Compte rendu
Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire
– Audition de M. Jean-Christophe Niel, directeur général de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) 2
Mercredi 2 octobre 2024
Séance de 15 heures
Compte rendu n° 2
Session ordinaire de 2024-2025
Présidence de
Mme Sandrine Le Feur,
Présidente
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La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a auditionné M. Jean-Christophe Niel, directeur général de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN).
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Monsieur le directeur général de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), je vous remercie de vous être rendu disponible rapidement pour cette audition. La semaine dernière, nous avons entendu M. Doroszczuk, président de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Nous souhaitions également vous entendre, avant de nous prononcer, en application de l’article 13 de la Constitution, sur la proposition du Président de la République de nommer M. Pierre-Marie Abadie à la présidence de l’ASN, puis de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).
Nous vous demandons, non pas, évidemment, pas de vous prononcer sur ce point, mais simplement de nous éclairer sur la situation de l’IRSN. L’Institut est-il prêt pour l’entrée en vigueur de la réforme de la gouvernance du contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection ? Quelles sont les principales étapes qui lui restent à franchir avant le 1er janvier ? Quel est l’état du climat social dans l’établissement ? Où en est la préparation du transfert des activités qui ne rejoindront pas l’ASN, mais le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) ?
Nous engagerons prochainement l’examen du projet de loi de finances (PLF). Quelle est votre appréciation de la situation budgétaire de l’IRSN et de ses besoins de financement ?
L’un des objectifs de la réforme est de valoriser davantage l’association de la recherche et de l’expertise, qui font la spécificité de l’IRSN. Votre audition nous offre l’occasion de saluer le bilan de votre institut et de vous entendre sur ses dossiers essentiels, tels que la prolongation de l’exploitation du parc électronucléaire et les projets de petits réacteurs modulaires (SMR).
Enfin, l’adaptation au changement climatique est une préoccupation transversale pour notre commission. Comment la vision stratégique de l’IRSN à long terme prend-elle en compte cette question ?
M. Jean-Christophe Niel, directeur général de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire. La sûreté nucléaire et la radioprotection relevant d’un travail collectif, je suis accompagné de Karine Herviou, directrice générale adjointe de l’IRSN, chargée de la sûreté nucléaire, de Jean-Christophe Gariel, directeur général adjoint en charge de la santé et de l’environnement, de Patrice Deschamps, directeur adjoint de la direction de la stratégie (DST) et d’Emmanuelle Mur, responsable des relations institutionnelles.
Puisque votre commission a été renouvelée et que je n’ai pas eu l’occasion de vous rencontrer tous lors de précédentes auditions, permettez-moi de rappeler que l’essentiel de ma carrière s’est déroulé entre l’ASN et l’IRSN. J’ai été directeur général de la première et, depuis 2016, directeur général de l’IRSN, renouvelé en 2021.
L’IRSN est un établissement public, technique et scientifique, chargé de l’évaluation des risques radiologiques et nucléaires. Il rassemble 1 800 experts et chercheurs, ainsi que toutes les personnes occupant des fonctions support qui leur permettent de faire leur travail correctement. L’IRSN consacre entre 25 % et 30 % de ses moyens à son appui à l’Autorité de sûreté nucléaire, 40 % à la recherche, et le reste à l’appui à un large spectre d’autorités – Autorité de sûreté de défense (ASND), ministères. Nous avons aussi des activités de prestation, dont l’objectif essentiel, outre qu’elles procurent des ressources, est d’aider à maintenir les compétences et les plateformes techniques de l’IRSN. Je considère que le système fonctionne bien et que l’IRSN a bien rempli ses missions, ce dont attestent un certain nombre de rapports, dont celui de la Cour des comptes en 2021 et celui du Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES).
L’objet fondamental de la loi du 21 mai 2024 relative à l’organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection est davantage la prévention de l’accident nucléaire ou radiologique qu’un processus de fusion administrative et budgétaire. C’est ce que mentionne l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) dans son rapport de juillet 2023.
La réorganisation consiste en trois réformes, trois chantiers complexes à mener en 2024 : la création de la nouvelle ASNR, qui rassemblera 1 600 salariés de l’IRSN et 500 fonctionnaires de l’ASN ; le transfert au CEA de la dosimétrie passive, c’est-à-dire du 1,5 million de dosimètres passifs que produit annuellement l’IRSN et qui doivent équiper toutes les personnes susceptibles d’être confrontées à une radiation sur leur lieu de travail ; le transfert de l’expertise de défense de l’IRSN au ministère des armées. Je pourrais ajouter à cette liste le chantier de la clôture de l’IRSN, qui appelle des actions particulières.
L’ASNR sera une structure unique, à plusieurs titres. D’abord, elle sera à la fois une autorité administrative indépendante (AAI) et un organisme de recherche – c’est original et unique au niveau international. L’AAI ne disposera pas de la personnalité morale ; elle rassemblera des agents publics et des salariés de droit privé soumis au code du travail – environ les trois quarts. Son budget comportera une part de 150 millions d’euros dédiée à la main-d’œuvre et une part importante de patrimoine matériel issu des coopérations.
Dans la mise en œuvre de la loi, cinq points me paraissent importants – ils ont d’ailleurs fait l’objet de débats lors des discussions parlementaires : la poursuite des activités de recherche ; la garantie de la capacité à gérer des crises nucléaires et radiologiques ; la séparation, expressément demandée par la loi, de l’expertise et de la décision ; le maintien de l’attractivité pour les recrutements ; la poursuite de l’interaction avec la société civile et la transparence.
Où en sommes-nous ?
Le nouveau cadre réglementaire, qui nécessite des décrets, est en cours d’élaboration. Des discussions sont engagées entre l’IRSN, l’ASN, l’ASND, le CEA, les administrations et les ministères de tutelle pour redéfinir certains modes de fonctionnement. Sept décrets particulièrement importants doivent passer devant le Conseil d’État avant publication d’ici à la fin de l’année. Ils concernent le transfert des droits, biens et obligations de l’IRSN, notamment des contrats sous sa responsabilité, vers l’État ou le CEA ; la mise en place des instances transitoires du dialogue social ; le transfert des activités et des salariés de l’IRSN vers le ministère des armées ou le CEA ; les conditions d’exercice d’activités rémunérées par l’ASNR. Ces projets de décret ont reçu du comité social et économique (CSE) un avis défavorable unanime.
Une vingtaine de groupes de travail ont été formés pour examiner les projets d’organisation et de mode de fonctionnement. Selon les sujets, ils rassemblent des représentants de l’IRSN, de l’ASN, du CEA, du ministère des armées et éventuellement d’autres acteurs. Ils ont vocation à identifier les sujets à traiter, et, le cas échéant, à résoudre les difficultés. Il peut s’agir de l’articulation entre l’expertise, l’instruction et la décision, de la gestion de crise, des systèmes d’information et de gestion, des ressources humaines ou encore de la gestion budgétaire, financière et comptable. Ces questions font l’objet d’interactions avec les instances représentatives du personnel de l’IRSN, de l’ASN et du CEA.
