Compte rendu
Commission de la défense nationale
et des forces armées
– Audition, ouverte à la presse, de l’amiral (2S) Christophe Prazuck, directeur de l’Institut de l’Océan de l’Alliance Sorbonne Université, ancien chef d’état‑major de la Marine (cycle « Espaces maritimes et enjeux de défense ») 2
– Nomination des rapporteurs pour avis sur le projet de loi de finances 2026 (sous réserve de son dépôt) 14
Mercredi
11 juin 2025
Séance de 11 heures
Compte rendu n° 73
session ordinaire de 2024-2025
Présidence
de M. Jean-Michel Jacques,
Président
— 1 —
La séance est ouverte à onze heures dix.
M. le président Jean‑Michel Jacques. Mes chers collègues, nous recevons à présent l’amiral (2S) Christophe Prazuck. Amiral, après quarante‑deux années dans la marine nationale – où nos carrières se sont croisées pendant deux années, lorsque vous étiez amiral des commandos marine et que j’étais major infirmier au commando Trépel – et après avoir été ancien chef d’état‑major de la marine, vous êtes depuis octobre 2020 à la tête de l’Institut de l’Océan de l’Alliance Sorbonne‑Université. L’objectif de cet institut consiste à favoriser des projets océaniques interdisciplinaires et à dégager une vision globale sur les problématiques maritimes, de climatologie, mais également de biologie marine, physique, géographie et géopolitique. Votre double regard, d’une part sur les enjeux de biodiversité marine au sens large et d’autre part sur les enjeux de défense et les espaces maritimes nous seront donc particulièrement utiles.
Les problématiques que j’évoquais s’ajoutent à la dégradation du contexte géostratégique et à la montée des conflictualités en mer, qui est aujourd’hui de plus en plus manifeste. La remise en cause du droit international de la mer, les stratégies de déni d’accès, les trafics de stupéfiants, la pêche illicite, les sabotages de pipelines, de câbles sous‑marins ou les attaques de drones en sont quelques exemples, que nous avons déjà évoqués lors des différentes auditions. La France, forte de son deuxième domaine maritime mondial et en tant que puissance maritime assumée, est particulièrement concernée par tous ces enjeux.
Dans ce contexte, pour défendre nos intérêts et nos ressortissants, nous pouvons compter d’ailleurs sur notre marine nationale qui opère 365 jours par an, vingt‑quatre heures sur vingt‑quatre, sur toutes les mers du monde. Acteur engagé en mer, notre marine nationale est également une sentinelle des changements du milieu marin, y compris environnementaux. La marine nationale connaît bien ce milieu marin et le protège, notamment dans le cadre de l’action de l’État en mer à travers la lutte contre la pêche illicite, la protection des aires marines protégées ou encore la lutte contre la pollution.
Amiral (2S) Christophe Prazuck, directeur de l’Institut de l’Océan de l’Alliance Sorbonne Université, ancien chef d’état‑major de la marine. Je vous remercie de m’inviter à m’exprimer aujourd’hui. J’ai quitté la marine et la fonction exigeante et passionnante de chef d’état‑major de la marine il y a cinq ans. Depuis, je dirige l’Institut de l’Océan de l’Alliance Sorbonne Université, un lieu de convergence rassemblant 1 500 chercheurs, ingénieurs, techniciens, dans trente laboratoires, cinq stations marines. Sorbonne Université est classée depuis plusieurs années dans le top 10 des universités marines dans le monde et se classe à la première place à l’échelle européenne.
J’ai beaucoup appris pendant ces cinq années, notamment dans les disciplines, que le métier de marin aborde peu ; la climatologie, la géologie, l’écologie, la biologie marine. Cette double expérience me conduit aujourd’hui à porter un regard enrichi sur l’océan et sur les problématiques maritimes. À l’Institut de l’Océan, j’ai touché du doigt une réalité scientifique qui, jusque‑là, était assez abstraite pour moi : la transformation de l’océan, qui intervient certes à petite vitesse, mais de manière indubitable, irréversible, pour des décennies. Il se transforme partout, des côtes bretonnes jusqu’à l’océan austral, et pour des siècles.
L’océan change, ses caractéristiques physiques, chimiques, écosystémiques changent, et ces changements modifieront les missions et les moyens de la marine. Par ailleurs, ces modifications appellent une évolution de la gouvernance de l’océan. De même, une évolution juridique pourrait également influer sur les grands principes de l’action maritime. L’océan n’est pas seulement un espace naturel et un enjeu environnemental, mais aussi un espace politique, économique, géostratégique structurant, dont l’évolution entraînera des conséquences profondes sur notre sécurité.
Afin d’évoquer l’impact sur les marines et l’activité maritime, j’illustrerai mon propos à travers cinq tableaux.
Mon premier tableau portera sur les ressources halieutiques. L’océan régule le climat, il absorbe un peu plus de 25 % du gaz carbonique que nous émettons, 90 % de l’excès de chaleur dû à l’effet de serre, mais cette fonction de tampon a un coût. Les évolutions physiques et chimiques comme le réchauffement des océans, l’acidification de l’eau de mer, la désoxygénation de certaines zones sont bien identifiées et la recherche aujourd’hui tente de comprendre quels organismes marins s’adapteront à ces évolutions, quels autres migreront, disparaîtront ou à l’inverse se multiplieront.
