Compte rendu

Commission d'enquête relative à l’organisation du système de santé et aux difficultés d'accès aux soins

         Table ronde « collectivités territoriales et nouvelles pratiques de soins », ouverte à la presse, réunissant M. Philippe Gouet, président du conseil départemental du Loir-et-Cher, président du groupe de travail santé, Départements de France, M. Patrick Genre, maire de Pontarlier, président des maires du Doubs, représentant de l’Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF), M. Gilles Noël, maire de Varzy et membre du bureau de l’Association des maires ruraux de France (AMRF), M. Jean-Charles Dron, directeur du programme e-Meuse santé, Mme Katy Bontinck, première adjointe au maire de Saint-Denis (93), chargée de la santé.              2

–     Présences en réunion...........................20

 


Mardi
1er avril 2025

Séance de 17 heures

Compte rendu n° 5

session ordinaire de 2024-2025

Présidence de
M. Jean-François Rousset,
Président

 


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La séance est ouverte à dix-sept heures.

 

M. le président Jean-François Rousset. Nous poursuivons nos travaux avec une table ronde consacrée à la santé dans les territoires. Nous accueillons aujourd'hui des représentants des différents échelons territoriaux concernés.

Je vous rappelle que cette séance est retransmise en direct sur le site internet de l’Assemblée nationale. L’enregistrement vidéo sera ensuite disponible à la demande. L’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées dans le cadre de travaux d’enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».

(M. Philippe Gouet, M. Patrick Genre, M. Gilles Noël, M. Jean- Charles Dron, et Mme Katy Bontinck prêtent serment.)

M. Philippe Gouet, président du conseil départemental du Loir-et-Cher, président du groupe de travail santé, Départements de France. Force est malheureusement de constater que notre système de santé, autrefois érigé en modèle à l’échelle mondiale, n’est plus en mesure de relever les défis sanitaires actuels et à venir. Le classement de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui positionne désormais la France au quinzième rang, traduit notre incapacité à répondre efficacement au vieillissement de la population et à la progression continue des pathologies chroniques.

La situation est préoccupante, puisque six millions de nos concitoyens sont dépourvus de médecin traitant, parmi lesquels 472 000 souffrent d’une affection de longue durée (ALD). Selon Eurostat, notre pays se classe avant-dernier parmi les 26 membres de l’Union européenne en matière de densité de médecins généralistes, avec seulement 319 praticiens pour 100 000 habitants, loin derrière la Grèce, qui en dénombre 656, ou le Portugal, avec 573.

Dans nos départements, en particulier les plus ruraux, la pénurie de spécialistes tels que les allergologues, pédiatres ou pédopsychiatres est criante. Cette dernière spécialité est pourtant essentielle, sachant que 22 % des enfants placés sous la responsabilité de l’aide sociale à l’enfance (ASE) présentent des troubles psychiques ou psychiatriques sévères. Or 20 départements sont actuellement dépourvus de tout pédopsychiatre, rendant impossible une prise en charge adaptée de ces jeunes en grande détresse.

Les délais pour accéder à une consultation spécialisée dépassent désormais deux mois en moyenne, poussant 64 % des personnes interrogées à renoncer aux soins. Nos hôpitaux publics sont à bout de souffle, avec un déficit cumulé atteignant 3 milliards d’euros pour 2024, touchant aussi bien les centres hospitaliers universitaires que les établissements de proximité. Le secteur privé subit également de lourdes difficultés, 60 % des cliniques et hôpitaux privés étant déficitaires cette année. La situation des services d’urgence est alarmante, puisque trois sur cinq sont en situation de dysfonctionnement et que les décès sur brancards se multiplient. En juillet dernier, huit patients sont décédés au centre hospitalier universitaire (CHU) de Nantes après avoir attendu plus de quinze heures avant leur prise en charge.

La pédiatrie est elle aussi en recul puisqu’en cinq ans, la France est passée de la quinzième à la vingt-deuxième place européenne en matière de mortalité infantile. Quant à la médecine scolaire, elle est dans un état déplorable, avec moins de 900 médecins et 7 000 infirmières pour 12 millions d’élèves. Ainsi, seuls 24 % des enfants de CP et 18 % des élèves de sixième bénéficient des visites médicales obligatoires.

La psychiatrie est aujourd’hui en crise, alors qu’un adulte sur quatre et un enfant ou adolescent sur six sont ou seront concernés par des troubles psychologiques ou psychiatriques. Entre 2003 et 2022, 4 600 lits psychiatriques ont été supprimés et 400 autres l’ont été en 2024. Mille professionnels font défaut dans ces services. En matière de pédopsychiatrie, moins de 700 praticiens sont en exercice dont un tiers est âgé de plus de soixante ans et 20 départements sont dépourvus de cette spécialité.

Notre souveraineté pharmaceutique est également gravement menacée. L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a en effet recensé 5 000 signalements de ruptures de stock en 2023, ce qui représente une augmentation de 128 % en deux ans. Cette même année, 35 % des Français n’ont pas pu se procurer leur traitement en pharmacie.

Face à ces constats alarmants, les Départements de France ont décidé d’agir. Alors qu’en septembre 2021, seuls trois départements s’étaient dotés d’une politique de santé, ils seront soixante à l’avoir fait d’ici au 1er janvier 2025, développant des stratégies concrètes pour améliorer l’accès aux soins et à la prévention.

Dans ce cadre, le groupe de travail que je préside a élaboré un rapport intitulé Santé et territoire : la place et le rôle des départements en France, qui propose six axes stratégiques, parmi lesquels la mise en œuvre d’un schéma départemental d’organisation des soins, la création d’un guichet unique et une coordination renforcée entre les acteurs de santé et l’échelon départemental. J’ai récemment présenté ces travaux au ministre de la santé, M. Yannick Neuder, ainsi qu’à Mme Catherine Vautrin. Un groupe de travail réunissant le ministère et Départements de France devrait prochainement être constitué pour approfondir ces propositions.

Le guichet unique que nous proposons serait cogéré par les départements, le niveau départemental de l’agence régionale de santé (ARS) et les caisses primaires d’assurance maladie (CPAM). Y seraient également associés les ordres professionnels, un représentant de la faculté de médecine ainsi que diverses structures territoriales. Ce dispositif aurait pour vocation de simplifier les démarches administratives liées à l’installation des professionnels de santé, toutes spécialités confondues. Il offrirait également un accompagnement aux étudiants en médecine et aux futurs paramédicaux, en tenant compte de leurs besoins concrets, notamment en matière de logement, de transport ou de garde d’enfants. Le ministre Yannick Neuder s’est montré très favorable à cette initiative, dans la perspective notamment de l’arrivée de 3 600 docteurs juniors sur nos territoires à partir de novembre 2026. Sa vision, résolument régionaliste, préconise en effet de confier aux régions la responsabilité du maillage territorial, de l’organisation et de l’accueil de ces nouveaux médecins. Les Départements de France se tiennent prêts à collaborer pleinement avec le ministère. Nous attendons les décrets d’application relatifs aux médecins juniors, encore non promulgués, et avons été invités à intégrer un groupe de travail sur cette thématique.

