Compte rendu
Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire
– Examen de la seconde partie du projet du projet de loi finances pour 2025 (n° 324) (M. Charles de Courson, rapporteur général) ; examen et vote sur les crédits des missions :
– Aide publique au développement ; Prêts à des États étrangers (M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial) 2
– Administration générale et territoriale de l’État (M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial) 16
– Sécurités :..................................24
- Police nationale ; Gendarmerie nationale ; Sécurité et éducation routières ; Contrôle de la circulation et du stationnement routiers (Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale)
- Sécurité civile (M. Damien Maudet et Mme Sophie Pantel, rapporteurs spéciaux)
– Immigration, asile et intégration (MM. Mathieu Lefevre et Charles Rodwell, rapporteurs spéciaux) 27
– Présences en réunion...........................63
Jeudi
31 octobre 2024
Séance de 14 heures 30
Compte rendu n° 037
session ordinaire de 2024-2025
Présidence de
M. Éric Coquerel,
Président
puis de
Mme Véronique Louwagie,
Vice-Présidente
— 1 —
La commission examine la seconde partie du projet du projet de loi finances pour 2025 (n° 324) (M. Charles de Courson, rapporteur général)
Mission Aide publique au développement et compte de concours financier Prêts à des États étrangers (M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial)
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Ce n’est pas sous les meilleurs auspices que je débute en tant que rapporteur des crédits de la mission Aide publique au développement (APD), qui diminuent considérablement cette année. De manière générale, je regrette le manque de continuité et de constance de cette politique au cours des douze dernières années. Durant le quinquennat du président Hollande, les crédits de l’ensemble de l’aide publique au développement avaient ainsi baissé de 1,6 milliard d’euros, alors qu’entre 2017 et 2024, les crédits de la mission ont connu une hausse de 120 %, soit une augmentation de 3,1 milliards d’euros.
L’actuel projet de budget efface près de 2 milliards d’euros de crédits : 1,3 milliard dans le projet de loi de finances (PLF) initial, auxquels s’ajouteront 641 millions par le biais d’amendements qui n’ont pas encore été déposés. Pourtant, les dotations de la mission avaient déjà fait l’objet d’une régulation significative avec le décret d’annulation de février dernier. Au total, le projet du Gouvernement préserve malgré tout 1,2 milliard d’euros de hausse depuis 2017.
De tels revirements, faits de hausses brutales et de baisses drastiques, nuisent à l’efficacité et au pilotage de l’aide publique au développement et à la cohérence de ses actions. Ils donnent l’impression que l’APD sert de variable d’ajustement budgétaire, sans véritable réflexion sur ses missions et son impact. L’aide publique déclarée par la France atteint presque 16 milliards d’euros : les priorités stratégiques doivent en être redéfinies, et soutenues par un budget mieux préservé des aléas de gestion. L’aide publique au développement est une politique de long terme.
S’agissant de 2025, je regrette d’une part que la mission paye un tribut disproportionné à l'effort global du Gouvernement en matière de dépenses, d'autre part que les actions qu’elle finance ne fassent pas l’objet d’une redéfinition politique.
La mission APD ne représente que 1 % des dépenses de l'ensemble des missions budgétaires. Pourtant, le décret d'annulation du 21 février dernier a annulé 742 millions d’euros sur un total de 10 milliards d’euros, soit 7 % de l’effort total. L’effort demandé dans le PLF pour 2025 est de 1,3 milliard d’euros sur un total de 15 milliards d’euros, soit 9 % du total. Enfin, les baisses que le Gouvernement demandera par amendements toucheront l’ADP à hauteur de 641 millions d’euros, soit 15 % du total. Au final, en 2025, la mission perdra 2 milliards d’euros, soit 34 % de son budget. Aucune autre mission budgétaire ne sera contrainte à un tel effort : celle qui contribue le plus ensuite, la mission Travail, emploi et administration des ministères sociaux, ne voit ses crédits baisser que de 8 % – quatre fois moins.
La mission Aide publique au développement devrait pourtant être au cœur de notre diplomatie et de l’influence française. Elle contribue notamment à la stabilité des pays en développement, en aidant à y fixer les ressources humaines les plus dynamiques, et constitue ainsi un outil indispensable de notre politique de gestion des flux migratoires.
Dans un contexte d’aggravation considérable du déficit, le budget de l’APD doit contribuer à l’effort, mais pas dans cette proportion, et pas sans une réorientation de nos priorités stratégiques et de nos modes d'intervention. Or le Gouvernement continue de s'inscrire dans le cadre de la loi de programmation du 4 août 2021 et dans celui du comité interministériel de juillet 2023, alors que ces outils de pilotage sont manifestement obsolètes. J’ai même l’intuition que ces variations budgétaires entraînent une redéfinition quasi involontaire de la nature de notre intervention et que le pilotage politique se fait sournoisement par les crédits. En effet, une augmentation des crédits permet d’abonder les grands fonds multilatéraux, tandis qu’une baisse brutale des crédits impose au contraire une régulation de l’aide bilatérale, qui est pilotable.
J’ai déposé des amendements de bon sens pour préserver les fondamentaux de l’APD : aide d’urgence, réponse aux crises, aide alimentaire et humanitaire, services sociaux de base et grands projets de génie civil, qui permettent de déployer l’expertise technique française. La préservation de notre capacité d'influence passe avant tout par l'aide bilatérale et les crédits pilotables, qui sont à la main de nos ambassades, de nos administrations et de l’Agence française de développement (AFD). Je suis favorable en revanche à ce que la France se retire de certains fonds multilatéraux, quitte à prévoir une sorte de clause de retour à meilleure fortune.
Bref l’aide publique au développement doit prendre sa part des économies budgétaires, mais la baisse doit être mesurée et prioritairement imputée sur l’aide multilatérale et sur les pays non coopératifs. Je suis également favorable à la hausse de la taxe de solidarité sur les billets d’avion ainsi qu’à une hausse raisonnable de la taxe sur les transactions financières, mais ces questions relèvent de la première partie du PLF.
Article 42 et état B : Crédits du budget général
Amendements II-CF1365 de M. Pierre-Yves Cadalen et II-CF2550 de M. Corentin Le Fur (discussion commune)
M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). La baisse des crédits de la mission inquiète particulièrement les acteurs de terrain qui mettent en œuvre l’aide publique au développement. Certains projets du programme 209 Solidarité à l'égard des pays en développement voient leur financement diminuer de 50 %. Pourtant, dans un contexte de multiplication des conflits internationaux, les besoins augmentent. Avec cette baisse, la France enverrait un signal catastrophique en termes de solidarité, alors que la coopération internationale est une manifestation des principes universalistes de la République. Nous proposons donc de relever les crédits du programme 209.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Mon amendement, nécessaire mais mesuré, propose d’en revenir au niveau de 2024 après application du décret d’annulation de février. La baisse des crédits serait ainsi ramenée à 12 %, contre 34 % actuellement. Un tel effort, justifié par l’état de nos finances publiques ne me semblerait pas disproportionné.
Cet abondement serait destiné en priorité aux dispositifs bilatéraux, qui sont plus facilement pilotables et efficaces en termes d’influence. Il permettrait de financer des actions tournées vers l’aide alimentaire, les services sociaux de base et la francophonie.
M. Jean-René Cazeneuve (EPR). Il est intéressant de noter que ceux qui nous reprochent de diminuer ces crédits sont ceux qui n’avaient pas voté les hausses que nous avions voulues dans les budgets précédents. Je vois là une manière pour eux d’approuver la politique qui avait été suivie. En tout cas, après les augmentations considérables que l’aide publique au développement a connues ces dernières années, il me semble qu'elle peut aujourd’hui contribuer à la réduction des déficits.
Mme Véronique Louwagie (DR). J’entends les besoins, mais nous nous opposerons à toutes les demandes d’augmentation de crédits de cette mission, dans la continuité de nos positions contre les hausses très importantes dont elle a bénéficié ces dernières années, qui se chiffrent en milliards. Nous nous réjouissons que le Gouvernement engage les efforts nécessaires avec cette baisse de 641 millions. Nombre de nos concitoyens ne comprendraient d’ailleurs pas que nous continuions à soutenir ces politiques publiques, compte tenu du contexte budgétaire.
M. le président Éric Coquerel. Je suis favorable à ces amendements. Monsieur Cazeneuve, les augmentations que vous évoquez valent surtout pour le début du premier mandat d’Emmanuel Macron. En 2023, les crédits de l’aide publique au développement ont chuté de 11 %, ce qui nous a fait redescendre à 0,5 % du revenu national brut (RNB), loin de l’objectif des 0,7 % alors même que les besoins s’accroissent, madame Louwagie.
Lors de l’examen de la mission Action extérieure de l’État, nous avons évoqué l’affaiblissement progressif de notre diplomatie. Si nous voulons que la France continue à jouer un rôle dans le monde, elle doit être présente pour aider les pays en voie de développement, qui subissent en premier lieu le réchauffement climatique, les effets de nos systèmes de production, la politique de libre-échange et une multitude de conflits. Comment ne pas comprendre que pour limiter les flux migratoires, comme le veulent certains, il importe d’agir sur leurs causes dans les pays d’origine des migrants ?
S’il y a bien un budget qui doit échapper à l’effort demandé, c’est celui de l’aide publique au développement. Diminuer ses crédits de 34 % est irresponsable, compte tenu de la situation internationale.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. En effet, une perte d’un tiers de ses crédits, c’est colossal. On peut demander un effort budgétaire à cette mission, mais pas dans ces proportions. D’où mon amendement, mesuré, qui propose un rétablissement, car les besoins sont nombreux, mais partiel, car l’effort est légitime.
Comme le souligne M. le président, l’aide publique au développement est un outil d’influence pour notre pays, et elle joue un rôle dans la lutte contre l’immigration subie. En aidant les pays de départ, nous leur permettons de faire face non seulement à leurs difficultés économiques mais aussi aux aléas climatiques, et ainsi d’enrayer l’hémorragie des populations.
M. Karim Ben Cheikh (EcoS). J’avais aussi déposé des amendements qui visaient au moins à rétablir les crédits du programme 209, Solidarité à l’égard des pays en développement, qui recouvre une grande partie de notre action bilatérale et des instruments déployés localement par les ambassades – bref, tout ce que nous sommes en train de détruire. Ce programme contrebalance le déséquilibre qui caractérise notre aide au développement, trop largement fondée sur des prêts : il finance des subventions et dons dans les pays considérés comme prioritaires par le comité interministériel de la coopération internationale et du développement (Cicid). N’oublions que c’est le manque de moyens sur ce type de programme qui nous a conduits à la situation que nous avons connue au Sahel et plus généralement en Afrique de l’Ouest. Ne refaisons pas cette erreur historique.
Mme Céline Thiébault-Martinez (SOC). Nous sommes également favorables au rétablissement des crédits de cette mission. La délégation aux droits des femmes a été alertée par plusieurs associations sur les conséquences des baisses de crédits prévues. Non seulement elles empêcheraient de futures actions de soutien à la scolarisation des petites filles, mais elles mettraient fin brutalement à des programmes non parvenus à leur terme, réduisant ainsi à néant les efforts déjà consentis.
Mme Sophie Mette (Dem). J’aurais voté en faveur de l’un des amendements de M. Ben Cheikh. Je vais me reporter vers celui de M. Le Fur.
La commission adopte l’amendement II-CF1365.
L’amendement II-CF2550 tombe.
Amendement II-CF1362 de M. Pierre-Yves Cadalen
Mme Nadège Abomangoli (LFI-NFP). Par cet amendement, le groupe LFI-NFP souhaite renouveler l’engagement de la France en faveur du fonds de soutien aux infrastructures critiques et secteurs prioritaires de l’économie ukrainienne en maintenant ses crédits au même niveau que 2024, soit 200 millions, afin que les projets proposés puissent être menés à bien. Réduire les crédits de ce fonds serait un mauvais signal envoyé à ce pays, à la reconstruction duquel la France s’est engagée à contribuer.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Je partage votre intention, mais l’augmentation de 80 millions que vous demandez est couverte par l’amendement que nous venons d’adopter. Demande de retrait.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF1360 de M. Pierre-Yves Cadalen
Mme Nadège Abomangoli (LFI-NFP). Depuis des décennies, le peuple palestinien subit la politique destructrice de gouvernements israéliens toujours plus extrémistes. La situation à Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem-Est ne fait qu’empirer : bombardements de civils, destructions d’infrastructures onusiennes protégées par le droit international, annexions de territoires palestiniens, confiscations arbitraires et violentes. Des millions de Palestiniens sont victimes de la politique à visée génocidaire de Benjamin Netanyahou. Le gouvernement français ne peut plus se contenter de mots.
Par cet amendement, le groupe LFI-NFP souhaite doubler la contribution de la France au fonds fiduciaire en faveur des territoires palestiniens de la Banque mondiale. Ce serait un signal important alors qu’Israël vient d’interdire sur son territoire l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (Unrwa), en criminalisant ses milliers d’agents, dont le travail détermine pourtant la survie de millions de Palestiniens et de Libanais.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Avis défavorable. D’une part, le programme 110 prévoit une dépense d’1,2 milliard au titre de la contribution française à la reconstitution de l’Association internationale de développement, branche de la Banque mondiale. D’autre part, un amendement très similaire portant sur la mission Action extérieure de l’État a été adopté ce matin.
M. le président Éric Coquerel. Même si M. Ben Cheikh avait indiqué que l’amendement en question avait davantage sa place dans la présente mission, il a été maintenu et voté. Il paraît donc plus judicieux de retirer le présent amendement.
L’amendement est retiré
Amendement II-CF444 de M. Franck Allisio
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Avis défavorable à cet amendement qui propose de supprimer la coopération bilatérale avec les grands émergents. Bien évidemment, l’aide aux pays émergents ne prend la même forme que pour les pays moins avancés, notamment les pays africains. Elle se fait soit dans un cadre multilatéral, essentiellement autour des enjeux environnementaux, soit dans un cadre bilatéral, avec des contreparties, soit dans le cadre de prêts de l’Agence française de développement.
M. Jean-René Cazeneuve (EPR). Madame Abomangoli, rappelons d’abord que la France a été l’un des premiers pays à intervenir à Gaza, en envoyant notamment des bateaux pour soigner les nombreux blessés.
Ensuite, chère collègue, les mots ont un sens. La mort de 6 millions de Juifs en Europe sur une population totale de 9 millions, c’est un génocide. Ce qui se passe à Gaza, c’est un drame épouvantable.
Mme Nadège Abomangoli (LFI-NFP). Les mots ont un sens et la réalité aussi. En employant les termes de « visée génocidaire », j’ai repris les analyses de plusieurs instances de l’ONU. Omer Bartov aussi, historien mondialement reconnu, spécialiste de l’histoire de la Shoah, explique qu’en Israël, où il a fait son service militaire, on retrouve dans la classe politique et le conditionnement des soldats tout ce qui a alimenté l’intention génocidaire en Allemagne. Enfin, cette formulation s’appuie sur le droit international. L’histoire jugera. Toujours est-il que ce que vivent les Palestiniens mérite empathie, attention et action. Et si j’ai proposé de financer ce fonds, c’est que je considère que ce qui a été détruit doit être reconstruit par celles et ceux qui croient encore en l’humanité.
M. le président Éric Coquerel. J’étais à Gaza, près de Rafah, quand le navire français que vous évoquez, monsieur Cazeneuve, était au port. Il était tellement bien équipé et préparé que, dans les faits, l’aide a été presque réduite à néant ! Dans cette tragédie, d’autres pays européens délivrent une aide bien supérieure à la nôtre. Par ailleurs, les députés de La France insoumise sont loin d’être les seuls à parler de « risque génocidaire », puisque c’est la Cour internationale de justice qui recourt à cette caractérisation.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF442 de M. Franck Allisio
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Je suis d’accord pour supprimer l’aide au développement de pays hostiles, mais le Gouvernement s’y emploie déjà. Il a suspendu les versements de l’APD au Mali en novembre 2022, ceux au Niger en juillet et ceux au Burkina Faso en août. Il assume de lier l’APD à la préservation des intérêts nationaux. J’ajoute que ces décisions relèvent moins du budget que des pratiques.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF443 de M. Franck Allisio
M. Jocelyn Dessigny (RN). Le présent amendement tend à supprimer les aides à la Chine. Est-il nécessaire de verser 150 millions d’euros par an à la deuxième puissance économique mondiale ?
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Beaucoup d’idées reçues ont cours sur l’aide à la Chine. Il s’agit d’un prêt consenti aux conditions du marché : les intérêts rapportent donc de l’argent à l’Agence française de développement. Les opérations financées contribuent à la transition du pays vers une économie plus respectueuse de l’environnement et font partie de notre partenariat commercial avec la Chine. Ce ne sont pas des dons.
M. Jocelyn Dessigny (RN). J’entends vos arguments. Est-il normal cependant de continuer à aider la Chine à se développer alors que notre dette atteint 3 000 milliards et que nous devrions donner la priorité au développement de nos entreprises ? Fabriquons en France, réindustrialisons notre pays et cela aura des vertus écologiques !
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Nous ne parlons pas de dons mais de prêts qui rapportent des intérêts à la France.
M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). Il faut éviter les caricatures. J’étais hier avec des personnes qui sont chargées de l’aide publique au développement à l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques). La ligne budgétaire des prêts consentis à la Chine ne figure pas dans l’APD. Ensuite, les sommes concernées financent des frais d’écolage, pour de la coopération universitaire, et des projets de lutte contre le changement climatique. L’APD est déjà attaquée publiquement, il faut éviter de répandre le doute sur son opportunité.
Mme Véronique Louwagie (DR). D’abord, les prêts ne font pas partie du budget d’environ 5 milliards que nous examinons. Ensuite, monsieur le rapporteur spécial, vous avez indiqué que la France était gagnante. Or j’avais cru comprendre qu’il y avait bien une contribution de sa part, dans la mesure où nous prêterions à la Chine à des taux en moyenne inférieurs à ceux auxquels nous empruntons. Qu’en est-il ?
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Selon les informations dont je dispose, nous sommes gagnants : l’AFD a encaissé des intérêts supérieurs à ce que nous avons dépensé.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF915 de Mme Nadège Abomangoli
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Avis défavorable. Nous venons déjà d’augmenter les fonds de l’aide publique au développement. Pour ma part, je recommande plutôt de la recentrer sur les besoins fondamentaux, en particulier sur l’urgence alimentaire.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF1432 et II-CF1473 de M. Karim Ben Cheikh
M. Karim Ben Cheikh (EcoS). Lors de la conférence sur le Liban, la France s’est engagée à lui apporter une aide de 100 millions, dont on ne trouve la trace ni dans la mission Aide publique au développement, ni dans la mission Action extérieure de l’État. Nous préférons prendre les devants pour aider le Gouvernement à tenir sa promesse.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Avis défavorable. Nous avons déjà réabondé les crédits de l’APD. La situation nous préoccupe tous, mais les aides bilatérales au Liban sont multiples, par le biais en particulier de l’AFD, de Proparco et d’Expertise France.
La commission rejette successivement les amendements.
Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission rejette l’amendement II-CF1062 de M. Pierre-Yves Cadalen.
Amendement II-CF1363 de Mme Nadège Abomangoli
M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). J’appelle votre attention sur cet amendement qui tend à renforcer l’aide alimentaire. Certaines ONG, comme Action contre la faim et l’Unicef, nous ont alertés sur les conséquences d’une baisse des crédits des programmes alimentaires : 896 000 enfants, laissés sans secours, pourraient souffrir de malnutrition sévère.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. J’aurais émis un avis favorable sur cet amendement si nous n’avions pas déjà adopté le II-CF1365, qui rétablit l’ensemble des crédits de l’APD. Avis défavorable, donc, même si je plaide pour un recentrage des crédits sur l’aide alimentaire.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF913 de Mme Nadège Abomangoli
M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). Le présent amendement vise à abonder le fonds Muskoka, créé en 2010, qui se montre essentiel pour la santé des mères et de leurs enfants en défendant leurs droits sanitaires, sexuels et reproductifs. Il mène plusieurs actions très importantes, en particulier contre les violences de genre et les problèmes sanitaires ainsi que dans la lutte contre le VIH.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Avis défavorable. En tant que cochampionne de la coalition d’action sur l’autonomie corporelle et les droits et santé sexuels et reproductifs, la France a déjà promis de mobiliser 400 millions sur cinq ans. Le PLF ne remet pas en cause cet engagement, ce qui montre au passage la rigidité de l’aide multilatérale. De plus, nous avons rétabli les crédits de l’APD.
M. Jocelyn Dessigny (RN). Nous sommes favorables au fond. Je m’étonne seulement d’un amendement qui tend à développer la natalité dans les pays étrangers alors que, lorsque nous défendons une politique nataliste en France, on nous reproche d’être sexistes et opposés aux droits des femmes.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Je suis d’accord sur la nécessité de soutenir la natalité et la démographie de notre pays, mais l’amendement concerne plutôt les aides à la contraception.
M. Karim Ben Cheikh (EcoS). Monsieur le rapporteur spécial, vous nous avez plusieurs fois objecté que nous venions de rétablir les crédits de l’APD. Ce n’est pas ce que fait le très bel amendement que nous avons adopté : il rétablit environ 80 % des crédits du programme 209, que les amendements du Gouvernement nouvellement annoncés tendent à amputer de 1,3 milliard – nous avons rétabli 1 milliard –, sachant que le programme 110 a perdu lui aussi 700 millions.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. En l’état, nous avons rétabli les crédits du programme 209. Il est probable qu’un amendement du Gouvernement en supprime 640 millions, mais il n’a pas encore été déposé, ni a fortiori voté. En attendant, les crédits sont donc là. Quant au sujet particulier de l’amendement, je rappelle que les crédits sont de toute façon maintenus.
M. le président Éric Coquerel. Avez-vous d’autres informations sur cet amendement gouvernemental ?
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Non, je sais seulement que, parmi les 5 milliards d’euros d’économies supplémentaires que le Gouvernement a annoncés, 640 millions d’euros seraient prélevés sur le budget de l’APD. Nous ne connaissons pas le détail de l’amendement mais il sera déposé.