Lorsque ces organismes marins jouent un rôle clé dans la pêche ou l’aquaculture – soit qu’on les exploite directement, soit qu’ils conditionnent l’abondance ou la bonne santé d’espèces pêchées –, cette transformation engendrera un impact économique, social ou sanitaire. Par exemple, nous observons en ce moment les flambées de ciguatera dans les territoires du Pacifique. Cette transformation laisse augurer de tensions autour d’une ressource halieutique qui changera probablement de taille, d’aires et de migrations. Dans les régions où la ressource halieutique constitue la base de la sécurité alimentaire, les déséquilibres qu’elle connaîtra entraîneront des conséquences sociales, puis politiques.
À cet impact climatique sur la ressource halieutique s’en ajoute un autre, lié à la biodiversité marine. Elle fait l’objet d’un traité international discuté en ce moment à Nice, le traité BBNJ (Marine Biodiversity of Areas Beyond National Jurisdiction). Il n’est pas possible de résumer la biodiversité à quelques espèces phares mises en avant dans les campagnes de sensibilisation, ni de la limiter à la liste de toutes les espèces présentes sur la terre ou dans les océans. Il faut également prendre en considération toutes les interactions entre ces espèces, que l’on pourrait représenter comme un « mikado » géant. Comme dans le mikado, le mouvement d’une baguette déplacée imprudemment peut modifier les équilibres d’un grand nombre d’autres baguettes, voire de tout le jeu.
Les chercheurs commencent seulement à décrypter ces interactions, notamment avec les micro‑organismes les plus petits mais les plus abondants – 80 % de la biomasse de l’océan –, à la base de toute la chaîne alimentaire. Une pression intense sur une pièce d’un écosystème peut le faire basculer brutalement dans un nouvel état. Même si tous les mécanismes ne sont pas encore mis à jour, des exemples abondent, qu’il s’agisse de la morue sur les bancs de Terre‑Neuve, les eaux jadis très poissonneuses de la Namibie dominées depuis les années 1960 par les gobies et les méduses, ou les efflorescences d’algues toxiques en mer de Chine orientale. Plus de 3 milliards de personnes dépendent directement des ressources halieutiques pour leur alimentation. Un effondrement des écosystèmes marins ne constituerait pas seulement une perte écologique, mais aussi une crise de sécurité alimentaire mondiale entraînant des conséquences sociales, migratoires et sécuritaires.
Ces enjeux conduisent la France à investir dans la surveillance, la recherche halieutique, la coopération technique, en particulier en Afrique de l’Ouest et dans le bassin indopacifique. Il s’agit d’un levier de diplomatie bleue, qui concerne à la fois la pêche, la surveillance satellitaire, la formation des principes de l’action de l’État en mer, la planification spatiale et la régulation concertée des captures.
Le deuxième tableau concerne les technologies duales, pour protéger la haute mer comme pour l’exploiter. Plusieurs évolutions récentes annoncent une recrudescence des activités maritimes au grand large, tant pour la préservation de l’océan que pour son exploitation. Avec le traité BBNJ, dit « traité de la haute mer », l’ambition consiste à protéger la biodiversité de la haute mer en dehors des zones économiques exclusives (ZEE) par exemple, avec l’instauration d’aires marines protégées dans l’espace maritime international.
Se pose également la question du contrôle de ces futures aires très éloignées des côtes. Seuls des moyens satellites et l’intelligence artificielle seront à même de détecter des signaux anormaux permettant de diriger des moyens d’intervention. D’ailleurs, il est loisible de s’interroger sur ces moyens d’intervention. À quels pays appartiennent‑ils ? Quel droit les régira‑t‑il ? Ces techniques de surveillance compliqueront la capacité des flottes à rester discrètes, puisque l’objectif sera de savoir ce qui se passe à 3 000 kilomètres au large, par exemple au milieu de la mer d’Arabie, au large de Madagascar.
Dans le domaine de l’exploitation, quelques entreprises comme la fameuse Metals Company et certains États développent un appétit minier pour les grands fonds marins. Notre pays s’y oppose à juste titre. L’autorité internationale des fonds marins est pressée de définir un code minier pour permettre le début de l’exploitation des grands fonds. Mais à supposer qu’un tel code soit adopté, qui en surveillera l’application et le respect par 2 000 à 6 000 mètres de fond ? Qui disposera des outils indépendants de surveillance, d’inspection, de constatation au moment où notre pays déploie une stratégie de maîtrise des fonds marins ? Ces perspectives économiques et technologiques engendreront également des effets duaux.
Le troisième tableau est relatif à la montée du niveau des mers et la recomposition du littoral. D’ici 2050, un milliard d’êtres humains vivront dans des zones côtières basses. Certaines villes, y compris en France, devront adapter ou relocaliser leurs infrastructures : ports, routes, bases navales, réseaux d’eau et d’électricité seront à renouveler. Ce chantier est gigantesque, il exige des compétences d’ingénierie, de génie civil, de travaux maritimes ; il constitue également un facteur de déplacement des populations, et donc de tensions géopolitiques.