Je tiens à souligner l'engagement des départements, qui mettent en œuvre des politiques ambitieuses pour garantir un meilleur accès aux soins. Nous proposons notamment des bourses aux étudiants afin d’attirer et de fidéliser les jeunes praticiens dans nos territoires. Nous soutenons également la création de maisons de santé pluriprofessionnelles, en finançant à la fois les bâtiments, les équipements et les plateaux techniques.

De nombreux départements développent par ailleurs des dispositifs de télémédecine encadrée et de qualité, reposant sur un véritable binôme professionnel. La durée moyenne d’une téléconsultation en France, de quatre minutes, nous semble dramatiquement insuffisante, en particulier pour des patients atteints d’affections de longue durée et n’ayant pas consulté depuis plusieurs mois. Nous recommandons donc un encadrement renforcé pour ces situations, avec une première consultation d’une durée minimale de quinze à vingt minutes.

M. Patrick Genre, maire de Pontarlier, président des maires du Doubs, représentant de l’Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF). Si nous devions définir la place des élus locaux dans le champ de la santé, qui, je le rappelle, ne relève pas de la compétence directe des communes mais demeure une responsabilité régalienne de l’État, nous mettrions en lumière les trois dimensions fondamentales que sont la proximité, l’ancrage territorial et l’expertise.

La récente crise sanitaire du covid a démontré avec force combien cette proximité s’est révélée déterminante. La gestion de la crise a été d’autant plus efficace que les élus locaux se sont pleinement saisis de la situation, en étroite collaboration avec les préfets. Cette efficacité repose sur une connaissance du territoire, de sa sociologie, de son tissu économique et de ses dynamiques démographiques.

Cette compréhension fine des réalités locales est un levier indispensable pour garantir l’accès à la santé. Nous privilégions d’ailleurs cette expression à celle d’accès aux soins, car elle permet d’englober l’ensemble des dimensions sanitaires, médico-sociales et préventives. L’AMF plaide pour que les élus locaux, qu’ils soient maires ou présidents d’intercommunalités, soient systématiquement intégrés aux processus de réflexion et de concertation. Il ne s’agit pas de revendiquer un rôle décisionnel, mais d’être consultés suffisamment en amont, notamment lorsque des fermetures de services hospitaliers sont envisagées ou lorsqu’une évolution des maternités est à l’étude. Ces décisions, parfois lourdes de conséquences, doivent s’accompagner de mesures adaptées et construites à partir des spécificités territoriales, afin de ne pas fragiliser davantage certaines zones déjà en difficulté.

Entre 2019 et 2022, la densité de médecins généralistes a diminué dans 78 départements. Seules 18 % des zones rurales sont considérées comme suffisamment dotées, contre 32 % des zones urbaines, ce qui révèle un déséquilibre manifeste. Face à cette réalité, nous appelons à une meilleure intégration des élus locaux, et particulièrement des maires, dans la gouvernance du système de santé. Cette implication pourrait se traduire par la mise en œuvre de groupements hospitaliers de territoire (GHT) de seconde génération, capables de construire des passerelles solides entre la médecine de ville et la médecine hospitalière. Nous souhaitons également que les maires soient associés à la définition des projets régionaux de santé, ainsi qu’à la gestion des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), qui doivent devenir de véritables interfaces de coordination entre soins de ville et hôpital. Les maires sont également en première ligne pour accompagner l’installation et l’hébergement des jeunes internes, qu’ils accueillent sur leur territoire. Ils sont également des acteurs de premier plan en matière de prévention, en mobilisant les centres communaux ou intercommunaux d’action sociale (CCAS et CIAS).

L’AMF, en lien étroit avec la Fédération hospitalière de France (FHF), soutient avec force le principe de responsabilité populationnelle et demande que ce concept soit généralisé à l’ensemble du territoire national. Il s’agit d’une approche globale de la prise en charge, intégrant les dimensions amont et aval du traitement. Son objectif est de garantir que seuls les patients réellement concernés arrivent à l’hôpital ou aux urgences, grâce à un accompagnement préventif et une orientation en amont. Cela suppose une analyse fine, à la fois socio-démographique et socio-économique, des populations les plus à risque.

En conclusion, nous réaffirmons la nécessité d’impliquer systématiquement les élus locaux dans toute réflexion ou concertation touchant à la santé sur leur territoire. Nous ne réclamons pas un pouvoir décisionnel direct mais exigeons d’être informés et consultés à temps.

M. Gilles Noël, maire de Varzy et membre du bureau de l’Association des maires ruraux de France (AMRF).  Je souhaite compléter ces propos en apportant une contribution spécifique sur la situation des communes rurales de moins de 3 500 habitants. Ces villages, bien que regroupant 33 % de la population française et couvrant 88 % du territoire national, ne disposent pourtant que de 25 % de médecins généralistes. Dans les bassins de vie ruraux, un généraliste couvre en moyenne une surface de trente-deux kilomètres carrés, quand son homologue en zone urbaine en couvre à peine cinq.

L’écart d’espérance de vie entre les départements ruraux et urbains s’est aggravé ces trente dernières années, pour atteindre aujourd’hui près de deux années pour les hommes. Un enfant né en milieu rural peut s’attendre à vivre deux ans de moins qu’un enfant né dans un environnement urbain. Bien que l’accès aux soins ne soit pas le seul facteur déterminant de cette disparité, il y contribue néanmoins de manière significative.

La consommation de soins hospitaliers illustre également ces inégalités. Un habitant rural consomme en moyenne 20 % de soins hospitaliers en moins qu’un urbain, avec des écarts atteignant jusqu’à 40 % pour certains traitements comme la dialyse ou la chimiothérapie.

Face à ces constats alarmants, les populations rurales se tournent massivement vers les mairies, dans l’espoir d’obtenir un accompagnement ou des solutions concrètes.

En tant qu’élus ruraux, nous portons un ensemble de convictions fortes pour répondre à ces enjeux. Nous estimons tout d’abord que l’installation et la formation des nouveaux professionnels de santé doivent être pensées à l’échelle départementale, qui nous semble être le bon niveau de proximité pour articuler les besoins et les ressources. Nous croyons également que la délégation de tâches, lorsqu’elle est bien encadrée, constitue une réelle valeur ajoutée dans nos territoires. Elle permet de s’appuyer efficacement sur les infirmiers, les pharmaciens et d’autres professionnels déjà présents et engagés dans les soins de proximité.

