Compte rendu

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

 Suite de l’examen pour avis des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du projet de loi de finances pour 2025 (n° 324) :

. Transports terrestres et fluviaux (Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis) 2

. Affaires maritimes (M. Jimmy Pahun, rapporteur pour avis).......2

. Transports aériens ; budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (M. Romain Eskenazi, rapporteur pour avis) 2


Mardi 22 octobre 2024

Séance de 21 heures 30

Compte rendu n° 7

Session ordinaire de 2024-2025

Présidence de

Mme Sandrine Le Feur,

Présidente

 


  1 

La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a poursuivi l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du projet de loi de finances pour 2025 (n° 324) sur les rapports pour avis de Mme Danielle Brulebois sur les crédits relatifs aux transports terrestres et fluviaux, de M. Jimmy Pahun sur les crédits relatifs aux affaires maritimes et de M. Romain Eskenazi sur les crédits relatifs aux transports aériens et ceux du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».

Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous abordons l’examen des amendements se rapportant aux crédits des transports.

 

Article 42 et état B : Crédits du budget général

 

Amendement II-CD71 de M. Loïc Prud’homme

Mme Ersilia Soudais (LFI-NFP). Nous nous opposons au développement de nouvelles lignes ferroviaires à grande vitesse car il se fait au détriment des lignes du quotidien.

Le grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO), qui consiste à créer deux nouvelles lignes à grande vitesse (LGV) ainsi que des aménagements ferroviaires au nord de Toulouse et au sud de Bordeaux, en est la parfaite illustration. Les crédits déjà alloués à ce projet doivent plutôt être affectés au financement de la rénovation des lignes des trains express régionaux (TER) de Nouvelle-Aquitaine et d’Occitanie et du chantier de modernisation de la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (Polt).

Le GPSO, auquel s’opposent la majorité des élus locaux et les associations du territoire, est, en outre, une aberration écologique : il impliquerait l’artificialisation de milliers d’hectares de terres agricoles, entraînerait la pollution des sols et des eaux et provoquerait, à terme, des nuisances acoustiques majeures.

L’urgence est d’investir massivement dans les trains du quotidien, locaux et populaires, en développant le réseau local, en rénovant les petites lignes et en augmentant significativement la fréquence des TER grâce à des moyens matériels et humains plus importants.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis (Transports terrestres et fluviaux). Nous pourrions débattre de l’impact environnemental du GPSO, mais un tel débat excéderait le cadre de la discussion budgétaire. Je précise néanmoins que ce projet sera utile au développement des services express régionaux métropolitains (Serm) de Bordeaux, de Toulouse et de Montauban ainsi qu’au développement du fret.

En tout état de cause, nous ne pouvons pas modifier en loi de finances les fonds de concours de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afit).

Avis défavorable.

M. Peio Dufau (SOC). En tant que cheminot et élu du sud-ouest, je suis concerné à un double titre par le GPSO. Il est d’autant plus absurde de construire une voie ferroviaire parallèle à une voie existante que l’argent manque pour entretenir cette dernière et qu’en définitive, moins de trains circuleront sur ces deux voies que sur la voie actuelle.

Par ailleurs, je doute que les transports pendulaires entre le sud-ouest et Paris soient la priorité des gens. Ils préféreraient qu’on développe des transports en commun efficaces pour leur permettre de se rendre au travail, qu’il s’agisse des services express régionaux métropolitains ou des bus, par exemple. Bref, le GPSO est un projet d’un autre temps : non seulement il est inepte d’un point de vue technique, mais il ne va pas dans le sens de l’histoire. Quel est l’intérêt de gagner vingt minutes lors d’un trajet entre Toulouse et Paris ?

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-CD69 de M. Sylvain Carrière, II-CD7 et II-CD85 de M. Peio Dufau (discussion commune)

M. Sylvain Carrière (LFI-NFP). Il s’agit d’engager un véritable plan de relance du transport ferroviaire des passagers et des marchandises. En effet, sept années de présidence Macron ont fait dérailler ce fleuron français et les annonces faites en ce domaine ne sont pas suivies d’effet. À preuve, l’amendement de 3 milliards adopté lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2024 a finalement été balayé par le 49.3.

Les lignes à grande vitesse captent l’écrasante majorité des financements, au détriment des petites lignes du quotidien – utiles à l’ensemble des Français, en particulier aux ruraux, mais aussi au fret –, qu’on abandonne au bénéfice des camions, toujours plus gros et plus polluants.

Nous proposons donc d’abonder de 3 milliards d’euros un fonds d’investissement pour la relance du transport ferroviaire et d’amorcer enfin la bifurcation écologique des transports du quotidien.

M. Peio Dufau (SOC). L’amendement II-CD7 vise à traduire dans le projet de loi de finances l’annonce par Élisabeth Borne d’un plan de 100 milliards d’euros destiné à financer la rénovation des voies ferroviaires existantes. À cette fin, nous proposons de créer une nouvelle ligne budgétaire et de lui allouer 1,2 milliard d’euros. Ces crédits sont en effets nécessaires pour relancer le fret, régénérer le réseau, maintenir les petites lignes, résorber les nœuds ferroviaires et développer les trains de nuit. Quant à l’amendement II-CD85, il est de repli.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Vous proposez de renforcer de façon significative les crédits alloués au développement, à la régénération et à la modernisation du secteur ferroviaire, en dénonçant le désengagement de l’État. Or son engagement en ce domaine est historique, puisque la nouvelle donne ferroviaire reste la feuille d’action du Gouvernement.

D’une part, SNCF Réseau investit, depuis 2021, grâce au soutien financier de l’État, près de 2,8 milliards pour la régénération du réseau, soit un effort sans précédent. D’autre part, le groupe SNCF versera, sur la période 2024-2027, 2,3 milliards supplémentaires par le biais du mécanisme de fonds de concours alimenté par les dividendes que le groupe verse à l’État. Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit ainsi une nouvelle hausse de ce fonds de concours de 300 millions, après une hausse similaire en 2024. Ces augmentations sont justifiées par les 8 milliards de bénéfices réalisés par la SNCF, grâce à l’engagement historique de l’État, qui a repris sa dette à hauteur de 25 milliards en 2020 et de 10 milliards en 2022.

Je conviens néanmoins qu’il est désormais urgent de formaliser l’ensemble des modalités de financement des engagements pris par le gouvernement précédent. À cet égard, l’actualisation du contrat de performance de SNCF Réseau doit permettre d’acter et de préciser la trajectoire de l’effort de régénération et de modernisation du réseau pour les années à venir. Avis défavorable sur les trois amendements.

M. Peio Dufau (SOC). La dette que l’État a reprise à la SNCF était constituée, d’une part, de celle des anciennes entreprises ferroviaires privées – Compagnie des chemins de fer du Midi et autres –, transférées à l’opérateur unique lors de sa création, et, d’autre part, de celle que l’entreprise a contractée dans les années 1980, lorsque l’État lui a commandé la construction de dizaines de LGV qu’il n’a jamais payées. Il s’agissait donc bien, en fait, d’une dette de l’État. Certes – et c’est un acte fort –, les dividendes que le groupe lui verse contribuent à rénover le réseau. Mais l’État n’alloue pas un euro à la SNCF dans le projet de budget, de sorte que l’on n’atteint pas l’objectif fixé dans le plan présenté par Mme Borne.

Tout le monde en convient : le ferroviaire, c’est l’avenir. Or, si l’on ne maintient pas le réseau en état de fonctionnement, on tuera l’outil. Il faut, pour cela, 3 milliards par an. La SNCF prend en charge la moitié de cette dépense ; à l’État de financer l’autre moitié.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Il est vrai que l’État ne donne pas d’argent à la SNCF, mais il pourrait engranger les dividendes qu’elle lui verse.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement II-CD80 de M. Sylvain Carrière

M. Bérenger Cernon. Nous proposons de soutenir la modernisation du réseau en investissant 1,5 milliard d’euros supplémentaires, notamment en faveur des petites lignes du quotidien.

Si le Gouvernement avait tenu les engagements qu’il prend depuis sept ans, nous n’en serions pas là. En 2024, la France est toujours engagée dans le tout voiture. Le réseau ferroviaire national est vieillissant, en particulier les petites lignes, dont l’état est même jugé préoccupant. L’an dernier, l’Autorité de régulation des transports a constaté que l’offre ferroviaire était en baisse alors que la fréquentation des trains continue à augmenter.

Dans le même temps, le Gouvernement fait le choix de favoriser les grands projets d’infrastructures, comme les lignes à grande vitesse ou des projets d’autoroutes inutiles. Pourtant, nos territoires attendent des investissements dans les petites lignes qui desservent les villes et les villages et garantissent un accès équitable à une mobilité propre. Les routes continuent de s’étendre quand notre réseau ferroviaire se réduit année après année.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je partage votre préoccupation pour les petites lignes. Du reste, depuis 2020, le Gouvernement a engagé avec les régions un plan de remise à niveau des lignes de desserte fine du territoire afin de pérenniser les services publics de transport qu’elles assument, notamment dans les zones rurales et périurbaines. Les crédits affectés par l’État dans le cadre des contrats de plan État-région (CPER) témoignent de l’attention particulière qui leur est portée. Ainsi, au cours de la période 2020-2022, il y a investi plus de 550 millions d’euros – soit un triplement de ses financements par rapport à la période précédente – sur un investissement total, tous financeurs confondus, de l’ordre de 1,5 milliard.

Cet effort se poursuit dans le cadre du volet mobilité des CPER 2023-2027. En effet, les protocoles entre l’État et les régions prévoient, pour les petites lignes, un investissement, tous financeurs confondus, de 2,6 milliards, dont 780 millions apportés par l’Afit au titre de la participation de l’État – 104 millions ont déjà été alloués en 2023 et 147 millions sont programmés en 2024.

Pour ces différentes raisons, votre amendement me semble en grande partie satisfait.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD82 de M. Peio Dufau

M. Peio Dufau (SOC). Nous proposons d’allouer 800 millions d’euros à un fonds de soutien aux régions afin d’accompagner les initiatives territoriales dans le cadre d’un moratoire sur la fermeture des petites lignes ferroviaires. Tout le monde s’accorde sur un tel moratoire, mais comme on se satisfait de résultats insatisfaisants…

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Même avis que sur l’amendement précédent.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-CD53 de Mme Marie Pochon et II-CD72 de M. Sylvain Carrière (discussion commune)

Mme Marie Pochon (EcoS). Il s’agit d’investir 1,5 milliard d’euros dans la construction d’un parc de matériel roulant de nuit afin de déployer, d’ici à 2030, un véritable réseau de trains de nuit en France et vers l’Europe.

Dans son rapport sur les trains d’équilibre du territoire (TET) publié en mai 2021, le Gouvernement juge nécessaire, pour relancer l’attractivité des trains de nuit, d’acquérir 600 voitures et 60 locomotives, soit un investissement total de 1,5 milliard. Un tel investissement permettrait, par ailleurs, de réduire les émissions de gaz à effet de serre et la consommation énergétique, de diminuer le coût du voyage pour les passagers – en leur évitant d’avoir à payer une nuit d’hôtel –, d’éviter la construction de nouvelles lignes en exploitant celles qui existent, de créer 130 000 emplois et, surtout, de garantir le droit à la mobilité, consacré par la loi 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités (LOM), en particulier des habitants des territoires les plus enclavés.

M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). Depuis 2022, malgré l’annonce ambitieuse d’un investissement de 100 milliards dans le transport ferroviaire, aucune avancée concrète n’a permis de remédier à la pénurie de matériels roulants, lesquels sont pourtant indispensables à la structuration d’un réseau national de trains d’ici à 2030. Or, sans investissements suffisants et immédiats, nous compromettons nos chances d’atteindre cet objectif.

La modernisation et l’extension du parc de trains de nuit sont un enjeu crucial pour le développement des mobilités durables et la réduction de nos émissions de gaz à effet de serre liées aux déplacements. Elles permettraient également de créer, en France, une véritable filière industrielle capable de répondre aux besoins en créant de l’emploi.

