Compte rendu

Commission d’enquête relative aux violences commises dans les secteurs du cinéma, de l’audiovisuel, du spectacle vivant, de la mode et de la publicité

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Lénaïg Bredoux, Mme Marine Turchi et M. Donatien Huet, journalistes à Mediapart 2

– Présences en réunion................................18

 


Jeudi
12 décembre 2024

Séance de 13 heures 30

Compte rendu n° 18

session ordinaire de 2024-2025

Présidence de
Mme Sandrine Rousseau,
Présidente de la commission

 


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La séance est ouverte à treize heures trente.

 

Mme la présidente Sandrine Rousseau. Nous recevons Marine Turchi, Lénaïg Bredoux et Donatien Huet, journalistes à Mediapart.

Vous avez mené des investigations extrêmement poussées sur les violences dans le secteur culturel et révélé de très nombreux faits qui entrent dans le champ de notre commission d’enquête. Vous avez notamment contribué à révéler des accusations contre des acteurs, des cinéastes, des producteurs, des animateurs, des DJ, dans le monde du cinéma et de l’audiovisuel mais aussi de la musique et du spectacle vivant.

Nous sommes donc ravis de vous accueillir pour que vous puissiez nous faire part de votre analyse des facteurs de risque qui existent dans ces milieux, mais aussi d’éventuelles préconisations pour y remédier.

Cette audition est ouverte à la presse et retransmise en direct sur le site de l’Assemblée nationale.

L’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes entendues par une commission d’enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

(Mme Marine Turchi, Mme Lénaïg Bredoux et M. Donatien Huet prêtent successivement serment.)

Mme Marine Turchi, journaliste à Mediapart. Du fait de toutes les enquêtes qui y ont été menées sur des violences sexuelles et sexistes, Mediapart est devenu un point d’ancrage à ce sujet, particulièrement dans le monde culturel et artistique, dans celui du cinéma et de la musique. Nous recevons donc énormément d’alertes et de témoignages. Ce flot de témoignages, par centaines, par milliers même, nous donne un point de vue sur ce milieu. Évidemment, on nous parle des trains qui n’arrivent pas à l’heure : nous ne recevons pas de témoignages qui montrent que tout va bien. Ce que nous voyons n’est donc pas exhaustif, et est biaisé ; mais cela donne un aperçu des dysfonctionnements. Dans 90 % des témoignages que nous recevons, il apparaît que si les alertes avaient été prises en compte en amont par les entreprises et les productions, les gens n’auraient pas eu à se tourner vers les médias. À travers nos enquêtes, nous voyons ainsi à l’œuvre tout un tas d’obstacles et de mécanismes – des mécanismes qui favorisent les violences, des obstacles qui empêchent la parole d’être émise ou, souvent, entendue.

L’élément le plus saillant est que ce milieu est précaire, très hiérarchisé et concurrentiel. Si l’on prend l’exemple du cinéma, sur lequel j’ai beaucoup travaillé, il y a une asymétrie entre, d’un côté, les célébrités et les décideurs, et de l’autre les techniciens et techniciennes, comédiens et comédiennes.

C’est de là que naissent les abus de pouvoir – car, vous le savez, ces affaires de violences sexuelles et sexistes sont en fait, et pas seulement dans le monde culturel, des affaires d’abus de pouvoir. Qui a le pouvoir ? Quels leviers actionne-t-il ? Que fait-il de ce pouvoir ? Est-ce qu’une actrice de 20 ans peut dire non à un producteur, un réalisateur ou un acteur très connu ?

Ensuite – et les deux sont corrélés – entre en jeu la taille du marché culturel, en l’occurrence du marché du cinéma. En France, celui-ci est très petit, très concurrentiel, à la différence, par exemple, du marché américain. Ça signifie que, de film en film, on se recroise. Qu’on soit un technicien une technicienne, ou un comédien une comédienne, en parlant, on s’expose forcément au risque de représailles, à celui d’être blacklisté. D’où la peur de parler.

Cette crainte a un fondement réel, ce n’est pas un fantasme. J’ai constaté dans mes enquêtes des cas de blacklisting. Une directrice de casting m’a dit en 2023 : « Le plus souvent, les femmes parlent, il ne se passe rien et leur carrière s’arrête. » Elle m’avait demandé ensuite de ne pas mentionner le fait que leur carrière s’arrêtait parce qu’elle avait peur que cela décourage de parler.

C’est en effet ce qui conduit plusieurs femmes à hésiter et, parfois, à reculer. Je pense à une actrice qui a témoigné, après mille hésitations, dans mon enquête sur Depardieu, finalement de manière anonyme, et qui m’a dit : « Parler, c’est se mettre en difficulté. En France, pour se permettre de dire les choses, il faudrait être au-dessus des personnes que vous accusez. Je suis une actrice qui travaille, mais en dents de scie. Le cinéma français, c’est un petit milieu. » Une autre actrice, toujours à propos de l’affaire Depardieu, me disait en 2019 : « Aujourd’hui, la structure économique du milieu du cinéma fait qu’aucune actrice ne peut se permettre de témoigner contre lui parce qu’il est influent. » Une troisième, dans une autre affaire, ne parvient pas encore à trouver la force de dénoncer son agresseur, très connu dans le milieu, et me dit : « Si je parle, ça va se retourner contre moi. Il fait encore la pluie et le beau temps dans le milieu. » À ce jour, cette femme n’a pas parlé publiquement, ni à la justice ; elle a trop peur.

Le risque de représailles, donc, existe. Le risque de mauvaise réputation aussi. Sara Forestier a pu vous le dire, d’autres le pourraient aussi. Parler, c’est prendre le risque qu’on vous dise que vous êtes folle, que vous l’avez bien cherché, que vous vouliez un rôle ou que justement vous ne l’avez pas eu, etc.

C’est ce qui explique que la parole est davantage possible quand la personne en cause est en perte de pouvoir et d’influence, en déclin, en fin de carrière. C’était le cas de Patrick Poivre d’Arvor (PPDA) ou de Gérard Depardieu, qui était déjà affaibli par ses accointances avec Poutine et d’autres régimes autoritaires quand nous avons fait notre enquête. Quant au réalisateur Christophe Ruggia, lorsque Adèle Haenel est sortie de sous sa coupe, elle était devenue plus puissante que lui : c’est ce qui permet la parole.

L’autre élément récurrent est la peur de stopper le tournage en dénonçant les faits. Elle aussi a un fondement réel : un film est une entreprise éphémère, précaire. Le risque de mettre tout le monde au chômage par des déclarations existe donc bien. Dans l’affaire Depardieu, c’est pour cette raison que l’une des plaignantes n’a d’abord pas voulu porter plainte.

Si les violences sexuelles et sexistes sont difficiles à dénoncer dans le milieu du spectacle, c’est aussi – j’imagine que vous en avez déjà parlé ici – à cause de l’alibi artistique. Tout est sous le paravent de l’art. Combien de fois l’ai-je entendu dans mes enquêtes ! L’art excuse, justifie, maquille un certain nombre de violences. Certains l’ont tout à fait assumé, comme Benoît Jacquot disant, dans le documentaire réalisé en 2011 par Gérard Miller, que faire du cinéma est une sorte de couverture pour certaines mœurs, de la même manière qu’il existe des couvertures pour des trafics illicites. Malgré les évolutions, le mythe du rapport entre le cinéaste et l’actrice, elle muse, lui génie créateur, et l’idée qu’il faudrait être amoureux de son actrice ou de son comédien pour tourner perdurent et imprègnent beaucoup le monde culturel et artistique, notamment le cinéma.

