Compte rendu

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

–  Audition de M. Antoine Armand, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie et de M. Laurent Saint-Martin, ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics sur le projet de loi de finances pour 2025              2

–  Débat relatif aux conditions de discussion du projet de loi de finances pour 2025 36

  présences en réunion...........................39

 


Vendredi
9 octobre 2024

Séance de 8 heures 30

Compte rendu n° 013

session ordinaire de 2024-2025

 

 

Présidence de

M. Éric Coquerel, Président

 

 


  1 

La commission entend M. Antoine Armand, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie et M. Laurent Saint-Martin, ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics sur le projet de loi de finances pour 2025.

M. le président Éric Coquerel. Mes chers collègues, nous auditionnons ce matin M. Antoine Armand, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, et M. Laurent Saint-Martin, ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics, qui nous présentent le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 adopté hier, en fin d’après-midi, en Conseil des ministres.

Nous commencerons l’examen, en commission, de la première partie du PLF mercredi prochain, 16 octobre, à dix-sept heures, et nous poursuivrons nos travaux les jeudi 17, vendredi 18 et samedi 19 octobre. Le délai de dépôt des amendements est fixé au dimanche 13 octobre à minuit, c’est-à-dire dans la nuit du dimanche 13 au lundi 14 octobre.

En séance publique, la discussion de la première partie devrait avoir lieu du lundi 21 au vendredi 25 octobre, en vue d’un vote solennel le mardi 29 octobre, après les questions au Gouvernement. Je rappelle à ce propos qu’il faut que la première partie du PLF soit adoptée, ou considérée comme adoptée, avant que l’examen de la seconde partie puisse débuter.

En commission des finances, la discussion de la seconde partie commencera le lundi 28 octobre. Jusqu’au lundi 4 novembre, la commission se saisira successivement de toutes les missions, dont l’examen sera à l’ordre du jour de la séance publique du mardi 5 au lundi 18 novembre. Il faudra également examiner, en commission, les articles non rattachés le mercredi 6 novembre, en vue d’un passage en séance publique le lundi 18 novembre.

Le vote solennel sur l’ensemble du projet de loi de finances pour 2025 se tiendrait le mardi 19 novembre, à moins que l’examen de l’ensemble des articles et des amendements ne soit pas achevé à cette date et qu’il convienne donc d’ouvrir des jours supplémentaires de séance. Dans ce cas, du fait du délai de quarante jours imposé pour l’examen du PLF en première lecture à l’Assemblée nationale, et dans la mesure où la lettre récapitulative faisant partir le décompte de ce délai devrait être adressée demain à la présidente de notre assemblée, nous pourrions être amenés à siéger jusqu’au jeudi 21 novembre.

Avant même le début de l’examen du PLF, nous aurons pu avoir, lundi prochain, 14 octobre, à quinze heures, un débat en séance publique sur la dette, puis, le lundi 21 octobre à seize heures, un débat d’orientation et de programmation des finances publiques, qui portera sur le plan budgétaire et structurel national à moyen terme que la France doit transmettre aux institutions européennes d’ici au 31 octobre et qui devrait être porté à notre connaissance d’ici au 16 octobre. Outre ces deux débats, un débat en séance publique sur les finances publiques locales se tiendra le jeudi 24 octobre à neuf heures, et le traditionnel débat sur le prélèvement sur recettes en faveur de l’Union européenne aura lieu le vendredi 25 octobre à quinze heures. Je me réjouis que le Gouvernement ait accédé à ces différentes demandes de débats en séance publique.

Messieurs les ministres, nous avons déjà évoqué lors de votre dernière audition les retards que nous pouvons déplorer par rapport aux délais prévus par la loi organique relative aux lois de finances (Lolf). Le fait que la presse se soit fait l’écho de certaines mesures contenues dans le budget avant que nous n’en ayons été informés a été fort peu apprécié. Je vous remercie cependant d’avoir envoyé le PLF à tous les commissaires hier.

M. Antoine Armand, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie. Je suis heureux de me trouver devant vous, comme le veut la tradition, au lendemain de la présentation du projet de loi de finances pour 2025 en Conseil des ministres, pour répondre à vos questions et entamer ainsi le parcours législatif de ce texte.

J’ai déjà eu l’occasion de vous le dire, notre pays se trouve dans une situation inédite et à un moment pivot. Nous sortons d’une crise sanitaire sans précédent, nous avons traversé une crise énergétique majeure, la guerre est en Europe, et l’escalade au Proche et au Moyen-Orient comporte des risques essentiels pour notre économie. Tous ces chocs ont affecté et affectent encore la situation économique. La croissance demeure, mais il a fallu la relancer, y compris au niveau européen, par des investissements publics massifs ; elle reste cependant atone sur tout le continent. C’est bien l’ensemble de nos économies qui tournent au ralenti et se trouvent confrontées à un risque d’affaissement productif, voire d’effacement face à l’interventionnisme agressif de nos concurrents internationaux, en particulier de la Chine et des États-Unis. Ce ralentissement nécessitera d’ailleurs la définition d’un nouvel agenda de compétitivité au niveau européen, car sans une meilleure coordination de nos politiques économiques et industrielles, sans une défense ferme et résolue de notre tissu productif, et sans investissements massifs, publics comme privés, dans l’industrie et dans les transitions écologique et numérique, les économies européennes seront condamnées à un tel affaissement.

Dans ce contexte, la France résiste. Sa croissance est meilleure que la moyenne des autres pays de la zone euro. L’Insee vient d’ailleurs de relever de 0,1 point sa prévision de croissance pour le quatrième trimestre 2024 ; pour l’ensemble de l’année, elle devrait atteindre 1,1 %. Le chômage de masse n’est plus le fléau que nous avons connu : le taux de chômage est même proche de son plus bas niveau depuis quarante ans, à 7,3 %. Des usines rouvrent, nos exportations augmentent, notre pays est le plus attractif de la zone euro et l’inflation continue de baisser – de plus de 4 % l’année dernière, elle est passée à moins de 2 % dans nos prévisions pour l’année à venir.

Nos fondamentaux économiques sont donc relativement solides, ce que nous devons avant tout à l’agenda ambitieux de réformes menées depuis 2017 et à l’action constante et déterminée des gouvernements qui se sont succédé. Je ne rappellerai pas les baisses d’impôts, à hauteur de 60 milliards d’euros, qui ont montré l’efficacité d’une doctrine fiscale stable. Je ne rappellerai pas les réformes du droit du travail et de l’assurance chômage, qui ont permis de viser le plein emploi, car le travail est le meilleur moyen de créer de la richesse. Je ne rappellerai pas la réforme des retraites et la progression du taux d’emploi des seniors. Je ne rappellerai pas l’investissement dans la recherche, ni les efforts sans commune mesure accomplis pour favoriser l’apprentissage, ce qui a permis d’atteindre la barre du million d’apprentis. Je ne rappellerai pas les différents paquets de simplification. Je ne rappellerai pas non plus les travaux menés, y compris par des parlementaires présents dans cette salle, pour transformer et moderniser notre économie.

Est-ce suffisant ? Évidemment non : il nous reste du travail à accomplir. L’économie française résiste, mais notre dette publique est colossale. En 2024, elle devrait dépasser 3 300 milliards d’euros, soit près de 113 % du produit intérieur brut. Tel est le résultat combiné de cinquante budgets nationaux en déséquilibre et d’une dépense publique qui n’a cessé d’augmenter – quasiment chaque année – lors des dernières décennies. La France est désormais le pays de l’Union européenne ayant le taux de dépenses publiques le plus élevé. Cette situation résulte aussi, il faut le reconnaître, de la réponse efficace et massive que nous avons apportée aux crises financières, sanitaire et énergétique qui se sont succédé.

Le problème de la dette ne peut être réduit à une question financière.

C’est d’abord un enjeu de souveraineté : si nous ne pouvons plus nous financer sur les marchés à des coûts raisonnables, nous ne pourrons pas continuer à préparer l’avenir, à relever notre industrie et à soutenir les infrastructures énergétiques.

C’est aussi, bien sûr, un enjeu de crédibilité, puisque la France est le troisième pays le plus endetté de la zone euro. Aussi présentons-nous un budget et une trajectoire macroéconomique et budgétaire dont l’objectif est de ramener le déficit sous la barre des 3 % du PIB, comme l’a annoncé le Premier ministre, à partir de 2029. Cela nous permettra simplement de stabiliser notre endettement, et donc de nous fixer un horizon de désendettement. À compter de 2027, si les prévisions de nos partenaires européens sont justes, la France sera le seul pays dont le déficit dépassera 3 % du PIB, puisque l’Italie et la Finlande devraient passer sous ce seuil en 2026.

La dette est enfin une question d’économie et de société. Nous paierons probablement cette année plus de 50 milliards d’intérêts et, si nous ne faisons rien, le service de la dette deviendra en 2027 le premier poste budgétaire de l’État – en d’autres termes, nous rembourserons nos emprunts pour un montant plus important que celui investi dans notre sécurité ou dans notre tissu socioéconomique. Personne d’entre nous ne peut se résoudre à cette fatalité. Pour éviter pareille situation, il faudra évidemment bousculer nos pratiques, notre façon de dépenser de l’argent public et d’agir collectivement. C’est pourquoi l’objectif premier de ce budget et de la trajectoire qui l’accompagne est de réduire notre déficit et de contenir notre endettement. Je le dis sincèrement, ce sera difficile et cela nécessitera sans doute des efforts nouveaux, y compris dans notre manière d’aborder la dépense publique et d’en suivre l’exécution, mais cela sera indispensable pour protéger la signature de la France et, plus largement, pour assurer notre stabilité macroéconomique. Nous devons donc examiner l’ensemble de nos dépenses publiques – je pense que le débat parlementaire le permettra très largement – alors que ces dernières augmentent et que les citoyens ne sont pas plus satisfaits des services ainsi financés.

Vous connaissez les nombreux leviers que nous pourrons actionner. J’en cite quelques-uns : la simplification et la réforme de l’État ; la maîtrise de la dépense de l’État, de la dépense sociale et de la dépense locale ; la maîtrise de l’ensemble des emplois publics. Ces mesures sont évidemment nécessaires, sur le long terme, pour rétablir les comptes publics de manière durable et pérenne. C’est tout le sens de ce budget, qui entend aussi protéger nos leviers de croissance et de transformation, dont certains sont importants – j’ai parlé de l’apprentissage, mais j’aurais également pu mentionner la décarbonation et le soutien à l’activité, deux leviers actionnés ces dernières années qui ont prouvé leur efficacité pour ce qui est de la croissance, de l’emploi et du soutien à la recherche et à l’innovation.

Pour suivre cette trajectoire et arriver à 3 % de déficit en 2029, nous avons besoin d’ancres solides, crédibles, qui marquent notre volonté très forte de redresser les comptes publics. C’est ce qui explique aussi le choix d’atteindre un déficit de 5 % en 2025. L’effort portera bien plus sur la baisse des dépenses que sur la hausse des prélèvements obligatoires, alors que la France a l’un des taux de prélèvements obligatoires les plus élevés du monde.

Les efforts demandés, qui seront temporaires pour les contributions exceptionnelles et permanents pour la réduction des dépenses publiques, devront s’accompagner de réformes profondes, structurelles, visant à améliorer durablement l’efficacité de la dépense. Avec Guillaume Kasbarian, ministre de la fonction publique, de la simplification et de la transformation de l’action publique, et Laurent Saint-Martin, ministre du budget et des comptes publics, nous engagerons un plan de simplification et de modernisation du service public, dont l’objectif affiché sera de produire des gains d’efficacité durables tout en améliorant la qualité du service public pour l’ensemble de ses usagers.

Je souhaite également que nous puissions améliorer la qualité de nos prévisions et du suivi de nos comptes. Je sais que ce sujet a été beaucoup discuté au sein de votre commission et que de nombreuses questions ont été posées s’agissant des écarts de prévisions, tant en dépenses qu’en recettes, sur le budget de l’État en 2023 et 2024. Personne n’a rien à cacher : toute la transparence sera faite et toutes les informations nécessaires seront communiquées à la représentation nationale. Une mission de l’Inspection générale des finances (IGF) a été diligentée pour rechercher les causes de ces écarts ; elle a rendu ses conclusions à l’été 2024 et, même si d’autres écarts ont été constatés depuis, il nous reste à en tirer les conséquences opérationnelles dans l’organisation des services et de leurs travaux. Sur la base de ce rapport, nous lancerons conjointement, en associant la représentation nationale – si elle le souhaite –, un plan d’action visant à améliorer la qualité et la transparence des prévisions de finances publiques. L’objectif est que nous disposions en permanence du diagnostic le plus actualisé possible, s’agissant tant du suivi des dépenses que des prévisions de recettes. Si vous êtes d’accord, monsieur le président, nous vous présenterons un point d’étape sur le renforcement de ces outils et des procédures de prévision avant la fin de l’année 2024.

Ce n’est qu’après avoir posé ce diagnostic et mis l’accent sur la réduction des dépenses publiques que nous pouvons évoquer les prélèvements exceptionnels, temporaires et ciblés qui seront nécessaires pour l’exercice 2025 afin de réduire notre déficit. J’insiste, vous vous en doutez, sur le caractère temporaire de ces hausses d’impôts, qui ne doivent pas pénaliser notre développement ni s’inscrire dans la durée.

Je n’ai pas besoin de vous rappeler le soutien que les précédents gouvernements ont apporté aux entreprises, de manière constante et durable tout au long des sept dernières années, pour affronter les crises et assurer leur croissance. Aussi proposons-nous que les plus grandes entreprises – celles dont le chiffre d’affaires dépasse 1 milliard d’euros – bénéficiaires paient un complément d’impôt exceptionnel sur leurs profits. Ce prélèvement supplémentaire devrait rapporter 8 milliards d’euros en 2025, 4 milliards en 2026, et concerner 440 groupes. Nous avons conscience de l’importance de l’effort demandé, mais celui-ci est nécessaire et, je le rappelle, temporaire. Je tiens à saluer l’esprit de responsabilité qui a animé de très nombreux représentants de grandes entreprises, qui se sont dits explicitement prêts à contribuer de manière exceptionnelle et temporaire au redressement des comptes publics, car ils savent comme nous que le coût de financement de l’État sera étroitement lié au coût de financement des entreprises et à la bonne santé macroéconomique de notre pays.

Dans un esprit de responsabilité, nous devons aussi reporter la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE). Nous n’avons pas pour autant changé d’avis sur cet impôt, qui pénalise en particulier notre industrie. La baisse reprendra, dans trois ans – nous inscrivons ce principe dans la loi –, même si nous ne pouvons pas nous le permettre aujourd’hui. Il y va de notre sérieux budgétaire.

C’est aussi la raison pour laquelle nous poursuivrons la trajectoire d’évolution du malus automobile, qui vise à inciter les constructeurs français et étrangers à déployer en priorité une offre de véhicules électriques sur notre territoire. Il faut y voir un marqueur de notre ambition de décarbonation et de verdissement de notre système fiscal. C’est en visant ce même objectif de verdissement que nous proposerons, par amendement, une hausse de la taxe sur les billets d’avion et l’inclusion des jets privés dans le périmètre de celle-ci. L’augmentation sera mesurée, mais il nous paraît normal et légitime que ceux qui voyagent beaucoup en avion contribuent davantage aux investissements nécessaires à la transition écologique.

Si le recours à l’outil fiscal est nécessaire, à court terme, pour engager dès 2025 le rétablissement de nos comptes publics en ramenant le déficit à 5 % du PIB – ce qui nécessite un ajustement de plus de 1 point assez inédit dans notre histoire récente –, nous conservons notre doctrine en maintenant une politique de l’offre et un soutien ferme et pérenne à l’activité. J’ai entendu les interrogations que vous avez légitimement exprimées, et je m’engage personnellement à ce que toute proposition documentée visant à remplacer un euro de hausse de fiscalité par un euro d’économies soit instruite et retenue si elle s’avère réalisable.

Le texte que nous vous soumettons est un projet : il est donc perfectible, d’autant que les délais relatifs à son élaboration ont été très brefs. Il est entre vos mains. Nous sommes à votre disposition pour une discussion dont nous ne doutons pas qu’elle sera sincère et constructive. Nous voulons être, collectivement, à la hauteur du moment que nous traversons.