Si, en cas d’adoption de l’amendement, le Gouvernement lève le gage, il fera le choix fort et ambitieux de la transition énergétique et écologique. Ce n’est qu’une affaire de choix : quel monde désirons-nous ?

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Tout d’abord, le bilan de ces dernières années est très positif : plusieurs lignes ont été remises en service, dont Paris-Nice et Paris-Lourdes depuis 2021. La ligne Paris-Tarbes a été prolongée jusqu’à Hendaye à l’été 2022, et deux autres lignes devraient être mises en service en 2023 : Paris-Aurillac et Paris‑Berlin.

Ensuite, 129 voitures de nuit ont été rénovées – pour un investissement total de 91 millions d’euros intégralement financé par l’État – et plusieurs aménagements ont été réalisés dans les principales gares accueillant les voyageurs de trains de nuit, notamment Paris-Austerlitz, Toulouse et Marseille.

La demande est extrêmement dynamique puisque 770 000 voyageurs ont opté pour le voyage de nuit en 2023, soit une hausse de fréquentation de 10 % par rapport à l’année précédente. Et l’année 2024 s’annonce exceptionnelle puisque les trains de nuit ont transporté 444 000 voyageurs au premier semestre, soit une augmentation de 45 %.

Enfin, le renouvellement du matériel roulant des trains de nuit se poursuivra en 2025 et il sera fait appel à un loueur, à l’issue d’une procédure de mise en concurrence qui sera lancée dans les prochains mois.

Avis défavorable.

M. Peio Dufau (SOC). Il s’agit, non pas de rénover des wagons obsolètes, mais de réfléchir à la production de nouveaux matériels, dont le délai avoisine une décennie. La fréquentation des trains de nuit est effectivement un succès. C’est précisément la raison pour laquelle 600 wagons-lits et 60 locomotives sont nécessaires. On ne peut pas se contenter de rénover d’anciens véhicules obsolètes, dans lesquels – je peux en témoigner – il n’est même pas possible de brancher un chargeur de téléphone.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. On ne produit pas 600 voitures du jour au lendemain : les 115 rames de TGV qui devaient être livrées en 2025 ne seront pas disponibles en temps voulu car Alstom a beaucoup de mal à les fabriquer. Il est donc inutile de prévoir des crédits supplémentaires.

M. Peio Dufau (SOC). Pour préparer l’avenir, il faut commander le matériel dès maintenant. Plus tôt il sera commandé, plus vite il sera livré. C’est du bon sens !

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement II-CD86 de M. Peio Dufau

M. Peio Dufau (SOC). Il s’agit d’allouer 150 millions d’euros à l’achat de trains de nuit.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que celles exposées à propos de l’amendement II-CD53.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendements II-CD163 de M. Fabrice Roussel et II-CD78 de M. Sylvain Carrière (discussion commune).

M. Fabrice Roussel (SOC). L’amendement II-CD63 vise à créer un fonds de financement des services express régionaux métropolitains abondé de 1 milliard d’euros, afin d’appliquer concrètement la loi du 27 décembre 2023 relative auxdits services express. Une conférence des financements a d’ailleurs été annoncée tout à l’heure, et il m’a semblé percevoir un appel à l’aide du ministre des transports.

De fait, les Serm sont à peine mentionnés dans la présentation de la sous-action Infrastructures ferroviaires du projet annuel de performance. Il est néanmoins indiqué que la prévision de fonds de concours Afit s’élève, pour 2025, à 300 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et à 350 millions d’euros en crédits de paiement (CP) – contre respectivement 673 millions et 398 millions dans la loi de finances pour 2024 –, que les opérations prévues en 2025 intègrent la montée en puissance des services express régionaux métropolitains et que le label de Serm a été attribué à vingt-quatre projets, après examen d’un premier dossier.

En septembre 2023, le président Macron annonçait le déblocage par l’État de 700 millions pour bâtir dix à quinze RER métropolitains, avec l’ambition de doubler la part du ferroviaire dans les déplacements du quotidien autour des grands pôles urbains. Or, non seulement ces 700 millions sont insuffisants – le coût du projet de la région nantaise atteint, à lui seul, cette somme –, mais ils n’apparaissent nulle part.

M. Sylvain Carrière (LFI-NFP). Nous proposons, nous aussi, de créer une nouvelle ligne budgétaire consacrée aux services express régionaux métropolitains, dotée de 700 millions en 2025. Vingt-quatre agglomérations ont présenté un projet de Serm, alors que dix projets étaient initialement prévus dans la loi de 2023. C’est la preuve que les Françaises et les Français et les élus sont favorables à la grande bifurcation des transports et à la sortie du tout voiture. Mais l’État ne s’en donne pas les moyens : le grand plan de financement qui avait été prévu n’aura été qu’un effet d’annonce. Nous l’avions anticipé, du reste. C’est pourquoi nous nous étions abstenus lors du vote de la loi.

Les 700 millions que nous proposons d’allouer à ces projets permettraient de financer uniquement leur lancement l’an prochain et d’éviter tout essoufflement. En effet, selon l’association Objectif RER métropolitains, 40 milliards seraient nécessaires pour mener à bien leur déploiement.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Les deux amendements visent à allouer des moyens supplémentaires aux Serm. On recense vingt-quatre projets de Serm, mais ceux-ci ne seront pas opérationnels avant une quinzaine d’années. Leur financement est étalé sur une durée supérieure et il ne s’agit pas de mettre 15 milliards sur la table dès 2025. Les contrats de plan État-région (CPER) pour la période allant de 2023 à 2027 prévoient un financement de 2,66 milliards, dont 891 millions apportés par l’État pour la réalisation de la phase préalable.

Le ministre délégué chargé des transports s’est engagé à réunir, au début de l’année prochaine, une conférence nationale de financement des Serm, laquelle devra explorer de nouvelles pistes de financement, notamment celle des ressources fiscales locales dédiées. L’objectif est d’assurer la pérennité des investissements et du financement de ces services.

L’avis est défavorable sur les deux amendements.

M. Pierre Meurin (RN). Je regrette qu’aucun membre du Gouvernement ne se soit déplacé pour évoquer un sujet aussi important que celui des Serm. On nous a vendu les Serm comme le projet d’avenir qui allait révolutionner l’intermodalité dans notre pays. Vous nous dites que le déploiement de ces services prendra quinze ans. Une conférence de financement avait été annoncée pour le mois d’avril, mais celle-ci n’a toujours pas eu lieu. Les projets de loi ne sont-ils faits que pour communiquer ? À quoi cela sert-il d’adopter des textes si on ne souhaite pas les appliquer ? Nous n’avons aucune information sur le financement et le pilotage.

La loi a transformé le Grand Paris Express (GPE) en société des grands projets, mais on ignore tout de la situation de cette nouvelle structure. J’aurais aimé qu’un membre du Gouvernement nous réponde sur le sujet. Je sais que le Gouvernement n’a que peu de considération pour la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, mais nous parlons d’un texte élaboré dans cette commission et adopté en séance publique l’année dernière. Le déficit de GPE s’élève à 13 milliards ! Nous avons besoin de réponses sur un projet qui coûte plusieurs milliards d’euros aux contribuables.

Mme la présidente Sandrine Le Feur. Il ne vous aura pas échappé que nous avons auditionné en fin d’après-midi le ministre délégué chargé des transports, juste avant le début de l’examen des crédits de la mission comme nous le souhaitions. Vous aviez tout loisir de l’interroger sur les Serm.

M. Jimmy Pahun, rapporteur pour avis. Un barreau de ligne va entrer en service entre Redon et Quimperlé. Il y a actuellement seize trains par jour et il y en aura une vingtaine d’ici à la fin de l’année et près de trente dans deux ans. De nouvelles locomotives sont en cours de construction. Les projets de Serm fonctionnent efficacement. En Bretagne, il y aura 20 % de lignes de trains supplémentaires. Les communautés de communes, les autorités organisatrices de transports (AOT), la région et l’État travaillent très bien ensemble.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. L’horizon de la planification des vingt-quatre projets de Serm est le temps long : on ne planifie pas l’ouverture de lignes ferroviaires d’un claquement de doigts. Les collectivités locales qui détiennent des compétences dans ce domaine doivent organiser le service de transports jusqu’au dernier kilomètre autour des Serm. Tout cela demande du temps. Comme les financeurs sont multiples, l’organisation d’une conférence nationale de financement est nécessaire : le ministre délégué en a annoncé la tenue prochainement.

La commission adopte l’amendement II-CD163.

En conséquence, l’amendement II-CD78 tombe.

 

Amendement II-CD70 de Mme Ersilia Soudais

M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). Les chiffres du fret en France sont catastrophiques compte tenu de la place que ce mode de transport occupe dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre et de l’impact environnemental. En 2022, la part du fret représentait 10,4 % du transport intérieur de marchandises contre 87,6 % pour les poids lourds. Nos voisins font beaucoup mieux puisque la moyenne européenne atteint 18 %, avec des pics de 23 % et de plus de 30 % en Allemagne et en Autriche. Entre 2000 et 2022, la part du fret ferroviaire a connu une baisse de 43 %, car celui-ci a été délaissé au profit de la route avec l’ouverture à la concurrence dans le rail dès 2006 et la suppression de l’écotaxe sur les poids lourds en 2014 alors que le fret paie toujours un péage au kilomètre. L’activité continue de se replier dans le transport ferroviaire et fluvial, comme l’affirme le ministère de la transition écologique, de l’énergie, du climat et de la prévention des risques.

Pourtant, le ministre délégué chargé des transports a confirmé sa volonté de doubler la part du transport de marchandises par le rail, mais une telle politique requiert des moyens, notamment financiers. Si on souhaite transformer la France en véritable nation écologique, soutenir le développement du fret est une évidence. L’an passé, notre commission avait voté un amendement visant à consacrer 1,5 milliard d’investissement dans le fret, mais le Gouvernement ne l’avait évidemment pas retenu lors d’un énième 49.3.

Nous proposons d’adopter à nouveau cet amendement, qui avait recueilli l’assentiment de la majorité des parlementaires l’an passé.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Le fret ferroviaire est évidemment incontournable pour décarboner le transport de marchandises, car il présente des bénéfices environnementaux majeurs par rapport à la route. Voilà pourquoi un soutien financier important est apporté au secteur depuis 2021 dans le cadre de la stratégie nationale pour le développement du fret ferroviaire. Lancée il y a trois ans, celle-ci a pour objectif de doubler la part modale du fret ferroviaire d’ici à 2030.

L’ensemble des aides à l’exploitation du fret ferroviaire croissent depuis 2021 et progressent dans le PLF pour atteindre 211 millions. Cette enveloppe permettra, conformément aux engagements du Gouvernement, de porter le montant de l’aide à l’exploitation des services de wagons isolés de 70 millions en 2024 à 100 millions l’année prochaine. En outre, l’État consacre, dans les nouveaux CPER, 500 millions au réseau capillaire du fret.

Une programmation des investissements pour le fret ferroviaire, aussi appelée démarche « Ulysse fret », vise à identifier les projets d’investissements nécessaires pour le fret ferroviaire d’ici à 2032. Le Gouvernement doit présenter prochainement un rapport de synthèse de ce travail.

L’avis est défavorable.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CD174 de M. Peio Dufau

M. Peio Dufau (SOC). Il vise à majorer l’aide au fret ferroviaire de 170 millions à 230 millions. Nous sommes tous d’accord sur la nécessité de soutenir ce secteur.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. La commission vient d’adopter un amendement de 1,5 milliard, ce qui me semble suffisant. J’émets un avis défavorable.

L’amendement est retiré.