M. le président Éric Coquerel. Ainsi, si M. Ben Cheikh a tort en théorie, en pratique il a raison.
M. Karim Ben Cheikh (EcoS). J’ajoute que nous pouvons déjà estimer la répartition des suppressions de crédits. La mission Action extérieure de l’État ne sera pas affectée, tandis que la mission Aide publique au développement et le périmètre ministériel le seront. On peut en conclure que 433 millions d’euros seront prélevés sur le programme 209.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF912 de M. Pierre-Yves Cadalen
M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). C’est un amendement d’appel sur le respect de la trajectoire de l’aide publique au développement. Dès les années 1970, la France s’est engagée à y consacrer 0,7 % de son RNB. Ce n’est pas impossible : l’Allemagne, la Norvège et le Luxembourg notamment y parviennent. Or le projet du Gouvernement ne respecte même pas l’objectif qu’il s’était lui-même fixé en la matière, puisque la loi de programmation de 2021 prévoyait d’atteindre ces 0,7 % en 2025. Cet échec intervient au moment où le multilatéralisme, la coopération internationale et la solidarité ont besoin de gestes forts, en particulier de pays qui s’en réclament à l’envi et font de cette ambition le fondement de leur singularité, comme c’est le cas de la France.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. L’objectif de 0,7 % ne sera pas atteint en 2025 – il ne l’a d’ailleurs été qu’une fois. Cela oblige à redéfinir les priorités. Il est vrai que les lois de programmation ne sont presque jamais respectées – on peut le regretter – mais, de façon générale, je me méfie d’une politique uniquement fondée sur les chiffres. Annoncer un objectif puis abonder les crédits correspondants sans réfléchir aux besoins, aux enjeux ni aux priorités ne me semble pas très opportun. Avis défavorable.
M. le président Éric Coquerel. Les annonces de cette nature ont un avantage, c’est que tout le monde pense que l’objectif est atteint. C’est comme le plan qui prévoyait 100 milliards pour la SNCF : il n’a pas été engagé mais le chiffre est resté dans les esprits !
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF1369 de Mme Nadège Abomangoli
M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). La France défend des positions sur la scène internationale, notamment aux Nations unies. Elle y affirme son grand attachement au multilatéralisme – mais, dans ce domaine comme dans les autres, il n’y a pas d’amour, seulement des preuves d’amour ! Il faut donc abonder les fonds des Nations unies, en particulier au moment où d’autres États les attaquent et où le secrétaire général est très critiqué. La France se doit d’envoyer un signal clair et nous pouvons le faire depuis cette assemblée.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Avis défavorable. La France transfère des sommes considérables aux instances de l’ONU : 1,3 milliard de dollars en 2021, dont 43 % relevaient de l’APD. Depuis 1945, nous sommes passés de 19 agences multilatérales à 171. Cette augmentation a pu avoir de bonnes raisons, mais je suis plutôt favorable à ce que nous réduisions nos dépenses les moins pilotables, sur lesquelles nous avons le moins d’influence, pour nous concentrer sur les aides bilatérales.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF1419, II-CF1420 et II-CF1430 de M. Karim Ben Cheikh
M. Karim Ben Cheikh (EcoS). Ces amendements visent à augmenter la contribution au Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), respectivement de 100, 50 ou 10 millions. On connaît la situation dans de nombreux pays, par exemple celle du Liban avec les réfugiés syriens.
Monsieur le rapporteur spécial, dans le 1,3 milliard que la France verse à l’ONU, je suppose que vous comptez les contributions obligatoires, sachant que leur montant a diminué avec la baisse du PIB et que nous sommes désormais le huitième contributeur des Nations unies, contre le cinquième en 2015. Je parle pour ma part des contributions volontaires, qui sont justement celles qui permettraient de rééquilibrer la situation.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Je suis plutôt favorable à l’augmentation des contributions volontaires, mais il faudrait alors réduire le montant des obligatoires, qui sont plus contraignantes.
Sur les amendements, j’émets un avis défavorable. La France n’a pas à rougir de son action pour l’accueil des demandeurs d’asiles et des réfugiés. Le programme 303 de la mission Immigration, asile et intégration leur consacre plus de 1 milliard. Nous avons aussi augmenté d’un tiers notre soutien au HCR entre 2022 et 2023. L’aide aux réfugiés est multiforme et significative.
La commission adopte l’amendement II-CF1419.
Les amendements suivants tombent.
Amendement II-CF711 de M. Jocelyn Dessigny
M. Jocelyn Dessigny (RN). Pour renforcer la francophonie, le présent amendement vise à augmenter de 50 millions d’euros les crédits de l’action 05, Coopération multilatérale, du programme 209, Solidarité à l’égard des pays en développement. Afin d’assurer sa recevabilité financière, ces crédits sont prélevés sur l’action 02 du programme 110, Aide économique et financière au développement.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Je suis pour préserver les crédits alloués à la francophonie, surtout cette année où le 19e sommet a été organisé dans la nouvelle cité internationale de la langue française de Villers-Cotterêts. En effet, la francophonie est un facteur d’influence majeur, qu’il faut défendre : par exemple, malgré une baisse de 21 % de l’APD britannique depuis 2021, le Gabon et le Togo, historiquement situés dans la sphère d’influence française, ont adhéré au Commonwealth. Cela faisait partie des priorités que je développais dans mon premier amendement. Mais, comme nous avons adopté un amendement beaucoup plus ambitieux, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF1418 et II-CF1427 de M. Karim Ben Cheikh, II-CF1364 de M. Pierre-Yves Cadalen et II-CF1429 de M. Karim Ben Cheikh (discussion commune)
M. Karim Ben Cheikh (EcoS). Mes amendements visent à soutenir l’Unrwa en abondant les crédits du programme 209 à hauteur respectivement de 100 millions d’euros, 50 millions ou 10 millions. L’Agence joue un rôle crucial pour la population palestinienne, qui vit un drame à Gaza. Elle a besoin de soutien, alors qu’elle subit une attaque terrible d’Israël. Un rapport de Catherine Colonna, ancienne ministre des affaires étrangères, montre que l’Unrwa est efficace et que les accusations portées à son encontre sont fausses.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Avis défavorable. La France contribue déjà à hauteur de 1,4 milliard aux institutions spécialisées des Nations unies.
M. Jocelyn Dessigny (RN). Nous voterons contre ces amendements. L’Unrwa est dans le collimateur du gouvernement israélien en raison de liens supposés avec le mouvement islamique terroriste du Hamas. J’invite mes collègues du Nouveau Front populaire à faire attention à qui nous octroyons des crédits.
M. le président Éric Coquerel. Ce sont les propos de M. Netanyahou. Les conclusions de Mme Colonna sont toutes différentes.
La commission adopte l’amendement II-CF1418.
Les amendements suivants tombent.
Amendements identiques II-CF1313 et II-CF1370 de M. Pierre-Yves Cadalen
M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). Ces amendements identiques ont été cosignés respectivement par M. Jimmy Pahun, député du Morbihan, et par les membres de mon groupe. En juin, la troisième Conférence des Nations unies sur l’océan aura lieu à Nice. Nous soutenons l’implantation en France d’un nouvel institut de recherche de l’ONU consacré aux études maritimes et océaniques, dont le projet a été conçu à Brest. Il accueillerait également des formations et participerait au partage de connaissances entre le Nord et le Sud, donc concourrait au respect de nos engagements internationaux. La France soutient le multilatéralisme et veut être au premier rang de la recherche et des politiques maritimes : ce projet, transpartisan, a tout son sens.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Je ne peux que soutenir la création d’un tel institut. Cependant, puisqu’il sera sur notre propre sol, votre amendement aurait davantage sa place dans la mission Recherche et enseignement supérieur. Avis défavorable.
M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). D’un autre côté, l’institut participera au partage de connaissances et dispensera des formations dans le cadre d’accords internationaux. Je pense notamment au Traité international pour la protection de la haute mer et de la biodiversité marine (BBNJ), pour la ratification duquel la France a déployé des efforts diplomatiques soutenus. Concrètement, des diplomates africains viendront se former à Brest, ce qui renforcera l’efficacité du BBNJ. On ne peut pas se contenter de se féliciter de la conclusion d’un accord : il faut consentir les moyens nécessaires pour qu’il soit suivi d’effets, sur le plan diplomatique comme sur le plan technique et scientifique.
J’ajoute que le budget de l’enseignement supérieur et de la recherche est grandement affaibli.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Je ne suis pas pleinement convaincu. Le ministère de l’enseignement et de la recherche participe à des projets de cette nature. Selon un rapport de la Cour des comptes, il est d’ailleurs le deuxième plus gros contributeur au financement d’organisations internationales, pour un montant de 1,5 milliard en 2021.
La commission adopte les amendements.
Amendement II-CF1359 de Mme Nadège Abomangoli
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. La création d’un nouveau programme pour organiser l’annulation de la dette des pays pauvres n’aurait aucune conséquence pratique : les annulations de dette, en cours de négociation, sont l’aboutissement d’un processus lent et complexe, qui mobilise de nombreux créanciers et impose que les États bénéficiaires collaborent entre eux. Une fois que les annulations sont décidées, on les impute au budget, pas l’inverse. Avis défavorable.
M. le président Éric Coquerel. Sur le fond, je n’ai rien contre, mais il s’agit d’un amendement d’appel qui ajouterait 300 millions d’euros complètement artificiels au budget….
L’amendement est retiré.
M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux avis sur les crédits de la mission.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Les amendements qui ont été adoptés ont considérablement changé ce budget. J’avais proposé que l’on revienne sur une partie de la baisse de crédits prévue, mais en contribuant tout de même à l’effort budgétaire. En l’état, il n’y a plus aucune baisse. Par ailleurs, je proposais un recentrage des priorités sur l’aide humanitaire et les réponses d’urgence aux crises. De ce double point de vue, le compte n’y est pas. Je ne suis donc pas favorable aux crédits de cette mission.
M. Jean-René Cazeneuve (EPR). Nous sommes très favorables aux dépenses de l’aide publique au développement, qui sont essentielles aussi bien en termes de solidarité et de développement économique que de diplomatie, de rayonnement de la France et de maîtrise de l’immigration. C’est la raison pour laquelle le budget de cette mission a augmenté de 50 % au cours des cinq dernières années.
Au regard de nos objectifs de maîtrise de la dépense publique, le budget tel qu’il nous a été présenté nous paraissait acceptable. Avec les près de 1,5 milliard d’euros qui viennent de lui être ajoutés, nous ne le voterons pas, tout en espérant être en mesure de rétablir rapidement les crédits à la hauteur de leur niveau de 2023.
M. Pierre-Yves Cadalen (LFI-NFP). La logique qui a prévalu aujourd’hui est parfaitement sensée : lorsque les besoins augmentent, la puissance publique doit y répondre. C’est son rôle, et c’est le sens de la construction de l’État et de la république sociale dans notre pays. L’augmentation de l’aide publique au développement appelle un accroissement des recettes, auquel nous nous attellerons la semaine prochaine, notamment en instaurant la taxe Zucman. Les plus riches doivent en effet participer à la solidarité concrète, sur le plan international comme à l’échelon national. Dans le contexte de la montée de l’extrême droite un peu partout en Europe, le fait de promouvoir la coopération internationale a un sens particulier puisque cela conduit à défendre les principes universalistes, l’égalité entre les êtres humains, la possibilité d’être soigné ou d’avoir accès à tous les droits fondamentaux où que l’on soit né, d’où que l’on vienne et où que l’on aille. Nous voterons en faveur de ces crédits.
Mme Dieynaba Diop (SOC). Nous avions voté assez unanimement contre le budget de la mission Aide publique au développement en commission des affaires étrangères car nous déplorions une baisse très importante des crédits. Le travail que nous avons effectué aujourd’hui ayant permis de les rétablir à un niveau satisfaisant, nous les voterons.
Mme Véronique Louwagie (DR). La France doit jouer pleinement son rôle et exercer toute son influence dans le monde, apporter son aide pour ce qui concerne les crises climatiques et agir pour qu’il y ait le moins de conflits possible. Cela étant, les crédits de la mission ont considérablement augmenté au cours des dernières années, sans que cela n’apporte une réponse, d’ailleurs, aux flux migratoires. Nous nous réjouissons que le Gouvernement ait entendu nos propositions de réduction des crédits, en optant pour une baisse de 641 millions qui se répartirait entre le programme 209, à hauteur de 433 millions, et le programme 208, pour 208 millions. Les amendements adoptés, eux, représentent une hausse de l’ordre de 1,5 milliard. Dans ces conditions, nous ne voterons pas ces crédits.
M. Karim Ben Cheikh (EcoS). J’entends beaucoup prononcer le mot « déraisonnable », à propos des augmentations que nous proposons. Ce qui était déraisonnable, c’était la baisse de près de 2 milliards de l’APD française. Nous avons réussi à en rétablir une partie – une partie seulement, soit entre 1,4 et 1,5 milliard, car dans la situation actuelle, chacun peut comprendre qu’il faille faire un effort. Certes, ce n’est pas satisfaisant, eu égard à l’importance de l’APD. Ce que la baisse de 2 milliards nous aurait empêchés de respecter, c’est la loi de programmation, les orientations du Cicid, nos engagements initiaux en matière d’APD. Elle aurait aussi conduit à dépouiller notre diplomatie du peu d’instruments qui lui restent pour travailler de façon bilatérale et tisser une relation fraternelle avec les autres pays. Nous avons remis un peu de raison dans ces crédits et nous les voterons donc, bien qu’ils demeurent en baisse.
Mme Sophie Mette (Dem). Certes, la France doit jouer son rôle dans le monde, et l’aide au développement revêt une importance particulière. Toutefois, les amendements adoptés entraînent un déséquilibre, avec 1,4 milliard de dépenses supplémentaires. Pour cette raison, nous ne pourrons pas voter les crédits de la mission.
Mme Félicie Gérard (HOR). Le groupe Horizons et indépendants salue le budget de 5,2 milliards alloué à la mission Aide publique au développement dans le projet de loi initial. Ce montant ne représente qu’une partie de l’effort total de la France en matière d’aide au développement puisqu’il faut également prendre en compte les prêts et subventions de l’AFD, le soutien à la formation d’étudiants étrangers réfugiés, les travaux de recherche de l’Institut de recherche pour le développement et du Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement, les prêts du Trésor ainsi que la part de notre contribution à l’Union européenne dédiée à l’aide internationale.
Ce budget nous confère les moyens d’atteindre nos objectifs pour 2030 et de respecter les priorités fixées par le Cicid, à savoir la sortie du charbon, la protection des droits humains, la sauvegarde de la biodiversité, le développement des infrastructures stratégiques et la lutte contre l’immigration irrégulière. En parallèle, notre groupe est favorable au renforcement de l’évaluation de cette politique. Nous souhaitons que les parlementaires soient associés de manière plus étroite au suivi annuel des actions menées au regard des objectifs.
Toutefois, les amendements adoptés pour près de 1,5 milliard d’euros dénaturent le budget initial de l’APD. En conséquence, nous voterons contre les crédits en l’état.
M. Jean-Pierre Bataille (LIOT). Nous avons tous envie que la France resplendisse et que nous puissions aider les uns et les autres. L’amendement du rapporteur nous faisait emprunter une partie du chemin : j’aurais aimé que nous nous arrêtions là. Pour des raisons tenant aux contraintes budgétaires – qui peuvent paraître excessives, mais il faut accepter les limites de l’exercice – le groupe LIOT s’opposera aux crédits tels que modifiés.
M. Emmanuel Maurel (GDR). Pour les raisons exposées par M. Ben Cheikh, le groupe GDR votera en faveur des crédits amendés par la commission.
M. le président Éric Coquerel. Pour ma part, je voterai évidemment ces crédits. Je me félicite que les amendements que nous avons adoptés reviennent en grande partie sur les baisses inconséquentes qui avaient été décidées, s’ajoutant à celles de 2023. Ils nous permettront peut-être d’atteindre à nouveau l’objectif des 0,7 % du revenu national brut. Il est du moins à souhaiter que le Gouvernement reçoive le message, alors qu’il s’apprête à imposer une baisse supplémentaire par des amendements que, j’espère, nous rejetterons. Après la mission Action extérieure de l’État, la mission Aide publique au développement redonne à la France une place utile dans le monde en faveur de la solidarité, du développement et de la paix.
La commission adopte les crédits de la mission Aide publique au développement modifiés.
Article 45 et état G : Objectifs et indicateurs de performance
Amendements II-CF2555 de M. Corentin Le Fur et II-CF441 de M. Franck Allisio (discussion commune)
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. L’amendement II-CF2555 vise à nous fournir des informations sur le degré de coopération en matière migratoire des pays bénéficiaires de l’aide publique au développement. Pour ce faire, nous proposons d’ajouter un objectif de performance comprenant deux indicateurs : le taux de transformation de l’instruction des laissez-passer consulaires et l’exécution réelle des retours forcés menés après le prononcé d’une OQTF (obligation de quitter le territoire français). Il s’agit de rappeler que l’APD implique des contreparties. L’amendement II-CF441 propose de prendre en compte le nombre de laissez-passer consulaires délivrés, ce qui me paraît moins utile qu’un ratio. Demande de retrait ou avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Contre l’avis du rapporteur spécial, la commission adopte successivement les amendements II-CF1357 de M. Pierre-Yves Cadalen et II-CF1358 de Mme Nadège Abomangoli.
Après l’article 59
Amendements II-CF1371 de M. Pierre-Yves Cadalen, II-CF1356 et II-CF1065 de Mme Nadège Abomangoli, II-CF1366 de M. Pierre-Yves Cadalen, II-CF1368 de Mme Nadège Abomangoli, II-CF914 et II-CF1367 de M. Pierre-Yves Cadalen, II-CF1063 de Mme Nadège Abomangoli et II-CF1064 de M. Pierre-Yves Cadalen
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Tous ces amendements sont des demandes de rapports. La plupart du temps, vous trouverez les informations demandées dans mon propre rapport. Je donnerai donc un avis défavorable sur tous les amendements, hormis le II-CF1064, qui s’intéresse aux critères définissant les pays vulnérables et fragiles ainsi qu’à l’impact qu’a cette définition sur l’indicateur. En effet, la vulnérabilité ne dépend pas que de la pauvreté, elle peut s’apprécier en fonction de différents critères. Des travaux très intéressants restent à conduire par exemple sur l’aléa climatique et sur les risques de migration économique qui y sont associés.
La commission adopte successivement les amendements.
M. le président Éric Coquerel. Nous en venons à l’examen du compte de concours financiers Prêts à des États étrangers.
Article 44 et état D : Crédits des comptes d’affectation spéciale et des comptes de concours financiers
Amendement II-CF1906 de M. Anthony Boulogne
M. Jocelyn Dessigny (RN). Le programme 853 Prêts à l’Agence française de développement, doté de 145 millions, contribue à « la mise en œuvre de l’aide économique et financière allouée par la France à des pays en développement ». Est-il dans l’intérêt de notre pays de continuer à déverser des dizaines de millions dans le budget de cet opérateur, au profit de pays étrangers ? L’AFD échappe au contrôle du ministère des affaires étrangères, et la gestion de l’APD est peu lisible. Le contribuable français ne peut pas continuer à financer cette entité technocratique. L’amendement vise à supprimer les crédits de ce programme.
M. Corentin Le Fur, rapporteur spécial. Avis défavorable. Les prêts procurent des revenus à l’AFD et sont un outil indispensable à notre diplomatie. Il nous faut préserver cette capacité de prêter. Afin de limiter les risques que vous soulignez, le volume d’affaires de l’AFD a été stabilisé à 12 milliards d’euros en moyenne annuelle.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte les crédits du compte de concours financiers Prêts à des États étrangers non modifiés.
Mission Administration générale et territoriale de l’État (M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial)
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. La mission Administration générale et territoriale de l’État regroupe les crédits du ministère de l’intérieur destinés aux préfectures – programme 354 –, au financement de la vie politique – programme 232 – et aux fonctions transversales de l’administration centrale du ministère – programme 216.
Le PLF propose une augmentation de 6,5 % des crédits de paiement, ou 304 millions d’euros, ce qui les porte à 4,96 milliards d’euros. Cette évolution mérite d’être soulignée dans le contexte actuel, même si elle est surtout le fruit du dynamisme des dépenses en matière d’immobilier. En revanche, les autorisations d’engagement sont annoncées en baisse de 15,8 %, ce qui représente une diminution de 886 millions d’euros. Ce recul est également lié aux opérations immobilières du ministère de l’intérieur.
Le programme 354 Administration territoriale de l’État est le mieux doté de la mission, puisqu’il regroupe un peu plus de la moitié des crédits – 2,66 milliards d’euros – et les trois quarts des emplois – 29 000 équivalents temps plein travaillé (ETPT). Le PLF annonce une augmentation des dépenses de 3,2 %, soit un peu plus de 82 millions d’euros.
La hausse des dépenses immobilières des préfectures explique l’essentiel de cette progression. Elle est due au renouvellement d’un certain nombre de marchés pluriannuels de fluides et d’énergie qui, dans le contexte inflationniste, représente un coût élevé pour les préfectures. La mise en service des cités administratives rénovées contribuera également au surcroît de dépenses.
Cependant, le budget de l’administration territoriale demeure contraint. Il est loin d’être à la hauteur des besoins en matière d’immobilier. Le parc immobilier des préfectures est en effet vieillissant et nécessite des travaux pour atteindre les objectifs du décret tertiaire, qui vise une réduction de la consommation énergétique de 60 % d’ici à 2050. De nombreuses opérations sont en attente.
Enfin, si l’on observe les autres charges du programme, on constate un léger recul des crédits hors dépenses de personnel, tandis que la progression de ces dernières est très faible, de l’ordre de 1,1 % hors contribution au compte d’affectation spéciale (CAS) Pensions.
Le schéma d’emplois devrait être neutre en 2025, ce qui semble être le signe d’une pause dans le réarmement des préfectures défendu par le précédent gouvernement. J’y vois une consolidation des emplois obtenus au cours des deux dernières années, qui ont succédé à une décennie de baisse des effectifs.