M. Laurent Saint-Martin, ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics. Je me réjouis également de vous retrouver pour vous présenter ce projet de loi de finances pour 2025.

Comme je l’avais dit lors de notre première audition et comme vient de le rappeler le ministre de l’économie, nous avons préparé ce budget dans des circonstances exceptionnelles. Je souhaite d’ailleurs saluer et remercier publiquement l’ensemble des administrations de mon ministère et de celui d’Antoine Armand, qui ont œuvré jour et nuit pour finaliser ces textes financiers et leurs annexes. Par la même occasion, je vous remercie également, vous tous ici présents, pour votre compréhension face aux désagréments causés par ce calendrier totalement atypique, que nous subissons également.

Ce calendrier contraint n’est pas sans conséquence sur le contenu du texte que nous vous présentons. Faute de temps, le texte initial n’inclut pas certains ajustements souhaités par le Premier ministre et annoncés lors de sa déclaration de politique générale. Ces ajustements seront donc introduits par voie d’amendement. Je me suis engagé devant vous à respecter les prérogatives budgétaires du Parlement, et je tiendrai cet engagement en étant très transparent – autant que les arbitrages actuels le permettent – au sujet des propositions complémentaires que nous défendrons au cours du débat parlementaire. J’y reviendrai au fil de mon propos.

Le ministre de l’économie et des finances a présenté très clairement le cadre macroéconomique dans lequel s’inscrit ce projet de loi de finances pour 2025, les enjeux liés au niveau d’endettement de la France, nos propositions en matière de fiscalité des entreprises ainsi que la nécessité impérieuse de préserver la croissance et l’activité économiques. Je n’y reviendrai donc pas. Pour ma part, je structurerai mon propos en trois points : après avoir décrit le cadre de responsabilité fixé par ce budget et la méthode que nous proposons d’employer pour redresser nos finances publiques, je préciserai concrètement le contenu du budget que nous vous soumettons pour 2025, en prenant des exemples précis, puis je reviendrai sur les propositions complémentaires que nous défendrons lors du débat à l’Assemblée nationale et au Sénat eu égard aux contraintes de temps que je viens d’évoquer.

Je m’étais engagé devant vous à tenir toujours un discours de vérité, et je ne changerai pas. Le projet de loi de finances et le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025 proposent, à eux deux, un effort de redressement de nos comptes publics à hauteur de 60 milliards d’euros dès l’an prochain. Il s’agit d’un effort urgent, qui vise à parer à la dégradation de nos finances publiques, d’un effort inédit par son ampleur, et surtout d’un effort nécessaire afin de ramener le déficit public à 5 % du PIB. J’insiste sur ce point car il est capital : l’effort que nous devons consentir pour atteindre les 5 % de déficit l’an prochain est bien de 60 milliards d’euros, soit 2 points de PIB. Vous le savez, le déficit devrait atteindre et même légèrement dépasser les 6 % en 2024. Nous serions d’ailleurs bien au-delà si nos prédécesseurs, Bruno Le Maire et Thomas Cazenave, n’avaient pas réagi très vite en cours d’année en proposant au Premier ministre, Gabriel Attal, un décret d’annulation de 10 milliards de crédits en février dernier, et en freinant la dépense de l’État par des gels complémentaires pour la fin de gestion 2024. À ces mesures s’ajoute le travail préparatoire de la rédaction des lettres-plafonds, qui a contribué à organiser le nécessaire freinage des dépenses de l’État lors des dernières semaines et des derniers mois.

Nous ne devons pas compromettre la trajectoire de réduction du déficit, qu’il convient de ramener sous la barre des 3 % à l’horizon 2029 comme l’a décidé le Premier ministre. Dès lors que nous approuvons ce cadre, que j’appelle le « cadre de la responsabilité », il y a un terrain sur lequel nous pouvons tracer ensemble un chemin. Au fond, nous revenons à l’esprit de nos institutions : s’il appartient au Gouvernement de proposer un cadre pour assurer la soutenabilité de nos finances, c’est évidemment au Parlement et à ses deux assemblées qu’il reviendra de décider des voies et moyens de ce redressement. Ce chemin, je suis prêt à le tracer avec vous, main dans la main, et avec toutes les parties prenantes de cette affaire – je veux parler des partenaires sociaux et, évidemment, des collectivités locales. J’insiste cependant sur le caractère intangible de ce cadre, dont il serait irresponsable de sortir. J’ai entendu lors des débats préparatoires beaucoup de lignes rouges, ce qui est évidemment tout à fait sain en démocratie, mais pour ma part, je n’en aurai qu’une seule : celle de redresser nos comptes publics, tout simplement parce qu’il le faut. Nous devons faire des choix courageux aujourd’hui pour ne pas avoir à faire des choix douloureux demain.

Je veux maintenant vous présenter la proposition que vous soumet le Gouvernement à travers ce texte, qui a le mérite de tenir compte de beaucoup d’autres recommandations. Parmi les propositions ou contre-propositions que nous entendons formuler depuis plusieurs jours, voire plusieurs semaines, certaines consistent à actionner davantage le levier de la recette fiscale, d’autres à passer davantage par la baisse des dépenses publiques. Pour autant, le texte que nous vous présentons n’est pas le fruit d’un consensus mou : c’est une proposition certes perfectible, mais équilibrée, réaliste et responsable.

Nous proposons un effort de redressement partagé entre toutes les administrations publiques, puisque la diminution des dépenses concerne tous les ministères. L’effort est surtout partagé parce qu’il consiste pour les deux tiers en une baisse des dépenses, et pour le tiers restant en des contributions ciblées, exceptionnelles et temporaires pour une partie d’entre elles. Pour bâtir ce budget, nous nous sommes en effet imposé une règle : pour 1 euro de recettes supplémentaires, nous exigeons 2 euros d’économies. En somme, le Gouvernement a fait ce que la Constitution et la loi organique imposent au Parlement : il a « gagé ». Cette règle d’or, je vous propose de la respecter tout au long de nos débats, autant que faire se peut. Si les solutions proposées divergent fortement selon les groupes ou les forces politiques, je crois que chacun ici a pleinement conscience de la nécessité de redresser nos comptes publics et de réduire le déficit pour garantir la souveraineté de notre pays.

Puisque c’est d’abord par l’augmentation des dépenses que le déficit s’est creusé, c’est prioritairement par la baisse de ces dépenses que devra passer l’effort. Baisser des crédits après des années de hausse n’est pas un gros mot, ni un tabou, mais une nécessité. Je le disais tout à l’heure, le tiers restant des mesures annoncées – environ 20 milliards d’euros – consistera principalement en des contributions fiscales, dont une majorité seront exceptionnelles, temporaires et ciblées sur les grandes entreprises et les ménages capables de participer à cet effort de solidarité.

J’ai parlé d’un partage entre toutes les administrations parce que la baisse de la dépense publique est l’affaire de tous. L’État et ses opérateurs devront toutefois montrer l’exemple : ils seront concernés par un peu plus de la moitié des modérations et des baisses de dépenses – nous estimons leur effort à 21,5 milliards d’euros selon le tendanciel – alors qu’ils ne représentent qu’environ un tiers des dépenses publiques. La quasi-stabilisation en valeur des crédits par rapport au budget voté pour 2024 rapportera 15 milliards – c’était d’ailleurs l’objet des lettres-plafonds signées par Gabriel Attal –, les opérateurs de l’État contribueront à l’effort à hauteur de 1,5 milliard, tandis que 5 milliards d’économies supplémentaires seront proposées par voie d’amendement. J’insiste sur ce point car la méthode n’est pas banale : vous ne trouverez pas les 21,5 milliards d’économies dans le texte initial puisque 6,5 milliards supplémentaires, dont 5 milliards de baisses de crédits au sein des missions des ministères, apparaîtront dans des amendements que nous défendrons en séance publique.

Nous travaillerons avec les collectivités locales à un effort de l’ordre de 5 milliards d’euros afin de contenir la progression de leurs dépenses. J’ai bien dit que nous travaillerions « avec » les collectivités, et non « contre » elles. Il ne s’agit en aucun cas de distribuer des bons ou des mauvais points, et encore moins d’enrayer l’investissement local, qui demeure un puissant moteur de croissance et d’activité.

Nous demanderons également des économies aux administrations de sécurité sociale en proposant de limiter à 2,8 % la progression de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam). Tel n’est pas l’objet du présent texte, mais il est nécessaire d’englober l’ensemble des comptes publics dans notre réflexion. Il n’y aura pas de casse sociale mais nous devons absolument freiner le creusement du déficit de la sécurité sociale, dans un esprit de responsabilité et dans le cadre global du redressement des finances publiques.

Permettez-moi de revenir quelques instants sur les moyens de réduire les dépenses dans le budget de l’État. Il faudra faire mieux avec moins de moyens, et l’assumer.

En premier lieu, nous proposons de supprimer des aides créées à titre exceptionnel dans un contexte et une conjoncture qui l’exigeaient, puisqu’il était alors nécessaire de préserver l’activité, de maintenir les emplois et d’assurer la relance – je pense notamment aux différents boucliers visant à protéger le pouvoir d’achat des ménages ou la compétitivité des entreprises. Je le répète, il est de notre responsabilité de retirer un certain nombre d’outils de protection car les crises sont désormais derrière nous – c’est particulièrement le cas de l’inflation, que le ministre de l’économie a estimée à 1,8 % en 2025. Ainsi, nous actons dans ce budget la disparition définitive du bouclier tarifaire sur l’électricité tout en assurant des baisses de prix pour les consommateurs soumis au tarif réglementé. Ce budget marque la fin du « quoi qu’il en coûte » et referme la page de la protection par l’État de nos concitoyens et de nos entreprises.

Nous ajustons les soutiens publics à l’évolution du contexte économique. C’est en particulier le cas des dispositifs de soutien à l’emploi, dès lors que le chômage atteint des niveaux parmi les plus bas depuis quarante ans. Il n’est pas question de supprimer toutes les aides à l’emploi, mais de procéder à des rebasages et d’adapter leur périmètre afin de les rendre toujours plus efficientes et efficaces.

Nous ajustons également les crédits aux besoins réels. Ainsi, la baisse de certains budgets ministériels n’est pas seulement due à la technique du rabot, mais aussi à la diminution des besoins. J’ai entendu beaucoup de critiques à propos de la baisse des effectifs dans la mission Enseignement scolaire, mais il s’avère que l’évolution démographique entraînera une baisse substantielle du nombre d’élèves à la rentrée 2025.

Nous cherchons à rendre les dispositifs plus efficients, c’est-à-dire à faire en sorte qu’ils favorisent certains comportements ou investissements sans pour autant coûter plus cher. Nous avons la responsabilité de repenser certains outils afin qu’ils coûtent moins cher aux contribuables tout en conservant leur efficacité. Par exemple, nous consacrons chaque année 16 milliards d’euros à l’apprentissage, après avoir triplé en sept ans les moyens accordés à cette politique, qui rencontre un très grand succès dont nous devons nous féliciter ; nous pouvons maintenant ajuster le montant des primes sans pour autant grever la dynamique ainsi créée. De même, le Premier ministre s’est demandé, dans sa déclaration de politique générale, s’il était vraiment nécessaire d’avoir trois dispositifs différents pour accompagner la transition vers les véhicules électriques. Sur ce sujet aussi, il y a probablement matière à faire mieux avec moins !

Nous mobilisons aussi les opérateurs en dynamisant leur gestion, en les rapprochant les uns des autres et en évitant de laisser de la trésorerie dormante. Là encore, l’urgence de la situation exige de telles mesures.

Nous réformons structurellement certains dispositifs afin d’améliorer leurs effets économiques. Je pense ici aux aides aux entreprises, en particulier aux allégements généraux de cotisations. Il s’agit non seulement de désmicardiser l’économie, pour reprendre l’expression utilisée dans le rapport Bozio-Wasmer, mais aussi de remettre les choses en perspective : certes, l’État a dépensé près de 80 milliards d’euros, dont 20 milliards ces quatre dernières années, pour améliorer la compétitivité des entreprises et leur permettre d’embaucher, mais nous pouvons nous poser la question d’une modération ou d’un freinage de cette politique d’allégements généraux.

Nous modérons aussi certaines dépenses qui ont fortement augmenté depuis 2017. Il est normal que ces choix, assumés comme nécessaires au redressement des comptes publics, soient questionnés et débattus. L’aide publique au développement (APD) est ainsi en baisse dans le budget pour 2025, mais elle a augmenté de 1,8 milliard d’euros, c’est-à-dire de plus de 70 % depuis 2017. Remettons ces données en perspective et ne confondons pas freinage de la hausse de la dépense avec austérité et baisse drastique des moyens.

Ces économies ciblées, qui seront complétées au cours des débats, ont pour partie été identifiées par des revues de dépenses, selon une méthode qui nous paraît essentielle pour instruire des réformes structurelles et ne pas grever la croissance. En effet, nos échanges sur le budget pour 2025 ne doivent pas obérer notre volonté de faire les réformes de structure nécessaires à notre pays. Il y a deux temporalités : celle du budget pour 2025 qui implique des choix marqués, notamment en termes de contributions exceptionnelles ; celle de l’agenda de réformes de structures qui seront présentées par le Gouvernement pour améliorer l’efficience des dépenses et prendre le relais des mesures budgétaires. C’est pourquoi nous systématiserons l’exercice de la revue d’efficacité de la dépense, sous l’égide du Premier ministre, afin d’examiner tous les champs de l’action publique.

Faire mieux avec moins de moyens, c’est aussi faire mieux avec moins d’effectifs et l’assumer. Nous proposons environ 2 200 suppressions de postes, réparties entre les ministères et les opérateurs de l’État. La pire méthode serait de pratiquer des baisses aveugles, au rabot, qui nuiraient à l’efficacité des services publics. Nous nous adaptons donc aux besoins des services publics et à la réalité des ministères : les effectifs seront préservés ou en hausse substantielle dans les domaines régaliens – justice, armées, intérieur  ; ils seront réduits dans des ministères qui se transforment tels que Bercy, souvent exemplaire en la matière, et quand ils sont affectés à des politiques dont le nombre de bénéficiaires se réduit, ce qui est le cas – et c’est une bonne nouvelle – pour l’opérateur France Travail.

Comme indiqué par le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, nous proposons un effort de justice et de solidarité, sous forme de contributions exceptionnelles, temporaires et ciblées sur les ménages et les entreprises capables de les supporter. Le caractère temporaire de ces contributions sera inscrit dans la loi par le biais d’une clause d’extinction.

Par souci de transparence et respect des prérogatives du Parlement, je souhaite vous informer des propositions complémentaires qui seront présentées dans l’hémicycle. Considérant que le garde des sceaux a raison de dire que la trajectoire fixée pour son ministère n’est pas satisfaisante, je proposerai de renforcer le budget de la justice, en cohérence avec l’accent mis sur le régalien. Nous proposerons aussi d’augmenter les crédits du ministère de l’intérieur, marquant la priorité que nous donnons à la sécurité des Français. Autre exemple de modifications du texte à attendre : la hausse des dotations versées à La Poste et à l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), afin de préserver notre maillage territorial et d’accompagner les territoires les plus fragiles. Nous proposerons aussi d’augmenter les crédits en faveur du financement de notre patrimoine. Enfin, le rendement de la réduction du loyer de solidarité (RLS) sera maintenu en 2025 à son niveau de 2024, afin de soutenir la construction de nouveaux logements par les bailleurs sociaux. En miroir, comme annoncé par le Premier ministre, nous proposerons une extension du prêt à taux zéro (PTZ) dans des conditions qui devront être précisées et débattues.

Tout comme le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, je m’engage à faire plus régulièrement devant vous le point sur la situation de nos finances publiques. Je rendrai compte régulièrement devant votre commission des informations et prévisions dont je dispose concernant les finances publiques. Il me semble indispensable que vous puissiez disposer, plusieurs fois par an et non pas uniquement lors du dépôt des textes financiers, d’état de situation précis et récents sur l’ensemble des administrations publiques (APU) : État, collectivités territoriales, administrations de sécurité sociale. Il est nécessaire qu’un mécanisme d’alerte puisse permettre d’anticiper d’éventuels dérapages et surtout les débats que nous devons avoir ensemble. Il y va du bon pilotage de nos finances publiques et de la qualité de l’autorisation parlementaire et de l’évaluation que vous ferez au printemps. Nous nous engageons, Antoine Armand et moi-même, à favoriser la transparence, l’écoute et le dialogue. Nous souhaitons donc que ce texte, enrichi par nos débats, soit construit avec vous.