En effet, cette élévation du niveau de la mer ne sera pas uniforme à la surface du globe. La Bretagne verra le niveau de la mer monter de cinquante centimètres à un mètre selon les derniers rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) d’ici la fin du siècle, quand la Finlande verra baisser le niveau de la mer jusqu’à un mètre. L’université technique d’Hô‑Chi‑Minh‑Ville estime qu’en 2100, 85 % du delta du Mékong et ses 17 millions d’habitants, pourraient être sous les eaux. Djakarta (11 millions d’habitants dans la ville et 30 millions dans l’agglomération) verrait le niveau de la mer s’élever de 3,80 mètres en 2100, ce qui a conduit le gouvernement indonésien à déplacer la capitale de 2 000 kilomètres sur l’île de Bornéo.
Concernant la marine, je retiens trois faits marquants en lien avec l’élévation du niveau de la mer. Premièrement, l’élévation du niveau de la mer impose de penser la viabilité des infrastructures portuaires à très long terme. Deuxièmement, cette évolution ne sera pas uniforme, il y aura des gradients d’impact, avec des zones très impactées et des zones moins impactées. Ces gradients d’impact se traduiront par des tensions économiques et politiques dans les zones côtières. Troisièmement, de nouvelles questions apparaîtront. Les ZEE seront‑elles redessinées en fonction de l’évolution du trait de côte, notamment dans les zones deltaïques ? Un État englouti sous les eaux conservera‑t‑il une souveraineté économique sur une ZEE centrée sur une terre qui n’existe plus ?
Le quatrième tableau, porte sur les catastrophes naturelles. La chaleur stockée dans les océans alimente des phénomènes extrêmes : cyclones, tempêtes locales, pluies diluviennes. Ces catastrophes touchent d’abord les zones tropicales, nos outre‑mer, mais aussi nos côtes méditerranéennes, dans la vallée de la Roya ou à Valence en Espagne. Les immenses ravages causés par ces phénomènes nécessitent toujours des réponses interministérielles et de long terme, dans lesquelles la flotte de commerce stratégique pourrait jouer un rôle outre‑mer. Cependant, dans l’urgence, pour la réaction immédiate, la voie maritime est très souvent la seule possible, car les infrastructures aéroportuaires sont hors d’état de fonctionner. L’entrée en premier dans une zone côtière touchée par un événement extrême se fera d’abord par voie de mer.
Pour la marine, disposer de moyens d’intervention immédiate dans nos outre‑mer au profit des populations françaises et de nos voisins constitue une nécessité. Les entraîner dans un cadre interarmées, interministériel, international est une sage précaution. J’ai d’ailleurs noté que la marine avait lancé ce type d’exercice avec les marines riveraines de l’océan Indien, et en partenariat avec la marine indienne.
Mon cinquième tableau a trait à la recomposition de l’espace océanique. Après avoir été dominé sans partage par les marines occidentales depuis la fin de la guerre froide, l’océan est redevenu un espace de compétition entre les puissances. La Chine construit une marine d’outre‑mer de rang mondial, la Russie relance ses savoir‑faire, la Turquie, l’Égypte, le Brésil bâtissent des marines puissantes, des tensions s’exacerbent en Méditerranée orientale, dans le golfe de Guinée, en mer de Chine.
Certaines de ces ambitions en mer de Chine, en Méditerranée orientale, sur les grands fonds, remettent en cause le droit de la mer adopté en 1982 à Montego Bay. Mais parallèlement, un autre mouvement incite à une régulation accrue de l’océan, instaurant plus de limites, moins de libertés. Le droit de la mer fondé à Montego Bay a été conçu dans un monde où l’on pensait l’océan infini, inaltérable, inépuisable, où la liberté de navigation semblait le grand enjeu structurant. Ce cycle est clos. L’océan est devenu un espace fini, vulnérable, disputé. Dans ce nouveau cycle, la liberté de navigation demeure cruciale, mais elle ne peut plus être pensée indépendamment des autres enjeux : la protection des écosystèmes, la régulation des flux, l’accès aux ressources, la sécurité alimentaire, la responsabilité des États.
Je vois six implications pour la marine. D’abord, la France dispose de 11 millions de kilomètres carrés de ZEE, sa marine est présente sur tous les océans. Elle contribuera à la surveillance de la santé de l’océan, comme elle le fait avec succès dans la mission Bougainville. Les observations océanographiques réalisées depuis certaines unités de la marine permettront la détection des signaux faibles qui annoncent des bascules dans les écosystèmes et donc sur les ressources halieutiques.
Ensuite, la marine fera face à des tensions accrues, puisque les pêcheurs seront confrontés à la raréfaction ou à la migration des ressources. Le haut niveau de violence des pêcheurs illicites dans les eaux guyanaises ou l’audace des pêcheurs vietnamiens pénétrant dans le lagon de Nouvelle‑Calédonie se multiplieront.
En outre, la marine sera impliquée dans l’aide immédiate à la suite de catastrophes naturelles, plus souvent, plus longtemps, face à des impacts croissants sur les populations. Ces événements extrêmes d’une intensité dévastatrice laisseront les zones côtières les plus fragiles dans un grand dénuement et pourront les plonger dans une crise économique et politique de longue durée, voire les transformer en États faillis. De plus, la marine intégrera dans son équation stratégique les capacités duales qui seront mises en œuvre pour surveiller la haute mer ou pour intervenir dans les grands fonds.