Les crédits du programme 232 Vie politique sont en baisse de 60 %, soit près de 160 millions d’euros, ce qui ramène leurs crédits de paiement à un peu plus de 100 millions d’euros. Cela s’explique par le fait qu’il n’y aura pas, en principe, d’élections à organiser en 2025. Évidemment, un nouveau report des élections provinciales en Nouvelle-Calédonie, mais aussi et surtout une nouvelle dissolution de notre assemblée à partir de l’été sont envisageables. Nous aurons l’occasion d’en reparler lors la discussion des amendements.
Concernant enfin le programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur, je note une baisse de 31 %, soit environ 840 millions d’euros, des engagements de dépenses, mais une hausse de 379 millions d’euros des crédits de paiement, soit une augmentation de 21 %. Ces évolutions proviennent là encore des dépenses en matière d’immobilier. Le chantier du nouveau site de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), à Saint-Ouen, entre dans sa phase de construction, ce qui explique à la fois la baisse importante des AE – le marché de construction ayant été passé cette année – et la hausse des CP. Cette opération d’envergure représente un coût total de 1,22 milliard d’euros. Le deuxième chantier est la reconversion d’une partie du village olympique en locaux pour plusieurs services du ministère de l’intérieur, opération qui s’inscrit dans le cadre plus large du projet Universeine.
Bien que ce programme contribue fortement à l’augmentation des crédits de la mission, je note que, paradoxalement, les dépenses autres que celles dédiées au personnel sont inférieures à la trajectoire de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur.
J’attends la fin de la discussion des amendements pour formuler un avis sur les crédits de cette mission.
Article 42 et état B : Crédits du budget général
Amendement II-CF319 de M. Matthias Renault
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Vous proposez d’internaliser l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS), autrement dit de faire en sorte que ses missions ne soient plus assurées par le biais d’un établissement public mais directement par le ministère de l’intérieur. Votre groupe propose la même évolution pour tous les opérateurs de l’État, comme le Conseil national des activités privées de sécurité (Cnaps) et l’Agence des communications mobiles opérationnelles de sécurité et de secours (Acmoss).
Je rappelle que la création de l’ANTS s’inscrivait dans le cadre de la dématérialisation des demandes de titres sécurisés conduite à partir de 2007. Il s’agissait alors de regrouper l’ensemble des compétences liées à la conception, la production et la sécurisation de la chaîne de délivrance de titres. Néanmoins, il pourrait être souhaitable d’accomplir un effort de rationalisation des services et d’apprécier l’efficacité de l’agence. La Cour des comptes a relevé un résultat excédentaire cumulé proche de 100 millions d’euros à la fin 2023. Avis de sagesse.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF1196 de Mme Élisa Martin, II-CF202 et II-CF205 de M. Hervé Saulignac et II-CF1178 de Mme Gabrielle Cathala (discussion commune)
Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). Mon amendement vise à ce que les crédits servant à financer les régimes concordataires en Alsace et en Moselle soient transférés aux préfectures, qui sont sous-dotées en personnel. La loi de 1905 devrait s’appliquer sur l’ensemble du territoire français.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Les trois premiers amendements visent à financer le redéploiement d’effectifs dans les préfectures et les sous-préfectures. Je propose à leurs auteurs de se rallier aux amendements II-CF438, II-CF437 et II-CF927 que je présenterai un peu plus tard, qui vont en partie dans leur sens, mais pour un impact budgétaire moindre. Avis défavorable sur ces trois amendements.
L’amendement II-CF1178 concerne les budgets dédiés aux cultes dans les départements concordataires. Le programme 216 alloue des crédits à l’entretien des cultes catholique, protestants et israélites dans les départements anciennement annexés par l’Allemagne. Ces crédits s’élèvent à 1,2 million d’euros pour les frais d’administration et les subventions aux communes de ces départements et 800 000 euros pour les opérations immobilières des palais épiscopaux de Metz et Strasbourg, auxquels il faut ajouter la rémunération d’environ 1 200 ministres du culte.
Je rappelle que le Conseil constitutionnel, en réponse à une question prioritaire de constitutionnalité en 2013, a confirmé la constitutionnalité de ce régime local particulier. Je crois savoir que nos collègues et élus locaux alsaciens et mosellans y sont très attachés. Avis défavorable.
Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). Selon un sondage récent, plus de la moitié des Alsaciens sont favorables à la fin du régime du concordat. Nous souhaitons l’extension à l’ensemble du territoire des dispositions concordataires constitutives de conquis sociaux, notamment en matière de sécurité sociale, mais il n’en va pas de même du volet cultuel.
La commission adopte l’amendement II-CF1196.
Les amendements II-CF202 et II-CF205 tombent.
La commission adopte l’amendement II-CF1178.
Amendements II-CF260 de Mme Marie-France Lorho, II-CF438 de M. Jean-Pierre Bataille et II-CF800 de Mme Martine Froger (discussion commune)
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Voici le premier des amendements que j’évoquais tout à l’heure, qui visent à redéployer des crédits en faveur des préfectures. Il propose de transférer 383 emplois, pour un montant de 23,52 millions d’euros, au bénéfice des centres d’expertise et de ressources des titres (Cert), afin de réduire le coût du contentieux des étrangers, de mieux lutter contre la fraude documentaire et d’aider les services à faire face à une charge de travail élevée.
M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement II-CF800 vise à limiter les disparités territoriales que l’on constate dans les délais d’obtention de titres d’identité en finançant le déploiement d’effectifs supplémentaires en faveur des Cert.
M. le président Éric Coquerel. Pour ma part, je voterai l’amendement de M. Bataille compte tenu de la situation que connaissent les préfectures, notamment au sein de mon département. Elles sont dans l’impossibilité de traiter en temps et en heure les demandes qui leur sont faites, qu’il s’agisse du renouvellement des papiers ou d’autres questions administratives.
La commission rejette l’amendement II-CF260.
Elle adopte l’amendement II-CF438.
L’amendement II-CF800 tombe.
Amendement II-CF437 de M. Jean-Pierre Bataille
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Il s’agit du deuxième amendement, qui propose d’affecter 190 emplois de plus aux services du contrôle de légalité des préfectures, pour un budget de 13,23 millions d’euros.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF927 de M. Jean-Pierre Bataille
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Voici le troisième amendement de la série, qui demande la réalisation d’une expérimentation dans une trentaine d’arrondissements, dans un premier temps, pour un budget de 2,09 millions d’euros. Il s’agit de déployer dans les sous-préfectures des conseillers affectés au montage des projets des plus petites communes, qui souffrent souvent d’un manque d’ingénierie en interne. Depuis vingt-cinq ans, il me semble que les services de l’État laissent les maires ruraux un peu livrés à eux-mêmes.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF802 et II-CF223 de M. Paul Molac (discussion commune)
M. Michel Castellani (LIOT). L’amendement II-CF802 vise à obtenir, de la part du ministre de l’intérieur, des rapporteurs spéciaux et des rapporteurs pour avis, des informations sur le coût total de l’organisation des élections législatives de 2024.
Quant au II-CF223, il vise à réaffecter des crédits au profit des communes pour compenser le coût de ces mêmes élections.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Demande de retrait pour les deux. Il n’est pas nécessaire d’abonder les crédits du programme, dans la mesure où aucune élection n’est prévue en 2025. En 2022, le coût des élections législatives pour l’État se serait élevé à 3,23 euros par habitant ; celui des dernières élections ne sera connu qu’en 2025.
M. le président Éric Coquerel. Je rappelle que le groupe LFI a exercé son droit de tirage pour lancer une commission d’enquête sur l’organisation des élections législatives de 2024.
Les amendements sont retirés.
Amendement II-CF1170 de Mme Élisa Martin
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Cet amendement vise à résoudre plusieurs difficultés rencontrées par les électeurs lors du dernier scrutin, notamment les délais d’inscription sur les listes électorales et la réception de la propagande électorale. Celles-ci ne sont pas vraiment liées au programme consacré à l'organisation des élections, qui couvre les dépenses engagées par l’État pour la diffusion des professions de foi, les remboursements aux candidats et la prise en charge des dépenses matérielles des communes.
Par ailleurs, les dépenses liées à de nouvelles élections législatives en 2025 seraient couvertes par l’ouverture de crédits non répartis sur le programme 552 Dépenses accidentelles et imprévisibles. Avis défavorable.
M. le président Éric Coquerel. La commission d’enquête que je viens d’évoquer parviendra sans doute à des conclusions qui permettront de documenter des demandes de crédits.
L’amendement est retiré.
Amendement II-CF630 de M. Franck Allisio
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Vous proposez la création d'une banque de la démocratie chargée du financement de la vie politique, permettant notamment aux candidats d’accéder plus facilement à des prêts. Un médiateur du crédit aux candidats et aux partis politiques remplit précisément cette mission. S’agissant des élections législatives de 2022, il précise que « seulement quatre candidats ont fait part à la médiation de difficultés liées à des demandes de prêt, donc très peu, ce qui confirme une tendance déjà constatée pour les élections précédentes. » Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF803 de M. Paul Molac et amendement II-CF439 de M. Jean-Pierre Bataille (discussion commune)
M. Michel Castellani (LIOT). Il est impératif de prévoir dès maintenant les crédits permettant d’organiser les élections provinciales en Nouvelle-Calédonie puisque nous examinerons prochainement la proposition de loi visant à les reporter en 2025.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Je demande le retrait de votre amendement au profit du mien, qui vise à augmenter de 600 000 euros les crédits destinés à l’organisation de ces élections. Ce montant correspond au nombre d’électeurs potentiels en Nouvelle-Calédonie – 170 000 environ – multiplié par le coût moyen des élections départementales et régionales, estimé à 2,99 euros.
L’amendement II-CF803 étant retiré, la commission adopte l’amendement II-CF439.
Amendement II-CF311 de M. Matthias Renault
Mme Claire Marais-Beuil (RN). Cet amendement vise à minorer des crédits dans la perspective de l’internalisation du Conseil national des activités privées de sécurité (Cnaps).
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Le Cnaps a fait preuve de son efficacité, notamment à l'occasion des Jeux olympiques. De plus, dans son rapport de 2023, la Cour des comptes estime que son activité est tout à fait satisfaisante et précise qu’il a répondu à toutes les demandes d’observation. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement. Suivant l’avis du rapporteur spécial, elle rejette l’amendement de repli II-CF310 de M. Matthias Renault.
Amendements identiques II-CF850 de M. Paul Molac et II-CF1522 de M. Pouria Amirshahi
M. Michel Castellani (LIOT). Ces amendements tendent à mettre fin au recours à l’intelligence artificielle et à la vidéosurveillance algorithmique déployées à l’occasion des Jeux olympiques, en diminuant de 8 millions le budget de l’action 11 Équipements de vidéo-protection et de surveillance électronique du ministère de l’intérieur, des collectivités et des acteurs privés.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Ces amendements nous permettront à la fois de défendre nos libertés fondamentales et de réaliser des économies. Il s’agit de mettre un terme à la vidéosurveillance algorithmique qui a été légalisée à l’occasion des Jeux olympiques de 2024, faisant de la France le premier pays à l’expérimenter.
Cette technologie présente un risque de stigmatisation de certains groupes sociaux. Elle utilise des biais discriminatoires, exerce une surveillance disproportionnée de la population et constitue une atteinte à nos libertés fondamentales. Son coût très élevé, de 2 millions d’euros par lot, profite, par le biais de marchés publics, à de grands groupes comme Wintics, Videtics, Orange Business et Chapsvision.
La dynamique économique retenue privilégie la surveillance massive au détriment d’investissements dans des politiques publiques centrées sur l’investigation et la résolution d’affaires. Adopter ces amendements permettrait de diminuer de 8 millions d’euros les autorisations d’engagement en la matière.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. La loi du 19 mai 2023 relative aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024 a autorisé l’utilisation de solutions d’intelligence artificielle, dont l’expérimentation doit prendre fin le 31 mars 2025. Concrètement, elle repose sur l’utilisation de caméras augmentées permettant de tester des solutions algorithmiques couplées en temps réel à des caméras de vidéoprotection. Les crédits ayant permis le financement de ce projet ne relèvent pas de la présente mission. Votre amendement vise une action constituant un ancien volet du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), qui permet de subventionner les collectivités territoriales. J’entends vos réserves sur ces technologies nouvelles : avis de sagesse.
Mme Sandra Regol (EcoS). À la suite du recours de la Nupes, le Conseil constitutionnel avait spécifié que la reconnaissance faciale, permise par la vidéosurveillance algorithmique, était interdite. Pourtant, il y a quelques jours, une enquête du média Disclose a révélé que la police l’utilisait depuis huit ans, la poussant à mettre un terme à cette pratique. Les conséquences de la vidéosurveillance algorithmique et les dérives qui en découlent démontrent à quel point il est important d’adopter ces amendements.
La commission adopte les amendements identiques.
Amendement II-CF436 de M. Jean-Pierre Bataille
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Le projet de loi de finances prévoit d’allouer près de 74 millions d’euros aux dépenses juridiques et contentieuses du ministère de l’intérieur, dont 18,7 millions d’euros pour couvrir les litiges en lien avec le droit des étrangers. Or ces dépenses ont atteint 33,8 millions d’euros en 2023. Les crédits prévus semblent donc insuffisants pour l’ensemble des objets à couvrir, à savoir l’indemnisation des refus de concours à la force publique pour les expulsions locatives, les litiges liés à la réglementation des conditions d’entrée et de séjour, la protection fonctionnelle des agents du ministère, les accidents de circulation des véhicules des ministères et les dégâts causés à l’occasion des manifestations.
Cet amendement vise à augmenter de 15,13 millions d’euros les crédits de l’action 06 Affaires juridiques et contentieuses du programme 216, pour couvrir les dépenses de protection fonctionnelle et les fonctions juridiques et de contentieux du ministère de l’intérieur.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF1805 de Mme Léa Balage El Mariky
M. Tristan Lahais (EcoS). Cet amendement vise à investir davantage dans la prévention des impayés des expulsions locatives, en doublant les capacités d’aide au paiement des impayés. Les expulsions locatives sont en constante augmentation, passant de 18 000 en 2022 à près de 22 000 en 2023, sans compter les effets attendus de la loi Kasbarian.
Investir dans la prévention a déjà fait ses preuves : durant la crise sanitaire, plusieurs mesures avaient été prises, comme le déploiement d’équipes mobiles de prévention des expulsions et la prolongation de la trêve hivernale. Pour faciliter l’échelonnement des procédures d’expulsion et d’indemnisation des bailleurs, 50 millions d’euros avaient été dégagés. Cette politique exceptionnelle ayant fait ses preuves, elle doit dorénavant être inscrite dans le droit commun.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Vous souhaitez allouer indirectement 30 millions d’euros aux fonds de solidarité logement gérés par les conseils départementaux ou les métropoles. Ce n’est pas vraiment l'objet du programme 216. Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF2549 de M. Jean-Pierre Bataille et II-CF440 de M. Franck Allisio (discussion commune)
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Cet amendement vise à abonder les crédits du FIPD à hauteur de 2,175 millions d’euros, contre 1,58 million d’euros pour l'amendement II-CF440.
Mme Claire Marais-Beuil (RN). L’amendement II-CF440 est maintenu, si jamais celui du rapporteur spécial était rejeté.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF604 de M. Paul Molac
M. Michel Castellani (LIOT). Cet amendement vise à annuler la baisse des moyens de la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires.
Suivant l’avis du rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement.
M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux avis sur les crédits de la mission.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Je vous ai présenté une mission dont les crédits étaient en hausse d’environ 600 millions d’euros, essentiellement pour financer des opérations immobilières. Nous y avons ajouté des crédits visant à renforcer les moyens des préfectures. En tant que rapporteur spécial, je vous invite à adopter les crédits de la mission.
Mme Claire Marais-Beuil (RN). Nous nous abstiendrons. Malgré quelques avancées, nous regrettons le rejet de nos amendements.
M. David Amiel (EPR). Nous nous abstiendrons.
M. Damien Maudet (LFI-NFP). Nous considérons avoir obtenu suffisamment de victoires et nous voterons pour ces crédits.
M. Philippe Brun (SOC). Compte tenu des amendements adoptés, les Socialistes voteront favorablement.
M. Ian Boucard (DR). Si une mission doit permettre de réduire l’endettement de l’État, c’est bien celle de son administration générale et territoriale. Les préfectures rendent de moins en moins de services aux citoyens : si vous n’avez pas besoin d’un titre de séjour ou d’un permis de chasse, vous ne vous y rendez plus. Je suis donc surpris qu’on augmente leurs capacités d'accueil, alors qu’on aurait pu rationaliser les dépenses. Certains départements, comme le vôtre monsieur le président, présentent des particularités, et renforcer les moyens pour l’instruction des titres de séjour en Seine-Saint-Denis serait justifié, mais pas dans beaucoup d’autres.
Je m’étonne donc du dérapage des crédits. Véronique Louwagie évoquait tout à l’heure le contrôle de légalité, qui alourdit les procédures et dont le renforcement se fait au détriment des élus locaux. Pour ces raisons et parce que nous estimons que des économies auraient pu être faites sur cette mission, le groupe Droite républicaine votera contre ces crédits.
M. Benjamin Lucas-Lundy (EcoS). Nous estimons avoir suffisamment corrigé le tir pour voter les crédits de la mission.
Mme Sophie Mette (Dem). Compte tenu des dérapages financiers, le groupe Dem votera contre.
Mme Félicie Gérard (HOR). Nous voterons contre également.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Le groupe LIOT votera les crédits de la mission.
La commission adopte les crédits de la mission Administration générale et territoriale de l’État modifiés.
Article 45 et état G : Objectifs et indicateurs de performance
Amendement II-CF257 de Mme Marie-France Lorho
M. Philippe Lottiaux (RN). Le taux d’exécution des obligations de quitter le territoire français (OQTF), malheureusement trop faible, est un bon indicateur de l’état de l’administration générale, qui laisse malheureusement à désirer.
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Le taux d’exécution des OQTF ne relève pas du programme que nous examinons. L’action Immigration, asile et intégration porte seulement les dépenses de personnel de la direction générale des étrangers en France. La mission budgétaire qui supporte les dépenses de fonctionnement et d’intervention en lien avec les OQTF ne fait pas partie de la présente mission. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF926 de M. Jean-Pierre Bataille
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Cet amendement vise à créer un indicateur de performance mesurant le déploiement du réseau radio du futur (RRF), dont nous espérons le lancement complet en 2025 et qui permettra d’améliorer les transmissions entre les forces de sécurité, les sapeurs-pompiers et les services médicaux d'urgence.
La commission adopte l’amendement.
Après l’article 59
Amendements identiques II-CF238 de la commission des lois et II-CF1203 de Mme Élisa Martin
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Instaurer un taux de contractuels dans la fonction publique est un facteur limitant. Avis défavorable.
M. Ian Boucard (DR). J’y suis également défavorable. D’abord, les fonctionnaires malades doivent pouvoir être remplacés. Ensuite, les préfets ont besoin de flexibilité pour mener à bien certaines missions ponctuelles.
La commission adopte les amendements identiques.
Amendement II-CF1206 de M. Damien Maudet
M. Jean-Pierre Bataille, rapporteur spécial. Avis de sagesse sur cette demande de rapport portant sur l’efficacité de l’ANTS, dont les indicateurs sont cependant déjà connus.
La commission adopte l’amendement.
Mission Sécurités et compte d’affectation spéciale Contrôle de la circulation et du stationnement routiers (Mme Constance Le Grip, M. Damien Maudet et Mme Sophie Pantel, rapporteurs spéciaux)
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale (Police nationale ; Gendarmerie nationale ; Sécurité et éducation routières ; compte d’affectation spéciale Contrôle de la circulation et du stationnement routiers). Permettez-moi de commencer par un hommage sincère, auquel vous vous associez, j’en suis sûre, aux femmes et aux hommes des forces de sécurité intérieure qui font face à des missions de plus en plus périlleuses, souvent au péril de leur vie et toujours au péril de leur santé ou de leur intégrité physique. Au cours des dernières années, les forces de sécurité intérieure ont été particulièrement mobilisées, entre le mouvement des gilets jaunes, les diverses contestations sociales et les violentes émeutes urbaines de juin 2023. En ce moment même, en Nouvelle-Calédonie, des milliers de gendarmes sont tous les jours pris pour cible.
Dans un contexte budgétaire contraint, ce projet de budget me semble être à la hauteur de l’enjeu : assurer la protection et la sécurité de nos compatriotes et permettre aux forces de sécurité intérieure d’exercer leurs missions avec les meilleurs moyens.
Les deux principaux programmes de la mission, le programme 176 Police nationale et le programme 152 Gendarmerie nationale, dépassent les 17 milliards. Ils s’inscrivent dans la trajectoire de hausse prévue dans la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi) de Gérald Darmanin. Les crédits de paiement sont en hausse de 600 millions d’euros, soit 4 %, et les autorisations d’engagement de 403 millions, soit 2 %. C’est un choix politique très clair du Gouvernement que de préserver et renforcer les moyens octroyés aux forces de sécurité pour remplir leurs missions. De manière générale, je me réjouis que les budgets des ministères régaliens, dotés d’une programmation pluriannuelle, soient préservés malgré le contexte budgétaire.
S’agissant du programme Gendarmerie nationale, je salue l’effort significatif de 438 millions d’euros consenti pour les crédits hors dépenses de personnel. Après deux années blanches en matière d’investissement et de nombreuses alertes lancées tant par les parlementaires que par la Cour des comptes, cette augmentation va permettre à la gendarmerie de s’équiper et d’entretenir ses véhicules, mais aussi d’acquérir des technologies informatiques pour faire face aux nombreux défis qu’elle a à relever en matière numérique.
Cependant, on ne peut passer sous silence le sujet brûlant de l’immobilier. En raison de plusieurs missions – la sécurisation réussie des Jeux olympiques et paralympiques et la forte mobilisation en Nouvelle-Calédonie –, des contraintes budgétaires ont amené à reporter à la fin de l’année le paiement de certains loyers. Ce sujet, si important pour les gendarmes, doit être traité. Le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, a lui-même reconnu qu’il conviendrait certainement de revoir un modèle immobilier désormais à bout de souffle et dépassé.