M. le président Éric Coquerel. Ce projet impose 36 milliards d’euros de baisse tendancielle des dépenses de l’État, de la sécurité sociale et des collectivités territoriales. C’est un budget d’austérité qui, en outre, est profondément inégalitaire : une baisse des dépenses publiques, des services publics et de la protection sociale affecte davantage la vie des classes moyennes et populaires que celle des gens capables de se payer ces mêmes services dans le privé. Une étude de l’Insee, parue en 2021, montrait que la moitié de la réduction des inégalités passait par des transferts en nature tels que l’éducation, la santé et le logement.

À lui seul, le budget de l’État va baisser de 17 milliards d’euros en tenant compte de l’inflation – 22 milliards en tendanciel. Une coupe aussi massive va peser sur l’activité économique : s’exprimant sur France Info ce matin, Pierre Moscovici, président du Haut Conseil des finances publiques (HCFP), tablait sur une baisse de 0,4 à 0,5 point de la croissance l’an prochain. Sans même parler des coupes concernant la sécurité sociale, la baisse du budget de l’État va aussi accélérer l’aggravation d’une pauvreté qui a explosé dans le pays. Une fois n’est pas coutume, nous sommes d’accord sur l’évaluation des économies à réaliser. Vous avez d’ailleurs raison de calculer en tendanciel, ce qui permet la meilleure prise en compte de la réalité. Êtes-vous d’accord avec les conséquences d’une telle politique sur les services publics ?

Contrairement à ce que vous affirmez, les mesures fiscales ne sont pas égalitaires : la surtaxe de 2 milliards d’euros sur les plus riches va toucher 0,3 % des foyers fiscaux, alors que la hausse de 3 milliards d’euros de la fiscalité sur l’électricité va affecter 40 % des Français. Certaines mesures fiscales ont plus de retentissement que d’autres sur la vie de nos concitoyens, notamment de ceux qui appartiennent à la classe moyenne. En additionnant ces mesures fiscales et les coupes dans les dépenses sociales, j’en arrive à la conclusion que 41 milliards d’euros concernent la vie de tout le monde et seulement 2 milliards celle des ultrariches.

S’agissant de l’électricité, il me semble qu’une hausse supplémentaire va s’ajouter aux 3 milliards d’euros, puisque vous comptez majorer la taxe sur l’électricité, afin de reporter sur les consommateurs les charges de service public dans les ZNI, les zones non interconnectées au réseau métropolitain continental. Avez-vous évalué ce coût supplémentaire ?

L’alourdissent de 8 milliards d’euros de la fiscalité sur les très grandes entreprises, qui va dans le sens de ce que certains d’entre nous préconisaient depuis longtemps, sera ponctuel et temporaire. En somme, tout ce qui est permanent frappe les classes moyennes et populaires, et tout ce qui est ponctuel et temporaire touche les plus favorisés ou les grandes entreprises. En outre, les recettes attendues d’une taxe exceptionnelle ne sont pas toujours au rendez-vous : la taxe sur les énergéticiens n’a rapporté que 600 millions d’euros contre 12 milliards attendus. Pourriez-vous nous apporter des garanties concernant le montant des recettes de la taxe exceptionnelle sur les entreprises, attendues à 8 milliards d’euros ?

Ce budget est aussi celui du renoncement écologique. L’Institut de l’économie pour le climat (I4CE) a publié en juillet dernier une étude très intéressante dans laquelle il évalue le besoin financement supplémentaire pour atteindre nos objectifs climatiques à 50 milliards d’euros pour l’État et 23 milliards pour les collectivités territoriales d’ici à 2030 à réglementation et législation inchangées. Or les crédits de la mission Écologie, développement et mobilité durables baissent de 7 %, soit 1,5 milliard d’euros. Le recul atteint même 16 %, soit plus de 3,5 milliards d’euros, si l’on retire l’augmentation de la contribution au service public de l’énergie (CSPE), une dépense non pilotable qui répond à des engagements passés et ne permet pas de soutenir de nouveaux projets d’énergies renouvelables. Et je vous épargne la baisse de 8,4 % du budget de l’agriculture. La France doit-elle renoncer à ses engagements climatiques pour réduire une dette financière qui résulte d’une baisse de recettes due à des cadeaux fiscaux accordés aux grandes entreprises et aux plus riches pendant sept ans ? Ce budget ne propose-t-il pas de renforcer ainsi la dette écologique ?

La presse a révélé que 4 000 postes d’enseignant allaient être supprimés. Vous faites état de 2 000 suppressions, en déduisant la création de 2 000 postes d’accompagnant d’élèves en situation de handicap (AESH), alors que les deux catégories n’ont pas les mêmes statuts et fonctions. Il y a de quoi s’inquiéter en matière de taux d’encadrement alors que le nombre d’élèves par enseignant est déjà l’un des plus élevés de l’Union européenne, voire de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Ma dernière question concerne le budget de l’APD, gravement menacée par vos coupes : la baisse de 22 %, qui intervient après une annulation de 14 % des crédits ouverts en 2024, compromet inévitablement l’objectif de consacrer 0,7 % du revenu national brut (RNB) à l’APD. Pourquoi l’affectation du produit de la taxe de solidarité sur les billets d’avion (TSBA) et de la taxe sur les transactions financières (TTF) au fonds de solidarité pour le développement (FSD) est-elle supprimée ?

M. Antoine Armand, ministre. À Bercy, nous raisonnons en effet en tendanciel depuis des années : nous regardons ce qui se serait passé sans l’adoption des mesures que nous avons prises, la différence avec la situation actuelle nous permettant d’en déduire des décisions en termes de freinage de la dépense et d’augmentation des prélèvements. Merci de nous en savoir gré.

Que l’on raisonne dans l’absolu ou en termes relatifs, on ne peut pas prétendre, comme vous le faites, qu’il s’agit d’un budget d’austérité. La dépense publique augmente en volume de 0,4 %. Autrement dit, nous la stabilisons. Grâce à la croissance espérée l’année prochaine, nous voulons la réduire progressivement pour que le déficit public soit contenu à 5 % du PIB. Dans l’absolu, je ne vois pas comment parler d’austérité alors que la dépense publique progresse légèrement et que l’Ondam augmente de 2,8 %. Voyons ce qu’il en est en termes relatifs. Il se trouve que je reviens de réunions de l’Eurogroupe et du Conseil pour les affaires économiques et financières (Ecofin), où j’ai pu échanger longuement avec mes partenaires européens. Certains pays ont adopté des plans d’austérité : la Roumanie a supprimé le treizième mois de ses agents publics ; l’Espagne, l’Italie et la Pologne ont réduit le salaire des fonctionnaires, respectivement de 5 %, de 5 % à 15 %, et de 10 %. Il faut prendre un peu de recul et regarder les faits.

Quant à nos estimations de croissance, nous les jugeons prudentes et réalistes. Nous avons évidemment tenu compte des effets potentiellement récessifs des réductions de dépenses et des prélèvements fiscaux ciblés, temporaires et exceptionnels. À cet égard, je trouve que la tonalité du HCFP est excessivement critique. Le HCFP estime que notre hypothèse de baisse du taux d’épargne à l’horizon de 2025 est optimiste, sans évoquer le redressement de l’opportunité de consommer, ni la baisse de l’inflation ressentie qui a été clairement documentée dans les dernières enquêtes de l’Insee. S’agissant de l’investissement, le HCFP évoque la baisse du taux de marge des sociétés non financières, sans préciser que le taux de marge de l’ensemble du secteur est bien meilleur. Il critique notre prévision du commerce mondial, sans évoquer notre hypothèse – plutôt conservatrice – d’un arrêt du rattrapage des pertes de performances pour 2025. D’ailleurs, d’autres instituts indépendants considèrent que notre prévision de croissance est réaliste. De manière générale, ils estiment que les prévisions de croissance, hors effet récessif des mesures budgétaires, sont plus élevées. Selon nous, il existe donc une marge correspondant à cet effet potentiellement récessif.

Le budget serait inégalitaire, selon vous. Pourtant, les prestations sociales, y compris les retraites, ont été fortement revalorisées l’année dernière et ce sera encore le cas cette année. Et même s’il ne s’agit pas d’une mesure budgétaire, la revalorisation anticipée de 2 % du Smic à compter du 1er novembre, annoncée par le Premier ministre, mérite d’être signalée. L’ensemble des prestations seront revalorisées à une date dont nous aurons à débattre.

Avec toute l’humilité qui convient, je vous dirais que les estimations de recettes sont les meilleures que nous ayons à ce jour. S’agissant de l’évolution spontanée des recettes, le HCFP estime que notre scénario est cohérent avec le scénario macroéconomique. Sans vouloir être trop technique, je dirai que le HCFP est donc d’accord avec notre façon de faire le lien entre l’augmentation du PIB et son effet sur les recettes à ce jour. Cela n’empêche pas qu’il y ait des surprises comme il y en a eu par le passé, que n’attendait aucun institut.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Quelles seront les conséquences du PLF et du PLFSS sur les services publics et la dépense sociale ? L’examen de ces textes nous donne l’occasion de nous interroger sur l’efficience de nos services publics et de nous poser collectivement la question suivante : pour un ministère, un bon budget est-il nécessairement un budget en hausse ? Ne devons-nous pas avoir la discipline de regarder ligne à ligne, d’analyser les besoins réels et leurs évolutions ? Ne devons-nous pas avoir l’exigence de chercher à faire différemment en transformant les outils qui sont à la disposition de ces ministères et de leurs opérateurs ? Nous avons souvent une lecture conduisant à estimer qu’un bon budget est nécessairement en hausse. Cela étant, vous avez raison, monsieur le président, nous devons veiller à la qualité des services publics.

Prenons l’éducation nationale, un sujet que je ne compte pas esquiver d’autant qu’il illustre très bien la problématique que je viens d’esquisser. Le solde des effectifs sera en effet négatif : 4 000 postes d’enseignant supprimés ; 2 000 postes d’AESH créés. La création de ces postes d’AESH était nécessaire et elle répondait à une volonté collective, mais il ne s’agit pas de confondre les métiers. La suppression de postes d’enseignant est à mettre en regard de l’évolution de la démographie des élèves : leur nombre a baissé de 350 000 au cours des six dernières années, et il devrait encore diminuer de 97 000 lors de la prochaine rentrée. Si nous adaptions le nombre de recrutements à cette évolution de manière proportionnelle, nous supprimerions 4 800 postes. Le budget proposé permet donc d’améliorer le taux d’encadrement des élèves.

J’en viens à la dépense sociale. On ne peut pas parler d’austérité quand l’Ondam progresse de 2,8 % à un moment où l’inflation est de 1,8 %. Toutes branches confondues, les dépenses sociales vont augmenter en 2025. Sans pratiquer l’austérité, nous devons proposer des mesures de freinage des dépenses de la sécurité sociale, les déficits de certaines branches étant devenus excessifs. Depuis 2019, dernière année sans crise, les dépenses de sécurité sociale ont progressé de 30 %, soit de 150 milliards d’euros, alors que l’inflation a été de 16 %. Je ne conteste pas qu’il y avait besoin de réinvestir et je suis fier des progrès accomplis grâce au Ségur de la santé, mais nous devons regarder en face le dérapage de 18 milliards d’euros des comptes sociaux. Le freinage de la dépense sociale sera l’une des conditions du rétablissement de nos comptes publics.

Alors que vous parlez de renoncement aux engagements climatiques, monsieur le président, vous constaterez que le budget pour 2025 consacre un montant record d’investissements à la transition écologique : les données du budget vert sont implacables. En revanche, nous devons assumer des modifications des priorités. Il faut améliorer l’efficacité de certains outils, tels que MaPrimeRénov ou l’aide à l’achat de voitures électriques, ce qui passe aussi par une lutte accrue contre la fraude. Tout en réduisant le poids financier de ces outils, il faut accroître l’accompagnement de l’État concernant le financement des énergies renouvelables, ce qui sera largement le cas en 2025 du fait de la baisse des prix. L’an prochain, la puissance publique jouera un rôle financier majeur dans les énergies renouvelables. La dette écologique ne sera pas sacrifiée sur l’autel de la dette financière, ainsi que le Premier ministre l’a rappelé dans sa déclaration de politique générale.

Quant à la TSBA, dite taxe Chirac, ce que vous décrivez est une conséquence de la Lolf : au 1er janvier 2025, est supprimée l’affectation des taxes qui n’ont pas de lien direct entre l’affectataire et le contribuable, dans un souci d’universalité budgétaire. Quoi qu’il en soit, le FSD ne souffrira d’aucune coupe budgétaire et recevra des crédits d’un même montant que celui auparavant issu de la TSBA.

M. Antoine Armand, ministre. Pour répondre à votre dernière question, monsieur le président, j’indique qu’il n’y aura pas de report sur les consommateurs des charges de service public dans les ZNI, ils seront bien concernés par la baisse de 9 %.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Messieurs les ministres, je ne vous poserai que neuf questions.

Le Gouvernement propose des efforts considérables qui rompent avec la facilité qui a prévalu au cours de ces dernières années et visent au rétablissement de nos finances publiques. On ne peut que s’en réjouir, mais il est grand temps ! Cependant, l’équilibre de mesures de hausse des prélèvements obligatoires et de baisse des dépenses, que vous nous proposez, présente évidemment un effet récessif que le HCFP estime entre 0,4 et 0,5 point de PIB. Si votre prévision de croissance de 1,1 % du PIB en tient compte, cela signifie que nous allions atteindre en 2025, hors mesures de redressement, une croissance en volume de 1,5 % ou 1,6 %. D’après le HCFP, cette prévision n’est pas réaliste. Si, au contraire, votre prévision de croissance à 1,1 % du PIB ne tient pas compte de ces mesures, alors la croissance pourrait tomber à 0,6 % ou 0,7 % – si toutes ces mesures sont effectivement prises et sont de l’ampleur annoncée. Vos prévisions d’une hausse de 61 milliards d’euros des prélèvements obligatoires en seraient fortement réduites. Pourriez-vous nous éclairer sur la sincérité de vos prévisions de recettes, afin d’éviter de renouveler en 2025 les considérables erreurs de prévision de 2024 ?

L’une des conditions de votre prévision de croissance de 1,1 % du PIB est une reprise de la consommation des ménages. Cela suppose notamment un certain reflux de leur taux d’épargne, qui atteint 18,1 % du revenu disponible en 2024, un taux bien supérieur à sa moyenne de long terme de 15 %. D’après vos prévisions, ce taux ne diminuerait que de 0,5 point en 2025. Ce phénomène d’épargne durablement élevée ne fragilise-t-il pas toute hypothèse de croissance reposant sur l’idée d’une possible reprise de la consommation des ménages ?

Quant aux entreprises, leur taux de marge devrait baisser de deux points entre 2023 et 2025, passant de 32,7 % à 30,7 % de leur valeur ajoutée. Leur taux d’épargne se contracterait de plus de quatre points dans l’intervalle, passant de 21,7 % à 17,1 % de leur valeur ajoutée. Dès lors, n’est-il pas hasardeux d’envisager une reprise, même timide, de l’investissement des entreprises ?

Le bouclier fiscal sur l’électricité prend fin le 1er février 2025. Dans cette perspective, l’article 7 du PLF relève le droit d’accise sur l’électricité pour les ménages de 21 à 25 euros par mégawattheure. Cependant, d’autres dispositions du même article prévoient la possibilité d’une hausse du droit d’accise sur l’électricité par voie réglementaire : une modulation comprise entre 5 et 25 euros par mégawattheure pourrait intervenir par arrêté. De plus, pour assurer la conformité au droit européen, l’article 7 relève la TVA sur les abonnements électriques de 5,5 % à 20 %, hausse censée être neutre pour le consommateur car elle devrait être absorbée par une baisse équivalente du droit d’accise. La combinaison de ces dispositions constitue un mécanisme complexe, pour ne pas dire un peu confus. Pourriez-vous nous indiquer quelle est la hausse du droit d’accise sur l’électricité qui doit intervenir le 1er février 2025 ? Dépassera-t-elle le niveau d’avant la crise ? Quelles sont les recettes supplémentaires attendues ? Surtout, ne craignez-vous pas que les renvois au pouvoir réglementaire, autorisés par cet article, n’entraînent une censure du Conseil constitutionnel pour incompétence négative du législateur ? Ces quatre questions constituent ma quatrième question, dirons-nous.

