Compte rendu
Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire
– Élection d’un vice-président.......................2
– Examen de la proposition de loi instaurant un impôt plancher de 2 % sur le patrimoine des ultrariches (n° 768) (Mme Eva Sas, rapporteure) 2
– Présences en réunion...........................20
Mercredi
12 février 2025
Séance de 9 heures 30
Compte rendu n° 082
session ordinaire de 2024-2025
Présidence de
M. Éric Coquerel,
Président
— 1 —
La Commission procède à l’élection d’un vice président.
M. le président Éric Coquerel. Nous devons procéder à l’élection d’un vice‑président de la commission, en remplacement de Mme Véronique Louwagie, dont le mandat a cessé le jeudi 23 janvier 2025 à minuit du fait de l’exercice de fonctions ministérielles.
Afin de conserver l’équilibre du bureau, je serais favorable à une candidature émanant du même groupe que Mme Louwagie.
J’invite ceux de nos collègues qui désirent faire acte de candidature à se faire connaître.
Je suis saisi de la candidature de M. Jean-Didier Berger.
En l’absence d’autres candidats, il n’y a pas lieu de procéder à un vote.
M. Jean-Didier Berger est proclamé vice-président de la commission. (Applaudissements.)
La Commission procède à l’examen de la proposition de loi instaurant un impôt plancher de 2 % sur le patrimoine des ultrariches (n° 768) (Mme Eva Sas, rapporteure).
M. le président Éric Coquerel. Cette proposition de loi est le deuxième texte que le groupe Écologiste a inscrit à l’ordre du jour de la niche parlementaire qui lui est réservée le jeudi 20 février 2025.
Mme Eva Sas, rapporteure. Je commencerai par deux chiffres qui m’ont particulièrement frappée. En vingt ans, les 500 plus grandes fortunes de France ont vu leur patrimoine augmenter d’environ 1 000 milliards d’euros, passant de 124 à 1 170 milliards. Par ailleurs, une étude conduite en juin 2023 par l’Institut des politiques publiques (IPP) indique que le taux de taxation effectif de ces contribuables n’est que de 2 % d’impôt sur le revenu, tous impôts personnels confondus.
Comment ces revenus toujours plus importants échappent-ils à l’impôt ? L’Institut des politiques publiques a montré que 97 % du revenu économique des soixante-quinze ménages de milliardaires français n’étaient pas imposables. Les plus aisés logent leur patrimoine dans des holdings qui distribuent le minimum de dividendes, ne générant ni revenu fiscal, ni impôt.
La situation ainsi créée est presque identique à celle de l’Ancien Régime où, selon les mots d’Alexis de Tocqueville, « l’impôt avait pour objet, non d’atteindre les plus capables de le payer, mais les plus incapables de s’en défendre ».
À l’échelle internationale, le constat de la faible taxation des plus riches a conduit à une prise de conscience, comme en témoigne le rapport commandé par le G20 à l’économiste Gabriel Zucman. Dans ce rapport remis en juin 2024, il préconise l’instauration de façon coordonnée dans les différents États, d’un impôt de 2 % sur le patrimoine des milliardaires. De nombreux pays ont soutenu cette proposition. Puisque le gouvernement français a publiquement appuyé cette initiative, il est temps d’envisager concrètement sa mise en œuvre sur le territoire national. La France pourrait ainsi devenir pionnière dans la taxation minimale des plus riches, comme elle l’a été pour les géants du numérique avec la taxe Gafam.
Avec ma collègue Clémentine Autain, nous avons consulté des économistes, dont Gabriel Zucman. Fortes de leurs analyses et de leur expertise, nous proposons ici la création d’un impôt plancher sur les plus fortunés, avec l’objectif de garantir que les 1 800 ménages les plus riches contribuent aux intérêts de la nation à hauteur de 2 % de leur patrimoine, tous impôts confondus.
Cet impôt concernerait exclusivement les ménages disposant d’un patrimoine qui est supérieur à 100 millions d’euros, c’est-à-dire les grandes fortunes et non les gérants de PME, les artisans ou les jeunes entrepreneurs.
Les biens professionnels, qui constituent selon le Comité d’évaluation des réformes de la fiscalité du capital au moins 66 % du patrimoine des contribuables visés, seraient inclus dans l’assiette de cet impôt. Les en exclure, comme dans le cas de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), reviendrait en effet à maintenir une faille béante dans le système fiscal, permettant aux plus riches de continuer à contourner l’impôt et donc à transgresser les principes de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen selon lesquels la contribution commune « doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ».
Le dispositif ne donnerait pas lieu à une double imposition, puisqu’il s’agirait d’un impôt différentiel garantissant simplement que le total des impôts payés soit au moins égal à 2 % du patrimoine.
On ne manquera pas de m’opposer un argument d’inconstitutionnalité. Toutefois, le rendement des hauts patrimoines étant en moyenne de 7 à 10 % par an, il est clair qu’un niveau de taxation de 2 % ne ferait que minorer ce rendement sans entamer le patrimoine. Par ailleurs, l’impôt plancher cesserait de s’appliquer dès lors que le patrimoine deviendrait inférieur à 100 millions d’euros. Il ne peut donc en aucun cas être considéré comme confiscatoire.
Sans doute nous objectera-t-on aussi que le Conseil constitutionnel s’est toujours prononcé en faveur d’un plafonnement de la fiscalité sur le patrimoine en fonction des revenus. Mais il convient de souligner d’une part que le Conseil n’a jamais eu à statuer sur un dispositif dont le seuil était fixé à 100 millions d’euros, d’autre part que sa jurisprudence est antérieure à l’étude de l’IPP mettant en lumière l’utilisation du plafonnement à des fins de contournement de l’impôt. Or le Conseil constitutionnel a précisément considéré en 2011 qu’il fallait « faire obstacle à ce que ces contribuables n’aménagent leur situation en privilégiant la détention de biens qui ne procurent aucun revenu imposable ». Il y a donc toute chance que l’impôt que nous proposons, caractérisé par un seuil élevé et ayant pour seul objectif d’éviter le contournement de l’impôt, soit jugé constitutionnel.
Le rendement escompté serait compris entre 15 et 20 milliards d’euros selon Gabriel Zucman. Cette somme est non seulement essentielle mais également nécessaire pour redresser nos finances publiques, financer la transition écologique et consolider nos services publics.
À l’heure où nous demandons tant d’efforts aux Français, il ne serait pas compréhensible que nous laissions les plus riches continuer à contourner l’impôt. Je vous demande donc d’adopter cette mesure simple et minimale de justice fiscale.
M. le président Éric Coquerel. Je trouve cette proposition particulièrement bienvenue.
Gabriel Attal, que nous avons auditionné, nous a expliqué que les difficultés rencontrées en 2023 et 2024 résidaient moins dans la hausse des dépenses publiques que dans un niveau de recettes plus faible que prévu. Or, face à ce diagnostic, le gouvernement s’est essentiellement attaché à limiter les dépenses.
J’ai plutôt tendance à penser qu’il aurait été plus logique de chercher à augmenter les recettes, dont la faiblesse est manifestement à l’origine des déficits. L’exercice a déjà eu lieu en séance publique, lors de la discussion de la première partie du budget : quoi qu’on pense des amendements qui ont alors été adoptés, émanant principalement du Nouveau Front Populaire, le fait est qu’ils aboutissaient à un solde positif, validé par l’article d’équilibre, de 37 milliards d’euros, et à un déficit inférieur à 3 %. L’opportunité et la crédibilité de ces amendements ont été contestées mais la démonstration demeure qu’en augmentant les recettes, le déficit passe en dessous de 3 % au lieu des 5 % annoncés.