L’enveloppe consacrée au programme Police nationale est globalement préservée, à l’exception de l’action sociale, réduite de 10 millions d’euros, et de plusieurs programmes d’investissements immobiliers, qui perdent 236 millions d’euros. Les crédits pour 2025 ne permettront pas de rattraper totalement la soixantaine d’opérations immobilières qui ont été interrompues ou reportées.
Enfin, nous devrons être particulièrement vigilants sur deux points. Le schéma d’emploi des forces tout d’abord est nul, aussi bien pour la police que pour la gendarmerie. Nous ne pouvons négliger cette entorse à la Lopmi : un rattrapage du nombre d’équivalents temps plein devra être programmé au cours des prochaines années. Ensuite, l’enveloppe de la réserve opérationnelle de la gendarmerie est en baisse, ce qui provoque de vives inquiétudes car les réservistes sont essentiels à la police comme à la gendarmerie.
Malgré mes réserves, je vous invite à voter ce budget responsable, qui ne sacrifie pas les priorités sécuritaires et tient les engagements pris, grâce à des choix politiques forts.
M. Damien Maudet, rapporteur spécial (Sécurité civile). Avant d’entrer dans le vif du sujet, j’ai une pensée pour nos voisins et amis espagnols, qui font face à des crues et des inondations majeures, ainsi que pour nos sapeurs-pompiers qui leur viendront en aide dans les prochains jours.
Sophie Pantel et moi avons organisé de nombreuses auditions pour rédiger ce rapport sur le programme 161 Sécurité civile, dépassant parfois son strict périmètre, et il apparaît clairement que le compte n’y est pas.
« Nos pompiers sont des héros absolus » : cette citation du Président de la République a maintenant plus de deux ans. Le Premier ministre a renouvelé ces éloges après les pluies et les inondations récentes, qui ont donné lieu à 2 300 interventions. Les sapeurs n'aiment pas ce terme mais oui, ce sont bien des héros du quotidien, notamment les 80 % d’entre eux qui sont volontaires : ils travaillent dans les espaces verts de Peyrat-le-Château, au Leroy-Merlin de Limoges ou comme infirmiers à Mende, et ils accourent pour servir la société. Les professionnels et les militaires ne sont pas en reste et risquent leur vie pour sauver la nôtre.
Comme cela a été remarqué pendant les auditions, les sapeurs-pompiers sont sans doute l’un des services publics les moins chers. Il ne doit cependant pas devenir low cost, surtout au moment où le changement climatique s’accentue et où la crise de l’hôpital s’aggrave, ce qui augmente considérablement le nombre des missions des sapeurs-pompiers.
Il est difficile de digérer la baisse globale des moyens quand la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris ne peut que rester en sous-effectif pour boucler son budget ; quand les associations agréées ne reçoivent de l’État que 30 ou 50 centimes par bénévole ; quand la retraite des sapeurs-pompiers volontaires n’évolue pas, malgré les amendements qui ont été adoptés lors de la réforme des retraites de 2023. Et pourtant les pompiers répondent toujours présents, que ce soit pendant les attentats ou lorsque l’Assemblée est inondée.
« Notre maison brûle et nous regardons ailleurs » : cette phrase convient aussi aux soldats du feu. Au-delà du programme 161, je vous invite à mener une réflexion plus globale sur le modèle de financement et de recrutement des sapeurs-pompiers afin qu’il y en ait davantage pour effectuer les missions du quotidien.
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale (Sécurité civile). Comme mon collègue, je regrette que les crédits du programme 161 soient en diminution à un moment où les forces de sécurité civile sont déjà sursollicitées, qu’il s’agisse de réagir aux événements climatiques – et je m’associe aux pensées déjà exprimées pour nos voisins espagnols – ou de pallier les carences du secteur sanitaire face au vieillissement démographique ou à l’émergence de risques accrus.
J’insisterai plus particulièrement sur quelques points opérationnels.
Tout d’abord, si la poursuite du pacte capacitaire est souhaitable, il devrait être davantage orienté vers les inondations.
En matière de moyens aériens, les retards dans l’acquisition de quatre nouveaux bombardiers d’eau De Havilland Canada, en raison des annulations de crédits décidées en février, ont conduit à louer des appareils. Cette situation appelle notre vigilance : non seulement nous sommes dépendants d’un pays étranger, ce qui représente un risque considérable pour notre souveraineté, mais cette location tampon est particulièrement coûteuse. Nous vous proposerons donc des amendements visant à augmenter les crédits pour sécuriser l’acquisition de deux nouveaux Canadair.
Par ailleurs, le projet NexSIS 18-112 et le Réseau radio du futur (RRF) apportent de bonnes solutions pour moderniser les interventions des sapeurs-pompiers et renforcer leur efficacité. Mais le recours à ces technologies est coûteux. Il faudra s’assurer que les capacités financières des collectivités territoriales sont suffisantes pour l’absorber. Là encore, il s’agit d’être à l’écoute.
Nous préconisons de préserver notre modèle de sécurité civile, fondé sur le volontariat, qui a largement fait ses preuves. Cela implique de trouver des solutions pour faciliter les choses avec les employeurs, privés comme publics. S’agissant du partenariat avec les « blancs », les attentes sont fortes, que ce soit sur les carences ambulancières – les pompiers n’ont pas vocation à pallier les carences du transport sanitaire – ou sur la généralisation du modèle de plateforme unique de traitement des appels. Comme nous l’avons déjà déploré lors de la première partie du PLF, le modèle de financement de la sécurité civile, qui repose à 90 % sur les collectivités territoriales, est à bout de souffle et appelle une réforme de toute urgence. Un consensus s’est formé autour de la notion de valeur du sauvé. Entre autres propositions, celle d’une participation des compagnies d’assurances ne serait pas incohérente, puisque les interventions des sapeurs-pompiers, en limitant des dommages, leur évitent des dépenses.
Autre sujet, dont on parle peu : la recherche. Pour structurer les nombreuses initiatives prises par différents organismes, il serait pertinent de créer un réseau, placé sous la direction d’un chef de file de terrain, pour coordonner les actions sans limiter l’agilité des acteurs.
Enfin, comme l’a rappelé Damien Maudet, il est important que les associations agréées de sécurité civile n’interviennent que sur des missions non urgentes, et toujours sous commandement des sapeurs-pompiers.
Au regard de ces remarques, je réserverai pour l’heure mon avis sur ces crédits, mais je ne doute pas que nous saurons, tous ensemble, améliorer la feuille de route de ce programme qui transcende les clivages politiques.
Article 42 et état B : Crédits du budget général
Amendements II-CF396 de Mme Sandra Regol, II-CF1661 de M. Pouria Amirshahi et II-CF2175 de M. Éric Coquerel (discussion commune)
Mme Sandra Regol (EcoS). J’ai écouté avec intérêt Mme Le Grip qui disait tout son amour pour les forces de police. Quand on aime, on le prouve : en l’espèce, il s’agit d’affecter davantage de moyens à la police pour développer une police de proximité et recréer du lien avec la population.
Dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville comme dans les quartiers aisés, la population ne demande qu’une chose : connaître les agents. Depuis de nombreuses années, les écologistes et plus largement les forces du NFP demandent le retour d’une police de proximité, car la territorialisation de l’action policière présente de nombreuses vertus : elle facilite le recueil de renseignements, qui fait si souvent défaut, et permet de tisser un lien de confiance durable avec la population.
En 2022, l’Institut Montaigne – vous voyez, nul besoin d’aller chercher des références à gauche – évaluait à 31 millions les seules dépenses de personnel au cours de la première année, auxquels il faut ajouter des coûts d’investissement. Mon amendement, plutôt ambitieux, vise donc à débloquer 150 millions pour commencer à déployer une police de proximité, ce qui permettrait à la fois d’améliorer le service rendu à la population et de redonner du sens au métier des agents, qui sont nombreux à souffrir de difficultés psychologiques – une dimension à laquelle le budget ne répond absolument pas.
L’amendement II-CF1661 est de repli.
M. le président Éric Coquerel. La création d’une police de proximité s’inscrit dans un projet global de refonte de la police en France, pour revenir à ce qui existait avant 2005 : arguant que les policiers n’étaient pas là pour jouer au ballon avec les jeunes mais pour assurer la répression, Nicolas Sarkozy avait progressivement dissous les polices de proximité. Nous considérons que cette décision était une erreur sur laquelle il faut revenir.
De nombreux pays européens ont de bien meilleures statistiques que les nôtres en matière de sécurité. Pourtant, ils ont moins de policiers que nous et leur police du quotidien n’est pas équipée de moyens dissuasifs, y compris létaux, comme les flash ball. Cela accrédite notre hypothèse : il serait pertinent de disposer de différents corps de police, en fonction du niveau de répression nécessaire, ce qui passe par une police de proximité.
Petit à petit, l’idée s’est installée que la police municipale devait assurer les missions de police de proximité. Nous nous opposons à cette vision du continuum de sécurité qui génère des inégalités entre les citoyens, selon que leur municipalité alloue plus ou moins de moyens à sa police – diminuant d’autant ceux finançant d’autres compétences, d’ailleurs. Ce n’est pas aux polices municipales d’assurer la police de proximité, mais à la police nationale.
Mon amendement propose donc à intégrer les 24 000 policiers municipaux à la police nationale, moyennant plusieurs mois de formation.
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. Sur ce sujet, nul besoin de revenir longtemps en arrière ou de verser dans la caricature : le déploiement d’une police de proximité n’implique pas la création d’un corps de fonctionnaires de police spécifique, c’est une question de doctrine d’emploi des forces.
Les engagements pris dans le cadre de la Lopmi étaient très clairs : doubler la présence des forces de l’ordre sur le terrain en dix ans, ce qui implique de recruter 8 500 policiers et gendarmes supplémentaires d’ici à 2027. Cette volonté de renforcer la visibilité des forces sur la voie publique se traduit, pour nos concitoyens, par l’idée de « voir du bleu ».
Je ne crois pas que cela nécessite la création d’un corps de policiers spécifique. À cet égard, les Jeux olympiques et paralympiques ont été riches d’enseignements : l’évolution qui a été faite dans l’emploi des forces de l’ordre a produit de très bons résultats en termes de rétablissement du lien de confiance avec la population.
Je rappelle enfin que lors de son discours devant les écoles de police, le 24 octobre, le ministre de l’intérieur a annoncé l’élaboration de plans départementaux de restauration de la sécurité du quotidien, qui s’appuient entre autres sur une doctrine d’emploi et la coopération avec les polices municipales. Le ministre délégué chargé de la sécurité du quotidien, Nicolas Daragon, est en train d’y travailler.
Les amendements que vous proposez ne me semblent pas pertinents, et j’émets donc un avis défavorable.
M. Ian Boucard (DR). Ce débat est intéressant. Nous l’avons déjà eu lors de l’examen de la Lopmi et je reconnais à Sandra Regol et au groupe écologiste leur constance sur le sujet. Nous continuons donc à être en désaccord.
Votre proposition d’intégrer les polices municipales à la police nationale, monsieur le président, me semble contraire au principe de libre administration des communes. Il n’appartient pas au législateur de faire ce choix à la place des élus municipaux. Dans ma circonscription, la ville de Belfort, administrée par la Droite républicaine, a choisi de quadrupler les effectifs de sa police municipale pour assurer une meilleure sécurité aux citoyens ; à Besançon, ville voisine administrée par les écologistes, ils ont été diminués. La délinquance y a augmenté, bien sûr, mais dans les deux cas, les citoyens ont pu valider ou invalider ces décisions à travers les urnes.
Je ne suis pour ma part pas favorable à l’instauration d’une police de proximité mais le débat est intéressant. En revanche, il n’a pas sa place au détour d’un amendement au PLF : cela relève d’un projet de loi ou d’une proposition de loi. Avec le nombre de groupes de gauches qu’il y a à l’Assemblée, on devrait bien trouver une niche parlementaire pour en parler !
Mme Sandra Regol (EcoS). Les ministres aiment beaucoup dire que les Français adorent leur police. En réalité, à en croire les sondages, ils adorent surtout leur gendarmerie, car les résultats des sondages qui portent spécifiquement sur la police sont quinze à vingt points inférieurs. Cela devrait nous inquiéter et nous interpeller sur les rapports que la police entretient avec la population.
Il se trouve que la gendarmerie a restauré des services de proximité. Si cela a donné de bons résultats, pourquoi ne pas s’en inspirer pour la police ? La police de proximité a existé et si Nicolas Sarkozy n’était pas passé par là, peut-être l’adhésion de la population serait-elle bien meilleure qu’aujourd’hui.
M. Thomas Cazenave (EPR). Il me semble que votre amendement, monsieur le président, conduirait à une grande confusion des responsabilités. Vous avez précisé, à juste titre, que le maire et le responsable de la police nationale avaient des responsabilités différentes. Mais en fondant les polices municipales dans la police nationale, vous exonérez le maire de sa responsabilité première, qui est d’ailleurs fort ancienne : assurer la tranquillité publique. Votre proposition va à rebours des demandes des élus locaux et en particulier des maires, qui veulent garder cette responsabilité.
Pour mieux articuler les missions des deux polices, nous avons créé des contrats de sécurité intégrée (CSI), qui prévoient le renforcement des effectifs de police nationale déployés au quotidien en même temps que celui des pouvoirs de police du maire. La plupart des maires ont signé un CSI – parfois tardivement, comme à Bordeaux.
Pour toutes ces raisons, nous voterons contre ces amendements.
M. Jocelyn Dessigny (RN). Assurer la sécurité des concitoyens est le premier devoir de l’État. En proposant de réduire de 100 à 150 millions les moyens alloués à la gendarmerie nationale pour les affecter à la police, ce sont les territoires ruraux que vous mettez en difficulté. La police intervient dans les villes de plus de 15 000 habitants : les territoires ruraux, eux, sont placés sous la surveillance de la gendarmerie, qui a besoin des crédits que vous voulez lui prendre pour pouvoir agir.
M. le président Éric Coquerel. Effectivement, monsieur Boucard, il s’agit plutôt d’un amendement d’appel, destiné à ouvrir le débat – et le PLF est un bon moment pour le faire.
Je ne pense pas que les citoyens valident spécifiquement le principe de la police municipale : ce qu’ils veulent avant tout, c’est une police de proximité, qu’elle soit financée par la mairie ou par l’État. La police municipale ayant été intégrée petit à petit, mais clairement, au continuum de sécurité, la question se pose forcément pour les maires d’en avoir une ou non.
L’objectif n’est pas de remettre en cause la présence des gardes champêtres par exemple, mais de constater que les missions des polices municipales s’apparentent de plus en plus à celles de la police nationale. C’est une question de philosophie : moi, je suis contre un modèle à l’américaine, où l’organisation du territoire a de fait favorisé l’émergence de polices municipales. Je suis pour l’égalité de tous les Français. Pour cela, la police doit rester nationale, car toutes les municipalités ne peuvent pas consacrer les mêmes moyens à cette mission de sécurité.
À cet égard, l’exemple des Jeux olympiques est très parlant. Pendant cette période, il y a eu à Paris une sorte de police de proximité : même si la plupart des policiers venaient de province, les mêmes équipes étaient déployées tout le temps au même endroit, dans une logique d’îlotiers, et les rapports avec la population étaient excellents. Il faut en tirer des leçons. D’ailleurs, la plupart des syndicats de police demandent eux aussi le retour d’une police de proximité : c’est bien la preuve que ce débat est largement transpartisan.
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. La sécurisation des Jeux olympiques et paralympiques par les policiers et les gendarmes, principalement à Paris mais également ailleurs, jusqu’en Polynésie, a été une réussite extraordinaire. Elle a prouvé qu’il n’était pas nécessaire de créer un corps spécifique ou de mener des réformes de grande ampleur pour obtenir de bons résultats. La philosophie qui a présidé au déploiement des forces ne peut être reproduite à l’identique, car elle a nécessité une concentration des forces sur certaines parties du territoire, mais la Direction générale de la police nationale (DGPN) et la Direction générale de la gendarmerie nationale travaillent à la décliner de manière pragmatique pour assurer à nos compatriotes le même niveau de protection et de sécurité partout dans le territoire.
M. David Amiel (EPR). Je crois au contraire, monsieur le président, que la police municipale est traditionnellement très ancrée en France. Créées au Moyen-Age, les polices municipales se sont organisées au moment de la Révolution française. Elles sont associées aux libertés locales. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si elles ont été étatisées en 1941, sous le régime de Vichy : il s’agissait précisément d’écraser les libertés locales.
Quant à l’excellence des rapports avec la population pendant les Jeux olympiques, elle n’est pas liée à la proximité des agents, qui venaient de toute la France et ne connaissaient pas les habitants locaux, mais de la manière dont les forces de sécurité ont assuré leur fonction. Pour reproduire cela, nul besoin d’étatiser les polices municipales : toutes les polices, dans le cadre de leurs missions respectives, doivent se comporter comme des polices de proximité.
M. le président Éric Coquerel. Vichy a étatisé les polices municipales, la Libération a amplifié leur importance : il s’agit bien d’un choix.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF187 de M. Roger Vicot
M. Roger Vicot (SOC). Il s’agit des moyens de la police judiciaire. Alors que notre pays fait face au défi majeur de la lutte contre le narcotrafic, auquel le sénateur Jérôme Durain vient de consacrer un rapport assez terrifiant, ses moyens connaissent une baisse globale de 10 % par rapport à 2024, et même 19 % s’agissant de la sous-action Soutien (autres dépenses) – Administration centrale et cabinets. Elle devrait pourtant être le bras armé de l’État dans ce domaine. Au regard des enjeux, cette baisse est presque criminelle.
Pour mettre le budget en cohérence avec le discours du ministre de l’intérieur, cet amendement vise à abonder de 280 millions l’action 05 du programme 176, pour en revenir au niveau du PLF pour 2024.
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. En réalité, le périmètre de l’action 05 a simplement évolué : les effectifs dédiés à l’arrestation des personnes mises en cause et à leur déferrement vers l’autorité judiciaire sont désormais imputés à l’action 01 Ordre public et protection de la souveraineté et à l’action 02 Sécurité et paix publiques. Contrairement à ce que vous pensez, les crédits n’ont donc pas diminué.
M. Roger Vicot (SOC). Le rôle de la police judiciaire ne se limite pas à l’arrestation et au déferrement, tant s’en faut : elle assure surtout l’investigation sur le long terme, en France et à l’étranger – du moins, c’était le cas avant la réforme Darmanin.
Pouvez-vous nous dire quelle est l’évolution du budget de la police judiciaire entre 2024 et 2025 ?
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. Je n’ai jamais dit que la police judiciaire ne s’occupait que des arrestations et des déferrements, simplement que le périmètre de l’action 05 avait été redéfini, dans un souci de simplification, de lisibilité et de transparence, afin de mieux correspondre à son titre de Police judiciaire.
La police judiciaire n’est absolument pas le parent pauvre de ce budget : au contraire, ses moyens sont en augmentation.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF1250 de Mme Élisa Martin
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. Cet amendement vise à demander un audit sur les conséquences de la Lopmi. Ce n’est pas un sujet de nature budgétaire, et si une mission parlementaire devait voir le jour, il me semble qu’elle relèverait davantage de la commission des lois. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendements identiques II-CF239 de la commission des lois et II-CF184 de M. Roger Vicot, amendements identiques II-CF240 de la commission des lois et II-CF186 de M. Roger Vicot, amendements II-CF1334 de Mme Gabrielle Cathala, II-CF1263 de Mme Danièle Obono et II-CF666 de M. Romain Baubry (discussion commune)
M. Roger Vicot (SOC). Les moyens alloués à la police nationale pour la formation sont manifestement insuffisants au regard des objectifs fixés, et cela bien qu’ils aient été réduits pour 2025 – il n’est par exemple plus question de l’augmentation de 50 % du temps de formation des policiers. Comme j’ai pu le constater à l’occasion de la mission d’information sur la hausse du nombre de refus d’obtempérer et les conditions d’usage de leurs armes par les forces de l’ordre, c’est un vrai problème, notamment s’agissant de la formation au tir. Ainsi, alors que beaucoup s’accordent à dire que trois tirs par an sont largement insuffisants, les agents n’en effectuent que 2,88 selon les documents budgétaires.
Nous estimons que l’accompagnement et les moyens de formation des milliers de policiers recrutés ces dernières années sont insuffisants. Par conséquent, nous proposons de renforcer les crédits qui y sont consacrés en abondant de 100 millions l’action 06 du programme 176.
Les amendements identiques II-CF240 et II-CF186 sont de repli.
M. Romain Baubry (RN). Dans un souci d'efficacité, nous proposons d’allonger la durée de formation des réservistes d’une semaine afin d’y intégrer le module « Agent de police judiciaire adjoint », souvent suivi plusieurs semaines ou mois après la formation initiale. Cela permettrait aux réservistes d’avoir des bases plus solides pour exercer leurs missions sur la voie publique.
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. La formation, initiale comme continue, est un sujet essentiel, auquel j’ai choisi de consacrer une partie de mon rapport spécial Malgré une réelle progression du nombre d’heures de formation continue individuelle ces dernières années, l’effort reste insuffisant, notamment s’agissant des techniques de sécurité en intervention ou des séances de tir réglementaires – tous les responsables de la police et de la gendarmerie que j’ai pu rencontrer en conviennent. J’ai d’ailleurs déposé un amendement visant à améliorer les indicateurs de la formation continue pour qu’ils reflètent davantage la réalité, et la DGPN a créé un groupe de travail sur ce sujet.
L’amendement II-CF1334 aborde plus spécifiquement la formation des forces de sécurité sur les violences conjugales et les violences sexuelles. Sur ce sujet, nous partions de loin, mais des progrès significatifs ont été accomplis en quelques années, tant dans la formation initiale que dans la formation continue, obligatoire pour tous les agents. Dans ce cadre, les modules de sensibilisation sont généralement dispensés en distanciel. Il est essentiel que nos forces de sécurité intérieures soient sensibilisées et s’impliquent dans ce problème de société.