En 2024, le produit de l’impôt sur les sociétés devrait atteindre 58 milliards d’euros, alors que dans le projet de loi de finances initiale, il était estimé à 72 milliards. Cette perte de 14 milliards me conduit à vous poser la question sur la crédibilité du rendement de la contribution exceptionnelle sur les grandes entreprises en 2025, à hauteur de 8 milliards en 2024. Ce chiffre n’est-il pas entaché d’importantes incertitudes ? Telle est ma cinquième question.

Le dossier de presse présente des mesures à hauteur de 60,6 milliards d’euros, qui reposeraient pour un tiers sur des hausses de recettes et pour deux tiers sur une baisse des dépenses. Or le HCFP nous a annoncé hier que, selon sa méthodologie, les efforts de réduction des déficits publics reposeraient en fait à 70 % sur une hausse des prélèvements obligatoires, pour un montant de 30 milliards d’euros, et à 30 % sur une réduction des dépenses, pour un montant de 12 milliards d’euros. Cette différence d’appréciation repose sur la référence par le Gouvernement à un scénario tendanciel alors que le HCFP se réfère à la situation de 2024. Pouvez-vous nous donner des explications sur cette divergence d’appréciation ? En outre, il est prévu que 5 milliards d’euros d’économies supplémentaires ainsi que 1,5 milliard de recettes supplémentaires, semble-t-il sur les billets d’avion et les énergies fossiles, seront proposés par amendements. Quelles sont les mesures envisagées, en particulier concernant les 5 milliards d’euros d’économies supplémentaires ? Ces amendements seront-ils déposés avant la séance publique, permettant un examen sérieux par les commissions ? Telle est ma sixième question.

L’évolution de l’endettement public – qui culminerait à 116,5 % du PIB en 2027 – est très préoccupante. Cette aggravation se traduit par une hausse de la charge de la dette, qui devrait passer de 53 milliards d’euros en 2023 à 70 milliards en 2025, et atteindrait même 125 milliards en 2031. La charge de la dette s’alourdirait ainsi de 8 milliards d’euros chaque année, grevant de façon croissante les ressources publiques. Dès lors, n’y a-t-il pas un risque d’effet boule de neige concernant la dette publique ? La trajectoire présentée dans le plan budgétaire et structurel à moyen terme (PSMT), qui prévoit un début de désendettement en 2028, est-elle crédible ? Telle est ma septième question.

Le mécanisme de fonds de réserve, auquel vous voulez soumettre les collectivités territoriales les plus importantes, est-il compatible avec le principe constitutionnel de libre administration de ces dernières ? Quels sont les critères de restitution de ce fonds aux collectivités à terme ? Cette mesure ne présente-t-elle pas un caractère rétroactif puisqu’elle s’appliquerait en 2025, mais sur les résultats de 2024 ? Cette mesure n’est-elle pas une forme de sanction collective qui ne tient pas compte des efforts individuels de certaines collectivités ? Telle est ma huitième question.

Les mesures d’économie ciblant les collectivités locales sont importantes : 1,2 milliard d’euros sur le gel de la dynamique de la TVA ; 0,8 milliard sur la réduction du taux du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) ; 3 milliards sur le fonds de réserve ; 1,5 milliard d’euros sur le fonds Vert ; 1,3 milliard d’euros sur les cotisations employeur au titre de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), soit 7,8 milliards d’euros au total, ce qui est supérieur aux 5 milliards d’euros annoncés. Imposer ces charges nouvelles aux collectivités territoriales, alors qu’on leur demande de limiter fortement en valeur la croissance de leurs dépenses, revient à leur demander de réduire de 2 % de leurs dépenses en valeur. Est-ce crédible ? Telle est ma dernière question.

M. Antoine Armand, ministre. Vos trois premières questions se rapportent aux hypothèses de croissance, au reflux du taux d’épargne et aux taux de marge des entreprises. Elles se tiennent car, comme indiqué précédemment, nos prévisions de revenus de l’épargne et d’augmentation de la consommation diffèrent de celles du HCFP. Notre prévision de 1,1 % de croissance intègre les effets récessifs potentiels des hausses temporaires d’impôts et des baisses de dépenses prévues pour 2025. Contrairement à vous, nous ne réduisons pas le taux de croissance de 0,5 %. Nous faisons l’hypothèse d’une baisse de l’inflation ressentie, moteur important d’une reprise de la consommation. À cela j’ajouterai deux facteurs : la montée en puissance progressive de l’effet des réformes de l’assurance chômage et des retraites en termes de taux d’activité et de soutien à l’emploi ; la baisse des taux d’intérêt qui devrait soutenir l’investissement et contribuer à la bonne santé des entreprises.

En ce qui concerne l’impôt sur les sociétés, vous nous interrogez légitimement sur l’écart constaté l’an dernier entre les recettes attendues et celles qui ont été effectivement encaissées. Je le répète, je m’engage à faire preuve de la plus grande transparence et à rechercher avec vous les raisons de cet écart. Pour le présent budget, nos prévisions sont prudentes et partagées par le HCFP, qui juge l’évolution spontanée des recettes pleinement cohérente avec les scénarios macroéconomiques, même si une prudence particulière reste de mise sur ces sujets.

Enfin, sur le potentiel effet boule de neige de la dette, je rappelle que celle-ci est très liquide et que la demande de dette est stable grâce à un portefeuille d’investisseurs très diversifié, comme l’atteste le bon avancement du programme de financement de l’État, couvert à hauteur de 90 %. C’est parce que nous réduirons le déficit à 5 % en 2025 que nous contiendrons les nouvelles émissions de titres et que nous maintiendrons la confiance des marchés, qui restent très attentifs.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Le 1er février 2025, la hausse de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) consacrera la sortie du bouclier tarifaire sur l’électricité. Le montant exact, précisé par voie réglementaire et sans doute supérieur à 32 euros par mégawattheure, sera fixé en fonction du prix réel de l’électricité et prendra en compte la baisse de 9 à 10 % de la facture des particuliers qui bénéficient du tarif réglementé – nous nous y sommes engagés. Dernièrement, la facture des particuliers qui bénéficient de tarifs libres – soit 20 % des ménages – a baissé de manière plus importante. Du reste, ils pourront toujours demander à bénéficier du tarif réglementé car le marché est souple.

S’agissant des collectivités locales, nous proposons qu’elles contribuent à hauteur de 5 milliards d’euros. Nous avons engagé avec elles un dialogue exigeant, en prenant en considération la réalité des finances locales. L’hétérogénéité des collectivités et des finances locales est telle qu’il est très difficile de proposer une contribution satisfaisante pour toutes. Nous avons présenté au Comité des finances locales un projet sur lequel nous devons travailler. Nous avons proposé la création d’un fonds de réserve à hauteur de 2,8 milliards. Cette proposition innovante a un double mérite : le fonds serait abondé par les collectivités territoriales qui ont la plus grande capacité à contribuer et leur contribution serait limitée à 2 % des recettes réelles de fonctionnement (RRF) pour 2024 – nous ne nous fondons pas sur des prévisions en la matière. La gouvernance de ce fonds sera assurée par les collectivités locales et s’inscrira dans un partenariat avec l’État. Nous avons également proposé un écrêtement de la dynamique de TVA à hauteur de 1,2 milliard d’euros ainsi qu’une baisse de deux points du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) à hauteur de 800 millions d’euros.

Enfin, s’agissant des amendements visant à diminuer les crédits que nous déposerons, nous sommes en train d’organiser les rencontres bilatérales avec l’ensemble des ministres qui se tiennent habituellement au printemps ou à l’été, afin d’arbitrer la situation ministère par ministère. Pour rappel, j’ai pris mes fonctions le 22 septembre dernier. J’ai indiqué ceux des ministères régaliens, notamment ceux qui font l’objet d’une loi de programmation, que nous ne souhaitons pas voir privés de moyens complémentaires. Les amendements vous seront transmis avant l’examen en séance afin que vous puissiez les étudier. Un effort complémentaire de réduction de la dépense publique devra être fourni ; à défaut, nous ne parviendrons pas à atteindre les 60 milliards d’économies.

M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux orateurs des groupes.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous sommes très loin du budget de rupture attendu : c’est le musée des horreurs des technocrates de Bercy. Nous déplorons des injustices fiscales partout, et ne constatons nulle part le redressement durable des comptes de la nation. Rien n’aura donc changé malgré le vote des Français.

Les ministres macronistes se suivent et leurs mauvaises gestions se ressemblent. Vous êtes déjà très loin de la cure d’austérité en ce qui concerne l’autosatisfaction. À vous écouter, vous avez tout bien fait et toujours mieux que nos voisins européens. Excusez-nous donc, monsieur Saint-Martin, de ne pas avoir votre intelligence collective. Nous nous contenterons de notre lucidité individuelle.

Si vous disiez la vérité, alors les comptes publics se tromperaient. Parfois, osez penser à rebours. Si l’économie était prospère, les comptes seraient positifs ; si vous aviez protégé le pouvoir d’achat, le taux d’épargne des Français ne traduirait pas l’angoisse des classes moyennes pour le lendemain.

Ce budget marque la cinquante-et-unième année de gestion désastreuse du parti unique. Les dépenses ne baissent pas, mais continuent d’augmenter et aucune réforme structurelle n’est annoncée. Les classes moyennes et populaires sont bien davantage mises à contribution que les privilégiés et les grandes entreprises, dont les modalités techniques de participation à l’effort ne sont pas précisées ; de mauvaises surprises sont à redouter en la matière.

Vous ne faites que des coups de rabot, vous faites toujours les fonds de tiroir ; nous ne discernons pas de stratégie. À cet égard, vous sacrifiez comme toujours les dépenses d’investissement, les dépenses d’avenir. Par exemple, l’investissement de 500 millions d’euros pour la création de trois parcs éoliens en mer représente cinq fois les économies liées à la suppression des postes d’enseignants que vous proposez.

Enfin, vos choix économiques structurants sont très surprenants. Tout d’abord, vous proposez une hausse soudaine du coût du travail, préparée sur un coin de table, sans aucune étude d’impact. Comme si l’on pouvait remettre en cause des dispositifs relatifs au Smic, en toute urgence, sans réfléchir aux conséquences ! Par ailleurs, vous proposez des dispositifs nouveaux et étonnants relatifs au nucléaire et à la sortie de l’Arenh (accès régulé à l’électricité nucléaire historique). Comment ont-ils été élaborés ? Comment pouvez-vous proposer des dispositions aussi urgentes, qui n’ont jamais été annoncées et qui ont été préparées sur un coin de table, alors que nous manquons de temps pour examiner le budget ? On est bien loin des promesses de M. Barnier. Nous déplorons que tous les efforts soient supportés par les classes moyennes et populaires et que le redressement des comptes publics ne soit pas assuré.

M. Antoine Armand, ministre. Nous serons très vigilants à l’impact macroéconomique, en particulier sur l’emploi, de la hausse du coût du travail. Cette mesure n’a pas été préparée sur un coin de table, elle fait partie des scénarios proposés par Antoine Bozio et Étienne Wasmer qui ont pris le temps de la réflexion et ont apporté leur expertise pour rédiger leur rapport. Le projet de loi de finances est perfectible, le débat parlementaire permettra de l’améliorer. Ainsi, si vous proposez de remplacer les nouveaux prélèvements prévus par des économies afin de réduire les premiers, nous serons très ouverts à cette suggestion.

Je connais votre attachement au nucléaire, vous connaissez le mien. L’article 4, qui pourra être débattu avec la ministre de la transition écologique, de l’énergie, du climat et de la prévention des risques, traduit dans la loi l’accord entre EDF et l’État.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Cette mesure permettra de sécuriser dès 2027 les revenus engendrés par la production nucléaire d’EDF, donc de protéger davantage les consommateurs contre les fluctuations du marché. Cette disposition de mise en conformité avec le droit européen n’est absolument pas une surprise. Le remplacement de l’Arenh est un sujet connu, qui fait l’objet de débats. Les revenus reversés aux consommateurs seront désormais calculés en fonction des revenus réels qui résultent des prix du marché, lesquels peuvent énormément fluctuer à la hausse – aussi avions-nous instauré un bouclier tarifaire lors de la crise de l’énergie – ou à la baisse, comme ce sera le cas à partir du 1er février 2025. L’article 4 est une bonne nouvelle pour les consommateurs.

M. David Amiel (EPR).  Messieurs les ministres, vous pourrez compter sur le soutien de notre groupe car c’est le bon moment pour consentir un effort de réduction des déficits publics. Entre 2017 et 2019, notre majorité avait réduit les déficits, qui sont passés, pour la première fois depuis longtemps, sous la barre des 3 % du PIB. Notre groupe a soutenu les plans de relance massifs pour faire face à la crise sanitaire. Nous devons désormais retrouver des marges de manœuvre pour affronter les prochains chocs. Du reste, c’était ce qui guidait l’action du précédent gouvernement, lequel avait décidé des annulations de crédits et des mises en réserve historiques en 2024, et préparé des lettres-plafonds en vue du PLF pour 2025.

Par ailleurs, vous pourrez compter sur le soutien de notre groupe car la réduction des dépenses est un exercice difficile face auquel chacun doit être humble. Je m’étonne de voir certains donner des leçons de réduction des dépenses publiques alors qu’ils s’opposaient avec véhémence à la réforme des retraites, il y a un an à peine.

Vous pourrez compter également sur notre groupe pour être toujours du côté de la solution. Nous ne serons pas le parti du sectarisme fiscal. Modifier l’impôt peut être nécessaire afin de le rendre plus juste ou plus efficace ; en revanche, nous serons très vigilants quant aux hausses d’impôts qui fragiliseraient les objectifs structurants en matière d’emploi, de transition écologique, de réindustrialisation. Chaque fois, nous proposerons des solutions alternatives à l’euro près pour atteindre l’objectif prioritaire et incontournable de réduction des déficits publics. Ce sera le cas s’agissant de la hausse des charges, qui menacent l’emploi et le processus de désmicardisation – autre objectif prioritaire –, ou encore s’agissant de la hausse des tarifs d’accise de l’électricité, supérieurs à ceux en vigueur avant la crise. J’ai bien entendu votre ouverture sur ce sujet.

Compte tenu de l’ampleur du déficit, quel montant d’annulations de crédits envisagez-vous pour l’année 2024, afin que l’effort à consentir soit moins important dans le PLF pour 2025 ? Quels sont les grands domaines qui seraient concernés par les 5 milliards d’économies supplémentaires proposées par voie d’amendements ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Il est nécessaire de remettre en perspective la question des hausses de charge. Durant les quatre dernières années, les entreprises ont bénéficié de près de 80 milliards d’euros d’exonération de charges patronales, dont 20 milliards s’appliquaient aux bas salaires, avec le succès que l’on sait. Une réduction de 4 milliards nous semble raisonnable et ne devrait pas grever la dynamique d’emploi. Si nous n’avons pas la même opinion sur cette question – je respecte la vôtre –, nous sommes d’accord sur la philosophie du rapport Bozio-Wasmer.

Il était courageux et nécessaire de prendre les décrets d’annulation de crédits pour l’année 2024, dont le montant global ne pouvait excéder 10 milliards d’euros : ils ont freiné le déficit. Une part substantielle des crédits ayant fait l’objet d’un surgel pour 2024 pourra également être annulée pour réduire au maximum le déficit de l’année 2024.

Nous ne présenterons pas de projet de loi de finances rectificative car nous estimons que le débat fiscal doit se tenir dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2025. L’estimation d’un déficit public de 6,1 % repose tant sur l’annulation des crédits du mois de février 2024 que sur celle d’une partie des surgels de la fin de gestion 2024. Ce montant incertain sera précisé dans le projet de loi de finances de fin de gestion, qui sera présenté à la fin de l’année.

Nous sommes en train de discuter avec les ministères au sujet des 5 milliards d’euros d’économies supplémentaires. L’arbitrage du Premier ministre sera rapide puisque nous aurons besoin de présenter les amendements correspondants lors de l’examen de la seconde partie du PLF. Je tiens à ce que vous ayez l’information le plus tôt possible ; cela mériterait la publication d’une sorte de tiré à part.

M. David Guiraud (LFI-NFP). A-t-on déjà récolté autant d’argent issu des impôts que durant ces dernières années ? Si oui, pourriez-vous nous préciser quand ?