 

Amendement II-CD84 de M. Peio Dufau

M. Peio Dufau (SOC). Il s’agit de dégager 30 millions pour l’aide aux wagons isolés. Ces derniers assurent une desserte fine, lot par lot, wagon par wagon, entreprise par entreprise. De nombreuses sociétés, situées principalement dans les ports, sont embranchées au rail : les wagons y pénètrent, chargent des marchandises puis les livrent, dans ce qui s’apparente à du sur-mesure. Cette offre est indispensable pour de nombreuses entreprises connectées au rail : sans les wagons isolés, elles n’utiliseraient que des camions. Le service n’est pas forcément rentable, mais il a un sens pour l’économie française et pour les petites entreprises.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Les aides aux wagons isolés sont effectivement très utiles pour les petites entreprises, lesquelles n’utiliseraient que des camions sans ce soutien public. Voilà pourquoi l’ensemble des aides à l’exploitation du fret ferroviaire, qui avaient augmenté en 2021, sont renforcées dans le PLF pour 2025 pour atteindre 211 millions.

Grâce à cet effort, conforme aux engagements du Gouvernement, l’aide à l’exploitation des services de wagons isolés passera de 70 millions en 2024 à 100 millions en 2025. Votre amendement semble dès lors satisfait et j’émets un avis défavorable à son adoption.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD87 de M. Peio Dufau

M. Peio Dufau (SOC). Il a pour objet de lancer, avec une enveloppe dotée de 85 millions, l’expérimentation d’un ticket climat à 9 euros par mois. L’idée est d’étendre à l’ensemble de l’année le pass rail qui n’existe que l’été. Ce ticket permettrait d’emprunter tous les transports et le bilan de son utilisation nous renseignerait sur l’élasticité du lien entre une politique d’offre de transports à très bas coût et un report des mobilités vers les transports en commun décarbonés.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je partage votre souhait de développer un ticket climat, lequel existe sous la forme, plus restreinte, du pass rail.

Les 235 000 pass rail vendus ont généré 2,38 millions de trajets réservés. Cependant, ce chiffre se situe au-dessous des attentes initiales, en raison notamment d’une mise en vente tardive et d’une promotion insuffisante. Pour compléter ces résultats, une analyse qualitative évaluera le comportement des jeunes utilisateurs et leur perception du pass rail. Les résultats de cette enquête, attendus pour la fin de l’année, nous donneront des enseignements sur l’opportunité de reconduire ou d’adapter le dispositif en 2025, pourquoi pas dans la direction que vous tracez.

Avant que ces études ne soient effectuées, il me semble disproportionné d’ouvrir une ligne de crédits de 85 millions pour financer l’extension du dispositif.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-CD51 de Mme Marie Pochon, II-CD74 de M. Sylvain Carrière, IICD50 de Mme Marie Pochon et II-CD73 de Mme Ersilia Soudais (discussion commune)

Mme Marie Pochon (EcoS). En 2023, le Gouvernement a promis un plan Vélo ambitieux assis sur un fonds doté de 1,25 milliard sur cinq ans, mais aucun des appels à projets prévus n’a encore vu le jour. L’année 2024 pourrait être une année blanche pour le vélo, laissant de nombreux territoires à la traîne, notamment dans les zones rurales où les aménagements sont très insuffisants, ce qui met en danger les usagers.

Quelques jours après l’atroce meurtre du jeune Paul à Paris, il importe de rappeler que si le nombre de blessés à vélo est plus élevé en ville, ces accidents font plus de morts à la campagne. En 2022, sur les 245 Françaises et Français décédés en faisant du vélo, 135 ont trouvé la mort sur une route rurale. Cela montre que le vélo n’est pas une occupation de bobos des villes et que sa pratique progresse également à la campagne. Ils sont en effet nombreux ceux qui aimeraient aller en ville ou au travail et faire leurs courses à vélo mais qui y renoncent faute d’infrastructures sécurisées et sécurisantes.

Comme nous restons très éloignés de l’objectif fixé de 12 % de part modale pour le vélo d’ici à 2030, nous proposons, comme le recommande l’Agence de la transition écologique (Ademe), de renforcer dès maintenant les investissements dans le développement du vélo à hauteur de 2,5 milliards supplémentaires.

M. Sylvain Carrière (LFI-NFP). Le vélo est le mode de transport le plus écologique après la marche, pourtant les usagers de la route les plus vulnérables sont les cyclistes. Ces derniers, qui pèsent moins de 100 kilogrammes avec leur monture, ont peu de chance de se sortir indemnes d’une collision avec un véhicule pesant plusieurs tonnes. C’est ce qui est arrivé à Paul Varry, jeune militant de l’usage du vélo à qui je veux rendre hommage, tué par un conducteur de SUV mécontent d’avoir été rappelé à l’ordre après avoir fait de la piste cyclable son parking. Ils sont chaque année plus de 200 à perdre ainsi la vie, principalement en zone rurale où les infrastructures n’existent pas et où il est urgent de les construire. Les collectivités sont prêtes et veulent agir, il ne leur manque que les moyens. Tout gel supplémentaire de crédits conduira à un essoufflement généralisé.

Pour une activité sportive et écologique, nous proposons d’augmenter de 500 millions les crédits alloués au vélo.

Mme Marie Pochon (EcoS). Il s’agit d’un amendement de repli. Dans les territoires ruraux, plus de 80 % des déplacements s’effectuent en voiture, souvent individuelle, faute d’alternatives. Ce n’est pas faute d’idées ni d’initiatives lancées par des collectifs citoyens, des associations ou des collectivités pour remplacer la voiture, impasse écologique, sanitaire, financière et sociale. La voiture dégrade la santé humaine, coûte de l’argent public et creuse les inégalités. Entre 10 % et 15 % de la population n’a pas le permis et combien d’autres n’ont pas les moyens d’acheter ni d’entretenir une voiture, d’en payer l’assurance et le carburant ? Tous ces gens renoncent à se déplacer : environ 40 % des Françaises et des Français déclarent renoncer régulièrement à des rendez-vous faute de pouvoir s’y rendre.

Grâce au premier plan Vélo, défendu par Élisabeth Borne alors ministre des transports, 14 000 kilomètres d’infrastructures cyclables ont été aménagés. Cet effort a entraîné une hausse de 33 % de la fréquentation des pistes. L’amendement vise à atteindre l’objectif du plan Vélo du Gouvernement de consacrer 1,25 milliard à cette politique en cinq ans en investissant 250 millions par an dès 2025. Se résigner à une année blanche pour le vélo sous couvert de redressement des comptes publics alors que des millions d’euros sont consacrés à de nouveaux projets routiers est inacceptable pour les collectivités engagées comme pour tous les acteurs du vélo.

Mme Ersilia Soudais (LFI-NFP). Nous proposons de sanctuariser le montant des investissements publics dans les infrastructures cyclables à hauteur de 250 millions. Les fonds dédiés au plan Vélo subissent des coupes budgétaires. La participation de l’État au plan Vélo sera de 100 millions en 2025, montant quatre fois inférieur à celui de cette année. Il s’agit d’un manque d’ambition alors que l’on déplore régulièrement des morts dans la cohabitation des usagers de la route. Les résultats de l’année en cours sont effrayants pour le vélo car aucun des dispositifs annoncés par le Gouvernement n’a vu le jour. Dans ma circonscription, il n’y a aucune volonté de proposer une alternative à la voiture. Les liaisons cyclables devraient compenser le manque de transports en commun sur l’axe Nord-Sud, mais, au lieu de cela, la seule voie récente est délaissée car elle fait doublon avec le RER A.

Avec l’appui de la Fédération française des usagers de la bicyclette, nous souhaitons abonder de 250 millions le plan Vélo pour les années 2023 à 2027. Il ne faut pas diminuer les investissements mais mieux les orienter.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Les cyclistes sont de plus en plus nombreux en France et le vélo se révèle de plus en plus populaire, pour les déplacements professionnels comme pour les loisirs. Ce phénomène n’est pas le fait du hasard, il résulte des engagements concrets pris par le Gouvernement pour soutenir le vélo, notamment le plan Vélo, doté de 1,25 milliard pour les années 2023 à 2027. Ces crédits ont été principalement utilisés pour réaliser des itinéraires cyclables continus, lesquels améliorent la sécurité et la qualité des trajets cyclistes. Ils ont déjà fait l’objet de six appels à projets dotés de 465 millions depuis 2019 pour 1 229 projets, dont 850 étaient situés en zone rurale ou périurbaine. Les territoires lauréats des derniers appels à projets seront annoncés à la fin de l’année : ils bénéficieront du soutien de l’État pour mener à bien des opérations d’aménagement cyclable.

Au-delà des fonds destinés à soutenir les mobilités actives, 183 millions de crédits d’État sont prévus dans les CPER et les contrats de convergence et de transformation (CCT) pour les années 2023 à 2027 pour achever les schémas nationaux et régionaux des vélos‑routes. Les dotations d’investissement de l’État aux collectivités – dotation de soutien à l’investissement local (DSIL), dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), dotation de soutien à l’investissement des départements (DSID), dotation politique de la ville (DPV) et fonds vert – contribuent également au financement d’aménagements en faveur des mobilités actives, pour un montant estimé à 100 millions en 2023. Les initiatives des collectivités locales relaient l’effort de l’État pour construire un cadre financier solide pour les investissements dans les infrastructures cyclables.

L’avis est défavorable.

M. Emmanuel Blairy (RN). La méconnaissance des territoires ruraux par l’extrême gauche m’indigne. Chez moi, dans la première circonscription du Pas-de-Calais, les routes ne sont même pas entretenues pour les tracteurs et les véhicules à moteur thermique. De nombreux lycéens et étudiants n’ont pas les moyens d’acheter un vélo. Vous avez été élus de façon démocratique dans les villes mais vous ne connaissez pas nos territoires, donc ne parlez pas en leur nom. Les habitants que je rencontre tous les jours ne veulent pas de plan Vélo mais des routes en bon état pour accéder facilement aux villes et des politiques visant à réduire les inégalités entre les territoires.

Mme Marie Pochon (EcoS). Je suis élue dans une circonscription comptant 240 communes, l’une des plus rurales de France, donc nous n’avons de leçon à recevoir de personne.

M. Pierre Meurin (RN). On ne peut pas adopter de démarche verticale et plaquer de fausses bonnes idées comme le plan Vélo. Dans les zones rurales, comment peut-on emmener les enfants à l’école et aller au travail à vélo ? Madame Pochon, vous aviez déposé un amendement visant à utiliser 20 % des espaces à zéro artificialisation nette (ZAN) pour développer des pistes cyclables dans les zones rurales, idée totalement lunaire. Même si vous êtes élue dans une circonscription rurale, vous avez un présupposé très urbain qui n’a aucune pertinence dans les territoires ruraux.

La France est passée du premier au dix-huitième rang mondial pour la qualité de ses infrastructures routières : avant d’élaborer des plans Vélo à 1,5 milliard, il faut rénover les routes qui se trouvent dans un état déplorable, notamment dans les zones rurales, et qui sont donc dangereuses. Votre plan Vélo est un truc de bobo écolo totalement déconnecté des enjeux de mobilité de notre pays.

M. Peio Dufau (SOC). La solution est multiple et associe le rail, la route et le vélo. Dans certains endroits, le vélo ne peut pas être utilisé pour les déplacements quotidiens, mais vous vous êtes également opposés à soutenir davantage le ferroviaire, chers collègues du groupe Rassemblement national ; or dans les zones rurales, le transport ferroviaire a un rôle important à jouer, donc gardez vos leçons.

La commission rejette successivement les amendements.


Amendements II-CF108 de M. Timothée Houssin et CD39 de Mme Chantal Jourdan (discussion commune)

M. Timothée Houssin (RN). L’amendement vise, pour une fois, à faire des économies puisque notre pays se trouve dans une situation difficile. À l’exception de la gauche, tout le monde cherche à maîtriser les dépenses publiques. Dans ce cadre, il est impératif d’orienter les fonds disponibles vers des investissements qui répondent directement aux priorités environnementales les plus urgentes.

C’est la raison pour laquelle je vous propose d’économiser 100 millions sur le plan Vélo : l’usage du vélo a augmenté de 27 % en deux ans dans les grandes villes et les ventes de vélos électriques ont progressé de 30 % car ceux-ci sont devenus accessibles. La dynamique est déjà lancée et les rues des métropoles sont déjà aménagées pour le vélo. En revanche, quand l’école, le lieu de travail et le supermarché se trouvent à plusieurs kilomètres voire à quelques dizaines de kilomètres du domicile, les gens n’utilisent pas le vélo pour se déplacer.