Améliorer et renforcer la formation, en particulier la formation continue, est un défi majeur : pour avancer sur ce sujet complexe, nous avons besoin de temps. Aussi, je vous demande de bien vouloir retirer tous les amendements au profit de mon amendement II-CF2344, inspiré des recommandations de la Cour des comptes, que je défendrai plus tard. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements II-CF395 de Mme Sandra Regol et II-CF190 de M. Roger Vicot (discussion commune)
Mme Sandra Regol (EcoS). En 2024, vingt et un policiers se sont déjà donné la mort, souvent avec leur arme de service. Cette profession est de plus en plus exposée à des risques psycho-sociaux. Or le Gouvernement réduit de moitié le budget du programme de mobilisation contre le suicide, en raison paraît-il d’un problème technique de répartition des crédits, alors même qu’il dit aimer la police.
Nos policiers méritent mieux, et plutôt que de nous résigner, nous vous proposons des solutions concrètes et peu coûteuses. Cet amendement vise à prendre en charge la consultation de psychologues en dehors du service de soutien psychologique opérationnel (SSPO). Je rappelle qu’on ne compte que 310 psychologues pour 152 000 agents.
M. Roger Vicot (SOC). Dans le même esprit, nous proposons de renforcer le budget du programme de mobilisation contre le suicide en allouant 1,3 million d’euros supplémentaire à l’action 06 du programme 176.
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. Le nombre élevé de suicides parmi les forces de l’ordre est tragique ; loin de moi l’idée de traiter cette question de manière technique. Je connais les risques psycho-sociaux dont j’ai longuement parlé avec les syndicats. Je regrette la baisse des crédits d’action sociale, même s’ils avaient beaucoup augmenté les années précédentes, notamment en 2024.
La DGPN est très engagée dans la prévention des suicides ; elle applique des actions ciblées que nous devons soutenir. J’ai déposé un amendement qui vise à abonder les crédits de l’action sociale.
M. Jocelyn Dessigny (RN). S’il convient de se demander comment accompagner les policiers pour éviter qu’ils ne se suicident, il faut également s’interroger sur les causes du phénomène. Ils se sentent abandonnés par l’État, ils sont confrontés à des manifestants d’extrême gauche de plus en plus violents qui jouissent d’une certaine impunité. Ils luttent contre le trafic de drogue, mais les délinquants sont libérés avant même le retour des policiers au commissariat. Et les décisions de justice rendues en matière de violences sur les policiers et les élus ne sont pas à la hauteur : les délinquants ne vont jamais en prison. Et je ne parle pas de la suradministration.
Tout cela décourage ceux dont la vocation est de rétablir l’ordre dans les rues pour garantir la sécurité de leurs concitoyens, ce qui est le premier devoir de l’État. Il faut donner des moyens aux forces de l’ordre. Nous sommes défavorables à ces deux amendements.
M. le président Éric Coquerel. À l’occasion, je serai intéressé de connaître les références des études scientifiques et sociologiques sur lesquelles vous vous fondez...
Mme Sandra Regol (EcoS). Tant la littérature scientifique que les ouvrages écrits par des agents eux-mêmes, ou encore les missions d’information menées à l’Assemblée aboutissent à la même conclusion : les agents se suicident en raison de la perte de sens de leur métier. Ils ne souhaitent pas seulement être la matraque qui tape ; ils veulent bien rétablir l’ordre, mais ils veulent aussi anticiper les violences et maintenir le lien social.
La perte de sens est également due à la hiérarchie qui stigmatise trop souvent les personnes qui font bien leur travail tout en laissant des personnes ayant commis des infractions faire carrière. L’immense majorité des policières et des policiers font un excellent travail mais ce ne sont pas eux qui sont le plus récompensés.
Tout cela est bien connu, il suffit juste d’ouvrir des livres.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF1835 de M. Romain Baubry
M. Romain Baubry (RN). Une vague de suicide touche en effet la police nationale depuis plus de vingt ans. Or les moyens déployés semblent inefficaces. Je propose qu’on change de méthode et qu’on modifie le plan visant à prévenir les risques psycho-sociaux.
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. Avis défavorable. La DGPN et la DGGN (direction de la gendarmerie nationale) sont très engagées dans la prévention de ces risques – il existe des cellules d’écoute, une ligne d’écoute joignable vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept est dédiée à ce phénomène. Par ailleurs, les actions de prévention se renforceront dans les années à venir.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF663 de M. Romain Baubry
M. Romain Baubry (RN). Si les forces de l’ordre subissent des violences toujours plus graves et plus fréquentes, leur famille n’est pas non plus épargnée. Les agents doivent parfois déménager, à leurs frais, à la suite d’agressions à leur domicile par des personnes qui ne reculent devant rien, car l’institution n’a pas les moyens de les mettre à l’abri.
Cet amendement vise à créer un fonds de soutien dédié aux familles des agents victimes de délits et de crimes liés à leur fonction.
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable. Le ministère de l’intérieur n’ignore pas les familles des forces de l’ordre ; au contraire, il déploie déjà une série d’actions très concrètes à leur destination.
Des conventions triennales, conclues avec de nombreuses organisations, dont la maison de la gendarmerie, fondation reconnue d’utilité publique qui effectue un travail remarquable en complément de l’action sociale, ont été renouvelées à la fin de l’année 2023.
Je vous invite à voter mon amendement qui vise à doter de ressources supplémentaires l’action sociale du ministère de l’intérieur.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF1325 et II-CF1279 de Mme Gabrielle Cathala (discussion commune)
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. Ces amendements concernent l’accueil des victimes de violences conjugales et sexuelles dans les commissariats et les brigades de gendarmerie.
Depuis plusieurs années, des outils – référents accueil, groupes d’enquêteurs spécialisés, dépôt de plainte en ligne ou hors les murs, pack nouveau départ – sont déployés et renforcés depuis pour améliorer l’accueil dans ces structures. Il faut rendre hommage à l’effort considérable consenti afin que la parole de ces publics vulnérables soit entendue et prise en considération.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
M. le président Éric Coquerel. Je soutiens ces amendements. J’en profite pour rendre hommage à l’action menée par le commissariat du XXe arrondissement de Paris, qui a aménagé une cellule en chambre pour éviter aux victimes de violences conjugales de rentrer chez elles après avoir porté plainte.
La commission adopte l’amendement II-CF1325.
L’amendement II-CF1279 tombe.
Suivant les avis de la rapporteure spéciale, la commission rejette successivement les amendements II-CF668 de M. Michaël Taverne, II-CF671 de Mme Florence Goulet, II-CF1223 et II-CF1240 de Mme Élisa Martin.
Amendements II-CF1233 de M. Damien Maudet et II-CF1608 de M. Pouria Amirshahi (discussion commune)
Mme Sandra Regol (EcoS). Le 10 octobre 2023, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a adopté un rapport qui appelle la France à mener une réforme des corps d’inspection de la police et la gendarmerie, demande soutenue de longue date par la gauche. Depuis deux ans, l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) ne rend pas son rapport dans les temps, contrairement à l’Inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN). Pour cette année, il n’est toujours pas publié, alors qu’il est censé l’être fin juillet !
Nous proposons donc que les missions de l’IGPN soient transférées à la Défenseure des droits, autorité administrative indépendante, afin d’accélérer le traitement des dossiers des plaignants et des plaignantes, civils ou policiers.
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. L’IGPN est, comme toutes les inspections générales, rattachée au ministère concerné ; mais c’est une instance qui agit en toute indépendance et qui fait preuve d’un grand professionnalisme. Depuis peu, elle est présidée par une magistrate, ce qui est un gage supplémentaire d’indépendance. Par ailleurs, le Conseil d’État a réaffirmé dans une décision du mois de mars 2022 que l’indépendance des inspections générales était garantie par les textes en vigueur. Avis défavorable.
Mme Sandra Regol (EcoS). Ce que j’ai dit, c’est que les rapports n’étaient pas publiés dans les temps. Je m’en étonne. J’ai passé une journée en immersion avec les agents de l’IGPN et j’ai pu constater qu’ils sont tout à fait dévoués. Néanmoins, s’ils ne peuvent accomplir correctement leur travail, ils rendront tous les ans leur rapport en retard. Renforcer la transparence de l’institution pour améliorer le travail de ses agents n’est pas une demande déplacée.
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. Ce sujet dépasse le cadre de l’examen des crédits budgétaires. Cela étant, je m’engage à mentionner ce retard, une fois que je l’aurais vérifié, dans mon rapport spécial.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements II-CF390 de Mme Sandra Regol, II-CF2614 de Mme Sophie Pantel et II-CF661 de M. Julien Rancoule (discussion commune)
Mme Sandra Regol (EcoS). Depuis quelques années, le nombre de camions-citernes feux de forêt (CCF) diminue alors que le risque d’incendie augmente. Les moyens alloués à nos services d’incendie et de secours (SIS) doivent donc être adaptés. Nous proposons d’augmenter les crédits dédiés à la sécurité civile, afin d’acquérir 800 CCF.
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale (Sécurité civile). Les CCF ont été au cœur des pactes capacitaires ces dernières années. Une enveloppe de 150 millions d’euros a été ouverte en 2023, ce qui a permis de signer 101 conventions avec les SIS et de financer près de 1 100 camions.
Vous proposez une hausse de 224 millions d’euros, alors qu’il nous paraît nécessaire de lisser l’effort dans le temps pour ne pas empiéter sur d’autres investissements. Je vous propose donc de retirer votre amendement au profit de l’amendement II-CF2614, amendement d’appel de vos deux rapporteurs spéciaux qui vise à pérenniser ces pactes et qui reconduit un dixième de l’enveloppe, soit 15 millions d’euros. Le risque d’inondation doit être pris en compte, notamment en renforçant les moyens de pompage lourd. Ces sujets devront être abordés avec tous les acteurs dans le cadre du Beauvau de la sécurité civile.
M. le président Éric Coquerel. Les mesures budgétaires en faveur des départements soumis à ce risque prévues par la loi de juillet 2023 sur la lutte contre le risque incendie ont-elles été appliquées ?
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. Des pactes capacitaires ont été signés et une enveloppe de 150 millions a été ouverte. Elle sera répartie entre les différents SIS.
M. Jean-René Cazeneuve (EPR). Il est faux de dire que les moyens capacitaires ont baissé. Le SIS du Gers a salué l’effort consenti par l’État. Nous soutenons les SIS, qui sont essentiels pour les territoires, dont les moyens doivent peut-être être augmentés.
M. Julien Rancoule (RN). Mon amendement vise à renforcer de 5 millions le budget dédié aux pactes capacitaires. Madame Regol, le budget que vous proposez est largement surestimé : le pacte capacitaire permet de dessiner une stratégie nationale, mais l’État n’a pas vocation à se substituer aux SIS, à qui il incombe de fournir les équipements. Nous soutiendrons l’amendement II-CF2614.
Mme Sandra Regol (EcoS). Comme un CCF coûte 280 000 euros, la livraison de milliers de camions représente une enveloppe importante. Par ailleurs, les frais de fonctionnement déjà importants de ces camions – fioul, chauffage des hangars pour éviter le gel des liquides – sont en constante augmentation alors même que les interventions se multiplient. Il ne s’agit pas de racheter l’ensemble du matériel.
Je retire mon amendement au profit de l’amendement II-CF2614. Néanmoins, c’est une goutte d’eau eu égard aux besoins des SIS, qui ne disposent toujours pas, par exemple, de pompes en cas d’inondation ni des moyens aériens prévus dans la Lopmi.
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. Je connais bien le coût des CCF pour avoir été présidente d’un SIS. Dans le cadre des pactes capacitaires, certains équipements ont été imposés puisqu’il était nécessaire d’harmoniser le matériel disponible.
Notre amendement est un amendement d’appel au sein d’une enveloppe budgétaire globale, qui renvoie au Beauvau, lors duquel il faudra travailler avec tous les acteurs, notamment s’agissant de la lutte contre les inondations. La première vague de pactes capacitaires, qui ont permis d’augmenter de 20 à 25 % les programmes pluriannuels d’investissement des SIS, est une bonne chose. Nous devrons en tirer les conséquences lors de la signature de la deuxième vague.
L’amendement II-CF390 est retiré.
La commission adopte l’amendement II-CF2614.
L’amendement II-CF661 tombe.
Amendements II-CF2532 de Mme Sophie Pantel et II-CF660 de M. Julien Rancoule (discussion commune)
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. Notre flotte vieillissante est composée de vingt-trois avions et de trente-sept hélicoptères. Lors de la saison des feux, plusieurs hélicoptères ne peuvent pas voler en raison de problèmes de maintenance. Pour compenser le manque de moyens, l’État a donc décidé de louer des appareils, pour un montant de 7 millions d’euros en 2024 et de 30 millions d’euros pour 2025.
La Lopmi prévoit de renouveler la flotte d’hélicoptères EC145 par les nouveaux H145 et d’acquérir des bombardiers d’eau, les Canadair DHC-515. Nous doutons de la capacité du constructeur canadien De Havilland à fournir ces équipements à la France, eu égard aux besoins du continent américain, victime de mégafeux. En outre, cette année, le décret d’annulation a annulé 52,8 millions d’euros de crédits, ce qui retarde la livraison des deux appareils pour lesquels un contrat avait été signé.
La question de la souveraineté industrielle de la France s’agissant des moyens aériens se pose. Nous devons être attentifs à trois projets français ou européens car ils permettraient de répondre à nos besoins dans les années futures.
L’amendement II-CF2532 propose une hausse des crédits du programme 161 afin notamment de compenser l’annulation de 52,8 millions d’euros.
M. Julien Rancoule (RN). Dans le même esprit, mon amendement vise à augmenter les crédits de l’action 13 de 50 millions d’euros afin d’acquérir des avions bombardiers d’eau.
En 2022, Emmanuel Macron s’était engagé à ce qu’en 2027 notre flotte soit totalement renouvelée, et passe de douze à seize appareils. Nous n’atteindrons jamais cet objectif. Et ce projet de loi de finances annule la livraison de deux appareils sur les quatre commandés !
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. Deux seulement avaient été commandés. Demande de retrait, au profit du nôtre.
L’amendement II-CF660 est retiré.
La commission rejette l’amendement II-CF2532.
Amendement II-CF389 de Mme Sandra Regol
Mme Sandra Regol (EcoS). Dans la même logique, il s’agit de renforcer et de diversifier les moyens aériens. Ce projet de loi de finances renforce la tendance à louer du matériel plutôt qu’à investir dans de nouveaux équipements.
Contre l’avis de la rapporteure spéciale, la commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF2551 de Mme Sophie Pantel et II-CF386 de Mme Sandra Regol (discussion commune)
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. Nous proposons le lancement d’un plan pluriannuel d’investissement concernant des hélicoptères lourds bombardiers d’eau de type Super Puma. Une augmentation de 50 millions d’euros des crédits du programme 161 permettrait de réduire le coût des locations qui sont effectuées chaque année pour compenser le manque de moyens héliportés.
Avis favorable également à l’amendement de Mme Regol.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements identiques II-CF243 de la commission des lois et II-CF387 de Mme Sandra Regol, amendement II-CF2537 de M. Damien Maudet (discussion commune)
Mme Sandra Regol (EcoS). Les sapeurs-pompiers sont confrontés à des situations tellement difficiles qu’ils sont de plus en plus nombreux à exprimer leur besoin d’un accompagnement psychologique. Certains SIS accomplissent un travail remarquable en la matière. Je pense en particulier à celui de l’Orne, qui a créé, à l’été 2022, une unité de soutien psychologique. Mais la situation varie selon les territoires. Par l’amendement II-CF387, adopté par la commission des lois, nous proposons de remédier à ces disparités en instaurant le remboursement intégral des séances d’accompagnement psychologique dont bénéficient les sapeurs-pompiers.
M. Damien Maudet, rapporteur spécial. La question soulevée par Mme Regol est essentielle. Je l’invite cependant à retirer les amendements II-CF243 et II-CF387 au profit de notre amendement II-AC2537, par lequel nous proposons un montant plus précis.
Mme Sandra Regol (EcoS). Les budgets ne sont absolument pas les mêmes, mais, pour ne pas ralentir nos travaux, j’accepte de retirer les amendements.
Les amendements II-CF243 et II-CF387 sont retirés.
La commission rejette l’amendement II-CF2537.
Amendement II-CF392 de Mme Sandra Regol
Mme Sandra Regol (EcoS). Il s’agit d’adapter notre sécurité civile au risque inondation en permettant aux sapeurs-pompiers de se doter des moyens de pompage lourds qui ont fait tellement défaut lors des inondations qui ont frappé les Hauts-de-France l’hiver dernier. Cet investissement est vital : ce qui s’est passé récemment dans la région de Valence pourrait se répéter. On ne peut pas raboter les budgets alloués à la transition climatique et renoncer à équiper les sapeurs-pompiers, qui sont notre dernier rempart, des moyens adéquats pour lutter contre les inondations.
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. Demande de retrait. Cet amendement est satisfait par l’adoption du II-CF2614.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF391 de Mme Sandra Regol
Mme Sandra Regol (EcoS). Nous proposons d’investir dans des équipements assurant une meilleure protection des sapeurs-pompiers qui, exposés à de nombreuses substances toxiques, sont de plus en plus souvent atteints de maladies graves, notamment de cancers.
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. Le coût de cette mesure est de 30 millions d’euros, mais il s’agit d’un véritable enjeu. Nous nous en remettons à la sagesse de la commission.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF393 de Mme Sandra Regol
Mme Sandra Regol (EcoS). Nous proposons que l’État contribue au remplacement par les SIS des produits retardateurs de feu qui contiennent des Pfas, c’est-à-dire des polluants éternels, par des mousses qui n’en contiennent aucun. Certains SIS, comme celui du Bas-Rhin, ont opté pour une telle substitution, qui est également envisagée dans d’autres départements. Cette démarche permet de protéger la santé des sapeurs-pompiers et la nôtre.
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. Il s’agit, là encore, d’un véritable problème. Sagesse.
M. Julien Rancoule (RN). Autant l’amendement II-CF391 me paraissait pertinent dans la mesure où certains SIS n’ont pas les moyens d’acquérir de nouvelles tenues plus protectrices, autant celui-ci me semble moins approprié car il s’agit ici de consommables, qui doivent être renouvelés quasiment chaque année, et qu’il revient aux SIS, et non à l’État, d’acquérir.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF564 et II-CF566 de Mme Mereana Reid Arbelot (discussion commune)
M. Damien Maudet, rapporteur spécial. Favorable à l’amendement II-CF566. Demande de retrait pour le II-CF564.
L’amendement II-CF564 est retiré.
La commission adopte l’amendement II-CF566.
Amendements II-CF659 de M. Julien Rancoule et II-CF2534 de Mme Sophie Pantel (discussion commune)
M. Julien Rancoule (RN). Nous proposons d’encourager le Gouvernement à investir, en matière de sécurité civile, dans les innovations françaises et européennes. Je pense aux solutions développées, d’une part, par la start-up française Hynaero, qui conçoit un avion amphibie, d’autre part, par Kepplair Evolution, qui permettra de transformer un avion en bombardier d’eau, solutions qui pourront aboutir d’ici au début des années 2030. Il s’agit, me semble-t-il, d’un enjeu transpartisan.
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. La recherche est un enjeu important. Nous vous proposons de retirer votre amendement au profit du II-CF2534, lequel vise à créer un fonds de soutien à la recherche et à l’innovation en matière de sécurité civile qui pourrait financer non seulement les projets aéronautiques que vous évoquez, mais aussi la recherche sur les produits retardants ou le recours à l’intelligence artificielle, par exemple.
M. Julien Rancoule (RN). Nos deux amendements me semblent complémentaires. Le mien est financièrement plus ambitieux que le vôtre, puisque je propose un montant, non pas de 1 million d’euros, mais de 5 millions, qui me paraît plus adapté à des projets tels que celui de Hynaero, qui a procédé à une levée de fonds de 15 millions pour développer sa solution. En revanche, votre amendement est intéressant en ce qu’il prévoit des investissements dans d’autres sujets d’innovation en matière de sécurité civile.
La commission rejette l’amendement II-CF659.
Elle adopte l’amendement II-CF2534.
Amendements II-CF2531 de M. Damien Maudet
M. Damien Maudet, rapporteur spécial. Nous proposons d’augmenter la contribution de l’État au budget de la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP), qui, en l’état, serait contrainte, pour couvrir ses dépenses en 2025, de réduire ses effectifs, ce qui n’est pas acceptable.
M. le président Éric Coquerel. Je confirme ce que dit le rapporteur spécial.
La commission adopte l’amendement.
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. Il est vrai qu’il faut permettre à la BSPP de boucler son budget pour 2025. Mais, si l’État participe à hauteur de 25 % à son budget de fonctionnement, pour ce qui est de l’investissement, ce sont les collectivités qui la financent. Il faudrait donc que nous prenions le temps d’approfondir cette question.
Amendement II-CF672 de M. Julien Rancoule
M. Julien Rancoule (RN). Il s’agit d’augmenter les crédits du programme 161 afin de financer une campagne de prévention contre les incendies domestiques. Les feux d’habitation font, chaque année, entre 200 et 500 morts, ainsi que 10 000 blessés. Or ces drames pourraient souvent être évités si nos concitoyens étaient mieux informés sur les gestes de prévention, comme l’installation d’un détecteur de fumée dans son logement, par exemple.
M. Damien Maudet, rapporteur spécial. Avis défavorable. Ce type de campagne de prévention de relève pas du programme 161. L’action Prévention et gestion de crises porte en effet non pas sur ce type de prévention, mais sur les moyens d’alerte, de veille et de solidarité nationale.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF2535 de Mme Sophie Pantel et II-CF658 de M. Julien Rancoule
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. Nous proposons d’augmenter la subvention de l’État à l’Agence du numérique de la sécurité civile (ANSC) au titre du financement du projet NexSIS 18-112. En effet, un certain nombre de SIS n’ont pas engagé de démarche pour participer au projet et ne versent donc pas de subventions à l’ANSC, de sorte que celui-ci risque de ne pas prendre corps rapidement. Or chaque année de retard engendrera un coût supplémentaire de 4 à 5 millions d’euros.