L’an dernier, l’État a récolté à lui seul 106 milliards d’euros de TVA, qui est l’impôt le plus important, auxquels il faut ajouter la part de la TVA affectée à la sécurité sociale – pour 60 milliards – et celle transférée aux collectivités locales – pour 30 milliards – afin de compenser les cadeaux faits aux grands groupes et aux grandes fortunes. C’est un curieux paradoxe : bien que nous soyons assis sur un tas d’or, celui des Français, nous serions menacés par un grave déficit.

Contrairement à votre prédécesseur, vous commencez à comprendre que lorsqu’on jette par la fenêtre des centaines de milliards d’euros par an pour les donner au CAC40, cela pose de gros problèmes aux finances publiques. Certes, vous comprenez plus vite, mais il faut quand même vous expliquer très longtemps, car votre budget est dans la droite ligne des précédents : vous menez une politique d’austérité budgétaire et une politique de l’offre, et vous n’atteignez jamais, pas même du bout des pieds, vos objectifs budgétaires – détail qui revient constamment sous la présidence de Macron. Non seulement vous vous noyez budgétairement, mais vous vous accrochez aussi à la manche des collectivités locales – qui, contrairement à vous, présentent des budgets à l’équilibre – pour les faire couler. Alors que vous leur avez annoncé un effort de 5 milliards d’euros, je constate une coupe de 6,5 milliards dans le budget qui entraînera des conséquences désastreuses pour elles et nos concitoyens.

S’agissant des services publics, je ne veux pas être méchant, mais il doit manquer deux minutes de cuisson dans la tête des membres de ce gouvernement. Pensez-vous réussir à nous faire croire que « l’école, voilà qui reste la priorité » – citation et blague de Michel Barnier –, alors que vous supprimez 4 000 postes d’enseignants dans le projet de loi de finances ? Je veux néanmoins saluer, monsieur Saint-Martin, votre effort pour être comique lorsque vous avez posé, avec une sincérité assez désarmante, cette question : « Pourquoi faut-il systématiquement considérer qu’un bon budget ministériel est un budget en hausse ? » Je ne sais quoi vous répondre, cela devient difficile d’avoir de l’estime pour vous.

Fort heureusement, vous n’avez aucune majorité dans cette assemblée et vous serez battus. Un autre projet de loi de finances, qui partage les richesses, protège les services publics et prépare la transition écologique est possible. Nous nous battrons pour cela. PLF : trois lettres pour désigner votre éphémère projet de loi de finances. Étant donné tous les coups de couteau que vous vous plantez déjà dans le dos au sein de votre – désormais – tout petit groupe parlementaire, je ne donne pas six mois à votre affaire. Votre temps est compté.

M. Antoine Armand, ministre. Je vais essayer de vous répondre en faisant montre d’un esprit moins polémique que le vôtre ; avec 3 000 milliards de dettes et 6 % de déficit, le débat mérite mieux que des petites phrases.

La première chose que vous avez dite est en contradiction avec la suite de votre propos. Oui, les recettes fiscales ont augmenté car nous avons soutenu l’activité. Les recettes de l’impôt sur les sociétés ont également augmenté alors que nous en avons baissé le taux. En effet, lorsqu’on fait confiance aux entreprises sur le long terme, elles-mêmes retrouvent la confiance. Par conséquent, les recettes fiscales qui servent à financer les services publics augmentent.

J’en viens à votre deuxième point : en effet, le montant des recettes atteint un record mais la dépense publique, qui est la plus importante de l’Union européenne, a augmenté plus vite que les recettes. Vous avez ainsi rappelé les raisons pour lesquelles nous avons besoin de baisser la dépense publique et de faire confiance aux entreprises pour investir et créer de l’emploi.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Tout le monde est d’accord, vous inclus : il faut adapter les moyens des services publics à la réalité des besoins. Si l’on peut diverger sur les propositions, les termes du débat sont essentiels. Je vous renvoie la question : le nombre d’enseignants doit-il être adapté au nombre d’élèves ? Vous considérez qu’il faut renforcer les services publics, c’est tout à fait légitime. Mais cela implique soit de trouver de nouvelles voies de financement, soit de baisser d’autres dépenses publiques. Je suis convaincu qu’au fond vous êtes d’accord : des finances publiques fortement déficitaires de façon durable sont dangereuses pour la souveraineté de notre pays.

S’agissant des collectivités, vous avez raison : leur budget de fonctionnement est à l’équilibre, conformément à la loi. Pendant la crise du covid, les collectivités ont apporté un soutien massif et l’État a fortement soutenu les finances locales. Je vous invite à porter un regard d’ensemble sur la réalité des finances locales. Si nous évoquons la responsabilité des collectivités territoriales, nous n’entendons pas ce terme au sens de culpabilité. Cela étant, nous sommes face à la nécessité collective de redresser les finances publiques. Du reste, la grande majorité des collectivités est d’accord avec ce principe. La question est de déterminer le bon moyen pour y parvenir ensemble.

M. Philippe Brun (SOC). Tout à l’heure, M. Armand a évoqué l’exemple de la Roumanie. Certes la France n’est pas la Roumanie ; même en Roumanie, il n’y a pas un décalage de 2 points de PIB entre les prévisions de déficit budgétaire et le déficit réel.

Si vous n’êtes pas directement responsables du trou dans les finances publiques, vous l’êtes politiquement car vous appartenez à la majorité qui a présenté le dernier budget et l’a voté.

La question de la répartition de l’effort pour résorber ce déficit très important se pose. Nous partageons un certain nombre de mesures que vous proposez. Nous avions proposé la surtaxe à l’impôt sur les sociétés pour les très grandes entreprises. Nous sommes également favorables à la mise à contribution des plus hauts revenus. Néanmoins, le compte n’y est pas en matière de répartition de l’effort. Alors que 2 milliards seront prélevés sur les hauts revenus, 3,5 milliards seront ponctionnés sur les retraités – la pension moyenne en France est inférieure à 1 500 euros – et 3,5 milliards seront prélevés sur l’ensemble des factures énergétiques des Français du fait de l’augmentation de la TICFE.

Selon M. Armand, le Gouvernement serait prêt à écouter toute proposition qui viserait à remplacer un impôt supplémentaire par une économie supplémentaire. Je pose la question inverse : est-il prêt à accepter toute proposition d’impôt supplémentaire qui se substituerait à une économie supplémentaire ? En effet, nous ne pouvons accepter les économies faites sur le budget de l’éducation nationale, alors que des professeurs ne sont pas remplacés dans des dizaines d’établissements et que des classes ferment en milieu rural. On ne peut accepter de sacrifier l’éducation nationale sur l’autel de la rigueur budgétaire. Voilà les questions que les socialistes posent dans un esprit constructif et de responsabilité.

M. Antoine Armand, ministre. Nous devons être transparents sur les prévisions de recettes, comme sur le suivi des recettes et des dépenses. Nous devons travailler avec la représentation nationale, si elle le souhaite, pour améliorer ce modèle et assurer ce suivi.

Je ne considère pas qu’on puisse remplacer des économies par un impôt. En effet, ces dernières années, la dépense publique n’a cessé d’augmenter plus vite que les recettes. Par ailleurs, notre taux de prélèvements obligatoires est l’un des plus importants au monde. Nous devrons appliquer une doctrine de stabilité fiscale et de baisse des impôts dès que les comptes publics seront rétablis afin de préserver l’emploi, la compétitivité et, partant, les salaires et les employés.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Je le répète, je n’éviterai pas le débat sur les crédits de l’éducation nationale – vous avez raison de l’évoquer avec gravité. Il est faux de dire que nous baissons les moyens de l’éducation nationale : 130 millions d’euros supplémentaires sont alloués à la mission Enseignement scolaire en 2025 ; nous ne l’abîmons donc pas, et les effectifs sont adaptés à la réalité démographique.

Nous débattrons notamment de votre souhait d’en renforcer les moyens. Cela étant, ne partons pas du constat que cette mission serait appauvrie : depuis 2019, ses crédits ont augmenté de près de 20 %. Cette tendance se poursuit dans le budget pour 2025. Néanmoins, des réformes et des améliorations sont sans doute nécessaires au sein de l’éducation nationale.

M. Nicolas Ray (DR). Nous partageons malheureusement votre constat : la situation des finances publiques est grave. Cela fait plusieurs années que nous alertons les différents gouvernements sur la dérive des finances publiques. Nous avions d’ailleurs proposé l’an dernier un contre-budget qui prévoyait 25 milliards d’économies. Soyez rassurés, messieurs les ministres, notre groupe fera le choix du courage, de la vérité et de la responsabilité. Nous serons aux côtés de Michel Barnier et à vos côtés pour redresser nos comptes publics.

Entre baisses des dépenses et hausses des impôts, nous avons clairement choisi notre camp. Vu le taux record de prélèvements obligatoires, nous ne devons pas céder à la solution de facilité qui consisterait à augmenter les impôts, notamment des Français qui travaillent ou des PME. Je salue le fait que, contrairement aux rumeurs, vous n’ayez pas gelé le barème de l’impôt sur le revenu, mesure qui aurait conduit à augmenter les impôts de tous les Français.

Le plan de redressement de nos comptes doit être ambitieux mais il doit être également juste pour préserver le pouvoir d’achat des Français – des actifs comme des retraités –, garantir la prise en charge des soins de nos concitoyens et assurer le respect des collectivités locales. Nous avons contribué au débat en présentant un plan de réduction des dépenses publiques de 50 milliards. Il s’articule autour de trois axes, dont la réduction de la lourdeur administrative, qui passe par une diminution des coûts que représentent les opérateurs. Vous allez dans ce sens en supprimant 1 000 équivalents temps plein (ETP) au sein des opérateurs. Nous pouvons aller plus loin car, en cinq ans, leurs effectifs ont été renforcés à hauteur de 28 000 ETP.

Depuis plusieurs semaines, vous indiquez vouloir faire reposer l’effort à hauteur de deux tiers sur les dépenses et d’un tiers sur la fiscalité, ce que Pierre Moscovici a contesté hier. Cette différence s’explique par l’application d’une méthode discutable, fondée sur une hausse irrésistible de 2,8 % des dépenses – du reste, cette méthode va à l’encontre de votre philosophie. Nous serons force de proposition au cours de ce débat pour lutter contre les doublons, chasser le gaspillage, redresser les comptes publics et garantir la souveraineté financière de la France.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Je vous remercie pour vos propos. S’agissant de l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu (IR) sur l’inflation, le gel du barème – proposition que nous avons toujours rejetée – entraînerait l’assujettissement de 600 000 contribuables à cet impôt. Cette mesure a été appliquée tant par des gouvernements de droite que par des gouvernements de gauche durant de nombreuses années. Alors qu’il est souvent reproché à ce budget de ne pas protéger les classes moyennes et populaires, le choix de ne pas recourir à cette mesure démontre le contraire.

Mme Eva Sas (EcoS). Messieurs les ministres, vous nous présentez avec retard un budget marqué par un ajustement sans précédent – 60 milliards d’euros –, un redressement brutal et excessif qui pèse essentiellement sur les dépenses.

Certes, vous proposez quelques mesures de recettes cosmétiques, comme la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, alors que les plus riches auraient dû être imposés sur le patrimoine. Or vous vous y refusez. Résultat : vous proposez des coupes budgétaires drastiques. Je soulignerai quatre points d’inquiétude majeure pour les écologistes.

D’abord, malgré les propos du Premier ministre sur la dette écologique, le budget de l’écologie est en baisse. Ainsi, les crédits du programme 174, Énergie, climat et après-mines, qui finance le dispositif MaPrimeRénov’, diminuent de 3 milliards d’euros, alors qu’il aurait fallu, au contraire, renforcer l’accompagnement des ménages dans la rénovation thermique.

Par ailleurs, vous exigez des collectivités territoriales un effort colossal et inatteignable, en prévoyant des coupes budgétaires à hauteur de 8,5 milliards d’euros, alors qu’elles appliquent les mesures relatives à la transition écologique et les politiques de solidarité en faveur des plus vulnérables. À l’inverse de la politique que vous proposez, les écologistes souhaitent non seulement préserver les moyens des collectivités mais aussi restaurer leur autonomie fiscale.

Vous proposez également de freiner la trajectoire de l’Ondam pour réaliser 3,8 milliards d’euros d’économies, notamment sur les achats de l’hôpital et le ticket modérateur. Comment ne pas craindre le pire alors que l’accès aux soins et à l’hôpital public est déjà si fragilisé ?

Enfin, vous prévoyez des suppressions d’emplois publics alarmantes, en particulier dans l’éducation nationale et à France Travail.

Pourquoi ne pas avoir mis à contribution, de façon plus volontariste, ceux qui en ont les moyens – les plus riches et les grandes entreprises – plutôt que de dégrader une fois encore les services publics, l’éducation nationale et l’hôpital public ? Prévoyez-vous de réduire les grandes dépenses inutiles – le service national universel (SNU), l’uniforme à l’école, le recours aux cabinets de conseil –, plutôt que de vous en prendre à l’écologie et aux collectivités locales ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Nous devons « rebaser » certains dispositifs d’aide de l’État ; c’est une question de bonne gestion. MaPrimeRénov’ est un bon outil, qui doit néanmoins être repensé, d’une part, pour en améliorer l’impact et l’efficacité en matière de performance énergétique ; d’autre part, pour lutter contre une fraude trop importante et à laquelle nous devons nous attaquer de front. La baisse des moyens ne signifie pas une moindre ambition en matière de rénovation thermique des bâtiments.

Vous avez dit que ce budget était excessif ; je ne partage pas votre opinion. Vouloir ramener le déficit public à 5 % du PIB n’est pas excessif. Compte tenu de la conjoncture et de la croissance, il est urgent d’accélérer la réduction des déficits publics, afin de prévenir de futures crises qui pourraient entraîner des récessions plus violentes.

Pourquoi n’allons-nous pas plus loin en matière de fiscalité ? C’est un vrai débat. Votre approche diffère de celle de M. Amiel. Nous suivons une boussole : nous ne voulons pas casser la politique de l’offre qui a accru l’investissement et a amélioré l’attractivité de notre pays. Depuis cinq ans, la France est le pays le plus attractif d’Europe, notamment grâce à une baisse de la fiscalité. Ne cassons pas ce qui a bien marché ces dernières années, à savoir les mesures qui ont rendu le pays attractif, que ce soit pour les grandes entreprises ou pour les particuliers. Nous proposons des mesures fiscales exceptionnelles, temporaires et ciblées, afin de trouver le bon équilibre entre la nécessaire contribution de certains et la poursuite d’une politique qui a porté ses fruits.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). Le projet de budget qui nous est soumis a le mérite de concilier la responsabilité et l’ambition dans un contexte où la situation de nos comptes est très préoccupante. Cette responsabilité se traduit par des efforts sans précédent de réduction de la dépense publique pour endiguer la spirale de l’endettement qui, si elle poursuit sa dynamique, risque de paralyser durablement l’action publique. Nous devons apprendre à dépenser moins en dépensant mieux.

Nous saluons également le fait que le Gouvernement propose des prélèvements ciblés qui répondent à un impératif de justice fiscale. Pour le groupe Les Démocrates, certaines particularités de notre système fiscal doivent être corrigées, afin de le rendre plus équitable et plus incitatif à l’investissement et à l’innovation des entreprises. À cet égard, nous accueillons de manière très favorable la taxe sur les rachats d’actions.

Nous regrettons que la plupart des efforts soient conjoncturels, alors qu’ils devraient s’accompagner de davantage de réformes structurelles qui porteraient leurs fruits à long terme. Pourquoi n’avez-vous pas envisagé de pérenniser la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus ? Un consensus s’est-il dégagé avec les grandes entreprises s’agissant de leur contribution exceptionnelle ? Joueront-elles le jeu sur le temps long ? Si vous limitez dans le temps la contribution différentielle, il risque d’y avoir un effet d’aubaine qui rendra inefficace le dispositif.

S’agissant de la politique du logement, le PLF ne prévoit pas la généralisation du prêt à taux zéro (PTZ). Quelles mesures complémentaires relatives au logement comptez-vous présenter par voie d’amendement ? Le PLF ne réglera certes pas tout le problème du logement en France, mais un choc fiscal est nécessaire.