Nous vous proposons d’établir des priorités en matière de développement durable et de rediriger des fonds vers des énergies décarbonées comme le nucléaire et l’hydrogène, le recyclage et la prévention des inondations ; nous souhaitons également réaliser des économies.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Contrairement à l’amendement précédent, le nôtre vise modestement à rétablir les crédits de financement d’aménagements cyclables afin de développer la pratique du vélo dans de bonnes conditions. Venant d’un milieu rural, il m’apparaît nécessaire de créer de nouvelles pistes cyclables sécurisées : les habitants réclament d’ailleurs d’agir en ce sens. Le PLF prévoit de réduire les crédits alors qu’il convient d’accompagner l’essor de l’usage du vélo dans l’ensemble du territoire.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. L’amendement de M. Houssin vise à supprimer l’ensemble des crédits budgétaires alloués au plan Vélo quand celui de Mme Jourdan souhaite les augmenter de 50 millions pour financer les investissements dans les infrastructures cyclables : face à ces demandes contraires, le compromis inscrit dans le PLF me semble raisonnable. J’émets un avis défavorable à ces deux amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement II-CD66 de M. Sylvain Carrière

M. Sylvain Carrière (LFI-NFP). Si le nombre de trajets réalisés à vélo est en constante augmentation – il a progressé de 28 % entre 2019 et 2021 –, le potentiel de développement de ce mode de transport reste important puisque, sur les 35 % de trajets domicile-travail inférieurs à 5 kilomètres, 60 % sont effectués en voiture. L’emport de vélos dans les bus permettrait de réduire le coût de la mobilité de 92 % par rapport à la voiture, dans un pays qui compte 15 millions de personnes en situation de précarité mobilité. Afin de promouvoir le report modal, nous proposons donc de dégager 5 millions d’euros pour renforcer les capacités d’emport de vélos dans les bus, sachant que le coût d’équipement d’un véhicule se situe entre 1 800 et 8 000 euros pour une capacité théorique de trois à huit vélos.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Bien que le développement des infrastructures permettant l’emport de vélos dans les bus puisse encourager une partie de la population à adopter ce mode de transport, les études disponibles montrent que cette demande se concentre principalement sur les déplacements touristiques ou de loisirs et qu’elle ne concerne que très marginalement les trajets domicile-travail. Un tel équipement ne fait pas l’objet d’un rapport coûts-bénéfices favorable puisqu’il ne semble pas répondre à une demande massive et généralisée, surtout dans les zones urbaines denses où les infrastructures cyclables se développent déjà rapidement.

Par ailleurs, la LOM a donné aux autorités organisatrices de la mobilité une certaine latitude pour investir dans ces équipements en fonction des besoins locaux – ce qu’elles font déjà très bien. Il est donc préférable de laisser ces autorités adapter les solutions en fonction des spécificités des territoires plutôt que d’imposer un déploiement généralisé qui ne correspondrait pas forcément aux attentes ou à la réalité des déplacements.

Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD63 de M. Emmanuel Blairy

M. Emmanuel Blairy (RN). Est-ce vraiment le moment d’investir plus de 15 millions d’euros dans la tour Séquoia et la grande arche de la Défense qui, soit dit en passant, fait presque offense à l’Arc de Triomphe ? Nous proposons de transférer 20 millions d’euros vers le programme 203 afin de régénérer le réseau routier national. Vous le savez, ce dernier subit une forte pression du fait de son usage intensif et, parfois, du dérèglement climatique. Par ailleurs, le développement de nouvelles formes de mobilité nécessite une révision des infrastructures. Il est donc crucial d’amplifier les efforts d’entretien, de réparation et de sécurisation des zones à risque. Le bon fonctionnement et la fiabilité du réseau routier, essentiel à la vie quotidienne de nos concitoyens et au développement économique de nos territoires, doivent être garantis par l’État.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. L’entretien du réseau routier national est effectivement une question de sécurité. C’est pourquoi le budget pour 2025 donne la priorité à l’entretien et à la régénération de ce réseau, auxquels il consacre quelque 1 milliard d’euros, par rapport au financement de nouveaux projets routiers. Avis défavorable.

M. Emmanuel Blairy (RN). Je n’ai pas bien compris pourquoi vous vous opposiez au transfert de 20 millions supplémentaires vers cette action.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je le répète : priorité est donnée à l’entretien et à la régénération du réseau routier afin de garantir sa sécurité. Le milliard d’euros prévu au budget pour 2025 paraît suffisant.

La commission rejette l’amendement.

 


Amendement II-CD34 de M. Pierre Meurin

M. Pierre Meurin (RN). Je défends toujours la même chose, mais cette fois sous la forme d’un amendement d’appel car les montants ont finalement peu de sens. En 2012, les routes françaises étaient placées au premier rang dans le classement du Forum économique mondial ; or, en 2018, elles sont tombées à la dix-huitième place. Vous dites, madame la rapporteure pour avis, qu’il est formidable que 1 milliard d’euros soient consacrés à l’entretien du réseau, mais je vous ferai remarquer que c’est moins que l’année dernière. Il n’empêche que l’état de nos routes se délabre de jour en jour, de semaine en semaine – et je ne parle même pas des ouvrages d’art. Quelle est la stratégie de la France dans ce domaine ?

Grâce aux écolos et aux associations écoterroristes, qui manifestent et bloquent tout projet routier, même lorsque le dossier est légalement constitué, nous ne construisons plus de routes. Allons-nous nous y remettre ? Nous en avons besoin, pour des raisons démographiques, économiques et de désenclavement des territoires ruraux. Mais je parle dans le vide – je défends un amendement d’appel mais aucun ministre n’est présent pour répondre à mes interrogations sur ce sujet stratégique. Y a-t-il un pilote dans l’avion ?

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. À vous entendre, le réseau routier de notre pays serait délabré. Je tiens à préciser que le milliard d’euros prévu en 2025 ne concerne que les routes relevant de la compétence de l’État, soit 18 000 kilomètres, à l’exception des 9 200 kilomètres de routes concédées. Cette somme me paraît donc suffisante. L’essentiel du réseau est géré par les communes et les communautés de communes, compétentes sur 700 000 kilomètres, ainsi que par les départements, qui assument la charge de 380 000 kilomètres. Ces collectivités font aussi beaucoup d’efforts, comme en témoignent le bon niveau d’entretien des routes et les investissements réalisés dans certains départements.

M. Pierre Meurin (RN). Votre réponse assez techno, probablement fournie par le ministère de l’économie ou des transports, n’est pas du tout satisfaisante car elle n’envisage aucune planification de l’entretien, de la rénovation et de la modernisation de notre réseau routier.

Les retours du terrain sont beaucoup moins optimistes que vous ne le dites. Le réseau se délabre et les départements n’ont plus les moyens d’entretenir les ouvrages d’art ni de les rénover. Je vous renvoie une nouvelle fois au rapport sénatorial de 2019, qui estimait à environ 200 millions d’euros par an pendant dix ans – moins que le plan Vélo – les crédits nécessaires à la rénovation de la totalité des ouvrages d’art de notre pays, dans le cadre d’une contractualisation où l’État se substituerait aux collectivités territoriales. Voilà une mesure intelligente et indispensable à notre souveraineté ! J’ajoute que le dérèglement climatique nécessite que les ouvrages d’art fassent l’objet d’un entretien bien particulier.

La réponse apportée n’est donc absolument pas satisfaisante. Mais aucun ministre ne participe à notre réunion… On se demande parfois pourquoi on travaille !

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Vos 4 millions ne changeraient pas grand-chose puisque 1 milliard d’euros sont budgétés.

M. Pierre Meurin (RN). Je vous ai dit que c’était un amendement d’appel !

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je ne vous permets pas de dire que ma réponse était techno : je suis une élue de terrain, conseillère départementale, et à ce titre je connais bien la situation des routes départementales. Pour avoir aussi été quinze ans conseillère municipale, je sais ce que c’est que d’entretenir des routes communales. Le ministère ne m’a pas aidée à répondre, je peux vous le dire.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD97 de Mme Ersilia Soudais

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NFP). Il s’agit également d’un amendement d’appel – un appel à la prise de conscience de l’impact colossal des projets autoroutiers. Notre pays vient de subir des inondations inédites, et le Premier ministre a dit à ce sujet que la prévention coûtait moins cher que la réparation. C’est bien vu, sauf que la première cause de l’aggravation des phénomènes climatiques, ce qui fait que des pluies importantes provoquent des inondations, c’est l’artificialisation des sols. Or le Gouvernement soutient allègrement des projets archaïques comme celui de l’autoroute A69, qui a réussi l’exploit de détruire 400 hectares de terres agricoles et d’espaces naturels, des zones humides et 162 espèces protégées pour longer une route nationale existante. Je pourrais également évoquer la double autoroute A133-A134 pour contourner Rouen, un projet conçu il y a trente ans qui détruit 500 hectares de terres naturelles, dont 142 hectares de forêt, ou encore l’A412 en Haute-Savoie, une catastrophe écologique vieille de quarante ans. Du point de vue budgétaire, l’abandon de la cinquantaine de projets autoroutiers contestés permettrait d’économiser 18 milliards. Face au changement climatique, soyons donc cohérents et instaurons d’urgence un moratoire sur les projets routiers afin d’entamer une véritable bifurcation écologique.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Vous dénoncez le projet d’autoroute A69. Je ne reviendrai pas sur ce débat, qui n’a pas lieu d’être dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances. Je rappellerai simplement que les crédits relatifs aux projets autoroutiers ont été diminués pour donner la priorité aux mobilités décarbonées et à la régénération du réseau routier existant. Avis défavorable.

Mme Anne-Cécile Violland (HOR). Madame Stambach-Terrenoir, je conçois que vous ayez des positions dogmatiques sur l’autoroute. En revanche, il existe effectivement, en Haute-Savoie, un projet vieux de quarante ans dont la réalisation est une nécessité absolue pour le désenclavement d’un territoire que vous ne connaissez manifestement pas. Il aurait été préférable de vous renseigner sur cette situation particulière avant d’exposer votre position dogmatique.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD109 de M. Timothée Houssin

M. Timothée Houssin (RN). Cet amendement vise à supprimer les crédits alloués au fonds vert dans le cadre du déploiement des zones à faibles émissions.

Ces ZFE sont avant tout source d’inégalités. Certains services publics d’envergure régionale tels que des hôpitaux se trouvent exclusivement dans les métropoles ; or les ruraux doivent pouvoir y accéder. Ainsi, dans ma circonscription, les habitants de nombreux villages situés à quelques dizaines de kilomètres de Rouen dépendent de services publics, notamment de services de soins, implantés dans la métropole et au cœur d’une ZFE.

Ces ZFE se trompent de cibles. Elles pénalisent les véhicules les plus anciens, souvent possédés par les personnes les plus modestes, qui sont aussi des petits rouleurs – dans le cas contraire, ces vieux véhicules ne circuleraient plus sur nos routes. Leur fondement scientifique est très discutable : comprenez-vous qu’un Porsche Cayenne V8 diesel de 400 chevaux pesant 2,5 tonnes puisse entrer dans une ZFE alors qu’une Twingo de 800 kg consommant trois à quatre fois moins ne le peut pas ?

Politiquement et économiquement, il serait opportun de mettre fin à cette politique. Cela nous permettrait d’économiser 14 millions d’euros.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. L’instauration de ZFE doit s’accompagner d’un report modal permis par la mise à disposition de solutions de mobilité autres que la voiture, par le développement de mobilités douces et par un verdissement du parc.

La réalisation d’études réglementaires et la détermination des besoins associés au déploiement de ces zones – mise en place d’une signalisation, création de parkings relais, développement d’autres solutions de mobilité, définition d’une stratégie de contrôle – bénéficient d’un soutien financier du fonds vert. À la mi-juillet 2024, 204 dossiers avaient été déposés et le montant cumulé des aides demandées s’élevait à 144 millions d’euros. L’entrée en vigueur des ZFE n’étant pas remise en cause, il me semble contreproductif de supprimer les aides financières accompagnant leur déploiement. Avis défavorable.