Les professionnels concernés estiment que le NexSIS 18-112 est un bon outil, mais ils remettent en cause sa gouvernance, au motif que les SIS devraient y être davantage associés et pouvoir assumer les charges d’investissement, mais aussi et surtout de fonctionnement du système.
M. Julien Rancoule (RN). Notre amendement a également pour objet d’accélérer le développement de NexSIS 18-112, mais nous proposons de n’allouer, à cette fin, que 3 millions d’euros à l’ANSC. Je tiens, à ce propos, à souligner une aberration. En effet, trois agences sont chargées de développer trois projets distincts, qui sont pourtant complémentaires, voire redondants. Ainsi, l’ANSC conçoit un logiciel destiné aux sapeurs-pompiers, une autre agence développe le sien propre pour le Samu – or il devrait être possible de créer une plateforme commune et de rationaliser les coûts – et l’Agence des communications mobiles opérationnelles de sécurité et de secours (Acmoss) est chargée du Réseau Radio du Futur. Il y a là une source d’économies substantielles qui pourraient être réaffectées au développement de NexSIS 18-112.
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. Nous partageons votre constat. C’est la raison pour laquelle nous demanderons par un autre amendement un rapport d’étude sur le mode de financement du projet.
La commission adopte l’amendement II-CF2535.
L’amendement II-CF658 tombe.
Amendement II-CF1837 de M. Romain Baubry
M. Julien Rancoule (RN). Il s’agit de permettre à chacun des centres d’incendie et de secours de s’équiper de stylos auto-injecteurs d’adrénaline et aux sapeurs-pompiers d’être formés à leur utilisation, comme ils y sont autorisés depuis la loi Matras du 25 novembre 2021.
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. Avis défavorable. Même si la loi Matras autorise les sapeurs-pompiers à utiliser ces stylos, cette question relève, selon nous, de la compétence des services de santé et de secours médical (SSSM) et des pharmacies à usage intérieur (PUI), dans le cadre des investissements prévus par les SIS.
M. Julien Rancoule (RN). Vous admettrez que les moyens des SIS n’ont pas augmenté depuis la loi Matras. On leur donne des compétences supplémentaires et on alourdit leurs coûts de formation et d’équipement sans pour autant leur permettre de les assumer pratiquement. Sur des questions de ce type, il nous faut travailler en bonne intelligence. En l’espèce, nous sommes certainement d’accord sur le fond : vous émettez un avis défavorable par sectarisme.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CF2530 de Mme Sophie Pantel et II-CF2566 de M. Damien Maudet (discussion commune)
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. Cet amendement d’appel vise à créer un fonds national de soutien au volontariat des sapeurs-pompiers, qui pourrait impulser le financement de campagnes nationales afin de renforcer l’attractivité du volontariat. Celui-ci est en effet menacé : on constate une perte de sens de l’engagement, liée notamment à l’augmentation des interventions de secours à personne. Les sapeurs-pompiers ne s’engagent pas pour assumer les défaillances du système de santé.
Par ailleurs, la directive européenne sur le temps de travail suscite des inquiétudes quant au statut de volontaire, même si un travail est en cours, notamment avec l’ancien président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, pour définir la notion de volontariat au niveau de l’Union européenne.
M. Damien Maudet, rapporteur spécial. La Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France évalue à environ 50 000 le nombre des sapeurs-pompiers volontaires supplémentaires qu’il faut recruter d’ici à 2027. Nous n’y parviendrons que si nous organisons des campagnes efficaces. Je précise que c’est en journée, la semaine, que le manque de volontaires se fait le plus cruellement sentir, car les gens travaillent.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF2978 de M. Damien Maudet
M. Damien Maudet, rapporteur spécial. Sophie Pantel et moi n’étions pas d’accord sur cet amendement d’appel qui vise à alerter la représentation nationale sur la nécessité d’organiser une campagne de recrutement de sapeurs-pompiers professionnels, notamment dans certains secteurs – je pense à ma circonscription –, où la présence d’au moins un ou deux professionnels est parfois nécessaire pour effectuer des interventions.
M. Julien Rancoule (RN). Je partage votre volonté d’embaucher davantage de sapeurs-pompiers professionnels, mais c’est aux SIS, et non à l’État, de consentir les efforts nécessaires – ce qui soulève une fois de plus la question du financement de ces structures. Il convient de repenser notre modèle, qui ne semble plus adapté, plutôt que d’organiser une campagne de recrutement : le problème n’est pas lié à la rareté de la ressource humaine, car un grand nombre des personnes reçues au concours n’obtiennent pas de poste.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF2533 de M. Damien Maudet, amendements identiques II-CF245 de la commission des lois et II-CF657 de M. Julien Rancoule, amendements II-CF246 et II-CF255 de la commission des lois (discussion commune)
M. Damien Maudet, rapporteur spécial. Nous proposons d’augmenter la subvention de l’État aux associations concourant à des missions de sécurité civile, qui ne perçoivent, pour certaines d’entre elles, que 20 ou 50 centimes par bénévole, ce qui est très peu au regard du nombre des missions qu’elles remplissent – je pense notamment à leur mobilisation dans le cadre des Jeux olympiques et paralympiques.
M. Julien Rancoule (RN). L’amendement II-CF657, qui a été adopté par la commission des lois, a le même objet. La quinzaine d’associations concourant à des missions de sécurité civile doivent se partager une enveloppe de 160 000 euros, soit l’équivalent, pour chacune, d’une subvention municipale. Un tel montant n’est évidemment pas à la hauteur de l’enjeu. On est bien contents de pouvoir solliciter ces associations lors d’événements tels que les Jeux ou pour former la population ; on peut donc faire l’effort d’augmenter le montant de l’enveloppe qui leur est allouée.
La commission adopte l’amendement II-CF2533.
Les amendements II-CF245, II-CF657 et II-CF246 et II-CF255 tombent.
M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux explications de vote.
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. Ce projet de budget n’est pas entièrement satisfaisant : il baisse au moment où les besoins augmentent sous l’effet du changement climatique. Toutefois, des amendements relatifs aux pactes capacitaires, à la recherche ou au soutien aux associations de sécurité civile agréées ayant été adoptés, je voterai pour l’adoption des crédits de la mission Sécurités.
M. Damien Maudet, rapporteur spécial. Si nous avons obtenu de nombreuses victoires essentielles en matière de sécurité civile, j’estime néanmoins, comme mon groupe, que de nombreuses questions relatives à la police notamment méritent d’être revues. Nous ne pourrons donc pas voter en faveur de l’adoption des crédits de la mission.
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. Je suis, pour ma part, favorable à l’adoption des crédits de la mission.
M. Julien Rancoule (RN). S’agissant de la mission Sécurités dans son ensemble, nous ne pouvons pas être satisfaits, car les engagements ne sont pas tenus.
En ce qui concerne la sécurité civile, nous avons pu avancer sur certains dossiers. Je regrette cependant que certains de nos amendements aient été rejetés par sectarisme alors qu’ils allaient dans le bon sens et que nous pourrions nous accorder sur certains points. En témoigne le fait que le rapporteur spécial a déposé des amendements identiques à ceux que j’avais défendus devant la commission des lois, notamment sur les associations agréées de sécurité civile. C’est manifestement qu’il estime que nous avons de bonnes idées. En matière de sécurité civile, nous pourrions travailler en bonne intelligence, de manière transpartisane.
M. Jean-René Cazeneuve (EPR). Je salue les crédits de la mission Sécurités, qui respectent les engagements pris par les ministres Darmanin et Lecornu dans le cadre de leurs lois de programmation respectives : l’augmentation très significative des moyens se traduit sur le terrain, que ce soit pour la police, la gendarmerie ou les pompiers. Nous faisons beaucoup mieux que les majorités précédentes, qui ont baissé les moyens des forces de l’ordre – que, contrairement à certains responsables politiques, nous ne stigmatisons pas.
Certaines mesures modifient le texte initial, mais nous voterons pour les crédits de la mission Sécurités, compte tenu de l’augmentation significative des moyens qui lui sont alloués.
Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). Je veux tout d’abord saluer le travail des agents de la police et de la gendarmerie.
Dans le document qui détaille les dépenses et les objectifs poursuivis en 2025, plusieurs éléments nous gênent : le mot « ordre » apparaît 103 fois, le mot « désescalade » une seule fois, et les mots « paix » et « État de droit » jamais.
Aucune information n’est donnée sur le nombre d’heures de formation initiale consacrées à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles que suivront les policiers et les gendarmes. Le module existe, mais il est insuffisant et ne fait partie de l’évaluation lors de l’examen final. Quant à l’amendement que j’avais déposé pour renforcer cette formation et la rendre obligatoire a été rejeté, comme notre amendement visant à former les policiers à la lutte contre le racisme et les discriminations.
Par ailleurs, le budget consacré à l’achat d’armes mutilantes – lanceurs de balles de défense, grenades, tasers… – reste bien trop important et n’est pas transparent puisqu’à la différence du document publié l’an dernier, le bleu budgétaire est insuffisamment détaillé. Étonnamment, le budget alloué à la prévention des suicides, toujours nombreux chez les policiers, est en baisse. Enfin, on observe une suppression inédite de 5 000 postes dans la police judiciaire.
Malgré les victoires que nous avons remportées sur le budget de la sécurité civile, nous ne pourrons pas approuver les crédits de la mission Sécurités.
Mme Céline Thiébault-Martinez (SOC). Si des amendements ont été adoptés sur le budget de la sécurité civile, de nombreuses questions n’ont pas été traitées. Aussi le groupe Socialistes s’abstiendra-t-il.
M. Ian Boucard (DR). Nous voterons bien entendu en faveur de l’adoption des crédits de la mission Sécurités, qui confortent les engagements pris dans le cadre de la loi de programmation et d’orientation du ministère de l’intérieur. Madame Cathala, il est vrai que le mot « ordre » apparaît à de nombreuses reprises dans le bleu budgétaire, et pour cause : la police et la gendarmerie, que nous défendons, sont des forces de l’ordre.
M. le président Éric Coquerel. On parle aussi de gardiens de la paix !
M. Ian Boucard (DR). Vous ne serez pas étonné, monsieur le président, que nous n’utilisions pas la même sémantique.
Force est de constater qu’à l’issue de l’examen de ce budget, nous avons adopté 512 millions de dépenses supplémentaires. Je regrette, à ce propos, les estimations au doigt mouillé retenues par certains groupes : on a pu observer que, pour des propositions similaires, l’estimation des rapporteurs spéciaux était beaucoup plus précise et, surtout, beaucoup plus basse. Je salue donc leur travail et je les remercie pour leurs explications, même s’ils appartiennent à des groupes très différents.
Le groupe Droite républicaine votera en faveur de l’adoption des crédits de la mission Sécurités.
Mme Sandra Regol (EcoS). Il ressort des programmes relatifs à la police et à la gendarmerie nationale qu’aucun effort n’est fait en matière de formation, que les crédits se rapportant à la police judiciaire continuent de s’effondrer, que rien n’est fait pour lutter contre les suicides d’agents… Tous les amendements que nous avons proposés sont restés lettre morte.
S’agissant de la sécurité civile, nous avons obtenu quelques petites évolutions, qui ne sont toutefois pas à la hauteur des enjeux. J’entends les rapporteurs lorsqu’ils nous répondent que nous n’avons pas les moyens de faire davantage. C’est précisément ce que je dénonce, car le coût de l’inaction est bien plus élevé que celui de l’action. Bref, le groupe Écologiste et social ne peut pas soutenir ce projet de budget.
Mme Sophie Mette (Dem). Je tiens tout d’abord à remercier les rapporteurs spéciaux pour leur travail. Nous pouvons être satisfaits qu’après les budgets précédents, qui étaient en augmentation, le projet de budget pour 2025 soit également en hausse. Nous voterons donc en faveur de l’adoption des crédits de la mission Sécurités.
Mme Félicie Gérard (HOR). Le budget de la mission Sécurités pour 2025 traduit un engagement fort du Gouvernement en faveur de la sécurité des Français. Dans un contexte de contrainte budgétaire, son augmentation de plus de 3 % en crédits de paiement témoigne de la priorité accordée à la protection des citoyens. Nous saluons, à ce propos, le travail des forces de l’ordre, dont l’efficacité a encore été démontrée lors des Jeux olympiques.
La sécurité est une des priorités de nos concitoyens, à laquelle nous ne pouvons que souscrire. Puisque les crédits examinés cet après-midi nous paraissent répondre efficacement à cette préoccupation, le groupe Horizons et apparentés votera pour leur adoption.
M. Charles de Courson (LIOT). Notre groupe, qui avait voté en faveur de la loi de programmation du ministère de l’intérieur, se prononcera en faveur de l’adoption des crédits de la mission Sécurités, tout en soulignant le véritable problème de financement des SIS.
La commission adopte les crédits de la mission Sécurités modifiés.
Article 45 et état G : Objectifs et indicateurs de performance
L’amendement II-CF1431 de M. Damien Maudet est retiré.
Suivant l’avis de la rapporteure spéciale, la commission rejette successivement les amendements II-CF1380 et II-CF1479 de Mme Élisa Martin.
Amendement II-CF2344 de Mme Constance Le Grip
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. Il propose trois nouveaux indicateurs de performance pour mieux comprendre les nécessités en matière de formation : le nombre d’officiers de police judiciaires, le nombre d’agents à jour de leurs obligations de formation aux techniques de sécurité en intervention (TSI) et le nombre d’agents à jour de leurs obligations en matière d’entraînement au tir, rapportés au nombre d’actifs.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF208 de M. Paul Christophle
Mme Céline Thiébault-Martinez (SOC). Il propose un indicateur de mesure de l’évolution du nombre de procédures moyennes par agent pour mieux prendre en compte le niveau d’activité dans l’allocation des effectifs de police.
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. Le sujet a été plusieurs fois soulevé par la Cour des comptes. La DGPN y travaille et la création d’un corps d’assistants d’enquête devrait aider à résorber le stock de procédures judiciaires. Sagesse.
La commission adopte l’amendement.
Après l’article 64
Amendement II-CF2343 de Mme Constance Le Grip.
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. Compte tenu des prérequis physiques forts pour nombre d’emplois, la police nationale a des difficultés à atteindre le ratio obligatoire de 6 % de personnels en situation de handicap. Elle doit chaque année payer une pénalité de 30 millions d’euros. Je propose un rapport pour étudier une possible évolution du mode de calcul afin de diminuer le montant de l’amende, ce qui dégagerait des ressources pour financer l’action sociale du ministère de l’intérieur.
La commission adopte l’amendement.
Suivant l’avis de la rapporteure spéciale, elle rejette successivement les amendements II-CF247 de la commission des lois et II-CF1516 de Mme Élisa Martin.
Amendement II-CF2345 de Mme Constance Le Grip
Mme Constance Le Grip, rapporteure spéciale. C’est une demande de rapport détaillant les coûts de la formation initiale et continue des policiers.
La commission adopte l’amendement.
Suivant l’avis de la rapporteure spéciale, la commission rejette l’amendement II-CF1526 de M. Damien Maudet.
Amendement II-CF2540 de Mme Sophie Pantel
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. C’est une demande un rapport sur les conséquences financières du renouvellement de la flotte des avions et des hélicoptères de la sécurité civile.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF2539 de Mme Sophie Pantel
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. Il demande un rapport sur le mode de financement du projet NexSIS 18-112, son coût pour les services d’incendie et de secours et les conséquences des retards de son développement et de son déploiement.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF2538 et II-CF2541 de M. Damien Maudet
M. Damien Maudet, rapporteur spécial. L’amendement II-CF2538 demande un rapport sur le financement par l’État de la prise en charge des risques de santé chez les sapeurs-pompiers et leur exposition aux risques professionnels. L’amendement II-CF2541 demande un rapport sur le coût pour les finances publiques de la prise en charge par les services d’incendie et de secours des carences ambulancières.
Tout à l’heure, M. Rancoule a dit que nous avions pris ses idées sans voter ses amendements. Je lui répondrai qu’en tant que commissaires aux finances, nous n’avions pas à déposer d’amendements en commission des lois. Par ailleurs, notre agenda d’auditions était plus chargé que jamais pour le programme Sécurité civile. Je signalerai également qu’à part lui, qui ne pouvait pas voter, aucun membre du Rassemblement national n’était présent en commission, si bien que son propre groupe n’a voté aucun de ses amendements.
Mme Sophie Pantel, rapporteure spéciale. J’ajoute que le RN n’a jamais voté les moyens supplémentaires proposés pour le financement des SIS.
Suivant l’avis de la rapporteure spéciale, la commission rejette successivement les amendements.
Article 44 et état D : Crédits des comptes d’affectation spéciale et des comptes de concours financiers
Puis la commission adopte les crédits du compte d’affectation spéciale Contrôle de la circulation et du stationnement routiers non modifiés.
Présidence de Mme Véronique Louwagie, vice-présidente de la commission
Mission Immigration, asile et intégration (MM. Mathieu Lefèvre et Charles Rodwell, rapporteurs spéciaux)
M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial. Le projet de budget de la mission Immigration, asile et intégration s’établit à 1,73 milliard d’euros en autorisations d’engagement et à 2,5 milliards d’euros en crédits de paiement pour 2025. C’est une diminution assez sensible d’environ 35 millions d’euros en AE et de 108 millions d’euros en CP, même si la trajectoire respecte globalement la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi).
Le projet de budget présente plusieurs points positifs. Il intègre en budgétisation initiale les prévisions de dépenses de l’allocation pour demandeur d’asile (ADA) que reçoivent les bénéficiaires de la protection temporaire, notamment les Ukrainiens. Par ailleurs, les effectifs de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) connaissent une augmentation de 29 emplois équivalents temps plein (ETP) pour réduire les délais de paiement. Je salue à cette occasion l’ensemble des agents qui sont parvenus à réduire les délais de traitement à quatre mois, contre huit il y a quelques années.
Je relève toutefois deux points de vigilance. Premièrement, la réduction du nombre de places au sein du dispositif national d’accueil peut se comprendre par le tassement de la demande d’asile, par une meilleure lutte contre les indus et par la réduction des délais de traitement de la demande d’asile grâce à l’Ofpra, mais aussi grâce à la loi sur l’immigration, qui comprenait un volet relatif à la Cour nationale du droit d’asile (CNDA). Cependant, les prévisions ne me semblent pas suffisantes pour assurer l’accueil des bénéficiaires ukrainiens de la production temporaire.
Le second point de vigilance, que Charles Rodwell détaillera plus avant, porte sur la réduction drastique des crédits d’investissement dédiés au nombre de places en centre de rétention administrative (CRA). Si nous votons les crédits en l’état, il n’y aura aucun investissement en 2025, à rebours des prévisions du prédécesseur de M. Retailleau, qui souhaitait la création de 3 000 places de rétention administrative en 2027, et en contradiction avec la volonté du ministre actuel de prolonger à 210 jours la durée de rétention administrative pour les personnes les plus dangereuses pour l’ordre public – volonté que nous saluons. Sans effort budgétaire pour créer des places, il ne sert à rien d’augmenter le délai de rétention.
M. Charles Rodwell, rapporteur spécial. Je souscris aux propos qui viennent d’être tenus par Mathieu Lefèvre. Le budget doit répondre aux objectifs fixés par les lois que les majorités successives ont votées ces dernières années sous la présidence d’Emmanuel Macron et le ministère de Gérald Darmanin, à commencer par la loi de programmation du ministère de l’intérieur et la loi sur l’immigration.
Les amendements que nous avons proposés visent à répondre à un principe : accueillir moins pour accueillir mieux. C’est ce que les Français attendent légitimement et c’est aussi le seul moyen d’accueillir dignement celles et ceux que nous choisissons d’accueillir. Nous alertons toutefois le Gouvernement sur le décalage entre certaines annonces et les politiques réellement appliquées. Le principal sujet de préoccupation est l’objectif de construction de 3 000 places en centre de rétention administrative en 2027, que le budget ne permet pas d’atteindre. Nous avons donc déposé un amendement visant à rétablir la trajectoire initiale en assumant des économies sur d’autres budgets de la mission et nous appelons le Gouvernement à lever le gage à la suite des annonces publiques faites par le Premier ministre et le ministre de l’intérieur.
Article 42 et état B : Crédits du budget général
Amendements II-CF710 de M. Jocelyn Dessigny et II-CF681 de M. Matthias Renault (discussion commune)
M. Yoann Gillet (RN). Dans un objectif gouvernemental de maîtrise des dépenses publiques et eu égard à la pression migratoire qui s’exerce sur le pays, l’amendement propose de supprimer les subventions versées annuellement par l’État aux 1 350 associations qui agissent dans les trois domaines de la mission. La prise en charge du droit d’asile en France, de même que la politique d’intégration, a été partiellement déléguée par l’État aux opérateurs associatifs. Si l’État veut reprendre le contrôle de ses frontières et de ses dépenses, il est nécessaire de faire des économies en la matière.
M. Charles Rodwell, rapporteur spécial. Avis défavorable. Premièrement, une bonne partie de ces subventions s’inscrivent dans le cadre de marchés publics signés par l’État pour des services importants. Deuxièmement, certaines de ces subventions sont nécessaires : des maires du Rassemblement national ou d’autres groupes se sont plaints de la fin de l’hébergement des personnes immigrées ou en situation irrégulière dans leur commune quand le contrat a été rompu entre l’État et certaines associations qui organisaient leur hébergement. Nous considérons que supprimer toutes les subventions aux associations que vous évoquez serait contre-productif. Troisièmement, nous savons que certaines subventions sont abusives. C’est la raison pour laquelle nous vous inviterons à voter l’amendement II-CF2066, qui demande un rapport détaillé sur les subventions allouées aux associations, notamment les subventions de l’État et des collectivités.
Je vous invite par ailleurs, à titre personnel, à voter l’amendement II-CF2063 qui proposera de transférer à l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) les crédits des associations qui délivrent un conseil juridique ou une aide juridique et sociale aux personnes retenues dans les CRA.