Par ailleurs, elle évoluera dans un environnement légal à la fois fragilisé par les puissances révisionnistes et transformé par un besoin de régulation renforcée. L’entretien d’une compétence de droit maritime est essentiel. Enfin, la marine intégrera l’élévation du niveau de la mer et la transformation du trait de côte dans la planification de long terme de ses infrastructures portuaires.
En conclusion, l’océan constitue désormais un acteur à part entière du destin géopolitique des nations. Sa santé conditionne notre sécurité alimentaire, sa montée redessine nos cartes, ses désordres climatiques imposent une adaptation de nos forces et sa gouvernance reflète l’état du multilatéralisme mondial aujourd’hui fragilisé. Dans ce contexte, gouverner l’océan ne consiste plus seulement à protéger l’environnement, mais aussi à préserver, contribuer à la paix, à la stabilité, à la souveraineté et à la résilience de la nation. Il s’agit d’une ambition collective et d’une responsabilité pour les générations futures.
M. le président Jean‑Michel Jacques. Je vous remercie pour cette approche, complémentaire aux autres auditions Je cède à présent la parole aux orateurs de groupe.
M. Julien Limongi (RN). Amiral, vous avez commandé la marine nationale. Vous connaissez donc mieux que quiconque la culture d’engagement et de résilience de nos marins. Lors du sommet de l’ONU sur les océans, bien des acteurs ont mis en avant les enjeux cruciaux que constituent les océans ainsi que les fonds marins. Nous connaissons la complexité croissante des missions que doit aujourd’hui remplir notre marine nationale : protection du domaine maritime, présence dans les zones de tension, surveillance des grands fonds, autant de responsabilités colossales assumées avec des moyens de plus en plus contraints.
La marine a toujours fait beaucoup avec peu, est présente sur tous les théâtres, qu’il s’agisse de la Méditerranée, de l’océan Indien ou de l’Indopacifique. Elle n’a jamais failli à sa mission malgré une sous‑dotation chronique. Aujourd’hui, la question du volume revient toutefois avec urgence. Le rapport du sénateur Dominique de Legge sur l’exécution de la loi de programmation militaire 2024‑2030 est alarmant : retard de livraison, report de crédit, inflation mal anticipée. L’indicateur de réalisation des équipements achetés s’établit à 62 %, avec des tensions particulièrement marquées sur les frégates, alors même que la marine est un pilier de notre autonomie stratégique. Aussi, dans les conditions actuelles d’exécution de la LPM, et face aux ambitions navales croissantes de nos partenaires comme de nos compétiteurs et du risque de la conflictualité qui explose, pouvons‑nous encore tenir nos objectifs ?
Amiral (2S) Christophe Prazuck. N’étant plus aux affaires, j’éprouve des difficultés à vous renseigner sur l’exécution de la LPM. L’ensemble de l’outil de défense a été réduit de manière parfois inquiétante depuis la LPM de 2009, mais le mouvement s’est inversé depuis 2015.
Un patrouilleur à la mer surveille autour de lui l’équivalent d’un département français. Si nous voulions surveiller la ZEE française, il faudrait avoir en permanence 600 bateaux à la mer. Cela n’arrivera jamais et n’a pas de sens. En conséquence, la meilleure manière d’assurer la surveillance de zones qui aiguisent de plus en plus d’appétits consiste à agir autrement, à travers les satellites ou l’intelligence artificielle, pour diriger des moyens – qui seront toujours trop comptés – vers les cibles les plus importantes.
Par ailleurs, les frégates sont effectivement en nombre insuffisant, mais les frégates multimissions (Fremm) sont des bateaux exceptionnels, dont la qualité n’a pas d’équivalent dans le monde. Le fait d’avoir doublé les équipages de ces bateaux permet de doubler les jours de mer et, d’une certaine manière, de compenser en partie leur nombre insuffisant.
M. Yannick Chenevard (EPR). Amiral, comme vous le soulignez, « notre défense commence au large ». Lorsque vous êtes devenus chef d’état‑major de la marine en 2016, la Chine émergeait comme une future puissance navale, l’hypothèse d’une confrontation navale en haute mer devenait plausible et la place majeure des porte‑avions était rappelée. Vous avez alors fixé trois priorités pour notre marine dans le cadre d’Horizon 2030 : le renouvellement, la régénération et la robustesse. Vous perceviez également l’importance des drones. Quel regard portez‑vous sur le renouvellement capacitaire ?
Ensuite, nous assistons aujourd’hui à une poldérisation en mer de Chine, une contestation des espaces maritimes et des tensions sur les détroits et canaux. Quel regard portez‑vous sur Montego Bay quarante‑trois ans après l’établissement du traité ? Des évolutions sont‑elles nécessaires ?