M. Antoine Armand, ministre. La taxe sur les rachats d’actions touchera les actions rachetées pour être annulées. Son assiette sera la valeur nominale, additionnée à la prime d’émission, et son taux de 8 %.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Nous devrons avoir un vrai débat sur le logement lors de l’examen de la mission correspondante. Je ne doute pas que nous l’aurons également en examinant la partie recettes. Il est normal que le PTZ ne figure pas dans le texte initial, en raison du calendrier. Il sera traité, comme je l’ai dit, par voie d’amendements.

Nous devons nous garder de réflexes systématiques de traitement du logement par la dépense fiscale. Il faut, en la matière, toujours viser l’efficacité, sans revenir à des outils qui présentaient des défauts que vous connaissez comme moi.

Le débat sur le logement n’en est pas moins indispensable et, en la matière, les gestes posés par le Premier ministre et qui seront consacrés dans ce texte vont dans le bon sens.

Mme Félicie Gérard (HOR). Les chiffres présentés confirment que la situation de nos finances publiques est très dégradée et nécessite plus que jamais un effort massif de redressement. Pour revenir dès 2025 à un déficit inférieur à 5 % et retrouver une trajectoire soutenable, vous nous proposez un effort budgétaire de 60 milliards d’euros.

Pour le groupe Horizons et indépendants, le sérieux budgétaire est essentiel. Il nous permet en effet de maintenir la confiance de nos concitoyens dans nos institutions et, surtout, de garantir la stabilité économique de notre pays. Nous abordons l’examen de ce budget avec responsabilité et avec la conscience de l’extrême difficulté dans laquelle nous nous trouvons. Nous serons, bien évidemment, constructifs. Les postures de principes et de blocage n’ont pas de place dans ce budget, tant la situation budgétaire de notre pays est préoccupante.

Quatre priorités guideront nos amendements à ce texte. La première est le soutien à la France qui travaille. Les efforts nécessaires au redressement des comptes ne doivent en effet peser ni sur les travailleurs ni sur la classe moyenne, et travailler doit payer plus que ne pas travailler. Notre deuxième priorité est l’accès au logement. La troisième est la préservation des finances des administrations publiques locales, et tout particulièrement des collectivités locales bonnes gestionnaires qui travaillent au quotidien à assainir leurs finances. La quatrième priorité est la réduction des dépenses publiques. Nous devons renforcer la lutte contre la fraude sociale et la fraude fiscale, et nous assurer que chaque euro investi l’est de manière efficiente et pour le bien public.

Au-delà de ces priorités, nous restons très attachés aux sujets régaliens. Si la trajectoire de la loi de programmation militaire semble respectée, l’étalement des trajectoires des lois de programmation du ministère de l’intérieur et du ministère de la justice inquiète nos concitoyens. Comme vous venez de l’annoncer, les montants inscrits dans le PLF seront probablement rehaussés par amendements du Gouvernement. Afin de rassurer les Français sur la pleine mobilisation de ce dernier pour leur sécurité, pourriez-vous nous donner des précisions sur ces hausses ? Permettront-elles de respecter les trajectoires des lois de programmation ou, à tout le moins, de s’en approcher fortement ?

M. Antoine Armand, ministre. La baisse de la dépense publique et l’amélioration de son efficacité sont en effet nécessaires. C’est toute la philosophie du Gouvernement que de favoriser, « la France qui travaille » en anticipant la revalorisation du Smic de 2 %, en ne gelant pas le barème de l’impôt sur le revenu pour ne pas accroître la pression fiscale sur les contribuables qui ont des salaires moyens ou modérés et en poursuivant le travail sur la réforme de l’assurance chômage, aujourd’hui entre les mains des partenaires sociaux.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Nous veillons à ce que les budgets correspondant aux lois de programmation soient systématiquement en hausse dans les ministères concernés et que, à défaut d’un plein respect de la marche du fait de la contrainte budgétaire à laquelle nous sommes soumis, on s’en approche le plus rapidement possible. Dans les amendements que nous proposerons pour réduire de 5 milliards la dépense publique, nous ne toucherons pas aux lois de programmation – la baisse d’effectifs complémentaires, notamment, ne touchera pas les ministères qui y sont soumis.

Les hausses d’effectifs qui figurent déjà dans le texte initial représentent à ce jour 630 ETP – équivalents temps plein – pour les armées et 619 pour la justice. Comme je l’ai dit à propos de la justice, ces chiffres pourront encore augmenter. Nous attachons une réelle attention à cette question, car les lois de programmation sont nécessaires et la sécurité, la justice et la recherche sont aussi des priorités de notre gouvernement.

M. Jean-Pierre Bataille (LIOT). Nonobstant l’approche bienveillante avec laquelle j’aborde ce projet de loi de finances pour 2025, je voudrais vous interpeller sur un point qui me contrarie particulièrement : le sort que vous semblez réserver aux collectivités territoriales. Malgré les annonces faites ici même le 25 septembre, la réalité est bien là : 5 milliards d’économies sont prévues sur le dos des collectivités – et même 6,5 milliards si on y ajoute la hausse des cotisations à la CNRACL. Cette annonce suscite une vive inquiétude chez l’ensemble des élus locaux et, bien que vous présentiez cette mesure comme une économie, elle est en réalité un prélèvement supplémentaire sur les recettes.

À cela s’ajoute, comme vous l’avez dit, le gel de la revalorisation des recettes annuelles de TVA, le coup de frein de 2,8 milliards sur la dépense des 450 plus grosses collectivités attribués à un fonds d’épargne dont le devenir reste à préciser, ainsi qu’une restriction sur le FCTVA – autant de mesures qui, si rien n’est fait, pèseront sur les capacités financières des collectivités, alors que ces dernières assurent, je le rappelle, 58 % de l’investissement public national pour seulement 1 % de la dette.

Pour en donner un exemple concret, ces mesures pénaliseraient la région Hauts-de-France de 128 millions d’euros, soit 50 % de son épargne brute. Elles sont perçues comme une atteinte à la capacité d’agir des élus locaux, dont la confiance envers l’État est, une fois de plus, mise à rude épreuve.

La répartition des efforts doit être équitable. Les collectivités ont certes un rôle à jouer dans le redressement des comptes publics, mais à hauteur de ce qu’elles pèsent dans la dette publique, c’est-à-dire au maximum 8 %, au lieu des 16 % correspondant au ratio de 6,5 sur 41,3 milliards d’euros.

Le Gouvernement entend-il les parlementaires et les élus locaux qui demandent un équilibre plus juste et plus respectueux de l’effort de redressement des comptes publics ? N’est-il pas temps de redonner une réelle autonomie fiscale aux collectivités territoriales, plutôt que de voir l’État freiner leur mission de premier investisseur public ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Comme moi, la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation souscrit au constat qu’il est temps, en effet, de repenser l’autonomie financière et, surtout, l’autonomie fiscale des collectivités, qui n’est pas constitutionnelle. En termes de décentralisation, nous sommes en quelque sorte au milieu du gué, ce qui ne permet pas d’associer responsabilité et levier fiscal et n’est, finalement, guère satisfaisant face à la situation actuelle.

Je crois cependant que nous assumons nos responsabilités quand nous regardons comment les collectivités territoriales peuvent contribuer au redressement des finances publiques. J’ai dit tout à l’heure qu’un grand nombre d’élus locaux considéraient que les collectivités territoriales ont un rôle à jouer dans la séquence qui s’annonce, et je pense que vous en conviendrez. La question est de savoir par quels moyens, mais ils ne sont pas si nombreux, notamment depuis que les leviers fiscaux ont été contraints. Ce que vous appelez des prélèvements ne sont que les moyens de réduire la dépense locale puisque, comme cela a été dit, les budgets de fonctionnement sont équilibrés. Nous ne voulons pas grever excessivement l’investissement local, qui est nécessaire dans les territoires. C’est une préoccupation réelle et nous examinerons cela avec finesse.

Je le répète toutefois : si, à propos du fonds de réserve, de l’écrêtement de la dynamique de TVA et du FCTVA, qui donneront lieu à un débat parlementaire à l’Assemblée comme au Sénat, des contre-propositions se font jour pour parvenir à une contribution équivalente des collectivités territoriales, nous y serons tout à fait ouverts, car les choses doivent se faire avec les collectivités, et certainement pas contre elles.

M. Emmanuel Maurel (GDR). Ma première question, qui n’est pas polémique, est la suivante : comment peut-on vous faire confiance ? Je ne parle pas du contenu politique du budget, mais de sa présentation car, au fil des révélations fracassantes sur le dérapage navrant des finances publiques depuis 2023, à grands coups d’erreurs de prévision et d’informations tronquées ou dissimulées, il est en effet impossible de vous faire crédit en matière de transparence et de sincérité budgétaires. Je le regrette pour le débat démocratique. Bruno Le Maire a dit que la vérité apparaîtrait plus tard : en attendant la vérité, nous devons être circonspects.

Deuxième question : croyez-vous vraiment que ce projet soit crédible pour réduire le déficit ? M. Moscovici, que nous entendions hier, a qualifié vos hypothèses de fragiles ou non documentées. M. de Courson a évoqué la consommation et même la reprise d’investissement que vous prévoyez, alors que vous coupez dans l’investissement des collectivités locales, qui sont le premier investisseur du pays. Par ailleurs, je ne comprends pas comment vous comptez atteindre une croissance de 1,1 %, chiffre qui était celui du consensus des économistes de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), de la Banque de France et de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), mais en septembre, avant les mesures de freinage que vous préconisez.

Troisième question : ce budget correspond-il vraiment aux besoins des Français ? Je crois que nous avons la réponse. Vous invoquez ainsi une augmentation budgétaire pour l’éducation nationale mais, si c’est vrai en valeur, ce ne l’est pas en euros constants. De même, dans le domaine du travail, avec 2,3 milliards d’économies, vous sacrifiez des politiques que vous aviez vous-même engagées. Vous annoncez ainsi 500 emplois en moins à France Travail, alors qu’on prévoit une charge supplémentaire liée notamment à la gestion du RSA. C’est impossible.

Enfin, il n’est pas vrai de dire que ce sont surtout les riches et les entreprises qui seront mis à contribution. Comme l’a excellemment dit le président Coquerel, quand on voit ce que vous faites avec les tarifs de l’électricité, le déremboursement des consultations, les dispositifs médicaux, les arrêts de travail et l’Ondam, on est très loin du compte.

M. Antoine Armand, ministre. Je ne m’étendrai pas à propos de la croissance, car j’ai déjà évoqué nos différences d’appréciation quant aux positions du Haut Conseil des finances publiques, notamment pour ce qui concerne les moteurs qui nous permettent de penser que la croissance sera de 1,1 % en 2025, les contributions exceptionnelles pesant sur les contribuables ou les entreprises qui le peuvent nous semblant avoir un effet récessif limité.

La question de la confiance et très légitime. Je crois comprendre que votre commission aura l’occasion de faire toute la lumière sur les mois et les années précédents. Vous prétendez que les précédents gouvernements ont dissimulé des choses. Ce n’est pas ma conviction et ces allégations me semblent même s’apparenter à de la diffamation. Votre commission et la représentation nationale pourront faire ce travail bien mieux que quiconque.

M. le président Éric Coquerel. Merci, monsieur le ministre, de rappeler la proposition que j’ai faite hier de transformer notre commission en commission d’enquête sur cette question.

M. Gérault Verny (UDR). Avec des dépenses publiques à 56 % du PIB, la France est devenue un État collectiviste, avec pour conséquence que notre pays est le plus fiscalisé de l’OCDE. Le collectivisme ayant toujours brillé par son inefficacité, la France est aussi le pays d’Europe où la dette publique est la plus élevée, supérieure à celle de l’Allemagne, dont le PIB est de 30 % supérieur.

Dans ce PLF, tout a changé sans que rien ne change, avec des ajustements faits de hausses et de prélèvements sur tous les Français, de manière directe ou indirecte. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, nous ferons ici, dans un an, les mêmes constats, mais avec une dette encore plus importante, et donc moins de marges de manœuvre.

Quels sont les garde-fous prévus pour interdire tout dérapage de ce budget ? Deuxièmement, quid des recettes si l’inflation est inférieure au chiffre de 1,8 % prévu, scénario probable selon le HCFP, comme nous l’a dit hier, ici même, M. Moscovici ? Troisièmement, quelle hausse du chômage des jeunes anticipez-vous à la suite de l’augmentation des charges sur les bas salaires ? Quatrièmement, quelle augmentation du nombre de faillites des TPE et PME anticipez-vous à la suite de cette même augmentation des charges ?

M. Antoine Armand, ministre. Bien que je ne souscrive pas aux termes que vous employez, il me semble que nous disons à peu près la même chose quant à notre difficulté à maintenir la dépense publique et au fait que nos recettes ne parviennent pas à rattraper l’évolution de cette dernière et tout ce qu’elle recouvre, non seulement en quantité, mais également en termes de spectre couvert.

Le Haut Conseil des finances publiques partage notre avis sur l’évolution spontanée des recettes et considère donc qu’à ce stade, aucune autre estimation ne devrait prévaloir quant à l’élasticité des recettes au produit intérieur brut. Cela n’exclut pas une évolution et, comme je le disais en introduction, je vous propose que nous puissions en reparler d’ici à la fin de l’année en termes rétrospectifs et au fil de l’année pour examiner l’évolution des recettes et nous ajuster autant que nécessaire. C’est la moindre des transparences que nous devons à la représentation nationale.

Quant aux allégements de cotisations sociales au niveau du Smic, je rappelle que l’ambition de cette réforme, prévue pour s’opérer sur deux exercices, est d’inciter davantage les entreprises à augmenter les salaires : compte tenu de la nouvelle structure des allégements de cotisations, la hausse du coût du travail est bien moins importante que vous ne le laissez entendre si les salaires sont régulièrement augmentés au fil du temps. Cela ne nous dispense pas pour autant de vigilance quant aux impacts de cette mesure.

M. le président Éric Coquerel. J’ai noté qu’avant de débuter l’examen de la seconde partie du PLF, nous devrions recevoir de la part du Gouvernement une sorte de tiré à part sur les 5 milliards d’euros d’économies supplémentaires demandées.

Nous en venons aux questions des autres orateurs.

M. Jean-René Cazeneuve (EPR). Je salue les mesures que prévoit ce PLF en faveur des agriculteurs, portant sur l’épargne de précaution, sur les successions et transmissions et sur la taxe foncière. Il s’agit là d’un engagement qui a été tenu.

Le travail engagé par notre commission sur la taxation des rentes a été interrompu par la dissolution de l’Assemblée nationale. Nous sommes satisfaits que la taxation des rachats d’actions figure dans le PLF. Pourquoi, cependant, cette taxation ne porte-t-elle pas sur la valeur effective de l’action, mais sur sa valeur nominale, et pourquoi la Crim, la contribution sur la rente inframarginale de la production d’électricité, a-t-elle disparu du texte ? Elle est certes remplacée par un effort d’EDF, mais on voit bien que, dans les dernières années, d’autres opérateurs ont réalisé des profits significatifs.

Enfin, c’est un raisonnement bizarre que d’affirmer, comme l’ont fait plusieurs orateurs, qu’on demandait un effort supplémentaire de 1,5 milliard sur le fonds Vert, car ce dernier n’existait pas voilà quatre ans. Il a été voté par l’ancienne majorité – même si bon nombre de députés ici présents ne l’ont pas fait –, et nous nous en félicitons, mais nous ne pouvons malheureusement pas en maintenir le niveau de financement à 2,5 milliards. J’espère que nous pourrons demain le relever, mais ce n’est toutefois pas un dû et la réduction de son montant n’est pas un effort demandé aux collectivités territoriales : il ne s’agit que de bonne gestion et d’effort partagé.

M. Antoine Armand, ministre. La taxe sur les rachats d’actions prend en compte la valeur nominale et les primes d’émission, notamment pour respecter le droit de l’Union européenne, et en particulier les directives mère-fille. C’est du reste parce que l’assiette est plus réduite que dans la configuration que vous évoquez que le taux a été fixé à 8 %.