Nous défendons également un meilleur accompagnement pour les jeunes Français qui reviennent exercer après une formation à l’étranger. Trop souvent perçus comme porteurs d’une formation au rabais, ils subissent une stigmatisation qui ne rend pas justice à leur engagement ni à leurs compétences. De la même manière, nous appelons à une meilleure reconnaissance des praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue), qui assurent aujourd’hui la continuité des soins dans nombre de nos centres hospitaliers de proximité. Ils doivent bénéficier de conditions d’exercice dignes, d’un accompagnement adapté et d’une rémunération équitable.

Nous dénonçons également la majoration financière appliquée aux patients qui ne disposent pas de médecin traitant. Cette pénalité, que nous considérons comme une double peine, frappe des patients déjà en grande difficulté d’accès aux soins.

Nous estimons également qu’il est temps de conditionner la liberté d’installation des médecins à l’engagement concret de consacrer au moins une journée par semaine à l’exercice dans un territoire sous-doté. Ce type de dispositif, incitatif et mesuré, permettrait de rééquilibrer l’offre de soins sans remettre en cause la liberté fondamentale d’installation.

Nous demandons enfin une présence renforcée des élus ruraux au sein des instances territoriales de santé, y compris dans les conseils d’administration des ARS. Il est regrettable que la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration, censée renforcer la représentation des élus locaux, n’ait que si peu pris en compte la spécificité rurale et la diversité des territoires.

Nous appelons enfin à mettre un terme à la logique de concurrence financière entre collectivités pour attirer les professionnels de santé. Cette course aux incitations désavantage structurellement les territoires les plus fragiles, qui ne peuvent rivaliser avec les moyens des métropoles. Il est temps de mettre en place une véritable stratégie nationale d’équité territoriale en matière de santé.

L’audition est suspendue de 17 heures 25 à 17 heures 40.

M. Jean-Charles Dron, directeur du programme e-Meuse santé. Ce programme d’innovation, lancé en 2018 à l’initiative des départements de la Meuse, de la Haute-Marne et de la Meurthe-et-Moselle, bénéficie d’un soutien financier dans le cadre de France 2030. Il nous a été confié la mission d’expérimenter des approches novatrices pour relever les défis persistants de l’accès aux soins dans les territoires ruraux, en prenant en considération les dynamiques démographiques, notamment le vieillissement de la population et la prévalence croissante des maladies chroniques.

E-Meuse Santé, dont le « e » renvoie à l’innovation numérique et à la e-santé, s’attache à explorer les potentialités du numérique en complément des actions déjà engagées par les collectivités pour structurer et coordonner l’offre de soins. L’objectif est d’apporter un soutien opérationnel aux professionnels de santé dans leur exercice quotidien, en allégeant leur charge administrative et logistique afin qu’ils puissent se recentrer sur leur cœur de métier.

Ce projet, porté conjointement par les trois départements concernés, associe également l’ARS Grand Est, la région Grand Est et deux groupements d’intérêt public impliqués dans l’animation économique. L’État a alloué une enveloppe de 22,8 millions d’euros sur dix ans pour mener à bien ces expérimentations.

Notre démarche repose sur l’identification fine des besoins exprimés dans les territoires, en combinant une vision régionale portée par les ARS et une attention constante aux réalités de terrain rencontrées par les professionnels de santé. Sur cette base, nous recherchons des solutions innovantes disponibles sur le marché, notamment dans le champ de la télémédecine, afin d’y répondre de manière ciblée et efficiente.

Au terme de cinq années d’expérimentation, nous constatons que la technologie, bien qu’indispensable, ne constitue pas en elle-même le principal enjeu. Le véritable défi réside dans l’organisation et dans la façon dont les territoires peuvent véritablement s’approprier ces outils et les intégrer de façon cohérente dans les pratiques de soin existantes. Il est fondamental que ces innovations viennent renforcer les offres locales et ne se développent pas en parallèle, au risque de créer des redondances ou des ruptures de parcours.

Nous conduisons actuellement une trentaine d’expérimentations qui abordent différents enjeux tels que l’amélioration de l’accès aux soins, la prise en charge des pathologies chroniques, le soutien au maintien à domicile et les actions de prévention. Ces thématiques sont étroitement liées dans le quotidien des patients, en particulier les personnes âgées, qui cumulent souvent une ou plusieurs maladies et se heurtent à des obstacles dans leur parcours de soin.

L’un des exemples concrets de notre démarche est le développement d’un modèle de téléconsultation « augmentée et assistée ». Nous avons observé que l’usage des équipements mis à disposition dans les territoires demeurait limité, en raison notamment de l’absence de personnel formé pour opérer les dispositifs ou du manque de réponse médicale adaptée. Le véritable enjeu résidait donc dans l’intégration de la téléconsultation dans les usages réels des professionnels, en cohérence avec les projets médicaux déjà existants. Nous avons conçu ce modèle pour répondre aux besoins spécifiques de la population, notamment les personnes sans médecin traitant ou celles nécessitant des consultations ponctuelles. L’approche retenue consiste à mobiliser un professionnel de santé, généralement un infirmier ou un pharmacien, pour accueillir le patient, établir un lien humain et recueillir les constantes. Lorsque le médecin se connecte, il peut ainsi se consacrer pleinement à l’échange médical, enrichi d’un premier niveau d’information déjà collecté.

Ce modèle a été bien accueilli par les patients, comme en témoigne une évaluation conduite par l’Université de Lorraine. Si certains expriment au départ des réticences vis-à-vis de la téléconsultation, ils reconnaissent ensuite la qualité de cette approche humaine.

À ce jour, nous avons déployé seize dispositifs de ce type dans le cadre d’e-Meuse Santé, en nous appuyant sur des technologies innovantes visant à améliorer l’expérience des patients comme celle des professionnels. Une étude menée récemment par l’union régionale des professionnels de santé (URPS) a en outre souligné l’intérêt manifeste de cette démarche.

Notre retour d’expérience nous a permis de dégager quatre axes structurants. Le premier concerne l’hybridation, car la télémédecine ne peut fonctionner que si elle s’inscrit de manière fluide dans les parcours de soin locaux, en complémentarité et non en concurrence avec les pratiques en place.

