et technologiques attachés à ce programme. Nous ne pouvons que nous interroger à notre tour sur le caractère hasardeux de ce pari financier et industriel : qu’arrivera-t-il si, aux alentours des années 2040, ces nouveaux réacteurs ne sont pas là pour soutenir notre capacité à produire de l’électricité dont nous avons besoin ?

M. Antoine Armand, rapporteur. Voilà qui est totalement déplacé : M. Tavel fait preuve non seulement d’un manque de courtoisie élémentaire en citant publiquement des propos que j’aurais tenus en privé, mais aussi d’un surcroît de malhonnêteté intellectuelle en les déformant – nos échanges avaient pourtant été excellents jusqu’ici. Je me dois donc de préciser que si j’ai pu employer cette expression, c’est pour signifier que le travail de n’importe quel député de la nation est de s’assurer que la mise en œuvre de ce nouveau programme nucléaire respecte le bon usage des deniers publics afin d’éviter un Flamanville 4, perspective que personne ne souhaite, à moins d’être, comme vous peut-être, animé d’une volonté d’autodestruction nationale. Cela implique donc de poser les bonnes questions au moment de la présentation du schéma financier et des futurs contrats d’allocation de production nucléaire.

La commission rejette les amendements.

 

Amendement CE484 de M. Maxime Amblard, amendement CE545 de M. Antoine Armand et sous-amendement CE634 de M. Jérôme Nury, amendement CE223 de Mme Marie-Noëlle Battistel (discussion commune)

M. Maxime Amblard (RN). Il importe de développer massivement le parc nucléaire, non seulement pour produire en abondance une énergie décarbonée abordable – le nucléaire étant, avec l’hydraulique, la source d’énergie décarbonée qui exige le moins de matériaux par quantité d’électricité produite : c’est de la physique –, mais aussi pour anticiper la mise à l’arrêt de réacteurs historiques. Nous proposons donc un ambitieux plan en trois phases pour développer d’ici à 2050 de nouveaux réacteurs. Notre capacité de production s’élèverait à 900 TWh d’électricité décarbonée pilotable et abordable, reposant sur des capacités installées de 130 GW, dont 70 GW grâce à de nouvelles infrastructures.

M. Antoine Armand, rapporteur. Notre amendement réécrit l’alinéa 7 pour mettre en correspondance relance nucléaire et capacités industrielles d’EDF, telles que de récents travaux, notamment ceux de RTE, les ont mises en évidence. La référence à la construction d’au moins 10 GW de nouvelles capacités serait maintenue, en précisant qu’elle devra être engagée au plus tard en 2026, date au-delà de laquelle serait lancée la construction de 13 GW supplémentaires sans qu’il soit fait mention de l’échéance de 2030 qui ne paraît pas réaliste. C’est un changement important s’agissant des réacteurs, puisqu’on passerait des 6 + 8 en étude aux 6 + 8 en construction.

M. Jérôme Nury (DR). L’amendement du rapporteur n’offre qu’une faible visibilité aux investisseurs et à la filière, notamment au regard de ses besoins de formation. C’est la raison pour laquelle nous voulons détailler le planning : 10 GW au plus tard en 2026 ; 13 GW en 2035 et une dernière tranche de 4 GW d’ici à 2050, ce qui nous permet de retrouver les 27 GW à l’horizon 2050 mentionnés dans la version initiale de la proposition de loi.

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Monsieur le rapporteur, la crédibilité financière que vous évoquiez est au cœur de notre amendement de repli : compte tenu des retards constatés depuis dix ans, il nous paraît bon de préciser que le lancement du nouveau programme devra correspondre aux capacités industrielles, financières et humaines d’EDF. Il importera aussi que les prix du nouveau mix soient pertinents afin qu’ils soient les plus bas possible pour les consommateurs.

M. Antoine Armand, rapporteur. Monsieur Amblard, votre objectif de production d’ici à 2050, qui suppose la construction d’une cinquantaine de réacteurs, paraît extrêmement ambitieux au regard des capacités d’EDF, qui sont les seules sur lesquelles nous pourrons nous appuyer puisque, conformément à vos votes, chers collègues, cette société aura le monopole de la construction et de l’exploitation des centrales. Je vous demande donc de retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

Monsieur Nury, je suis sensible à vos arguments, mais j’ai un doute sur notre capacité à atteindre l’objectif que vous fixez à partir de 2035 et vous propose d’y revenir en séance. Sagesse, donc.