M. Pierre Meurin (RN). La question des ZFE me tient tout particulièrement à cœur. Quand allez-vous entendre raison ?

La classification Crit’Air n’a aucun sens. Comme l’a expliqué M. Houssin, un Porsche Cayenne, qui est un véhicule de riches – ce langage devrait plaire à la gauche –, est classé Crit’Air 1 bien qu’il émette beaucoup plus de monoxyde d’azote, de dioxyde d’azote et de particules fines qu’une Clio vieille de trente ans, très bien entretenue mais classée Crit’Air 4.

En réalité, les ZFE sont les instruments d’un système séparatiste qui, en distinguant géographiquement les aires urbaines des aires rurales, fait comprendre aux Français les plus modestes qu’ils sont des pollueurs pour les habitants des villes. Cette mesure, très symbolique, a donc pour effet de diviser les Français.

Il y a deux ans, MM. Millienne et Leseul ont mené une mission flash à ce sujet. Ils ont expliqué que les ZFE n’avaient aucun sens tout en concluant qu’il fallait poursuivre dans cette voie. Personne ne s’est penché sur l’acceptabilité sociale des ZFE ni sur les critères d’amélioration de la qualité de l’air dans les zones urbaines. Dans le même temps, on a appris que le métro, en raison de son système de freinage, polluait beaucoup plus que d’autres véhicules. Cela ne nous a pas empêchés de créer une sorte d’Absurdistan : chaque collectivité territoriale fait ce qu’elle veut en matière de ZFE, pour des raisons parfois purement idéologiques. Ainsi, à Paris, les propriétaires d’un véhicule Crit’Air 3 peuvent bénéficier d’un « pass ZFE » dans la limite de douze jours par an. Mais comment allez-vous expliquer aux Français les plus modestes que, pour aller travailler, se soigner, faire leurs courses ou emmener leurs enfants à l’école, ils n’ont pas le droit d’entrer dans les zones urbaines avec leur Clio pourtant bien entretenue ?

Voilà deux ans et demi que le groupe Rassemblement national vous alerte à ce sujet. Chacun reconnaît que ce système n’a absolument aucun sens et qu’il n’est pas efficient. Personne n’a jamais réussi à démontrer que les ZFE permettaient d’améliorer la qualité de l’air. Il faut donc y mettre fin. Quand ce dispositif cauchemardesque va-t-il s’arrêter ? Encore une fois, j’aurais aimé qu’un ministre soit présent pour répondre à ma question.

Mme la présidente Sandrine Le Feur. Vous vous interrogez sur l’acceptabilité sociale de ce dispositif, mais je rappelle que la création de ZFE est une proposition issue des travaux de la Convention citoyenne pour le climat. Il en est de même pour l’objectif zéro artificialisation nette (ZAN).

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD107 de Mme Anaïs Sabatini

M. Julien Guibert (RN). En supprimant 50 millions d’euros au sein de l’action 03, Amélioration du cadre de vie, du programme 380, Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires, nous entendons nous opposer aux ZFE, qui constituent un non-sens écologique et un coup porté contre les personnes les plus fragiles socialement, à savoir les habitants des zones rurales qui doivent se rendre dans une métropole mais qui n’ont pas les moyens d’acheter un véhicule moderne et moins polluant selon certains critères. Le chef-lieu de la région Bourgogne-Franche-Comté, Dijon, va bientôt mettre en place une ZFE. Les habitants de ma circonscription, dans la Nièvre, verront alors leurs trajets vers la métropole complexifiés, d’autant que presque aucun véhicule n’est doté de vignette Crit’Air.

Du reste, le bilan carbone d’un nouveau véhicule électrique produit en Chine est-il vraiment meilleur que celui d’un véhicule thermique sur le marché depuis une vingtaine d’années ? Je n’en suis pas certain.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Avis défavorable, pour les raisons évoquées précédemment.

M. Emmanuel Blairy (RN). On pourrait penser que la création de ZFE permet de réduire un peu notre empreinte carbone. Permettez-moi cependant de rappeler certaines choses très factuelles. Même si l’on décidait, demain ou dans trente ans, par pure idéologie, d’instaurer des ZFE dans toutes les communes de plus de 5 000 habitants, et même si l’on imposait l’utilisation de moteurs électriques sur l’ensemble du territoire, il faudrait toujours des usines, des hommes et des femmes pour construire les véhicules, ainsi que de la voirie, de l’asphalte, du goudron, des plaquettes de frein, des disques… Là n’est donc pas la question. Le véritable enjeu réside sans doute dans les relations commerciales internationales, dans notre manière de produire, dans le localisme. En aucun cas il ne faut emmerder les ruraux, les empêcher de se déplacer pour se nourrir ou se soigner. Revenons au bon sens paysan et fions‑nous à ceux qui connaissent la valeur des choses, parce qu’ils vivent avec les saisons plutôt qu’avec des idéologies !

M. Timothée Houssin (RN). J’ai entendu les explications un peu empruntées de Mme la rapporteure pour avis, puis les vôtres, madame la présidente, nous dissuadant de faire quoi que soit contre les décisions de la Convention citoyenne pour le climat. J’ai surtout remarqué le silence de la gauche, qui a pourtant l’habitude de parler beaucoup sur les sujets de développement durable. Or je n’ai entendu absolument personne m’expliquer l’intérêt écologique de ces ZFE. Ainsi, nous allons continuer de consacrer des dizaines de millions d’euros à des dispositifs dont tout le monde sait qu’ils sont contreproductifs et injustes.

M. Pierre Meurin (RN). L’an dernier, La France insoumise a probablement eu un éclair de génie en demandant un moratoire sur la mise en place des ZFE. Cette position est pourtant contradictoire avec les décisions prises par la gauche au sein des exécutifs locaux. Le groupe Rassemblement national est le seul à avoir défendu, au début de l’année 2023, dans le cadre d’une niche parlementaire, une proposition de loi visant à supprimer les ZFE. Vous ne l’avez pas votée, mais vous aurez peut-être ce soir, chers collègues de gauche, l’occasion de vous rattraper et de vous montrer enfin cohérents avec les positions que vous avez prises – un peu comme pour l’abrogation de la réforme des retraites, le 31 octobre prochain. Sinon, ce sera comme d’habitude : vous vous agiterez un peu mais vous finirez toujours par voter pour Emmanuel Macron.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Vous jetez le bébé avec l’eau du bain. Consacrer des crédits à un meilleur accompagnement du dispositif, réfléchir à des modalités d’application tenant compte de divers paramètres, ce n’est pas pareil que supprimer l’intégralité de ces crédits, ignorer les problèmes de santé publique liés à la pollution de l’air causée par les transports et rejeter toutes les solutions visant à les régler.

M. Emmanuel Blairy (RN). Il ne s’agit pas d’ignorer les conséquences du réchauffement climatique ni de la pollution – deux phénomènes malheureusement complémentaires –, mais de considérer qu’il existe peut-être d’autres moyens de régler ces problèmes. Regardons les choses en face, soyons humbles et écoutons les avis des professionnels sur la question. Ni vous ni moi ne sommes prophètes, ni fils de prophètes ! Le groupe Rassemblement national a proposé la création d’une mission d’information sur les changements climatiques : cela montre que cette question ne nous pose pas de problème.

Vous défendez les ZFE. Pour ma part, je pense qu’il faudra envisager, dans les grandes villes de plus de 100 000 habitants, par exemple, une renégociation des plans de circulation. Il y a trop de bouchons, en particulier à Paris depuis que la police de la circulation a été confiée à la maire de la capitale. Or les bouchons entraînent de la pollution, des maladies et toutes sortes de problèmes sanitaires.

Restons humbles, ne jouons pas aux apprentis sorciers et exposons clairement nos propositions. C’est trop facile d’attaquer le Rassemblement national en dessous de la ceinture ! Vous êtes partisans d’une écologie punitive ; quant à nous, nous défendons une écologie équitable.

Mme Anne-Cécile Violland (HOR). M. Delautrette l’a dit, il ne s’agit pas de se prononcer pour ou contre les ZFE, mais plutôt de réfléchir à une révision de leurs modalités d’application et aux moyens de limiter leurs effets de bord.

Les ZFE ne visent pas véritablement à lutter contre le réchauffement climatique. En revanche, leurs bénéfices sont tout à fait avérés s’agissant de la qualité de l’air, ce qui n’est pas négligeable alors que 40 000 décès sont imputés chaque année à la pollution de l’air extérieur.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD79 de Mme Ersilia Soudais

Mme Ersilia Soudais (LFI-NFP). Nous souhaitons annuler les coupes budgétaires prévues pour le fonds vert, s’agissant de l’action dédiée au cadre de vie qui comprend les crédits pour promouvoir les politiques de covoiturage. Celui-ci étant particulièrement utile en zone rurale, je ne doute pas que mes collègues du RN n’hésiteront pas à voter cet amendement. Je rappelle au passage que la Seine-et-Marne est le quatrième département à utiliser le plus le covoiturage. Ce dispositif présente l’avantage de réduire les coûts pour les ménages et l’empreinte carbone de nos trajets. Comme le souligne négaWatt, il participe à l’effort de sobriété. Favoriser le covoiturage est d’autant plus important que 15 millions de personnes de plus de dix-huit ans étaient en situation de précarité de mobilité en 2023 et que ce chiffre ne cesse d’augmenter.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je vous rejoins sur l’importance du covoiturage. Il ne s’agit pas seulement de remplacer chaque véhicule thermique par une voiture électrique. Il faut modifier les usages, ce qui suppose d’augmenter le taux d’occupation des véhicules qui est en moyenne de 1,4 seulement.

Le plan national covoiturage pour la période 2023-2027, doté de 150 millions d’euros, comporte trois mesures importantes : la prime de 100 euros pour les primo‑conducteurs, l’incitation financière au profit des usagers et l’éligibilité au fonds vert au titre du développement du covoiturage. La création de voies réservées au covoiturage pour l’accès aux agglomérations est également nécessaire, les incitations au covoiturage ne pouvant être uniquement financières.

Au 1er août 2024, 129 projets en faveur du covoiturage pour un montant de 7 millions d’euros ont déjà été retenus pour bénéficier du soutien du fonds vert. Des demandes de cofinancement supplémentaires ont déjà été déposées pour un montant de 23,6 millions jusqu’à la fin 2024. Pour 2025, les certificats d’économie d’énergie (CEE) ainsi que le fonds vert continueront de soutenir respectivement les usagers de plateformes et les collectivités.

Le sujet est pris au sérieux mais il faut du temps pour changer les habitudes.

Avis défavorable.

M. Pierre Meurin (RN). Je n’ai pas d’hostilité à l’égard de l’amendement, mais le covoiturage est déjà une pratique courante dans les zones rurales. Je doute donc des vertus de la planification en la matière. En outre, je regrette que vous ayez trouvé votre inspiration auprès de cette association fumiste qu’est négaWatt.

Alors que 60 % des trajets dans les zones urbaines couvrent une distance maximale de 2 kilomètres, la question primordiale est de savoir comment dissuader les gens de prendre leur voiture pour ces trajets-là.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CD150 de M. Romain Eskenazi

M. Romain Eskenazi (SOC). Alors que la France possède le plus long réseau d’Europe – 8 500 kilomètres de voies navigables sur 38 000 –, le transport fluvial de marchandises, cinq fois moins émetteur de CO2 que le transport routier, représente moins de 3 % des tonnes-kilomètres transportées. Il pourrait être multiplié par quatre dans le bassin de la Seine.