Le second vise à structurer une approche à trois niveaux. L’hyper proximité constitue un premier levier important, avec les pharmaciens ou les infirmiers qui deviendraient les premiers interlocuteurs des patients, à la fois pour la téléconsultation et pour des actions de prévention ciblées. Les maisons de santé pluriprofessionnelles offrent un second niveau d’organisation pertinent. Grâce aux outils numériques et à des conditions de travail attractives, elles pourraient favoriser l’installation de spécialistes, aujourd’hui réticents à exercer dans les zones rurales. Le troisième niveau repose sur les plateaux techniques, conçus en articulation avec l’offre hospitalière et clinique existante. Ces structures permettraient un accès de proximité à des spécialités telles que l’ophtalmologie ou la dermatologie, en limitant les déplacements contraignants. Elles pourraient accueillir des acteurs publics aussi bien que privés, en s’appuyant sur des solutions numériques.

La gouvernance territoriale constitue un autre pilier fondamental. Nous considérons que les CPTS, en lien avec les groupements de santé territoriaux (GST), représentent les cadres adaptés pour porter et diffuser des projets médicaux sur les territoires. L’implication des élus, à la fois régionaux et départementaux, est également indispensable. La distinction entre l’accès aux soins et le soin proprement dit permet de fédérer l’ensemble des acteurs autour d’une vision commune, dans le respect des compétences de chacun.

Nous soulignons enfin l’importance de l’innovation, qui doit irriguer l’ensemble du système de santé. Il est impératif qu’elle bénéficie aux professionnels de ville, qu’ils soient médecins généralistes, kinésithérapeutes, pharmaciens ou infirmiers. Se pose également la question du financement de cette innovation, afin d’accompagner la transition vers de nouveaux modèles organisationnels et économiques, dans l’objectif de renforcer la prise en charge en amont pour éviter les hospitalisations qui peuvent l’être.

Dans ce cadre, nous développons actuellement le projet Transition territoire de santé, qui s’inscrit dans le prolongement d’e-Meuse Santé. Nous envisageons une phase de préfiguration d’une durée de vingt-quatre à trente-six mois, destinée à tester ce modèle avant d’envisager une éventuelle généralisation à l’échelle nationale.

Plus globalement, face à l’enjeu d’ordre populationnel, nous devons faire évoluer notre système de santé, encore largement fondé sur une logique curative, vers une approche davantage préventive. Les premiers résultats obtenus à travers les projets engagés en France montrent que l’investissement dans la prévention permet, sur le long terme, de générer des économies substantielles sur le versant curatif.

Mme Katy Bontinck, première adjointe au maire de Saint-Denis (93), chargée de la santé. Je vous remercie d'avoir choisi Saint-Denis pour illustrer la situation de l'accès aux soins à l'échelon municipal dans les villes de banlieue.

En tant que première adjointe de la commune nouvelle de Saint-Denis, je souhaite vous livrer un retour d’expérience concret, issu d’un territoire confronté à de nombreux défis. Depuis le 1ᵉʳ janvier 2025, notre ville, désormais fusionnée avec Pierrefitte, compte 150 000 habitants et s’inscrit dans une intercommunalité élargie à 450 000 habitants. Dans ce cadre, nous avons fait le choix d’instaurer une coordination santé à l’échelle intercommunale, devenue indispensable à la suite de la crise du covid. L’Institut Paris Région a d’ailleurs documenté cette montée en puissance des intercommunalités sur les enjeux de santé en Île-de-France, évolution que nous jugeons particulièrement significative.

Malgré une amélioration modeste de certains indicateurs, le contexte sanitaire et social de notre territoire reste préoccupant. Avec 70 % de la population vivant en quartier prioritaire de la politique de la ville, nous devons faire face à des réalités difficiles telles qu’un taux de pauvreté de 36 %, un revenu médian annuel de 15 000 euros, bien inférieur à la moyenne nationale, et une espérance de vie masculine inférieure de deux années à la moyenne régionale. Nous constatons également une prévalence élevée des pathologies chroniques et des cancers.

L’un des constats les plus alarmants concerne la faible participation de la population aux campagnes de dépistage et de prévention. En dépit de l’investissement constant de nos partenaires, nous enregistrons un écart de près de dix points avec la moyenne régionale. Pour le dépistage du cancer du sein, par exemple, seules 53 % des femmes y participent, contre 63 % en Île-de-France. Cette tendance se retrouve dans la quasi-totalité des campagnes de prévention.

Les difficultés rencontrées en matière de vaccination constituent un autre point de vigilance, comme l’a montré la campagne contre le covid. La mise en œuvre de la vaccination contre le papillomavirus (HPV) en classe de cinquième dans les collèges se heurte à des obstacles nombreux. Par ailleurs, il n’est pas rare que des patients se présentent aux urgences de l’hôpital avec des pathologies à un stade avancé, révélant un accès tardif, voire inexistant, aux soins en amont.

Ces difficultés se traduisent dans l’indice de développement humain de notre commune, qui s’élève à 0,34, contre 0,65 pour la moyenne régionale. Pour autant, nous refusons de céder au fatalisme. Notre situation géographique, en petite couronne parisienne, nous confère notamment un avantage majeur en matière de desserte en transports en commun, facilitant l’accès aux structures de soins situées à Paris, même si l’accès au secteur 1 demeure une problématique sensible pour nos habitants.

Notre territoire bénéficie par ailleurs d’une dynamique positive, en lien notamment avec les Jeux olympiques et paralympiques, qui ont accéléré la production de logements abordables et le développement d’infrastructures. Cette attractivité nouvelle suscite l’intérêt des professionnels de santé. La présence de structures coordonnées, en salariat ou en maison de santé pluriprofessionnelle (MSP), inscrites dans des projets de santé publique structurés, incite également les jeunes praticiens à venir s’installer à Saint-Denis. Ces évolutions nourrissent une perspective plus optimiste.

À cet égard, je souhaite attirer votre attention sur le centre de santé participatif La Place Santé, implanté depuis 2011 dans le quartier du Franc-Moisin, secteur d’habitat social actuellement en pleine rénovation urbaine. Cette structure s’inscrit depuis trois ans dans une expérimentation visant à promouvoir un modèle participatif en santé. À l’origine associative, La Place Santé est née de l’initiative du docteur Didier Ménard, médecin généraliste implanté dans le quartier. Son approche, à la fois pluriprofessionnelle et sociale, vise à accompagner les patients dans leur globalité, au-delà du seul soin curatif.

L’équipe pluridisciplinaire est composée de médecins généralistes, de soignants paramédicaux, d’une infirmière en pratique avancée et d’une psychologue. Elle propose en outre des ateliers de médiation santé et de prévention, renforçant ainsi l’offre classique de soins. En valorisant la participation active des habitants, la structure est aujourd’hui devenue un acteur essentiel du territoire.