Madame Battistel, votre amendement évoque la construction de huit réacteurs d’ici à 2050 : cela suppose-t-il que la construction de deux réacteurs viendra s’ajouter à celle des six que la version actuelle du texte prévoit pour 2026 ?

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Nous entendons dès à présent subordonner le lancement du nouveau programme aux capacités d’EDF.

Mme Dominique Voynet (EcoS). Mettons qu’il soit techniquement et financièrement possible de construire quarante-deux centrales nucléaires supplémentaires d’ici à 2050 – hypothèse hasardeuse s’agissant d’installations encore au stade du design – et tirons-en des conclusions, car il faut dire les choses comme elles sont au lieu de donner des leçons de physique nucléaire : à terme, cela nous exposerait de nouveau à l’effet falaise dénoncé par tous. Cette logique de stop and go n’a aucun sens !

M. Maxime Laisney (LFI-NFP). L’objectif fixé par le Rassemblement national est délirant : atteindre 70 GW en vingt-cinq ans alors qu’il nous a fallu quarante ans pour arriver à 63 GW, et cela en s’appuyant sur une technologie coréenne après avoir dépendu d’une technologie américaine, celle de Westinghouse. Élargissons la focale : dans le monde, si l’on met à part la Chine et, dans une moindre mesure, la Russie qui continuent à construire des réacteurs, le nucléaire est à l’arrêt. Le pic de la production se situe vingt ans en arrière : le nucléaire est une énergie du passé. Emmanuel Macron a sans doute oublié que le triplement des capacités nucléaires mondiales, auquel appelait une déclaration commune de la COP28 qu’il a signée, implique un épuisement de l’uranium naturel vers 2060. Votre proposition, monsieur Amblard, se heurte aussi à des limites physiques.

M. Maxime Amblard (RN). Monsieur Laisney, vous démontrez une nouvelle fois votre incapacité à suivre le débat. Notre amendement fait reposer la dernière phase sur des réacteurs de quatrième génération qui permettraient d’exploiter les 350 000 tonnes disponibles d’uranium appauvri, ressource que nous avons déjà réussi à utiliser avec des moyens technologiques et techniques moins avancés.

Une dernière remarque : si je comprends bien, monsieur le rapporteur, votre amendement prévoit un objectif moins ambitieux que celui affiché dans la proposition de loi.

 

La réunion est suspendue de dix-neuf heures vingt à dix-neuf heures trente

 

La commission rejette successivement les amendements ainsi que le sous-amendement.

 

Amendements CE252 de M. Karim Benbrahim et CE135 de M. Jérôme Nury (discussion commune)

M. Karim Benbrahim (SOC). La proposition de loi sénatoriale, en donnant une place exorbitante au nucléaire, écarte les efforts que nous devons consentir pour réduire notre consommation d’énergie et développer les énergies renouvelables. Pour notre part, nous défendons un mix énergétique équilibré, alliant sobriété et efficacité : il s’appuie sur une part de nucléaire pour accompagner la transition vers un essor des énergies renouvelables et anticipe la fermeture des centrales du parc historique. Cet amendement de repli va en ce sens.

M. Jérôme Nury (DR). Nous souhaitons faire des 27 GW de nouvelles capacités non un plafond, mais un plancher, afin d’afficher une ambition forte pour notre politique nucléaire.

M. Antoine Armand, rapporteur. Monsieur Benbrahim, comme pour les autres amendements de votre groupe, je m’interroge sur ce que recouvrent les termes « à l’horizon 2050 » : cela signifie-t-il que la construction des nouveaux réacteurs doit commencer dès maintenant ?

Sur l’amendement de M. Nury, qui affiche une ambition plus forte sans pour autant contraindre, j’émettrai un avis favorable.

M. Karim Benbrahim (SOC). Nous vous avons déjà répondu, monsieur le rapporteur : nous fixons simplement un objectif pour 2050, considérant que la loi n’a pas à déclencher les investissements et à tout définir.

M. Antoine Armand, rapporteur. J’aimerais revenir sur le vote précédent : en rejetant mon amendement CE545, qui proposait une ambition moindre que la version sénatoriale, le groupe LFI a signifié qu’il souhaitait plus de nucléaire d’ici à 2035.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements CE224 de Mme Marie-Noëlle Battistel et CE462 de M. Joël Bruneau (discussion commune)

Mme Marie-Noëlle Battistel (SOC). Les petits réacteurs modulaires utilisés actuellement le sont à des fins militaires, dans les sous-marins ou les porte-avions, et répondent à des exigences de sûreté et de sécurité particulières. Toutefois, dans le domaine civil, il n’existe aucune doctrine d’emploi pour leur future installation : s’agit-il de renforcer les capacités de production du réseau grâce à des chaudières de moindre puissance ou bien d’alimenter de grandes plateformes industrielles ? Il manque aussi une évaluation de leur pertinence économique et industrielle. C’est la raison pour laquelle, dans ce nouvel amendement de repli, nous excluons pour ces SMR toute fixation d’objectifs quantitatifs.