Pour soutenir ce mode de transport, l’amendement vise à accroître de 200 millions l’enveloppe allouée à Voies navigables de France (VNF). Cette montée en puissance est indispensable pour moderniser le réseau – rénovation d’ouvrages, restauration de digues ou de berges, automatisation d’écluses, verdissement de la flotte – et développer des plateformes logistiques multimodales à l’entrée des métropoles et grands centres urbains pour faciliter l’acheminement des marchandises dans les derniers kilomètres.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je partage votre avis sur le rôle des voies navigables et leur potentiel de développement.

Pour 2025, les crédits dédiés à VNF sont stables à hauteur de 254 millions. L’établissement bénéficiera par ailleurs d’une hausse du plafond de perception de la redevance hydraulique de 6,6 millions par rapport à 2024, portant l’ensemble des recettes à un point haut de 774 millions.

L’établissement est préservé des coupes budgétaires. Je serai néanmoins attentive au respect des trajectoires prévues dans le COP (contrat d’objectifs et de performance) pour les moyens humains et financiers.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CD100 de M. Dominique Potier

Mme Chantal Jourdan (SOC). Il s’agit de dédier 60 millions d’euros à l’aménagement d’un domaine public fluvial à énergies positives.

Face au changement climatique, les ouvrages hydrauliques et de navigation contribuent grandement à l’adaptation et à la résilience des territoires grâce à une gestion active et raisonnée de la ressource hydrique et au savoir-faire des collaborateurs de VNF. Le développement du transport fluvial participe directement à la réduction des émissions du secteur. VNF assure par ailleurs la gestion, l’acheminement et la mise à disposition de l’eau dans les territoires pour maintenir ses différents usages dans la durée et le respect des équilibres naturels.

Cet amendement vise à lancer un vaste programme d’investissement permettant à terme, et en partenariat avec VNF, de mobiliser 1 milliard d’euros. Il s’agit de passer de la parole aux actes puisque ces objectifs sont inscrits dans la loi relative à l’accélération et à la production d’énergies renouvelables ainsi que dans la loi relative à l’industrie verte.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Le développement de l’hydroélectricité est l’une des missions confiées à VNF pour valoriser le potentiel de la voie d’eau dans la production d’énergie renouvelable, favoriser le développement du multi-usage des infrastructures et dynamiser les ressources propres de l’établissement.

Conformément à la loi relative à l’industrie verte, le COP 2023-2032 réaffirme l’objectif de développement des énergies renouvelables : VNF est tenu de pérenniser les capacités de production existantes sur le réseau et d’augmenter la puissance installée pour renforcer sa participation active à la transition énergétique.

Pour ce faire, l’établissement doit se doter d’une stratégie pluriannuelle 2025-2035 intitulée « Voies navigables à énergie positive » et présenter, fin 2024, un rapport étudiant les conditions, notamment financières, de développement de la production d’énergies renouvelables des voies navigables et de leurs dépendances. Ce rapport est un préalable à l’identification des besoins financiers. En outre, n’oublions pas que certains projets sont financés par les recettes qu’ils génèrent.

Avis défavorable d’autant que nous venons d’augmenter les crédits de VNF de 200 millions.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD75 de Mme Ersilia Soudais

M. Sylvain Carrière (LFI-NFP). L’amendement vise à augmenter les crédits alloués à VNF. L’établissement public gère le réseau de voies navigables de l’État, constitué de 6 700 kilomètres de voies, de plus de 3 000 ouvrages d’art et de 40 000 hectares de domaine public en bordure de voie d’eau. Il est un acteur clé de la bifurcation écologique.

Les savoirs des agents sont indispensables pour s’adapter aux conséquences du changement climatique. Or depuis 2017, 443 ETP (équivalents temps plein) ont été supprimés, leur nombre total passant de 4 471 à 4 028 dans le PLF pour 2025. L’amendement a donc pour objet de rétablir le plafond d’emplois de 2017.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je partage votre avis sur l’importance des agents de VNF et sur la qualité de leur travail, en particulier dans la gestion du cycle de l’eau.

Notre commission a souvent été alertée sur la baisse du plafond d’emplois de VNF. Dans le PLF pour 2025, pour la seconde fois consécutive, ce plafond est stabilisé à hauteur de 4 028 ETP.

L’établissement est préservé des coupes budgétaires. Je serai attentive au respect des trajectoires prévues dans le COP pour les moyens humains et financiers. Nous venons d’augmenter les crédits de VNF de 200 millions.

La commission rejette l’amendement.

 


Amendement II-CD152 de M. Gérard Leseul

M. Denis Fégné (SOC). Il s’agit d’accorder 50 millions d’euros supplémentaires à l’Afit dont les recettes proviennent de la taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques, les amendes forfaitaires des radars automatiques, la taxe d’aménagement du territoire et la taxe de solidarité sur les billets d’avion. Certaines de ces recettes ont connu une baisse significative en raison de la crise sanitaire.

La fragilité du modèle de financement des infrastructures, qui repose essentiellement sur l’Agence, est connue. Elle a été accrue ces dernières années par de multiples bricolages financiers dans des textes budgétaires rectificatifs.

Nous demandons au Gouvernement de lever le gage afin de ne pas avoir à ponctionner les crédits du programme Service public de l’énergie.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. L’Afit est désormais financée par le biais de taxes affectées prélevées sur les mobilités dites carbonées – concessions autoroutières, transport aérien, etc.

Bien que les recettes diminuent en 2025, passant de 4,6 à 3,7 milliards d’euros, l’Agence conserve un montant de recettes affectées bien supérieur à celui de 2023. Elle dispose ainsi des moyens nécessaires pour accompagner les projets prioritaires du Gouvernement, assurer le financement des restes à payer correspondant aux engagements antérieurs, et contribuer aux programmes de régénération et de modernisation des réseaux.

Cependant, j’en conviens, nous devons rester vigilants quant à l’évolution des ressources de l’Afit à court et moyen terme. M. le ministre délégué aux transports s’est engagé à mener une réflexion sur le sujet tenant compte notamment de la part croissante des véhicules électriques et de la fin des concessions autoroutières. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD179 de Mme Danielle Brulebois

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. L’amendement vise à augmenter la subvention pour charges de service public de l’Autorité de régulation des transports (ART) de 3,6 millions d’euros.

L’ART s’est vu confier de nombreuses missions nouvelles ces dernières années. La transposition du quatrième paquet ferroviaire européen a étendu les compétences de l’autorité dans le domaine de l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire. La loi d’orientation des mobilités a élargi ses missions à de nouveaux secteurs : la régulation des activités de gestionnaire de l’infrastructure, de gestionnaire technique ainsi que des prestations de sûreté exercées par la RATP en Île-de-France ainsi que la régulation du secteur des services numériques de mobilité. Enfin, la loi DDADUE du 8 octobre 2021 a confié à l’autorité de nouvelles responsabilités dans le secteur aéroportuaire et en matière routière.

Pour assumer ses nouvelles compétences, ses effectifs sont passés de 62,5 ETP en 2015 à 102 en 2022. Or, dans le même temps, la subvention est restée stable, autour de 11 millions, avant d’être majorée, mais insuffisamment, à 14 millions en 2022 puis à 15 millions d’euros en 2025. Aussi, chaque année, l’ART doit-elle puiser dans ses réserves pour financer ses charges. Cette situation anormale ne peut pas se prolonger indéfiniment.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD67 de M. Sylvain Carrière

M. Sylvain Carrière (LFI-NFP). L’amendement a pour objet de renforcer l’accessibilité des transports aux personnes en situation de handicap.

En France, 12 millions de personnes sont en situation de handicap et 15 millions développent une maladie invalidante. Or seulement 482 gares sur 3 000 sont accessibles aux personnes à mobilité réduite ; elles étaient 364 il y a deux ans ; à ce rythme, il faudrait encore plus de trente ans pour rendre l’ensemble des gares accessibles.

Nous devons faciliter le quotidien des personnes en situation de handicap et leur permettre ainsi de participer pleinement à la vie sociale. Lorsque nous rendons accessibles les transports pour les personnes à mobilité réduite, cela sert aussi aux utilisateurs de poussettes, aux personnes âgées et aux femmes enceintes.

Nous revendiquons un nivellement par le haut en matière d’accessibilité des équipements publics. Nous devons y consacrer les moyens nécessaires afin de rattraper notre retard.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Le programme de mise en accessibilité des gares est le premier programme d’investissements de la société SNCF Gares et connexions – cela représente près de 350 millions tous les ans. De son côté, l’État a dégagé près de 120 millions en 2024 dont 100 millions au titre de la nouvelle génération de contrats de plan État-région 2023-2027.

En tout état de cause, comme l’État s’y est engagé lors de la Conférence nationale du handicap d’avril 2023, les travaux de l’ensemble des gares nationales seront lancés d’ici à la fin 2027. Les enveloppes prévues dans le cadre des volets mobilité des CPER 2023-2027 sont dimensionnées à cet effet : 928 millions d’euros dont 384 pour la part de l’État sont inscrits dans les avenants mobilité.

Il est encore trop tôt pour savoir si ces moyens seront insuffisants pour atteindre les objectifs fixés. Avis défavorable.

M. Peio Dufau (SOC). Je travaille à SNCF Gares et connexions. Je peux d’ores et déjà vous annoncer que les crédits que vous avez évoqués ne seront pas suffisants pour assurer l’accessibilité de l’ensemble des gares.

La commission adopte l’amendement.

 


Amendement II-CD68 de M. Sylvain Carrière

M. Sylvain Carrière (LFI-NFP). L’amendement vise à généraliser le développement des plateformes de mobilité. Déployées à l’échelle des bassins de mobilité, elles assurent le lien entre les usagers et les organisateurs de la mobilité.

En France, 15 millions de personnes souffrent de précarité dans leur mobilité, soit 1,7 million de plus qu’en 2022. Pour nombre d’entre elles, la cause en est le manque d’harmonisation entre les types de transports.

Prenons l’exemple d’un bus qui arrive dix minutes après le début des cours au collège, aucun élève ne le prendra. En avançant son départ de dix minutes, le report modal deviendrait possible. Les plateformes de mobilité permettent de tels ajustements mais elles restent trop peu développées.

En 2017, des expérimentations ont été menées par WeMove. Le rapport sur les incidences économiques de l’action pour le climat de Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz, qui les mentionne, conclut qu’un euro investi dans une plateforme permet en retour une économie de 6 euros à la collectivité. Pour offrir à 5 000 personnes supplémentaires un accompagnement à la mobilité en 2025, nous proposons d’engager 50 millions d’euros.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je reconnais l’utilité des plateformes de mobilité pour les publics spécifiques, qui ne trouvent pas de solution dans le système classique et qui ont besoin d’un accompagnement vers l’autonomie.

Cependant, les autorités organisatrices des mobilités disposent déjà d’une certaine latitude pour investir dans ces dispositifs en fonction des besoins locaux. Le Laboratoire de la mobilité inclusive a référencé 221 plateformes en 2023, qui font d’ailleurs souvent l’objet d’un accompagnement ou d’un soutien financier de l’État.

Il est donc préférable de laisser ces autorités adapter les solutions en fonction des spécificités de leur territoire, plutôt que d’imposer un déploiement généralisé qui ne correspondrait pas forcément aux attentes ou à la réalité des territoires.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD166 de M. Karim Benbrahim

M. Karim Benbrahim (SOC). Cet amendement tend à soutenir la transition écologique des entreprises de transport maritime, par la création d’un fonds doté de 125 millions d’euros.

Le soutien de l’État se résume à des mesures en faveur de la compétitivité, de l’emploi et de la modernisation de la flotte de commerce. Ces objectifs sont insuffisants car ils occultent les enjeux écologiques.

Il convient, d’une part, de repenser la place des échanges internationaux dans nos modes de consommation et, d’autre part, de réussir la décarbonation de la part du transport maritime qui restera nécessaire.

Le fonds pourra être alimenté par l’affectation d’une part des revenus du système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne, qui inclut depuis cette année les émissions du transport maritime.

M. Jimmy Pahun, rapporteur pour avis. Je partage l’objectif de décarbonation et le transport maritime s’y attelle. J’ai déjà évoqué les zones Seca (zones de contrôle des émissions de soufre) ; les changements de carburant ; le recours à la propulsion vélique.