Il y a deux ans, le centre a adopté un statut coopératif, intégrant les usagers dans sa gouvernance. Cette démarche permet aux habitants de participer aux décisions importantes, notamment dans le recrutement des médecins, ces derniers étant eux-mêmes impliqués dans la gestion du centre. Cette organisation, qui s’est avérée particulièrement efficace dans un quartier prioritaire de la ville, bénéficie d’un soutien fort des habitants et développe des synergies avec d’autres structures, telles que la protection maternelle et infantile (PMI) ou les infirmiers libéraux.

La pérennité financière de ce modèle reste toutefois incertaine, l’expérimentation prenant fin début 2026. Malgré une évaluation en cours, les difficultés structurelles de financement des politiques sociales font planer une réelle incertitude sur l’avenir de cette initiative. Au nom des habitants de Saint-Denis et de l’équipe de La Place Santé, je sollicite donc votre attention sur ces modèles innovants, qui ont fait la preuve de leur efficacité dans les quartiers populaires.

Bien que La Place Santé soit une structure coopérative relevant du droit privé, elle s’inscrit dans la tradition d’engagement de la municipalité en matière de santé. La ville de Saint-Denis gère en effet cinq centres municipaux de santé qui partagent une logique de coordination des soins et offrent les avantages liés à l’exercice salarié, appuyés par une collectivité locale engagée.

Dans ce cadre, nous avons récemment harmonisé notre cadre d’emploi sur celui des praticiens hospitaliers, renforçant ainsi l’attractivité de nos centres pour les jeunes médecins. Nous avons également mis en place des partenariats avec l’hôpital de Saint-Denis et l’AP-HP, permettant des temps partagés de médecins entre nos structures. Ces dispositifs ont conduit à une nette augmentation du nombre de candidatures.

Les conclusions du récent rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur le modèle économique des centres de santé soulignent l’intérêt de l’approche pluriprofessionnelle et recommande une meilleure répartition des tâches entre médecins et infirmiers, notamment dans le cadre des pratiques avancées. Notre propre expérience vient corroborer cette recommandation, notamment au regard de la forte prévalence des pathologies chroniques au sein de la patientèle.

Les collectivités qui, comme la nôtre, s’impliquent directement dans l’offre de soins et ne se contentent pas d’un rôle de coordination deviennent elles-mêmes des acteurs de soins à part entière. Nous devons encourager les collectivités qui en ont la capacité à s’engager dans cette voie car cette implication pourrait favoriser des contractualisations renforcées avec les ARS, notamment grâce au fonds d'intervention régional (FIR), afin de soutenir des actions concrètes et ciblées.

Je souhaite enfin souligner l’effort financier important consenti par la ville de Saint-Denis dans le domaine de la santé. Chaque année, nous y consacrons 14 millions d’euros, soit 6 % de notre budget municipal, pour une compétence qui, rappelons-le, reste facultative. Sur cette somme, 2 millions constituent un reste à charge direct pour la collectivité. Cette réalité explique en partie pourquoi de nombreuses structures associatives ou mutualistes sont aujourd’hui contraintes de fermer. Si notre budget global de 250 millions d’euros nous permet d’assumer cet engagement, ce choix reste délicat, notamment face à d’autres besoins fondamentaux tels que les écoles ou les crèches.

Pour conclure, je plaide avec force en faveur des centres de santé participatifs, qu’ils soient associatifs, coopératifs ou municipaux, en particulier dans les quartiers prioritaires. Ils constituent des piliers incontournables de notre système de santé territorial et doivent, à ce titre, être pleinement reconnus et soutenus.

M. Christophe Naegelen, rapporteur de la commission d’enquête relative à l’organisation du système de santé et aux difficultés d’accès aux soins. Je tiens tout d'abord à exprimer ma gratitude pour vos interventions respectives et à saluer les différentes initiatives mises en place.

La raison d'être de cette commission d'enquête parlementaire découle des problématiques que nous constatons aujourd'hui à trois niveaux, à savoir l'accès aux médecins généralistes, l'accès aux spécialistes et l'accès à l'hôpital public, notamment à ses services essentiels tels que les urgences et la maternité.

Quelle est la nature de vos relations avec l'administration, en particulier avec l’ARS, dans vos collectivités respectives ? Je fais ici référence à l'ensemble de l'écosystème de l'ARS, incluant les délégués départementaux et les directeurs généraux des ARS régionales. Les départements et les communes sont-ils véritablement associés aux processus décisionnels ?

Avez-vous des propositions concrètes à formuler pour améliorer le fonctionnement actuel ? Pensez-vous qu'une refonte complète de l'ARS soit nécessaire ? Avez-vous mené une réflexion approfondie sur ces sujets ? Quelle est votre vision sur la manière dont l'administration de santé pourrait agir plus efficacement en faveur des territoires ?

M. Philippe Gouet. Nous observons des dynamiques très différentes dans le fonctionnement des ARS en fonction des territoires. Si la collaboration est excellente dans certaines régions ou départements, nous rencontrons d’importantes difficultés relationnelles dans d’autres.

Il pourrait être judicieux d'accorder davantage d'autonomie aux délégations départementales des ARS qui, actuellement, ne disposent pratiquement d’aucune marge de manœuvre et dépendent entièrement de leur direction régionale.

M. Christophe Naegelen, rapporteur. Je souhaiterais approfondir ici la question de l’autonomie. Comment envisagez-vous concrètement une telle évolution ? Devons-nous l’imaginer selon un modèle analogue à celui des préfets, avec des représentants du ministère de la santé placés directement auprès du préfet et la suppression, de fait, de l’échelon régional ?

Notre commission a précisément pour mission de dépasser le stade des constats et d’élaborer des propositions structurantes, fondées sur des principes de clarté, d’efficacité et de proximité. Il nous revient d’imaginer des recommandations concrètes, susceptibles d’avoir un impact réel sur les territoires. C’est pourquoi j’attends, à ce stade, des suggestions précises, opérationnelles et argumentées pour réformer en profondeur et de manière cohérente l’organisation actuelle.

M. Philippe Gouet. Nous défendons avec conviction la nécessité d’une collaboration étroite entre le préfet départemental et le directeur territorial de l’ARS, car ces deux acteurs partagent une connaissance fine et concrète des réalités locales ainsi que des problématiques sanitaires spécifiques à leurs territoires. Il est tout aussi fondamental d’associer pleinement les structures départementales à ce travail, car elles disposent d’une expertise précieuse, forgée au plus près des besoins de la population.