M. Joël Bruneau (LIOT). Nul doute que, parmi la quinzaine de projets de SMR sur lesquels se penchent actuellement plusieurs start-up, certains aboutiront, mais soyons réalistes, ces réacteurs ne pourront être opérationnels d’ici à 2030. Il importe donc de ne pas les mentionner dans l’objectif de construction de nouvelles structures pour 2030.

M. Antoine Armand, rapporteur. Madame Battistel, il me semble que votre amendement aurait dû porter sur la première et non sur la deuxième phrase de l’alinéa 7. Avis défavorable.

Je serai favorable, en revanche, à l’amendement de M. Bruneau. Supprimer cet objectif de construction de SMR de la loi n’empêche nullement les constructeurs de le réaliser. En outre, s’agissant des petits réacteurs, il me semble que nous devons concentrer nos efforts sur le soutien à la construction des réacteurs de quatrième génération, objet de l’un de mes amendements à venir.

La commission adopte l’amendement CE224.

En conséquence, l’amendement CE462 tombe.

 

M. Antoine Armand, rapporteur. Je suis stupéfait de ce qui vient de se passer. Madame Battistel, vous avez défendu un amendement visant à supprimer la mention d’un petit réacteur modulaire. Je vous ai indiqué que la phrase visée par l’amendement n’était pas la bonne. Un sous-amendement n’était pas possible, puisqu’il ne pouvait pas porter sur la phrase appropriée. Malgré cela, en votant l’amendement, nous avons supprimé la mention de la construction de nouvelles capacités nucléaires à l’horizon 2030. Il me semble que le scrutin n’est pas sincère, à moins que votre intention n’ait été de supprimer la phrase relative au nouveau nucléaire – mais ce n’est pas ainsi que vous l’avez présentée.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. Je comprends votre désaccord, monsieur le rapporteur, mais le vote est souverain.

 

Amendement CE31 de M. Joël Bruneau

M. Joël Bruneau (LIOT). Il s’agit d’obtenir, par le biais d’une loi de programmation, des précisions sur le montant prévisionnel des investissements liés aux nouvelles capacités de production d’électricité d’origine nucléaire.

En dépit du précédent de Flamanville, il serait intéressant qu’EDF chiffre le montant de l’investissement global nécessaire pour atteindre les objectifs que nous inscrivons dans le texte.

M. Antoine Armand, rapporteur. Je partage votre préoccupation, mais une loi de programmation ne me semble pas être l’outil idoine. Je vous demande donc le retrait de l’amendement.

M. Joël Bruneau (LIOT). Je le retire, mais une estimation plus précise serait bienvenue.

L’amendement est retiré.

 

Amendement CE253 de M. Karim Benbrahim

M. Karim Benbrahim (SOC). L’adoption de l’amendement de Mme Battistel a permis la suppression de la deuxième phrase de l’alinéa 7, qui prévoyait la construction, à laquelle nous nous opposons, de 23 GW de nouvelles capacités nucléaires.

Cet amendement tend, par cohérence, à supprimer la troisième phrase du même alinéa, qui va encore plus loin en planifiant l’étude de 10 GW de capacités supplémentaires.

M. Antoine Armand, rapporteur. Sans vouloir relancer le débat, l’amendement de Mme Battistel n’a pas été présenté comme vous venez de le faire.

Par votre amendement, vous vous opposez à la simple étude de la construction de nouveaux réacteurs. C’est pour le moins contradictoire de la part de ceux qui ne cessent de réclamer, à raison, une meilleure information sur les coûts et le calendrier.

M. Matthias Tavel (LFI-NFP). C’est votre droit d’être en désaccord avec les votes. En revanche, j’ai relevé, à plusieurs reprises, des remarques particulièrement désobligeantes à l’endroit notamment des collègues de gauche, et ce quel que soit leur avis sur le texte et sur le nucléaire. Il serait bon de revenir à une attitude plus respectueuse à l’égard de l’opposition, à laquelle vous appartiendrez peut-être demain, afin de pouvoir travailler dans des conditions plus sereines.