Amiral (2S) Christophe Prazuck. Votre question pose parfaitement le constat et les termes du débat. Le droit de la mer issu de Montego Bay est fragilisé. Par exemple, les revendications de Pékin sur la mer de Chine du Sud s’opposent totalement aux principes de Montego Bay. Cette position constitue d’ailleurs un mystère pour moi : la Chine, qui dépend du trafic maritime plus que tout autre pays dans le monde, fragilise les bases même du droit maritime qui permet son alimentation en produits énergétiques et ses exportations. La remise en cause a également lieu en Méditerranée orientale, où la Turquie n’a pas ratifié la convention de Montego Bay. La fragilisation de ce traité se traduit également par la récente décision du président américain d’autoriser l’exploitation minière des grands fonds dans les eaux internationales, dans ce qu’on appelle « la zone », qui est normalement soumise à une autorisation de l’Autorité internationale des fonds marins basée à Kingston, en Jamaïque.
Ensuite, le droit de la mer a été inventé à une époque où il ne s’agissait pas de préserver l’océan, mais de partager les ressources marines de manière équitable. Montego Bay a ainsi établi des zones économiques exclusives, à la demande des pays en développement. Aujourd’hui, le paysage est complètement différent. L’océan est en train de se transformer, des zones de pêche abondantes disparaissent, les enjeux de sécurité alimentaire et de biodiversité sont prégnants.
Désormais, le moteur de l’évolution du droit maritime concerne la protection de l’océan, des grands fonds, de la biodiversité. Le traité sur la haute mer traduit parfaitement cette évolution du droit maritime depuis Montego Bay, c’est‑à‑dire une inflexion vers la préservation d’un objet qui n’est pas infini et qui peut être modifié. Cette préservation d’un bien commun repose évidemment sur le multilatéralisme. En conséquence, le droit maritime est contesté, fragilisé, mais nous sommes en train de le modifier, de le renforcer, pour faire face aux nouveaux défis qui sont devant nous, sur sa préservation.
Encore une fois, la posture de la Chine sur la mer de Chine méridionale m’apparaît mystérieuse. Le coût politique des revendications me semble énorme, notamment vis‑à‑vis des autres pays riverains, face aux avantages potentiels. Les ressources halieutiques ont été largement diminuées et même dans ce domaine, il y aurait certainement moyen de trouver des accords avec les pays riverains. Il n’y a pas besoin de disposer d’une souveraineté sur des îlots s’il s’agit d’assurer la sécurité maritime entre le détroit de Malacca et les ports de Chine. La marine chinoise dispose de la flotte la plus nombreuse du monde ; il lui serait donc facile de mettre en place ce que nous faisons en mer Rouge, c’est‑à‑dire des escortes, des bateaux qui patrouillent. Les raisons de ces revendications me semblent vraiment de nature politique et nationaliste plus que d’ordre économique et rationnel.
M. Emmanuel Fernandes (LFI‑NFP). À La France insoumise, nous considérons que le peuple humain se définit par sa dépendance absolue à l’océan mondial. Nous avons donc un intérêt collectif à agir pour protéger ce bien commun qui est gravement menacé par les conséquences du changement climatique, le productivisme qui engendre des pollutions destructrices, l’appropriation privée, les tensions entre nations et les conflits d’usage que les espaces maritimes suscitent et subissent.
Je souhaite vous interroger sur la coopération militaro‑scientifique qui s’organise dans notre pays via une institution duale. Je pense au service hydrographique et océanographique de la marine (Shom), qui remplit à la fois des missions civiles et des missions militaires, avec un soutien de la défense caractérisé par l’expertise que ce service apporte à la direction générale de l’armement (DGA) et par ses capacités de soutien opérationnel des forces. Les scientifiques peuvent également bénéficier de l’expertise de l’industrie militaire nationale. Des représentants du ministère des armées font par exemple partie du conseil d’administration de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer). Pourriez‑vous nous détailler quelques domaines concrets de coopération entre la marine et l’institut que vous dirigez ?
Ensuite, au moment où se tient à Nice la conférence des Nations unies sur l’océan, et alors qu’Emmanuel Macron a annoncé que les aires marines dites protégées dans lesquelles le chalutage de fond serait interdit passeraient d’ici à fin 2026 de 0,1 % à 4 %, l’ONG de défense de l’océan Bloom a découvert que ces 4 % de nouvelles aires marines supposées être fortement protégées se trouvent dans des zones dans lesquelles le chalutage de fond est déjà interdit. Je souhaitais donc connaître votre avis sur cet effet de communication.
Enfin, mon collègue Pierre‑Yves Cadalen est à l’origine d’une proposition de résolution visant à la création d’un Institut Océan de l’université des Nations unies en France, résolution adoptée le 2 avril de cette année à l’Assemblée nationale. Il est primordial de renforcer la coopération internationale et la diplomatie scientifique concernant les océans. Pensez‑vous que l’institut que vous dirigez pourrait prendre part à la création d’un tel Institut Océan de l’université des Nations unies spécialisé sur les océans en France ?
Amiral (2S) Christophe Prazuck. Sorbonne Université a apporté son soutien à l’université de Bretagne occidentale dans ce dossier de création d’une université des Nations unies consacrée aux océans. En compagnie de l’université de Bretagne occidentale, nous avons organisé il y a trois jours à Nice le premier forum international des universités marines pour essayer d’établir une plateforme d’échanges au sein de la communauté scientifique, mais également en faire profiter les étudiants, favoriser les cursus se déroulant dans plusieurs pays. Il s’agit d’une excellente initiative, que nous soutenons.
