Compte rendu

Commission
des lois constitutionnelles,
de la législation
et de l’administration
générale de la République

         Suite de l’examen de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant création d’un statut de l’élu local (n° 136) (MM. Stéphane Delautrette et Didier Le Gac, rapporteurs)                            2

 

 

 


Mercredi
18 juin 2025

Séance de 9 heures

Compte rendu n° 83

session ordinaire de 2024-2025

Présidence
de M. Florent Boudié,
président


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La séance est ouverte à 9 heures.

Présidence de M. Florent Boudié, président.

La Commission poursuit l’examen de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant création d’un statut de l’élu local (n° 136) (MM. Stéphane Delautrette et Didier Le Gac, rapporteurs).

 

Après l’article 8

Amendement CL266 de Mme Catherine Hervieu

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Cet amendement vise à aider financièrement les artisans, agriculteurs et commerçants indépendants qui optent pour une location-gérance de leur fonds de commerce afin de se consacrer à l’exercice d’un mandat électif local. Le dispositif proposé insère un article après l’article 35 ter du code général des impôts afin de prévoir, notamment, un abattement fiscal de 30 % sur la redevance perçue dans ce cadre. L’objectif est de faciliter l’entrée dans le mandat dès lors que le statut professionnel des intéressés ne leur permet pas de bénéficier d’autorisations d’absence.

M. Stéphane Delautrette. Si je partage la finalité recherchée, j’en reviens à l’échange que nous avons eu hier. Le gouvernement nous a en effet rappelé son souhait de n’ouvrir aucune niche fiscale. Or nous souhaitons que le gage soit levé, afin de permettre l’application des dispositions déjà votées : l’introduction d’une charge supplémentaire n’incitera pas le gouvernement à le faire. Avis défavorable.

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Nous en débattrons dans l’hémicycle. Il est souhaitable de favoriser le pluralisme de la représentation des élus locaux, notamment avec le public ciblé ici. Il y a, si je puis dire, niche fiscale et niche fiscale.

La commission adopte l’amendement.

Article 9 (art. L. 2123-1, L. 2123-2, L. 2123-3 et L. 4135-1 du code général des collectivités territoriales) : Extension du champ des autorisations d’absence et augmentation du plafond de remboursement des pertes de revenus subies par l’élu

Amendements identiques CL178 de M. Stéphane Delautrette et CL339 de Mme Blandine Brocard

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. L’amendement CL178 vise à supprimer l’alinéa 8 de l’article 9. Introduit en séance publique au Sénat, il prévoit l’octroi d’un temps de repos de vingt-quatre heures pour les élus municipaux en cas de déclenchement d’une alerte rouge sur le territoire de la commune. Les auditions ont en effet montré que la notion d’alerte rouge ne renvoie à aucune base juridique clairement définie.

Mme Blandine Brocard (Dem). Ne faisons pas peser de contraintes supplémentaires sur les entreprises qui emploient des élus, au risque d’obtenir l’effet inverse de celui escompté. Par ailleurs, cette alerte rouge pourrait également s’appliquer aux pompiers et acteurs de la sécurité civile, qui sont loin d’être les derniers à s’engager dans les exécutifs municipaux.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’amendement CL305 de Mme Agnès Firmin Le Bodo tombe.

Amendement CL162 de M. Didier Le Gac

M. Didier Le Gac. L’amendement vise à instaurer un délai minimal de soixante-douze heures sous lequel l’élu salarié doit avertir son employeur de son absence. En effet, si la grande majorité des organisations professionnelles sont enclines à favoriser l’exercice de la fonction d’élu de leurs salariés, elles demandent simplement un préavis minimum, de façon que les salariés ne quittent pas leur poste de travail dans la journée, ou la veille pour le lendemain.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Comme vous pouvez le constater, je ne suis pas cosignataire de cet amendement. Il convient de distinguer les absences pour participer à une campagne électorale, visées à l’article 8, et les absences liées à l’exercice du mandat, visées à l’article 9. Dans le dernier cas, porter à soixante-douze heures le délai d’information de l’employeur n’est pas toujours compatible avec la réalité de l’exercice du mandat. Nous-mêmes, parlementaires, sommes quelquefois informés d’une réunion en préfecture la veille ou l’avant-veille. Le délai de soixante-douze heures est disproportionné et de nature à rendre plus difficile l’absence de l’élu pour l’exercice de son mandat. Je n’y suis donc pas favorable, et même très défavorable. Une fois n’est pas coutume, les deux rapporteurs ne partagent pas la même position.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CL268 de Mme Catherine Hervieu

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Dans un souci d’harmonisation, cet amendement vise à élargir à l’ensemble des élus locaux – et non aux seuls maires et adjoints au maire – la procédure dérogatoire au régime de déclaration préalable des autorisations d’absence en cas de crise ou de situation exceptionnelle.

Suivant l’avis du rapporteur, la commission adopte l’amendement.

Elle adopte les amendements rédactionnels CL179 et CL180 de M. Stéphane Delautrette, rapporteur.

Amendement CL269 de Mme Catherine Hervieu

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Mon amendement vise à supprimer l’alinéa 16, qui précise que l’employeur n’est pas tenu de payer les autorisations d’absence des élus salariés. Cet alinéa entre en effet en contradiction avec l’esprit initial du texte : une meilleure reconnaissance des élus.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. L’amendement, qui modifie une disposition applicable aux seuls élus régionaux, entre en contradiction avec les autres dispositions du code général des collectivités territoriales (CGCT) pour les élus municipaux et départementaux, qui ne sont pas visés par le dispositif. Vous introduiriez donc une formulation différente, applicable aux seuls élus régionaux. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL181 de M. Stéphane Delautrette, rapporteur.

La commission adopte l’article 9 modifié.

Après l’article 9

Amendement CL296 de Mme Catherine Hervieu

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Afin de permettre aux élus locaux de répondre à leurs nombreuses sollicitations, nous proposons qu’ils puissent bénéficier, à leur demande, d’un temps partiel de droit, dans le respect des règles en vigueur.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Vous souhaitez permettre aux élus locaux de bénéficier, à leur demande, d’un temps partiel de droit, dont ils détermineraient eux-mêmes la quotité. Le code du travail permet d’ores et déjà de solliciter le recours à une réduction de la durée du travail, sous forme d’une ou plusieurs périodes d’au moins une semaine, au titre des « besoins de la vie personnelle » du salarié – l’engagement en tant qu’élu peut en faire partie. Il n’y a pas d’appréciation portée par l’employeur sur le caractère légitime ou non du motif de la demande du passage à temps partiel. Le dispositif actuel ne peut être refusé que pour des raisons objectives liées au fonctionnement de l’entreprise, indépendamment du motif de la demande de recours à ce temps partiel. Par ailleurs, votre amendement n’instaure pas un temps partiel de droit en faveur de l’élu salarié, qui reste soumis à la même autorisation de l’employeur. Avis défavorable.

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Le fait d’inscrire ce dispositif dans la proposition de loi donnerait un signal aux employeurs et les inciterait à respecter le code du travail.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Votre amendement revient à permettre une décision unilatérale du salarié. Si je partage votre objectif, la rédaction du dispositif et la perspective d’une décision unilatérale, dans le cadre de la relation avec l’employeur, me posent problème.

La commission rejette l’amendement.

Article 9 bis (nouveau) (art. L. 1132-3-4 du code du travail) : Assimilation des temps d’absence de l’élu municipal à une durée de travail effective pour l’octroi des avantages sociaux

Amendement de suppression CL177 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. L’article 9 bis modifie le code du travail afin d’y inscrire que les droits d’absence du salarié détenant un mandat de conseiller municipal sont assimilés « à une durée de travail effective pour la détermination du droit aux prestations sociales ». Cet article précise qu’« aucune modification de la durée et des horaires de travail prévus par le contrat de travail ne peut être effectuée en raison des absences intervenues » du fait de l’exercice du mandat de l’élu salarié. Si je partage l’objectif de protection des salariés, le dispositif proposé ne crée aucun droit nouveau. En effet, il figure déjà à droit constant dans le CGCT, dans des termes identiques. Une duplication ne nous semble donc pas utile ; aussi, dans un souci de clarté et de lisibilité du droit, M. Le Gac et moi proposons-nous de supprimer l’article.

M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Nous ne sommes pas favorables à la suppression de cet article. Si je conviens de son caractère redondant, l’inscription des droits des élus dans le code du travail est de nature à favoriser l’appropriation des règles liées au statut de l’élu dans les entreprises, qui se réfèrent au code du travail et non au CGCT. Je le rappelle, le but de ce texte est de favoriser l’engagement des salariés du privé.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Suivant votre logique, il faudrait dupliquer dans le code du travail toutes les dispositions du CGCT relatives à l’exercice du mandat. Dès lors que ce n’est pas le cas l’article, qui ne crée pas de droit nouveau, présente peu d’utilité. Ne dupliquer qu’une disposition parmi toutes les autres n’aurait guère de sens.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 9 bis est supprimé et les amendements CL319 de M. Jean-Claude Raux, CL366 de Mme Marie Pochon, CL409 et CL419 Mme Françoise Buffet tombent.

Article 10 (art. L. 1621-6 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) : Création d’un label « Employeur partenaire de la démocratie locale »

Amendement de suppression CL436 de Mme Élisa Martin

M. Carlos Martens Bilongo (LFI-NFP). L’article 10 crée un label « Employeur partenaire de la démocratie locale ». Il est dangereux de permettre aux entreprises privées de faire prévaloir leurs intérêts sur la démocratie locale. Ce dispositif ouvre une brèche susceptible de créer des conflits d’intérêts, avec un risque d’ingérence dans les collectivités locales.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Le dispositif est calqué sur celui qui a été proposé pour l’engagement des sapeurs-pompiers volontaires. L’objectif est d’inciter les entreprises à favoriser l’engagement de leurs salariés au service des citoyens. Si je ne suis pas favorable à un crédit d’impôt – un amendement à venir proposera que la valorisation de l’engagement de l’entreprise ne soit pas financière, mais relève davantage de l’image de l’entreprise –, il me paraît utile d’inciter les entreprises à favoriser l’engagement local de leurs salariés. Avis défavorable.

M. Carlos Martens Bilongo (LFI-NFP). Une niche fiscale sera-t-elle créée ?

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Je proposerai par amendement de supprimer la niche fiscale, et de la remplacer par un dispositif de valorisation de l’entreprise dans l’engagement RSE – responsabilité sociale des entreprises. Je ne suis toutefois pas favorable à la suppression de l’article, car le label est intéressant.

L’amendement est retiré.

Amendement CL340 de Mme Blandine Brocard

Mme Anne Bergantz (Dem). Il s’inscrit dans une logique d’équité entre tous les élus. Le dispositif de convention avec les employeurs ne doit pas être réservé aux seuls élus locaux. En effet, l’exercice de tout mandat implique un engagement particulier, qui peut être compliqué à concilier avec une activité professionnelle. Ces engagements font vivre notre démocratie : nous souhaitons qu’ils soient pris en compte dans leur diversité et que les entreprises qui les accompagnent soient distinguées.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Si je comprends l’intention de cet amendement, le texte porte sur l’engagement des élus locaux – dans les conseils municipaux, départementaux, régionaux – et non sur l’engagement associatif, dont on sait qu’il faut le soutenir. Par ailleurs, l’article 10 prévoit que la convention doit être signée avec une collectivité territoriale ou un établissement public de coopération intercommunale (EPCI). Il n’est donc pas pertinent d’étendre cette possibilité à l’ensemble des élus. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CL280 de Mme Catherine Hervieu

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Cet amendement vise à dégager un temps suffisant aux élus locaux sur l’année pour assurer les différentes fonctions de leur mandat tout en préservant leur équilibre familial et professionnel. La diversité des profils des élus – à laquelle nous sommes attachés – n’en sera que favorisée.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Je partage votre avis : il faut travailler sur le contenu de la convention, dans un objectif de simplification et de clarté. Le texte prévoit qu’un décret fixera les conditions d’attribution du label. Je vous propose d’y travailler dans la perspective de la séance et vous invite donc à retirer votre amendement.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques CL285 de M. Stéphane Delautrette et CL206 de M. Hervé Saulignac

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Dans sa rédaction actuelle, le texte prévoit que les conventions-cadres avec les employeurs sont signées par les collectivités territoriales et les EPCI. Or un employeur peut être amené à signer des conventions avec plusieurs collectivités, départements ou EPCI, selon sa taille, son rayonnement géographique et le nombre d’élus locaux qu’il emploie. Dans un souci de simplification et de facilitation, cet amendement propose de confier aux associations d’élus la possibilité d’élaborer des conventions-cadres, dans lesquelles s’inscriraient les conventions signées avec les employeurs, les collectivités ou les EPCI. Ces conventions-cadres pourraient constituer un modèle permettant de simplifier la signature de conventions par chaque collectivité et facilitant le processus de labellisation.

La commission adopte les amendements.

Amendements CL287 et CL317 de Mme Blandine Brocard, amendements CL286 de M. Stéphane Delautrette et CL293 de Mme Catherine Hervieu (discussion commune)

Mme Anne Bergantz (Dem). L’amendement CL287 vise à supprimer l’alinéa 4 de l’article 10, qui, si nous l’avons bien compris, permet à une entreprise qui paie son salarié pendant ses heures d’absence de déduire 60 % de la somme de ses bénéfices imposables. Dans le contexte actuel des finances publiques, il ne nous semble pas pertinent de créer une énième niche fiscale pour les entreprises, d’autant que cette disposition peut conduire à un effet d’aubaine, notamment pour les entreprises employant des cadres, qui rattraperont le travail qu’ils n’ont pas effectué durant leurs heures d’absence.

L’amendement CL317 répond à un souci d’équité. S’il peut sembler contradictoire avec l’amendement que je viens de défendre, il vise à étendre une niche fiscale à tous les signataires de la convention : pourquoi la limiter aux seuls employeurs publics et privés et en priver les travailleurs non salariés, notamment les agriculteurs ? En effet, l’exercice d’un mandat a forcément des répercussions sur leur chiffre d’affaires, puisqu’il leur faut embaucher pour pallier leurs absences ou augmenter leur amplitude horaire.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Il me semble que nous sommes tous d’accord sur l’intérêt du label. Ce qui soulève une difficulté, c’est la niche fiscale. Je vous propose donc de la supprimer tout en préservant le dispositif de valorisation de l’entreprise, non pas en termes financiers mais de communication, sur son engagement pour favoriser l’engagement local, au titre de sa RSE par exemple. J’invite donc mes collègues à retirer leurs amendements au profit du mien.

Les amendements CL287, CL317 et CL293 sont retirés.

La commission adopte l’amendement CL286.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL484 de M. Stéphane Delautrette, rapporteur.

Amendement CL39 de M. Bruno Bilde

M. Bryan Masson (RN). Cet amendement vise à attribuer, de manière automatique, le label « Employeur partenaire de la démocratie locale » aux structures ayant signé une convention avec un élu local, pour aménager ses horaires de travail ou ses conditions d’exercice professionnel. Ce label constitue une reconnaissance symbolique forte mais son attribution reste facultative, d’où une incertitude et une inégalité de traitement potentielle, selon les territoires et les secteurs. En systématisant son attribution, nous encourageons l’engagement des employeurs dans le soutien à la vie démocratique locale.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Toutes les entreprises employant un élu local n’ont pas vocation à être labellisées. Les conditions d’attribution seront précisées par un décret. Je l’ai dit à Mme Hervieu, il me semble préférable de ne pas toucher à la rédaction actuelle et de retravailler, dans la perspective de la séance, à un dispositif plus clair sur les modalités d’attribution du label. Je vous invite à retirer votre amendement ; sinon, l’avis sera défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CL288 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Il s’agit de l’amendement que je vous ai présenté il y a quelques instants, proposant un dispositif alternatif au crédit d’impôt. Il vise à compléter l’article 10 par une mention selon laquelle l’employeur pourra faire état de sa qualité d’« Employeur partenaire de la démocratie locale » dans sa déclaration de performance extra-financière, pour une prise en compte au titre de la RSE.