La taxe dont nous débattons figurait parmi les amendements proposés. Elle semble pouvoir faire consensus, dans la mesure où le gouvernement a indiqué réfléchir à l’instauration d’une taxe sur le patrimoine, à hauteur de 0,5 %.
L’étude conduite par l’IPP a en outre montré, sur la base de chiffres fournis par Bercy, que les personnes les plus riches du pays payaient largement moins de 2 %, voire pas du tout d’impôt sur le revenu (IR). Le transfert d’une partie de leurs gains vers des biens professionnels leur permet en effet d’être taxés à hauteur de 25 ou 26 % de leurrevenu économique, quand les 0,1 % des Français les plus riches assujettis à l’IR sont imposés à 47 ou 48 %. La différence se compte en dizaines de milliards. La taxe proposée répond précisément à cette problématique.
Au-delà de nos couleurs politiques, nous devrions par ailleurs tous trouver insupportable le chantage au départ récemment effectué par quelques-unes de ces personnes qui échappent largement à l’impôt si la moindre taxe nouvelle leur était appliquée. Bernard Arnault s’exprime beaucoup dans ce sens, tout en agitant le chiffre d’une augmentation de 40 % de son imposition. Cela me donne furieusement envie d’aller vérifier ses déclarations fiscales – dont j’ai lu qu’il était tellement inquiet que je les consulte qu’il avait, il y a quelque temps, demandé leur classement secret-défense ! Quoi qu’il en soit, je pense que nous considérons tous ici que chacun doit participer à l’effort commun et s’acquitter de façon juste et équitable des impôts qu’il doit à la nation.
Enfin, cette proposition de loi me paraît d’autant plus opportune et pertinente qu’Éric Lombard a confirmé que les taxes exceptionnelles sur les grands groupes et les ultrariches ne seraient pas prolongées plus d’un an et que la piste privilégiée pour réduire le déficit serait plutôt celle de la limitation des dépenses publiques. Je crains par conséquent que la taxe sur le patrimoine évoquée lors des négociations ne finisse dans les limbes de l’histoire. Il me paraît donc bon que notre assemblée se saisisse de la question et donne une majorité à la proposition qui nous est soumise.
Mme Claire Marais-Beuil (RN). Une solution pour réduire les injustices fiscales ? Une taxe, bien sûr ! Énième idée de la gauche à destination des contribuables.
Oui, il y a un problème de justice fiscale en France, comme ailleurs. Mais qu’ont fait les écologistes et les socialistes dans ce domaine entre 2012 et 2017, lorsqu’ils étaient au gouvernement et majoritaires au Parlement, que François Hollande était Président et Cécile Duflot ministre ? Rien. La gauche ne fait des propositions que lorsqu’elle n’est pas au pouvoir. Pire, elle choisit toujours l’injustice. Emmanuel Macron, c’est votre héritage !
Et c’est lui que vous continuez à choisir face à Marine Le Pen, quand le Rassemblement national fait des propositions pour instaurer une véritable justice fiscale. Notre position, à nous, est constante : nous souhaitons nous attaquer d’abord aux rentes et à la fortune financière parfois issue de la spéculation. C’est pourquoi nous avons déposé trois amendements visant à transformer votre taxe en impôt sur la fortune financière. Voilà un moyen de répondre directement au problème de l’injustice fiscale.
M. Mathieu Lefèvre (EPR). Pour ma part, j’assume de penser que nous gagnerions à avoir en France davantage de Bernard Arnault pour créer de la richesse et des emplois.
Votre proposition de loi est une énième flèche décochée contre les entreprises. Elle ne touchera pas que les grands groupes, mais également les petites et moyennes entreprises. En effet, dès lors que les dividendes distribués et les bénéfices qui ne le sont pas figurent indistinctement dans l’assiette, le dispositif conduira nécessairement à renchérir le coût de transmission des PME et contraindra certaines entreprises à distribuer des bénéfices alors qu’elles auraient plutôt besoin d’investir.
De l’aveu même de Gabriel Zucman, cette taxe devrait, pour être efficace, être déployée au niveau international. La France, pays déjà le plus taxé de l’OCDE en dépit des baisses d’impôts voulues par Emmanuel Macron, pourrait bien sûr se targuer d’être la première à appliquer un tel impôt en proclamant que ses entrepreneurs ont le drapeau chevillé au cœur, mais je crains que l’instauration d’une taxation spoliatrice ne les fasse quand même fuir et qu’à la fin, les premières victimes de cette proposition de loi ne soient les Français et les emplois.
Le groupe EPR s’opposera à la proposition de loi. Il préfère travailler en Européen, comme il l’a fait avec l’imposition minimale des sociétés et la taxation des géants du numérique.
M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). La France compte d’un côté 11 millions de pauvres et 8 millions de personnes qui dépendent de l’aide alimentaire, de l’autre 147 milliardaires et 500 familles qui accumulent quelque 1 228 milliards d’euros. Comment une infime minorité peut-elle amasser autant d’argent pendant que le pays galère et que plus d’un Français sur trois saute des repas par manque de moyens ?
Ces inégalités insupportables ne cessent de croître, depuis que Macron sévit à la Présidence. Alors que l’État devrait assurer un peu de justice, de solidarité, d’égalité, vous venez de faire adopter, par 49.3 et avec la complicité du Rassemblement national, un budget ultra-austéritaire qui ne prend rien aux plus riches et prive le pays des 72 milliards en plus que l’Assemblée nationale avait pourtant adoptés, amendement après amendement.
La proposition de loi qui nous est présentée nous offre la possibilité de ramener un tout petit peu d’équité, de garantir que les personnes gagnant plus de 100 millions d’euros par an paient au moins 2 % d’impôt. Cela ne concernerait que les 4 000 personnes les plus riches du pays, soit 0,002 % de la population. J’ajoute que cet argent n’est en réalité pas le leur, car personne ne produit 100 millions par son travail. Être milliardaire est immoral, et cent fois millionnaire aussi, puisque l’argent amassé est le produit du vol de la plus-value du travail.
À titre de comparaison, 100 millions d’euros correspondent à 6 118 années de smic ; les 215 milliards de la fortune de Bernard Arnault, à environ 13 millions d’années de smic. Garantir un minimum d’impôt de 2 % quand les milliardaires en paient bien souvent moins que les autres contribuables apparaît somme toute très raisonnable. C’est même le minimum de la décence.
M. Mickaël Bouloux (SOC). Depuis une vingtaine d’années, les inégalités s’envolent en France. Face à un contexte financier et social délicat et à une crise écologique chaque jour plus prégnante, il apparaît urgent que les ménages les plus aisés, qui ont bénéficié d’un allègement significatif de leur imposition depuis 2017, participent à l’effort national d’augmentation des recettes publiques. Dès lors, le groupe Socialistes et apparentés soutient l’instauration d’un impôt plancher de 2 % sur le patrimoine des contribuables les plus riches. Il a d’ailleurs porté plusieurs amendements en ce sens dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025.
Quelques interrogations subsistent toutefois sur des cas marginaux. Je pense par exemple à un rentier possédant un patrimoine important, mais dont les revenus imposables sont faibles. Le Conseil constitutionnel considérerait-il alors l’impôt comme confiscatoire ?