La création de l’ASNR comporte deux enjeux à souligner : la convergence entre l’IRSN et l’ASN, et le calendrier. S’agissant de la convergence, certains sujets, comme la gestion de crise, progressent ; sur d’autres, comme l’organisation entre l’expertise et la décision, la stratégie ou l’ouverture à la société, des divergences demeurent. Celles-ci ne sont pas anormales entre des organismes ayant des missions, des cultures et des histoires différentes ; elles doivent toutefois être arbitrées. Aussi est-il essentiel que le préfigurateur, futur président de l’ASNR, soit nommé pour procéder aux arbitrages relatifs à l’organisation et au fonctionnement de la future Autorité.
Concernant le calendrier, l’IRSN et l’ASN ont procédé à l’identification des actions indispensables à la création de l’ASNR, notamment celles qui doivent absolument être réalisées avant le 1er janvier 2025. Avant cette date, il est indispensable que l’organisation transitoire soit stabilisée, que des préfigurateurs aient été nommés dans chaque direction, afin d’organiser les délégations de signature pour les personnes concernées dans tous les domaines : les finances, pour engager les commandes, valider les services faits et payer les fournisseurs ; la gestion quotidienne des ressources humaines, pour les signatures de contrat de travail, la validation des congés, la paye et les missions ; les questions d’hygiène, de sécurité et d’environnement, qui relèvent du droit pénal ; les activités opérationnelles, comme la signature des avis techniques. Ces éléments, une fois définis, devront être intégrés dans les flux de travail, dits workflows, qui organisent le système d’information et de gestion ; celui de l’IRSN sera conservé de manière transitoire lors de la création de l’ASNR.
Cela représente un travail très important, qui nécessite de définir la gouvernance de l’ASNR extrêmement rapidement – d’ici à la mi-octobre. Pour permettre la paye et le paiement des fournisseurs, il faut assurer la structuration comptable et l’interface technique entre les outils de gestion, Chorus pour celui de l’État et Agora pour celui de l’IRSN. Malgré l’engagement sans faille des équipes de l’IRSN et de l’ASN, des incertitudes demeurent quant à la réalisation de tâches essentielles, ce qui me conduit à m’interroger sur la capacité de l’ASNR à remplir de façon satisfaisante ses missions au 1er janvier 2025.
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous en venons aux interventions des porte‑parole des groupes.
M. Auguste Evrard (RN). Je me réjouis qu’après des années d’égarement, le nucléaire semble enfin redevenu une évidence pour tous, ou presque. Il s’agit d’une bonne nouvelle pour la souveraineté et l’indépendance énergétique de la France. Les députés du groupe Rassemblement national saluent ce retour au bon sens et à la raison. Cependant, nous ne pouvons ignorer les retards accumulés dans cette filière stratégique ni les défis qui se multiplient, cependant que, hormis les déclarations d’intention, certes louables, du Président de la République, nous ne disposons toujours pas de trajectoire claire et précise.
Il est inquiétant que la Commission européenne, dirigée par Mme von der Leyen, a choisi la très notoirement antinucléaire Teresa Ribera pour mener la politique énergétique de l’Union européenne. Une telle décision soulève des interrogations légitimes quant à la cohérence des engagements européens vis-à-vis de l’énergie nucléaire. Nous devons rester vigilants face à ces contradictions, qui pourraient affecter directement les intérêts stratégiques de notre pays.
S’il nous a toujours semblé que la fusion de l’ASN et de l’IRSN assurerait davantage d’efficacité et de cohérence à notre politique nucléaire, notre groupe s’est toutefois inquiété des délais proposés : alors que la fusion est censée être effective au 1er janvier 2025, aucun de ses dix-sept décrets d’application n’a encore été publié – la dissolution et l’incertitude quant à la nomination d’un nouveau gouvernement ont sans doute perturbé la mise en œuvre de cette fusion. La semaine dernière, le président de l’ASN s’est montré rassurant ; partagez-vous le même sentiment ?
Pouvez-vous nous indiquer comment le personnel de l’IRSN, parmi lequel la perspective de la fusion a suscité de nombreuses inquiétudes, vit cette incertitude ? Combien de démissions ont été enregistrées depuis l’adoption de la loi, en avril dernier ? L’augmentation salariale prévue dans le texte a-t-elle permis de freiner les départs vers le secteur privé et de préserver l’expertise scientifique et technique au sein de l’IRSN ?
Concernant la répartition des compétences entre la future ASNR et le CEA, existe‑t‑il, selon vous, le risque que certains domaines d’expertise spécialisés de l’IRSN soient fragilisés dans la nouvelle configuration ? Chacun des services de l’IRSN connaît-il la structure à laquelle il sera rattaché ?
M. Jean-Christophe Niel. Concernant la perception du nucléaire, je vous renvoie au baromètre de l’IRSN, publié chaque année. De nos jours, 63 % des personnes considèrent que la construction de centrales nucléaires est une bonne chose, contre 11 % d’avis négatifs ; 49 % de l’échantillon pensent qu’il faut continuer à en construire, 22 % ayant l’opinion contraire. Il y a trois ou quatre ans, ces chiffres étaient différents.
J’ai indiqué que les décrets sont en cours d’élaboration et doivent passer devant le Conseil d’État.
Les incertitudes s’agissant de la future ASNR sont encore nombreuses. Son organisation, par exemple, n’est pas définie ; le collège de l’ASN est censé la présenter d’ici à la mi-octobre. Le travail est considérable. Quiconque a travaillé sur la fusion de plusieurs collectivités sait la complexité d’une telle réforme. Aussi, je m’interroge sur la capacité de l’ASNR à remplir ses missions de manière satisfaisante. Le risque est élevé d’un fonctionnement en mode dégradé.
Dans toute organisation connaissant une telle transformation, l’inquiétude du personnel est bien légitime. Le CSE de l’IRSN a émis un avis négatif sur la proposition d’organisation faite en juin. Les démissions ont augmenté de 40 % entre 2023 et 2024, mais ces chiffres ont une portée limitée. D’autres paramètres sont plus signifiants. Ainsi, entre 2019 et 2023, le nombre de personnes ayant une année d’ancienneté a doublé, tandis qu’il a diminué parmi les effectifs comptant quinze à dix-neuf ans d’ancienneté. Il s’agit donc d’une bascule du niveau d’expérience qui pourrait poser question pour la nouvelle structure. Autre exemple, 17 % des personnes démissionnaires faisaient partie de la hiérarchie, cette proportion étant moindre les années précédentes. Il y a donc des signes d’inquiétude de la part du personnel.
S’agissant des risques liés aux transferts, des décisions ont déjà été prises concernant la dosimétrie, qui passe au CEA, et les activités d’expertise nucléaire de défense. Il serait prématuré de parler des autres sujets ; il faudra que le système fonctionne pour voir comment il se rééquilibre.
Pour ce qui est du devenir des différents services de l’IRSN, compte tenu de la brièveté des délais, le choix a été fait d’une stabilité des équipes techniques de part et d’autre au 1er janvier ; leur réorganisation interviendra ultérieurement, à la prise de fonction du président de l’ASNR. Pour les activités de support et fonctionnelles, le schéma n’est pas encore défini : il a fait l’objet d’une première proposition sur laquelle le collège de l’ASN travaille et qui devrait être rendue publique à la mi-octobre.