M. Jérémie Iordanoff (EcoS). Nous voterons contre l’article 10. La logique de labellisation pose en effet problème, notamment d’un point de vue philosophique, car la démocratie n’est pas réservée à certains. Il ne saurait y avoir une forme d’affichage de certaines entreprises qui soutiendraient la démocratie, et pas les autres : toutes les entreprises sont concernées par la démocratie. Si je conçois qu’il faille favoriser l’engagement citoyen et la participation de toutes et tous aux questions collectives, cela ne relève pas de la responsabilité des entreprises, dont aucune ne doit être stigmatisée. Une telle logique est dépourvue de rapport avec les questions démocratiques et ne permettra pas de revitaliser l’engagement local au service de l’intérêt général.

Mme Violette Spillebout (EPR). Nous soutiendrons fermement cet amendement, qui permettra de compléter le label « Employeur partenaire de la démocratie locale ».

Monsieur Iordanoff, il existe déjà une communauté animée par le ministère du Travail intitulée « Les entreprises s’engagent », qui regroupe près de 100 000 entreprises. Elle a permis près de 203 000 engagements depuis 2022 et 1 500 événements de passage à l’action en faveur d’une société inclusive et d’un monde durable en 2024.

Le soutien à l’engagement dans la démocratie locale doit devenir l’un des piliers de la politique RSE des entreprises. Grâce à nos débats, nous pourrions par exemple pousser le gouvernement à signer une convention en ce sens avec les grandes entreprises françaises, afin qu’elles montrent l’exemple.

Mme Elsa Faucillon (GDR). Nous nous opposons à cet article car il ne précise pas suffisamment les critères d’attribution du label. Certaines entreprises, alors qu’elles maltraitent leurs salariés, pourraient le recevoir simplement parce qu’elles ont recruté un élu local et l’ont bien traité.

Il faudrait soumettre l’obtention de ce label au respect d’une pluralité de critères, comme c’est le cas en matière d’environnement. Sinon, les employeurs pourront s’acheter à bon compte un label, sur le modèle du greenwashing, ou écoblanchiment.

Même si je ne suis pas opposée à l’idée d’un label il comporte donc, dans la rédaction actuelle, plus de risques que d’avantages.

Mme Brigitte Barèges (UDR). Je suis contre un tel label à cause du risque de conflit d’intérêts. La situation des élus n’a rien à voir avec celle des pompiers, qui sont bénévoles et qu’il est normal de valoriser pour qu’ils aient un emploi.

Pensons aux élus qui seraient embauchés dans une entreprise du secteur du bâtiment et des travaux publics. Si elle passe un marché avec la collectivité, cela créera de nombreux problèmes.

Mme Anne Bergantz (Dem). Nous nous interrogeons également sur ce label. Le dispositif doit rester souple, car ce n’est pas l’entreprise qui est responsable de l’engagement citoyen de ses salariés, mais le contraire. À titre personnel, je voterai donc contre l’article 10.

M. Didier Le Gac, rapporteur. J’ai été président d’un SDIS, un service départemental d’incendie et de secours. Dans les petites et moyennes entreprises notamment, les employeurs sont fiers de signer une convention et les labels « Employeur partenaire national des sapeurs-pompiers » sont un succès.

Il ne s’agit pas ici de demander que les entreprises soient vertueuses dans tous les domaines, mais de valoriser celles qui acceptent de recruter un conseiller municipal ou un adjoint au maire et qui s’engagent à faciliter son engagement, en lui permettant parfois de quitter le travail plus tôt le soir ou d’être absent à certaines réunions. Les entreprises labellisées pourront communiquer sur cette démarche, dont la presse pourra aussi se faire l’écho. Ce sera le même dispositif que celui prévu pour les SDIS, qui est une vraie réussite.

M. Joël Bruneau (LIOT). L’enfer est pavé de bonnes intentions. Si nous créons un nouveau label, certaines entreprises feront tout pour éviter qu’un de leur salarié soit élu à un poste à responsabilité. Avant d’être élu maire de Caen et président de la communauté urbaine de Caen La Mer, je travaillais à la Caisse d’épargne. Si, au vu de mon engagement, ce groupe avait demandé le label « Employeur partenaire de la démocratie locale », il se serait privé de tout financement au profit de ces deux collectivités, à moins de s’affranchir des règles de prévention des conflits d’intérêts. Le problème concerne potentiellement une bonne partie du tissu local : toutes les banques, les entreprises de travaux publics, les entreprises de services aux collectivités – Veolia et Suez, par exemple – et les promoteurs immobiliers.

Certes, nous connaissons une crise de l’engagement, mais il faut faire confiance à la responsabilité individuelle. Quand on est salarié et que l’on veut s’engager, on est prêt à prendre certains risques pour sa carrière professionnelle. C’est un choix, n’allons pas chercher plus loin.

M. Philippe Latombe (Dem). Si les conventions signées avec les SDIS ne donnent pas lieu à des conflits d’intérêts, c’est parce que, contrairement aux élus locaux, les pompiers ne passent pas de marchés publics. Nous voterons contre l’article 10.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Oui, madame Faucillon, dans la perspective de la séance publique, il nous faut clarifier les règles d’obtention du label, plutôt que de les renvoyer à un décret.

Nous avons supprimé la réduction fiscale associée au label. À la place, par cet amendement, nous permettrons aux entreprises concernées de valoriser leur engagement en communiquant dans le cadre de leur RSE.

Quant aux conflits d’intérêts, si je suis votre raisonnement, ils concernent toutes les entreprises employant des élus, qu’elles soient labellisées ou non. Et si une entreprise ne souhaite pas afficher que certains de ses salariés sont élus, elle ne sera nullement obligée de demander le label. Les entreprises pourront choisir de valoriser ou non leur engagement citoyen.

Ainsi, je reste convaincu de l’utilité de cet amendement et de l’article 10. Nous devrons toutefois retravailler sur les modalités d’obtention du label en séance publique.

La commission adopte l’amendement.

La commission rejette l’article 10.

Article 11 (art. L. 6315-1 du code du travail, art. L. 521-6 du code général de la fonction publique) : Prise en compte du mandat électif local lors de l’entretien professionnel réalisé dans le cadre de la formation professionnelle

Amendement CL486 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Nous proposons une nouvelle rédaction de l’article 11, afin de renforcer le dialogue entre l’élu local salarié et son employeur.

Dans sa rédaction actuelle, l’article 11 vise à compléter l’entretien professionnel des salariés, qui est réalisé dans le cadre de leur formation professionnelle, ainsi que l’entretien d’évaluation annuel des agents publics. Il prévoit que, lorsque le salarié ou le fonctionnaire est titulaire d’un mandat local, ces entretiens portent obligatoirement sur les mesures destinées à faciliter la conciliation entre vie professionnelle et fonctions électives ainsi que la prise en compte de l’expérience acquise dans le cadre de celles-ci.

Nous souhaitons conserver ces avancées du Sénat. Toutefois, plutôt que d’imposer le traitement de ces questions dans le cadre de l’entretien professionnel ou d’évaluation – ce qui pourrait avoir des effets préjudiciables pour le salarié ou l’agent public élu – nous proposons que ces discussions soient conduites à la demande des salariés ou des agents publics visés et dans le cadre spécifique déjà prévu dans le code du travail et le CGCT.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Cette réécriture va dans le bon sens en ce qu’elle soumet le traitement de ces questions à la demande du salarié ou de l’agent public. J’imagine qu’il n’est pas nécessaire de préciser que les syndicats pourront accompagner les élus concernés.

J’ajoute que, de la même manière que nous cherchons à inventer un endroit où nos concitoyens nouvellement élus pourront accéder à leurs droits, il faudrait introduire dans le texte le principe d’une information des employeurs, afin que ceux-ci connaissent l’impact de l’élection de leur salarié.

La commission adopte l’amendement et l’article 11 est ainsi rédigé.

En conséquence, l’amendement CL341 de Mme Blandine Brocard tombe.

Article 11 bis (nouveau) (art. L. 512-19 du code général de la fonction publique) : Prise en compte de l’exercice de fonctions exécutives locales pour les affectations et les demandes de mutation au sein de la fonction publique de l’État

Amendement CL477 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Le Sénat a prévu de créer une nouvelle priorité légale de mutation pour les fonctionnaires exerçant un mandat exécutif local. Toutefois, ce dispositif affecterait la cohérence du régime de priorités légales en vigueur, lequel prend en compte la vie privée des agents et la nature de leur emploi – par exemple l’éloignement du conjoint, une situation de handicap, ou le fait d’être affecté à un poste supprimé.

Nous proposons le maintien d’une priorité pour les élus d’exécutifs locaux, mais qui s’appliquerait de manière subsidiaire par rapport aux priorités en vigueur dans la loi. Elle aurait néanmoins une valeur supérieure aux priorités fixées par les lignes directrices de gestion ministérielles.

Par ailleurs, nous proposons d’introduire une garantie contre les mutations forcées dans l’intérêt du service pour les élus locaux, en prévoyant que l’éloignement du lieu où le fonctionnaire est élu doit être pris en compte au titre des circonstances relatives à la vie personnelle du fonctionnaire.

Nous poursuivons le même objectif que le Sénat, mais la rédaction que nous proposons est plus opérationnelle.

La commission adopte l’amendement et l’article 11 bis est ainsi rédigé.

En conséquence, l’amendement CL240 de Mme Violette Spillebout tombe.

Article 12 (art. L. 611-9, L. 611-11, L. 612-3, L. 685‑1, L. 686‑1 et L. 687‑1 du code de l’éducation, art. L. 2123-18-1 du code général des collectivités territoriales) : Création d’un statut de l’élu étudiant

Amendement CL270 de Mme Catherine Hervieu

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Par cet amendement nous proposons de faciliter l’engagement des étudiants dans une campagne électorale et l’exercice d’un mandat par les étudiants. Les étudiants représentent 4,50 % de la population, mais seulement 0,69 % des élus. Nous devons donc soutenir leur engagement.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Nous partageons votre intention. Si nous voulons garantir la pluralité des équipes municipales et leur représentativité, il faut lever les freins à l’engagement local des étudiants.

Toutefois, tel qu’il est rédigé, votre amendement ne précise pas la période au cours de laquelle les étudiants bénéficieraient d’aménagements pour leurs études au titre de leur candidature. Il faudra donc le retravailler dans la perspective de l’examen en séance. Demande de retrait.

L’amendement est retiré.

Amendement CL40 de M. Bruno Bilde

M. Bryan Masson (RN). Nous proposons de permettre aux étudiants élus locaux de conclure une convention tripartite avec leur établissement d’enseignement supérieur et la collectivité où ils exercent leur mandat. Cette convention de nature facultative faciliterait l’articulation entre les exigences universitaires et les obligations inhérentes au mandat local. Ce cadre juridique souple permettrait par exemple des aménagements d’emploi du temps, ou des modalités d’évaluation spécifiques.

Trop souvent, l’engagement dans la vie publique ralentit ou désorganise le parcours académique des étudiants, faute de mécanisme d’accompagnement approprié, alors qu’il ne devrait pas constituer un obstacle. Notre amendement répond à un impératif de conciliation entre vie étudiante et engagement citoyen, dans la perspective d’une réelle égalité des chances dans l’exercice du mandat électif.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Nous partageons votre intention : il faut permettre aux étudiants de s’engager dans la vie élective. Mais l’article L. 611-11 du code de l’éducation prévoit déjà que « des aménagements dans l’organisation et le déroulement des études et des droits spécifiques liés à l’exercice de responsabilités particulières sont prévus par les établissements d’enseignement supérieur », et l’article 12 propose d’étendre leur bénéfice aux élus étudiants. La création de conventions tripartites facultatives n’ouvrirait donc aucun droit nouveau. Avis défavorable.

Mme Violette Spillebout (EPR). Notre groupe est défavorable à cet amendement. La convention tripartite proposée serait à la carte et dépendrait de l’école ou de l’université. Ce n’est pas suffisant.

Nous souhaitons pour notre part inscrire le statut d’élu étudiant dans la loi, afin que les absences liées à la participation à un conseil municipal, par exemple, soient reconnues comme valables au sein du cursus universitaire.

Quant à savoir à partir de quand on est candidat, la question s’était posée lors de l’audition des représentants la CNCCFP (Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques), dans le cadre des travaux sur la proposition de loi renforçant la sécurité des élus locaux et la protection des maires. Ceux-ci considéraient, je crois, que l’on devient officiellement candidat soit à partir du dépôt de la déclaration du mandataire financier pour la campagne soit à partir d’une déclaration de candidature dans la presse, sachant qu’une candidature peut toujours être annulée avant l’élection. Il reste un vide juridique sur ce point. Si nous voulons que davantage de jeunes s’engagent dans une campagne électorale, la sécurisation des mesures pour les étudiants candidats est une question majeure, sur laquelle nous devons poursuivre nos travaux communs.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Il faut inscrire clairement les droits dans la loi, plutôt que dans une convention tripartite facultative. C’est une question de démocratisation du statut de l’élu, mais aussi d’indépendance. Les conventions proposées lieraient l’étudiant à l’établissement où il est inscrit et, puisqu’elles seraient à la carte, seraient accordées à la tête du client.

M. Bryan Masson (RN). Oui, les conventions proposées seraient facultatives. Nous pourrions retravailler l’amendement pour les rendre plus contraignantes. Nous voulions toutefois éviter d’instaurer une obligation, pour garantir de meilleures relations entre l’établissement universitaire, l’élu local étudiant et la municipalité. Les choses doivent se faire en douceur, de manière pédagogique, souple.

Nous voulons tous que les étudiants s’investissent dans un mandat électif, dans une liste électorale, dans la vie d’une cité. Nous devons réfléchir ensemble à la manière de faciliter ces engagements.

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Nous souhaitons également faciliter l’engagement des étudiants. Toutefois, cela doit passer par un cadre commun, qui doit être le plus simple et le plus lisible possible, d’autant que les étudiants changent parfois d’établissement en cours d’année universitaire. Je ne suis pas d’accord avec la démarche de gré à gré proposée ici.

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL487 et CL488 de M. Stéphane Delautrette, rapporteur.

La commission adopte l’article 12 modifié.

Après l’article 12

Amendement CL265 de Mme Catherine Hervieu

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Pour favoriser la candidature d’étudiants à une élection, nous proposons qu’un décret fixe les conditions d’aménagement de leurs études supérieures.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Cet amendement poursuit le même objectif que le CL270, mais il est moins bien rédigé. Ces amendements doivent être retravaillés dans la perspective de la séance publique, afin d’être clarifiés. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Article 13 (art. L. 2123-18-1, L. 2123‑18‑1‑2 [nouveau], L. 3123‑19, L. 3123‑19‑1‑1 [nouveau], L. 4135‑19, L. 4135‑19‑1‑1 [nouveau], L. 5211‑13, L. 5211‑14) : Facilitation des conditions d’exercice des élus en situation de handicap

Amendement CL320 de M. Jean-Claude Raux

M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Les personnes en situation de handicap représentent environ 16 % de la population, mais seulement 0,003 % des élus. Afin de résorber cet écart important et de leur permettre de s’engager dans la vie publique, il faut préciser que les frais liés à l’accessibilité doivent être pris en charge, « quelle que soit la situation de handicap ou la nature des besoins ».