De plus, la proposition de loi ne supprime pas l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), ce qui peut soulever des problèmes de bornage entre les deux impôts. Il est donc nécessaire de prévoir une appréciation scrupuleuse des conditions d’assujettissement, afin d’éviter toute possibilité d’évasion fiscale.
Nous avons choisi de ne pas déposer d’amendement à ce stade et plaçons notre entière confiance en la rapporteure et en sa volonté d’améliorer les dispositions de la proposition de loi, dont nous espérons le succès et que nous soutenons avec enthousiasme.
M. Thierry Liger (DR). Cette proposition de loi présente tout d’abord l’inconvénient de fixer un plancher mais pas de plafond, ce qui risque de rendre l’impôt confiscatoire.
Elle associe par ailleurs dans un même impôt les revenus et le patrimoine, notamment professionnel. Or certaines situations, dans l’industrie notamment, combinent un important patrimoine professionnel et de faibles revenus. L’instauration d’un impôt plancher pourrait donc mettre certains entrepreneurs en difficulté de trésorerie ou les amputer d’une partie de leur patrimoine, avec de possibles impacts sur l’emploi.
Cette mesure risque également de porter préjudice à l’attractivité de la France, déjà dotée de l’un des niveaux d’imposition les plus élevés de l’OCDE, et ce alors que de nombreux pays travaillent justement à réduire leur fiscalité.
Nous venons d’adopter une contribution différentielle sur les hauts revenus et une contribution exceptionnelle pour certaines entreprises. Selon nous, la solution au déficit réside maintenant essentiellement dans un travail sur les dépenses publiques. Ajouter d’autres impôts n’en est certainement pas une. Notre groupe sera défavorable à cette proposition de loi.
Mme Clémentine Autain (EcoS). La proposition de loi qu’Eva Sas et moi vous proposons peut permettre d’une part d’introduire un peu de justice fiscale dans un monde d’inégalités, d’autre part de renflouer les caisses publiques pour répondre aux besoins du pays.
L’impôt que nous proposons devrait concerner environ 1 800 personnes – le chiffre est approximatif car il est très difficile de connaître le patrimoine des ultrariches en France, ce à quoi il conviendrait d’ailleurs de remédier avec un dispositif qui assure un peu plus de transparence. Selon les calculs de Gabriel Zucman, ses recettes s’établiraient entre 15 et 25 milliards d’euros.
Cela suppose d’inverser la tendance, Emmanuel Macron n’ayant cessé de subventionner les hyper-riches en leur octroyant toujours plus de faveurs fiscales, au prix d’un déficit abyssal, de services publics au régime sec et d’une transition écologique réduite à néant. Pendant que la majorité de la population se serre la ceinture, les 500 plus grandes fortunes françaises ont empoché 1 000 milliards de plus en dix ans.
Ce qui est sidérant, c’est que les ultrariches cotisent infiniment moins en proportion de leur revenu que la majorité des Français. Selon l’Institut des politiques publiques, nos concitoyens paient en moyenne 50 % d’impôts, tout confondu – IR, TVA, cotisations sociales – alors que ce taux s’établit à 27 % pour les milliardaires. La France a ainsi inventé l’impôt régressif, puisque des mécanismes légaux permettent aux plus fortunés de le contourner. Le patrimoine des plus riches est en outre essentiellement constitué d’actifs financiers, atteignant des niveaux de concentration probablement inégalés dans l’histoire.
Voilà pourquoi nous devons revisiter le système d’imposition. Il s’agit d’un enjeu d’égalité et même de décence. Refuser l’instauration d’un impôt plancher de 2 % sur le patrimoine reviendrait à sanctuariser la possibilité pour les ultrariches de se soustraire à l’impôt. Comment imaginer que notre assemblée laisse se perpétuer une telle injustice ?
M. Emmanuel Mandon (Dem). Directement inspirée des travaux de Gabriel Zucman, cette proposition de loi s’appuie sur le constat que le système fiscal français serait régressif pour les foyers les plus riches. Si elle présente le mérite de nous permettre d’échanger sur les moyens de rendre le système plus équitable, elle n’en repose pas moins selon nous sur une erreur fondamentale de principe : vous appréhendez en effet les revenus des plus fortunés en incluant les bénéfices des entreprises qu’ils contrôlent, alors même que ces revenus, dès lors qu’ils ne sont pas distribués, appartiennent à l’entreprise. Un tel raisonnement va à l’encontre du droit des sociétés.
Le dispositif aurait par ailleurs des effets délétères sur la santé du tissu productif français. En taxant le stock indépendamment de sa nature et de sa liquidité, l’impôt grèverait la capacité des entreprises à innover, à investir et à redistribuer. L’ISF prévoyait par exemple des exonérations visant à préserver le patrimoine professionnel.
Enfin, cet impôt contrevient à la réalité économique. L’instaurer unilatéralement dans une économie ouverte présenterait un risque majeur pour l’attractivité du pays.
Pour toutes ces raisons, le groupe Les Démocrates votera contre. Nous souhaitons, dans l’esprit des réflexions conduites au sein du G20, que la coopération internationale soit privilégiée pour renforcer efficacement la fiscalité appliquée aux grandes fortunes. Des travaux pourraient également être menés à l’échelle européenne et nationale afin d’inciter à la redistribution et à l’investissement des bénéfices non distribués localisés dans les holdings.
M. François Jolivet (HOR). Merci de nous proposer ce texte, qui apporte une contribution bienvenue au débat sur les recettes de l’État. Nous nous inquiétons toutefois des effets de bord qu’il serait susceptible de créer.
Sans préjuger de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, la question du caractère confiscatoire de cette imposition se pose réellement, d’autant que le dispositif proposé cohabiterait avec l’IFI.
Gabriel Zucman insiste par ailleurs dans son rapport sur la dimension non pas nationale, ni même européenne, mais nécessairement internationale d’une telle taxation. La présente proposition de loi doit certainement combler les conseillers de M. Trump qui suivent nos travaux – et je crains que les industriels et les investisseurs du monde de l’intelligence artificielle que nous recevions hier à Paris ne reviennent pas si elle était adoptée !
Le texte prévoit d’intégrer à l’assiette taxable les contrats d’assurance vie temporairement non rachetables. Autre innovation, il impose une taxation de 2 % sur la fortune nette, frappant ainsi l’immobilier d’entreprise et le capital détenu. Il s’agit en somme d’un nouvel ISF venant toucher les outils de production. À ce propos, il ne me semble pas avoir vu d’exemption pour les sociétés foncières privées portant la production de logements.
Le groupe Horizon sera défavorable à cette proposition de loi.
M. Jean-Pierre Bataille (LIOT). Je pense que tous les parlementaires souscrivent à l’impératif de justice fiscale, qui soulève la question de l’impôt appliqué aux plus fortunés.
La mesure proposée présente toutefois le risque de déclasser encore la France, qui présente déjà le taux de prélèvements obligatoires le plus élevé parmi les États développés. Cette taxation conséquente, dont le rendement serait de l’ordre de 15 à 25 milliards d’euros, pourrait encourager l’exil fiscal tandis que son assiette, incluant les biens professionnels, engendrerait un risque pour l’appareil productif français – sans parler du risque d’inconstitutionnalité que vous écartez d’un revers de main.