Cette idée va de pair avec la difficulté d’une partie du monde culturel à intégrer que le code du travail s’applique malgré la liberté de création. Cela peut faire sourire, mais une actrice qui se rend le matin sur un tournage part au travail. L’oubli de ce cadre légal, que j’ai observé dans plusieurs affaires chez des producteurs et productrices, des réalisateurs, des acteurs, est l’une des raisons du fait que les violences continuent et qu’on a du mal à les dénoncer.

L’autre obstacle récurrent à la dénonciation des faits par les victimes est leur minimisation, leur banalisation par les témoins ou les confidents.

Dans l’affaire Depardieu, une partie des faits qui ont été dénoncés avaient eu lieu au vu et au su de tous et toutes. Ils étaient même dans des vidéos, des articles, des livres que nous avons retrouvés lors de notre enquête il y a quelques années. La dénonciation des violences a fait l’objet, d’après les femmes qui parlent, de rires et d’une minimisation. Même les témoins disent que, oui, ils ont rigolé, oui ils ont regardé ailleurs – et cela doit conduire tout le monde à s’interroger. Le « oh, ça va, c’est Gérard », je l’ai tellement entendu pendant mon enquête que cela aurait pu être le titre de mon article.

Dans l’affaire Gérard Miller, c’est la même chose : plusieurs témoignages font état des railleries dont les autres chroniqueurs ont accompagné ses manœuvres d’approche de très jeunes femmes, parfois mineures, à la fin des émissions de Laurent Ruquier ou d’autres, sous un prétexte professionnel selon elles.

Voilà l’environnement dans lequel ces faits peuvent avoir lieu. Or les gens ne peuvent pas dénoncer ce qu’ils ne considèrent pas comme problématique. Beaucoup ne savent pas, ne veulent pas savoir, ne veulent pas intégrer ce qu’est une agression sexuelle, ce qu’est le harcèlement sexuel.

Je me souviens d’une directrice de la photographie qui avait passé des heures avec un réalisateur multi-accusé et qui affirmait qu’elle n’avait rien vu d’inapproprié. Elle était formelle. Mais quand je lui ai demandé si le réalisateur avait pu mettre sa main sur sa poitrine ou sur sa cuisse, ou tenter de l’embrasser, elle m’a répondu que c’était arrivé plusieurs fois. Donc à mes questions générales, elle répond qu’elle n’a rien vu de problématique, mais quand je lui demande si une chose précise est arrivée, elle répond que oui, bien sûr, mais qu’elle le repoussait.

Dans l’affaire Depardieu, alors même que certaines scènes survenues sur des tournages m’étaient rapportées par cinq ou six témoins, les réalisateurs et producteurs me disaient n’avoir rien vu, rien su. Sur vingt contactés, neuf n’ont pas répondu et onze m’ont dit cela. Un seul a reconnu avoir dû recadrer Gérard Depardieu – après le deuxième film et tout un tas d’alertes. Tout est mis sur le compte de l’humour, du personnage hors norme qu’est Depardieu. On parle éventuellement de propos graveleux, mais pas davantage, alors même que tout un ensemble de témoins attestent l’inverse.

Les gens ne peuvent pas non plus dénoncer ce qu’ils ne comprennent pas. Par exemple, en travaillant sur l’affaire PPDA sous l’angle de ce que savait TF1, j’interviewe la rédactrice en chef du « 20h » de l’époque. Elle réfute le fait que des agressions sexuelles ou des viols aient pu avoir lieu dans les locaux de TF1, dans le bureau de PPDA, porte ouverte. Je la questionne sur le récit d’une plaignante qui dénonce un viol dans le bureau, porte ouverte. Et voici ce qu’elle me dit : « Jamais une fille n’a pu avoir un truc comme ça avec la porte ouverte, c’est pas possible. Si les secrétaires avaient entendu, elles auraient fermé la porte. Moi, si j’avais été secrétaire, discrètement, je fermerais la porte. Je ne crois pas une seconde cette histoire-là. Mais après tout, elle l’a dit, elle l’a dit. » Ce sont ses mots précis.

Souvent, les personnes qui se disent victimes parlent, font part d’un malaise, d’un problème ; le message est envoyé, mais pas reçu. Dans le cas d’Adèle Haenel, qui avait 12 ans, combien n’ont pas vu les signaux qui clignotaient partout, les tentatives de la part de l’actrice de parler au fil des années ? La Société des réalisateurs de films n’a pas voulu saisir la petite perche qu’elle tendait. Mon enquête était imbibée de la culpabilité des gens de n’avoir pas agi, pas davantage écouté, pas saisi la perche.

Il revient dans nos enquêtes que les victimes ne savent pas non plus vers qui se tourner. Les référents harcèlement ne sont pas formés – je l’ai constaté fréquemment – et, trop souvent, ils sont liés à la production. Dans l’affaire Depardieu 2, l’affaire du film Les Volets verts, qui fait aussi l’objet d’un procès, le dispositif a été totalement inefficace : la référente harcèlement n’a rien fait ; c’est le directeur de production qui a essayé d’agir en demandant à Depardieu de s’excuser ; à aucun moment la référente harcèlement ne s’est tournée vers les deux futures plaignantes, alors même que les faits étaient connus sur le tournage.

La production elle-même ne sait pas toujours comment agir, y compris quand elle veut bien faire. J’ai déjà reçu des coups de fil de gens me demandant, parce que je suis une journaliste qui travaille sur ces sujets, de leur expliquer ce qu’ils pouvaient faire. Cela montre combien ils sont désarmés, aujourd’hui encore, en 2024.

Enfin, il y a les agents. Certains, peu nombreux, sont de vrais soutiens pour les personnes qui se disent victimes, mais beaucoup d’autres sont des obstacles – obstacle à la parole quand les femmes rapportent les faits, mais aussi à la sortie de l’affaire. Parfois, ils protègent les agresseurs. J’ai vu des agents informés du fait que leur acteur était visé par une ou plusieurs accusations et qui faisaient tout pour étouffer l’affaire alors même que des paroles émergeaient, que des inquiétudes se manifestaient, que des directeurs ou directrices de casting ne voulaient plus les faire tourner. Cela pose aussi la question de la formation des agents dans ce domaine.

Mme Lénaïg Bredoux, journaliste à Mediapart. Pour ma part, j’aimerais insister sur un point qui a précisément trait au périmètre de votre commission d’enquête.

Très souvent, on demande à Mediapart pourquoi revenir toujours au cinéma, au théâtre, à la musique, aux industries culturelles en général, pourquoi faire encore une enquête sur un réalisateur ou un acteur. C’est une question que nous nous posons nous-mêmes.