M. Hubert Ott (Dem). Alors que la sûreté nucléaire était jusqu’alors garantie par la dualité et l’indépendance de l’ASN et de l’IRSN, le projet de fusion de ces deux organismes m’a particulièrement frappé. Il me fallait bien en saisir les tenants et les aboutissants car, contrairement à de nombreux grands pays nucléarisés, la France n’a pas à déplorer d’accident nucléaire majeur – même si nous avons frôlé la catastrophe au Blayais, les 26 et 27 décembre 1999. C’est bien là la preuve objective de la pertinence de cette dualité pour assurer efficacement la sûreté nucléaire pour la population française.
J’ai assisté à la plupart des rencontres et des auditions organisées, notamment à l’initiative de notre collègue Gérard Leseul, visant à recueillir l’avis et le sentiment des personnels, ou de leurs représentants, des deux organismes. Les témoignages et les points de vue exprimés relevaient tous d’un sentiment d’inquiétude, de questionnement et d’incompréhension face au projet.
Il est question du risque industriel le plus élevé qui soit dans notre pays. En matière nucléaire, il n’y a aucun droit à l’approximation ou à la moindre absence de rigueur, tant les conséquences d’un accident seraient désastreuses et définitives, pour des milliers d’années.
« Il ne faut jamais sacrifier l’avenir au présent », a dit hier le Premier ministre Michel Barnier, faisant sien un principe énoncé en son temps par Pierre Mendès France. Rappelons simplement que tout combustible nucléaire usé et stocké après sa sortie des réacteurs conserve un risque radiologique pendant de très longues périodes, avec des demi-vies pouvant atteindre 24 000 ans. Depuis l’avènement de l’espèce, y a-t-il une seule civilisation humaine qui ait assuré une continuité de 24 000 ans ? Cela seul permet de douter de la pérennité de la sûreté nucléaire à venir. La dualité entre l’IRSN et l’ASN nous a garanti une sûreté à court terme. Pouvons-nous nous permettre de procéder à leur fusion sans prendre un quelconque risque – selon les personnels de ces deux organismes, il n’est pas négligeable ? Que vous inspire cette fusion au regard de la sécurité des Français ?
M. Jean-Christophe Niel. En tant que directeur général de l’IRSN et anciennement de l’ASN, je suis extrêmement sensible aux enjeux de la sûreté nucléaire, et attaché à sa préservation. Comme toute grande transformation, la phase de transition engendre inévitablement un certain nombre de perturbations ; il faudra être très vigilants quant à son impact sur la sûreté nucléaire. Le rapport de l’Opecst a bien mentionné cette phase de fragilité.
En tout état de cause, dans la réorganisation définie par la loi du 21 mai 2024, un des enjeux est le maintien des activités de recherche. Typiquement, la recherche est un investissement sur l’avenir ; celle d’aujourd’hui représente les bonnes expertises, décisions et sûreté de demain. Il faudra également préserver la capacité à gérer les crises nucléaires et radiologiques, qui est l’alpha et l’oméga de l’IRSN, garantir la séparation entre expertise et décision – un principe reconnu internationalement et l’un des vecteurs de l’efficacité du processus de décision –, conserver l’interaction avec la société civile et la transparence, pour partager les enjeux de sûreté nucléaire avec nos concitoyens.
M. Pierre Cazeneuve (EPR). La création de l’ASNR le 1er janvier 2025 marquera un moment clé pour l’avenir de la politique de sûreté nucléaire en France. Issue de la réforme votée en avril dernier, cette autorité résultera de la fusion de l’ASN et de l’IRSN, rapprochement qui a suscité des interrogations parfaitement légitimes au sein du Parlement, mais aussi dans la société civile et les associations. Le groupe Ensemble pour la République est attaché à l’énergie nucléaire, qui représente encore plus des deux tiers de notre production d’électricité, comme aux énergies renouvelables : un mix équilibré est la clé de voûte de notre souveraineté énergétique.
L’IRSN a un rôle fondamental dans notre système de sûreté. Depuis sa création, il s’est affirmé comme un acteur essentiel en matière d’expertise technique et scientifique, au service de la protection des populations, des travailleurs et de l’environnement. L’ASN, pour sa part, remplit une fonction de régulation et de contrôle. Chacune des deux entités dans son rôle spécifique a contribué à la robustesse de notre modèle de gestion des risques. Ce haut niveau de sûreté est d’ailleurs reconnu par 82 % des Français ; leur confiance est centrale.
Vous l’avez dit, la clé reconnue internationalement est la séparation entre, d’une part, l’activité de recherche et d’expertise, et, d’autre part, la décision sur la sûreté. Comment cette séparation vous semble-t-elle pouvoir être maintenue au sein de la nouvelle entité ?
La France n’est pas le premier pays à avoir amorcé une telle fusion. Disposez-vous de retours d’expériences plus ou moins réussies ? Comment la différenciation des compétences a-t-elle été maintenue ?
Quel rôle voyez-vous pour l’Opecst, qui a joué un rôle précurseur important dans cette réforme, dans les relations de la future entité avec le Parlement ?
Mme Karine Herviou, directrice générale adjointe en charge de la sûreté nucléaire. Malgré un consensus rapide des groupes de travail, créés il y a un an, sur la répartition des responsabilités en matière d’évaluation du risque et prise de décisions au sein de l’ASNR, il reste un désaccord profond sur qui y assurera concrètement chacun de ces volets : c’est une question qui devra être arbitrée.
L’IRSN tient à une distinction claire des personnels, car l’expertise comme la préparation et l’instruction des décisions – qui nécessite de prendre du recul et d’évaluer, au-delà de l’avis de l’expert, les autres enjeux à prendre en compte dans la gestion du risque –, sont des métiers spécifiques, qui requièrent des compétences particulières. Par exemple, en cas de problème de sûreté, c’est à l’autorité de sûreté de décider de la poursuite du fonctionnement d’une installation, en fonction de la position de l’expert, mais aussi des propositions formulées par l’exploitant nucléaire.
Cette répartition fait l’objet de discussions depuis longtemps, et on constate d’ailleurs de nombreuses démissions parmi les personnels se trouvant à l’interface entre ces deux domaines. Aujourd’hui, l’ASN souhaite que les personnels puissent assurer un jour l’expertise, l’autre l’instruction ; les personnels de l’IRSN s’y refusent de manière assez marquée.
M. Jean-Christophe Niel. J’ai déjà eu l’occasion, lors de précédentes auditions, de m’exprimer sur la fusion. Il existe autant de modèles de gouvernance nucléaire que de pays, car chacun compose avec sa taille et son histoire.
Aux États-Unis, la référence en matière de modèle intégré, l’ANRC (American National Riding Commission), qui est l’autorité de sûreté, fonde 15 % à 20 % de ses décisions sur des avis extérieurs – une proportion similaire à celle des avis de l’IRSN. Il y a quelques années, la Belgique a conclu que la fusion n’était pas pertinente dans son cas, et nos collègues Suédois, eux, s’interrogent. Quoi qu’il en soit, une transformation d’une telle ampleur engendre inévitablement des perturbations.