Le groupe LIOT estime nécessaire d’explorer des solutions fiscales plus justes pour les plus hauts patrimoines et salue l’ouverture par le premier ministre, à la demande des socialistes, d’un chantier dans cet esprit. Il lui apparaît qu’un travail approfondi sur les niches fiscales constituerait une approche plus pertinente et équilibrée que celle qui est proposée. Il est opposé aux fondements du présent texte mais s’associera à toute avancée pertinente dans la quête, sans doute utopique, d’une parfaite justice fiscale.
M. Nicolas Sansu (GDR). Je remercie et félicite le groupe Écologiste et social d’avoir choisi d’inscrire ce texte dans sa niche parlementaire. Le débat public impose de s’intéresser au sujet : en témoignent les travaux conduits par le G20 et l’OCDE, le rapport produit par Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz ou encore l’étude de l’IPP montrant que les plus riches ne contribuent pas à la hauteur de leur fortune.
La question centrale est celle du consentement à l’impôt. Il faut faire en sorte que ce soit le travail qui enrichisse, plus que le patrimoine, que cette « boule d’héritage » qui ne cesse de grossir. J’ajoute que l’impôt proposé ne toucherait qu’un nombre infime de personnes et que lorsqu’on possède 100 millions, payer 2 millions tous impôts confondus, y compris l’IR et l’IFI, n’est vraiment pas grand-chose. Refuser d’instaurer cet impôt serait donc une erreur.
En 2024, Bernard Arnault a versé 3 milliards d’euros dans une holding familiale. Avec un système transparent, cela aurait dû générer, avec 30 % de flat tax, quelque 900 millions d’euros de recettes fiscales. Mais comme c’est la quote-part pour frais et charges qui s’impose, avec un impôt sur les sociétés à 25 %, cela n’a rapporté que 37,5 millions d’euros de recettes. Voilà la réalité !
Par ailleurs, à ce niveau de patrimoine, il ne s’agit pas que de villas et de yachts : il s’agit d’une fortune financière. Que le Rassemblement national se rassure, Montretout ne sera pas taxé !
Enfin, le contexte mondial est particulièrement inquiétant : les milliardaires font désormais partie du gouvernement Trump, avec une volonté impérialiste affichée. La France s’honorerait à souligner la nécessité de stopper un tel système, porteur de violence et de guerre.
M. Charles de Courson, rapporteur général. Cette idée d’un impôt plancher sur la fortune, si elle est intéressante, se heurte selon moi à des obstacles nombreux et majeurs.
Le premier est celui de la constitutionnalité. La jurisprudence du Conseil constitutionnel plafonne en effet à 70 % le total de l’impôt au regard du revenu disponible – et non d’un revenu potentiel. Le nouvel impôt sera donc confiscatoire dès lors qu’il s’appliquera à des biens qui rapportent moins de 2 % – et même de 1,4 % compte tenu du taux de 70 % – puisque cela reviendra à prélever la totalité du revenu disponible. Nous nous sommes déjà heurtés à la même difficulté s’agissant de l’ISF.
La deuxième difficulté réside dans l’inclusion dans l’assiette de l’impôt des biens professionnels. Ces derniers en ont toujours été exclus, au nom de la préservation de l’outil de travail, pour éviter les délocalisations d’entreprises. Lors de la discussion sur l’ISF, ils en avaient été exclus après adoption du fameux « amendement Liliane », qui avait été négocié directement entre la famille Bettencourt et François Mitterrand.
Troisième écueil : la concurrence internationale. Les fortunes visées par le présent impôt étant essentiellement mobilières, elles sont susceptibles à tout moment de se délocaliser.
Ces différents obstacles me paraissent incontournables en l’état actuel de l’interprétation qu’en donne le Conseil constitutionnel.
Je mentionne aussi un problème secondaire : cet impôt concernerait le patrimoine net, y compris les assurances vie ; or ces dernières, juridiquement, ne sont plus la propriété de leurs auteurs.
Reste que le problème posé par notre collègue est bien réel. La fameuse « étude secrète » conduite par le service de la législation fiscale du temps de l’ISF avait montré que dix des cinquante plus grandes fortunes françaises ne s’acquittaient pas de l’ISF, et que les quarante autres ne contribuaient qu’à 10 % à peine du barème. Les gens s’organisaient en effet en holdings familiales ne distribuant que très peu de revenus : certains même ne déclaraient aucun revenu, vivant de prêts à la consommation remboursés occasionnellement après une plus-value effectuée sur une partie de leur patrimoine. L’ISF a ainsi été complètement contourné et n’a plus concerné que les « petits riches » disposant de fortunes immobilières, et non les très grosses fortunes mobilières.
L’une des pistes majeures à explorer serait par conséquent celle des holdings familiales. Pour franchir les obstacles tant constitutionnels que concurrentiels, une solution serait peut-être de créer un précompte sur les revenus placés dans les holdings familiales non distribués.
En l’état, en tant que rapporteur général, je ne peux pas donner un avis favorable à cette proposition de loi.
Mme Eva Sas, rapporteure. Je remercie chacun pour sa contribution.
Madame Marais-Beuil, mon but n’est pas de taxer toujours plus, mais de faire en sorte que chacun paye sa part. Puisque votre groupe est favorable à une meilleure justice fiscale, nous attendons qu’il le prouve en votant ce texte qui répond directement à cet objectif.
Monsieur Lefèvre, en fixant le seuil de cet impôt à 100 millions d’euros, nous en excluons clairement les artisans et les PME. Cet argument ne tient donc pas.
Vous considérez que cette mesure devrait être prise à l’échelon international, mais Gabriel Zucman lui-même, avec lequel nous avons échangé, considère qu’il serait une très bonne chose que la France soit pionnière : cela ouvrirait la voie à la négociation internationale. La ministre Amélie de Montchalin a quant à elle cité l’exemple de la taxe Gafam, instituée par la France et qui a constitué un premier pas vers une taxation minimale des multinationales à l’échelle internationale. C’est bien la preuve que la France peut être pionnière sans déstabiliser son système fiscal ni économique.
Je partage l’indignation d’Aurélien Le Coq et de Mickaël Bouloux face à l’accroissement des inégalités et du patrimoine des plus riches dans notre pays.
Concernant la question des liquidités nécessaires pour s’acquitter de l’impôt, qui peuvent effectivement manquer ponctuellement, la proposition de loi prévoit la possibilité d’étaler le paiement sur cinq ans.
Monsieur Liger, le cas des patrimoines professionnels ne générant pas de revenu me paraît pour le moins marginal, et théorique. Cet argument est toujours utilisé pour perpétuer les comportements de contournement de l’impôt des plus fortunés, mais il ne me semble pas recevable.
Je remercie Clémentine Autain du travail effectué en commun.
Monsieur Mandon, vouloir protéger les revenus non distribués dans les holdings condamne à l’inaction face à l’évasion fiscale, puisque les plus riches s’appuient précisément sur cet élément pour contourner l’impôt.
Monsieur Jolivet, nous espérons bien sûr que la mesure que nous proposons sera adoptée au niveau international.
Les sociétés immobilières entrent bien dans le périmètre de la taxation, qui ne concerne toutefois, je le rappelle, que les contribuables physiques disposant d’un patrimoine d’au moins 100 millions. Le cas que vous soulevez est donc marginal, voire inexistant – comme tous ceux qui sont évoqués pour protéger ceux qui se livrent au contournement de l’impôt.