Nous ne sommes pas là pour accumuler des dossiers individuels. Ce n’est pas l’objet d’un travail journalistique. Celui-ci vise à révéler des faits d’intérêt général, à contribuer à un débat de société, à essayer de faire changer les choses à notre échelle. Il s’agit de montrer les mécanismes structurels qui font que ces violences systémiques sont permises par toutes les institutions, dans tous les milieux – nous insistons très souvent sur le fait que nous faisons des enquêtes sur tous les milieux ; d’ailleurs, nous n’avons pas commencé par les industries culturelles, mais par la politique.

Nous essayons aussi de faire des enquêtes de différents niveaux, certaines avec beaucoup de gens qui témoignent, pour expliquer comment, dans tel ou tel secteur d’activité, des mécanismes spécifiques s’ajoutent à la domination dont les violences sont le produit.

Mais il est vrai que nous revenons sans cesse aux industries culturelles, notamment au cinéma, mais aussi à la musique. Nous avons fini par nous dire, au lieu de le déplorer, que c’était révélateur de quelque chose. MeToo a d’ailleurs commencé par une enquête concernant le cinéma. C’est un milieu qui se croit différent des autres ; qui croit, parce qu’il s’agit de culture, du beau, d’art, donc du juste, du vrai, que rien ne peut y être sale ni violent. On parle souvent de la politique des auteurs dans le cinéma, mais ce phénomène est vrai de beaucoup de secteurs culturels. Nous le voyons tout le temps. Il faut dire aussi qu’il s’agit de classes sociales supérieures, dotées d’un capital culturel très élevé, ce qui heurte profondément l’image que l’on a encore, malgré tout, de l’identité des auteurs de violences sexistes et sexuelles. Je sais que tout cela est évident pour cette commission, mais il y a là, manifestement, un nœud qui explique la résistance très forte que nous rencontrons et l’opposition que nous observons dans nos enquêtes entre les gens qui veulent que les choses changent et ceux qui ne le veulent surtout pas et s’arcboutent sur leurs positions de pouvoir.

Voilà pourquoi il est essentiel que nous poursuivions notre travail d’enquête dans ce secteur : parce que, comme pour n’importe quel milieu professionnel, il est nécessaire de raconter comment beaucoup trop de gens sont encore victimes de violence dans le travail, mais surtout parce qu’il s’agit d’une activité qui produit des œuvres qui investissent l’espace public et qui contribuent à l’imaginaire collectif. Cela aussi, vous le savez. Il s’agit donc à la fois de protéger les gens qui travaillent dans les industries culturelles et d’interroger la société sur ce que l’on considère comme beau et sur la manière dont nos imaginaires sont structurés autour de faits parfois très violents.

Mme la présidente Sandrine Rousseau. Madame Turchi, vous disiez qu’il faut que la victime soit d’un statut supérieur à celui qu’il ou elle dénonce pour que la parole puisse se libérer sans que les carrières soient brisées. Mais Adèle Haenel a quitté le cinéma et ce milieu ne l’interprète pas comme un échec collectif. Il ne s’interroge pas sur les raisons de cette décision, ce qui en dit long. Nous avons plusieurs fois posé la question et les réponses que nous avons obtenues étaient plus que décevantes.

Vous nous avez beaucoup parlé des violences sur des victimes adultes, mais pas d’enquêtes sur des enfants, et je ne me souviens pas que vous en ayez menées. Je laisse de côté les enquêtes sur des faits survenus quand des victimes aujourd’hui adultes étaient enfants, comme Adèle Haenel, qui avait 12 ans. Êtes-vous aussi saisis de cas concernant des enfants ? Si oui, dans quelles conditions et pourquoi l’information ne sort-elle pas autant que lorsqu’il s’agit d’adultes ? Si non, pourquoi, selon vous ?

Mme Lénaïg Bredoux. Le travail journalistique se heurte à une difficulté particulière lorsqu’il s’agit de recueillir le récit de victimes mineures, pour des raisons à la fois juridiques et éthiques : cela suppose de demander l’accord du tuteur ou de la tutrice – la plupart du temps, les parents – alors que les enfants ne lui ont pas forcément parlé des faits. Cela nous pose un problème d’éthique journalistique. Pour une enquête qui concernait la photographie de mode et impliquait des mineurs de 15 à 17 ans, nous avons choisi de ne pas publier les récits car les adolescents n’avaient pas parlé à leurs parents et n’avaient donc pas leur consentement. Il faut vraiment être prudent avec des mineurs, surtout sachant le retentissement psychologique que peut avoir la médiatisation.

Par ailleurs, de façon générale, la parole est facilitée quand on parvient à faire l’effort de contacter des journalistes, ou au moins qu’on accepte de leur répondre. Mais ce qui est déjà difficile pour un adulte et encore plus coûteux pour les mineurs.

Mme Marine Turchi. Quand nous discutons d’une affaire avec des personnes majeures, souvent, des récits plus anciens émergent, qui ne concernent pas cette affaire, mais témoignent des conditions dans lesquelles elles ont été castées au fil des années, de ce qu’on leur a demandé de faire. On voit alors l’absence de limites, souvent sous le couvert de l’alibi artistique. Quand on parle de leur carrière et qu’on gratte un peu, je suis effarée d’entendre ce qu’elles ont pu endurer. Et cela ne peut pas être mis seulement sur le compte de l’époque. Il y avait sûrement encore moins de limites avant, mais cela reste d’actualité. Est-ce que l’enfant sait qu’il peut refuser certaines choses ?

Je me souviens des vidéos de casting que nous avons recueillies, Lénaïg et moi, avec notre confrère Geoffrey Le Guilcher, dans le cadre de l’affaire Luc Besson, en 2018. Je pense notamment à une jeune femme de 16 ans dans un hôtel. Tout cela était vraiment très malaisant. Où sont les garde-fous ?

Ainsi, même si ce n’est pas nécessairement le cœur de notre sujet, en retraçant l’histoire, on se rend compte de tout ce qu’endure une jeune femme ou un jeune homme dans une carrière artistique – de toutes ces demandes totalement inappropriées.

M. Erwan Balanant, rapporteur. Vous l’avez dit, il est difficile d’obtenir des témoignages. Il existe une omerta. Mais vous est-il arrivé, du fait de la promiscuité entre le monde de la culture et celui du journalisme, de subir en outre des pressions visant à mettre fin à une enquête ?

Par ailleurs, il me semble qu’il y a un vrai conflit d’intérêts entre la protection de vos sources, qui fait partie de l’éthique journalistique, et la nécessité où vous met l’article 434-3 du code pénal de signaler certains faits concernant des mineurs. Comment gérez-vous cette injonction contradictoire adressée au journaliste, d’une part, et au citoyen d’autre part ?

M. Donatien Huet, journaliste à Mediapart. Sur le premier point, si l’on se tourne vers nous, c’est aussi parce que Mediapart a très peu de journalistes culture et n’entretient donc pas avec ses sources la proximité que l’on reproche parfois à la presse culturelle, comme d’ailleurs à la presse sportive.

C’est ce qui, en 2020, a conduit le collectif MusicToo à s’adresser à Mediapart pour lui donner accès aux quelque 300 témoignages recueillis au cours d’une campagne de plusieurs mois afin d’entamer une remise en question de cette industrie. C’est ce qui nous a permis de conduire notre enquête en toute indépendance, n’ayant aucun intérêt à défendre tel ou tel artiste.