M. Yoann Gillet (RN). Ces associations reçoivent près de 1 milliard d’euros chaque année : même en retirant 750 millions, il resterait assez d’argent pour honorer les marchés publics pendant la transition, aussi inacceptables soient-ils. Nous marchons sur la tête en confiant à ces associations une compétence de l’État, avec les abus que l’on connaît. Les associations que nous finançons pour faire du secours en mer font bien plus que cela : elles encouragent l’immigration et, avec les députés d’extrême gauche qui les soutiennent, se rendent coresponsables des morts en mer. C’est une situation dramatique, mais si certains n’encourageaient pas ceux qui vivent dans la misère dans leur pays à traverser, il n’y aurait pas de morts en mer.
M. Antoine Léaument (LFI-NFP). En commission des lois, nous avons l’habitude que M. Gillet et le Rassemblement national fassent des propositions qui, ici, reviennent à tuer des gens – sans le dire, car ce serait contraire à la loi. Oui, supprimer les aides aux associations qui viennent en aide aux personnes en détresse, comme les naufragés, cela revient à tuer des gens.
Les trois principales causes des départs sont les difficultés économiques, la guerre et le changement climatique. C’est contre elles qu’il faut lutter, mais vous n’en parlez jamais car ce sont vos amis qui provoquent cette souffrance et cet exil, à commencer par M. Bolloré qui exploite les matières premières en Afrique.
M. Peio Dufau (SOC). Je ne supporte pas les propos du Rassemblement national. Chez nous, au Pays basque, nous sommes une terre de passage pour les migrants. C’est la police qui les fait tuer : quand elle les attrape, elle les ramène à la frontière à Irun et les oblige à traverser le fleuve à la nage. Certains sont morts noyés, d’autres sont passés par la voie ferrée. Trois sont morts sous mes yeux dans ma ville, à Ciboure ; j’étais d’astreinte à la SNCF ce jour-là et je l’ai vu ! Alors, vos petits propos de merde, gardez-les pour vous ! On ne parle pas comme ça de la mort des gens.
Mme Véronique Louwagie, présidente. Monsieur Dufau, modérez vos propos. Je ne peux pas vous laisser dire que la police tue ou vous exprimer de façon vulgaire.
M. Peio Dufau (SOC). Mes excuses, mais je l’ai vécu.
Mme Véronique Louwagie, présidente. La commission vous accueille avec plaisir mais je vous demande d’exposer votre vision dans le respect.
Mme Perrine Goulet (Dem). Il est inadmissible d’entendre dire que la police tue volontairement des migrants. Je ne suis pas d’accord avec l’amendement du Front national, mais ces propos vont trop loin. La police ne tue pas.
M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial. Efforçons-nous de parler d’immigration avec raison, modération et pragmatisme, sans accuser ni les associations ni la police de tuer des migrants. Nous ne subventionnons à ma connaissance aucune association de passeurs. Croire cela, c’est méconnaître la réalité des politiques publiques : à Calais, s’il n’y avait pas d’associations pour aider les migrants et assurer l’hébergement et la restauration des personnes en transit, l’État ne pourrait pas assurer ces missions. Oui, trois fois oui, l’argent doit être contrôlé ; nous avons proposé un amendement en ce sens. Mais, de grâce, ne laissons pas croire que l’État donne de l’argent aux passeurs.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Je vous demande de comprendre la colère légitime de M. Dufau. Il faut regarder la réalité en face. L’enquête d’un consortium de journalistes publiée dans Le Monde a révélé ce qui se passe dans la Manche : oui, des policiers ont bien, à plusieurs reprises, pris part à la crevaison d’embarcations gonflables. Je salue toutes les associations qui contribuent à l’accès au droit, à la solidarité et à la défense de l’humanisme qui font la fierté de notre République. Il faut voter contre ces amendements.
Mme Véronique Louwagie, présidente. La colère, même légitime, ne permet pas toutes les expressions. Chacun doit s’exprimer dans le respect des autres.
Mme Stella Dupont (NI). En aucune manière l’État ne finance des passeurs. À Calais, où nous comptons des morts chaque semaine, le problème est avant tout lié à l’absence de voie de passage régulière qui pousse nombre d’étrangers à prendre tous les risques, y compris le pire. Nous devons travailler à une voie légale de migration vers le Royaume-Uni plutôt qu’imaginer des murs qui seront toujours franchissables. Je voterai contre les amendements.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements II-CF1610 de Mme Félicie Gérard, II-CF647 de M. Yoann Gillet, II-CF2064 de M. Charles Rodwell, II-CF409 de Mme Andrée Taurinya, II-CF1808 de Mme Léa Balage El Mariky et II-CF199 de Mme Céline Thiébault-Martinez (discussion commune)
Mme Félicie Gérard (HOR). Cet amendement d’appel vise à alerter sur le coût que représente la procédure de demande d’asile. Lors de son arrivée sur le territoire et en attente de l’acceptation ou du rejet de son droit à l’asile, une allocation forfaitaire est versée au demandeur d’asile dès lors qu’il accepte l’offre de prise en charge qui lui a été présentée par l’Ofii lors de l’enregistrement de sa demande. Cette allocation est familialisée et elle intervient en complément de l’éventuel accueil dans un centre d’hébergement. Le mécanisme représente un coût de plus de 350 millions d’euros pour les finances publiques ; il n’existerait pas si les demandes d’asile étaient instruites en dehors des frontières nationales.
La politique de l’asile ne doit évidemment pas être remise en question pour les demandeurs qui relèvent bien du droit d’asile, mais cette allocation d’attente crée un appel d’air manifeste à l’immigration illégale en poussant des personnes qui n’en relèvent pas manifestement à entrer sur le territoire national sous le couvert de l’asile et à s’y maintenir ensuite de manière irrégulière. L’amendement propose de la supprimer. J’appelle le Gouvernement à réformer d’urgence la procédure d’asile et à transférer l’instruction des dossiers aux ambassades et consulats français, ce qui serait beaucoup plus respectueux des êtres humains.
M. Yoann Gillet (RN). Le budget présenté par le Gouvernement est une escroquerie : les dépenses publiques continuent de croître plus vite que l’inflation et aucune économie n’est réalisée sur des secteurs clés comme l’immigration. En cela, il semble influencé par la gauche.
En 2023, l’Ofpra a enregistré 142 649 demandes d’asile, soit 8,7 % de hausse par rapport à 2022. Il s’agit du plus haut niveau jamais enregistré. Le pic de 2019 a même été dépassé. Le système, totalement dévoyé, est devenu une machine incontrôlable et crée un appel d’air pour une immigration de masse. Pendant ce temps-là, que fait le Gouvernement ? Rien. Pire encore, il continue de réduire les crédits pour lutter contre l’immigration irrégulière, tout en laissant exploser les dépenses injustifiées au profit des demandeurs d’asile. Ses priorités ne vont pas à la sécurité des Français ou à la lutte contre l’immigration illégale, mais à des allocations versées aux demandeurs d’asile pour 353 millions d’euros, une somme qui dépasse les moyens dédiés à l’expulsion de délinquants étrangers. C’est proprement scandaleux. Cette disproportion inacceptable appelle un rééquilibrage d’urgence.
M. Charles Rodwell, rapporteur spécial. L’amendement II-CF2064 est en lien avec l’amendement II-CF2065 de Mathieu Lefèvre proposant la modulation de l’ADA selon un barème fixé en fonction du pays d’origine, puisqu’il existe une liste objective de pays d’origine sûrs. L’évolution des crédits que nous proposons correspond à cette modulation.
Mme Andrée Taurinya (LFI-NFP). Nous pensons au contraire qu’il faut accueillir correctement tous ceux qui échouent sur notre territoire après avoir quitté leur pays pour fuir des situations dramatiques. L’allocation de demandeurs d’asile devrait être revalorisée, et non baissée de 16 %. Notre amendement propose donc de prélever 47,2 millions d’euros sur le programme Immigration et asile pour créer une ligne nouvelle Moyens supplémentaires à destination de l’allocation pour demandeurs d’asile.
J’ajoute que l’amendement de M. Rodwell, qui propose de trier les étrangers, ne me paraît pas conforme aux valeurs de notre République. En fonction de quoi les trierait-on ? De leur couleur de peau, de leur religion, de leur pays d’origine ? C’est absolument impensable.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Collègues d’extrême droite, les demandeurs d’asile qui fuient la guerre, la dictature, la torture, les menaces d’excision ou l’emprisonnement pour leur orientation sexuelle n’ont pas le temps de faire des études comparatives pour voir dans quel pays il vaut mieux aller. Ces mensonges sont les hallucinations d’esprits pollués par une idéologie raciste. Il faut au contraire garantir l’accès aux droits et la République s’honorerait à respecter réellement les demandeurs d’asile.
Cet amendement de ma collègue Léa Balage El Mariky, soutenu par la Fédération des acteurs de la solidarité, propose d’augmenter de 40 millions d’euros le budget consacré à l’allocation pour demandeur d’asile, qui n’a pas été revalorisée depuis sa création en 2015. Tous les acteurs de terrain disent qu’elle est insuffisante pour permettre aux personnes de subvenir à leurs besoins de première nécessité. Nous demandons l’annulation de la baisse décidée par le Gouvernement et la prise en compte les effets de l’inflation.
Mme Céline Thiébault-Martinez (SOC). Notre amendement vise également à revaloriser l’allocation pour demandeur d’asile. Nous sommes choqués par la proposition de moduler l’ADA, selon des critères qui ne sont pas précisés dans l’amendement. Le montant sera-t-il fixé en fonction du pays de provenance ou de l’aspect physique des personnes qui arrivent à la frontière ?
M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial. Je comprends, madame Gérard, qu’il s’agit d’un amendement d’appel ; évidemment, vous n’imaginez pas réduire à zéro l’allocation pour demandeurs d’asile. Le droit européen, fort heureusement, ne le permettrait pas. Je vous répondrai que la précédente majorité est parvenue à en stabiliser le montant : en 2018, il était de 300 millions d’euros, avec une demande d’asile inférieure ; en 2025, il sera de 250 millions d’euros, si l’on exclut les protégés temporaires ukrainiens. Cette dépense est maîtrisée non pas parce que le Gouvernement est inique et veut faire des économies sur les demandeurs d’asile, mais parce que l’ADA est versée moins longtemps : les délais de jugement sont plus rapides et, depuis la loi sur l’immigration, les délais d’appel ont également été réduits.
En revanche, monsieur Gillet, vous assumez de ne donner aucun soutien matériel à l’accueil des demandeurs d’asile. C’est un point de vue contraire au droit européen et à la vocation humanitaire de notre pays.
Entre ces deux options, Charles Rodwell et moi proposons de faire évoluer l’allocation, dont le montant est plus élevé que dans d’autres pays, pour lutter contre le dévoiement du droit d’asile et améliorer l’efficacité de la dépense. Elle sera modulée non pas en fonction de la couleur de la peau ou de la religion, ce qui serait absurde, mais du pays d’origine. Il existe des nationalités pour lesquelles la présomption d’asile est plus forte. D’ailleurs, techniquement, cette modulation existe déjà.
Avis défavorable à tous les amendements, sauf à celui présenté par M. Rodwell.
Mme Véronique Louwagie, présidente. M’étant penchée sur ces questions en qualité de rapporteure spéciale pour la mission Santé, je rappelle que lorsqu’une demande d’asile est déposée, les demandeurs bénéficient, pendant trois mois, de l’AME (aide médicale de l’État) dédiée aux soins urgents. Pendant l’examen de leur demande, ils relèvent de la Puma (protection universelle maladie), c’est-à-dire du dispositif de droit commun. Enfin, le maintien des droits est prévu pendant six mois – auxquels peuvent s’ajouter quarante-cinq jours – après l’expiration du titre de séjour. Durant cette période, certaines personnes déposent une demande de titre de séjour pour soins. Dans ce cadre, opérer une distinction entre les demandeurs originaires d’un pays sûr et les autres pourrait présenter un intérêt.
M. David Guiraud (LFI-NFP). Certains prétendent que l’allocation perçue par les demandeurs d’asile pendant l’examen de leur dossier créerait un appel d’air. Vous rendez-vous compte de ce que vous suggérez ? Personne ne songe à quitter sa famille et ses proches ni à parcourir 5 500 kilomètres pour toucher 14 euros par jour – 6,80 euros en cas d’hébergement en Cada (centre d’accueil pour demandeurs d’asile) ! Il n’y a aucun pactole à toucher, ici.
Cette allocation devrait au contraire être revalorisée. Les êtres humains ne se noient pas sans se débattre. Croyez-vous que les demandeurs d’asile se laisseront mourir de faim si vous ne leur donnez pas suffisamment d’argent pour s’acheter un peu de nourriture ? En raisonnant ainsi, on crée les conditions de la délinquance et de l’insécurité. Tendre la main aux autres, ce n’est pas seulement être plus humain, c’est aussi créer des conditions d’harmonie paisible, qui permettent à tout le monde de coexister.
M. Yoann Gillet (RN). De deux choses l’une, monsieur le rapporteur spécial : ou bien vous n’avez pas pris la peine de lire notre amendement, ou bien vous êtes de mauvaise foi. Nous ne proposons pas de supprimer tous les financements, mais de réduire de 5 % le budget alloué à l’ADA et de 10 % les crédits d’hébergement.
Par ailleurs, collègues d’extrême gauche, c’est précisément parce que le droit d’asile fait honneur à notre pays qu’il faut faire preuve de fermeté : toutes les personnes qui en profitent injustement et finissent par être déboutées mettent en danger ceux qui en ont vraiment besoin. Il faut faire la part des choses entre ceux qui sont réellement en danger dans leur pays et ceux – nombreux, osons le dire – qui viennent simplement profiter du système.
Alors que les Français ont déjà du mal à boucler leurs fins de mois et à manger correctement, n’augmentons pas une allocation qu’ils payent de leur poche.
Mme Stella Dupont (NI). Je suis défavorable aux amendements de Mme Gérard et de MM. Gillet et Rodwell. Celui des rapporteurs spéciaux me semble contrevenir à la convention de Genève du 28 juillet 1951, puisqu’il prévoit de trier les demandeurs d’asile en fonction de leur pays d’origine. Cette proposition est d’autant plus abjecte que des demandeurs issus de pays considérés comme sûrs peuvent très bien obtenir l’asile s’ils répondent aux critères de la convention de Genève.
Je récuse par ailleurs avec la plus grande fermeté la notion de dévoiement du droit d’asile : s’il y a une procédure qui dysfonctionne, ce n’est pas l’asile, mais l’immigration économique régulière, devenue si difficile que de nombreuses personnes sont contraintes d’emprunter d’autres voies.
Mme Sandrine Runel (SOC). J’invite M. Gillet à venir à l’Ofpra pour y découvrir comment les choses fonctionnent : ce serait probablement très instructif pour lui et son mouvement.
Le droit d’asile, rien que le droit d’asile, voilà ce que nous défendons. L’article 1er de la convention de Genève liste les raisons en vertu desquelles ceux qui quittent leur pays peuvent demander l’asile – pas pour toucher 6,80 euros par jour, mais parce qu’ils sont menacés de mort en raison de leurs convictions politiques, de leur religion ou de leur orientation sexuelle, par exemple. Il est impossible de savoir, avant que son dossier soit examiné, si une personne relève ou non de l’asile.
Alors que nous devrions accueillir les demandeurs dignement, un sur deux n’est pas hébergé. Cessons donc de prétendre qu’ils viennent en France pour y faire du tourisme.
Mme Elsa Faucillon (GDR). En effet, avant l’examen de sa situation précise, rien ne dit si un demandeur d’asile obtiendra le statut de réfugié. Le pays d’origine peut certes constituer une indication, mais il ne permet pas de prédire l’issue de la demande : par exemple, certaines femmes venues d’Afghanistan ne reçoivent pas la protection de la France, tandis que des personnes fuyant des pays considérés comme sûrs peuvent se voir accorder l’asile en raison des persécutions spécifiques qu’elles y subissent.
La France fait par ailleurs partie des pays d’Europe où le taux d’acceptation des demandes d’asile est le plus faible – beaucoup plus qu’en Allemagne ou en Suède, par exemple.
Enfin, les personnes qui perçoivent l’ADA sont très loin de vivre dans le luxe. La supprimer créerait du désordre. Ce seraient d’ailleurs les seules conséquences de la politique migratoire que vous promouvez : créer du désordre et nuire à la cohésion sociale.
Mme Véronique Louwagie, présidente. Les taux d’acceptation des demandes d’asile déposées par les personnes originaires de certains pays sûrs sont très faibles : 0,68 % pour la Moldavie, 3,48 % pour l’Arménie, ou encore 2,6 % pour le Monténégro. Ce constat devrait nous inciter à faire preuve de discernement.
M. Charles Rodwell, rapporteur spécial. La convention de Genève et le pacte européen sur la migration et l’asile prévoient déjà que les États puissent appliquer des procédures spécifiques. Les modalités de la modulation que nous proposons seraient fixées par décret et s’appliqueraient sur la base d’un critère parfaitement objectif, à savoir la liste des pays sûrs définie par le conseil d’administration de l’Ofpra, qui est un organisme indépendant. Il ne serait pas question d’un quelconque tri.
La commission rejette successivement les amendements II-CF1610, II-CF647 et II-CF2064.
Elle adopte l’amendement II-CF409.
Les amendements II-CF1808 et II-CF199 tombent.
Amendements II-CF1599 et II-CF1601 de Mme Stella Dupont
Mme Stella Dupont (NI). Les exilés subissent souvent des souffrances et des traumatismes importants, dans leur pays d’origine mais aussi pendant leur parcours de migration. Or l’accompagnement et l’accès aux soins en santé mentale restent trop limités, tout comme l’accès à l’interprétariat. Nous devons renforcer les moyens qui y sont consacrés. Tel est le sens de ces amendements, ainsi que du II-CF1600, que nous examinerons ultérieurement.
M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial. Je salue votre travail sur cette mission, que vous connaissez parfaitement. Vous avez raison de rappeler que les personnes qui demandent l’asile en France ont parfois vécu des situations traumatiques, qui doivent être prises en charge. Néanmoins, une personne ayant obtenu le statut de réfugié relève du droit commun et bénéficie à ce titre de la Puma, qui couvre les soins psychiatriques, mais aussi du RSA et des prestations familiales et de logement. L’enjeu n’est donc pas tant d’augmenter les budgets que d’accorder à ces situations toute l’attention qu’elles méritent.
Avis défavorable aux amendements.
Mme Claire Marais-Beuil (RN). Le manque d’accès aux soins de psychiatrie est un grave problème pour toute la population, qu’elle soit immigrée ou non. Efforçons-nous de résoudre les difficultés du secteur avant de prétendre offrir un suivi à tout le monde.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CF412 de Mme Gabrielle Cathala
Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). Comme Mme Dupont, nous souhaitons que les personnes migrantes, qui font face à des parcours traumatiques, puissent bénéficier du soutien psychologique et psychiatrique dont elles ont besoin. Une étude publiée dans The Lancet en 2023 montre par exemple que les femmes demandeuses d’asile arrivant dans le Sud de la France ont dix-huit fois plus de risques de subir des violences sexuelles que les autres.
Mon amendement, moins ambitieux que les précédents, vise à prélever des crédits sur les actions répressives du budget consacré à l’immigration pour améliorer l’accompagnement.
M. Charles Rodwell, rapporteur spécial. Nous comprenons bien le problème que vous décrivez, mais une personne ayant obtenu le statut de réfugié relève du droit commun et bénéficie donc de tous les droits sociaux déjà évoqués. Avis défavorable.
M. Gérard Leseul (SOC). Je regrette vivement que vous soyez passée si vite sur le vote de l’amendement II-CF1601, madame la présidente : vous avez choisi de considérer qu’il était identique au précédent, mais nous aurions aimé pouvoir nous prononcer clairement.
Mme Véronique Louwagie, présidente. Je n’ai pas entendu d’opposition lorsque j’ai demandé si le vote était identique au précédent.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF1809 de Mme Léa Balage El Mariky
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous proposons de créer, à titre expérimental, des permanences d’accompagnement médical et psychologique pour les femmes dans les structures de premier accueil des demandeurs d’asile (Spada). L’étude du Lancet montre en effet que les demandeuses d’asile sont surexposées aux violences sexuelles dans le pays d’accueil ; et seule une femme sur dix rencontrée dans ce cadre avait fait appel aux forces de l’ordre ou consulté un médecin.
Les Spada sont la porte d’entrée des demandeurs d’asile dans le dispositif national d’accueil. Une expérimentation lancée par l’association France terre d’asile a permis de créer, à l’aide de fonds privés, une permanence médico-psycho-sociale au sein d’une structure parisienne pour orienter le plus tôt possible les demandeuses d’asile concernées vers les professionnels de santé. Nous souhaitons poursuivre cette expérimentation dans trois autres départements, en y consacrant un financement spécifique de 780 000 euros.
M. Charles Rodwell, rapporteur spécial. Au-delà de la protection déjà évoquée, les femmes peuvent, comme toute personne nouvellement arrivée sur le territoire, demander à l’Ofii un rendez-vous santé. Cette visite médicale gratuite permet de réaliser un bilan clinique et de repérer tous les troubles de santé, y compris mentaux. Le secret médical y est absolu. Le lien entre l’Ofii et les Spada s’opère également à travers les pôles France asile créés par la loi « immigration » du 26 janvier 2024.
Le service que vous évoquez est déjà assuré. Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement.
Contre l’avis de M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement II-CF1600 de Mme Stella Dupont.
L’amendement II-CF1811 de Mme Léa Balage El Mariky est retiré.
Amendements II-CF194 de Mme Céline Thiébault-Martinez, II-CF411 de Mme Andrée Taurinya et II-CF195 de Mme Céline Thiébault-Martinez (discussion commune)
Mme Sandrine Runel (SOC). L’amendement II-CF194 vise à financer la création de places d’hébergement d’urgence pour demandeurs d’asile (Huda). Le PLF pour 2025 prévoit une baisse de 71 millions des crédits consacrés à ce parc d’hébergement, donc la suppression de plus de 6 000 places, alors que leur nombre est déjà insuffisant. Une telle réduction serait contraire aux principes de la convention de Genève.
Seuls 65 % des familles demandeuses d’asile et 50 % des personnes isolées ont été hébergées cette année. Les autres sont laissées dans la précarité et se trouvent contraintes de se loger sous des tentes. Pour respecter la dignité de ces personnes, il faut revenir sur les suppressions de places prévues et annuler cette baisse de crédits.