À chaque fois que cela est possible, nous favorisons la coopération internationale. Pour les étudiants dans les sciences de la mer, la compréhension des relations entre la science et la politique, la science et les négociations internationales est fondamentale. Nous voulons emmener des étudiants dans ces grands forums, les COP climat, les COP biodiversité, la conférence des Nations unies sur l’océan (Unoc), afin qu’ils touchent du doigt la relation entre la connaissance scientifique et la décision politique.
Ensuite, la marine et l’institut que je dirige collaborent dans un projet commun, la mission Bougainville, indépendante du Shom. Aujourd’hui, la flotte océanographique française dispose de quatre bâtiments océanographiques hauturiers, contre 100 bateaux hauturiers pour la marine. Un jour de mer pour un bâtiment de recherche scientifique coûtant 40 000 euros, il est nécessaire de s’appuyer sur d’autres moyens que ceux de la flotte océanographique française si l’on veut multiplier les observations de l’océan.
C’est la raison pour laquelle nous avons établi ce partenariat avec la marine, qui consiste à utiliser en opportunité des bâtiments de soutien et d’assistance outre‑mer (BSAOM) basés à La Réunion, en Nouvelle‑Calédonie et en Polynésie, pour effectuer des observations sur le microbiome océanique, la base de la chaîne alimentaire. Sur ces bateaux, nous affectons chaque année deux étudiants en année de césure, sous un statut de volontaire officier aspirant.
Jusqu’à présent, la marine réalisait des observations météorologiques, que nous complétons désormais avec des observations biologiques effectuées par ces étudiants. Nous disposerons ainsi d’une base de données et des observations uniques au monde, qui permettront, je l’espère, de détecter des bascules d’écosystèmes.
Je ne suis pas un spécialiste du chalutage de fond, mais il est évident que celui‑ci engendre un impact sur l’environnement. Par ailleurs, les scientifiques peuvent naturellement fournir des éléments au débat sur la préservation de l’environnement océanique. Nous espérons tous que ces éclairages scientifiques permettront aux autorités politiques d’aboutir à des décisions équilibrées. Ces débats, ces échanges parfois difficiles, existent néanmoins et dégagent une tendance assez claire, qui devrait aboutir à une meilleure préservation de nos océans.
M. Sébastien Saint‑Pasteur (SOC). Il existe une apparente concordance des temps. Alors que nous vous recevons ici, se tient également à Nice un sommet de l’océan où tous les responsables clameront leur attachement au climat, à la défense de nos océans, sans qu’il ne se traduise malheureusement par de véritables engagements. Nous ne sommes pas dans le cadre d'une COP, évidemment, mais il existe un sentiment de frustration parce qu’au fur et à mesure que les températures augmentent, la biodiversité recule.
Nous mesurons les effets de ces dérèglements à la lecture des rapports scientifiques ou des catastrophes naturelles aux quatre coins du monde, y compris dans notre pays. Existe‑t‑il une littérature scientifique, des recherches qui expliquent la dissonance cognitive profonde de certains responsables politiques sur l’enjeu environnemental, sur la nécessité de protéger nos océans ? Vous avez parlé des États‑Unis au sujet des recherches minières. Nous pourrions aussi nous référer au recul incompréhensible porté par la loi dite Duplomb. La réintroduction des néonicotinoïdes rappelle inévitablement l’ouvrage fondateur de Rachel Carson, Printemps silencieux, qui expliquait comment les pesticides, le dichlorodiphényltrichloroéthane (DDT), détruisaient toute vie.
Faut‑il s’attendre à ce que la course aux ressources transforme demain nos océans en un véritable monde du silence, loin de la simple formule littéraire, mais un espace profondément saccagé ? Au cours du dernier siècle, la masse totale des poissons prédateurs a diminué de deux tiers. Les vagues de chaleur marine ont doublé depuis 1982 en raison de l’envolée de nos émissions de gaz à effet de serre, et l’océan est plus acide aujourd’hui qu’il ne l’a jamais été depuis 20 millions d’années. Près de 25 milliards de particules de microplastiques flottent à sa surface, conséquence des 5 à 13 millions de tonnes de déchets dérivés du pétrole qui échouent chaque année, sans parler des récifs coralliens.
Nous savons que les marins, celles et ceux qui vivent sur la mer, sont attachés à la préservation des ressources. Pourriez‑vous partager votre sentiment sur ces paradoxes, alors qu’il existe plus que jamais une nécessité de protéger nos océans ?
Amiral (2S) Christophe Prazuck. Il existe certainement des études en sciences sociales sur l’écart existant entre la science, la perception du grand public et les décisions politiques. L’exemple du plastique est assez saisissant à ce titre. Lors des conférences internationales du traité pour limiter la pollution plastique, l’industrie porte une parole assez forte pour mettre en doute, fragiliser les conclusions ou les recommandations émises par les scientifiques. Plus largement, les questions sur la biodiversité constituent toujours un combat.
Des événements comme l’Unoc peuvent susciter des frustrations bien compréhensibles, mais elles ne peuvent pas pour autant être envisagées comme de simples gesticulations. Même si elle n’aboutit pas à un traité engageant, contraignant, cette étape de la mobilisation, de la sensibilisation, de la rencontre, est essentielle. À ce titre, j’ai relevé qu’un appel sur la pollution plastique de soixante‑quinze pays différents a été lancé hier pour parvenir en août prochain à Genève à la conclusion d’un traité sur la pollution plastique. J’ai également noté que le nombre de signataires du traité de la haute mer était passé d’une trentaine à plus de cinquante pendant l’Unoc.