Mme Lénaïg Bredoux. Effectivement, d’autres journaux ont davantage besoin que nous de ne pas être blacklistés lors d’une projection ou de la promotion d’un livre. Ces mesures de rétorsion ont plus d’effet sur les journalistes des magazines culturels. C’est pourquoi il est tout à leur honneur de mener ce genre de travaux – je pense notamment aux journalistes de Télérama qui participent à la cellule d’investigation du magazine, dont une qui a été très longtemps critique de cinéma, avec qui j’ai participé à un débat.

Nous sommes donc dans une situation moins difficile qu’eux, qui vivent des mesures de rétorsion – ne pas être prévenu, ne pas être invité à une avant-première… Cela ne signifie pas que l’on ne tente pas de nous dissuader de publier nos enquêtes. Ça, c’est notre quotidien.

M. Erwan Balanant, rapporteur. De qui viennent les pressions ?

Mme Lénaïg Bredoux. C’est très variable. Elles existent dans tous les milieux, pas seulement dans les industries culturelles. Par exemple, des avocats nous menacent de plaintes ; un climat d’intimidation est créé pour dissuader les personnes qui nous ont confié leur récit d’en accepter la publication ; on suscite la peur du procès en diffamation avant même la parution, ce qui incite certains témoins à se rétracter.

Nous y sommes habitués. Comme journalistes en CDI à Mediapart, nous sommes protégés, même si ces situations sont parfois inconfortables ou stressantes. Nous le sommes par le collectif, par l’appareillage juridique du journal et le cabinet d’avocats avec lequel nous travaillons quand nous publions nos enquêtes et qui nous défend. Les journalistes pigistes sont plus vulnérables. Mais avant tout, ce sont les témoins qui le sont. Pour eux, les pressions sont les plus fortes et le risque encouru est le plus grand.

Mme Marine Turchi. Sur le second point, notre rôle est très clair et immédiatement expliqué aux personnes à qui nous parlons : nous sommes journalistes, nous ne demandons à personne de porter plainte ou de ne pas le faire ; ce n’est pas notre propos.

Évidemment, c’est difficile quand on a connaissance de certains faits, parfois très graves, qui peuvent d’ailleurs s’ajouter à d’autres déjà connus de la part de la même personne. Évidemment, c’est parfois frustrant quand la personne renonce à témoigner ou recule. Mais nous ne sommes pas des auxiliaires de justice. Ce n’est pas à nous de les conduire au commissariat.

En revanche, il nous revient de leur donner toute la photographie de ce que peut engendrer leur témoignage – et la publication de l’article : nous les amenons dans l’arène médiatique, ce qui nous donne une immense responsabilité. Nous leur exposons tout cela, ce que va permettre leur témoignage, pourquoi ça peut être difficile, etc.

Beaucoup nous demandent si nous croyons qu’ils doivent porter plainte ; ce à quoi nous disons que nous ne pouvons pas répondre. Certains journalistes n’écrivent pas en l’absence de plainte. Ce n’est pas notre cas. Pour moi, ce n’est pas un critère : je préfère une enquête avec vingt à trente témoignages qu’un seul témoignage et un morceau de plainte.

Vous nous demandez ce que nous faisons de tout ça ? Nous, nous sommes journalistes.

M. Erwan Balanant, rapporteur. Mais comment s’articule l’obligation tirée de l’article 434-3 du code pénal de dénoncer des faits concernant des mineurs, qui s’applique à tous les citoyens, avec le secret des sources ? Ne craignez-vous pas qu’une victime finisse par vous reprocher de ne pas avoir prévenu les autorités à sa place ? Comment appréhendez-vous ces cas de conscience, qui viennent avec une charge émotionnelle que nous commençons nous-mêmes à bien connaître ? Je vous pose cette question tout autant comme parlementaire que comme citoyen.

Mme Marine Turchi. Au-delà même de la protection des sources, chez Mediapart, nous nous sommes fixé une ligne : ne pas parler à l’insu des victimes. Ainsi, contrairement à d’autres journalistes, nous ne révélons pas qu’une plainte a été déposée si la victime nous a demandé de le taire. Ne pas signaler des infractions à la place des victimes relève de la même démarche. Cela nous place certes dans des dilemmes très difficiles, mais nous devons nous en tenir à ce contrat moral qui nous lie à nos sources. La protection des sources est la pierre angulaire de la profession de journaliste et de la liberté de la presse.

Mme la présidente Sandrine Rousseau. Il serait intéressant d’auditionner des magistrats pour mieux comprendre le rôle du procureur et les conditions dans lesquelles il peut se saisir de lui-même des dossiers, car ce n’est pas nécessairement aux journalistes d’agir.

Je souhaite vous interroger à présent sur la fameuse liste noire qui a été partagée sur les réseaux sociaux avant le festival de Cannes. C’est un cas d’école : il montre comment on peut jeter le discrédit sur une rédaction ou prévenir un début d’embrasement. Comment avez-vous vécu cette affaire, et comment l’analysez-vous aujourd’hui ?

Mme Lénaïg Bredoux. Soyons clairs : cette liste n’a jamais existé. Mediapart ne l’a pas établie, et d’ailleurs ne publie pas de listes. Comment une idée aussi farfelue – que nous nous apprêtions à publier une liste de noms – a-t-elle pu se répandre de la sorte non seulement dans le milieu du cinéma, mais aussi au sein de rédactions sérieuses, dont les journalistes font le même métier que nous ? Du côté de la presse, je ne comprends toujours pas que cela ait pu être possible.

Du côté du cinéma, cette affaire est révélatrice d’un certain état de panique, et en tout cas de la situation d’entre-deux dans laquelle nous nous trouvons. À force de révélations d’affaires et de témoignages de femmes – très majoritairement – qui ont pris sur elles pour raconter ce qu’elles ont vécu dans l’industrie du cinéma, le milieu a fini par comprendre qu’il y avait un problème. On peut penser qu’il aurait pu en prendre conscience plus tôt, mais cela reste positif. Mais enfin, si nous avions vraiment été sur le point de publier une liste de dix réalisateurs en activité, que n’y a-t-il pas eu un appel à témoignage, une ligne d’écoute, des dispositifs concrets pour recueillir la parole des victimes – d’autant que tout ce monde était susceptible de se croiser au cours du festival ?

Je suis consternée d’avoir vu des articles sur cette liste. Ce n’est pas cela, l’éthique journalistique : la presse ne publie pas des rumeurs, mais des faits.

Mme Marine Turchi. À partir de la cérémonie des César et de la prise de parole de Judith Godrèche en février 2024, j’ai commencé à recevoir des appels : des journalistes qui avaient entendu dire que nous enquêtions sur telle ou telle personne, puis des personnes se disant victimes désireuses de témoigner… Cela devenait fou : il y avait de plus en plus d’appels, et de plus en plus de noms, que l’on retrouve sur cette liste.

Mme la présidente Sandrine Rousseau. Diriez-vous que cette liste a, d’une certaine manière, libéré la parole ?

M. Erwan Balanant, rapporteur. Mais de quelle liste parlez-vous ?

Mme Marine Turchi. De celle qui a circulé sur les réseaux sociaux au mois de mai, et que nous avons découverte comme vous, alors qu’elle nous était attribuée.