S’agissant de l’amendement, une étude ne mobilise pas seulement quelques personnes dans un bureau. Elle implique des processus très longs et coûteux – en temps, en énergie, et en deniers publics. Quand on sait le temps qu’il faut à EDF pour chiffrer les six premiers réacteurs électronucléaires de grande puissance, l’étude envisagée sera nécessairement structurante pour l’entreprise. Les forces vives d’EDF seraient mieux employées à autre chose.

Mme la présidente Aurélie Trouvé. J’invite l’ensemble des collègues à se concentrer sur le fond des débats.

M. Antoine Armand, rapporteur. Il me paraît contradictoire de s’opposer à une étude quand on en réclame à chaque amendement.

Mme Julie Laernoes (EcoS). À moins que le discours de Belfort du Président de la République en tienne lieu, aucune loi n’a entériné la relance du programme nucléaire. Cela n’a pas empêché le Gouvernement de lancer plusieurs études sur le sujet.

Le groupe Écologiste est parfaitement cohérent, monsieur le rapporteur, puisqu’il a défendu la suppression de la totalité de l’alinéa 7, puis la deuxième phrase seulement, puis la troisième.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements CE366 de Mme Julie Laernoes et CE209 de M. Maxime Laisney (discussion commune)

Mme Julie Laernoes (EcoS). Pour en finir avec trois mythes et trois choix industriels dépassés, l’amendement vise à supprimer la prolongation des installations de retraitement au-delà de 2040 ; l’objectif de 20 % de combustibles issus de matières recyclées d’ici à 2040 ; la relance des réacteurs à neutrons rapides. Ces options sont non seulement fragiles sur le plan technique, mais aussi totalement délirantes sur le plan financier.

En matière de retraitement, 27 milliards d’euros seraient nécessaires pour prolonger les installations actuelles jusqu’en 2040 et, pour la suite, rien n’est chiffré. Cette stratégie n’a fait l’objet d’aucun débat, alors que tous les autres pays l’ont abandonnée. Même l’ASN a évoqué en 2022 la fin possible de cette exception française. Pourtant, nous continuons par réflexe, additionnant coûts et risques.

Quant au recyclage, c’est une illusion. Le MOx ne s’utilise que dans certaines centrales, ne se recycle qu’une fois et produit des déchets encore plus complexes à gérer.

S’agissant de la relance des réacteurs à neutrons rapides, après le fiasco de Superphénix et l’abandon d’Astrid, pourquoi vouloir injecter des milliards dans une filière instable et non maîtrisée ?

Compte tenu des contraintes budgétaires, il serait préférable de concentrer nos moyens sur des solutions crédibles et utiles à la transition énergétique. Celles que propose le texte ne servent qu’à obérer un débat essentiel : que faire des tonnes de déchets nucléaires que nous ne savons pas traiter et dont nous ignorons les coûts afférents ?

M. Maxime Laisney (LFI-NFP). Il est question ici de retraitement à La Hague, zone la plus nucléarisée au monde, je le rappelle.

M. Macron a décidé seul, dans le secret du Conseil de politique nucléaire, de la construction de nouvelles piscines, qui sera finalement confiée non pas à EDF mais à Orano, sans qu’on en connaisse le coût.

Pourquoi en sommes-nous là ? Parce que les piscines de La Hague arrivent à saturation, laquelle est en partie liée à la difficulté à faire quelque chose du MOx. Selon l’ASNR, il reste neuf mois de fonctionnement du parc nucléaire avant que les piscines ne soient saturées. C’est dire la fragilité du nucléaire sur lequel repose encore l’essentiel de notre production d’électricité.

Le Cotentin a prévu de se mobiliser contre les nouvelles installations à La Hague du 18 au 20 juillet. Je vous y invite.

M. Antoine Armand, rapporteur. Avis défavorable à ces amendements de suppression, qui interdisent de débattre de la rédaction des alinéas.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement CE488 de M. Maxime Amblard

M. Maxime Amblard (RN). Dans la perspective du développement des réacteurs de quatrième génération, il est nécessaire d’augmenter les capacités de retraitement et de valorisation des combustibles usés.

M. Antoine Armand, rapporteur. Je ne suis pas opposé à l’amendement, mais il me semble satisfait par la rédaction actuelle. Sagesse, donc.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE254 de M. Karim Benbrahim

M. Karim Benbrahim (SOC). Il s’agit de remettre en cause l’objectif faisant du retraitement et du recyclage des combustibles usés leur principal mode de gestion. Ce choix technologique incombe à la filière.