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Plusieurs amendements visant à favoriser l’inclusion des élus en situation de handicap ont été déposés, notamment par M. Peytavie. Je me réjouis qu’ils aient finalement été déclarés recevables et que nous puissions en débattre. Toutefois, je privilégie la rédaction de l’amendement CL86. Quant à celui que vous venez de présenter, j’en demande le retrait.

En effet, le droit en vigueur prévoit déjà un dispositif opérationnel et clair qui me semble couvrir l’ensemble des situations de handicap. Votre amendement, lui, couvrirait un champ plus large. Même si nous sommes favorables à l’inclusion, la partie réglementaire du CGCT prévoit déjà que les élus en situation de handicap peuvent obtenir le remboursement des frais spécifiques de déplacement, d’accompagnement et d’aide technique, dès lors qu’ils ont été reconnus comme travailleurs handicapés par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées, qu’ils bénéficient de l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, mutilés de guerre et assimilés, ou qu’ils peuvent prétendre au bénéfice de la carte mobilité inclusion.

Si certaines situations de handicap sont exclues du droit en vigueur alors qu’elles devraient légitimement y figurer, alors il faudra les examiner au cas par cas et en discuter avec le gouvernement. Enfin, un tel problème n’a pas été soulevé pendant les auditions – ce qui ne veut pas dire qu’il ne faille pas mieux prendre en compte les personnes en situation de handicap engagées localement. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Amendements CL85 et CL91 de M. Sébastien Peytavie, amendement CL489 de M. Stéphane Delautrette (discussion commune)

M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Alors que les personnes en situation de handicap sont loin d’être les mieux pourvues financièrement, elles doivent parfois assumer des dépenses importantes pour adapter leur environnement à leurs problématiques spécifiques. Les élus en situation de handicap doivent ainsi avancer des frais liés à leur handicap, avant d’être remboursés quelques semaines ou mois plus tard par la collectivité où ils sont élus. Par l’amendement CL85, nous proposons qu’ils puissent plutôt présenter directement la facture à la collectivité – sur le modèle de la DMD, la dotation matérielle du député. Cela favoriserait leur engagement.

L’amendement CL91 vise à préciser que les aides donnant droit à un remboursement de frais pourront être « individuelles, matérielles, humaines et techniques ». Ainsi, une personne malentendante pourrait avoir accès à un locuteur de la langue des signes ou à d’autres adaptations. Il faut couvrir l’ensemble des champs de compensation et d’adaptation pour éviter les trous dans la raquette.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. L’amendement CL489 est rédactionnel.

Quant aux deux autres amendements en discussion commune, je leur préfère le CL86, qui vise à dispenser les personnes en situation de handicap d’avance de frais, et qui sera examiné dans quelques instants. Même s’il poursuit le même objectif, l’amendement CL85 a le désavantage de prévoir également une révision du champ des frais spécifiques, qui devrait être retravaillée. Je demande donc son retrait.

Je rappelle par ailleurs que la proposition de loi permettra de porter le plafond de remboursement des frais spécifiques de 1 048 euros mensuels à 1 657 euros mensuels, par référence aux indemnités des maires d’une commune de moins de 1 000 habitants, et même à 1 829 euros mensuels, car l’article 1er prévoit en outre d’augmenter le montant des indemnités.

Quant à l’amendement CL91, il est satisfait. Je demande également son retrait.

M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Je maintiens mes amendements, d’autant qu’ils ont été élaborés avec le concours d’associations de personnes en situation de handicap : l’Observatoire du validisme en politique et l’association Handéo. Dans l’éventualité où ils seraient adoptés, je ne doute pas que notre collègue Peytavie acceptera d’y retravailler et de les perfectionner en vue de la séance.

Mme Violette Spillebout (EPR). Nous soutiendrons l’amendement CL91, mieux-disant et plus précis sur les différentes formes d’aides pouvant être apportées à un élu en situation de handicap dans l’exercice de son mandat. Un important travail d’analyse des dispositions actuelles du code général des collectivités territoriales a été mené afin d’identifier les améliorations possibles, en fonction du type de handicap. À cet égard, le texte du Sénat permet des avancées majeures puisqu’il prévoit notamment une augmentation du plafond de remboursement des frais engagés et l’obligation de rembourser l’aménagement du poste de travail. Après des échanges avec M. Peytavie, le groupe Ensemble pour la République avait d’ailleurs déposé des amendements complémentaires – jugés irrecevables – qui prévoyaient des exceptions pour aménager le poste de travail à domicile, lorsque l’élu en situation de handicap a besoin d’y préparer ses réunions. L’objectif est de lever les freins au maximum, pour que les personnes en situation de handicap s’engagent dans un mandat d’élu local.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Nous soutenons ces amendements qui participent de la démocratisation de la fonction d’élu, laquelle doit pouvoir s’exercer en toute indépendance. Toutefois, notre inquiétude porte sur la réalité des financements : comment les communes financeront-elles les coûts liés à ces aménagements, y compris pour l’adaptation des locaux – dans certaines mairies, il faut monter des escaliers pour accéder à l’accueil ou aux bureaux ? Il faudra bien que le gouvernement – au hasard – s’engage à mobiliser les moyens nécessaires, dans le cadre du projet de loi de finances.

Successivement, la commission rejette l’amendement CL85 et adopte l’amendement CL91.

En conséquence, les amendements CL489 de M. Stéphane Delautrette et CL86 de M. Sébastien Peytavie tombent.

Amendement CL96 de M. Sébastien Peytavie

M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Cet amendement vise à créer un droit opposable pour les élus en situation de handicap à bénéficier d’un aménagement du poste de travail ou de la prise en charge de leurs frais et à saisir la justice administrative en cas de refus opposé à leurs demandes d’adaptation.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Je comprends le problème soulevé : il n’est pas acceptable qu’un élu en situation de handicap se voit refuser le remboursement des frais spécifiques auquel il a droit. Toutefois, pour que les choses soient claires, l’article 5 de la proposition de loi prévoit que les élus « bénéficient » du remboursement de leurs frais et non plus qu’ils « peuvent [en] bénéficier ». Il n’est donc pas possible de refuser un droit garanti par la loi. De plus, tout élu peut saisir le juge administratif dès lors que ses droits ne sont pas respectés. Cet amendement n’apportant rien de nouveau aux textes en vigueur, je vous invite à le retirer ; à défaut, j’émets un avis défavorable.

M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Je préfère le maintenir.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CL291 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Dans sa rédaction actuelle, l’alinéa 14 prévoit que le dispositif entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 1er juin 2025. Cette date étant dépassée, il est proposé de la reporter d’un an, ce qui laissera le temps au gouvernement de préparer le décret, tout en permettant à ceux qui seront élus au printemps 2026 de bénéficier de ces mesures dès les premiers mois de leur mandat.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’article 13 modifié.

Article 14 (art. L. 325-14 du code général de la fonction publique, art. L. 6323-6 et L. 2145-5 du code du travail) : Formation des élus locaux et des candidats à un mandat électif local

Amendement CL343 de Mme Blandine Brocard

M. Éric Martineau (Dem). Si l’accompagnement des élus dans l’exercice de leurs fonctions est une priorité que nous soutenons, il est essentiel de s’adapter aux réalités de terrain et aux contraintes budgétaires des collectivités. C’est pourquoi nous proposons de restreindre les dispositifs de formation aux maires et aux adjoints au maire et d’exclure les conseillers municipaux qui n’ont pas de délégation. Il est logique que les maires et leurs adjoints, qui exercent une charge exécutive directe et sont confrontés au quotidien à la complexité de la gestion de la commune, bénéficient en priorité des formations les plus structurantes.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Il y a une discordance entre l’exposé sommaire de l’amendement et ce qui en résulterait s’il était adopté. En effet, l’alinéa 4 de l’article 14 prévoit que, dans les concours de la fonction publique, une épreuve puisse porter sur la reconnaissance de l’expérience acquise au titre de l’exercice d’un mandat électif local, qu’il soit exécutif ou non – actuellement, la loi ne prévoit cette possibilité que pour l’expérience professionnelle. L’objectif est de mieux prendre en compte les compétences ou l’expertise acquises par les élus locaux pendant leur mandat et de les valoriser dans les concours d’accès à la fonction publique, dans le respect du principe d’égalité d’accès aux emplois publics. C’est pourquoi je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrais un défavorable.

M. Éric Martineau (Dem). Je le maintiens.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Donner la priorité ne signifie pas restreindre ! Or votre amendement vise à restreindre les formations aux seuls maires et adjoints au maire – et non pas à leur donner la priorité, comme vous le mentionnez. Démocratisation, indépendance, essence. Le conseiller municipal est, lui aussi, amené à voter des délibérations – par exemple, pour donner l’avis de la commune sur le plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI). L’écarter d’une formation qui est pourtant de nature à l’aider à comprendre ce sur quoi il doit se prononcer risque de susciter une forme de découragement. Par ailleurs, nous proposons, dans un amendement qui sera examiné ultérieurement, que les élus bénéficient systématiquement, au moment de leur élection, d’une formation sur leurs droits.

Ensuite, l’article 14 pose la question des organismes qui seront habilités à dispenser les formations, en particulier le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT). Il faudra chiffrer les coûts liés à la présente proposition de loi, au moment d’examiner le projet de loi de finances : nous verrons alors si le gouvernement est favorable, oui ou non, à un statut de l’élu local et à sa formation.

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Cet amendement fige le dispositif, comme si les conseillers municipaux n’étaient jamais amenés à évoluer ni à exercer une délégation, voire à devenir maire à leur tour. Je peux en témoigner : un conseiller municipal n’est pas qu’une simple potiche et il doit maîtriser l’ensemble des politiques publiques. Si la formation se fait généralement sur le tas, au cours de l’exercice du mandat, il serait utile de compléter cette expérience par des formations reconnues, permettant de mieux appréhender la complexité des réglementations et l’évolution des lois en vigueur. Ce serait à la fois un gage de qualité et une démarche démocratique. Je suis donc choquée par cette proposition, qui ne respecte pas l’esprit de la proposition de loi.

M. Bryan Masson (RN). Nous sommes opposés à cet amendement pour la bonne raison que les maires et les adjoints au maire ne sont pas les seuls à s’investir et à se mobiliser pour la collectivité : n’oublions pas les élus délégués, à qui le maire a confié une partie de ses fonctions. Pourquoi faudrait-il les exclure, de facto ? Ils accomplissent également un travail important pour les administrés.

L’intention première de l’amendement n’était peut-être pas tant d’exclure certains élus du dispositif que d’aborder le sujet des finances publiques. Si le budget des collectivités ne peut pas évoluer en faveur des élus locaux, fermons le ban, rentrons chez nous et ne faisons pas de loi ! Si nous voulons vraiment travailler à un statut de l’élu local et prendre en compte l’ensemble des élus qui œuvrent pour la collectivité et qui souffrent actuellement, il faut poser la question du budget plutôt que de chercher à en restreindre la cible – sinon, ce sera une loi inutile de plus !

M. Éric Martineau (Dem). Nous retirons notre amendement et verrons ce que nous ferons pour la séance. Néanmoins, l’article 14 pose bien la question de la contrainte budgétaire pour les communes, d’autant qu’il concerne aussi, si vous le relisez, le mandat de responsable d’une association – y compris à titre bénévole.

L’amendement CL343 est retiré.

Amendement CL478 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Cet amendement, qui a pour objet de répondre au déficit d’offre de formation dans les petites communes, vise à rétablir la possibilité, pour le CNFPT, de dispenser des formations aux élus locaux. Cette proposition, qui figurait dans le texte initial, a été supprimée au Sénat, qui a considéré que les formations actuelles du CNFPT n’étaient pas adaptées aux élus locaux et que celui-ci serait obligé de créer un nouveau programme de formation spécifique, duquel résulterait une charge supplémentaire.

Pour avoir échangé avec ses représentants, je sais que le CNFPT est favorable à l’idée de cibler la formation sur les plus petites communes, d’autant que la distinction entre les élus et les agents de la fonction publique n’est pas très importante dans ces collectivités qui ne disposent pas, comme leurs homologues de plus grande taille, de services techniques.

Mme Violette Spillebout (EPR). Notre groupe est très favorable à cet amendement ; nous en avions d’ailleurs déposé un en ce sens, sans doute un peu moins bien rédigé puisqu’il a été jugé irrecevable. L’essentiel, c’est que la formation des élus des communes de moins de 3 500 habitants progresse. À ce titre, le fait de les associer aux formations dispensées par le CNFPT aux agents municipaux, qui peuvent être issus de la même commune ou de la même communauté de communes, constituera un avantage pratique et leur permettra de se former en équipe. Pour avoir échangé avec le président du CNFPT lors du congrès de la Fédération nationale des centres de gestion qui s’est tenu à Lille récemment, je confirme qu’il y est favorable sur le principe. Reste à aborder la question des moyens. Nous savons aussi qu’en raison de leur charge de travail, des fonctionnaires sont parfois contraints de se désister d’une formation, ce qui ouvre la possibilité d’intégrer des élus locaux dans des sessions de formation déjà établies.

J’ajoute que nous avions adopté, en décembre 2023, une loi visant à revaloriser le métier de secrétaire de mairie : une nouvelle formation est donc sur le point de voir le jour, conformément aux décrets d’application publiés en juillet 2024. Or, dans le cas des petites communes, les besoins en formation d’un secrétaire de mairie et d’un élu local ne sont pas si éloignés. Cela permettra donc de renforcer l’efficacité de l’investissement public.

La commission adopte l’amendement.

Amendements identiques CL479 de M. Stéphane Delautrette et CL205 de M. Hervé Saulignac

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Par cet amendement, nous proposons de sécuriser juridiquement la possibilité donnée à tout salarié de suivre des formations relatives à l’exercice d’un mandat local et aux règles qui encadrent les campagnes électorales. La proposition initiale visait à permettre aux candidats à un mandat électif local de bénéficier, dans le cadre de leur compte personnel de formation (CPF), des formations ouvertes aux élus locaux, afin de mieux les préparer, en cas d’élection, à l’exercice de leurs futures fonctions. Toutefois, considérant qu’il était trop complexe de définir la notion de candidat déclaré publiquement, le Sénat a finalement préféré étendre cette possibilité de formation à l’ensemble des salariés, dans le cadre de leur CPF.

La rédaction actuelle pose cependant deux difficultés : d’une part, l’article ne précise pas que les organismes de formation doivent être agréés par le Conseil national de la formation des élus locaux (CNFEL) et, d’autre part, les organismes agréés ne proposent pas de formation relative aux règles applicables aux campagnes électorales. C’est pourquoi nous proposons de faire évoluer le dispositif, en prévoyant que les organismes habilités à dispenser les formations relatives au mandat soient agréés par le CNFEL et que les formations portant sur les règles encadrant les campagnes électorales répondent à un cahier des charges, fixé par le ministère de l’intérieur. Ces évolutions permettront d’assurer la cohérence avec les règles applicables au droit à la formation des élus et d’en sécuriser le déploiement.