Mme la présidente Sandrine Rousseau. La photo d’une liste d’une dizaine de noms a circulé.

Mme Marine Turchi. À l’époque, je ne sais pas d’où part cette rumeur, mais je reçois des appels de représentants du monde du cinéma et de journalistes. Ces derniers devraient d’ailleurs savoir que je ne peux rien leur dire : que j’enquête ou non, si je commence à leur répondre, la confidentialité de notre travail est fichue. Bref, nous nous sommes retrouvés dans une position intenable car démentir, commencer à répondre, c’est exposer nos enquêtes et décourager de potentiels témoins. Ces coups de fil étaient de plus en plus récurrents, cela devenait fou. Et parmi ces appels, nous nous sommes mis à recevoir de véritables témoignages que je ne peux évoquer aujourd’hui – c’est toujours le même problème.

L’objectif de cette campagne était évidemment de nous nuire. L’étonnant, c’est que personne n’ait remarqué qu’il aurait été impossible de coordonner dix enquêtes, sachant le mal que nous avons à en mener une à bien ! Je signale que nous passons notre temps à mettre un terme à des enquêtes qui n’aboutissent pas. En l’occurrence, il aurait fallu mener dix fois le travail contradictoire, contacter dix fois les personnes, les proches et les éventuels témoins. Et les gens figurant sur la liste ne se sont dit à aucun moment qu’ils n’avaient pas été appelés, ni d’autres autour d’eux ?

Que personne ne se soit interrogé sur la crédibilité de cette rumeur est révélateur de la panique du milieu, de sa fébrilité. La vérité n’importe plus, n’importe qui peut dire n’importe quoi. Cela montre aussi que les gens ne nous lisent pas et se font une idée fausse du travail journalistique, du moins lorsqu’il est sérieux. Cette rumeur a porté atteinte à notre travail, à notre réputation, au sérieux de nos méthodes.

Le pire, c’est que lorsque nous avons dû nous résoudre à démentir, nous n’avons pas été crus. Lénaïg et moi-même avons fini par nous exprimer publiquement, mais cela n’a pas mis fin aux spéculations. J’ai été invitée par des chaînes de télévision pour venir commenter cette affaire sur un plateau : j’étais à l’étranger, cela aurait dû leur donner un indice sur l’imminence d’une publication !

Nous répondons de ce que nous publions, pas des rumeurs : j’invite donc chacun à regarder nos articles.

Mme la présidente Sandrine Rousseau. Monsieur Huet, la situation dans le monde de la musique est-elle différente ? Comment travaillez-vous ?

M. Donatien Huet. Au départ, je ne suis pas spécialiste de cette question au sein de la rédaction de Mediapart. Tout part de l’appel à témoignage MusicToo. En parcourant les témoignages, puis en enquêtant, nous avons découvert une situation très similaire à celle de l’industrie du cinéma : un sexisme banalisé et généralisé, et des répondantes – car il s’agit surtout de femmes – se trouvant pour la plupart dans des situations précaires – intermittence, service civique, stage.

La plupart des témoignages concernent ce qu’on appelle les musiques actuelles – rock, rap, musique électronique –, moins le jazz ou la musique classique. Un aspect qui revient beaucoup, et qui s’écarte peut-être un peu du cinéma, est l’omniprésence des soirées, de l’alcool et des drogues, dans le contexte de concerts ou de festivals. La frontière entre la vie privée et le travail des professionnels de la musique est abolie. Cela place les femmes et les personnes précarisées dans des situations très difficiles. Qui plus est, la présence de drogue et d’alcool pèse sur l’émergence des témoignages, et rend les victimes peu précises et un peu honteuses.

Depuis MusicToo, des progrès ont été faits. Le Centre national de la musique conditionne maintenant ses aides : les structures bénéficiant des subventions doivent respecter un protocole de prévention des violences sexistes et sexuelles (VSS), qui comprend la formation des cadres. Les festivals sont de plus en plus nombreux à instituer des brigades de prévention des VSS destinées aux festivaliers et aux festivalières. Ainsi les Trans Musicales ont-elles fait appel cette année pour la première fois à une association implantée à Nantes, les Catherinettes, qui a l’avantage de compter dans ses brigades mobiles des personnes formées au recueil de la parole des victimes. D’autres festivals, notamment le Hellfest, avaient aussi eu recours à des brigades de prévention, mais sans former les bénévoles, ce qui rend impossible de recueillir la parole des victimes. Il s’est rapproché l’an dernier d’associations dont c’est le cœur de métier.

Le vrai problème aujourd’hui, ce sont les coulisses. Que se passe-t-il lors des afters, quand les projecteurs sont éteints ? Plusieurs affaires ont fait grand bruit, comme l’affaire Slimane : le chanteur qui a représenté la France à l’Eurovision est accusé d’avoir harcelé et agressé sexuellement des techniciens de sa tournée, dans un contexte de forte alcoolisation et de consommation de drogue. Certains ont porté plainte, ce qui constitue un progrès notable : il est assez rare que des techniciens fassent cette démarche, puisque la musique est un petit milieu dans lequel tout le monde se connaît, et que ceux qui décident de témoigner risquent de ne plus retrouver de travail. Il y a aussi eu l’affaire Rammstein, qui s’est déroulée en Allemagne mais concerne également la France : une dizaine de femmes ont expliqué avoir été sélectionnées parmi les spectateurs des premiers rangs et amenées en coulisse, droguées, agressées sexuellement. Bref tout ce qui se passe backstage est pour l’instant une sorte de trou noir et peu de mesures sont prises.

Le milieu de la musique n’a pas encore fait sa révolution. Quelques initiatives d’ampleur limitée ont vu le jour, quelques associations se sont constituées pour accompagner les structures, des projets de mentorat à destination des femmes et des minorités de genre ont émergé – par exemple More Women on Stage, dans le milieu du rock. Mais aucun poste n’a été créé au sein des majors pour prévenir les violences sexistes et sexuelles.

Il faut dire qu’en France, à la différence de ce qui s’est passé dans l’industrie du cinéma, aucun chanteur ou musicien de l’envergure de Gérard Depardieu ou de Patrick Poivre d’Arvor n’a été mis en cause, et aucune musicienne très connue n’a témoigné. Nous avons recueilli les témoignages de la chanteuse Pomme ou de Flore Benguigi, du groupe l’Impératrice. Cette dernière nous a raconté pourquoi elle avait quitté le monde de la musique, à la suite des humiliations et du sexisme ordinaire qu’elle avait subis au sein de son groupe.

Une phrase qui avait été reprise par Pierre Mauroy résume bien la situation : « Quand tous les dégoûtés seront partis, il ne restera plus que les dégoûtants. » C’est ce qui se passe dans le milieu de la musique.

Mme la présidente Sandrine Rousseau. C’est ce qui se passe dans beaucoup de milieux…

M. Erwan Balanant, rapporteur. Madame Turchi, vous avez souvent évoqué les défaillances de la réponse policière et judiciaire. Pourriez-vous nous les décrire, à tous les niveaux, des textes de loi à la procédure pénale ? Je suis convaincu que nous pouvons faire des progrès dans les méthodes d’enquête. Par exemple, il arrive que les victimes soient soumises à des enquêtes de personnalité auxquelles échappent les auteurs des faits… Les témoignages des victimes font-ils apparaître des pistes d’amélioration ?