M. Antoine Armand, rapporteur. Au nom de la neutralité technologique, je suis favorable à l’amendement.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement CE272 de Mme Anne Stambach-Terrenoir

M. Matthias Tavel (LFI-NFP). Cet amendement de repli vise à exclure l’export de déchets nucléaires.

Notre ligne de conduite doit être de limiter la production de déchets et d’en assurer le traitement dans notre pays, non de les exporter, en particulier les déchets nucléaires dont on connaît la dangerosité.

En outre, le partenariat avec la Russie de M. Poutine et Rosatom pour enrichir l’uranium de retraitement contredit la souveraineté à laquelle nous sommes tous attachés.

M. Antoine Armand, rapporteur. L’amendement n’a pas de sens, puisque la France n’exporte pas de déchets nucléaires, si l’on s’en tient à leur définition. Mon avis est donc défavorable.

M. René Pilato (LFI-NFP). Voici une occasion d’éprouver la cohérence des uns et des autres. Certains ici croient à la transmutation, au recyclage, etc. Je les invite à voter l’amendement.

Mme Louise Morel (Dem). Dans l’esprit de l’amendement, tous les déchets de type nucléaire sont concernés. Puisque vous voulez interdire l’exportation, êtes-vous prêts à allouer des crédits à la construction d’un centre de traitement des déchets en France afin d’assurer notre autonomie dans ce domaine ? Je cherche la cohérence de votre côté.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE215 de M. Maxime Laisney

M. Maxime Laisney (LFI-NFP). Il est proposé de substituer aux mots « retraitement-recyclage » celui de « retraitement ».

Il est un peu osé de parler ici de recyclage : il n’est pas question de papier ou de bouteilles en verre, mais de déchets nucléaires. Ensuite, cette qualification inclut le fameux techno centre de Fessenheim, dans lequel il est envisagé de fabriquer des petites cuillères à partir de déchets nucléaires. Je rappelle qu’il n’existe pas de seuil en deçà duquel l’absence de risque pour la santé humaine est avérée, selon les études épidémiologiques récentes.

L’uranium de retraitement, provenant de La Hague, est obligatoirement envoyé à Rosatom pour être réenrichi puisqu’il n’existe pas d’autres installations capables de le faire dans le monde.

M. Antoine Armand, rapporteur. Le projet de techno centre de Fessenheim concerne des métaux à faible radioactivité, absolument pas des combustibles usés. L’amendement n’est donc pas pertinent.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement CE546 de M. Antoine Armand

M. Antoine Armand, rapporteur. L’amendement vise à supprimer une précision inutile.

La commission adopte l’amendement.

 


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Informations relatives à la commission

M. Gérault Verny a été nommé rapporteur sur la proposition de loi visant à relancer le secteur du logement (n° 1411).

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires économiques

 

Réunion du mardi 3 juin 2025 à 17 h 50

 

Présents. - M. Henri Alfandari, M. Maxime Amblard, M. Antoine Armand, M. Christophe Barthès, Mme Marie-Noëlle Battistel, M. Karim Benbrahim, M. Benoît Biteau, M. Philippe Bolo, M. Jean-Luc Bourgeaux, M. Julien Brugerolles, M. Joël Bruneau, Mme Cyrielle Chatelain, M. Inaki Echaniz, M. Frédéric Falcon, M. Charles Fournier, M. Jean-Luc Fugit, M. Julien Gabarron, Mme Géraldine Grangier, Mme Clémence Guetté, Mme Julie Laernoes, M. Maxime Laisney, Mme Nicole Le Peih, M. Robert Le Bourgeois, M. Pascal Lecamp, M. Guillaume Lepers, M. Eric Liégeon, M. René Lioret, M. Bastien Marchive, Mme Sandra Marsaud, M. Nicolas Meizonnet, Mme Manon Meunier, Mme Louise Morel, Mme Sandrine Nosbé, M. Jérôme Nury, M. René Pilato, M. François Piquemal, M. Dominique Potier, Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, Mme Valérie Rossi, M. Fabrice Roussel, Mme Anne Stambach-Terrenoir, M. Matthias Tavel, M. Lionel Tivoli, Mme Aurélie Trouvé, M. Stéphane Vojetta, Mme Dominique Voynet, M. Frédéric Weber

 

Excusés. - M. Harold Huwart, M. Alexandre Loubet, M. Max Mathiasin, M. Philippe Naillet, M. Joseph Rivière

 

Assistait également à la réunion. - Mme Danielle Brulebois