Le multilatéralisme passe par ce genre d’événements, qui permettent des rencontres, d’afficher des ambitions. Par ailleurs, nous votons régulièrement pour donner notre appréciation sur le respect des engagements pris par les autorités politiques.
M. Jean‑Louis Thiériot (DR). Amiral, quelle est votre analyse sur le rôle de la ligne littorale dans la conflictualité navale future ? On sait qu’en mer Noire, les frappes engagées depuis le sol par des drones ou des missiles ont permis aux armées ukrainiennes de remporter des succès. Selon vous, cela signifie‑t‑il un renforcement de la capacité de frappe depuis la terre dans les eaux brunes, voire jusque dans les eaux vertes et les eaux bleues ? Devons‑nous en tirer des conséquences, notamment pour nos outre‑mer ?
Ensuite, vous évoquez le désir d’un renouveau du multilatéralisme pour la protection de cette ressource commune, que nous sommes nombreux à partager. Cependant, je suis peut‑être un peu moins optimiste que vous. Dans un monde du recours désinhibé à la force, où un certain nombre de grands acteurs n’ont pas signé Montego Bay, où les États‑Unis sortent volontairement de la COP 21, quelle place y a‑t‑il vraiment pour avancer sur des mécanismes suivis et contraignants ? Comment faire pour qu’ils ne se limitent pas à des vœux pieux ?
Amiral (2S) Christophe Prazuck. L’historien Martin Motte considère qu’il existe trois types de guerres sur mer : la guerre d’escadre où deux grandes flottes s’affrontent en haute mer ; la guerre de course, celle de Surcouf, qui consiste à s’en prendre au commerce de l’adversaire ; et la guerre de côte, qui consiste soit à attaquer les côtes de l’adversaire, soit à protéger les siennes. Le combat littoral existe depuis toujours. Dans celui‑ci, le défenseur a une longueur d’avance par rapport à l’attaquant ; à telle enseigne qu’en 1944, le général Eisenhower avait décidé de reporter le débarquement de Normandie du 5 au 6 juin en raison des conditions météorologiques.
Je ne dispose pas de renseignements de première main sur ce qui s’est passé en mer Noire. Néanmoins, à la lecture de la presse, je suis un peu surpris par la manière dont les Russes ont utilisé leurs moyens, qui me semble assez peu imaginative et assez imprudente. Si les Ukrainiens ont fait preuve d’une véritable audace tactique, le positionnement des Russes a été quelque peu surprenant ; ils ont été touchés par des missiles pourtant assez faciles à intercepter.
En revanche, si vous observez la situation dans le sud de la mer Rouge, les interceptions des missiles balistiques, très rapides, réalisées par les bâtiments européens et français en particulier montrent que les possibilités de défense face à des moyens à terre ne sont pas nulles et permettent de protéger le trafic maritime. Nous sommes donc dans cette dialectique du bouclier, de la cuirasse et de la lance, et les exemples de la mer Noire ne sont peut‑être pas reproductibles dans toutes les circonstances.
Ensuite, quels sont les outils du multilatéralisme ? Sur plusieurs sujets, l’exploitation minière des grands fonds, la pollution plastique, le traité de la haute mer, la France s’inscrit dans une démarche pour associer d’autres pays afin d’obtenir un effet de masse et d’entraînement suffisant pour peser au moins sur les opinions publiques. Cela sera‑t‑il suffisant ? Je l’ignore. Mais avons‑nous d’autres choix ? Devons‑nous rester les bras ballants devant certains pays qui refusent les règles internationales, veulent imposer leurs intérêts par la force ? Je ne suis pas diplomate, mais la solution qui me semble la plus engageante consiste à bâtir des coalitions entre pays volontaires.
M. Damien Girard (EcoS). Amiral, je souhaite vous interroger sur les enjeux liés aux grands fonds marins. J’ai déjà eu l’occasion d’échanger avec le sous‑chef d’état‑major opération de la marine sur la dimension militaire de leur surveillance et de leur protection. Au‑delà des aspects strictement militaires, les fonds marins constituent aujourd’hui un espace de compétition stratégique multidimensionnelle mêlant enjeux de sécurité, d’environnement, de recherche scientifique et de souveraineté économique. Avec ses 10,2 millions de kilomètres carrés et de zones maritimes, la France est à la fois une puissance d’opportunité et une puissance d’exposition.
Elle est câblée, connectée, mais aussi vulnérable. La stratégie ministérielle de 2022 a posé des jalons en soulignant le besoin de coopération entre l’État, les armées, les chercheurs et les industriels. Votre double expérience à la tête de la marine nationale et aujourd’hui au sein de l’Alliance Sorbonne Université illustre parfaitement cette convergence nécessaire entre compétences scientifiques et préoccupations stratégiques.