Monsieur Bataille et monsieur le rapporteur général, nous avons bien évidemment étudié l’argument de la constitutionnalité. Oui, la jurisprudence de 2011 peut laisser penser que la mesure que nous proposons serait déclarée conforme à la Constitution ; en tout état de cause, la question mérite d’être posée, ce qui sera possible si nous adoptons cette proposition de loi. Rien ne préjuge de la réponse du Conseil constitutionnel, qui avait considéré, en 2011, qu’il fallait faire obstacle à ce que les contribuables aménagent leur situation en privilégiant la détention de biens ne procurant aucun revenu imposable : cela correspond précisément à la situation visée par la proposition de loi.
J’entends les arguments invoqués, mais vous invite à ne pas céder à l’inaction devant l’évasion fiscale des plus riches. Ne pas adopter cet impôt plancher décevrait assurément les Français, qui tous aspirent à une égalité devant l’impôt.
Article unique
Amendements de suppression CF1 de M. Mathieu Lefèvre et CF13 de M. Jean-Didier Berger
M. Mathieu Lefèvre (EPR). Je suis toujours surpris que la question du secret fiscal puisse être mise à mal dans notre commission. Vous avez évoqué la situation personnelle d’un contribuable, monsieur le président, ce que je trouve extrêmement dangereux pour la démocratie. Et, pardon madame Autain, je n’ai pas très envie de vivre dans un monde où tout le monde connaîtrait mon patrimoine.
Madame la rapporteure, vous ne m’avez pas répondu au fond. Votre taxe ne permet pas de purger les plus-values latentes. Elle inclut l’ensemble du patrimoine des contribuables concernés, qu’il s’agisse des dividendes ou des bénéfices non distribués, ce qui aura un impact très important sur la valeur des actions prise en compte dans le cadre de la valorisation des titres détenus, donc sur la transmission des entreprises, dont le coût est déjà très élevé en France. C’est cela qui avait justifié l’instauration du pacte Dutreil, que vous souhaitez par ailleurs remettre en cause. Comment considérer qu’il ne faut pas sortir les dividendes pour financer la transmission ? Il nous faut une réponse sur ce point technique – sauf à considérer qu’avec un patrimoine de 100 millions, on n’a aucune action ni dividende dans des entreprises françaises qui, accessoirement, créent de la croissance et de l’emploi.
Nous demandons donc la suppression de l’article unique.
M. Jean-Didier Berger (DR). Il nous paraît malvenu, dans un pays déjà champion du monde en matière de fiscalité, d’aggraver la situation par l’ajout d’un impôt. Nous préférons, pour améliorer les équilibres financiers, réduire la dépense publique plutôt qu’augmenter la pression fiscale au risque de nuire à la compétitivité des entreprises et à l’image de la France sur la scène internationale.
Si des recettes fiscales devaient toutefois être trouvées, la taxation proposée ne conviendrait pas : outre les nombreux inconvénients déjà soulevés, elle conduirait à accroître la complexité de notre fiscalité, qui explique déjà largement les failles constatées. Améliorer la justice fiscale passe au contraire par une simplification – voire une révolution –, afin de rendre le système plus juste et compréhensible par l’ensemble des Français. Oui, notre impôt censément progressif peut être en réalité dégressif et nous avons un travail d’ampleur à mener sur la question.
Mme Eva Sas, rapporteure. Cette proposition de loi ne concerne pas la transmission d’entreprises et ne remet aucunement en cause le pacte Dutreil, un dispositif très avantageux qui exonère à 75 % la transmission des parts d’entreprises et permet de maintenir un actionnariat familial.
Quant à la complexité du mécanisme, je signale que son principe est exactement celui qui a été retenu par le gouvernement pour éviter les abus en matière d’évasion fiscale. Non, ce dispositif n’ajouterait pas de la complexité mais de la justice fiscale, ce dont notre pays a bien besoin. Avis défavorable.
M. le président Éric Coquerel. Monsieur Lefèvre, je regrette que vous repreniez des insinuations faites à mon encontre à l’époque de ma première élection à la présidence de cette commission. Certains avaient agité le risque que je rende publics les documents fiscaux que ma fonction me permet d’obtenir. Vous remarquerez qu’en plus de deux ans, cela ne s’est jamais produit. En l’occurrence, j’estime simplement utile, à partir du moment où Bernard Arnault fait de ses impôts un objet politique, de vérifier si ses affirmations sont exactes.
S’agissant des amendements, il me semble que les adopter serait une régression par rapport au débat que nous avons eu sur le projet de loi de finances : dans un contexte où il est avéré que les plus riches ne paient pas l’impôt dont ils devraient s’acquitter, une majorité d’entre nous s’étaient exprimés pour un rééquilibrage, en adéquation d’ailleurs avec le sentiment global des Français.
L’étude de l’IPP de juin 2023 conclut que le taux d’imposition effectif est progressif jusqu’à des niveaux de revenus élevés, y compris pour les 1 % des ménages les plus riches, mais devient régressif au-delà. S’il s’élève à 46 % pour les 0,1 % de foyers fiscaux les plus riches, l’impôt passe à 26 % pour les 0,002 % les plus riches. Dans un pays où le consentement à l’impôt est essentiel, il me semble normal de rétablir une forme d’équité, quelle que soit par ailleurs l’ampleur de ce qu’apportent à l’économie ces grandes fortunes, dont je rappelle qu’elles n’existeraient pas sans le travail des salariés.
M. Matthias Renault (RN). Je tiens à rappeler que Gabriel Zucman, dont on reprend ici une taxe pensée pour être mondiale, est un économiste très engagé, qui a signé une tribune de soutien à la NUPES lors des élections législatives et ne trouve rien à redire à son programme économique invraisemblable.
L’objectif du texte est clairement de revenir sur la loi de finances pour 2025. Je doute qu’une proposition de loi soit le vecteur le mieux adapté pour cela. Par ailleurs, ce budget, qui a porté notre taux de prélèvements obligatoires à 43,5 %, nous permettant de rester le pays le plus taxé au monde, prévoit aussi une contribution exceptionnelle sur les grandes entreprises. C’est à tout cela que s’ajouterait la taxe Zucman, qui inclut les biens assurant l’activité productive. C’est vraiment la course à l’échalote.
Le groupe Rassemblement national va néanmoins s’abstenir lors du vote des amendements de suppression, car il souhaite débattre de sa proposition de transformer l’IFI en impôt sur la fortune financière.
Mme Clémentine Autain (EcoS). Le discours du Rassemblement national met tout le monde sur le même plan. Or, depuis 2019, les milliardaires ont vu leur fortune augmenter de 1,3 million d’euros par jour. Je suis donc sidérée d’entendre qu’il ne faudrait surtout pas les taxer ni les empêcher de contourner l’impôt. Quand il y a des fuites, monsieur de Courson, il faut boucher tous les trous : nous proposons un mécanisme, mais si vous avez d’autres idées pour s’attaquer aux holdings familiales, nous sommes preneurs.
On nous oppose l’argument de la compétitivité et de la délocalisation de l’outil de production : c’est méconnaître la construction de ces fortunes et leur liquidité extrême. Si nous ne prenons pas au sérieux cette taxe de 2 %, Bernard Arnault continuera à ne pas être imposé sur ses 190 milliards de patrimoine. Je n’ai pas encore entendu de proposition alternative sérieuse permettant d’affronter ce problème du contournement de l’impôt. Et je trouve inacceptable, dans une situation aussi grave, d’entendre que taxer le patrimoine des milliardaires à 2 % poserait un problème de constitutionnalité – autrement dit, d’égalité devant l’impôt !