Pour ce qui est de la Crim, nous avons préféré demander une contribution exceptionnelle à notre énergéticien plutôt que d’instaurer un nouvel impôt de production qui ressemblait, en fait, à une taxe sur les capacités déjà installées, à savoir les centrales nucléaires car, ces dernières étant essentiellement décarbonées, une telle mesure était évidemment désincitative.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Le débat est complexe. Vous avez émis des contre-propositions tout à fait légitimes à la suite de la hausse de la fiscalité. Or la fiscalité sur la puissance installée est ce qui tue le plus l’attractivité. Nous aurons ce débat en séance, mais ce sont là des exemples très concrets et nous convenons tous qu’il faut définir avec beaucoup de finesse la fiscalité que nous allons instaurer, afin de ne pas casser l’attractivité et la politique de l’offre.

M. Eddy Casterman (RN). Alors que le Gouvernement avait promis un projet de loi de finances de préservation du pouvoir d’achat et d’économies, les Français auront tout le contraire, notamment du fait de l’écologie punitive. Hausse de la fiscalité, taxes environnementales en tous genres, taxe sur l’électricité, malus automobile, taxe sur les billets d’avion ou TVA sur les chaudières à gaz sont autant de charges financières qui reposeront encore et toujours sur les classes moyennes et les plus modestes, qui n’ont d’autre choix que de payer pour se chauffer, se déplacer ou aller travailler, particulièrement dans la ruralité, comme c’est le cas dans ma circonscription.

Dans le même temps, le budget prévoit d’augmenter les crédits en faveur du développement des énergies renouvelables, cédant à une écologie déconnectée du réel, en continuant par exemple à financer toujours plus l’éolien, énergie intermittente qui défigure nos paysages, mais semble faire l’impasse sur l’investissement dans les énergies du réel et du bon sens, comme le nucléaire ou les biocarburants, qui offrent aux Français des énergies propres, continues, fiables, souveraines et peu chères.

Face à ces choix qui pèsent sur le pouvoir d’achat des Français, pourquoi ne pas saisir l’occasion de faire de ce budget le choix du bon sens et du pragmatisme dans les investissements de production d’énergie, afin de garantir l’innovation et la souveraineté, et d’épargner le pouvoir d’achat des Français ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Ce budget est une proposition d’équilibre. Il ne s’agit ni d’écologie punitive, comme vous le dites, ni d’abandon écologique, comme je l’ai entendu tout à l’heure, mais de la poursuite de l’investissement dans une transition écologique qui est absolument nécessaire.

Nous maintenons notre ambition dans le domaine du nucléaire, mais nous croyons aussi qu’il faut, dans le mix énergétique, continuer à investir massivement dans les énergies renouvelables. C’est là, de fait, une divergence entre nous et vous avez raison de souligner que nous l’assumons et la revendiquons dans ce budget, qui prévoit une hausse substantielle des moyens consacrés à la transition énergétique, notamment parce que les prix baissent.

Je ne laisserai donc pas dire qu’il s’agit d’un budget d’écologie punitive. C’est un budget d’investissement dans la transition écologique, et certainement pas de renoncement face à notre dette écologique, qui est, selon moi, au moins aussi importante que la dette financière. Nous devons aborder de front ces deux dettes.

M. Christian Baptiste (SOC). Vous proposez une coupe budgétaire de 250 millions d’euros au détriment de nos pays des océans, déjà étouffés par la vie chère et la précarité, notamment à la Martinique, qui est à feu et à sang. Est-ce là votre conception de l’égalité républicaine ?

Alourdir, comme vous prévoyez de le faire, la taxe sur les billets avions est une mesure non seulement injuste, mais aussi déconnectée de la réalité quotidienne de nos territoires. La continuité territoriale n’est pas un luxe, mais un droit fondamental. Aggraver la situation de nos compatriotes ultramarins, c’est nier ce droit fondamental à la mobilité.

Ces choix entérinés dans le budget pour 2025 sacrifient des millions de nos concitoyens ultramarins au profit d’une logique comptable et déshumanisée. Cette coupe budgétaire et le durcissement de la taxe de solidarité sur les billets d’avion sont inacceptables, et je m’y opposerai. Comment pouvez-vous justifier cette décision qui accentue la souffrance de nos territoires tout en prétendant défendre l’égalité républicaine ?

M. Antoine Armand, ministre. Vous avez raison de poser, à propos de la taxation des billets d’avion, la question ultramarine. Le barème n’est pas figé et la question que vous soulevez fait précisément l’objet de discussions. Je ne peux vous dire qu’il n’y aura pas, dans cette nouvelle taxation et ce nouveau barème, une contribution de chacun, même minime, mais cela ne signifie pas que nous ne prenons pas en compte vos propos et que nous n’allégerons pas l’effort pour les personnes directement concernées.

Je saisis cette occasion pour témoigner de la solidarité du Gouvernement face à la situation économique de l’ensemble des départements et régions d’outre-mer et pour vous dire que j’aurai dans les prochains jours une attention toute particulière à cette situation en dressant avec les acteurs locaux un état des lieux avant de pouvoir proposer des mesures.

Mme Véronique Louwagie (DR). Les baisses d’impôts ne peuvent être durables que si elles s’accompagnent d’une baisse des dépenses publiques. Je me réjouis que vous soyez revenus sur certaines dispositions relatives aux agriculteurs, aux ZRR – les zones de revitalisation rurale –, au PTZ et à La Poste, et que des mesures aient été prises en ce sens.

Quand aurons-nous les PAP, les projets annuels de performances ? En termes de méthode, vous nous demandez de construire avec vous le budget et j’ai bien entendu que nous serait communiqué une sorte de tiré à part pour les 5 milliards d’économies, mais cela pourrait-il être aussi le cas pour le montant de 1,5 milliard concernant les opérateurs, qui ne figure pas dans le PLF ? Pourrions-nous également disposer d’une ventilation par mission des gels et des annulations de crédits qui porteront vraisemblablement sur 2024 ? En effet, avec des chiffres de 16,5 et de 8,5 milliards, il est difficile de construire le budget pour 2025 sans disposer d’une déclinaison par mission.

Quant aux amendements, que vous avez annoncés pour le débat en séance, mieux vaudrait que vous puissiez les déposer dès le stade de la commission, car il nous est difficile de travailler ici sans connaître ces éléments.

Je suis tout à fait favorable à une diminution de la dépense publique, qui n’est, selon nous, pas encore suffisante, avec une augmentation de 35,5 milliards des dépenses. Enfin, quel est, par mission, le nombre de départs à la retraite prévus pour les cinq années qui suivent ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Sur cette dernière question, qui demande quelques recherches, je vous ferai une réponse documentée.

Les amendements relatifs aux opérateurs et aux ministères qui seraient déposés en commission devraient l’être par un député ; il me semble donc plus cohérent qu’ils soient déposés en séance par le gouvernement, sachant qu’il s’agit d’une initiative gouvernementale. En revanche, il est juste que la commission ait de la visibilité quant à ce qui sera présenté en séance.

Pour ce qui est des annulations de crédits, nous sommes en train de procéder aux arbitrages. Un projet de loi de finances de fin de gestion (PLFG) sera déposé autour du 6 novembre et nous souhaitons pouvoir vous éclairer davantage dans la deuxième quinzaine d’octobre sur notre volonté d’annulations de crédits – annulations qui, je le dis d’emblée, ne refléteront pas seulement la volonté politique de ce gouvernement car certains crédits surgelés ne pourront matériellement pas être annulés. Le processus ne sera donc que partiel, mais nous ferons le maximum.

Quant aux PAP, ils vous seront transmis aujourd’hui, comme l’exige le calendrier.

M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). Ce budget est une déclaration de guerre sociale. Vous avez vidé les caisses de l’État pour remplir les poches des ultrariches et vous avez désormais décidé de saigner en priorité celles et ceux qui n’ont rien. Les retraités devront faire à Noël un chèque-cadeau aux grandes fortunes de ce pays, puisque vous décidez du gel de leur pension pendant six mois, alors même que deux millions d’entre eux vivent sous le seuil de pauvreté. Vous augmentez les taxes sur l’électricité, alors que douze millions de Français vont encore souffrir du froid cet hiver. En revanche pendant ce temps, les ultra-riches dormiront bien au chaud, puisque rien n’est fait pour mettre à contribution les patrimoines, alors que 500 familles possèdent 1 228 milliards d’euros, soit trois fois le budget de l’État.

Pourquoi ne pas toucher à l’héritage des ultra-riches ? Pourquoi ne pas rétablir l’ISF, l’impôt de solidarité sur la fortune ? Pourquoi ne pas instaurer un impôt Zucman sur les patrimoines ? Pourquoi faire crever de faim et de froid des millions de Français et protéger une infime minorité ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Veillons, monsieur le député, à nous en tenir aux termes d’un débat factuel ! J’ai dit que tous ceux qui relèvent du tarif réglementé de l’électricité verraient leur facture d’électricité baisser. Il ne faut pas dire l’inverse : c’est un engagement du Gouvernement, que nous tiendrons au 1er février.

Vous avez raison d’être attentif à la situation des petites retraites. J’ai dit que le minimum vieillesse serait un minimum social revalorisé dès le 1er janvier. Nous devrons avoir ce débat en séance et je serai tout à fait ouvert à l’idée de voir à quel niveau le décalage de six mois de l’indexation des pensions peut avoir un impact sur des pensionnés touchant des petites retraites.

Le Premier ministre a dit très clairement qu’il s’agissait d’un budget de redressement et d’efforts, ce que nous assumons, mais que ce budget devait également protéger les plus fragiles de nos concitoyens. Qu’il s’agisse de la baisse des factures d’électricité ou de la situation des petites retraites, nous y serons très vigilants.

Mme Danielle Simonnet (EcoS). Vous dites que ce budget vise à protéger les plus fragiles, et le rôle d’un budget est de répondre au moins aux besoins vitaux. Avoir un toit, par exemple, est un besoin vital, car on meurt de vivre dans la rue, or les associations nous alertent quant au fait que 2 000 enfants vivent dans la rue. Votre réponse est une baisse de 55 millions – si on tient compte de l’inflation – du budget alloué à l’hébergement d’urgence, alors qu’il faudrait au moins créer 10 000 places de plus et disposer d’au moins 160 millions d’euros supplémentaires. Qu’avez-vous à dire cela ?

Pour ce qui est du logement social, comment pensez-vous que les bailleurs sociaux pourront à nouveau investir alors que vous maintenez la réduction du loyer de solidarité ?

Quant à la rénovation énergétique et aux mesures antivétusté, notamment dans le logement social, pourquoi êtes-vous passés d’une promesse de hausse de 1,2 milliard sur trois ans en 2023 à 350 millions seulement sur deux ans ?

Dans le domaine de l’aide à la pierre, pourquoi n’y a-t-il toujours pas de virage alors qu’il faudrait construire au moins 200 000 logements sociaux, en donnant priorité aux logements très sociaux ? Quels sont les moyens alloués au fonds national d’aide à la pierre ? Le logement et l’hébergement sont des questions très urgentes.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Vous avez raison de souligner l’importance d’un débat sur la question du logement, que j’ai d’ailleurs soulignée moi-même en répondant à M. Mattei.

J’ai précisé dans mon propos liminaire que le rendement de la réduction du loyer de solidarité serait maintenu en 2025 à son niveau de 2024, ce qui, par rapport aux lettres-plafonds initiales, représente une évolution dans votre sens. Il faut prendre en compte la réalité des bailleurs sociaux, que vous rappelez à juste titre. Le débat sur le logement devra aller plus loin et prendre en considération toutes les variables dans ce secteur et dans les secteurs d’activité concernés.

M. Charles Sitzenstuhl (EPR). Messieurs les ministres, votre stratégie budgétaire pose question. Vous prévoyez en 2024 un déficit de 6,1 %, alors que vous aviez la possibilité de recourir à un projet de loi de finances rectificative pour 2024 afin de corriger dès maintenant la tendance sur les quatre mois de gestion de l’année actuelle qui relèvent de votre responsabilité. C’était, je le rappelle, ce que recommandait fortement l’ancien ministre des finances, Bruno Le Maire, que nous avons entendu dans cette commission. Ne pas faire de loi de finances rectificative pour 2024 revient à renoncer à des recettes supplémentaires pour 2024 – au moins 3 milliards selon les estimations qu’en donnait Bercy à l’époque, voire davantage –, qui seraient autant d’efforts évités en 2025. Pouvez-vous expliciter ce raisonnement budgétaire ?

M. Éric Coquerel (LFI-NFP). Je vous invite à répondre aussi à la question qui vous a été posée tout à l’heure sur les gels budgétaires prévus.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Pour ce qui concerne les gels, j’ai dit que je ne pouvais pas répondre aujourd’hui parce que la question était encore soumise à arbitrage. J’ai seulement dit que l’ensemble des crédits qui avaient été surgelés ne pourraient pas être annulés et que l’annulation serait nécessairement partielle en raison de la réalité des besoins de financement en fin de gestion. Nous freinerons au maximum l’année 2024 et je ne veux pas laisser s’installer un débat, qui ne me semble pas très sain, sur la question de savoir si nous n’empêcherions pas le freinage maximum sur les crédits de 2024 pour permettre des reports sur 2025. Ce n’est pas du tout notre état d’esprit, qui consiste au contraire à annuler un maximum de crédits en 2024 pour commencer déjà à ralentir le déficit cette année.

Par ailleurs, au terme des débats qui se sont tenus à ce propos au printemps dernier, l’arbitrage de l’ancienne majorité et de l’ancien gouvernement avait consisté à ne pas faire de loi de finances rectificative. S’il avait fallu un collectif budgétaire, c’est précisément au printemps ou à l’été qu’il aurait fallu le faire. Ouvrir en toute fin d’année un deuxième débat fiscal, quasi rétroactif, pour la seule année 2024 ne serait pas de bonne gestion, et c’est précisément pour éviter de telles situations que nous avons créé, dans la Lolf, la catégorie nouvelle des PLFG. Le débat fiscal doit porter sur le projet de loi de finances pour 2025 et il me semble beaucoup plus raisonnable et plus cohérent de finir l’année avec un PLFG pour 2024.

M. Anthony Boulogne (RN). Au vu de l’état calamiteux des finances publiques – dont la responsabilité incombe essentiellement aux gouvernements macronistes successifs –, l’heure est aux économies budgétaires. Encore faut-il qu’elles soient justement réparties. Il serait inacceptable que les 5 milliards d’euros d’économies prévues sur les collectivités locales concernent les communes et les départements : ce coup de rabot porterait un préjudice à leurs capacités d’investissement, déjà lourdement affaiblies ces dernières années. Plutôt que de réaliser des économies injustes, le Gouvernement devrait s’intéresser au rapport de Boris Ravignon, qui établit à 7,5 milliards le coût des normes et de l’enchevêtrement des compétences entre l’État et les collectivités – autrement dit, du millefeuille administratif.

Le Rassemblement national a déjà proposé des solutions qui permettraient de réaliser des économies substantielles, comme la suppression des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et des régions, ou la lutte contre la bureaucratie. Allez-vous enfin reprendre nos propositions de bon sens ou préférez-vous continuer à faire les poches des élus locaux ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Ce ne sont que les 450 plus grosses collectivités territoriales qui, je le répète, contribueront au fonds de réserve : les plus fragiles ne seront pas concernées, notamment la vingtaine de départements qui sont les plus affectés par l’effet ciseaux entre la baisse des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) et l’augmentation des dépenses sociales. Les critères du fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (Fpic) nous permettront d’établir un périmètre objectif. De fait, aucune commune ne contribuera au fonds de réserve.

M. Jacques Oberti (SOC). Le dossier accompagnant le PLF évoque une « juste participation des collectivités à l’effort collectif ». Il précise que leur effort sera proportionné à leur poids dans la dépense publique et tiendra compte de leur situation financière, ce qui exclut les plus petites ou les plus fragiles. Les critères retenus dans le PLF reposent, pour la plupart, sur les indicateurs de richesse des administrations publiques locales (Apul), lesquels sont devenus obsolètes depuis la suppression de la taxe d’habitation. Il n’est pas tenu compte des marges de manœuvre financières réelles des collectivités, comme l’épargne nette ou la capacité de désendettement, pour juger de leur fragilité et déterminer lesquelles seront soumises à la ponction de 2 % – sans parler du coup de frein que cette mesure provoquera sur l’investissement et sur le maintien de services publics de proximité.