Dans ce contexte, je souhaite recueillir votre analyse sur deux points. D’abord, quelle perspective concrète de coopération entre les mondes militaires et scientifiques peut‑on développer pour mieux cartographier, surveiller, protéger les fonds marins tout en préservant la biodiversité ? Ensuite, à l’heure où Donald Trump annonce vouloir accélérer l’exploitation des grands fonds sous‑marins, comment la France et l’Europe doivent‑elles se positionner face à ce choix stratégique et à ses implications géopolitiques et environnementales ?
Amiral (2S) Christophe Prazuck. Vous mentionnez les perspectives de collaboration entre militaires et scientifiques sur la maîtrise des grands fonds, mais j’aurais tendance à vous répondre que chacun traite de sujets différents. Lorsque je faisais partie de la marine, nous abordions la question des grands fonds sous l’angle de la protection des infrastructures sous‑marines vitales, notamment pour l’économie, et en particulier les câbles sous‑marins.
Les scientifiques peuvent s’intéresser aux câbles sous‑marins dans la perspective d’utiliser les câbles sous‑marins comme des senseurs de biodiversité, des senseurs acoustiques. Mais ils s’attachent surtout à étudier la géologie ou la biologie des grands fonds, laquelle nous a par exemple fait découvrir dans les années 1980 la chimiosynthèse, qui était totalement inconnue à la surface de la terre.
En revanche, les points communs concernent les technologies d’intervention dans les grands fonds. Dans le cadre de France 2030, un programme lie l’ensemble de la communauté qui s’intéresse aux grands fonds pour développer des drones, des moyens de pénétration et d’intervention sous la mer. Ces technologies duales servent d’un côté à surveiller les grands fonds et de l’autre à les explorer. Si l’on devait entrer dans l’ère de l’exploitation minière des grands fonds, se poserait rapidement la question du contrôle. Y a‑t‑il une police des grands fonds ? En supposant que le code minier traite de cet aspect, qui assurera de son respect ? Qui relèvera les preuves ?
Normalement, ce contrôle relève de l’État du pavillon. Si le bateau navigue sous pavillon de Sierra Leone, la Sierra Leone doit s’assurer que l’exploitation minière des grands fonds est faite conformément au droit international. Mais l’on peut aussi considérer qu’une observation indépendante ne serait pas inutile. De la même manière que la marine conduit la police des pêches dans les zones économiques exclusives, peut‑être pourrait‑on imaginer là des moyens d’investigation, d’intervention, de surveillance. Mais leur coût serait faramineux. Les moyens d’observation et d’intervention à 4 000 mètres ou 6 000 mètres de profondeur se comptent sur les doigts d’une main, dans le monde entier. Contrôler plusieurs chantiers serait totalement hors de portée.
Que faire en cas de décisions unilatérales ? Au sein de l’Autorité internationale des fonds marins, qui se réunit à la fin du mois, il existe un forum où notre pays doit être capable de rassembler des protestations, des déclarations du plus grand nombre possible de pays pour réclamer un moratoire, empêcher ou protester contre une décision unilatérale.
M. le président Jean‑Michel Jacques. Je vous remercie pour vos très riches propos, qui nous ouvrent de nouvelles perspectives très intéressantes.
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Informations relatives à la Commission
La commission a nommé les rapporteurs pour avis suivants sur le projet de loi de finances 2026 (sous réserve de son dépôt) :
AVIS |
Groupe |
Rapporteur |
ANCIENS COMBATTANTS, MÉMOIRE ET LIENS AVEC LA NATION |
Rassemblement national |
Laurent Jacobelli |
DÉFENSE |
Horizons & Indépendants |
Anne Le Hénanff |
DÉFENSE |
La France insoumise ‑ Nouveau Front Populaire |
Bastien Lachaud |
DÉFENSE |
Socialistes et apparentés |
Isabelle Santiago |
DÉFENSE |
Ensemble pour la République |
Yannick Chenevard |
DÉFENSE |
Rassemblement national |
Frank Giletti |
DÉFENSE |
Ensemble pour la République |
François Cormier‑Bouligeon |
Tome 8 SÉCURITÉS |
Droite Républicaine |
Valérie Bazin‑Malgras |
La séance est levée à douze heures huit.
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Membres présents ou excusés
Présents. – Mme Delphine Batho, M. Yannick Chenevard, M. Alexandre Dufosset, M. Yannick Favennec‑Bécot, M. Emmanuel Fernandes, M. Frank Giletti, M. Damien Girard, M. David Habib, M. Laurent Jacobelli, M. Jean‑Michel Jacques, M. Pascal Jenft, M. Abdelkader Lahmar, Mme Gisèle Lelouis, M. Julien Limongi, Mme Michèle Martinez, M. Aurélien Saintoul, M. Sébastien Saint‑Pasteur, M. Jean‑Louis Thiériot, M. Romain Tonussi
Excusés. – M. Gabriel Attal, M. Christophe Bex, Mme Anne‑Laure Blin, M. Matthieu Bloch, M. Frédéric Boccaletti, M. Manuel Bompard, Mme Cyrielle Chatelain, Mme Geneviève Darrieussecq, M. Didier Lemaire, Mme Murielle Lepvraud, Mme Lise Magnier, Mme Alexandra Martin, Mme Anna Pic, Mme Natalia Pouzyreff, Mme Mereana Reid Arbelot, M. Mikaele Seo, M. Boris Vallaud, Mme Corinne Vignon