Vous l’avez rappelé, j’ai des échanges réguliers avec votre commission et avec l’Opecst depuis plusieurs années. Je considère que le Parlement a un rôle essentiel à jouer dans la sûreté nucléaire : il faut rendre compte à la représentation nationale de l’ensemble des activités en lien avec la sûreté nucléaire – et c’est d’ailleurs ce que prévoit la loi.
Mme Clémence Guetté (LFI-NFP). Pour La France insoumise, la loi prévoyant la fusion de l’IRSN et de l’ASN au sein de l’ASNR, adoptée l’an dernier, menace directement la sécurité et la transparence en matière de sûreté nucléaire. Le 25 octobre dernier, vous avez confirmé que cette fusion emportait un risque réel que cette expertise soit soumise à la volonté du gouvernement en place – sachant que les gouvernements se succèdent et ont parfois des visions contradictoires s’agissant du mix énergétique. Autrement dit, l’acharnement des gouvernements macronistes à construire des centrales nucléaires l’emporte sur la sécurité.
Ne nous méprenons pas, ce risque n’est pas un impensé de la fusion ; il est, au contraire, parfaitement mesuré et intégré à sa logique. Pour notre part, nous sommes fondamentalement convaincus que l’indépendance de l’expertise de l’IRSN dérange, et qu’elle aurait pu coûter cher aux futurs opérateurs privés. Par exemple, c’est un de ses avis qui a conduit, en 2021, à l’arrêt de la centrale nucléaire de Civaux, après la découverte de fissures liées à un phénomène de corrosion – une mise à l’arrêt qui aurait coûté plus de 30 milliards d’euros.
Nous avons bien compris ce qui est en jeu derrière cette obsession macroniste de la concurrence en tous domaines – y compris celui de l’énergie : la recherche d’une minimisation des coûts engendrés par la nécessaire sécurité nucléaire, et donc sa liquidation, méthodiquement organisée, au profit des grands groupes industriels privés qui lorgnent le marché des nouveaux réacteurs, les petits réacteurs modulaires dits SMR.
La précipitation irresponsable de l’organisation de cette fusion menace très directement tous les agents de l’IRSN. Très inquiète d’un délai jugé bien trop court entre la promulgation de la loi et la création de l’ASNR, qui doit être effective en janvier 2025, l’intersyndicale a alerté dès juillet sur l’absence d’étude d’impact sur les conséquences sociales de cette fusion. Que va-t-il advenir des postes qui seraient menacés par la fusion ?
Le CSE de l’IRSN a, lui aussi, demandé un délai supplémentaire d’un an, plaidant pour reporter la fusion au 1er janvier 2026, mais l’agenda néolibéral des gouvernements successifs d’Emmanuel Macron a mené à cette casse organisée du système de sûreté de nos installations nucléaires, et conduit à brader notre sécurité.
Par ailleurs, les coupes budgétaires à répétition – de nouvelles sont en effet prévues dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) pour 2025 –, ne sont pas sans inquiéter votre homologue de l’ASN, que nous avons entendu la semaine dernière, d’autant qu’elles se font sur le dos des travailleurs de ce secteur.
Vous avez déclaré partager les craintes du CSE et de l’intersyndicale s’agissant du délai imposé pour la réalisation de la fusion. Comment comptez-vous lutter contre les démissions et l’importante rotation des personnels engendrées par le projet de fusion ?
Êtes-vous inquiet des conséquences de la fusion, en particulier la fin de la séparation entre expertise et décision, sur les activités de fond ?
Enfin, vous anticipez un fonctionnement de l’ASNR en mode dégradé en raison des contraintes budgétaires, en particulier celles qui seront imposées dans le cadre du prochain PLF. Pouvez-vous être plus précis ? Ces contraintes sont-elles un obstacle à notre sécurité ?
M. Jean-Christophe Niel. Je rappelle que la décision d’arrêter la centrale de Civaux a été prise par EDF.
Par définition, la fusion est une grande transformation, et ce chantier important aura donc des conséquences pour tous les personnels, mais l’organisation des directions techniques, les « pôles », qui fera l’objet de réflexions ultérieures, restera inchangée au 1er janvier – ceux qui y travaillent continueront d’effectuer le même travail, dans le même bureau, avec le même chef. Seules les 300 personnes travaillant dans les directions fonctionnelles et de support, comme l’informatique ou les ressources humaines (RH), qui assurent des activités tout à fait essentielles, seront donc directement affectées par la réorganisation des directions et des changements de périmètre. Sur ce sujet, des discussions sont en cours, et le collège de l’ASN doit se prononcer sur l’organisation qu’elle souhaite adopter. Comme vous l’a dit M. Doroszczuk, la majorité de ces 300 personnes continuera d’exercer un métier proche, sinon identique, à celui qu’elles exerçaient jusqu’à présent, mais une trentaine de postes pourraient disparaître. C’est le principe des poupées russes.
Par ailleurs, comme l’a dit Karine Herviou, la séparation de l’expertise et de la décision est l’un des enjeux de la nouvelle organisation. Elle est inscrite dans la loi, ce que j’avais relevé à l’époque comme très positif, mais il faudra voir comment elle est appliquée concrètement. À cet égard, le contrôle du Parlement sera important, car ce sera une des manières de s’assurer que le nouveau système remplit correctement ses fonctions.
Des inquiétudes peuvent s’exprimer car trois facteurs se cumulent pour compliquer la situation : la relance du nucléaire, avec tous les défis que cela implique pour l’IRSN – lancement des réacteurs de type EPR et EPR 2 et des SMR, prolongation d’exploitation des centrales, création du centre industriel de stockage géologique (Cigéo) –, la transformation à mener, qui est un objet complexe, et la question budgétaire. Avec Bernard Doroszczuk, nous avons écrit à la direction du budget à ce sujet. D’après des informations récentes, les choses semblent aller dans le bon sens, mais je n’en sais pas suffisamment pour m’aventurer plus avant.
M. Gérard Leseul (SOC). Nous avions combattu la loi du 21 mai 2024, qui a finalement été adoptée à une voix près. La fusion de l’IRSN et de l’ASN pour créer l’ASNR est une réforme d’une telle ampleur et d’une telle complexité qu’il ne nous semble pas réaliste de prétendre la mener en moins de sept mois, et encore moins après vos propos et ceux du président de l’ASN, la semaine dernière. Les nombreuses alertes lancées par les parlementaires à l’occasion de son audition s’ajoutent aux avis défavorables déjà émis par les représentants des personnels de l’IRSN et de l’ASN sur le projet d’organisation et de fonctionnement préparé par le collège de l’ASN.
Le passage par une organisation transitoire limite, dans un premier temps, les évolutions des unités cœur de métier de l’IRSN et de l’ASN, mais ce n’est pas le cas pour les unités fonctionnelles et de support. En effet, le projet prévoit la disparition de certaines unités, dont les missions seront transférées à d’autres, qui seront elles-mêmes fusionnées – le tout sans visibilité sur les conséquences de ce choix.