Mme Marine Turchi. J’ai écrit un livre de 500 pages sur cette question ; je tâcherai d’être plus brève ici.

Tout se joue au moment de l’enquête préliminaire, menée sous l’égide du parquet : c’est la première enquête à la suite du dépôt de plainte, celle qui doit faire un tri. Pour de nombreuses raisons, dont le manque de moyens et de formation, tous les dossiers ne donneront pas lieu à une enquête approfondie. Des études universitaires montrent ainsi que les viols conjugaux font l’objet d’enquêtes moins poussées que d’autres dossiers. Il en va de même pour les faits commis dans des contextes d’altération de l’état de la victime, du fait de la soumission chimique ou d’une alcoolisation. Ce tri est terrible, les enquêteurs le reconnaissent eux-mêmes.

Adèle Haenel a bénéficié d’une procédure en or, elle en est consciente. L’enquête a été confiée aux meilleurs policiers, une équipe d’élite de l’Office central pour la répression des violences aux personnes, l’instruction a été menée par une juge d’instruction ultracompétente et spécialiste des violences commises sur les mineurs.

A contrario, certains dossiers d’enquête préliminaire tiennent en quelques pages : auditions de la plaignante et du mis en cause, expertise psychologique basique de la plaignante, parfois quelques auditions de témoin, éventuellement une confrontation. C’est un peu léger pour assurer la manifestation de la vérité… Et tout se joue donc à cette étape du parquet. Les choses se passent différemment lorsqu’une instruction est ouverte, mais encore faut-il arriver jusque-là.

Comme me l’avait fait remarquer un avocat, quand on enquête sur un tueur en série, on remonte sa trajectoire sur plusieurs années, on essaie de comprendre les raisons du passage à l’acte, on définit le profil de ses victimes, on mène des enquêtes sur son environnement. En matière de violences sexuelles, on ne pousse pas les investigations aussi loin. Plusieurs magistrats ont d’ailleurs reconnu ne pas faire usage de tout l’éventail des moyens d’enquête proposé par le code de procédure pénale pour des affaires de VSS. Ainsi, les mises sur écoute sont très rares, réservées aux grosses affaires – pour des réseaux de pédocriminalité par exemple. Certains pensent pourtant qu’elles pourraient être utiles, comme les réquisitions de courrier électronique.

Par ailleurs, on n’explique pas assez aux plaignantes – j’utilise le féminin car les victimes sont majoritairement des femmes – comment se déroule une enquête. Quand elles poussent la porte d’un commissariat, elles ont l’impression d’être arrivées au bout du chemin, qui a déjà été long. Pour la justice, c’est au contraire le point de départ. Les plaignantes ne savent pas toujours non plus qu’il ne suffit pas de raconter : leur parole va être confrontée à des paroles contradictoires, celles du mis en cause et de certains témoins, et c’est violent. Quand on leur dit qu’elles vont devoir se soumettre à une expertise psychologique, elles y vont avec cette image collective qu’un médecin est là pour prendre soin d’elles, alors qu’il s’agit d’une autre forme d’interrogatoire, qui porte sur les faits, et qui pourra être cité lors de l’audience.

Il y a donc un décalage entre les attentes des plaignantes et la réalité à laquelle elles sont confrontées une fois qu’elles poussent la porte du commissariat. Je me souviens d’un plaignant qui m’a dit : « Comme je disais la vérité, j’ai cru qu’il suffisait de raconter… » Il faut ajouter à cela l’imaginaire véhiculé par les séries américaines : les gens ont l’impression qu’ils vont avoir un super avocat, que les policiers se mettront en quête des plus minuscules indices et que la vérité finira par émerger. Or certains avocats sont dépassés, certains n’ont pas les compétences nécessaires, certains n’en font qu’un dossier parmi d’autres.

Les professionnels du droit devraient expliquer chaque étape du processus. Ainsi, les questions des policiers ne sont souvent pas comprises, parce qu’elles ne sont pas expliquées. Quand les policiers demandent à une victime comment elle était habillée, ce n’est pas nécessairement une question déplacée : il peut s’agir de retrouver la personne sur des images de vidéosurveillance, ou de corroborer d’autres témoignages. Tout cela est donc une question de formation – et en même temps, c’est facile à dire : ce n’est pas en formant les policiers et les magistrats qu’on détricotera trente ans d’idéologie. Tout le monde est imprégné de stéréotypes et de biais, vous, moi, les magistrats et les policiers. Il faut une évolution globale de l’éducation et de la culture. Reste que la justice devrait expliquer davantage comment elle travaille et surtout ce qu’elle peut et ce qu’elle ne peut pas faire – on lui en demande parfois trop, elle ne peut pas toujours tout réparer.

Les gens peuvent donc être propulsés dans des procédures génératrices de violences, parfois encore plus difficiles à supporter que les violences sexuelles elles-mêmes – cela s’appelle la victimisation secondaire. Nous le constatons clairement dans nos dossiers. Certains ressortent broyés du processus judiciaire, parfois parce qu’ils n’y ont pas été préparés.

M. Erwan Balanant, rapporteur. Beaucoup de personnes auditionnées insistent sur l’importance qu’a le dépôt de plainte pour la suite de la procédure. Pourrait-on améliorer la qualité de la plainte, peut-être avec des formations, en particulier dans les milieux à risque ? Il s’agirait d’apprendre comment déposer plainte et par qui se faire accompagner – encore faut-il savoir comment organiser cette formation. C’est censé être le rôle des avocats – ce n’est pas pour rien qu’on les appelle aussi des conseils. La formation des avocats en matière de dépôt de plainte est-elle suffisante ? Pour certaines infractions, devrait-on envisager la présence obligatoire de l’avocat lors du dépôt de plainte ?

Mme Marine Turchi. Le moment de la plainte est clé et les conditions du dépôt de la plainte déterminantes pour la suite de la procédure. Ainsi, dans l’affaire Luc Besson, Sand Van Roy appelle police secours dès le lendemain matin, elle est dans tous ses états. On l’amène au commissariat, on l’interrompt pour l’amener à l’unité médico-judiciaire. À la lecture de son audition, il est clair qu’elle n’est pas dans son état normal, elle panique, divague, parle de dauphins. Elle est en état de choc. Cela n’a rien à voir avec l’affaire Depardieu dite des Volets verts, où la plainte a été déposée avec une avocate et des associations spécialisées comme l’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail.

Combien de personnes savent qu’on peut écrire au procureur, pour mettre le récit par écrit avant d’être auditionné ? Qui sait qu’on peut appeler le commissariat pour prendre rendez-vous avec un service spécialisé ? La majorité des gens se rendent dans le commissariat le plus proche de leur domicile ou de leur lieu de travail, mais quand on a mal aux dents, on ne va pas chez l’ophtalmo ! Les témoignages doivent être adressés au bon endroit et recueillis dans de bonnes conditions. Ce qui change tout, nous le voyons dans les dossiers, c’est de pouvoir rassembler tous les éléments dans une plainte étayée, conçue avec l’aide d’un avocat ou d’une association – certaines le font, même si elles sont débordées.