L’amendement II-CF195 est un amendement de repli.
M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial. La précédente majorité a porté le nombre de places du DNA de 82 000 en 2017 à 119 000 aujourd’hui. Il est vrai que leur nombre diminuera d’environ 8 000 l’an prochain, du fait d’une baisse de crédits de l’ordre de 71 millions d’euros. Cette baisse s’explique par la réduction des délais de traitement des demandes d’asile, par un léger tassement du nombre de demandes depuis 2023, et par l’action forte conduite par les services de l’État pour lutter contre l’occupation indue des logements.
J’ai déposé un amendement visant à abonder ces crédits de 25 millions d’euros, notamment pour que les réfugiés ukrainiens bénéficiant de la protection temporaire puissent continuer à être accueillis, ce que le montant actuellement prévu dans le PLF ne permet pas.
Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement II-CF194.
Les amendements II-CF411 et II-CF195 tombent.
Amendement II-CF1567 de M. Pouria Amirshahi
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Nous proposons de renforcer le programme Immigration et asile de 12 millions d’euros afin d’éviter la suppression de places en centres d’accueil et d’examen des situations (CAES), qui sont la porte d’entrée des personnes migrantes dans la procédure administrative.
Contre l’avis de M. Charles Rodwell, rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement.
Amendements II-CF1807 de Mme Léa Balage El Mariky et II-CF2068 de M. Mathieu Lefèvre (discussion commune)
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Notre amendement vise à renforcer le budget consacré à l’accueil des réfugiés ukrainiens. Les hébergements collectifs « sas Ukraine » comptent 11 000 places, mais les dépenses correspondantes ne sont pas mentionnées dans le PLF. Les gestionnaires de ces centres ont besoin de visibilité sur les projets financés, d’où la nécessité de faire apparaître le montant de 328 millions d’euros dans l’action Accueil des étrangers primo arrivants.
M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial. Le PLF pour 2025 met fin à la sous-budgétisation qui caractérisait l’ADA versée aux bénéficiaires de la protection temporaire et qui tendait à créer des difficultés en fin de gestion : un budget spécifique de 107 millions d’euros y figure désormais.
Je vous propose de retirer votre amendement au profit du mien, qui tend à abonder les crédits du DNA pour maintenir l’hébergement de ces bénéficiaires.
La commission adopte l’amendement II-CF1807.
L’amendement II-CF2068 tombe.
Amendements II-CF2062 de M. Charles Rodwell, II-CF640 de M. Yoann Gillet et II-CF192 de M. Marc Pena (discussion commune)
M. Charles Rodwell, rapporteur spécial. La Lopmi et la loi « immigration » fixent une trajectoire d’investissement dans la construction, la rénovation et la sécurisation des centres de rétention administrative, dont le nombre de places devra être porté à 3 000 d’ici à 2027. Le budget proposé ne permettra pas de tenir cette trajectoire. Nous appelons donc le Gouvernement à rétablir les crédits d’investissement et de construction de CRA en levant le gage sur cet amendement. À défaut, nous proposons des pistes d’économies sur le reste de la mission.
M. Yoann Gillet (RN). La France verse chaque année près de 1 milliard d’euros aux associations immigrationnistes – contre 300 millions d’euros en 2016. Dans le même temps, elle se contente de 70 millions d’euros pour assurer le fonctionnement des CRA. Le gouvernement Barnier s’inscrit pleinement dans cette politique, qui accorde si peu de moyens aux centres de rétention, pourtant essentiels pour lutter concrètement contre l’immigration massive.
Le budget présenté ne permettra pas de tenir les engagements du Gouvernement en matière de construction de centres de rétention. Il faut rétablir des financements crédibles, à la hauteur des objectifs annoncés publiquement.
M. Marc Pena (SOC). Mon amendement vise à renforcer les moyens alloués aux personnels de santé au sein des CRA, afin de garantir un accès aux soins effectif à toutes les personnes qui y sont retenues. L’objectif d’augmentation du nombre de places en CRA doit aller de pair avec une amélioration des conditions sanitaires. L’accès aux soins est un droit fondamental qui doit être garanti à tous, y compris aux personnes placées en rétention administrative. Or la situation actuelle dans les CRA, que je visite régulièrement, révèle des carences importantes en matière de santé, mettant en péril la dignité et l’intégrité physique et mentale des personnes retenues.
Notre objectif n’étant évidemment pas de réduire les crédits du programme Intégration et accès à la nationalité française, nous appelons le Gouvernement à lever le gage.
M. Charles Rodwell, rapporteur spécial. Les deux amendements de nos collègues seraient satisfaits par l’adoption de celui que j’ai présenté. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme Véronique Louwagie, présidente. Je profite de l’amendement de M. Pena pour préciser que, contrairement à une idée reçue, les personnes en situation irrégulière placée en CRA ne sont pas prises en charge au titre de l’AME mais de la sécurité sociale, pour un coût que nul ne sait chiffrer.
M. Yoann Gillet (RN). En effet, la somme énorme prise aux Français – qui ne parviennent déjà pas à se soigner – pour financer l’AME n’englobe pas tous les soins offerts aux étrangers en situation irrégulière. Elle ne couvre pas non plus les coûts liés aux détenus en prison, par exemple. Puisque nos collègues de gauche semblent réagir, je leur rappelle que 37 % des Français ont déjà renoncé à se soigner faute de moyens. Tous ne sont pas des petits-bourgeois comme vous !
M. Antoine Léaument (LFI-NFP). Parmi les personnes pouvant prétendre à l’AME, 51 % n’y recourent pas. Par ailleurs, dans tous les pays qui s’y sont essayés, la suppression des aides médicales aux étrangers, y compris en situation irrégulière, a conduit à une hausse des dépenses de santé, les personnes étant prises en charge lorsque leurs pathologies sont plus graves, donc plus coûteuses à soigner.
Il est vrai que M. Gillet veut tuer des gens : sa proposition permettrait donc effectivement de faire des économies en laissant mourir des malades. Pour ma part, j’estime que nous avons une responsabilité collective envers les personnes qui, une fois parvenues sur notre sol, ont besoin d’être soignées. C’est toute l’histoire de notre patrie républicaine qui nous l’impose.
Mme Véronique Louwagie, présidente. Il est difficile d’entendre un député prétendre qu’un de ses collègues aurait la volonté de tuer des gens. D’autre part, nous aurons l’occasion de débattre de l’AME au cours de l’examen de la mission Santé.
M. Gérard Leseul (SOC). Je tiens à soutenir la proposition sérieuse et très finement chiffrée de notre collègue Pena, qui mérite d’être adoptée à l’unanimité.
Mme Claire Marais-Beuil (RN). J’aimerais entendre la gauche défendre tout autant les Français qui ne se soignent plus. Des personnes frappent régulièrement à ma porte pour me demander à quels traitements elles doivent renoncer, faute de pouvoir les payer tous. Je n’ai aucune leçon à recevoir de vous.
La commission rejette successivement les amendements II-CF2062 et II-CF640 et adopte l’amendement II-CF192.
Contre l’avis de M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement II-CF211 de Mme Céline Thiébault-Martinez.
Suivant l’avis de M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial, elle rejette l’amendement II-CF642 de M. Aurélien Lopez-Liguori.
Amendement II-CF209 de Mme Céline Thiébault-Martinez
Mme Sandrine Runel (SOC). Il vise à attribuer des crédits supplémentaires au pôle Protection de l’Ofpra. Tous les demandeurs d’asile ne finissent pas en situation irrégulière : certains sont protégés et doivent se voir attribuer des papiers pour pouvoir continuer leur parcours d’intégration.
M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial. À l’initiative de Stella Dupont, les effectifs de ce service ont été renforcés de 8 ETP. L’effet est déjà notable, puisque près de 30 000 actes ont été établis au premier semestre 2023, contre 18 000 au premier semestre 2022. Je propose que nous en restions là. Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement. Amendements II-CF267 de M. Matthias Renault et II-CF2063 de M. Charles Rodwell (discussion commune)
M. Charles Rodwell, rapporteur spécial. Nous proposons que l’aide juridique et sociale aux étrangers dans les CRA soit assurée par l’Ofii.
J’émets un avis défavorable à l’amendement de M. Renault. Nous sommes d’ailleurs très étonnés que le Rassemblement national propose de diminuer les crédits de l’Ofii, qui œuvre à réguler l’immigration irrégulière.
La commission rejette successivement les amendements.
Suivant l’avis de M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial, la commission rejette successivement les amendements II-CF653 et II-CF867 de Mme Alexandra Masson.
Contre l’avis du rapporteur spécial, elle adopte l’amendement II-CF407 de Mme Andrée Taurinya.
L’amendement II-CF1113 de M. Benjamin Lucas-Lundy tombe. Contre l’avis de M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement II-CF410 de Mme Andrée Taurinya.
L’amendement II-CF1120 de M. Benjamin Lucas-Lundy tombe.
Amendements II-CF213 de M. Laurent Lhardit et II-CF206 de M. Karim Benbrahim (discussion commune)
M. Laurent Lhardit (SOC). Nous souhaitons renforcer les subventions destinées aux centres sociaux et aux associations qui dispensent des cours de français aux étrangers arrivant en France.
Contre l’avis de M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement II-CF213.
L’amendement II-CF206 tombe.
Contre l’avis de M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement II-CF402 de Mme Andrée Taurinya.
Amendement II-CF250 de la commission des lois
Mme Elsa Faucillon (GDR). Cet amendement, adopté par la commission des lois, vise à régulariser les travailleurs sans papiers, qui contribuent activement à la vie de la nation, dans les métiers du bâtiment, du soin ou du lien, et plus généralement dans une multitude de secteurs où ils sont fréquemment exploités. Si certains employeurs militent pour la régularisation de leurs salariés, le caractère irrégulier de leur situation les expose bien souvent à des phénomènes d’exploitation et à des conditions de travail dangereuses.
Il serait juste – sur les plans tant humains qu’économique – de régulariser ces centaines de milliers de personnes afin de les sortir d’une situation d’exploitation porteuse de risques importants.
M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial. Ce n’est pas véritablement un débat budgétaire : vous le savez, chère collègue, puisque vous avez fait le choix d’un amendement d’appel à 1 euro. Nous avons besoin d’une immigration économique maîtrisée : tel est le sens des dispositions de la loi « immigration ». Je regrette d’ailleurs que les décrets correspondants ne soient pas encore parus. Défavorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CF251 de la commission des lois, amendements identiques II-CF212 de Mme Céline Thiébault-Martinez et II-CF252 de la commission des lois, amendements identiques II-CF253 de la commission des lois et II-CF405 de Mme Andrée Taurinya (discussion commune)
Mme Elsa Faucillon (GDR). L’amendement II-CF251 vise à allouer 20 millions d’euros à un nouveau programme Sauvetage en mer. Dans la Manche, l’année 2024 a été particulièrement meurtrière. De nombreuses personnes décèdent, depuis des années, en tentant cette traversée. Les chiffres sont encore plus dramatiques en mer Méditerranée, où seules des ONG – d’ailleurs souvent criminalisées et empêchées, notamment par le décret Piantedosi, en Italie – gèrent le sauvetage. En Manche, il existe des navires, mais ils sont trop peu nombreux et peu adaptés au sauvetage en mer. La création de ce programme permettrait d’affronter la question même si, à titre personnel, je milite plutôt pour des routes légales sûres puisqu’il faut éviter que ces personnes, qui trouveront, de toute façon, un moyen de venir, empruntent les voies les plus dangereuses.
M. Charles Rodwell, rapporteur spécial. Je veux rendre hommage à nos forces de l’ordre, à nos forces de secours et aux associations, qui sont mobilisées pour empêcher ces personnes d’aller se noyer en mer et, si besoin est, les sauver. Nous avons rencontré, à Calais, les personnes mobilisées pour cette mission, qui réalisent un travail remarquable, et avons discuté avec elles des aspects budgétaires. Nous sommes défavorables à votre amendement. Premièrement, les crédits relatifs à l’organisation des forces nationales de sauvetage sont déjà prévus dans la mission Sécurités : si vous souhaitez les majorer, il faut abonder cette dernière plutôt que de créer un programme. Deuxièmement, le financement de ces opérations s’inscrit dans une dynamique européenne, qui fonctionne. Il serait plus opportun d’abonder les fonds européens que de créer une ligne de crédits nationale.
Mme Elsa Faucillon (GDR). Nous avons précisément déposé une proposition de résolution européenne visant à créer une flotte européenne de sauvetage en mer. Pour l’heure, en Méditerranée, on laisse aux seules ONG le soin de s’acquitter de cette tâche – et encore c’est beaucoup dire, puisqu’elles sont largement empêchées. Le sauvetage en mer n’entre pas dans les missions de l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex). En revanche, ses navires, comme tous ceux qui se trouvent à proximité d’une embarcation en détresse, sont censés sauver les personnes se trouvant à son bord. Dans le cas du naufrage de l’Adriana, qui a entraîné la mort de 600 personnes, il a toutefois été révélé que Frontex avait mis beaucoup de temps avant de lancer l’alerte, ce qui a empêché de sauver tous ces gens.
La commission adopte l’amendement II-CF251.
Les autres amendements tombent.
Contre l’avis des rapporteurs spéciaux, la commission adopte l’amendement II-CF403 de Mme Andrée Taurinya.
Amendements II-CF1548 de M. Pouria Amirshahi et II-CF404 de Mme Andrée Taurinya (discussion commune)
Mme Danielle Simonnet (EcoS). L’amendement II-CF1548 a pour objet d’affecter 15 millions d’euros à la protection et à l’accès aux droits des mineurs non accompagnés. La Convention internationale des droits de l’enfant nous fait obligation d’assurer une prise en charge globale et inconditionnelle des mineurs. Pourtant, dans les faits, la situation est dramatique.
M. Charles Rodwell, rapporteur spécial. Notre avis sera défavorable car vous proposez d’abonder un nouveau programme de l’État alors qu’il s’agit d’une compétence des départements. Il conviendrait plutôt de soutenir ces derniers.
Nous nous félicitons de l’accord trouvé entre la France et le Maroc concernant les mineurs non accompagnés de nationalité marocaine.
La commission adopte l’amendement II-CF1548.
L’amendement II-CF404 tombe.
Contre l’avis des rapporteurs spéciaux, la commission adopte successivement les amendements II-CF408 de Mme Andrée Taurinya et II-CF1121 de M. Benjamin Lucas-Lundy.
Mme Véronique Louwagie, présidente. Nous en venons à l’avis des rapporteurs spéciaux et aux explications de vote sur les crédits de la mission.
M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial. Compte tenu des votes intervenus, la mission a été vidée de ses crédits et de son sens. On a augmenté massivement l’allocation pour demandeur d’asile ; en contrepartie, il n’y a plus de fonds pour lutter contre l’immigration irrégulière. Il convient évidemment de s’opposer à ces crédits, ce qui est regrettable eu égard à la noblesse de la mission exercée par les agents de l’Ofii et de l’Ofpra, à qui nous rendons hommage.
M. Emmanuel Fouquart (RN). Pour les mêmes raisons, nous voterons contre les crédits de la mission.
Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). L’ensemble des amendements que nous avons fait adopter ont permis de parvenir à un budget d’accueil et non plus de répression. Nous voterons en faveur des crédits.
M. David Amiel (EPR). Cette mission repose sur un équilibre entre la lutte contre l’immigration irrégulière et l’intégration. Or les amendements adoptés, qui représentent 500 millions d’euros de dépenses, bouleversent cet équilibre. C’est d’autant plus regrettable que des améliorations devaient être apportées à la copie initiale. Les rapporteurs spéciaux ont notamment formulé des propositions concernant les CRA. On pouvait également améliorer les dispositifs d’intégration, qui étaient insuffisants. Le choix qui a été fait de déséquilibrer complètement nos instruments de politique migratoire nous oblige évidemment à voter contre ces crédits.
Mme Céline Thiébault-Martinez (SOC). Compte tenu de l’adoption des amendements visant à revaloriser l’ADA, à accompagner les personnes LGBTQIA + et à allouer des moyens au sauvetage en mer, nous voterons en faveur de ce budget.
Mme Véronique Louwagie, présidente. Eu égard aux amendements adoptés, les membres du groupe Droite républicaine voteront contre les crédits de la mission.
Mme Danielle Simonnet (EcoS). Les groupes du Nouveau Front populaire peuvent être fiers du travail accompli, qui nous a permis de bâtir un budget républicain, qui respecte véritablement le droit d’asile, garantit l’égalité des droits sur notre territoire et favorise la régularisation des travailleuses et travailleurs sans papiers, ainsi que l’accueil des mineurs non accompagnés. En conséquence, nous voterons pour les crédits.
Mme Félicie Gérard (HOR). Le budget pour 2025 de la mission Immigration, asile et intégration, tel que présenté par le Gouvernement, reflète une volonté de renforcer la maîtrise des flux migratoires tout en améliorant l’intégration des primo-arrivants. L’augmentation des crédits alloués à l’accélération du traitement des demandes d’asile permet de réduire les délais de traitement. Parallèlement, le développement du contrat d’intégration républicaine, reposant notamment sur l’apprentissage de la langue française, permet une meilleure insertion professionnelle et sociale.
En revanche, les crédits votés en commission ce soir n’étant pas raisonnables, le groupe Horizons & indépendants votera contre les crédits de la mission.
Mme Elsa Faucillon (GDR). Je constate que la majorité déserte la commission, alors qu’il s’agit de soutenir le budget de la mission Immigration, asile et intégration, défendu en commission des lois par le ministre de l’intérieur. Parallèlement, je me réjouis des avancées obtenues par les députés du Nouveau Front populaire rétablissant l’équilibre en faveur de l’intégration, qui avait subi une baisse drastique de ses moyens, en particulier pour l’apprentissage de la langue et l’hébergement des demandeurs d’asile.
Nous voterons le budget ainsi modifié, qui résonne mieux avec notre devise républicaine.
La commission adopte les crédits de la mission Immigration, asile et intégration modifiés.
Article 45 et état G : Objectifs et indicateurs de performance
Amendement II-CF2067 de M. Mathieu Lefèvre
M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial. Cet amendement reprend une proposition de notre ancien collègue Mansour Kamardine, visant à définir le nombre de bateaux interceptés dans les eaux territoriales françaises à Mayotte.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CF1877 de M. Paul Christophle
Mme Céline Thiébault-Martinez (SOC). Cet amendement vise à créer un nouvel objectif, portant sur la durée moyenne de placement en CRA des ressortissants dont la rétention s’achève par un éloignement.
Contre l’avis de M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial, la commission adopte l’amendement.
Contre l’avis de M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial, elle adopte l’amendement II-CF210 de Mme Céline Thiébault-Martinez.
Après l’article 60
Amendement II-CF2013 de M. Mathieu Lefèvre
M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial. Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda) prévoit la contribution des compagnies aériennes au financement des zones d’attente dans les aéroports. Cet amendement vise à le modifier pour rendre obligatoire cette contribution puisque les compagnies aériennes ont une responsabilité dans le placement des passagers en zone d’attente.
La commission rejette l’amendement.
L’amendement II-CF2065 de M. Mathieu Lefèvre est retiré.
Contre l’avis de M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial, elle adopte l’amendement II-CF406 de Mme Andrée Taurinya.
Amendement II-CF2066 de M. Charles Rodwell
M. Charles Rodwell, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet la production d’un rapport permettant de déterminer le montant des financements publics versés aux associations mandatées par l’État ou les collectivités locales pour intervenir dans le champ de la mission Immigration, asile et intégration.
La commission rejette l’amendement.
Contre l’avis de M. Mathieu Lefèvre, rapporteur spécial, elle adopte l’amendement II-CF254 de la commission des lois.
Contre l’avis du rapporteur Charles Rodwell, elle adopte les amendements identiques II-CF413 de Mme Andrée Taurinya et II-CF1529 de M. Pouria Amirshahi.
Membres présents ou excusés
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du jeudi 31 octobre 2024 à 14 heures 30
Présents. - M. Franck Allisio, M. David Amiel, M. Jean-Pierre Bataille, M. Karim Ben Cheikh, M. Anthony Boulogne, M. Philippe Brun, M. Pierre-Yves Cadalen, M. Michel Castellani, Mme Gabrielle Cathala, M. Thomas Cazenave, M. Jean-René Cazeneuve, M. Éric Coquerel, M. Jean-François Coulomme, M. Charles de Courson, M. Sébastien Delogu, M. Jocelyn Dessigny, Mme Dieynaba Diop, M. Benjamin Dirx, M. Peio Dufau, Mme Mathilde Feld, M. Emmanuel Fouquart, Mme Félicie Gérard, M. José Gonzalez, Mme Perrine Goulet, M. David Guiraud, M. Pierre Henriet, M. Philippe Juvin, Mme Émeline K/Bidi, M. Daniel Labaronne, M. Tristan Lahais, Mme Constance Le Grip, M. Mathieu Lefèvre, M. Corentin Le Fur, M. Gérard Leseul, M. Philippe Lottiaux, Mme Véronique Louwagie, M. Emmanuel Mandon, Mme Claire Marais-Beuil, M. Jean-Paul Mattei, M. Damien Maudet, M. Emmanuel Maurel, M. Kévin Mauvieux, Mme Sophie Mette, M. Nicolas Metzdorf, Mme Sophie Pantel, M. Nicolas Ray, M. Charles Rodwell, M. Fabrice Roussel, M. Alexandre Sabatou, M. Nicolas Sansu, M. Arnaud Simion, Mme Danielle Simonnet, M. Charles Sitzenstuhl, Mme Céline Thiébault-Martinez
Assistaient également à la réunion. - Mme Nadège Abomangoli, M. Romain Baubry, M. Ian Boucard, Mme Stella Dupont, Mme Elsa Faucillon, M. Yoann Gillet, M. Antoine Léaument, M. Laurent Lhardit, M. Benjamin Lucas-Lundy, M. Marc Pena, M. Julien Rancoule, Mme Sandra Regol, Mme Sandrine Runel, Mme Andrée Taurinya, M. Roger Vicot