L’absence de note d’organisation décrivant le fonctionnement envisagé des unités de l’ASNR et des processus de travail auxquels elles contribueront rend impossible toute évaluation de la cohérence d’ensemble du projet. Cette construction doit donc se faire dans l’incertitude, en un temps record et dans un contexte budgétaire particulièrement inquiétant, puisque la direction du budget prévoit de diminuer de 37 millions d’euros la dotation de l’ASNR, qui serait donc insuffisante pour répondre aux besoins – Bernard Doroszczuk nous l’a confirmé.
Selon une analyse effectuée par les directions de l’IRSN et de l’ASN avec l’appui de la société Eurogroup Consulting, la réalisation de treize des actions à mener impérativement avant la fin de l’année pour respecter le calendrier de la fusion est incertaine ; quatre d’entre elles, pour lesquelles le risque est qualifié de critique, sont même compromises. Malgré la mise en place d’une organisation provisoire dans l’objectif de minimiser les risques de défaillance et la confusion entre les missions, le Parlement est donc légitimement très inquiet quant à la capacité de l’ASNR de pouvoir mener à bien ses missions et d’assurer la séparation entre expertise et décision dès le 1er janvier 2025. À soixante jours ouvrés de l’échéance, il nous semblerait plus sage, pour la sûreté et la sécurité nucléaires, et donc la protection de nos concitoyens, de reporter la date de la fusion : selon vous, faut-il la reporter de six ou de douze mois ?
M. Jean-Christophe Niel. Je vous confirme que quatre des actions dites incontournables, dont la réalisation connaît actuellement un risque critique, nécessiteront un important travail – je les ai citées dans mon propos liminaire. Quant à repousser la fusion, je dirai seulement qu’un délai supplémentaire permettrait de travailler plus sereinement.
M. Vincent Descoeur (DR). Jusqu’à présent, la sûreté nucléaire dans notre pays reposait sur la dualité et la complémentarité entre l’ASN, autorité administrative indépendante autorisant la mise en service et la prolongation d’exploitation des réacteurs nucléaires, et l’IRSN, structure chargée de l’expertise visant à éclairer ses décisions. Si notre groupe s’est majoritairement montré favorable à la nouvelle organisation de la gouvernance, nous ne sommes pas pour autant sourds aux inquiétudes réelles qui peuvent s’exprimer.
Vous avez évoqué les nombreuses démissions. Nous comprenons la circonspection des salariés devant la perspective d’intégrer un nouvel organisme. Le Conseil d’État lui-même reconnaissait que l’intégration des missions et des moyens d’un établissement public industriel et commercial (Epic) au sein d’une AAI était l’un des plus grands défis en matière de ressources humaines, puisqu’il s’agit de faire cohabiter des agents de droit public et des salariés de droit privé. Les travaux de concertation sur la fusion ont-ils permis de dégager des pistes rassurantes pour vos salariés qui tiennent, et c’est bien naturel, à l’indépendance que leur confère leur statut ?
Nous serons également attentifs au respect d’une stricte étanchéité entre l’expertise, aujourd’hui assurée par l’IRSN, et la prise de décision, qui relève de l’ASN. Interrogé sur ce sujet crucial, le président de l’ASN nous a renvoyés au futur règlement intérieur de la nouvelle organisation, sans plus de précision. Attachés à notre mission de contrôle, nous aimerions en savoir davantage sur le climat et l’avancement des discussions sur ce règlement, qui conditionnent la possibilité même de tenir les délais fixés par la loi. J’ai d’ailleurs cru comprendre que vous-même doutiez qu’ils puissent être respectés : selon vous, quels seraient des délais raisonnables ?
Compte tenu de la concurrence d’un secteur privé jugé plus rémunérateur, avez-vous obtenu des garanties budgétaires pour assurer l’attractivité des métiers et postes dans la nouvelle entité ?
M. Jean-Christophe Niel. Vous avez utilisé le terme de complémentarité ; il me semble traduire parfaitement le fonctionnement dual actuel, puisque les missions assurées par l’ASN et l’IRSN s’inscrivent dans un continuum d’actions qui va du dépôt de la demande d’autorisation par un opérateur à la décision prise par l’ASN.
S’agissant des conditions matérielles des salariés de l’IRSN, le verre est à moitié plein et à moitié vide : à la suite du vote de la loi, le personnel a effectivement bénéficié d’une augmentation salariale, et il en remercie la représentation nationale, mais malgré tout un écart subsiste, même s’il n’est plus que de 20 %, contre 30 % à 40 % avant l’adoption de la loi. Il me semble que cette période de relance du nucléaire offre des possibilités d’évoluer, malgré l’état des finances publiques.
S’agissant de la nature de l’ASNR, la difficulté de l’exercice, c’est de faire rentrer le pied Epic, structure de type privé, dans la chaussure État. Le statut d’autorité publique indépendante (API) aurait grandement facilité les choses – le Conseil d’État y a fait référence. Dans l’esprit du texte adopté, les salariés de droit privé ont vocation à le rester dans la future structure, car ce statut est plus adapté à la gestion de carrière des profils concernés – experts et chercheurs.
Mme Karine Herviou. Concernant la séparation entre expertise et décision, les difficultés de convergence au sujet de l’organisation cible ont conduit le collège de l’ASN à prendre la décision, saluée par les salariés de l’IRSN, de juxtaposer dans un premier temps les équipes métiers. Celles-ci travaillent ensemble depuis longtemps mais ne se connaissent pas si bien que cela. Elles pourront, durant cette période de découverte et d’acculturation, mieux se connaître, discuter et compléter les travaux en cours. Des efforts sont bel et bien consentis de part et d’autre, mais s’accorder sur la manière d’organiser les activités pour préserver la séparation prendra du temps. La juxtaposition des structures retenue au 1er janvier permettra de ne pas prendre de décision irréversible ou malheureuse, et d’assurer une continuité dans le fonctionnement.
M. Jean-Christophe Niel. Je reviens un instant sur la question des délais, sans pour autant y répondre complètement. Mes gestionnaires m’ont indiqué que clôturer un exercice en cours d’année, que ce soit le 30 juin ou le 15 novembre, était toujours beaucoup plus compliqué que de le faire en fin d’année.
Mme Julie Laernoes (EcoS). À propos de la fusion, le président de l’ASN a déclaré, la semaine dernière : « Je ne crois pas avoir dit que j’étais totalement serein ». Vous-même avez indiqué à plusieurs reprises aujourd’hui que vous doutiez de la capacité de l’ASNR à exercer ses missions de manière satisfaisante. Vos déclarations respectives rejoignent donc les inquiétudes fortes et sincères que nous avons exprimées tout au long de l’examen du projet de loi relatif à l’organisation de la gouvernance de la sûreté nucléaire et de la radioprotection. Comment peut-on jouer avec la sûreté nucléaire dans un des pays les plus nucléarisés au monde ?
Vous avez rappelé les nombreux défis qui attendent les autorités de sûreté : les difficultés de fonctionnement rencontrées au démarrage des EPR, qui augurent mal de la construction de nouveaux EPR 2, et les risques associés au prolongement de la durée de fonctionnement des réacteurs de 900 mégawatts au-delà de quarante ans, qui devait être leur durée maximale d’exploitation. Vous avez certes un plan de charge pour relever ces défis, mais s’y ajoute la gestion de la fusion.