La commission adopte les amendements.

Amendements identiques CL481 de M. Stéphane Delautrette et CL204 de M. Hervé Saulignac

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Le Sénat a étendu, en séance publique, le congé de formation économique, sociale, environnementale et syndicale à l’ensemble des élus locaux, qu’ils soient membres de conseils municipaux, départementaux ou régionaux.

Cette mesure soulève deux difficultés. D’une part, elle ne répond pas aux besoins des élus locaux  : le congé syndical permet à tout salarié qui le souhaite de participer à des stages ou à des sessions de formation économique, sociale, environnementale et syndicale, organisés soit par des centres spécialisés, rattachés aux organisations syndicales, soit par des instituts internes aux universités. Ce n’est pas ce dont les élus locaux ont besoin. D’autre part, elle augmente les autorisations d’absence pouvant être accordées aux élus : je rappelle que le congé de formation des élus, qui est actuellement de dix-huit jours par mandat, sera porté, si la loi est adoptée, à vingt-quatre. Il n’est pas rémunéré par l’employeur, mais la collectivité peut compenser les pertes de revenus. Le congé syndical, lui, est de douze jours par an – soit soixante-douze jours au total pour la durée d’un mandat municipal –, lesquels s’ajouteraient aux jours déjà prévus dans le texte pour les élus. Je ne vois donc pas l’intérêt de telles dispositions qui, au vu de notre analyse, ne répondent pas aux attentes des élus. C’est pourquoi nous proposons de supprimer les alinéas 10 et 11 de l’article.

La commission adopte les amendements.

Elle adopte l’article 14 modifié.

Article 14 bis (nouveau) (procédure de législation en commission) (art. L. 2321-12-1 du code général des collectivités territoriales) : Financement de bilans de compétences par le droit individuel à la formation des élus locaux

M. le président Florent Boudié. Cet article faisant l’objet d’une procédure de législation en commission, je rappelle qu’il ne sera pas débattu en séance publique.

Amendement de suppression CL482 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Nous proposons de supprimer l’article 14 bis, qui est déjà satisfait par les rédactions actuelles du CGCT et du code du travail. Il n’apporte rien au droit existant et crée un risque d’a contrario, notamment parce qu’il ne vise que les communes et sous-entend que les bilans de compétences ne feraient pas déjà partie des formations qui permettent la réinsertion professionnelle. Or, depuis 2022, 25 % des demandes de formation formulées dans le cadre du droit individuel à la formation des élus (DIFE) étaient liées à un projet de reconversion, et 7 % d’entre elles portaient sur un bilan de compétences, d’après les chiffres transmis par la Caisse des dépôts et consignations.

La commission adopte l’amendement.

Article 15 (art. L. 2123‑13, L. 2123‑14, L. 2573‑7, L. 3123‑11, L. 4135‑11, L. 7125‑13 et L. 7227‑13 du code général des collectivités territoriales) : Report des crédits de formation en cas de création d’une commune nouvelle et augmentation de la durée du congé de formation des élus

Amendement CL460 de Mme Catherine Hervieu

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Pour compléter l’article 15, nous proposons que les primo-élus disposent de six jours de congé formation supplémentaire, afin de s’approprier plus rapidement et plus efficacement les sujets complexes liés à l’exercice de leur mandat, et d’éviter qu’ils aient une impression de décalage ou le sentiment d’être des élus de seconde zone par rapport aux autres conseillers municipaux, lesquels bénéficient déjà d’une certaine expérience.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. La formation est un véritable enjeu, et force est de constater que les élus ne recourent pas suffisamment à leurs droits en la matière. Le vrai sujet est donc de favoriser l’accès aux formations sur la plateforme et de permettre aux élus de mobiliser leur DIFE, plutôt que d’augmenter le nombre de jours, qui sera déjà porté de dix-huit à vingt-quatre grâce à l’article 15. Si je comprends l’objectif poursuivi et l’idée de permettre aux élus de mobiliser les jours dont ils disposent pour se former, je ne pense pas qu’une augmentation du nombre de jours changera quoi que ce soit. C’est pourquoi je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, avis défavorable.

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Je vous rejoins sur la difficulté de mobiliser le droit à la formation, sujet qui mériterait un travail d’évaluation en parallèle, dont la délégation parlementaire aux collectivités territoriales et à la décentralisation pourrait se charger. Néanmoins, inscrire officiellement, et de manière lisible, ce droit dans la loi permettrait d’irriguer dans les territoires et d’inciter les élus à l’exercer. De plus, étant donné l’enjeu des politiques publiques locales auxquelles ils seront confrontés dans le cadre du mandat à venir – en matière d’adaptation au changement climatique ou d’environnement, sujet attaqué sur plusieurs fronts –, ce droit à la formation mérite d’être considéré avec solennité.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Cet amendement a le mérite d’appeler l’attention sur les conditions dans lesquelles un élu commence son mandat. J’évoquais tout à l’heure la nécessité pour un élu de connaître ses droits ; il s’agit ici davantage de connaissances sur le plan institutionnel. Ceux qui sont élus depuis longtemps ont fait l’expérience de la formation dans le grand bain. Je ne suis pas certaine que ce soit la meilleure manière d’entamer ces fonctions, qui sont à la fois fondamentales et complexes. J’entends également que le problème n’est pas lié au nombre de jours, même si le présent amendement cible spécifiquement les primo-élus auxquels il accorde un droit supplémentaire et qu’il est important de les accompagner dès le départ pour qu’ils ne se sentent pas perdus ou découragés. En outre, la formation supplémentaire pourrait intégrer une information sur leurs droits.

M. Bryan Masson (RN). Je rejoins l’argumentaire du rapporteur : les jours de formation ne sont pas suffisamment utilisés. La meilleure des formations, c’est celle qui se fait dans le grand bain, auprès des directeurs ou des chefs de service et des fonctionnaires qui font vivre la collectivité – ils l’ont fait avant nous, élus que nous sommes, et le feront encore bien après nous, lorsque nous ne le serons plus ; c’est sans doute aussi ce qui explique que les élus recourent peu à leurs jours de formation. Par conséquent, n’ajoutons pas encore des dispositifs qui s’éloignent de la réalité des maires, des adjoints et des conseillers municipaux.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Permettez-moi de rappeler le sens de l’article 15 bis, qui intègre l’obligation d’une session d’information sur les fonctions d’élu local et, donc, sur ses droits. La proposition de loi répond donc déjà à cette nécessité de mieux informer les élus dès leur entrée en fonction. Je le répète, plutôt que d’augmenter le nombre de jours de formation, il faut favoriser l’accès à celle-ci.

Par ailleurs, tel que votre amendement est rédigé, ces six jours de congé formation supplémentaires ne seraient pas financés, alors qu’actuellement, les pertes de revenus subies par l’élu lorsqu’il assiste à des formations sont compensées, et que les formations peuvent toujours être suivies pendant les congés payés. Six jours sans solde ne seront pas de nature à faciliter l’accès à la formation !

La commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 15 non modifié.

Article 15 bis (nouveau) (art. L. 1221‑5 [nouveau] du code général des collectivités territoriales) : Session d’information sur les fonctions d’élu local

Amendements identiques CL292 de M. Stéphane Delautrette, CL67 de M. Guillaume Gouffier Valente, CL107 de Mme Martine Froger, CL203 de M. Hervé Saulignac et CL344 de M. Laurent Croizier

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Tel que le texte est rédigé, la session d’information des élus doit être organisée dans les trois premiers mois de leur mandat, période durant laquelle ils doivent déjà faire tout un travail d’appropriation de leur fonction – le nouvel élu est tout de suite mis dans le bain. Je propose de porter ce délai à six mois pour s’assurer de l’effectivité de l’organisation, ce qui permettra aussi à l’élu de trouver des réponses à des questions qu’il se sera posées en ayant un peu baigné dans la fonction.

M. Guillaume Gouffier Valente (EPR). Mon amendement identique a été travaillé avec Intercommunalités de France.

Mme Martine Froger (LIOT). Il s’agit de porter de trois à six mois le délai imposé pour réaliser la formation.

M. Laurent Croizier (Dem). Il ne s’agit pas tant d’organiser cette session dans les délais les plus courts que dans les conditions les meilleures. Pour ce faire, nous proposons de porter de trois à six mois le délai imparti pour la réaliser.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Le délai se discute mais, comme le président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation est parmi nous, j’entends surtout dans cet échange une invitation à y voir clair sur les formations disponibles pour les élus. On pourrait imaginer une formation immédiate sur les droits et aussi sur l’environnement institutionnel, les deux questions difficiles en début de mandat. Au bout des six mois, on pourrait ensuite organiser ce type de formation, à un moment où l’élu a une conscience un peu plus claire de ses propres besoins. On bute, souvent sans le dire, sur l’adaptation des moyens de formation proposés par les CNFPT ou autres – n’oublions pas le rôle joué par les organismes de formation des partis.

La commission adopte les amendements.

Amendement CL456 de Mme Catherine Hervieu

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Après avoir insisté sur l’exigence d’une formation de qualité, je soulignerai ici le caractère moins-disant de la notion de « session d’information », que je propose de remplacer par « formation ». S’agissant des délais, nous verrons ce qui sortira de nos travaux. Quoi qu’il en soit, une session d’information n’est pas forcément du même niveau qu’une session de formation qui pourra compter lors d’une démarche de validation des acquis de l’expérience (VAE).

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. La notion de formation est peut-être plus claire et précise que celle de session d’information, mais cette dernière offre sans doute plus de souplesse. Mais si notre commission considère que cette modification clarifie les choses, je m’en remets à sa sagesse.

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Si j’ai bien entendu ce que vous disiez concernant l’évaluation du recours au droit à formation, cette modification permettra de voir plus précisément ce qu’il en est dans ce domaine. Elle serait cohérente avec les arguments que vous avez développés.

La commission adopte l’amendement.

Amendements CL262 de M. Jean-Claude Raux et CL457 de Mme Élisa Martin (discussion commune)

M. Jean-Claude Raux (EcoS). Nous avons toutes et tous en tête un ou des actes de violences sexistes et sexuelles (VSS) en politique, des petites remarques sexistes répétées aux cas de violences médiatisées. Le mouvement MeToo a percuté la politique comme presque tous les milieux de pouvoir, et c’est tant mieux. Pour lutter contre les VSS, il faut commencer par former très largement dans ce domaine. Nous proposons donc d’inclure un module dédié à la lutte contre les VSS dans la formation initiale obligatoire des élus locaux, comme le préconisait d’ailleurs le rapport de Mme Spillebout et de M. Jumel.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). La position de l’élu est complexe : il n’est pas le supérieur hiérarchique des agents, mais il leur donne des consignes. C’est une position qui peut être utilisée par certaines personnes – souvent des hommes – pour mettre la pression sur d’autres – souvent des femmes. De surcroît, la formation permet d’avoir des condamnations plus sévères. L’homme est informé de ce qu’il ne doit pas faire, notamment de ce qui peut être considéré comme des glissements de comportement. La formation est à la fois une mise en garde et une manière de sanctionner.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Je suis tout à fait favorable à une formation sur les VSS. L’amendement de Mme Martin est plus souple sur le contenu de la formation que celui de M. Raux qui le balise davantage. L’intention est la même et je suis favorable aux deux. S’il faut choisir, je pencherais pour la rédaction de Mme Martin. Je suggère donc à M. Raux de retirer son amendement au profit de celui de sa collègue.

Successivement, la commission rejette l’amendement CL262 et adopte l’amendement CL457.

Amendements CL187 de Mme Delphine Lingemann, CL458 de Mme Élisa Martin et CL468 de M. Carlos Martens Bilongo (discussion commune)

Mme Delphine Lingemann (Dem). Je propose d’intégrer une information obligatoire sur les enjeux climatiques et environnementaux à la formation des élus locaux lors de leur prise de fonction. Il est important que les élus locaux disposent d’une compréhension claire de ces enjeux et des politiques publiques à mettre en œuvre à leur échelle.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Il paraît nécessaire de favoriser une habitude en matière de prévention des risques et de gestion des crises. Les collectivités ont parfois du mal à respecter certaines de leurs obligations, moins par manque de volonté que par défaut d’information et de formation. En l’occurrence, nous visons la prévention et la gestion des risques climatiques.

M. Carlos Martens Bilongo (LFI-NFP). Il s’agit de compléter l’article par l’alinéa suivant : « 3° Une formation sur les enjeux énergétiques et climatiques ainsi que sur la bifurcation écologique. » Une telle formation en début de mandat permettra aux élus de mieux appréhender certains dossiers concernant notamment le chauffage des bâtiments publics ou la géothermie.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Si vous me le permettez, je vais donner un avis global. Ces amendements et les suivants consistent à étendre la formation obligatoire à de très nombreux domaines. Si je pense qu’il fallait ajouter les VSS, je suis plus réservé sur les autres propositions. Vous estimez nécessaire que les élus soient formés et sensibilisés aux enjeux climatiques et environnementaux. Ce n’est pas moi qui vous dirai le contraire. Mais viennent ensuite d’autres demandes de formation concernant la gestion des risques, la démocratie locale, les finances locales et les marchés publics, les outils à la disposition des élus contre les violences, la santé au travail. Ajoutons toutes les formations que les élus peuvent juger utiles pour l’exercice de leur mandat et qui ne figureraient pas dans la liste.

L’intention est plutôt bonne, mais rendre obligatoires toutes ces formations n’est-ce pas contraindre le choix des élus et les priver de formations qu’ils considèrent plus utiles pour eux dans l’exercice de leur mandat ? Si je souscris à l’idée que les élus soient bien formés sur tous ces sujets, je pense qu’il s’agit pour nous de faire en sorte qu’ils aient accès à ces formations, pas forcément de les leur imposer. Nous avons déjà adopté le principe d’une formation en début de mandat. En outre, les élus membres d’un exécutif ont des obligations de formation en fonction de leur délégation. Le tout cumulé, cela fait beaucoup d’obligations.

Même si je comprends l’intention, je demande un retrait de ces amendements. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Ces différents amendements permettent de donner corps à ce que nous considérons comme des nécessités pour l’entrée en mandat. D’une certaine manière, ces thèmes viennent nourrir le contenu des formations initiales. C’est la raison pour laquelle nous maintenons notre amendement.

Mme Delphine Lingemann (Dem). À l’heure du changement climatique, il me semble essentiel d’intégrer tous les aspects environnementaux dans la construction des projets politiques locaux. Je vais donc maintenir aussi mon amendement.

M. Joël Bruneau (LIOT). Une fois de plus, chers collègues, je loue vos bonnes intentions ; mais le but recherché étant que les gens s’engagent en politique, n’allons pas trop loin dans ce genre d’obligations à remplir à peine sont-ils élus. J’irai même jusqu’à dire que les sujets éminemment importants que vous évoquez les uns et les autres, c’est avant de se présenter aux élections qu’il faudrait les travailler et sur lesquels il faudrait se former. Cela ne peut résulter que d’une démarche volontaire. Autre argument : il me semble exagéré d’aller jusqu’à ce niveau de détail dans une loi sur le statut de l’élu – formulation que je n’approuve pas tellement. Tant que nous y sommes, fixons aussi les horaires des conseils municipaux !