Dans le cadre de la stratégie nationale portuaire adoptée en 2021, l’État soutient les investissements dans les grands ports maritimes visant au déploiement de l’offre d’électricité à quai à hauteur de 175 millions. Pour l’heure, 4 milliards ont été engagés. Les réalisations concrètes en matière d’électrification des ports sont là : Marseille va devenir le premier port 100 % électrique d’ici à 2028, il est déjà le premier port connecté en Europe pour les ferrys.

Le travail est fait, les choses avancent. Votre amendement est satisfait. Je vous invite à le retirer, à défaut, j’y serai défavorable.

M. Karim Benbrahim (SOC). Mon amendement ne concerne pas l’électrification des ports mais plutôt le changement de propulsion des navires.

Le système d’échange de quotas d’émission de l’Union européenne procure une nouvelle source de financement. Il serait incompréhensible que les projets de recherche et développement pour construire des navires moins polluants ne bénéficient pas des fonds de l’Union européenne. Je maintiens mon amendement dans la mesure où vous ne répondez pas aux questions qu’il soulève.

M. Jimmy Pahun, rapporteur pour avis. J’ai commencé mon propos en évoquant l’évolution obligatoire de la propulsion des navires.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD148 de M. Romain Eskenazi

M. Romain Eskenazi (SOC). J’ai bien conscience que le Gouvernement cherche des économies partout mais elles n’ont pas lieu d’être lorsque la sécurité est en jeu. Je parle là du sauvetage en mer.

Au cours de l’été, on a dénombré 983 situations de noyade dont 27 % – 268 – se sont soldées par des décès ; les deux tiers des personnes ont été sauvées par les membres de la SNSM qui sont pour beaucoup des volontaires.

Le budget de le SNSM finance la formation, la création de postes de secours, ou encore la signalétique en mer. Or il subit cette année une baisse de 30 %, soit 3 millions d’euros. Je demande donc non pas une augmentation mais simplement le maintien des crédits par rapport à l’année dernière. Il s’agit de sauver des vies sur nos plages.

M. Jimmy Pahun, rapporteur pour avis. Il y a trois ou quatre ans, nous avons voté une hausse de la subvention de la SNSM de 4,5 millions portant l’aide de l’État à 10 millions par an. C’est énorme. La bonne nouvelle cette année provient des recettes de la taxe sur les éoliennes maritimes qui représentent 1,7 million – la SNSM en perçoit 5 %.

Je vous demande de retirer votre amendement sans quoi je serai obligé de donner un avis défavorable. J’aimerais que la SNSM commence à valoriser les investissements dont elle a bénéficié. Elle a reçu beaucoup d’argent et elle en lève aussi grâce à ses très nombreuses actions qui suscitent des dons importants. Je félicite d’ailleurs les bénévoles pour leur engagement exceptionnel. N’oublions pas non plus ceux qui vont en mer faire du sauvetage.

Je voudrais que la SNSM commence à rénover sa flotte. Le programme est lancé depuis cinq ans mais il est difficile de trouver le bon chantier pour construire les navires, notamment de première catégorie.

Je vous jure que la SNSM a ce qu’il faut pour l’instant.

M. Pierre Meurin (RN). Nous voterons avec grand plaisir l’amendement. Conformément à notre opposition constante aux énergies intermittentes, nous sommes très heureux de prendre de l’argent aux éoliennes pour le donner au sauvetage en mer.

M. Romain Eskenazi (SOC). Je salue la force de conviction du rapporteur pour avis. Je remercie M. Meurin pour son soutien mais je l’invite à lire l’exposé sommaire jusqu’au bout. Nous y précisons que « notre volonté n’est pas de réduire les crédits du programme 345 Service public de l’énergie, c’est la raison pour laquelle nous demandons au Gouvernement de lever le gage. »

M. Pierre Meurin (RN). J’invite le Gouvernement à ne pas lever le gage.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CD77 de Mme Ersilia Soudais

Mme Ersilia Soudais (LFI-NFP). Il s’agit d’adopter un plan de reconversion pour les salariés travaillant dans le secteur des jets privés dont nous prônons l’interdiction dans l’espace aérien français.

Alors que le Gouvernement appelle à la sobriété énergétique, les ultra-riches sont épargnés et continuent de nous étouffer avec leur bilan carbone désastreux. Kylian Mbappé a ainsi parcouru en jet privé pas moins de 6 600 kilomètres en cinq jours de l’Espagne à la Suède en passant par la France.

Le jet privé reste le symbole d’un mode de vie écocidaire. Entre 2005 et 2019, les émissions de CO2 de ces appareils en Europe ont augmenté de près d’un tiers ; leur usage est cinquante fois plus polluant qu’un trajet en train. La situation est d’autant plus scandaleuse que des liaisons ferroviaires à grande vitesse existent sur 70 à 80 % des dix itinéraires les plus empruntés par les jets privés.

Par cet amendement, nous proposons donc la reconversion des salariés dans des secteurs contribuant à la bifurcation écologique tels que le ferroviaire, la rénovation thermique ou les énergies renouvelables.

M. Romain Eskenazi, rapporteur pour avis. Le groupe Socialistes ne défend pas, à court terme, l’interdiction des jets privés mais leur très forte taxation. La proposition du Gouvernement en la matière est assez encourageante mais nous souhaitons aller plus loin.

Je suis néanmoins favorable à votre amendement. L’inévitable baisse de l’activité des jets privés qu’entraînera la taxation – l’instauration d’un couvre-feu de huit heures par nuit dans les douze plus grands aéroports que je propose pourrait accentuer cette tendance – fera naître des besoins de reconversion professionnelle. Je suggère même d’élargir le plan à toutes les personnes qui travaillent aujourd’hui dans le secteur aérien puisque l’objectif est bien un ralentissement de la croissance du trafic pour des raisons écologiques et sanitaires.

M. Emmanuel Blairy (RN). Madame Soudais, vous refusez le progrès.

Sans prétention, je me permets de vous rappeler que l’homme à ses débuts marchait puis il s’est déplacé à cheval avant de recourir aux bateaux puis vint le train et enfin les moteurs thermiques et l’avion.

Ne devrions-nous pas plutôt nous intéresser à la pollution émise par un cargo qui traverse le monde grâce aux traités de libre-échange que vous soutenez parfois ?

Vous voulez reconvertir les salariés du secteur des jets privés, mais avez-vous un plan de reconversion pour les agriculteurs qui croulent sous les normes ?

Vous préférez une fois encore l’idéologie au bon sens paysan.

Mme Clémence Guetté (LFI-NFP). C’est pathétique, monsieur le député. Je suis atterrée de vous entendre tout mélanger. Vous partez des jets privés pour arriver aux agriculteurs en passant par le libre-échange.

La seule cohérence dans votre pensée est le soutien que vous apportez à la fois aux ultra-riches qui se déplacent en jet privé et aux tenants de l’agrobusiness.

Loin de votre discours démagogique, vous devriez savoir que les agriculteurs sont les premiers à pâtir de l’utilisation de pesticides. Les normes environnementales sont là aussi pour les protéger.

Vous avez refusé de soutenir tous les amendements qui augmentaient les crédits alloués au ferroviaire et au vélo, parce que votre modèle, c’est la bagnole, chère à Emmanuel Macron. Vous préférez protéger les jets privés plutôt que soutenir des modes de déplacement absolument indispensables pour le futur. Vous êtes en commission du développement durable, essayez au moins de faire un petit peu semblant.

M. Peio Dufau (SOC). Vous êtes un peu schizophrènes. Tout à l’heure, vous défendiez le propriétaire de la Twingo contre celui du Porsche Cayenne et maintenant vous défendez les propriétaires de jets privés !

M. Pierre Meurin (RN). Je vous remercie, madame Guetté, pour vos leçons de morale mais contrairement à vous, nous n’avons pas voté pour Emmanuel Macron.

La gauche s’oppose à toute forme de progrès. Vous voudriez presque revenir à la traction animale voire humaine.

Ce que vous appelez avec beaucoup de mépris le modèle de la bagnole, c’est celui que connaissent les Français qui travaillent, ceux des zones rurales. Vous êtes complètement déconnectée.

L’amendement est purement incantatoire ; il est d’ailleurs présenté comme un amendement d’appel. Vous voulez interdire les jets privés mais vous soutenez les éoliennes qui sont fabriquées avec du balsa issu de la déforestation de l’Amazonie. Il n’est pas contraire à la raison de préférer la destruction du monde à une égratignure de son doigt.

La commission adopte l’amendement.

 

 

Article 43 et état C : Crédits des budgets annexes

 

Amendement II-CD76 de Mme Clémence Guetté.

Mme Clémence Guetté (LFI-NFP). Nous constatons la forte reprise des flux aériens. En 2019, on a recensé un peu plus de 700 000 mouvements aériens à Paris-Charles-de-Gaulle et à Paris-Orly ; après une baisse due à la crise du covid, les entreprises aériennes ont multiplié leurs offres pour compenser les pertes financières liées à la crise sanitaire. Cette reprise cause des nuisances sonores extrêmement fortes, lesquelles ont des effets sanitaires très graves pour les riverains des aéroports, par exemple à Orly qui se trouve dans ma circonscription. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) nous alerte sur le fait que le bruit constitue le deuxième facteur environnemental provoquant le plus de dommages sanitaires en Europe derrière la pollution atmosphérique ; or l’avion, c’est la pollution et le bruit, puisqu’un décollage dégage plus de 130 décibels.

L’amendement vise à créer un organe de contrôle chargé de garantir le respect des couvre-feux légaux, de minimiser les nuisances sonores et de sanctionner les compagnies qui dérogeraient aux règles.

M. Romain Eskenazi, rapporteur pour avis. Je vis depuis trente-deux ans sous les avions de Roissy et j’ai axé mon rapport sur les impacts climatiques et les nuisances sonores du trafic aérien, qui font peser des risques sur la santé, notamment des troubles cardiovasculaires et du sommeil. Voilà pourquoi je recommande l’établissement d’un couvre‑feu à l’échelle nationale pour préserver la santé et le sommeil des riverains des aéroports qui sont trop nombreux en France : j’espère que la commission nous soutiendra dans ce combat. Je partage donc totalement votre constat.

Votre amendement vise à créer un nouveau programme au sein du budget annexe dédié au contrôle des nuisances. Le programme 614 Transports aériens, surveillance et certification du budget annexe comprend déjà une composante relative à la réduction des nuisances sonores et atmosphériques à proximité des aéroports.

En outre, l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (Acnusa), autorité administrative indépendante, a déjà pour mandat de garantir le respect des couvre‑feux et des autres restrictions. Elle a d’ailleurs infligé 639 sanctions en 2023 pour un montant de 11,7 millions d’euros d’amende aux compagnies aériennes. Le budget de l’Acnusa relève du programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologique, du développement et de la mobilité durables et non du budget annexe, aussi préconiserai-je plutôt, comme je le recommande dans le rapport, de tripler le plafond des amendes pouvant être distribuées aux compagnies aériennes en cas de manquement aux prescriptions en vigueur car les sommes encourues sont actuellement trop peu dissuasives.

Je me réjouis que le ministre délégué chargé des transports ait annoncé tout à l’heure que quelqu’un serait nommé à la tête de l’Acnusa dans le mois qui vient, la présidence étant vacante depuis avril. De ce fait, aucune amende n’a pu être prononcée et les dossiers restent en souffrance malgré le travail des services de l’Autorité.

Enfin, je défends l’élaboration de nouvelles restrictions, notamment l’interdiction de décollages et d’atterrissages nocturnes, afin d’aboutir à un juste équilibre entre la préservation de cette activité économique et celle de la santé des riverains et du climat.

Je m’en remets à la sagesse de la commission sur l’amendement, en recommandant de privilégier une augmentation de l’action 26 du programme 217 qui porte sur l’Acnusa, même si je suis évidemment favorable à l’augmentation des moyens dédiés au contrôle et aux sanctions des nuisances aériennes.

La commission adopte l’amendement.