Nous considérons que l’échelon régional, dans son organisation actuelle, demeure trop éloigné des enjeux quotidiens liés à l’accès aux soins. La crise du covid a mis en évidence les limites de ce modèle. Alors que les ARS régionales peinaient à prendre des décisions rapidement, les préfets départementaux se sont distingués par leur réactivité et leur capacité à agir sans délai.

Le principal frein que nous identifions réside aujourd’hui dans l’absence d’autonomie réelle des ARS à l’échelle départementale. L’ensemble des décisions stratégiques reste concentré au niveau régional, ce qui engendre une inertie préjudiciable et ralentit considérablement les processus, qu’il s’agisse de la gestion des services hospitaliers, de la fermeture d’établissements ou de la mise en œuvre de nouveaux plateaux techniques.

M. Patrick Genre. L’AMF partage pleinement l'avis exprimé sur l'importance cruciale des délégations territoriales. La crise sanitaire a démontré l'efficacité d'une approche décentralisée, où les préfets de départements, en collaboration avec les délégués territoriaux, ont pu agir efficacement. Nous reconnaissons également la diversité des situations sur le territoire en ce qui concerne les relations avec les ARS.

Nous plaidons pour un retour à la proximité. Le délégué territorial, en lien étroit avec le préfet de département et les élus locaux, possède une connaissance inégalée de son territoire. Néanmoins, nous ne préconisons pas la suppression pure et simple des ARS. Une approche extraterritoriale reste nécessaire dans le domaine de la santé, car certaines problématiques dépassent le cadre de nos territoires de proximité. La vision régionale, dans le contexte de la stratégie nationale de santé, demeure pertinente.

Cependant, nous recommandons vivement que les délégations territoriales soient dotées de réelles capacités décisionnelles opérationnelles afin d'inverser la logique actuelle. Plutôt que de faire descendre les directives du ministère de la santé vers le terrain, nous devons faire remonter les besoins locaux pour élaborer la stratégie de santé. Bien que les projets régionaux de santé (PRS) tentent d'adopter cette approche, sa mise en œuvre reste complexe.

Notre proposition consiste donc à transformer les délégations territoriales en véritables échelons opérationnels, travaillant en étroite collaboration avec les élus locaux et les structures existantes.

M. Gilles Noël. En tant que représentants des maires ruraux, nous considérons que les ARS doivent impérativement être placées sous l’autorité du préfet de département. Cette condition est à nos yeux essentielle pour instaurer une véritable proximité de gouvernance et une relation de confiance entre les différents niveaux d’acteurs locaux. Tant que les ARS ne seront redevables qu’au ministre de la santé, nous resterons enfermés dans un modèle vertical et déconnecté des réalités de terrain.

Nous observons par ailleurs que les ARS tendent de plus en plus à empiéter sur les prérogatives de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), alors que ces institutions jouent un rôle central dans le financement et l’organisation de notre système de santé. Nous préconisons que la CNAM incite clairement ses délégations territoriales à sortir de leur posture administrative pour aller à la rencontre des élus locaux et s’impliquer concrètement dans les dynamiques territoriales.

Nous demandons enfin une révision en profondeur du fonctionnement des cartes de zonage établies par les ARS, qui définissent les zones sous-dotées en offre de soins. Ces cartes, trop rigides dans leur conception actuelle, ne reflètent pas toujours la réalité du terrain. Nous plaidons pour une mise à jour semestrielle de ces zonages, afin qu’ils puissent s’adapter plus finement à l’évolution des besoins locaux. Cette plus grande souplesse permettrait une réponse plus rapide et plus pertinente aux situations de tension ou de désertification médicale.

M. Jean-Charles Dron. Dans notre expérience, l’ARS s’est imposée comme un partenaire central, non seulement en tant que financeur de projets, mais également comme catalyseur efficace d’initiatives innovantes. Notre collaboration avec l’ARS s’organise à deux niveaux complémentaires, puisque nous entretenons des relations étroites avec les directions territoriales des trois départements concernés, tout en travaillant de manière continue avec le service en charge de l’innovation. Cette double articulation s’est révélée particulièrement pertinente et productive dans le cadre de notre projet.

Je souhaite, à titre d’illustration, évoquer nos travaux menés dans le domaine de la télémédecine. Ceux-ci ont directement contribué à l’élaboration d’une feuille de route régionale structurante, portée conjointement par l’ARS, la région, la préfecture et la CNAM. Ce document stratégique témoigne de l’efficacité d’une approche véritablement collaborative, fondée sur la co-construction et la complémentarité des acteurs.

Pour autant, nous aspirons à une évolution du cadre de gouvernance, qui permettrait d’intégrer pleinement les collectivités territoriales dans les processus de décision. Il nous paraît essentiel d’améliorer l’articulation entre l’accès aux soins et les politiques de santé, en mobilisant des outils adaptés et partagés. Parmi ces outils, les dispositifs cartographiques jouent un rôle fondamental qui, lorsqu’ils sont mis à disposition des élus, deviennent de véritables instruments structurants d’aide à la décision.

Mme Katy Bontinck. Je tiens à souligner ici le retour extrêmement positif que nous formulons à l’égard de l’ARS Île-de-France et de sa délégation départementale en Seine-Saint-Denis, notamment dans la qualité des relations qu’elles entretiennent avec les élus et dans la solidité des partenariats établis. Il me semble important, dans un contexte où les critiques à l’égard des ARS sont parfois vives, de rappeler l’état antérieur de l’organisation des politiques de santé publique. Avant la création des ARS, plus de seize services déconcentrés de l’État se partageaient, de manière fragmentée, la gestion des volets sanitaire, médico-social, environnemental et hospitalier. L’ARS a permis d’unifier ces compétences, assurant une gestion plus cohérente de la santé environnementale, de l’offre de soins, en ville comme à l’hôpital, et du secteur médico-social.

S’il fallait formuler une piste d’amélioration concrète, nous suggérerions de revisiter la gestion des dossiers relatifs à l’insalubrité et au saturnisme dans les logements. Aujourd’hui, cette responsabilité repose sur une répartition inégale selon que les communes disposent ou non d’un service communal d’hygiène et de santé, en vertu d’une cartographie qui n’a pas évolué depuis 1983. Cette organisation génère des situations peu efficientes alors que certaines équipes municipales seraient en mesure de prendre le relais.

M. Christophe Naegelen, rapporteur. Il ne s’agit pas ici de formuler une critique systématique des ARS, mais d’observer avec lucidité la situation actuelle dans la majorité des territoires. Nous devons reconnaître que certaines décisions, ainsi que les organisations mises en place il y a vingt-cinq ou trente ans, ne sont plus en adéquation avec les besoins et les réalités actuelles de nos territoires.