M. Philippe Gosselin (DR). Pour ma part, je pense qu’il faut avoir les potentialités de formation les plus larges possible, à condition bien sûr que leurs maquettes soient sérieuses. Nous pouvons en effet nourrir quelques interrogations sur certains organismes qui sont pourtant agréés et qui bénéficient de sources de financement parfois généreuses, dirais-je en faisant attention au choix des mots. Les dépenses de formation sont obligatoires, ce qui représente une manne. Peut-être serait-il intéressant d’évaluer ces actions de formation et les organismes qui les proposent ?

Je n’ai rien contre une formation aux enjeux énergétiques et climatiques, mais il y a beaucoup de sujets qui mériteraient de faire l’objet d’une formation à l’échelon municipal, celui de la proximité et du quotidien. Dans une loi, devons-nous entrer à ce point dans les détails ? Pour ma part, j’aimerais qu’il y ait des formations adaptées, personnalisées, vraiment intuitu personae. Il peut y avoir des formations à destination d’une majorité municipale ou de l’ensemble des conseillers municipaux, ce qui a du sens et dépasse les divergences légitimes dans une République. Mais il peut aussi y avoir des parcours personnalisés de formation. Parce que cela ne relève pas de leur domaine d’action, certains élus ne souhaitent peut-être pas être formés aux enjeux énergétiques et climatiques, même si cela peut être regrettable. Je trouve que nous allons un peu trop loin vers une offre forfaitaire. Laissons un peu de liberté et d’autonomie. Le mieux est parfois l’ennemi du bien.

M. Bryan Masson (RN). Les membres du groupe RN vont évidemment s’opposer à ces amendements, en allant dans le sens du rapporteur qui explique que ces contraintes ne sont pas bénéfiques pour les élus locaux. Or ce sont eux qui sont au centre de ce texte et les premiers de cordées sur le terrain. En matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire, ils savent très bien comment prendre en considération la préservation de nos centres-villes, et ils le font dans leur grande majorité. Ils sont à la manœuvre dans le domaine des mobilités et des transports doux. Ils sont en première ligne concernant la gestion des déchets, le tri et le recyclage. Même chose en matière d’énergies, de bâtiments publics, d’eau et de biodiversité. Moi qui viens d’un territoire qui affronte sécheresse et risques d’incendies, je peux témoigner du fait que ce sont nos élus locaux qui préviennent et agissent, souvent avant l’État.

Élus de proximité au contact de la réalité, ils savent que l’écologie et la préservation de l’environnement sont primordiales. Ils sont en lien direct avec la population qui le leur rappelle, notamment à chaque élection. Ils sont moins éloignés que certains élus nationaux peut-être plus soumis à certains lobbies. Quand on est maire d’une petite commune, on est beaucoup plus libre et proche de la réalité, notamment en matière d’environnement. Je tenais à le dire pour défendre nos élus locaux qui agissent déjà en faveur de l’environnement.

Mme Brigitte Barèges (UDR). Je rejoins les précédents orateurs, notamment Joël Bruneau, ancien maire de Caen. La formation est financée par le budget municipal. Fixée en début de mandat, l’enveloppe peut être augmentée en fonction des besoins. Il faut vraiment garder une certaine souplesse. On peut faire des formations collectives pour tous les conseillers municipaux et des formations plus spécialisées pour un adjoint ou un conseiller délégué. Or nous sommes en train de monter une usine à gaz qui va coûter cher à nos finances locales. Il appartient aux élus de faire des efforts de formation personnelle – l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) et de nombreux organismes évoluant autour des mairies proposent des formations. Et on apprend aussi sur le tas. Il me semble qu’au fil du temps, nous créons une rente de situation pour l’élu local, alors que cette fonction est avant tout un engagement, un devoir, un mandat au profit des citoyens.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). On va dire que je n’ai pas entendu la notion de rente de situation. Scandaleux ! Pour les élus, il ne s’agit pas de savoir mais de faire. L’écologie est une question transversale qui va s’inviter dans tous les débats, y compris ceux qui concernent les politiques sociales. Cela doit nous inciter à faire le point sur les formations, leur nature et la manière dont elles sont dispensées. Monsieur Gosselin, vous avez raison de vous soucier de l’attribution des agréments, mais les exigences ont déjà été renforcées et la situation a évolué dans le bon sens.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Monsieur Masson, je n’ai jamais dit qu’il n’était pas bénéfique pour un élu de se former à certains sujets tels que le changement climatique. Loin de moi l’idée qu’une telle formation ne leur serait pas utile dans l’exercice de leur mandat. En revanche, j’alerte sur un cumul de formations qui seraient à faire obligatoirement dans les six premiers mois de mandat. Il n’est pas réaliste de vouloir leur imposer un tel parcours en six mois, sans parler du coût de ces formations qui sera financé par le budget des communes. Les petites collectivités risquent de rencontrer des difficultés, sachant que le budget formation est proportionnel au budget des communes. Je vous invite à la prudence concernant l’adoption de ces amendements. Nous devons travailler sur l’accès aux formations, mais pas les imposer dans les six premiers mois de mandat.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CL227 de M. Emmanuel Duplessy

M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Il n’est certes pas possible d’aborder les sujets de fond lors de ce premier temps d’information sur le fonctionnement des collectivités, mais il est important de rappeler les bases en matière de droits et de devoirs des élus, et de présenter les outils à la disposition de ces mêmes élus pour lutter contre les violences et les menaces dont ils peuvent faire l’objet dans l’exercice de leur mandat. Les élus locaux se plaignent, souvent à juste titre, d’être en première ligne des montées en tension dans la société, liées notamment à l’affaiblissement de nos services publics et au fait que certains de nos concitoyens n’accèdent plus ou mal à leurs droits. Pour permettre aux élus de mieux connaître la législation, il serait intéressant de les informer sur le « pack sécurité » et sur l’existence dans chaque commissariat d’un référent auquel ils peuvent s’adresser quand ils subissent des violences. L’idée est d’informer sur l’état du droit, et non de dispenser une formation très poussée lors de cette première étape.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Pour les raisons développées précédemment, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.

Mme Violette Spillebout (EPR). Malgré la loi promulguée il y a quelques mois après de longs échanges à l’Assemblée nationale, peu de progrès ont été faits en matière de violences à l’égard des élus. Nombre d’élus locaux ne connaissent pas les subtilités du droit pénal et ne savent pas quelle procédure engager quand ils sont diffamés ou injuriés. Dans certains départements, des conventions ont été signées entre l’AMF locale, la préfecture et les procureurs, mais il reste beaucoup de progrès à faire en faveur de la protection des élus locaux. Compléter ainsi la formation et revenir sur le sujet, c’est aussi une manière de continuer à agir auprès du gouvernement pour que l’accompagnement des élus soit renforcé. La cellule spéciale nationale recense désormais les faits de violence, mais, un an après l’adoption de la loi, je ne suis pas sûre que le législatif ait suffi pour faire cesser les agressions envers des élus locaux.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Les propos de Mme Spillebout laissent à penser que la surenchère pénale, le cœur du projet de loi adopté il y a un an, n’est finalement pas très efficace. Une partie de la violence, y compris symbolique, à l’égard des élus locaux s’explique par l’austérité imposée par les gouvernements successifs. Faute d’avoir les moyens de répondre à certaines situations, ces élus sont en difficulté. Comprendre n’est pas excuser, comme disait Max Weber, mais si nous n’arrivons pas à analyser l’origine d’une partie de ces violences, nous allons faire du sur-place : continuer dans une surenchère pénale qui ne règle rien. Les questions de démocratisation, d’indépendance et de sens se posent. Confronter les élus locaux à cette situation de manque terrible de moyens les met en difficulté et augmente la violence et les tensions avec les citoyens. Il faudrait prendre le temps de réfléchir à cet aspect et ne pas imaginer que l’on va régler le problème en informant les élus de leurs droits. Il faut évidemment qu’ils soient informés de leurs droits, mais nous devons aller plus loin dans l’analyse des raisons de la violence. J’aurais envie d’ajouter une remarque vraiment pas politiquement correcte : on se demande parfois ce qui doit nous arriver pour que nous soyons effectivement protégés.

M. Joël Bruneau (LIOT). Ce phénomène de société complexe ne touche malheureusement pas que les élus, il s’étend à toutes les personnes qui, de près ou de loin, sont en charge d’autorité ou représentent la République. Un maire de commune, qui organise régulièrement des réunions publiques et porte des projets pas toujours faciles à défendre, se heurte à des violences qui sont heureusement verbales dans la plupart des cas. Cet état de fait n’est pas lié à une question de moyens. L’austérité, chère collègue, c’est quand vous avez moins d’argent d’une année sur l’autre Or, jusqu’à preuve du contraire, les collectivités – comme l’État, d’ailleurs – dépensent de plus en plus chaque année. Il n’y a donc pas d’austérité, mais il peut y avoir des choix et des arbitrages avec lesquels on peut ne pas être d’accord.

Le vrai sujet de fond est que certains de nos concitoyens ont beaucoup de mal à appréhender le sens de l’intérêt général, qu’ils manifestent une conception un peu nombriliste de ce qui est légitime et une intolérance à la frustration. Certains n’acceptent pas qu’un projet d’intérêt général puisse aboutir si, selon eux, il nuit à des intérêts particuliers. Je peux vous citer le cas d’une manifestation contre l’installation d’un dentiste dans un quartier, au prétexte que les patients de ce praticien risquaient de prendre les places de stationnement des habitants dudit quartier. Nous en sommes là. Nous n’allons pas résoudre le problème par des formations ou des mesures de ce genre. Quant à l’atteinte à l’intégrité physique de l’élu, elle peut parfois s’expliquer par le fait que, au nom de certaines causes, on s’autorise des manœuvres violentes.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Pour ma part, je comprends tout l’intérêt que les élus soient bien informés sur ce sujet, mais je ne suis pas certain que cela passe forcément par l’obligation d’effectuer une formation dans les six mois qui suivent l’élection. De toute façon, si toutes ces formations sont rendues obligatoires dans ce délai, je ne vois pas comment les élus pourraient remplir ces obligations. Ce serait matériellement et budgétairement impossible. En revanche, je pense que l’information est impérative. Travaillons avec les associations pour que les élus soient mieux informés de leurs droits, notamment en matière de protection dans l’exercice de leurs fonctions.

La commission adopte l’amendement.

Amendement CL263 de M. Jean-Claude Raux

M. Jean-Claude Raux (EcoS). Je conçois, monsieur le rapporteur, que l’on ne puisse tout inclure de la formation initiale obligatoire, mais certains sujets sont très importants. C’est le cas de la lutte contre les discriminations, objet de cet amendement.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Une fois encore, ce n’est pas le sujet qui pose problème mais la capacité des collectivités à réaliser tous ces modules de formation. Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

Amendements CL462 et CL464 de Mme Élisa Martin

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). On en rajoute une petite couche. Nous voudrions permettre aux élus d’avoir une vision suffisamment claire des conditions dans lesquelles ils exercent leur mission. Pour ce faire, nous proposons qu’ils bénéficient d’une présentation détaillée sur le fonctionnement des finances locales et des marchés publics, et d’une formation sur le fonctionnement de la démocratie locale et la participation des citoyens. En effet, le rôle d’un élu local est aussi de trouver les moyens de faire en sorte que les citoyens prennent vraiment part à certaines décisions.

Certes, l’accumulation de toutes ces formations peut entraîner une difficulté, y compris temporelle, pour les élus qui doivent les faire. Elles sont pourtant nécessaires pour que le mandat local ait du sens et soit donc vécu de la meilleure manière possible, afin d’éviter le découragement.

Enfin, M. Bruneau nous dit qu’il y a austérité quand les budgets baissent. Eh bien c’est le cas : les budgets des collectivités baissent d’année en année. Le boulot de l’élu local est désormais de chercher où sabrer dans les dépenses, ce qui n’est pas sans conséquences sur la qualité et l’ampleur des services publics.

M. Didier Le Gac, rapporteur. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

Nous ne sommes évidemment pas opposés à la formation, qu’encouragent du reste de nombreuses mesures de cette proposition de loi, comme l’allongement du congé de formation.

Alors que le texte vise à faciliter et à simplifier l’exercice du mandat des élus, vos amendements créent des contraintes, notamment une obligation de formation sur des sujets variés – environnement, finances publiques, marchés publics. Certes, il faut former les élus, mais ils participent déjà à des sessions de formation en lien avec les associations d’élus. Ce n’est pas en obligeant l’élu à suivre une session de formation tous les samedis matin qu’on lui donnera envie de poursuivre son mandat.

M. Bryan Masson (RN). Je suis tout à fait d’accord avec le rapporteur. Devons-nous encourager l’engagement des élus locaux ou les infantiliser ? Les contraintes que nous sommes en train de voter risquent de compliquer encore l’exercice du mandat, tant pour les élus actuels que pour les futurs élus, sans pour autant résoudre les problèmes auxquels ils sont confrontés. Un mandat local, c’est court. L’infantilisation conduira au désengagement.

Il faut s’attacher à résoudre les difficultés rencontrées par les élus locaux dans l’exercice de leur mandat. Ce type d’amendement ne favorise pas l’engagement et n’améliore nullement le quotidien des élus.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendements CL469 et 470 de Mme Catherine Hervieu

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Ce débat met en lumière des orientations en matière de politiques publiques sur lesquelles nous devons prendre position. Par définition, l’élu ne peut être expert en tout ; cela dit, il doit pouvoir exercer son mandat de la meilleure façon possible. Nos discussions à ce sujet sont donc intéressantes. Les dispositions qui pourraient être adoptées en séance contribueraient à améliorer la maîtrise de certains sujets par l’ensemble des élus locaux.

L’amendement CL469 reprend une demande de l’Association des petites villes de France qui souhaite que les élus soient formés à la gestion de crise. Par exemple, les effets du changement climatique se traduisent très concrètement dans les communes, notamment par des inondations, des incendies. Lorsque ces événements surviennent brutalement, les services de l’État et les SDIS viennent apporter leur appui. Néanmoins, ce sont les élus locaux qui sont en première ligne.

Il serait intéressant de prévoir en amont cette formation, qui permettrait d’assimiler tant des connaissances technologiques et relatives aux phénomènes naturels que les leçons tirées des retours d’expérience. L’expression « gestion de crise » est suffisamment large pour cela.

Quant à l’amendement CL470, il vise à prévoir une formation sur les enjeux de cybersécurité, vu les risques d’ingérence qui menacent les collectivités, ainsi qu’une sensibilisation à l’utilisation de l’intelligence artificielle. Plus généralement, il s’agit d’apprendre à se protéger.

Cette formation s’inscrit dans le cadre de la transposition de la directive européenne relative à la protection des entités critiques, comme les banques. À tous les échelons territoriaux – locaux, nationaux et européens –, il est essentiel de sensibiliser les élus à la cybersécurité. J’appelle votre attention sur le fait que cet amendement prend en compte des enjeux fondamentaux.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Certes, les élus doivent avoir connaissance des sujets importants que vous avez évoqués. Néanmoins, je m’interroge sur la faisabilité des mesures proposées. Tous ces sujets ne pourront être abordés lors de la session de formation obligatoire – le texte prévoyait initialement une session d’information – suivie par les élus dans les six premiers mois de leur mandat. En effet, il faudrait prévoir une ou deux semaines de formation pour assimiler ces sujets. Cela étant, nous devons faire en sorte que les élus soient informés et formés sur tous ces sujets au cours de leur mandat.