S’agissant des délais dans lesquels celle-ci doit se concrétiser, vous avez dit partager le cri d’alarme du CSE, avançant que disposer de plus de temps permettrait d’y travailler plus sereinement. Vous avez également soulevé les points essentiels de la transparence et de l’ouverture à la société civile, un axe majeur que le collège de l’ASN propose, dans son projet de réorganisation, de confier à une future direction de la communication et des relations publiques. Ni les associations ni vos équipes ne comprennent ce choix qui risque de faire passer l’ouverture à la société pour une simple action de communication à destination du grand public. Partagez-vous ces inquiétudes ? Avez-vous obtenu du collège de l’ASN la garantie que cet axe continuera d’être développé au sein de la future autorité, comme c’est le cas aujourd’hui au sein de l’IRSN ?
Selon les éléments dont il disposait, M. Doroszczuk a jugé alarmantes les prévisions budgétaires pour 2025 en matière de sûreté nucléaire. Compte tenu du coût non négligeable de la fusion et des enjeux majeurs en matière de sûreté nucléaire, ne serait-il pas temps de repousser cette réforme ?
M. Jean-Christophe Niel. L’ouverture à la société est effectivement l’un des points sur lesquels nous avons appelé l’attention du collège de l’ASN. Loin d’être une simple action de communication, c’est avant tout une manière très concrète d’exercer et de coconstruire l’expertise, dans une logique de partage et d’interaction avec nos concitoyens. L’IRSN a publié, il y a déjà une quinzaine d’années, une charte partagée avec des organismes aussi variés que le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer), l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris), l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), Santé publique France (SPF) ou encore l’université Gustave-Eiffel.
Concrètement, nous avons développé des techniques originales pour favoriser les interactions, comme les serious games – des « jeux sérieux » –, qui consistent à confronter des personnes de tous horizons, notamment des associations, au traitement de sujets complexes. Un de ces jeux concernait les déchets dits de haute activité à vie longue, tels ceux ayant vocation à rejoindre le futur site de stockage de Cigéo – s’il voit le jour –, un autre, la gestion de la décontamination suite à un accident nucléaire. Nous avons également développé des outils informatiques en matière de gestion post-accidentelle.
La construction de l’expertise est essentielle, et il est donc important de ne pas prendre le risque de l’amalgamer avec des actions de communication. En tout état de cause, l’ASN se montre très attachée au maintien de cette ouverture à la société.
S’agissant du volet budgétaire, je ne peux que partager l’avis de Bernard Doroszczuk ; nous avons d’ailleurs envoyé un courrier commun à la direction du budget. Il semblerait que les questions budgétaires aient récemment connu une évolution positive, mais les informations dont je dispose restent très parcellaires, et je ne peux donc pas m’avancer davantage.
M. Sylvain Berrios (HOR). Dans son rapport du 11 juillet 2023, l’Opecst indiquait que seulement 400 des 2 000 décisions, soit 20 %, délivrées chaque année par l’ASN dans le cadre du système dual reposaient sur une expertise préalable de l’IRSN. La majorité des avis de l’Institut sont pourtant susceptibles d’entraîner de lourdes conséquences – ce fut le cas de celui rendu sur les phénomènes de corrosion sous contrainte, plutôt prudent mais qui avait conduit à la mise à l’arrêt de plusieurs réacteurs, dont celui de la centrale de Civaux, à l’hiver 2022. En pleine crise énergétique, et alors que la situation internationale rappelait l’importance de la souveraineté énergétique, ces mises à l’arrêt ont fait couler beaucoup d’encre, à tort ou à raison. J’ignore si c’est cet épisode qui a conduit le Gouvernement à décider, début 2023, de fusionner l’ASN et l’IRSN ; quoi qu’il en soit, nul ne peut ignorer l’importance d’agir avec prudence et raison en la matière.
L’expertise est aussi nécessaire que l’indépendance est indispensable pour que les avis rendus soient les plus objectifs possible. Pourtant, l’indépendance que l’IRSN met si souvent en avant reste toute relative, puisqu’il est en réalité placé sous la tutelle de cinq ministères – ceux chargés de l’écologie et de la cohésion des territoires, des armées, de l’énergie, de la recherche et de la santé. À cette situation s’ajoutent les inquiétudes exprimées la semaine dernière par le président de l’ASN au sujet de la baisse de 37 millions d’euros du budget de fonctionnement de l’ASN, soit un quart de son budget.
Dans ce contexte, quelles sont les garanties d’indépendance que vous considérez comme indispensables pour que la nouvelle autorité unique puisse exercer ses missions avec l’efficacité attendue au regard des enjeux, en particulier la construction de quatorze nouveaux réacteurs ?
M. Jean-Christophe Niel. Pour en avoir été le directeur général, je peux vous dire qu’une grande part des 2 000 décisions prises chaque année par l’ASN portent sur des appareils médicaux et ne sauraient être comparées aux 400 qui reposent sur l’expertise préalable de l’IRSN.
Mme Karine Herviou. S’agissant de la corrosion sous contrainte, l’IRSN n’est pas à l’origine de la décision d’arrêt des réacteurs. C’est EDF qui, compte tenu de l’état des connaissances à l’époque, a décidé de mettre à l’arrêt les réacteurs de palier N4 de Civaux pour procéder à des contrôles. La stratégie de contrôle et d’arrêt des réacteurs, et la rapidité d’exécution ont été entièrement endossées par l’ASN, qui dispose d’une équipe chargée de l’expertise des équipements sous pression nucléaire.
L’IRSN est intervenu pour répondre à des questions portant sur la gravité des faits, leurs conséquences et les dispositions visant à limiter les risques pesant sur les réacteurs qui continuaient de fonctionner. Il ne lui appartient pas de décider de l’arrêt des réacteurs. Une fois les réparations effectuées sur les tuyauteries concernées, le délai avant la remise en service de la centrale de Civaux correspondait à la réalisation des dernières modifications nécessaires après un arrêt normal du réacteur. Là encore, aucun avis de l’IRSN n’a conduit à arrêter un réacteur ou à en retarder la remise en service.
M. Jean-Christophe Niel. EDF a agi en exploitant nucléaire responsable, puisque ce type de décision lui revient.
L’indépendance de la future ASNR, qui ne doit pas être un objet administratif désincarné, repose sur son statut juridique et sur plusieurs règles de fonctionnement. Comme la loi le prévoit, les cinq commissaires composant le collège de l’ASNR seront les garants de son indépendance. Leur mandat est non renouvelable et ils ne peuvent recevoir d’injonctions de quiconque, pas même du président de l’instance – qui n’est pas leur responsable hiérarchique.
Outre le statut juridique, plusieurs modes de fonctionnement contribueront à l’indépendance de la structure : la recherche devra vivre librement, parce qu’il est nécessaire de s’appuyer sur un jugement technique solide pour prendre une bonne décision de manière indépendante ; la distinction entre l’expertise et la prise de décision devra être clairement assumée, afin de garantir l’absence de tout biais ; l’attractivité de l’Autorité devra être conservée, afin de disposer de personnels compétents, puisqu’une structure incapable d’attirer des collaborateurs de bon niveau s’affaiblirait nécessairement ; enfin, l’ASNR devra rendre des comptes au Parlement tout en interagissant avec la société.