M. Thomas Cazenave (EPR). Je soutiens l’amendement de Mathieu Lefèvre, même si je comprends l’intention de la rapporteure. Il n’y a pas de problème avec les riches en France, qui paient beaucoup d’impôts, mais il y a en effet un problème avec les ultrariches, dont plusieurs travaux montrent qu’ils ne paient pas assez d’impôts au regard de leurs revenus et de leur patrimoine.
Toutefois, le patrimoine est liquide et se déplace. Vous pouvez vous faire plaisir avec votre belle proposition de loi, mais la base taxable partira du jour au lendemain. Je trouve que vous balayez un peu trop vite l’argument de l’ouverture internationale. Nous ne sommes pas une île. Vous voulez appliquer au niveau national ce que Gabriel Zucman a pensé à l’échelle européenne et internationale. Ce faisant, vous allez ouvrir une brèche et lorsque les patrimoines se seront déplacés, non seulement vous n’aurez pas plus de justice fiscale, mais vous n’obtiendrez pas le rendement attendu. C’est la raison pour laquelle nous sommes contre, non pas votre objectif, mais votre proposition de loi purement incantatoire.
Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Je suis un peu atterrée de voir qu’on invente n’importe quel prétexte pour éviter de taxer 1 800 personnes dans ce pays. S’agissant des ultrariches, nous ne sommes absolument pas les champions de la fiscalité ! De plus, il ne s’agit pas d’une taxe ou d’un impôt mais d’une garantie de contribution effective.
Je regrette par ailleurs que M. le rapporteur général brandisse de façon systématique le principe de constitutionnalité. Nous sommes ici entre parlementaires : adoptons ce texte et nous verrons bien ensuite ce que décide le Conseil constitutionnel. Je rappelle que cette mesure pourrait rapporter 20 milliards au budget de la France, ce qui, dans les circonstances actuelles, n’est pas un simple détail.
Enfin, on peut s’amuser que le Rassemblement national, qui se fait habituellement le défenseur des opprimés, refuse un impôt qui pourrait rétablir un peu de justice fiscale et qui est très attendu par les Français. Ces derniers déplorent que les ultrariches ne s’acquittent pas de leurs impôts alors qu’eux-mêmes en payent tous, ne serait-ce qu’avec la TVA.
Mme Marie-Christine Dalloz (DR). Votre but, madame la rapporteure, serait de lutter contre les abus en matière fiscale. Mais des dispositifs anti-abus existent déjà dans notre réglementation fiscale : votre texte ne répondra pas mieux à la situation.
De plus, il soulève deux questions. La première concerne le niveau de nos prélèvements. Si, madame Feld, nous sommes bien les champions du monde de la fiscalité ! Notre imposition est maximale et entrave nos perspectives économiques. La deuxième question porte sur la compétitivité des entreprises. Comment rendre notre pays attractif quand vous n’avez que le mot taxation à la bouche ? Vous n’abordez pas ce sujet.
Par ailleurs, vous pouvez faire toutes les simulations que vous voulez, mais lorsque les fortunes seront délocalisées, le rendement de l’impôt sera nul. La taxation n’est pas l’alpha et l’oméga de notre économie. Chacune de vos propositions vise à rajouter une nouvelle taxe. Je crois que vous prenez les choses dans le mauvais sens.
Enfin, monsieur le président, puisque vous parlez de consentement à l’impôt, il faudrait s’interroger sur le nombre de contribuables s’acquittant d’un impôt sur le revenu, qui est très faible en France par comparaison aux autres pays européens. Il conviendrait peut-être de créer une taxe très basse mais portant sur l’ensemble des contribuables.
Pour toutes ces raisons, nous voterons pour la suppression de cette proposition de loi.
M. le président Éric Coquerel. Je suis favorable à l’instauration de quatorze tranches qui concerneraient tout le monde : ce serait plus juste. La prochaine fois, madame Dalloz, vous pourrez donc voter avec moi !
M. Nicolas Sansu (GDR). On nous reproche de n’avoir que le mot taxation à la bouche : c’est faux ! Ce sont le consentement à l’impôt et la justice fiscale qui sont nos maîtres mots. Face aux défis posés par la transition écologique et par l’urgence climatique, soyons un peu sérieux.
Vous nous mettez en garde contre l’exil des riches, mais les États-Unis taxent leurs citoyens même quand ils quittent le pays ! Pour notre part, nous avons diminué la durée de l’exit tax… C’est totalement inconséquent de la part de nos dirigeants, alors qu’il existe des dispositifs permettant de taxer ceux qui voudraient délocaliser leur fortune financière. On pourrait par exemple les taxer pendant quinze ou vingt ans après leur départ, puisqu’ils ont bénéficié de l’éducation et du système de santé de notre pays. Ce sujet est sur la table de l’OCDE et du G20, alors arrêtez d’utiliser cet argument !
Enfin, madame Dalloz, tout le monde paye des impôts avec la TVA, qui est le premier d’entre eux. L’impôt sur le revenu n’est pas le seul prélèvement obligatoire ; c’est même un des plus petits rendements de notre architecture fiscale.
M. Mickaël Bouloux (SOC). Je suis effaré par le conservatisme de nos collègues de droite et d’extrême droite. Nous proposons une taxe relativement modérée de 2 % portant sur 0,002 % des patrimoines – ceux qui augmentent de 10 % à 15 % chaque année sans rien faire. Il s’agit d’une simple participation au bien commun, qui bénéficie par ailleurs aux contribuables concernés : croyez-vous qu’ils pourront maintenir ce niveau de rentabilité à long terme dans une société qui va mal faute d’investissements, sans parler de l’état de la planète ? Nous voterons contre ces amendements de suppression.
Mme Eva Sas, rapporteure. Monsieur Renault, il ne s’agit pas d’un impôt qui s’ajoute aux autres mais d’une taxation différentielle, permettant de s’assurer que l’ensemble de ce qui est acquitté atteint un plancher de 2 %. Ce n’est qu’un filet anti-abus. Nous sommes sur la bonne piste puisque le gouvernement réfléchit à un dispositif similaire. Or celui que nous vous proposons est opérationnel : inutile de différer plus longtemps.
Madame Dalloz, la réglementation anti-abus est manifestement inopérante puisque l’IPP a démontré que les plus riches échappent à la taxation et ne payent que 2 % d’impôts sur le revenu, tous impôts personnels confondus.
Certains disent que l’on paye trop d’impôts en France, mais ce n’est pas vrai pour tout le monde ! Cela pourrait se discuter pour les classes moyennes et supérieures, mais ce dispositif, justement pour rétablir l’égalité, ne concernera que les 1 800 contribuables les plus aisés. Ce sont ces derniers que vous protégez en vous opposant à ce texte.
Enfin, personne ne nie l’existence d’un risque d’exil fiscal. Je dis simplement qu’il y a souvent un grand pas entre la menace et son exécution. Les études réalisées dans d’autres pays, comme la Suède, montrent que l’exil fiscal est en vérité très faible parce que les contribuables les plus aisés, comme tout le monde, ont des attaches familiales et territoriales qui ne se défont pas si facilement. Il faut donc relativiser. Mais nous avons pris en compte cet argument puisque nous vous proposerons un amendement permettant de faire perdurer le dispositif pendant cinq ans après une expatriation fiscale.
La commission rejette les amendements de suppression.
Amendement CF12 de M. Jean-Philippe Tanguy
M. Matthias Renault (RN). Nous proposons de transformer l’impôt sur la fortune immobilière en impôt sur la fortune financière. C’est un amendement que nous défendons depuis des années. La gauche, quant à elle, s’y oppose depuis des années, tout en prétendant défendre les pauvres contre les riches : elle peut garder ses leçons !