Une formation aussi dense aurait un coût très élevé, et il serait compliqué pour l’organisme de formation de couvrir tous les sujets lors d’une seule session. Pensons aussi aux petites communes, qui seraient soumises à la même obligation.

Par ailleurs, comme nous avons adopté un amendement remplaçant la session d’information par une session de formation, tout ce qui relève de la sensibilisation ou de l’information en interne ne s’inscrit pas dans le cadre de la formation.

Mme Elsa Faucillon (GDR). Les élus locaux ont besoin d’obtenir une réponse sur tous les sujets importants évoqués par mes collègues. Par leurs amendements, ils font remonter des souhaits d’élus locaux connus ou de collectifs.

En tant que législateurs, toutefois, nous ne devons pas imposer un cahier des charges pour les formations ou les sessions d’information. En revanche, il est important que ces sujets fassent l’objet d’une boîte à outils permettant à chaque élu de trouver ce dont il a besoin. Tous les élus n’ont pas besoin de suivre une formation sur les risques liés à la cybersécurité et sur la gestion de crise. En tant qu’élue locale et ancienne déléguée d’un quartier, je n’avais pas besoin d’une formation à la cybersécurité pour être une bonne élue de quartier.

Un élu local exerce un mandat politique ; il a des choix à faire. L’élu local doit à la fois gérer et lutter, il ne faut pas oublier l’un ou l’autre de ces aspects. La formation implique aussi une forme d’émancipation, qui se traduit par la possibilité pour l’élu de choisir.

M. Ugo Bernalicis (LFI-NFP). Nous soutenons ces amendements car le besoin est réel.

Cette série d’amendements et ce texte sont la conséquence de la faillite de la politique d’accompagnement des collectivités locales et des élus locaux menée depuis au moins huit ans. Certes, tous les élus locaux n’ont pas besoin de suivre une formation à la cybersécurité. Mais lorsqu’une commune est victime d’une cyberattaque, elle ne sait pas à qui s’adresser : elle ne sait pas forcément qu’elle peut contacter l’ANSSI – Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information –, qui apparaît comme une entité lointaine et qui manque de moyens.

Les élus n’ont pas besoin d’une formation à la gestion de crise tous les quatre matins. Néanmoins, en sa qualité d’agent de l’État, c’est le maire qui sera en première ligne pour la gérer. Lorsqu’une crise, comme une pandémie, survient, le maire, selon la taille de sa commune, dispose de moyens plus ou moins importants alors qu’il doit prendre des décisions concrètes. Si toutes les structures accompagnaient réellement les élus locaux, nous ne nous ferions pas des nœuds au cerveau pour prévoir des formations adaptées aux besoins et aux situations.

Une structure était censée accompagner les élus locaux, notamment en matière d’ingénierie : l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT). J’avais émis quelques réserves et critiques quant à la pertinence de cette structure qui ne réglerait aucun problème mais qui, en réalité, cacherait une diminution des moyens alloués aux différents secteurs relevant de sa responsabilité. Ces craintes sont devenues des certitudes ; tout le système dysfonctionne. Par exemple, le contrôle de légalité, qui est un outil pour accompagner les élus, est censé être une priorité depuis des années. Cela devait se traduire par le déploiement d’équivalents temps plein dans les préfectures et les sous-préfectures. Pourtant, rien n’a été fait en ce sens.

Dans la continuité des votes sur les amendements relatifs à la formation, allouons des moyens importants à l’accompagnement des élus.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle adopte l’article 15 bis modifié.

Après l’article 15 bis

Amendement CL246 de Mme Céline Thiébault-Martinez

Mme Céline Thiébault-Martinez (SOC). Mon amendement vise à prévoir une formation consacrée aux risques professionnels, à destination de tous les élus, afin de rappeler les principes de prévention en matière de santé au travail. Les élus sont également des employeurs. À ce titre, il serait donc pertinent qu’ils bénéficient d’une telle formation pour exercer correctement leur mandat.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Votre amendement prévoit que cette formation devra être suivie par l’ensemble des membres de l’organe délibérant. Or son champ d’application aurait pu être limité aux seuls élus chargés des ressources humaines.

Bien que je considère que les élus doivent être mieux accompagnés sur ces sujets dans l’exercice de leur mandat, je vous invite à retirer votre amendement. À défaut, avis défavorable.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Ce n’est pas exactement le sens de l’amendement, qui vise plutôt à préserver la santé des élus, en particulier leur santé mentale – c’est un véritable sujet. Selon l’enquête scientifique menée par l’AMF et le Cevipof – Centre de recherches politiques de Sciences Po –, l’une des principales difficultés rencontrées par les élus est leur mauvaise santé – et non l’insuffisance du montant de leurs indemnités –, notamment en raison de la charge mentale liée à l’exercice du mandat qu’ils estiment, de manière légitime, considérable et terrible.

J’ignore si une formation leur permettra de résoudre ces difficultés, mais cet amendement a au moins le mérite de mettre en lumière que les élus locaux ne vont pas très bien.

M. Joël Bruneau (LIOT). Cet empilement de formations obligatoires en début de mandat n’aura pour effet que de décourager les élus locaux. Ce que demandent la plupart des élus locaux, qu’ils soient élus d’une petite ou d’une grande collectivité, c’est qu’on leur lâche un peu la bride pour qu’ils puissent mener à bien leurs projets.

Certes, la charge mentale est importante compte tenu d’un environnement de plus en plus complexe et de la pression exercée par nos concitoyens. Les maires de petites communes, confrontés à des questions pointues, se tourneront naturellement vers le secrétaire général de la préfecture. Plusieurs services déconcentrés apportent un appui aux collectivités sur certains dossiers auxquels ils ne s’opposent pas systématiquement – il ne faut pas noircir le tableau.

Sortez donc des approches théoriques et écoutez le vécu de ceux qui ont exercé un mandat d’élu local – bien entendu, mon expérience n’est pas celle d’un maire d’une commune de 250 habitants.

La commission rejette l’amendement.

Amendements CL314 et CL465 de Mme Catherine Hervieu

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Par l’amendement CL314 nous insistons sur la nécessité d’organiser une formation consacrée à la gestion de crise liée au réchauffement climatique et aux aléas météorologiques.

Nous avons bien entendu les arguments ayant conduit au rejet de tous les amendements similaires. Néanmoins, le fait que nous insistions sur cette question et que les amendements aient été déposés par des groupes très différents témoigne de l’importance du sujet.

J’ai écouté les arguments du rapporteur : s’il semble trop compliqué de dispenser ces formations en début de mandat, leur organisation au cours de celui-ci serait pertinente. Si l’amendement ne précise pas ce point, il est important de l’évoquer pour, éventuellement, aboutir à un compromis en séance.

Enfin, cet amendement s’inspire des travaux du rapport sénatorial de la délégation aux collectivités territoriales « Engager et réussir la transition environnementale de sa collectivité ».

L’amendement CL465 s’inscrit dans la même logique. Il vise à dispenser une formation aux élus locaux chargés d’une délégation relative à l’organisation de la démocratie locale ou participative, démarche visant à répondre aux besoins de notre société.

La nouvelle étape en matière de démocratie participative dans laquelle nous nous engageons, à la suite des premières lois du début du XXIe siècle, nécessite un important travail de conception et d’animation.

De plus, on constate une défiance des citoyens à l’égard des élus, même si elle s’exprime de manière plus modérée envers les élus locaux qu’envers les élus nationaux. Par exemple, la suppression de la taxe d’habitation n’a pas facilité ces relations.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Le CGCT prévoit déjà que les élus qui reçoivent délégation suivent obligatoirement une formation en début de mandat.

Par ailleurs, il ne revient pas à la loi de définir le programme de formation. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable sur ces deux amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

Amendement CL372 de Mme Marie Pochon

M. Sébastien Peytavie (EcoS). Pour améliorer la lisibilité des offres de formation à destination des élus locaux, il est proposé d’envisager la création d’une plateforme numérique qui recenserait l’ensemble des offres de formation.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Votre amendement est satisfait puisque la plateforme « Mon Compte élu » propose un accès en ligne à toutes les formations dont bénéficient les élus dans le cadre de leur droit à la formation, qu’il s’agisse des formations liées à l’exercice du mandat, lesquelles font l’objet d’un catalogue spécifique, ou des formations généralistes suivies dans le cadre d’une reconversion. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

Chapitre III
Faciliter la conciliation entre l’exercice du mandat et la vie personnelle de l’élu

Article 16 (art. L. 2123-18-2, L. 2335-1, L. 3123-19, L. 4135-19, L. 7125-22 et L. 7227-23 du code général des collectivités territoriales) : Élargissement de la prise en charge par la commune des frais de garde et extension de la compensation par l’État du remboursement

Amendement CL219 de Mme Céline Thiébault-Martinez

Mme Céline Thiébault-Martinez (SOC). Cet amendement vise à clarifier et à harmoniser le droit au remboursement des frais de garde d’enfants engagés par les élus locaux dans le cadre de leur mandat, en fixant un âge plafond de 12 ans pour les enfants concernés.

Il s’agit de faciliter la vie des élus et d’éviter que les frais de garde d’enfant, rendus nécessaires par les engagements liés à leur mandat, ne pèsent sur leur budget et ne nuisent à l’exercice de leur mandat.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Vous proposez d’abaisser à 12 ans l’âge plafond, actuellement fixé à 16 ans dans la partie réglementaire du CGCT. Cet amendement est moins-disant que le droit en vigueur. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

L’amendement est retiré.

Amendements CL201 de M. Hervé Saulignac et CL94 de M. Sébastien Peytavie (discussion commune)

Mme Céline Thiébault-Martinez (SOC). L’amendement CL201 vise à supprimer l’alinéa 4 de l’article 16. Il tend donc à revenir sur l’extension aux communes de 3 500 à 10 000 habitants du financement par la DPEL – dotation particulière relative aux conditions d’exercice des mandats locaux – de la prise en charge des frais de garde d’enfants ou d’assistance aux personnes âgées.

M. Sébastien Peytavie (EcoS). Notre amendement, qui devrait être satisfait par le texte, s’oppose au précédent. Il vise justement à étendre la compensation par l’État du remboursement des frais de garde d’enfants ou d’assistance aux personnes âgées ou en situation de handicap aux communes de moins de 10 000 habitants, dont la situation financière reste fragile. Il y a là un enjeu car seuls 0,001 % des élus sont en situation de handicap.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Je comprends l’intention de l’amendement CL201. La question est de savoir si la DPEL sera revalorisée à la hauteur de l’ambition nouvelle qu’on veut lui donner. Je crains qu’elle ne reste à enveloppe constante, même si j’admets que son extension aux communes jusqu’à 10 000 habitants est une mesure intéressante.

Je m’en remets à la sagesse de la commission sur l’amendement CL201, qui vise à s’assurer que la DPEL permette d’atteindre les objectifs qui ont justifié sa création, car il permet d’assurer une plus grande sécurité du financement à destination des plus petites communes. Quant à l’amendement CL94, il est satisfait : demande de retrait et, à défaut, avis défavorable.

La commission adopte l’amendement CL201.

En conséquence, l’amendement CL94 tombe.

Elle adopte l’article 16 modifié.

Après l’article 16

Amendements identiques CL188 de Mme Delphine Lingemann, CL348 de Mme Blandine Brocard et CL375 de Mme Marie Pochon

Mme Delphine Lingemann (Dem). Mon amendement vise à enjoindre le ministre chargé des collectivités territoriales à déterminer par arrêté un modèle de délibération fixant les modalités de remboursement des frais de garde d’enfants ou d’assistance aux personnes âgées ou handicapées.

Dans de nombreuses communes, la complexité des procédures de prise en charge des frais de garde d’enfants est un frein à l’engagement des femmes dans l’exercice de mandats locaux. Les inégalités entre les hommes et les femmes se creusent à l’arrivée des enfants.

La création de ce modèle de délibération permettrait de simplifier les procédures et favoriserait l’engagement des femmes.

Mme Anne Bergantz (Dem). Cet amendement a été travaillé avec l’Association des maires ruraux de France. Simple et concret, il est essentiel pour encourager et soutenir l’engagement des femmes dans les conseils municipaux.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Avis favorable. Il est difficile pour les petites communes d’avoir accès à des modèles de délibérations, qui sont des documents techniques et spécifiques. Ces amendements visent à faciliter l’exercice du mandat. Du reste, cette mesure permettra également d’aider des collectivités plus importantes.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Premièrement, en l’absence de compensation à l’euro près des surcoûts liés à la prise en charge des frais de garde ou d’assistance par les collectivités, ces frais ne seront pas couverts. La collectivité devra arbitrer entre la conduite des politiques publiques et le soutien aux élus. Or les élus des petites communes privilégieront le pilotage et la mise en œuvre des politiques publiques.

Deuxièmement, cela pose la question de la mise à disposition par les services de l’État de moyens permettant aux élus locaux d’accomplir leurs missions. Selon l’étude de l’AMF et du Cevipof, la première raison du mécontentement et du découragement des élus locaux est leurs relations avec les services de l’État. Il ne s’agit pas de mettre en cause les fonctionnaires qui travaillent dans ces services mais de critiquer le manque de moyens alloués pour venir en aide aux élus.

Il n’y a pas si longtemps, les TPG – trésoriers-payeurs généraux – établissaient les budgets des communes à partir des consignes données par les maires. Aujourd’hui, les trésoreries ont été remplacées par un réseau d’aides à destination des décideurs locaux ; l’aide apportée est de nature différente.

Tout à l’heure, Ugo Bernalicis a évoqué le contrôle de légalité, qui ne se limite pas à relever les erreurs. Il s’agit d’un appui apporté aux élus locaux pour rédiger leurs délibérations. Or, désormais, ils n’en bénéficient plus.

Mme Catherine Hervieu (EcoS). Les amendements visant à faciliter l’engagement des femmes dans l’exercice du mandat local sont cohérents avec la nouvelle loi instaurant un mode de scrutin de liste paritaire pour les communes de moins de 1 000 habitants qu’ils traduisent concrètement.

En outre, l’adoption de ces amendements permettrait d’apporter des réponses aux femmes qui s’interrogent sur leur engagement pour 2026.

La commission adopte les amendements.

Article 16 bis (nouveau) (art. L. 2123-18-4, L. 3123-19-1, L. 4135-19-1, L. 6434-4, L. 7125-23 et L. 7227-24 du code général des collectivités locales) : Extension du bénéfice du chèque emploi-service universel (Cesu) à l’ensemble des élus locaux

Amendements de suppression CL295 de M. Didier Le Gac et CL346 de Mme Blandine Brocard

M. Didier Le Gac, rapporteur. Stéphane Delautrette et moi sommes souvent en phase, mais nous sommes en désaccord sur cet article.

L’article 16 bis concerne le Cesu, le chèque emploi service universel. Bien que j’aie été maire pendant vingt ans, j’ignorais que la loi permettait aux communes d’accorder une aide financière aux élus qui, exerçant des fonctions exécutives – notamment les maires et les adjoints –, utilisent le Cesu. Cet article, introduit par le Sénat, prévoit d’étendre le bénéfice de cette aide à l’ensemble des élus. Cela soulève une question de finances publiques ; mais après tout, pourquoi pas ? C’est un choix politique.