Mme Constance de Pélichy (LIOT). La question de la fusion entre l’IRSN et l’ASN reste très sensible pour les députés. Nous pouvons nous réjouir de l’exemplarité de la France en matière de sûreté nucléaire, dont les enjeux sont parmi les plus importants au monde. Notre système dual, ou complémentaire, a jusqu’à présent entièrement fait ses preuves en matière de résultats.
Les liens que l’IRSN entretient avec la société civile sont notoirement reconnus et nous sommes attachés à voir l’ASNR les faire perdurer. Ils participent pleinement à la confiance de nos compatriotes dans l’énergie nucléaire. Avez-vous connaissance de la manière dont ces liens pourraient être entretenus par la nouvelle Autorité ? Leur rattachement à la direction de la communication suscite des inquiétudes.
Après l’accident nucléaire de Fukushima, l’industrie nucléaire a connu une période de crise. L’amélioration des processus et, surtout, la crise énergétique qui a suivi l’invasion de l’Ukraine par la Russie ont relancé le débat sur le développement de l’énergie nucléaire. Beaucoup s’accordent à dire que seule cette dernière peut nous permettre de relever le double défi consistant à assurer notre souveraineté énergétique et à développer une énergie décarbonée. Néanmoins, après vingt ans sans construire de centrale et compte tenu du désamour qu’a connu le nucléaire, nous traversons une réelle crise des savoir-faire. Développer notre parc ne pourra se faire sans les moyens humains nécessaires : le besoin d’efficacité est donc plus important que jamais. Nous nous interrogeons tout particulièrement sur l’intérêt de fusionner nos institutions à ce moment clé, ce qui risque de désorganiser la filière et de lui faire perdre en efficacité et donc en sûreté. Ce pari de simplification risque-t-il de freiner la relance de cette filière ?
Pour justifier la réforme, le Gouvernement avance un nombre accru de missions d’expertise. Un renforcement des effectifs n’aurait-il pas suffi à faire face à la surcharge de travail due à la relance du nucléaire ? À l’inverse, manquons-nous de toute façon de personnels formés ? L’ASNR nous permettra-t-elle de gagner en efficacité, notamment dans l’instruction de différents projets ? Malgré les démissions en cascade que vous avez mentionnées, l’attractivité des métiers est-elle suffisante ? De quels leviers disposons-nous pour l’améliorer ?
La fusion aura-t-elle un impact sur la qualité de la recherche menée dans le secteur du nucléaire ? Comment assurer une recherche de qualité ? Enfin, savez-vous s’il est prévu de faire évoluer les règles de sûreté nucléaire dans le cadre de cette fusion ?
M. Jean-Christophe Niel. J’ai déjà évoqué des outils visant à interagir avec la société civile ; il existe une véritable ingénierie en matière d’ouverture à la société, reposant sur la coconstruction. L’expérience de l’IRSN en la matière lui a permis d’évoluer et de prendre en considération des enjeux qui ne l’étaient pas auparavant. En tout état de cause, il faut faire preuve d’imagination dans le choix de ces outils ; j’ai déjà évoqué les serious games, un logiciel de simulation d’accident grave, etc.
La fusion va-t-elle ralentir la relance ? Le rapport de l’Opecst le relève, une opération de ce type entraîne une désorganisation, qui n’est pas forcément propice à l’efficacité du travail, d’autant que certaines améliorations auraient pu être apportées indépendamment de ce chantier. Ainsi, l’ASN et l’IRSN ont récemment mené un exercice commun de gestion de crise autour d’un centre unique, alors que deux centres distincts préexistaient ; un second exercice est prévu la semaine prochaine. Cette réflexion, comme sa mise en œuvre, aurait pu être menée à bien sans la perspective de la fusion.
La recherche implique des doctorants, des post-doctorants, des chercheurs, des installations, des partenariats et des collaborations. L’un des enjeux de la nouvelle organisation est la capacité de la maintenir sous tous ces aspects, avec de l’attractivité pour les doctorants et les chercheurs et des installations de recherche performantes. Celles de l’IRSN sont reconnues au niveau international ; elles l’ont encore été la semaine dernière, à l’occasion d’un atelier de recherche sur les accidents graves qui se tenait à Chicago.
Quant à l’avenir des partenariats, qui sont très importants, je tiens à vous rassurer comme j’ai rassuré les nombreux organismes concernés : le processus de transfert des biens, droits et obligations est engagé. La poursuite des partenariats n’en demeure pas moins l’un des principaux enjeux de la nouvelle organisation.
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous en venons aux questions des autres députés.
M. David Magnier (RN). La fusion entre l’IRSN et l’ASN suscite des inquiétudes quant à la capacité de la future ASNR à garantir une indépendance scientifique. Jusqu’à présent, l’IRSN émettait des avis critiques avant que l’ASN ne prenne ses décisions.
Des alertes ont été lancées lors de l’audition de M. Bernard Doroszczuk. Celles qui ont été lancées par les personnels de l’IRSN et de l’ASN concernent l’absence d’une organisation claire et la suppression de certaines unités essentielles. Une analyse d’Eurogroup Consulting a également révélé que treize actions présentant des risques importants sont incertaines, alors que quatre autres, présentant des risques critiques, sont compromises, mettant en doute la capacité de l’ASNR à être opérationnelle au 1er janvier 2025.
Dans ces conditions, comment garantir que l’indépendance scientifique ne sera pas compromise et que les évaluations techniques seront préservées de toute influence politique ou économique ? Avec un budget réduit de 37 millions, comment assurer le financement des missions critiques de sûreté et de radioprotection ? Afin d’éviter les risques de défaillance dès le 1er janvier 2025, un report de la fusion est-il envisagé ?
Mme Julie Laernoes (EcoS). Que retenez-vous de votre mandat à la tête de l’IRSN, qui s’arrête prématurément ? Quels en sont les points forts et quels sont vos regrets ? Qu’auriez-vous pu mener à bien si votre mandat avait été à son terme ?
Comment la fusion est-elle perçue au niveau international, où l’IRSN occupait une place notable et bénéficiait d’une solide reconnaissance ? Vous avez indiqué que des inquiétudes avaient été exprimées.
Enfin, quels conseils pourriez-vous donner à celui ou celle qui prendra la tête de la nouvelle autorité ?
Mme Danielle Brulebois (EPR). Tout d’abord, permettez-moi de vous remercier tous les trois pour tout ce que vous avez fait jusqu’à maintenant, ainsi que pour vos publications qui nous informent parfaitement. J’espère que cet effort de communication sera poursuivi par la nouvelle entité.
S’agissant des SMR, ces petits réacteurs modulaires à faible puissance qui fleurissent un peu partout – certains étant même exploités par des start-up –, pouvez-vous nous dire quelles sont les exigences en matière de sûreté et de sécurité ?