Les professionnels du milieu du cinéma sont-ils suffisamment formés ? Non, si l’on en croit toutes les questions que nous recevons, notamment pour nous demander des contacts d’avocats et d’avocates. Ce n’est pas à nous de jouer ce rôle, mais c’est révélateur du manque d’informations des plaignants et des plaignantes, qui ne savent pas vers qui se tourner. Pourtant certains avocats, surtout des avocates, se sont spécialisés et n’interviennent plus que dans des dossiers de violences sexistes et sexuelles. Les plaignantes ne savent pas non plus que le premier rendez-vous chez l’avocat est généralement gratuit.

Beaucoup d’avocats ne sont pas non plus suffisamment formés. Certains sont débordés, d’autres profitent de la détresse des gens mais beaucoup sont très investis et ne comptent pas leurs heures quand il s’agit d’accompagner leurs clients, qu’ils soient connus ou inconnus. Mais il faut parfois dire à un client que, même si le choix lui appartient, il ne semble pas en état de porter plainte tout de suite. Il faut en tout cas l’avertir que cela va être violent. C’est ce que nous faisons dans le domaine médiatique : il nous arrive de demander aux gens s’ils sont prêts à encaisser ce qui se passera après la publication de l’article – beaucoup de soutien, certes, mais aussi du cyberharcèlement sur les réseaux sociaux, ou des ruptures familiales. Cette préparation, certains avocats la font très bien, d’autres non.

Mme Sarah Legrain (LFI-NFP). Je souhaiterais aborder la question des liens entre les enquêtes journalistiques et la justice, deux domaines que l’on considère souvent séparément, et surtout les points de friction entre les deux.

Quels outils judiciaires sont utilisés pour vous intimider et gêner vos enquêtes ? La présomption d’innocence par exemple est une notion juridique qu’on vous oppose souvent. Avez-vous des suggestions d’évolutions législatives pour limiter de telles tentatives d’intimidation et renforcer la protection des sources et l’indépendance journalistique ?

À l’inverse, vos enquêtes sont-elles parfois utilisées dans le cadre d’enquêtes judiciaires ? Vous n’avez peut-être pas plus de moyens que la justice – quoique ! – mais vous disposez d’atouts dont elle ne bénéficie pas. Vous pouvez ainsi enquêter sans publier le nom des victimes qui souhaitent rester anonymes, alors que les procédures judiciaires s’arrêtent assez rapidement dans ce cas. La justice s’est-elle déjà saisie de dossiers à la suite de l’une de vos enquêtes ?

Dernière question, un peu provocatrice. Le Syndicat de la magistrature a récemment publié une enquête sur les VSS au sein de la justice – car il y a des agresseurs aussi dans la justice, ce qui, outre les biais qui existent partout, augmente encore les risques de victimisation secondaire. Si vous pouvez répondre à cette question, comptez-vous enquêter sur les violences sexistes et sexuelles dans le milieu judiciaire ?

Mme Lénaïg Bredoux. La question du lien entre enquêtes journalistiques et judiciaires est essentielle. Ma collègue vous a dit que nous n’étions pas des auxiliaires de justice : ce n’est pas un simple élément de langage pour nous rassurer à bon compte. Nous ne sommes pas non plus des policiers, des gendarmes ni des juges. Heureusement, nous ne jugeons ni ne condamnons personne. Nous révélons au public des faits d’intérêt général dans un cadre fondamental, celui de la loi de 1881 sur la liberté de la presse.

Les publications journalistiques peuvent faire l’objet d’un contrôle a posteriori devant le tribunal correctionnel, auquel cas nous devons démontrer que nous avons bien respecté la loi. Je ne le conteste absolument pas, je rappelle simplement que nous aussi, nous intervenons dans un cadre légal et même parfois judiciaire. Il peut arriver que nous soyons poursuivis pour diffamation. Je l’ai été deux fois pour des affaires de violences sexistes et sexuelles – à l’occasion de l’affaire Baupin puis dans le cadre d’une enquête à l’université – et à chaque fois, j’ai gagné. Devant la justice, nous devons justifier du sérieux de notre enquête, de la prudence de notre expression, de la poursuite d’un but légitime et du respect du contradictoire. Ces critères essentiels fixent le cadre de notre travail journalistique d’intérêt général – que le mélange des genres, si nous étions auxiliaires de justice, rendrait impossible.

Cela n’empêche pas les enquêtes journalistiques de contribuer parfois au déclenchement d’enquêtes judiciaires, ou de les prolonger. Il arrive que des procureurs se saisissent d’informations publiées ; c’est même quasiment automatique lorsque les violences concernent des mineurs. En 2016, c’est la révélation par Mediapart et France Inter de premiers témoignages au sujet de Denis Baupin qui a conduit le procureur de la République de Paris à ouvrir une enquête préliminaire. Parfois, les procureurs préfèrent ne pas se saisir, notamment lorsque les victimes sont anonymes. Nous ne comprenons pas toujours ce qui motive leur décision.

Mme la présidente Sandrine Rousseau. On parle beaucoup des victimes mais peu des personnes qu’elles accusent. L’interview de Benoît Jacquot par Gérard Miller illustre puissamment la façon dont les agresseurs renforcent conjointement leur propre système de valeurs, leurs justifications et le récit qu’ils parviennent à imposer grâce à leur pouvoir. Est-ce un phénomène que vous observez et sur lequel vous enquêtez ? Vous avez déclaré que vous ne condamniez personne, mais il vous est souvent reproché précisément de condamner les gens que vous nommez dans vos enquêtes ! J’ai une opinion personnelle à ce sujet mais vous, qu’en pensez-vous ?

Mme Marine Turchi. Nous ne condamnons ni ne déclarons personne coupable. Il est important de souligner que nous n’utilisons aucune qualification pénale dans nos articles. Nous n’avons ni les mêmes méthodes, ni le même but que la justice. Ce qui est accablant pour les accusés, ce sont les faits que nous avançons – pas seulement au travers de témoignages mais aussi d’éléments matériels comme des lettres ou des SMS ! Encore une fois, il faut lire nos enquêtes : elles ne se bornent pas au témoignage de la principale concernée. Notre dossier sur Adèle Haenel, par exemple, s’appuie sur sept mois d’enquête, sur des lettres de Christophe Ruggia et sur le témoignage de son ex-compagne au sujet des aveux qu’il lui aurait livrés.

La phase la plus compliquée de l’enquête pour nous est celle du contradictoire. Nous mettons tout en œuvre pour obtenir un entretien avec la personne mise en cause. Neuf fois sur dix, elle nous oppose un refus, éventuellement avec une ligne de démenti. Lorsqu’au contraire nous obtenons des explications, nous lançons de nouvelles recherches, nous retournons vers les principales concernées pour poser de nouvelles questions. Les commentaires que je lis parfois au sujet de notre travail sont à mille lieues de la réalité. C’est le travail accompli qui nous permet de déterminer si nous sommes en mesure de publier un article, et il nous arrive très souvent de ne pas le faire. Certaines personnes nous demandent, au dernier moment, de ne pas publier l’enquête – ce qui tord le cou à l’idée qu’elles arriveraient avec une clé USB toute prête et actionneraient le levier #MeToo pour se venger ! La plupart du temps, la démarche est difficile et coûteuse.