 

Mme la présidente Sandrine Le Feur. Conformément à la loi organique relative aux lois de finances (Lolf), les amendements à la seconde partie du PLF peuvent transférer des crédits d’un programme à l’autre, sous réserve de la disponibilité de ceux-ci. J’appelle votre attention sur le fait que, compte tenu des amendements que nous avons déjà adoptés, le programme 174 Énergie, climat et après-mines n’aura bientôt plus de crédits disponibles – il ne reste plus que 600 millions en crédits de paiement (CP). Cela rendrait irrecevables, à la commission des finances ou en séance publique, les amendements suivants transférant les crédits de ce programme.

 

La commission émet un avis défavorable à l’adoption des crédits du budget annexe Contrôle et exploitation aériens.

 

Après l’article 60

 

Amendement II-CD17 de Mme Lisa Belluco

Mme Lisa Belluco (EcoS). Au risque de revenir sur un sujet qui fâche, l’amendement vise à interdire tout financement de nouvelles autoroutes ou de nouvelles lignes à grande vitesse (LGV) par de l’argent public. Ces projets ne répondent à aucun enjeu de nos politiques de transport, ils empêchent la décarbonation des mobilités du quotidien, ils augmentent la pollution de l’air, ils détruisent les sols – que l’on songe aux 1 500 hectares de terrains fertiles artificialisés pour la construction de la ligne reliant Lyon à Turin –, ils constituent une débauche d’argent public – le PLF affecte près de 325 millions en autorisations d’engagement (AE) et 464 millions en CP au financement de l’Afit et de nouveaux réseaux routiers – et ils ne sont même pas utiles à tous nos concitoyens puisque les TGV sont utilisés par les personnes les plus aisées et que les autoroutes sont délaissées quand une alternative gratuite existe même si celle-ci est un peu moins rapide.

L’amendement ne minore pas les ressources de l’Afit mais il recentre ses investissements vers d’autres types d’infrastructures comme les lignes de train du quotidien, les trains de nuit, les pistes cyclables – les crédits du fonds Vélo sont gelés pour cette année et rien n’est prévu pour 2025 –, la régénération et l’entretien du réseau routier existant, qui souffre effectivement du changement climatique. Il n’est en revanche plus possible qu’un flot d’argent public finance des projets à contretemps de la crise écologique : soyons un peu modernes, chers collègues.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure avis. L’amendement propose de cesser de financer de nouvelles lignes LGV et autoroutes par l’Afit, en raison de leur impact écologique. Cependant, ces infrastructures sont essentielles pour l’amélioration de la mobilité. Les lignes LGV, comme Lyon-Turin, favorisent le report modal du transport routier et aérien vers le rail, contribuant à la réduction des émissions de dioxyde de carbone (CO2). Quant aux autoroutes, elles restent parfois indispensables pour les territoires ruraux et périurbains, dans lesquels les alternatives de transports collectifs sont limitées.

Par ailleurs, les crédits pour les projets autoroutiers diminuent de près de 30 % en AE et en crédits de paiement, afin de donner la priorité aux mobilités décarbonées et à la régénération du réseau routier existant. Une approche équilibrée est nécessaire pour continuer à moderniser les infrastructures tout en limitant leur impact environnemental.

L’avis est défavorable.

M. Pierre Meurin (RN). L’amendement est la quintessence de l’idéologie écolo que nous combattons. Il cible également les routes à chaussées séparées par un terre-plein central, c’est-à-dire les voies sur lesquelles la vitesse est limitée à 110 kilomètres par heure. Celles-ci permettent de désenclaver les villes moyennes et les territoires ruraux. La ville d’Alès, qui se situe dans ma circonscription, n’est pas reliée à Nîmes : l’adoption de l’amendement empêcherait de finir cette route, qui a pour objectif de désengorger Nîmes grâce à l’aménagement d’un contournement.

Les bouchons résultent de l’absence d’infrastructures routières suffisantes pour absorber la croissance démographique : il est donc nécessaire d’aménager des contournements des villes et de construire de nouveaux tronçons routiers pour désengorger des agglomérations et des territoires. Les embouteillages polluent davantage que la circulation à une allure normale. L’adoption de votre amendement créerait des bouchons, donc de la pollution. Il en va de même de la suppression de places de stationnement dans une ville, laquelle accroît la pollution car les véhicules roulent plus longtemps pour pouvoir se garer.

Un amendement aussi idéologique montre à quel point vous ne vous souciez pas de l’amélioration de la qualité de l’air ; votre unique préoccupation est de taper sur les honnêtes gens qui roulent en voiture. Il est temps que cesse votre obsession, qui vire à une forme de pathologie politique.

M. Peio Dufau (SOC). Je viens de vérifier : il existe des voies ferrées entre Alès et Nîmes. Nous sommes donc sauvés !

Mme Lisa Belluco (EcoS). Ayant fait mes études à Alès, je connais assez bien le sujet. La suppression d’un cul-de-sac ferroviaire a permis de gagner près d’un quart d’heure entre Alès et Nîmes. La liaison entre les deux villes est désormais de bonne qualité, même s’il convient peut-être d’améliorer la fréquence des trains, ce qui nécessiterait d’adopter des amendements visant à accorder des moyens supplémentaires au transport ferroviaire en ponctionnant les lignes dédiées aux nouvelles autoroutes et LGV. Je vous remercie en tout cas d’avoir cité cet exemple, qui illustre parfaitement l’inutilité de la route lorsqu’on fait des travaux sur le rail.

M. Pierre Meurin (RN). Votre raisonnement est valable si vous habitez à deux minutes de la gare. Mais si vous vivez à Vézénobres, à sept kilomètres d’Alès, comment faites-vous pour gagner la gare sans prendre la voiture ? Peut-être voudrez-vous remplacer la route par une piste cyclable, mais allez expliquer votre projet aux gens… Je vous vois protester, mais vous avez bien parlé de « l’inutilité de la route », de façon générale et absolue. Les écologistes souhaiteraient voir la totalité des routes disparaître de la carte de France – l’amendement va d’ailleurs dans ce sens, puisqu’il vise à instaurer un moratoire sur les projets routiers, de façon générale. Vous êtes complètement hors-sol. L’exemple que j’ai cité était bon, et vos arguments complètement coupés de la réalité.

Vous opposez les mobilités les unes aux autres. Au contraire, la route, le rail et éventuellement les mobilités douces doivent être complémentaires. Votre idéologie antivoiture vous coupe de cette intelligence de l’intermodalité.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD55 de Mme Marie Pochon

Mme Marie Pochon (EcoS). Ce que j’ai dit tout à l’heure à M. le ministre délégué, je vais le répéter pour nos collègues d’extrême droite qui votent contre le train, contre le vélo et contre tout moyen de sortir les gens de la précarité mobilité. Ils pensent que le seul choix qui doit rester aux ruraux, c’est la voiture individuelle – tant pis pour leur santé et leur porte‑monnaie –, à moins que ce ne soit le jet privé… Nous, écologistes, défendons la liberté de choisir son mode de mobilité, y compris à la campagne.

En 2024, 12,3 milliards d’euros d’argent public sont provisionnés pour seulement cinquante-cinq projets routiers ou autoroutiers ; à l’heure de la disette financière, cet argent n’ira pas financer d’autres modes de mobilité. Seuls 30 millions sont alloués chaque année aux alternatives de mobilité en ruralité – aux navettes, à la structuration du covoiturage, aux solutions cyclables, au transport à la demande, à l’autopartage… Or, 30 millions d’euros, c’est aussi le coût d’un simple échangeur routier. Nous proposons donc d’arrêter de mettre des milliards dans des projets qui n’ajoutent aux routes que de nouvelles routes et n’aident pas les gens dans la galère à rouler dessus ; pour ce faire, notre amendement vise à interdire à Afit France de financer des projets à contretemps des impératifs écologiques de préservation des sols et de développement de réseaux de transport durables et accessibles à tous.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Avis défavorable, pour les raisons déjà évoquées en réponse à l’amendement II-CD17.

M. Julien Guibert (RN). Du fait de l’ouverture du réseau ferroviaire à la concurrence, ma région, pourtant dirigée par le Parti socialiste, le Parti communiste français et Europe Écologie-Les Verts, va faire fermer des lignes rurales. À compter de 2035, le technicentre de Varennes-Vauzelles, le plus gros employeur de ma circonscription et de mon département, risque également de fermer car nous n’avons aucune assurance que les sociétés ferroviaires privées l’utilisent pour assurer la maintenance de leurs trains. Par ailleurs, la gauche a supprimé l’accueil du public et fermé les guichets des gares de Saint-Florentin-Vergigny, Tonnerre, Pont-sur-Yonne et Villeneuve-sur-Yonne. Enfin, à la suite de la conclusion d’une nouvelle convention TER entre la région et la SNCF, nous avons dû nous battre pour éviter que les contractuels ne soient pas renouvelés, notamment dans les gares d’Avallon et Clamecy. Vous pouvez donc garder vos leçons de morale !

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD101 de M. Sylvain Carrière

M. Sylvain Carrière (LFI-NFP). Nous demandons un rapport sur les modalités de nationalisation des sociétés concessionnaires d’autoroutes. En effet, il n’est pas acceptable que des entreprises accumulent des profits considérables sur le dos des Français. Chaque année, les prix des péages augmentent davantage que l’inflation et certaines sociétés autoroutières refusent de payer des taxes qu’elles doivent à l’État. Pourtant, c’est open bar : les concessions sont distribuées à tout-va, au premier venu.

D’aucuns, comme l’ancienne Première ministre Élisabeth Borne, qui fut d’ailleurs l’un des artisans de la privatisation, crient au soviétisme lorsqu’il est question d’une nationalisation qui coûterait 50 milliards d’euros. Mais quel est le manque à gagner pour l’État ? D’après le rapport du Sénat sur la rentabilité des autoroutes, 55 milliards de dividendes seront distribués par Vinci et Eiffage entre 2006 et 2036 – une somme bien inférieure aux quelque 17 milliards payés par ces entreprises pour avoir le droit d’exploiter les autoroutes.

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. L’enjeu, pour l’État, est plutôt d’anticiper la fin des concessions actuelles et de préparer les futures modalités de gestion des autoroutes. Cela implique de suivre les conditions de fin des contrats actuels, de réexaminer les conditions d’un éventuel renouvellement des concessions et de renforcer le cadre réglementaire pour s’assurer que ces dernières soient conformes à l’intérêt général. Il convient aussi de déterminer les modalités d’utilisation des financements dégagés en faveur des mobilités durables. Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

 

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Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

 

Réunion du mardi 22 octobre 2024 à 21 h 30

 

Présents. - M. Gabriel Amard, M. Fabrice Barusseau, Mme Lisa Belluco, M. Emmanuel Blairy, M. Nicolas Bonnet, Mme Manon Bouquin, M. Jean-Michel Brard, Mme Danielle Brulebois, M. Sylvain Carrière, M. Bérenger Cernon, M. Marc Chavent, M. Mickaël Cosson, M. Stéphane Delautrette, M. Vincent Descoeur, M. Peio Dufau, M. Romain Eskenazi, M. Auguste Evrard, M. Denis Fégné, Mme Sylvie Ferrer, M. Jean-Marie Fiévet, Mme Clémence Guetté, M. Julien Guibert, M. Timothée Houssin, M. Sébastien Humbert, Mme Chantal Jourdan, Mme Sandrine Le Feur, Mme Julie Lechanteux, Mme Claire Lejeune, M. David Magnier, M. Pierre Meurin, M. Hubert Ott, Mme Julie Ozenne, Mme Marie Pochon, M. Loïc Prud’homme, M. Xavier Roseren, M. Fabrice Roussel, Mme Anaïs Sabatini, Mme Ersilia Soudais, Mme Anne Stambach-Terrenoir, M. Nicolas Thierry, M. Antoine Vermorel-Marques, Mme Anne-Cécile Violland

 

Excusé. - M. Matthieu Marchio

 

Assistaient également à la réunion. - M. Karim Benbrahim, Mme Danièle Carteron