M. Jean-Christophe Niel. Monsieur Magnier, l’indépendance ne se déclame pas, elle se pratique. Pour ce faire, des moyens sont nécessaires : un budget, des gens compétents, une organisation structurée prévoyant des activités de recherche et une séparation ente l’expertise et la prise de décision. Nous devrons nous assurer de la permanence de ces moyens. À cet égard, votre commission et l’Opecst ont un rôle essentiel à jouer.
Vous avez raison, madame Laernoes, mon mandat, associé à l’existence de l’IRSN, prendra fin le 31 décembre 2024. Ce ne sont pas tant mes actions qui importent que celles de l’Institut, qui est un collectif : c’est d’ailleurs ce qui fait sa force. Permettez-moi d’en profiter pour saluer les femmes et les hommes qui le composent, pour les remercier de leur travail.
Objectivement, l’IRSN a bien travaillé. C’est ce qu’en disent les nombreuses entités qui l’observent : un conseil d’administration, un comité financier, la Cour des comptes, le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur et plusieurs inspections générales. L’Institut est également certifié et accrédité. Ces observateurs internes et externes ne constituent pas des contraintes, bien au contraire : ils nous permettent de travailler correctement.
Parmi les points forts de l’IRSN, je mentionnerai en premier lieu son professionnalisme. L’institut a prouvé sa capacité de se mobiliser lors des grands rendez-vous, tels que le développement des EPR, la progression de l’exploitation, la corrosion sous contrainte et le développement de Cigéo, sans même parler des situations de crise, qui sont relativement fréquentes – un incendie dans une centrale, par exemple. Il mène également des actions dans le domaine médical : il a ainsi été récemment saisi par l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) d’une demande relative à la protonthérapie.
Deuxièmement, nous avons beaucoup œuvré à l’amélioration du pilotage. Bien que l’on puisse toujours faire mieux en matière d’efficacité du système, nous avons amélioré la rationalisation et l’efficacité du processus, notamment grâce à Mme Karine Herviou et M. Jean‑Christophe Gariel, tant pour la recherche que pour l’expertise ou les fonctions support. À cet égard, je tiens à souligner la qualité du dialogue social, qui est un vecteur d’amélioration du pilotage de l’Institut, comme l’a remarqué la Cour des comptes.
Troisièmement, l’IRSN a réussi à s’imposer comme leader de la recherche européenne, en matière de sûreté comme de radioprotection. Ainsi, l’IRSN, en la personne de Jean-Christophe Gariel, pilote le programme Pianoforte à travers lequel la Commission européenne délègue à un groupement de 150 organisations la gestion des budgets de recherche. En outre, dans une démarche stratégique, l’IRSN a lancé il y a trente ans un code d’accident grave, devenu le code de référence européen et international.
Quatrièmement, l’IRSN a renforcé son rôle dans l’anticipation et la gestion de crise. Ainsi, dans le cadre des Jeux olympiques et paralympiques, nous avons vérifié la conformité de 15 000 logements destinés aux athlètes avant leur transmission au Comité international olympique, en partenariat avec le ministère de l’intérieur et le CEA. Avec la direction générale de la santé, après avoir procédé à des tests, nous avons remporté l’appel à projet pour conduire la mission Rescue : il s’agit, en cas d’accident dans une centrale nucléaire à l’étranger, de mettre à disposition 50 000 dosimètres dans un aéroport français et dans un délai de douze heures. Enfin, l’IRSN a signé il y a dix jours un accord sur la gestion de crise avec l’Ukraine et l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), ce qui témoigne de la qualité des relations des deux instances.
Cinquièmement, l’interaction avec les citoyens représente l’une des plus-values de l’Institut et doit être poursuivie.
Quant à mes regrets, ils portent sur le plan stratégique que nous étions en train d’élaborer et qui a été interrompu. Au moment où la fusion a été décidée, nous étions engagés, avec nos autorités de tutelle, dans un travail d’optimisation de notre fonctionnement et de nos priorités. Différents projets, comme la création d’un centre de crise commun avec l’ASN, auraient probablement vu le jour à l’issue de cette réflexion.
Les acteurs français du nucléaire bénéficient d’une reconnaissance internationale, qui résulte de la taille de notre parc. L’IRSN occupe toutefois une place singulière, unique au monde, en raison de sa taille et du choix, fait en 2001, de regrouper en un même organisme toutes les composantes de l’évaluation des risques. Ainsi, en Allemagne, j’ai deux interlocuteurs distincts pour parler de la sûreté et de la radioprotection. En matière de recherche, l’IRSN fait également l’objet d’une reconnaissance particulière, notamment de la part de nos interlocuteurs américains.
Si j’avais des conseils à donner au futur dirigeant de l’ASNR, ce serait de garantir la séparation entre l’expertise et la recherche, poursuivre une recherche de qualité, continuer à ouvrir l’institution à la société civile de manière innovante et maintenir l’attractivité des métiers.
Avant de laisser la parole à Karine Herviou, je vous remercie pour votre invitation ; nous restons à votre disposition pour évoquer tout sujet relevant du champ de nos missions.
Mme Karine Herviou. Madame Brulebois, nous sommes impliqués depuis une dizaine d’années dans les échanges internationaux portant sur les SMR. De nombreux travaux sont en cours, en coordination étroite avec l’ASN, pour définir les objectifs de sûreté les concernant. L’IRSN et l’ASN ont insisté sur la nécessité d’aller au-delà de ce qui est en vigueur pour les gros réacteurs. En effet, en raison de leur plus faible puissance, les SMR seront potentiellement implantés à proximité de la population ou sur des sites industriels.
Dans le cadre de nos interactions avec de nombreuses start-up, nous avons défini un processus d’instruction et d’expertise plus agile, afin de répondre à leurs besoins. Cela implique de nombreux investissements de la part de l’ASN et de l’IRSN, qui semblent être efficaces. Nous avons commencé à instruire des dossiers d’autorisation de création de petits réacteurs et de nombreux dossiers d’option de sûreté devraient être soumis au cours des prochains mois.
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Madame, messieurs, nous vous remercions.
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Membres présents ou excusés
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
Réunion du mercredi 2 octobre 2024 à 15 heures
Présents. - M. Christophe Barthès, M. Fabrice Barusseau, M. Sylvain Berrios, M. Nicolas Bonnet, M. Jean-Yves Bony, Mme Manon Bouquin, Mme Danielle Brulebois, M. Pierre Cazeneuve, M. Bérenger Cernon, M. Marc Chavent, M. Mickaël Cosson, M. Vincent Descoeur, M. Peio Dufau, M. Aurélien Dutremble, M. Romain Eskenazi, M. Auguste Evrard, M. Denis Fégné, Mme Clémence Guetté, M. Julien Guibert, M. Sébastien Humbert, Mme Julie Lechanteux, M. Gérard Leseul, M. David Magnier, M. Marcellin Nadeau, M. Hubert Ott, Mme Julie Ozenne, Mme Constance de Pélichy, M. Fabrice Roussel, Mme Anaïs Sabatini
Excusés. - M. Jean-Marie Fiévet, Mme Sandrine Josso, Mme Christelle Petex, Mme Ersilia Soudais, M. Matthias Tavel
Assistaient également à la réunion. - Mme Julie Laernoes, M. Vincent Thiébaut