S’agissant de la présomption d’innocence, que l’on nous oppose très souvent, je voudrais rappeler ici qu’elle est un principe pénal, qui s’applique donc dans le cas où une affaire judiciaire est en cours – ce qui n’était pas le cas, par exemple, quand Adèle Haenel a mis en cause Christophe Ruggia. En revanche, et c’est essentiel, nous avons des principes déontologiques, parmi lesquels l’exigence du contradictoire. Nous ne pouvons pas publier une enquête sans avoir au préalable soumis l’ensemble des éléments à la personne mise en cause. Et contrairement à ce qu’affirment systématiquement les accusés, nous ne nous contentons pas d’un coup de fil vingt-quatre heures avant la publication, nous avons des dizaines de questions à poser ! Si l’enquête est menée sans eux comme ils le disent, c’est parce qu’ils n’ont pas répondu à nos sollicitations pendant plusieurs semaines. Nous respectons leur décision, mais ils ne peuvent pas dire que l’enquête a été menée à charge et sans eux.

Lorsque nous écrivons au sujet d’une enquête judiciaire en cours, nous pouvons être attaqués pour atteinte à la présomption d’innocence. Je constate que nous n’avons été jamais été condamnés pour cela – ni même poursuivis, s’agissant des violences sexistes et sexuelles. C’est parce que nos enquêtes sont mesurées et laissent la place au contradictoire.

Je constate aussi que l’on entend beaucoup parler de tribunal médiatique et de présomption d’innocence en matière de VSS, beaucoup moins lorsque l’enquête porte sur d’autres sujets. Cela en dit long : on nous dénie beaucoup moins le droit d’enquêter sur la corruption, l’hôpital ou des scandales environnementaux ! Une avocate que j’interviewais le résume ainsi : quand on parle de tribunal médiatique et de présomption d’innocence, c’est pour nous dire « taisez-vous ». Or notre rôle, c’est de faire sur les VSS le même travail que nous menons sur les autres sujets. Lénaïg Bredoux a mis un pied dans la porte à Mediapart en affirmant que, oui, il s’agit bien d’un sujet d’intérêt public, sur lequel nous allons enquêter. À l’époque, cela n’allait pas de soi. Aujourd’hui, les rédactions s’y sont mises et se sont professionnalisées. Une partie de la presse – pas toute – fait un travail sérieux, parfois énorme, s’efforçant d’aller chercher des témoignages et des éléments matériels. Et, je le redis, de nombreuses enquêtes partent à la poubelle sans être publiées.

L’expression « tribunal médiatique » permet de mettre dans le même sac les réseaux sociaux – des messages de 140 signes, sans hiérarchisation de l’information ni travail de recoupement –, les commentateurs de plateaux de télévision – qui racontent ce qu’ils veulent, même s’ils ont une carte de presse – et les enquêtes sérieuses menées par des journalistes pendant plusieurs mois voire plusieurs années.

M. Erwan Balanant, rapporteur. Le recours à la « présomption d’innocence » et au « tribunal médiatique » en disent long, selon vous. Mais cela dit quoi ? Pourquoi ne vous oppose-t-on pas la présomption d’innocence lorsque vous enquêtez sur la direction d’un hôpital par exemple, qui peut elle aussi n’avoir commis aucune faute ? Je suis très attaché à la présomption d’innocence, comme vous, j’en suis sûr. Les seuls qui jugent, dans notre pays, sont les magistrats. Mais pourquoi y recourt-on spécifiquement pour les VSS ? Et pourquoi ces questions sont-elles si présentes dans le milieu du cinéma, reflet de notre société ? Plus on soulève le tapis, plus on trouve de poussière. Parallèlement, je suis stupéfait du faible écho médiatique que rencontre notre commission. Pas un journaliste ne vient nous voir. Cela m’inquiète : les propositions que nous allons faire ne vont-elles pas passer sous le radar, comme les dénonciations de Maria Schneider en son temps, comme celles d’Adèle Haenel l’avaient d’abord fait, et comme le feront peut-être celles de Judith Godrèche ? Comment faire en sorte que cela n’arrive pas ? C’est à la fois décourageant et une motivation pour poursuivre les travaux de notre commission.

Mme Lénaïg Bredoux. Nous-mêmes ressentons parfois du découragement face aux centaines, voire aux milliers de témoignages que nous recevons chaque année – les gens continuent de s’adresser à la presse pour la simple raison qu’ils n’ont pas été entendus ailleurs. Nous continuons néanmoins, parce qu’il le faut.

La presse, qui est une industrie culturelle, n’échappe ni aux mécanismes d’abus de pouvoir, ni à l’aveuglement collectif, ni à l’entre-soi masculin et dominant qui y a régné en maître pendant des décennies. De ce fait, elle a longtemps fait partie du problème : selon la doctrine qui prévalait, les VSS étaient des affaires de coucheries qui relevaient de la vie privée et le journalisme devait s’arrêter à la porte de la chambre à coucher – formule célèbre du Canard Enchaîné, pourtant très réputé en matière d’investigation. On a longtemps considéré qu’il n’était pas légitime de traiter ces sujets de bonnes femmes, et encore moins d’enquêter dessus. Ce n’est pas un hasard si, très souvent, les premières investigations ont été lancées par la bande et non par les services d’enquête de quotidiens installés.

Si la bataille de la légitimité journalistique a fait beaucoup avancer les choses en quinze ans, elle n’est pas encore gagnée. Il y a encore un doute sur le fait que ces sujets soient d’intérêt général. C’est ce qui explique que les affaires de VSS ne soient pas traitées de la même façon que les autres.

Mme Marine Turchi. Si personne ne veut entendre parler du sujet, c’est parce qu’il interroge tout le monde, partout – pas seulement les agresseurs, mais aussi les témoins. Combien de gens ont entendu leur collègue de bureau dire qu’on lui avait mis la main aux fesses sans saisir la perche qu’elle tendait ? Nos enquêtes sont parsemées de cela : ce ne sont pas seulement des gens malveillants et sexistes qui ont fermé les yeux, mais aussi des gens très bien, dans les familles, les entreprises, les bandes d’amis. Or c’est difficile à entendre.

C’est la raison pour laquelle il faut continuer, car nous sommes loin du bout de chemin : le tournage des Volets verts avec Depardieu ne remonte qu’à 2021 ! Il reste beaucoup à faire – d’où l’intérêt, aussi, de votre commission.

Mme la présidente Sandrine Rousseau. Ayant été le sujet de l’une des premières enquêtes menées en France sur les VSS dans le monde politique, je voudrais témoigner du sérieux, reconnu par la justice elle-même, de l’enquête qui avait été menée. Je tiens à le dire, car c’est très important : lorsque des personnes parlent, elles sont mises en fragilité, et le sérieux des enquêtes est leur seule protection. Cette adresse est pour les journalistes : vous avez vraiment une grande responsabilité, car il n’y a que le sérieux de votre enquête qui protégera la victime qui parle. Merci à vous pour ce que vous faites.

 

La séance s’achève à quatorze heures cinquante-cinq.


Membres présents ou excusés

Présents. – M. Erwan Balanant, Mme Sarah Legrain, Mme Sandrine Rousseau