En revanche, la rédaction de l’article me gêne. En l’état du droit, dès lors qu’une commune décide d’appliquer le dispositif, les élus peuvent utiliser le Cesu pour régler des frais de garde, y compris lorsque ces frais sont sans lien avec l’exercice du mandat. Certes, la collectivité peut prendre une délibération pour restreindre l’usage du Cesu, mais prenons garde au message que nous envoyons à nos concitoyens.

Je propose donc de supprimer l’article. Mais nous pourrons éventuellement retravailler sa rédaction en vue de l’examen en séance.

Mme Violette Spillebout (EPR). Nous avions travaillé sur le sujet avec M. Jumel. En cohérence également avec la proposition de loi que nous avions déposée avec M. Delautrette, nous allons voter contre cet amendement de suppression. J’entends que cette facilité offerte aux élus puisse ne pas être utilisée à bon escient ; mais il est ressorti du travail d’écoute mené par le Sénat que l’aide financière relative aux Cesu mériterait d’être étendue à tous les élus, et non pas réservée au seul exécutif. L’article est donc une vraie avancée.

Mme Anne Bergantz (Dem). Cette mesure, dont nous comprenons l’intention, pose un problème de soutenabilité financière, notamment aux petites collectivités. L’esprit de la proposition de loi est d’accompagner les élus exerçant des responsabilités exécutives. Leur charge de travail et leur disponibilité ne sont objectivement pas les mêmes que celles des conseillers sans délégation. Enfin, cette extension n’a fait l’objet d’aucune évaluation.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Je suis très défavorable à ces amendements de suppression. L’article répond à une demande des élus. Restreindre l’extension du dispositif risque d’aller à l’encontre même de notre objectif de favoriser l’engagement de tous. Une facilité est donnée sans obligation pour les collectivités : elles participeront librement à la prise en charge des Cesu, en fonction de leurs moyens. Je suis favorable au maintien de cette disposition, complémentaire des autres dispositifs de remboursement de frais.

La commission rejette les amendements.

Elle adopte l’article 16 bis sans modification.

Article 17 (art. L. 323-6, L. 331-3-1 [nouveau] et L. 331-8 du code de la sécurité sociale, art. L. 3142‑88 du code du travail, art. L. 2123‑9, L. 2123‑25‑1, L. 3123‑7, L. 3123‑20‑1, L. 4135‑7, L. 4135‑20‑1, L. 7125‑26 et L. 7227‑27 du code général des collectivités territoriales) : Cumul des indemnités journalières et des indemnités de fonction

Amendement CL453 de Mme Élisa Martin

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Les élus locaux peuvent avoir la tentation d’exercer leur mandat, quel que soit leur état de santé. Or l’alinéa 2 de l’article 17 ne les protège pas suffisamment. C’est pourquoi, au lieu d’une simple absence de contre-indication, nous souhaitons un avis formel du médecin, comme c’est le cas actuellement.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Je comprends votre intention de préserver la santé des élus. Loin de moi l’idée de les exposer. Néanmoins, l’expérience a montré que des élus avaient été contraints de rembourser leurs indemnités journalières au seul motif qu’ils n’avaient pas pensé à demander à leur médecin d’indiquer sur le formulaire Cerfa qu’ils pouvaient continuer à exercer leur mandat. La rédaction du Sénat est pertinente : elle apporte des garanties en matière de santé publique, puisque l’accord du médecin est maintenu – il peut préciser que l’élu malade ne doit pas continuer à exercer ses fonctions électives –, sans exposer l’élu à une quelconque obligation de remboursement lorsque certaines mentions ont été oubliées sur le Cerfa. Avis défavorable.

La commission adopte l’amendement.

Suivant l’avis du rapporteur, elle rejette successivement les amendements CL273 et CL260 de Mme Lisa Belluco.

Amendement CL491 de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. En séance publique, le Sénat a étendu au congé d’adoption la mesure permettant à l’élu local de continuer à exercer son mandat et de bénéficier du cumul de l’indemnité journalière et de l’indemnité de fonction. Le texte modifie à cet effet l’article L. 331-8 du code de la sécurité sociale, relatif au congé de paternité et d’accueil de l’enfant. Or les dispositions relatives au congé d’adoption sont inscrites à l’article L. 331-7. Afin de rendre la mesure opérationnelle, c’est donc cet article que l’amendement complète.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’amendement CL253 de Mme Lisa Belluco tombe.

Amendement CL494 rectifié de M. Stéphane Delautrette

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Nous souhaitons que, en cas de remplacement provisoire du chef de l’exécutif, le droit à la suspension du contrat de travail et à la réintégration s’applique pour la période d’exercice provisoire des fonctions de chef de l’exécutif. En effet, la rédaction actuelle du texte prévoit que l’élu qui remplace le chef de l’exécutif empêché peut retrouver son emploi à l’expiration de son mandat, et non à la fin de la suppléance. Ces dispositions répondent aux difficultés qu’a récemment rencontrées Mme la maire de Poitiers.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). C’est un amendement très important. Parmi les enjeux de la démocratisation de la fonction d’élu se pose la difficulté du retour à l’emploi, en particulier pour les salariés du privé. L’amendement offre une garantie de retour à son poste. Même s’il concerne une situation particulière et provisoire, peut-être pourrions-nous y voir l’ébauche d’un modèle qui permettrait à des salariés du privé d’exercer un mandat sans perdre leur emploi.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL492 de M. Stéphane Delautrette, rapporteur.

Elle adopte l’article 17 modifié.

Après l’article 17

Amendement CL347 de Mme Blandine Brocard

Mme Anne Bergantz (Dem). Cet amendement part d’un constat simple, en lien avec la situation de la maire de Poitiers. Lorsqu’une élue locale est en congé maternité et qu’elle ne peut reprendre ses fonctions pour des raisons de santé, il est difficile de maintenir la délégation de ses pouvoirs, faute d’un cadre légal clair. Nous proposons une mesure de bon sens, qui cherche à mieux concilier engagement politique et maternité. Quand la santé de l’élue ne lui permet pas de reprendre immédiatement ses fonctions, la délégation doit pouvoir être étendue à toute la durée de son congé maternité.

M. Stéphane Delautrette, rapporteur. Il faut en effet trouver une solution. Si je souscris totalement à votre intention sur le fond, la forme légistique ne me paraît pas pertinente. Au lieu de créer un article additionnel, mieux vaudrait modifier l’article L. 2121-20 du CGCT. Je vous propose de retirer votre amendement de sorte que nous puissions travailler dessus d’ici à l’examen en séance.

L’amendement est retiré.

La réunion est suspendue de douze heures dix à douze heures quinze.

Chapitre IV
Sécuriser l’engagement des élus et les accompagner
dans le respect de leurs obligations déontologiques

Article 18 (art. L. 432-12 du code pénal) : Détermination des intérêts susceptibles de constituer l’infraction de prise illégale d’intérêts

Amendement de suppression CL367 de Mme Élisa Martin

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Hier soir, dans sa grande sagesse, la commission a refusé une évolution proposée par les sénateurs selon laquelle un agent d’une commune elle-même membre d’une intercommunalité pouvait y être élu. Cela n’est pas sans lien avec cet article, qui vise à supprimer le conflit d’intérêts public-public. Nous y sommes opposés. Imaginons un élu qui prenne une décision à propos d’un organisme dans lequel travaille son conjoint. Même s’il y a un intérêt public à ce que cette prime soit votée, il y a aussi un intérêt personnel pour l’élu concerné. De surcroît, supprimer ce conflit d’intérêts, selon Transparency International ou Anticor, rendra moins transparentes et traçables les raisons de telle ou telle décision. Or il nous semble qu’il y a une aspiration citoyenne à ce que les décisions soient rendues dans les conditions les plus transparentes possible. Enfin, la jurisprudence n’est pas défavorable aux élus. La justice est capable de détecter les cas où la volonté d’accorder un avantage indirect à sa propre personne est manifeste. C’est pourquoi il ne faut pas supprimer le conflit d’intérêts public-public.

M. Didier Le Gac, rapporteur. Nous sommes d’accord sur deux points. Tout d’abord, il est vrai que cet article est l’un des plus importants. Chez moi, ce n’est pas tant l’incivilité, l’insécurité ou l’empilement des normes qui découragent les élus mais la suspicion qui règne sur leurs décisions quand ils sont élus dans deux organismes publics. Mon amendement CL454 reprend beaucoup de propositions faites par les différents groupes afin d’encourager les élus à repartir pour un nouveau mandat. Entendons-nous bien : il ne s’agit pas d’aller sur le terrain du conflit d’intérêts public-privé. Il faut rassurer les associations qui travaillent dans ce domaine et le font de façon remarquable. Dans le conflit d’intérêts public-public, il n’y a pas d’enrichissement personnel. Il s’agit d’élus qui siègent dans deux organismes publics, deux collectivités locales ou dans une collectivité locale et une SPL – société publique locale – ou une SEM – société d’économie mixte –, et dont la probité est remise en cause.

Par ailleurs, il est vrai aussi que l’article 18, dans sa rédaction résultant des travaux du Sénat, n’est pas satisfaisant, puisqu’il ne règle pas la situation. Le législateur se penche sur cette question depuis quelque temps. Il y a eu la loi dite « 3DS », relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale, qui avait essayé d’améliorer ce point sans régler grand-chose.

Le conflit d’intérêts public-public est une singularité française qui décourage nos élus locaux. Il n’est pas cohérent de sanctionner un élu qui détient deux mandats locaux ou qui siège au sein d’un organisme où il a été désigné par sa propre collectivité. Les élus nous disent souvent que c’est kafkaïen ! Pour toutes les associations d’élus, de l’AMRF – Association des maires ruraux de France – à France urbaine, en passant par l’AMF, l’Association des petites villes de France, Villes de France et la Fédération des élus des entreprises publiques locales (EPL), on ne peut plus continuer ainsi.

Nous avons aussi travaillé avec M. Christian Vigouroux, l’un de ceux qui connaissent le mieux le sujet du conflit d’intérêts. Il vient de remettre au Premier ministre un rapport remarqué et remarquable riche de nombreuses propositions que nous avons en partie reprises.

L’avis est donc défavorable. Je proposerai, avec mon amendement CL454, une rédaction mesurée, pesée et calculée à la virgule près pour répondre au mieux à la demande des élus locaux et à l’exigence de probité.

Mme Violette Spillebout (EPR). L’article 18 est extrêmement important pour l’ensemble des élus locaux. Le conflit d’intérêts public-privé reste pleinement visé et sanctionné ; les garde-fous déontologiques et la transparence dans l’exercice des fonctions restent nécessaires. L’exception française du conflit d’intérêts public-public fait courir un risque judiciaire qui pourrit la vie des élus locaux et constitue un frein à leur engagement. Nous sommes au cœur de la proposition de loi.

Dans le Nord, un cas a mobilisé tous les élus locaux tant il était hallucinant. Le maire de Grand-Fort-Philippe, M. Sony Clinquart, a été attaqué en justice et condamné pour détournement de fonds publics parce que, pour faire fonctionner la maison médicale qu’il avait créée et favoriser le recrutement de médecins, il a décidé d’y placer deux agentes de la ville comme secrétaires médicales. Le montage ayant été jugé incorrect juridiquement, Anticor a déposé plainte contre lui. Il a été condamné en première instance à six mois de prison avec sursis, 5 000 euros d’amende et trois ans d’inéligibilité. Nous sommes bien loin d’un conflit d’intérêts touchant la vie privée d’un élu ou d’un couple. C’est une incohérence totale de notre droit. L’erreur administrative met en cause non seulement la probité mais aussi la responsabilité judiciaire d’un maire.

Le maire de Marcq-en-Barœul, M. Bernard Gérard, qui est aussi vice-président de la région, a proposé une subvention au conseil régional pour une salle de sport dans sa ville. Il n’a pas eu le droit de voter. Résultat : à une voix près la résolution pourrait ne pas être adoptée.

M. Joël Bruneau (LIOT). Il faut être raisonnable. Seul le génie français peut avoir inventé ce concept de conflit d’intérêts public-public. Quelle forme concrète prend-il dans une collectivité ? Un élu désigné après délibération par sa commune pour la représenter dans une instance publique n’a pas le droit de parler dans son conseil municipal du sujet sur lequel il a été délégué ni même, si l’on suit les recommandations à la lettre, d’être présent au sein du conseil municipal au moment où le sujet est abordé. C’est à ce point ubuesque que le président du conseil communautaire en arrive à demander à la moitié de la salle de sortir au moment des délibérations concernant le syndicat d’eau ! Parfois, on n’a même plus le quorum pour adopter la délibération qui le concerne un peu – la mise à disposition d’une parcelle pour construire un nouveau point de captage ou ériger un château d’eau. Cela n’a pas de sens de considérer qu’un maintien des choses en l’état nous permettrait de mieux répondre aux exigences naturelles de probité. Du reste, la probité ne s’impose pas par la loi, elle relève d’abord d’une conviction personnelle. Il ne peut pas y avoir de détournement à des fins personnelles, par définition, puisque l’élu est délégué par l’organe délibérant.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Ce qui va protéger le mieux les élus de tout soupçon, c’est le fait de rendre les délibérations et les cheminements des décisions les plus transparentes possible. Or, en faisant sauter cette notion de conflit d’intérêts public-public, on rend les choses moins traçables. Lorsque Transparency International ou Anticor s’expriment, ils ont une parfaite connaissance du conflit d’intérêts public-public. Dans une logique de prudence, nous maintenons notre amendement de suppression. Nous nous abstiendrons sur votre proposition, monsieur le rapporteur, et étudierons ce sujet de très près pour la séance. Il faudrait aussi examiner très précisément l’exemple cité par Mme Spillebout car, d’une manière générale, me semble-t-il, la jurisprudence est plutôt favorable aux élus.

M. le président Florent Boudié. Une fois n’est pas coutume, je vais vous faire part d’une expérience personnelle. Je siège dans deux organismes en tant que conseiller régional d’opposition de Nouvelle-Aquitaine. Le président du conseil régional m’a nommé représentant dans une SPL et dans une SEM. J’ai dû, comme vous tous, déclarer à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) mon appartenance à ces conseils d’administration. J’avais d’abord omis de le faire, ne m’imaginant pas dans un cas de conflit d’intérêts, d’autant que j’ai assez rarement siégé, depuis le mois de juillet 2024, au sein de ces deux organismes. La HATVP a saisi le bureau de l’Assemblée nationale, lequel, par le biais de son vice-président, Roland Lescure, m’a lui-même saisi, en me demandant instamment de quitter ces conseils d’administration, étant coupable d’un potentiel conflit d’intérêts aux termes de l’article 432-12 du code pénal.

M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Notre groupe souhaite aussi permettre aux élus désignés représentants dans un certain nombre de satellites de la collectivité de participer aux délibérations concernant le satellite pour lequel ils ont été désignés représentants. Cette continuité nous semble importante et nous comprenons l’exaspération de certains élus locaux. Néanmoins, l’article 18 n’est pas satisfaisant. Seuls les alinéas 1er et 8, qui en constituaient la version originelle, répondent au problème. Les six autres alinéas ne concernent pas le conflit d’intérêts public-public.

Monsieur le président, en tant qu’élu local, je suis membre d’une SEM et le déontologue ne m’a rien demandé.

M. le président Florent Boudié. Faites attention, cher collègue ! Ce n’est pas le déontologue mais la HATVP qui a saisi le bureau de l’Assemblée nationale.

M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Quant au premier exemple donné par Mme Spillebout, je ne suis pas certain qu’il s’agisse d’un conflit d’intérêts public-public mais plutôt d’un problème de mise à disposition sauvage de personnels.