Nous considérons qu’il n’y a aucune honte à faire fortune, au contraire. C’est une différence fondamentale avec la gauche, qui considère que s’enrichir est dégoûtant et que réussir est honteux. Nous pensons qu’il y a différentes façons de faire fortune et que toutes ne se valent pas. Il est tout à fait positif de s’enrichir en créant des entreprises et de la richesse dans l’économie réelle ; les rentes et la spéculation sont nettement moins légitimes. C’est toute la philosophie de notre impôt sur la fortune financière, qui est une taxe antispéculation – contrairement à l’IFI actuel, qui taxe le patrimoine enraciné.
Mme Eva Sas, rapporteure. Bien que je sois d’accord sur le fait que la fortune financière mérite d’être mieux imposée, je trouve votre proposition trop restrictive par rapport à l’impôt plancher sur la fortune, dont l’assiette est plus large et permet d’inclure des éléments relevant de la fortune immobilière. L’imposition que nous proposons est également plus juste car elle cible spécifiquement la tranche des contribuables les moins imposés et les plus aisés, ce que ne fait pas votre impôt sur la fortune financière. Avis défavorable.
M. Matthias Renault (RN). Ce n’est pas qu’une question d’assiette : notre dispositif est complètement différent du vôtre car il vise les revenus financiers et non le patrimoine. L’esprit n’est pas du tout le même.
Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP). Je remarque que le Rassemblement national utilise les mêmes mots que sa patronne, Mme Le Pen, qui avait déclaré en 2022 que l’IFI était un impôt taxant l’enracinement des Français propriétaires. Leur impôt sur la fortune financière vise à protéger les classes moyennes assujetties à l’ISF du seul fait de la valorisation d’un patrimoine immobilier familial. Or l’IFI comporte déjà un abattement : seuls les contribuables détenant un patrimoine supérieur à 1,3 million d’euros, soit moins de 1 % des Français, en sont redevables – on est loin des classes moyennes qu’évoque Mme Le Pen. C’est une insulte pour les 50 % des Français dont le patrimoine est inférieur à 100 000 euros. On sait pourquoi le Rassemblement national propose chaque année ce nouvel impôt : pour en faire disparaître un auquel Mme Le Pen devrait être assujettie !
La commission rejette l’amendement.
Amendement CF11 de M. Jean-Philippe Tanguy
M. Kévin Mauvieux (RN). Il s’agit d’un amendement de repli visant à sortir les biens immobiliers du calcul de l’assiette de l’impôt. Nous considérons qu’il faut orienter la taxation sur les flux financiers et sur la spéculation plutôt que sur les biens immobiliers.
Mme Eva Sas, rapporteure. Il ne nous paraît pas justifié d’exclure des biens immobiliers de l’assiette de l’impôt plancher sur la fortune. Celui-ci cible les patrimoines très élevés, de plus de 100 millions d’euros, ce qui exclut toute taxation injuste des classes moyennes. Avis défavorable.
Mme Clémentine Autain (EcoS). Le Rassemblement national n’a pas le même rapport à l’argent et à la fortune que nous. Les patrimoines des ultrariches que nous voulons soumettre à un impôt plancher proviennent pour l’essentiel d’actifs financiers, qui seront donc taxés à 2 %. Votre amendement, plus ciblé, est forcément moins-disant et reviendra en réalité à protéger les milliardaires. Notre taxe atteindra sa cible, à savoir les actifs financiers détenus par les holdings, qui sont les nouveaux moyens pour les milliardaires et les ultrariches d’échapper à l’impôt.
La commission rejette l’amendement.
Amendement CF4 de Mme Mathilde Feld
Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). La lutte contre l’évasion fiscale a été abandonnée par les macronistes et l’ensemble de la droite, alors qu’il s’agit d’un des plus grands fléaux de ce siècle. Le rapport que j’y avais consacré avec Nicolas Sansu reprenait ce constat de Gabriel Zucman que notre pays est devenu un paradis fiscal pour les plus riches, et proposait déjà la création d’un impôt plancher. Ce rapport s’intéressait également à l’action de nos gouvernements successifs au cours des sept dernières années, et le constat est sans appel : les plans de communication portés par M. Attal et M. Darmanin lorsqu’ils étaient chargés du budget n’ont été suivis d’aucun acte. La Cour des comptes a récemment adressé un référé au premier ministre sur le plan de lutte contre les fraudes aux finances publiques lancé en grande pompe par Gabriel Attal en 2023, qui prévoyait la création d’une unité de renseignement spécialisée dans la recherche et la prévention des fraudes fiscales les plus complexes et les plus graves. Deux ans plus tard, sur la centaine d’agents expérimentés qui devaient composer ce service, seules trois fiches de poste ont été créées et aucun recrutement n’a été réalisé.
Camarades macronistes, vous n’avez rien fait car vous aviez sans doute un problème de recettes. Vous avez l’occasion de vous rattraper en votant en faveur de ce texte de justice fiscale et sociale, ainsi que pour cet amendement visant à abaisser le seuil de l’impôt plancher à 50 millions d’euros.
Mme Eva Sas, rapporteure. Je privilégie le seuil de 100 millions pour éviter tout risque d’atteinte aux outils productifs des entreprises petites et moyennes. Un tel seuil ne touche vraiment que les ultrariches ; cela évite les faux débats. Avis défavorable.
L’amendement est retiré.
La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CF14 et CF15 de Mme Eva Sas, rapporteure.
Amendement CF30 de Mme Eva Sas
Mme Eva Sas, rapporteure. C’est l’amendement dont je parlais tout à l’heure qui prévoit un dispositif anti-exil fiscal. Ceux qui s’expatrient resteraient ainsi soumis à l’impôt plancher pendant une durée de cinq ans après leur départ. Cela renforce le texte, même si ce phénomène de l’exil fiscal demeure marginal
Mme Clémentine Autain (EcoS). Dès qu’il s’agit de taxer les ultrariches, on nous oppose le risque d’une fuite des capitaux. Je soutiens donc cet amendement important qui permettra de contenir cette éventualité. Surtout, il faut battre cet argument en brèche car, en réalité, le risque n’est pas si important que cela, comme on l’a constaté avec d’autres mesures fiscales s’attaquant aux milliardaires. On ne peut pas, au prétexte que quelques-uns partiraient, renoncer à agir et laisser les milliardaires contourner l’impôt.
La commission adopte l’amendement.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CF16, CF17, CF18 et CF19 de Mme Eva Sas, rapporteure.
Amendements CF5 de Mme Mathilde Feld et CF10 de M. Jean-Philippe Tanguy (discussion commune)
Mme Mathilde Feld (LFI-NFP). Si la France est devenue un paradis fiscal pour les multimillionnaires, c’est parce que sa législation est trop permissive. Les plus pauvres payent la TVA sur l’intégralité de leur revenu, puisqu’ils le consomment entièrement. Les salariés des classes moyennes payent l’impôt sur le revenu, puisqu’ils n’ont pas d’avocats pour les en exempter. Les milliardaires, eux, peuvent profiter de notre système mité de niches et d’exonérations. Pour que tout le monde soit traité de façon égale, que les gros payent gros et que les petits payent petit, il est essentiel d’adopter cette proposition de loi. Nous proposons par cet amendement d’augmenter le taux de l’impôt plancher.