Notre responsabilité collective est de faire preuve de remise en question permanente et de démontrer notre capacité à faire évoluer nos structures et nos modes d’action afin de proposer des réponses plus pertinentes aux attentes de nos concitoyens.

Mme Stéphanie Rist (EPR). Nous avons instauré, dans mon département, une collaboration entre l'ARS et l'association départementale des maires pour l'élaboration des zonages, permettant ainsi un véritable dialogue. La généralisation de cette pratique vous semblerait-elle pertinente ?

Quelle est la position de vos collectivités respectives concernant la proposition de loi Garot sur la régulation de l'installation des médecins ?

M. Philippe Gouet. La position de Départements de France sur la régulation des professions de santé, en particulier celle des médecins, est sans ambiguïté. Alors que plus de 80 % de notre territoire est classé en zone sous-dense et que la France figure en dernière position au sein de l’Union européenne en matière de densité médicale, nous exprimons une grande réticence à l’égard de toute forme de régulation coercitive de l’installation. Nous ne croyons pas que limiter l’installation dans les quelques zones qualifiées de sur-dotées permettrait, à elle seule, d’améliorer significativement l’accès aux soins. Il convient d’ailleurs de rappeler que même dans des zones urbaines telles que Paris, l’accès aux soins primaires demeure problématique.

Cette approche restrictive risquerait, par ailleurs, de décourager les futurs médecins en restreignant leur liberté d’installation. Une telle mesure pourrait en outre susciter une opposition importante de la part des ordres professionnels, des syndicats représentatifs, des internes et des étudiants en médecine, créant ainsi un climat de tension susceptible de fragiliser davantage encore notre système de santé.

S’agissant du zonage, il est aujourd’hui établi par la CNAM en concertation avec les syndicats professionnels, avant d’être transmis à l’ARS, qui dispose d’une marge de modulation actuellement limitée à 5 %. Dans une optique de meilleure adaptation aux spécificités locales, il pourrait être pertinent d’élargir cette marge à 15, voire 20 %, afin de donner aux agences régionales davantage de souplesse dans l’application des critères. Nous préconisons par ailleurs que la révision du zonage devienne annuelle et qu’elle s’appuie sur les données actualisées de l’Ordre des médecins, dans le but d’établir une cartographie plus fine, réactive et adaptée aux réalités de terrain.

M. Patrick Genre. Pour l'AMF, la question des zonages mérite une révision en profondeur, tant dans son élaboration que dans son actualisation. Bien que les élus locaux soient consultés, leur avis intervient à un stade très tardif du processus, sans réelle capacité d’influence. Face à la technicité des dossiers, notamment lorsqu’il s’agit d’évaluer les besoins spécifiques par discipline médicale, les élus se trouvent souvent démunis, malgré leur connaissance fine du terrain.

Nous estimons que le rôle des élus devrait se recentrer sur l’enjeu fondamental de la répartition territoriale des professionnels de santé. À cet égard, nous considérons qu’une révision annuelle des zonages constitue un minimum indispensable.

Concernant la régulation, nous avons souligné à plusieurs reprises les limites des politiques fondées uniquement sur les incitations financières, qui se sont révélées largement insuffisantes pour inverser les dynamiques de désertification médicale. Nous proposons donc deux pistes d’action complémentaires. La première consiste à territorialiser davantage la formation médicale, en renforçant l’ancrage départemental, en lien avec les facultés de médecine et les doyens. La seconde repose sur la mise en cohérence entre l’installation des médecins et leur engagement à participer à la permanence des soins ambulatoires (PDSA). Cette mesure est cruciale pour alléger la pression qui s’exerce aujourd’hui sur les services d’urgence, où l’on constate une multiplication des prises en charge non urgentes.

Pour illustrer ces propos, je souhaite évoquer l’exemple de Pontarlier, où la CPTS a mis en place une maison médicale de garde, créant un lien direct et fonctionnel entre la ville et l’hôpital. Les résultats ont été rapidement visibles puisqu’en l’espace de trois mois, une diminution de 30 % des passages aux urgences a été constatée. Cette organisation a permis de regrouper cinq secteurs de garde préexistants au sein d’une même structure, avec des bénéfices notables pour les praticiens eux-mêmes, qui réalisent désormais moins de gardes tout en assurant un suivi plus large de la population.

M. Gilles Noël. S’agissant de la présence des élus dans les instances de concertation et de pilotage, nous y sommes naturellement favorables. Nous exprimons en revanche une opposition claire à la proposition de loi portée par M. Garot, en particulier en ce qui concerne son volet relatif à la régulation de l’installation des médecins, qui risque de fragiliser les territoires ruraux.

Nous anticipons des situations où les jeunes praticiens, confrontés à ces mesures, se détourneront des zones rurales au profit d’un exercice salarié ou opteront pour des zones intermédiaires, voire pour la périphérie urbaine. Ce glissement entraînerait, de manière indirecte, une forme de sanction pour les communes les plus isolées, même si certains collègues gardent l’espoir que cette réforme puisse susciter un regain d’attractivité pour certains territoires en souffrance.

Nous défendons donc une logique fondée sur le principe d’une liberté d’installation maintenue dans les villages ou les pôles de vie, mais accompagnée de contreparties claires.

M. Jean-Charles Dron. Notre démarche vise avant tout à améliorer les conditions d’exercice des professionnels de santé grâce aux outils numériques, ce qui contribue, de manière concrète, à renforcer l’attractivité de ces métiers.

L’hybridation permet en outre de dissocier le projet de vie du projet professionnel en distinguant le lieu de travail du lieu de résidence. Cette flexibilité ouvre de nouvelles perspectives en matière d’aménagement du territoire et d’organisation des soins.

En ce qui concerne les zonages, nous observons l’émergence d’outils innovants qui permettent non seulement une analyse fine des situations actuelles mais également une capacité de projection précieuse, notamment dans un contexte où la démographie médicale évolue rapidement.

Mme Katy Bontinck. S’agissant du zonage, une piste d’amélioration significative résiderait dans une territorialisation accrue des aides à l’installation qu’il conditionne.

À l’heure actuelle, les ARS ont la possibilité d’adapter ces dispositifs pour les médecins généralistes, mais cette flexibilité ne s’applique pas à l’ensemble des professions de santé. Or nous faisons face à des pénuries criantes dans certaines disciplines, notamment parmi les orthophonistes et les sages-femmes, en particulier dans nos quartiers les plus fragiles.