La commission rejette l’amendement.

Amendement CL454 de M. Didier Le Gac

M. Didier Le Gac (EPR). Cet amendement de réécriture de l’article 18 ne vise bien entendu pas à affaiblir les exigences déontologiques qui pèsent sur les élus, mais à répondre à leur crainte permanente de se retrouver mis en cause devant le juge pénal pour des conflits entre deux intérêts publics. Nous avons travaillé avec les associations d’élus auditionnées, avec la HATVP, dont nous avons sollicité l’avis, et avec le Gouvernement. Nous avons également consulté M. Christian Vigouroux, dont certaines des recommandations issues de son rapport sont traduites dans cet amendement.

Premièrement, l’amendement reprend, dans une rédaction un peu différente, la proposition des associations d’élus d’exclure du champ de la prise illégale d’intérêts les élus désignés par leur collectivité pour une fonction non rémunérée au sein d’un autre organisme. Plutôt que de recopier les dispositions du code pénal, solution juridiquement inutile, l’amendement se contente d’y renvoyer explicitement.

Deuxièmement, il apporte une réponse à une jurisprudence de 2023 de la Cour de cassation, laquelle a neutralisé la modification de l’article 432-12 du code pénal résultant de la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire précisant que l’intérêt en cause devait être de nature à compromettre l’impartialité, l’indépendance ou l’objectivité de l’auteur des faits. L’amendement précise donc que cet intérêt doit effectivement compromettre l’impartialité, l’indépendance ou l’objectivité de l’auteur.

Troisièmement, il prévoit d’exclure les intérêts publics du champ de l’article 432‑12 du code pénal. Un élu qui siège dans deux organismes publics ou qui détient deux mandats locaux ne doit en effet pas pouvoir faire l’objet d’une condamnation pénale de ce fait.

Quatrièmement, il prévoit que pour des motifs impérieux d’intérêt général, en particulier en cas d’urgence, l’infraction de prise illégale d’intérêts ne peut être constituée. M. Vigouroux évoque deux exemples intéressants : d’une part, le cas d’un maire contraint, afin de faire face à un sinistre, de conclure en urgence un marché au bénéfice d’une entreprise exploitée par un proche, alors que celle-ci est la seule en mesure d’intervenir efficacement à brève échéance ; et, d’autre part, le cas de la commune qui investit dans une maison médicale où s’installe finalement un membre de la famille du maire, en l’absence d’autre candidat dans une région particulièrement touchée par la pénurie de médecins.

Cinquièmement, cet amendement supprime les modifications opérées par le Sénat concernant la liste des liens familiaux, comme vous le proposez, monsieur Duplessy, dans votre amendement CL229. Restreindre le délit de prise illégale d’intérêts à la seule famille directe nous semble en effet trop restrictif. Cette infraction pouvant aussi être constituée à des degrés plus éloignés : cousins, oncles ou grands-parents par exemple.

Enfin, il propose une coordination à l’article 432‑12‑1 du code pénal afin d’aligner la rédaction du délit de prise illégale d’intérêts applicable aux magistrats avec la nouvelle rédaction de l’article 432‑12. Il opère également une modification similaire à l’article 2 de la loi n° 2013‑907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, laquelle satisfait ainsi l’amendement CL230 de M. Duplessy.

Pour toutes ces raisons, je vous invite à adopter cet amendement qui permettra de véritablement sécuriser juridiquement l’exercice des fonctions d’élu local.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Je ne suis pas certaine que la question porte sur la rémunération, par exemple d’un élu membre d’une SEM. Elle porte plutôt sur l’opposition entre deux intérêts généraux et concerne donc également les élus qui ne sont pas rémunérés pour leurs fonctions, mais aussi les situations où un élu ne cumule pas deux fonctions.

Prenons l’exemple d’un maire qui décide de verser un treizième mois dans des conditions un peu brinquebalantes dès la première partie du versement. Il devra effectuer le deuxième versement au mois de décembre quoi qu’il arrive, car s’il bloque la prime, il bloque le versement du traitement des fonctionnaires. Imaginons en outre que ce versement intervienne trois mois avant les élections municipales et que la moitié des agents municipaux vivent sur le territoire de la commune. On voit bien le conflit d’intérêts public-public alors que le maire n’exerce aucune autre fonction. Pour la question des liens de parenté, c’est la même chose : votre rédaction n’épuise pas le sujet.

Il me semble donc problématique de restreindre ou de faire disparaître la notion de conflit d’intérêts public-public, d’autant que les magistrats prennent déjà en compte les éléments propres à la situation, comme dans le cas de réparation urgente d’un sinistre. Je m’abstiendrai donc.

M. Joël Bruneau (LIOT). Faire courir le risque à un élu de se retrouver devant un tribunal, même si celui-ci l’exonère, n’est pas la meilleure manière d’encourager et de soutenir son engagement.

Dans le cas d’un élu délégué par sa commune pour la représenter dans une SEM, par exemple, sa légitimité vient du conseil municipal, elle n’est pas intuitu personae. Par conséquent, s’il venait à prendre des décisions contraires à l’intérêt de la commune, il est probable que ses collègues ne le maintiendraient pas dans ses fonctions déléguées.

La commission adopte l’amendement et l’article 18 est ainsi rédigé.

En conséquence, les autres amendements à l’article 18, ainsi que l’amendement CL230, tombent.

Après l’article 18

Amendement CL455 de M. Didier Le Gac, amendements identiques CL30 de M. Freddy Sertin, CL65 de M. Guillaume Gouffier Valente, CL129 de Mme Valérie Bazin-Malgras, CL199 de M. Hervé Saulignac et CL351 de M. Laurent Croizier (discussion commune)

M. Didier Le Gac, rapporteur. Cet amendement de réécriture qui s’inspire, comme les amendements identiques, d’une proposition des associations d’élus, concerne les règles de déport qui sont aujourd’hui un véritable irritant. Elles peuvent conduire à des situations ubuesques où la majorité des membres du conseil municipal, dont parfois ceux qui connaissent le mieux le dossier, se trouvent obligés de quitter la salle. En cas d’oubli, les élus peuvent même se retrouver inquiétés au pénal.

Il modifie certaines dispositions de la loi 3DS. Elle a le mérite d’exister, mais, dans les faits, elle n’a pas changé grand-chose pour les élus.

Il exclut des situations de conflits d’intérêts toutes les situations où la collectivité a désigné l’élu pour siéger au sein d’un autre organisme ou groupement, et non uniquement les cas où ils sont désignés en application de la loi. En contrepartie de cette généralisation, l’amendement limite cette absence de conflits d’intérêts aux cas où l’élu ne perçoit pas d’indemnités de fonction au titre de cette représentation.

Il ajoute à la liste des actes exclus du champ du conflit d’intérêts le cas des élus qui signent seuls, au nom de la collectivité ou du groupement, un acte intéressant la personne morale concernée.

Il clarifie les exceptions au principe d’absence de conflit d’intérêts, notamment dans le cas où l’organisme extérieur est candidat à l’attribution, par la collectivité ou le groupement, d’un contrat de la commande publique, afin de garantir l’égalité de traitement des candidats.

Enfin, il consacre l’absence de conflit d’intérêts personnel d’un élu du seul fait qu’il siège dans deux collectivités territoriales ou groupements de collectivités territoriales, alors même que le cumul entre deux mandats locaux est autorisé.

M. le président Florent Boudié. Quel est votre avis sur les amendements identiques ?

M. Didier Le Gac, rapporteur. Mon amendement en est très proche, mais il ajoute plusieurs coordinations nécessaires pour garantir une bonne application. J’invite donc leurs auteurs à les retirer.

Les amendements CL30 et CL65 sont retirés.

La commission adopte l’amendement CL455. En conséquence, les amendements CL129, CL199 et CL351 tombent.

Article 18 bis (nouveau) (art. L. 3132-5 et L. 4142-5 [nouveaux] du code général des collectivités territoriales) : Modalité de calcul du quorum en cas de déport de conseillers départementaux ou régionaux représentant leur collectivité au sein d’organismes extérieurs

Amendement CL459 de M. Didier Le Gac

M. Didier Le Gac, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination, qui étend les dispositions de l’article aux sociétés d’économie mixte locales (SEML).

La commission adopte l’amendement.

Amendements CL461 de M. Didier Le Gac et CL357 de Mme Violette Spillebout (discussion commune)

M. Didier Le Gac, rapporteur. Mon amendement complète l’article afin de lever toute ambiguïté sur une éventuelle obligation de sortie de salle en cas de déport d’un élu. Ainsi, il est explicitement précisé qu’un membre d’une assemblée délibérante intéressé à l’affaire ne peut être considéré comme ayant pris part à la délibération en raison de sa seule présence à la réunion de l’organe délibérant. Cette précision s’appliquera aux conseillers municipaux et communautaires, mais également aux conseillers départementaux et régionaux.

Par rapport à l’amendement CL357, il apporte plusieurs corrections légistiques et rédactionnelles. J’invite donc Mme Spillebout à le retirer.

L’amendement CL357 est retiré.

La commission adopte l’amendement. CL461.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL429 de M. Didier Le Gac, rapporteur.

Elle adopte l’article 18 bis modifié.

Article 19 (art. L. 2123-35, L. 3123-29 et L. 4135-29 du code général des collectivités territoriales) Octroi automatique de la protection fonctionnelle aux élus locaux victimes de violences, de menaces ou d’outrages

Amendement CL430 de M. Didier Le Gac

M. Didier Le Gac, rapporteur. Cet amendement réécrit intégralement l’article 19, du fait de la promulgation, depuis l’adoption de la présente proposition de loi par le Sénat, de la loi du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux. Cette dernière ayant introduit une procédure d’octroi automatique de la protection fonctionnelle pour les exécutifs locaux, les dispositions de l’article 19 ayant le même objectif sont devenues sans objet.

Cet amendement conserve néanmoins les dispositions relatives à l’extension de la protection fonctionnelle aux conseillers municipaux, départementaux et régionaux qui ne sont pas chargés de fonction exécutive, y compris ceux qui ont cessé leurs fonctions. Pour ces élus, serait conservée la procédure d’octroi de la protection fonctionnelle sur délibération. La procédure d’octroi automatique resterait réservée aux exécutifs locaux, c’est-à-dire à une catégorie d’élus plus exposée et plus vulnérable dans la mesure où ils sont les plus visés par des actes d’agression.

L’amendement procède également à de légers aménagements de la procédure d’octroi automatique au regard des difficultés de la mise en œuvre constatées depuis la promulgation de la loi du 21 mars 2024.

La commission adopte l’amendement et l’article 19 est ainsi rédigé.

En conséquence, l’amendement CL371 de Mme Élisa Martin tombe.

Après l’article 19

Amendement CL376 de Mme Marie Pochon

M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Avec cet amendement je propose la création de référents santé mentale au sein de chaque préfecture pour les élus locaux, lesquels peuvent être soumis à de fortes pressions. Leur mission serait d’accompagner, à leur demande, les élus locaux et de préparer des plans de prévention et d’identification des risques.

M. Didier Le Gac, rapporteur. Stéphane Delautrette et moi sommes très sensibles à cette question, mais votre amendement me semble rigide et difficile à mettre en œuvre. Je ne suis en effet pas sûr que les petites communes réussiront à trouver un référent. Je vous informe toutefois que nous donnerons un avis favorable à un amendement déposé après l’article 29 demandant un rapport sur l’impact des violences subies par les élus locaux sur leur santé mentale.

M. Emmanuel Duplessy (EcoS). Mon amendement prévoit la création d’un référent au sein des préfectures et non de chaque commune. Nous ne sommes pas déconnectés des réalités de nos communes ! Par ailleurs, il n’est pas rigide puisqu’il renvoie à un décret pour ses modalités d’application.

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). Je ne veux pas donner le sentiment que nous prenons simplement acte des difficultés des élus locaux. Ils doivent pouvoir disposer des moyens financiers pour mettre en œuvre les projets pour lesquels ils ont été élus, ils doivent se sentir soutenus par les services de l’État et ils doivent se sentir moins seuls.

Tout cela a un coût – je pense notamment à l’extension de la protection fonctionnelle. Il faudra donc à un moment que nous nous demandions qui devra passer à la caisse pour ne pas se contenter d’intentions louables.

La commission adopte l’amendement.

Article 20 (art. L. 2123-34, L. 3123-28 et L. 4135-28 du code général des collectivités territoriales) : Application de la protection fonctionnelle en cas de poursuites pénales dans le cadre de l’audition libre

Amendements identiques CL431 de M. Didier Le Gac et CL198 de M. Hervé Saulignac

M. Didier Le Gac, rapporteur. Cet amendement tire les conséquences de la décision QPC – question prioritaire de constitutionnalité – du Conseil constitutionnel du 4 juillet 2024 par laquelle il a jugé contraire au principe d’égalité le fait de n’octroyer aux agents publics la protection fonctionnelle que dans certains cas où leur est reconnu le droit à l’assistance d’un avocat.

Pour remédier à cette inconstitutionnalité, l’amendement aligne les conditions d’octroi de la protection fonctionnelle aux élus mis en cause pénalement sur celles prévues pour les agents publics à l’article 3 bis A de la proposition de loi visant à renforcer la sécurité des professionnels de santé.

La commission adopte les amendements et l’article 20 est ainsi rédigé.

En conséquence, les amendements CL190 de Mme Delphine Lingemann et CL352 de M. Laurent Croizier tombent.

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La séance est levée à 13 heures.

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Membres présents ou excusés

 

Présents. - M. Xavier Albertini, M. Pouria Amirshahi, Mme Brigitte Barèges, Mme Anne Bergantz, M. Ugo Bernalicis, M. Carlos Martens Bilongo, Mme Sophie Blanc, Mme Émilie Bonnivard, M. Florent Boudié, Mme Blandine Brocard, Mme Gabrielle Cathala, M. Jean-François Coulomme, M. Stéphane Delautrette, M. Emmanuel Duplessy, Mme Elsa Faucillon, Mme Martine Froger, M. Jonathan Gery, M. Yoann Gillet, M. Philippe Gosselin, M. Guillaume Gouffier Valente, Mme Monique Griseti, M. Jordan Guitton, Mme Catherine Hervieu, M. Patrick Hetzel, M. Jérémie Iordanoff, M. Guillaume Kasbarian, M. Didier Le Gac, Mme Constance Le Grip, M. Mathieu Lefèvre, M. Aurélien Lopez-Liguori, Mme Marie-France Lorho, M. Olivier Marleix, M. Éric Martineau, Mme Élisa Martin, M. Bryan Masson, M. Stéphane Mazars, M. Éric Michoux, M. Paul Molac, M. Jean Moulliere, Mme Danièle Obono, M. Sébastien Peytavie, Mme Anna Pic, M. René Pilato, M. Julien Rancoule, M. Nicolas Ray, M. Philippe Schreck, M. Freddy Sertin, M. Thierry Sother, Mme Violette Spillebout, M. Michaël Taverne, M. Jean Terlier, Mme Céline Thiébault-Martinez, M. Roger Vicot

Excusés. - M. Romain Baubry, Mme Pascale Bordes, Mme Edwige Diaz, Mme Caroline Yadan

Assistaient également à la réunion. - Mme Lisa Belluco, M. Joël Bruneau, M. Laurent Croizier, Mme Delphine Lingemann, Mme Marie Pochon, M. Jean-Claude Raux