Les députés du Rassemblement national proposent, pour restaurer la justice fiscale, d’instaurer un impôt sur la fortune financière, sorte d’IFI macroniste inversé fondé sur une conception étriquée du patrimoine taxable. Ils font ainsi semblant de méconnaître la structure du patrimoine des multimillionnaires, composé majoritairement d’actifs financiers. Mais s’ils votaient contre une proposition de loi qui sert précisément l’objectif qu’ils prétendent se fixer, ils montreraient qu’ils sont les garants du patrimoine des grandes fortunes. Ils confirmeraient ainsi qu’ils ne sont pas une alternative au macronisme mais son prolongement autoritaire, qu’ils n’œuvrent pas en faveur de l’intérêt commun mais dans le but de rassurer les nantis.
Qu’ils prouvent donc le contraire en votant pour cette proposition de loi, et pour cet amendement qui la rend encore plus juste et plus productive !
Mme Claire Marais-Beuil (RN). Nous continuons à préférer un impôt sur la fortune financière et proposons de ramener le taux de l’impôt plancher de 2 % à 1,5 %.
Mme Eva Sas, rapporteure. Je comprends le souhait de porter le taux à 3 % ; cela reste très bas. Toutefois, le taux de 2 % nous semble plus équilibré et efficace – c’est le taux qui a été retenu par Gabriel Zucman au niveau international. Il soulève moins de risques d’inconstitutionnalité et rapporterait 20 milliards, ce qui nous paraît déjà important.
De la même façon, il ne nous semble pas nécessaire de baisser le taux à 1,5 %, d’autant que nous avons besoin de recettes fiscales. Dès lors, et pour rester dans la droite ligne des travaux de Gabriel Zucman, j’émets un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président Éric Coquerel. Certains ici ont dépeint la France comme la championne d’Europe toutes catégories du taux de prélèvements obligatoires, invoquant une supposée concurrence internationale qui pourrait inciter les ultrariches à quitter le pays s’ils étaient davantage imposés.
Un récent rapport du Conseil des prélèvements obligatoires comparant les systèmes d’imposition de sept pays cibles considérés comme représentatifs montre pourtant que, si la France se place en troisième position, derrière le Danemark et l’Allemagne, pour les ménages dont le revenu équivaut à 50 % du salaire moyen du pays, elle n’est plus que cinquième – dépassée par la Belgique et le Royaume-Uni – pour ceux dont le revenu représente 250 % de ce salaire.
M. Aurélien Le Coq (LFI-NFP). L’énergie déployée par le Rassemblement national pour raboter la mesure ou en diminuer le périmètre est absolument hallucinante. Il n’avait pas les mêmes préoccupations quand il s’agissait de laisser passer le projet de loi de financement de la sécurité sociale qui faisait 400 millions d’économies sur le dos des apprentis !
On parle ici de taxer des fortunes colossales, supérieures à 100 millions d’euros. S’agissant du patrimoine immobilier, après application des abattements, l’IFI ne taxe que les biens dont la valeur est supérieure à 1,9 million d’euros. Le texte présenté par Eva Sas prévoit un abattement de 1 million d’euros pour les résidences principales. Cette proposition reste donc très raisonnable.
Mme Clémentine Autain (EcoS). Le Rassemblement national a à cœur de baisser le taux d’imposition plancher. On ne dira jamais assez qu’il n’est pas favorable au partage des richesses et protège, en fin de compte, les fortunes des milliardaires. Nos débats le révèlent une fois de plus.
Porter le taux de l’impôt plancher à 3 % serait un pied de nez assez amusant à l’égard de la règle des 3 % de déficit public inventée sur un coin de table à Bruxelles, et l’on peut toujours discuter d’où il faut placer le curseur : si nous avions fixé le taux à 3 %, vous auriez demandé 4 % et si nous avions établi le seuil à 50 millions vous auriez proposé 25 millions. Mais notre proposition de 2 % reprend celle défendue au G20 par Gabriel Zucman. C’est un début, qui nous permet de mettre le pied dans la porte. Ce texte, s’il était adopté, constituerait déjà un bouleversement dans notre législation fiscale.
La commission rejette successivement les amendements.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CF20, CF21, CF22, CF29, CF23, CF24, CF25, CF26, CF27 et CF28 de Mme Eva Sas, rapporteure.
Amendement CF2 de M. Mathieu Lefèvre
M. Mathieu Lefèvre (EPR). Je propose de subordonner l’entrée en vigueur du texte à un accord conclu au moins au niveau européen, ou dans le cadre du G20. Vous n’avez pas répondu à l’argument relatif à la mobilité des capitaux et des chefs d’entreprise, ni à la question des transmissions patrimoniales, qui se posera forcément au vu de l’assiette que vous entendez prendre en compte.
Mme Eva Sas, rapporteure. Cet amendement me semble relever d’une stratégie dilatoire visant à retarder indéfiniment l’instauration d’un mécanisme pourtant nécessaire et légitime. Rien, à part l’absence de volonté politique, ne s’oppose à la création de cet impôt : ni le droit européen, ni le droit international n’empêchent la France d’agir dès maintenant.
Nous venons d’adopter une mesure visant à freiner l’expatriation fiscale. Dès lors, il n’est pas nécessaire d’attendre un accord international ou européen. La France peut être pionnière en la matière comme elle l’a été en créant la taxe Gafam sans déstabiliser son système fiscal et économique.
La commission rejette l’amendement.
Elle adopte l’article unique modifié.
L’ensemble de la proposition de loi est ainsi adopté.
Membres présents ou excusés
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mercredi 12 février 2025 à 9 heures 30
Présents. - M. Franck Allisio, M. David Amiel, Mme Clémentine Autain, Mme Géraldine Bannier, M. Jean-Pierre Bataille, M. Laurent Baumel, M. Jean-Didier Berger, M. Carlos Martens Bilongo, M. Mickaël Bouloux, M. Philippe Brun, M. Stéphane Buchou, M. Eddy Casterman, Mme Gabrielle Cathala, M. Thomas Cazenave, M. Éric Coquerel, M. Alexis Corbière, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Sébastien Delogu, M. Jocelyn Dessigny, M. Benjamin Dirx, Mme Mathilde Feld, Mme Marina Ferrari, M. Emmanuel Fouquart, Mme Félicie Gérard, M. Christian Girard, Mme Perrine Goulet, M. David Guiraud, M. Stéphane Hablot, M. Pierre Henriet, M. François Jolivet, M. Philippe Juvin, M. Daniel Labaronne, M. Tristan Lahais, M. Aurélien Le Coq, M. Mathieu Lefèvre, M. Corentin Le Fur, M. Jérôme Legavre, M. Philippe Lottiaux, M. Emmanuel Mandon, Mme Claire Marais-Beuil, M. Denis Masséglia, M. Emmanuel Maurel, M. Kévin Mauvieux, Mme Marianne Maximi, Mme Yaël Ménaché, Mme Estelle Mercier, Mme Sophie Mette, M. Nicolas Metzdorf, M. Jacques Oberti, Mme Christine Pirès Beaune, M. Jean-François Portarrieu, M. Nicolas Ray, M. Matthias Renault, M. Charles Rodwell, Mme Sophie‑Laurence Roy, M. Alexandre Sabatou, M. Emeric Salmon, M. Nicolas Sansu, Mme Eva Sas, Mme Danielle Simonnet, Mme Liliana Tanguy, M. Emmanuel Tjibaou, M. Éric Woerth
Excusés. - M. Christian Baptiste, Mme Constance Le Grip