Quels critères comptez-vous utiliser pour travailler de façon plus juste ? Aurez-vous le courage de prendre à bras-le-corps la question de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels et d’habitation ? Dans un contexte hyperinflationniste et après la crise du covid, de nombreuses communes ont dû augmenter leur taux d’imposition pour garder à niveau leurs services, assainir leur budget ou investir. Alors qu’elles ont assumé devant les citoyens cette hausse de la fiscalité, leur responsabilité est mise à mal par la subsistance du coefficient correcteur (le « coco ») appliqué à la taxe foncière, lequel aboutit globalement à une solidarité inversée entre les territoires ! Que comptez-vous faire pour le supprimer ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Ce n’est pas prévu dans le PLF mais nul doute que nous aurons un débat à ce sujet, comme chaque année, et que le rapporteur général nous reparlera du dégel nécessaire du « coco » !

M. Éric Woerth (EPR). L’État a fait un effort considérable pour protéger les Français, l’économie et les entreprises lors des crises successives que nous avons vécues. Il est naturel que cet effort s’inverse aujourd’hui, et je salue les propositions fortes qui nous sont faites. Je partage aussi l’idée selon laquelle des réformes profondes doivent accompagner cet effort, sans quoi celui-ci ne serait qu’un coup d’épée dans l’eau. Les membres du Gouvernement devront s’attacher à l’expliquer, chacun dans son domaine. Nous avons besoin d’en savoir plus à cet égard s’agissant des collectivités locales, du modèle social et de nombreux autres sujets.

Mais je voudrais insister sur l’importance de ne pas se contredire, s’agissant des cotisations sociales des entreprises. Plutôt que d’allégements de charges, je pense qu’il faut parler de barèmes. On ne fait pas de cadeaux aux entreprises, on réduit le coût du travail. Or il faut faire preuve de prudence en la matière – d’ailleurs, le rapport d’Antoine Bozio et Étienne Wasmer ne recommande pas de toucher à ce coût. Maintiendrez-vous les mesures que vous avez prévues dans ce domaine ?

Par ailleurs, pourriez-vous chiffrer les dépenses supplémentaires liées aux annonces faites par le Premier ministre lors de sa déclaration de politique générale, au sujet du prêt à taux zéro (PTZ) et des retraites notamment ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Le coût de ces mesures peut grandement varier selon leur paramétrage, qui sera abordé lors du débat parlementaire. Il peut par exemple varier entre 180 millions et 1 milliard pour le PTZ.

Sur le coût du travail, je souscris à vos propos. D’abord, la lettre de mission transmise aux économistes Bozio et Wasmer précisait que leur proposition de réforme devait se faire à coût constant. Or il n’est pas impossible de penser en dehors de ce cadre : c’est ce que nous proposons. Vous avez parfaitement raison, ensuite, d’utiliser le terme de prudence. C’est un sujet dont nous débattrons mais je crois possible, quant à moi, de freiner partiellement, à hauteur de 4 milliards d’euros, la baisse du coût du travail à laquelle 80 milliards au total auront été consacrés au cours des quatre dernières années – le tout sans grever la politique d’emploi et tout en contribuant à la désmicardisation. Il ne faut pas refuser par principe un pilotage un peu différent des allégements, sans à-coups brutaux, pour participer à l’effort de redressement des finances publiques. Je suis convaincu que les chefs d’entreprise comprennent cette nécessité, à condition qu’elle soit bien expliquée.

Enfin, j’abonde totalement en votre sens s’agissant des réformes de structure : il nous faut un agenda de réformes en parallèle du présent budget. À défaut, les mesures fiscales annoncées ne pourront pas être temporaires ; il faut être très clair à ce sujet.

M. le président Éric Coquerel. N’est-ce pas le coût du capital qui est trop élevé ? Cette question sera au cœur de nos débats.

M. Matthias Renault (RN). Le barème de l’impôt sur le revenu est indexé sur une inflation à 2,1 %. Allez-vous l’indexer sur l’indice des prix à la consommation (IPC) révisé par l’Insee à 1,8 % ?

Par ailleurs, pourquoi la taxe que vous envisagez sur les rachats d’actions s’appliquera-t-elle sur leur valeur nominale et non sur leur valeur de rachat, comme aux États-Unis ?

L’article 4 du PLF s’intitule « Mise en place d’un partage avec les consommateurs des revenus du nucléaire historique ». Si son titre est alléchant, cet article prévoit en réalité une taxe sur EDF, dont les seuils fiscaux seront fixés par voie réglementaire et qui entrera en vigueur au 1er janvier 2026. Pourquoi l’avoir intégré au budget pour 2025 ?

M. Antoine Armand, ministre. J’ai déjà répondu, à propos des rachats d’actions, qu’il s’agit simplement de respecter le droit de l’Union européenne, en l’occurrence la directive « mère-fille ».

S’agissant de l’Arenh, il est important d’agir vite pour pouvoir préparer en amont le nouveau cadre contractuel qui devra entrer en vigueur au 1er janvier 2026. Les entreprises sont demandeuses de visibilité sur les futurs prix de l’énergie. Formellement, le prélèvement ne fait que matérialiser le plafonnement des prix de l’électricité à partir de certains montants, en vue d’une redistribution à l’ensemble des contractants. Cette mesure ne réglera pas tous les problèmes, mais elle permettra de répondre en partie à la crise énergétique et à l’explosion des prix de l’énergie.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Quant au barème de l’impôt sur le revenu, il restera indexé sur une inflation à 2,1 %.

M. Charles Rodwell (EPR). Je partage évidemment votre souci de rétablir les comptes publics avec des mesures courageuses, mais j’aimerais savoir comment vous avez évalué leur éventuel impact récessif sur la croissance et l’attractivité de notre pays – je vous renvoie à ce sujet aux déclarations de Patrick Martin sur l’effet d’une hausse des cotisations sur l’emploi. Selon vous, quel impact ces mesures auraient-elles sur l’économie de notre pays en 2025, si le PLF était voté en l’état ?

M. Antoine Armand, ministre. Nous partageons votre interrogation et nous nous efforçons de réduire autant que possible l’effet de ces mesures sur l’attractivité, la croissance et l’emploi ; c’est notre combat commun. Nous considérons que ces effets seront réduits dès lors que seuls les ménages aux revenus les plus élevés et les très grandes entreprises bénéficiaires, réalisant plus de 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires, seront concernés. Nous avons par ailleurs une divergence d’appréciation macroéconomique avec le HCFP : selon nous, le reflux de l’épargne, la baisse des taux des banques centrales et la baisse prévue de l’inflation stimuleront davantage l’investissement, l’emploi, le pouvoir d’achat et la consommation que ce qu’il envisage dans certaines de ses hypothèses. Cela nous permet d’estimer que notre prévision de croissance de 1,1 % intègre bien les effets potentiels des mesures contenues dans le PLF. Je le dis cependant avec beaucoup d’humilité : nous devons encore travailler à l’amélioration du texte avec les représentants des entreprises et avec vous. Il faudra que nous sachions accepter les propositions d’économies que vous ferez, afin de réduire la hausse des prélèvements, notamment sur les entreprises. Ce sont l’emploi et l’attractivité du pays qui sont en jeu.

M. le président Éric Coquerel. Messieurs les ministres, nous vous remercions.

La commission débat des conditions de discussion du projet de loi de finances pour 2025.

M. le président Éric Coquerel. Je souhaite vous faire part d’un certain nombre de points qui ont été arrêtés en réunion du bureau de la commission mercredi matin.

Le bureau de la commission, soucieux que le projet de loi de finances puisse être discuté dans de bonnes conditions tant en commission qu’en séance publique, a souhaité porter à la connaissance de l’ensemble des groupes des cibles en termes de nombre d’amendements. Le respect de ces cibles permettrait d’envisager que, dans le temps imparti, l’ensemble des amendements puissent être examinés. Un message en ce sens a été envoyé aux responsables des groupes. Il s’agit bien évidemment de cibles purement indicatives, et nul n’entend remettre en cause le droit individuel de chaque député à proposer autant d’amendements qu’il le souhaite. Mais c’est un appel à la responsabilité individuelle et collective.

Le bureau de la commission a par ailleurs arrêté les modalités de discussion de la seconde partie du projet de loi de finances en commission. Pour chaque mission budgétaire, après un propos liminaire du ou des rapporteurs spéciaux, pour un temps limité à 5 minutes pour chaque rapport spécial, puis le cas échéant, des interventions des rapporteurs pour avis, pour 2 minutes, il sera immédiatement procédé à un examen des amendements de crédits. C’est à la suite de cet examen que pourront être accueillies des explications de vote des groupes pour 2 minutes par groupe et un vote sur les crédits. Les ministres sont, en principe, auditionnés par les commissions saisies pour avis, et la commission des finances n’a pas vocation à auditionner systématiquement les ministres lors de cette séquence, qui va être particulièrement condensée cette année. Toutefois, le bureau a décidé que seraient recueillis les souhaits des groupes quant à des auditions de ministres qui sembleraient particulièrement nécessaires. Le cas échéant, les ministres concernés seraient auditionnés en un temps limité, de l’ordre d’une heure, juste avant de procéder à l’examen des crédits budgétaires correspondants.

M. Jean-René Cazeneuve (EPR). Je souhaite protester contre l’injonction à contingenter le nombre d’amendements déposés par les membres du groupe EPR lors du prochain examen du projet de loi de finances, qui nous a été signifiée par courrier électronique il y a deux jours. Le droit d’amendement est un droit fondamental auquel il ne saurait être porté atteinte. Cela ne serait pas de bonne politique. J’ajoute que notre groupe a toujours fait preuve de responsabilité en la matière, ce qui n’a pas toujours été le cas d’autres groupes. Je rappelle que les groupes de la Nupes avaient déposé l’an dernier en commission plus de 1 000 amendements.

M. le président Éric Coquerel. Je note tout d’abord, M. Cazeneuve, que votre intervention prend une forme plus correcte que le tweet de M. Mathieu Lefèvre qui m’accusait hier soir de vouloir limiter le droit d’amendement des parlementaires, ce qui est totalement faux. Le message que j’ai fait parvenir mercredi via le secrétariat de la commission des finances indiquait des cibles purement indicatives ; l’interprétation de M. Lefèvre est à tout le moins abusive. Je n’ai nullement entendu remettre en cause un droit constitutionnel.

Je vous lis le texte du message qui a été envoyé mercredi : « Le bureau de la commission qui s’est tenu ce mercredi 9 octobre 2024 a souhaité que soient portées à la connaissance de chacun des groupes des cibles d’amendements par groupe, purement indicatives, qui permettraient, si elles étaient respectées, que le nombre total d’amendements déposés sur chacune des parties du projet de loi de finances pour 2025 demeure dans des proportions permettant d’envisager qu’ils puissent tous être discutés dans le temps qui est imparti pour examiner ce projet en commission puis en séance publique. »

Surtout, il s’agit non d’une décision personnelle mais d’une initiative approuvée par le bureau de la commission, à la portée indicative et qui ne fait que prolonger la démarche initiée par la présidente de l’Assemblée nationale lors de la précédente législature. Partant du constat selon lequel l’examen de plus de 5 000 amendements en séance publique, que ce soit lors de l’examen de la première ou de la seconde partie du PLF, n’est matériellement pas possible, une réflexion avait été engagée et j’avais d’ailleurs proposé à cette occasion d’établir un temps programmé pour l’examen de chaque mission budgétaire. Dans la mesure où nous ne disposons pas du temps nécessaire pour modifier le règlement de l’Assemblée, la seule solution pour tenir dans les délais consiste à ce que le nombre d’amendements déposés demeure dans des proportions raisonnables.

Bien entendu cette démarche n’a de sens que si nous souhaitons tous pouvoir achever l’examen des amendements dans les délais et ainsi voter sur le texte. J’ajoute que cette démarche d’autolimitation va principalement impacter les groupes d’opposition, qui sont naturellement portés à amender davantage le projet du gouvernement. Je trouve donc votre réaction particulièrement étonnante. En tout état de cause et quel que soit le nombre d’amendements déposés, nous irons au terme de la discussion en commission car je souhaite absolument que la commission puisse se prononcer par un vote sur le texte.

Mais je ne conteste pas la liberté du groupe EPR de ne pas se sentir lié par ces cibles.

Mme Véronique Louwagie (DR). Le droit d’amendement est libre pour chacun des députés, ce principe n’est pas contesté. Pour ma part, j’ai relayé la position du bureau au sein de mon groupe sans recevoir un accueil favorable. J’ai la conviction que nous saurons nous adapter en fonction de la situation comme nous l’avons fait l’an dernier en procédant au retrait de nombreux amendements en cours de discussion. Il convient de faire le nécessaire pour éviter que le gouvernement puisse avoir recours à une ordonnance.

M. le président Éric Coquerel. Je vous rappelle que, l’an dernier, si nous sommes parvenus à nous adapter en commission, par le retrait d’amendements, en revanche, en séance, nous ne savons pas si nous y serions parvenus, car c’est le recours à l’article 49.3 qui a écourté les discussions.

M. Charles de Courson, rapporteur général. Je me permets de faire remarquer à notre collègue Véronique Louwagie que l’on peut espérer que les membres de son groupe seront moins enclins à amender dès lors qu’ils sont dans la majorité.

M. Jean-Paul Mattei (Dem). On pourrait résumer la situation en disant que trop d’amendements tue l’amendement ! Il s’agit aussi d’une forme de respect vis-à-vis des collègues pour ne pas monopoliser le temps de parole, comme le fait régulièrement le groupe de la France insoumise. Il convient de revenir à une forme de raison en ce qui concerne le dépôt d’amendements, et cela pour tous les textes et pas uniquement les textes financiers.

Mme Eva Sas (EcoS). Je me réjouis de cet effort de rationalisation qui est nécessaire ; pour autant je dois avouer que le message n’est pas parfaitement reçu au sein de mon groupe. Nous essaierons néanmoins de faire un effort car, à défaut, nous serons tous pénalisés. J’ajoute que le retrait massif des amendements ne m’apparaît pas être une solution satisfaisante au regard du travail préparatoire conduit pour élaborer chaque amendement.

M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Nous soutenons totalement cette mesure d’autolimitation car nous avons conscience des effets du recours à l’article 49.3 sur les pouvoirs du Parlement. Cette mesure est également souhaitable pour être davantage audible aussi bien par les citoyens que par les entreprises.

M. Éric Woerth (EPR). Je relève que nous sommes dans une situation très inhabituelle, sinon paradoxale, où c’est l’opposition qui fait appel à la modération !

M. François Jolivet (HOR). Pour notre part nous avons toujours été raisonnables en matière d’amendements ; il est nécessaire d’avoir un peu de rigueur sur ce sujet.

M. le président Éric Coquerel. Je rappelle qu’il ne s’agit en aucun cas de limiter les droits de chaque parlementaire. Il faut se souvenir que le fait d’arriver jusqu’au vote l’an dernier n’a été possible qu’en sacrifiant l’examen d’un grand nombre d’amendements et que le risque existe à la fois d’une transmission du texte au Sénat si nos débats de première lecture ne sont pas achevés le 21 novembre et de permettre au Gouvernement de mettre en vigueur le projet de loi de finances par ordonnance si l’ensemble des débats ne sont pas terminés le 21 décembre. Il convient absolument d’éviter de telles situations ; or, avec 5 000 amendements, nous n’y parviendrons pas.

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Membres présents ou excusés

Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

 

 

Réunion du vendredi 10 octobre 2024 à 8 heures 30

 

Présents. - M. David Amiel, M. Christian Baptiste, M. Jean-Pierre Bataille, M. Karim Ben Cheikh, M. Jean-Didier Berger, M. Anthony Boulogne, M. Philippe Brun, M. Eddy Casterman, M. Jean-René Cazeneuve, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, Mme Félicie Gérard, M. David Guiraud, M. François Jolivet, M. Tristan Lahais, Mme Constance Le Grip, M. Aurélien Le Coq, M. Jérôme Legavre, Mme Véronique Louwagie, M. Jean-Paul Mattei, M. Emmanuel Maurel, Mme Estelle Mercier, Mme Sophie Mette, M. Jacques Oberti, M. Nicolas Ray, M. Matthias Renault, M. Charles Rodwell, M. Nicolas Sansu, Mme Eva Sas, Mme Danielle Simonnet, M. Charles Sitzenstuhl, M. Jean-Philippe Tanguy, M. Gérault Verny, M. Éric Woerth

 

Excusés. - Mme Marie-Christine Dalloz, Mme Marina Ferrari, M. Nicolas Metzdorf, Mme Sophie Pantel, Mme Christine Pirès Beaune, M. Emmanuel Tjibaou