En ce qui concerne la PPL Garot, nous y sommes globalement favorables. Depuis de nombreuses années, les débats sur les aides à l’installation se succèdent, sans que les résultats ne soient à la hauteur des enjeux. Plusieurs dizaines de millions d’euros ont été consacrées à ces dispositifs et il apparaît aujourd’hui indispensable d’en évaluer l’efficacité réelle pour éventuellement explorer de nouvelles voies. Si la rédaction actuelle de la proposition n’est pas exempte d’imperfections, elle a donc le mérite d’ouvrir un débat salutaire.

Mme Annie Vidal (EPR). S’agissant tout d’abord de la place des élus dans les processus décisionnels, j’ai bien entendu votre ressenti concernant le manque d’implication. Cela m’amène à m’interroger sur l’articulation concrète entre vos collectivités et le collège des collectivités territoriales représenté au sein des CTS. Ces instances constituent, par essence, un espace de démocratie sanitaire, dans lequel se discutent et se construisent les stratégies territoriales. En tant que présidente du CTS de Seine-Maritime, je constate que la participation des élus est souvent hétérogène.

Aussi, comment les représentants élus font-ils circuler l’information et relayent-ils les invitations à participer aux différents groupes de travail ? Sur mon territoire, qui regroupe 304 communes, en grande majorité rurales, nous ne disposons que de quatre à sept représentants pour couvrir l’ensemble des communes. Dans ce contexte, comment organisez-vous la diffusion de l’information ou la remontée des besoins spécifiques de chaque commune, sachant que les réalités diffèrent profondément entre une grande ville et une commune rurale ?

Je souhaite également obtenir davantage de précisions sur les articulations institutionnelles qui sous-tendent le projet e-Meuse. Quelle est la place respective du projet territorial de santé, de l’ARS et du CTS dans son élaboration et sa mise en œuvre ? Qui en est le porteur et quel en est le mode de financement ? Enfin, pouvez-vous nous indiquer où, concrètement, sont déployés les dispositifs de télémédecine dans les zones rurales concernées ?

Mme Josiane Corneloup (DR). Je suis profondément convaincue de la nécessité de territorialiser le projet de santé, car les spécificités régionales sont trop diverses pour que des réponses uniformes puissent être pleinement efficaces. L’expérience de la crise du covid nous a démontré toute la pertinence de cette approche de proximité, qui devrait nous conduire à repenser en profondeur nos modes d’organisation.

Il semble également essentiel d’associer les acteurs du champ social à cette réflexion. Les dimensions sociales et sanitaires étant intimement liées, il serait particulièrement pertinent d’intégrer leur regard et leur expertise dans la conception de nos politiques de santé.

Je considère en outre la télémédecine comme une opportunité majeure pour les territoires ruraux, bien qu’elle demeure encore largement sous-exploitée. Il est paradoxal de constater que les téléconsultations sont aujourd’hui plus fréquentes en zone urbaine, alors même que les déserts médicaux concernent davantage les territoires ruraux.

Je m’interroge sur le développement très limité des téléconsultations spécialisées et de la téléexpertise. Si la dermatologie bénéficie d’un usage relativement établi, cette pratique reste marginale dans d’autres spécialités, alors que l’accès aux spécialistes est souvent aussi complexe que celui aux médecins généralistes. Certaines maisons de santé et officines disposent pourtant d’un équipement adapté, permettant de développer ces pratiques. Je souhaite donc connaître votre rôle dans ce déploiement.

Je souhaite également évoquer votre expérimentation et les moyens financiers conséquents qui lui sont consacrés dans une logique pluriannuelle. À l’heure actuelle, l’absence d’un modèle de rémunération adapté représente une problématique majeure concernant le développement de la téléconsultation. Le forfait de 750 euros, alloué indépendamment du volume réel réalisé, constitue une limite manifeste à son déploiement. Je suis pourtant convaincue que la téléconsultation est appelée à devenir, à terme, un mode d’exercice à part entière, en complémentarité avec la consultation physique. Certaines personnes privilégient ce mode d’accès aux soins, notamment en raison de sa rapidité. La crise du covid a d’ailleurs largement contribué à intégrer la téléconsultation dans les usages médicaux du quotidien.

S’agissant de la téléexpertise dermatologique, la situation est encore plus préoccupante. En l’absence de modèle économique pérenne, et en raison de l’échec des négociations conventionnelles, les perspectives de développement demeurent limitées.

Quelle est votre position sur ces enjeux ?

M. Philippe Gouet. S’agissant des CTS, nous constatons une grande hétérogénéité de fonctionnement selon les territoires. Les CTS nous sollicitent essentiellement sur la PMI, en particulier pour le suivi des grossesses chez les femmes en situation de précarité économique, ainsi que les actions de prévention. Ce sont, dans les faits, les deux principales thématiques qui structurent nos échanges avec ces instances.

La pratique de la télémédecine est actuellement encadrée par l’avenant 9, qui limite son exercice à 20 % de l’activité des médecins. Dans les territoires confrontés à une désertification médicale avérée, il devient pourtant indispensable de relever ce seuil, afin de permettre un recours plus large à ce mode de consultation.

S’agissant plus spécifiquement de la télémédecine en dermatologie, son potentiel est aujourd’hui largement reconnu. Il semble néanmoins essentiel d’envisager son extension à d’autres disciplines, en particulier la psychologie et la psychiatrie. La téléconsultation peut en effet offrir un cadre propice à l’instauration d’un échange singulier entre le praticien et le patient.

M. Patrick Genre. Permettez-moi d’apporter un éclairage fondé sur mon expérience personnelle à la tête du CTS du Doubs, où nous constatons une participation qui reste extrêmement faible, alors que certains élus avaient pourtant exprimé le souhait d’y siéger.

En tant qu’élus, nous devons nous investir pleinement dans les structures de gouvernance existantes, qu’il s’agisse des comités d’élus des GHT ou des CTS. Il ne s’agit pas de réinventer des dispositifs mais bien d’activer et de faire vivre ceux qui sont déjà à notre disposition.

Je considère par ailleurs que le positionnement institutionnel des CTS demeure flou, y compris dans les textes législatifs. Leur articulation avec la conférence régionale de la santé et de l’autonomie (CRSA) est insuffisamment définie, ce qui contribue à fragiliser la légitimité des CTS dans le processus décisionnel.

S’agissant de la télémédecine, si elle constitue sans aucun doute une réponse pertinente à certaines difficultés d’accès aux soins, elle ne saurait être présentée comme une solution unique ou suffisante face à la dégradation de l’offre de médecine générale. La notion de proximité étant centrale, il est impératif que le médecin téléconsultant connaisse le territoire dans lequel il intervient afin d’orienter le patient vers les services de recours pertinents et disponibles localement.

La présence d’un professionnel de santé pour accompagner la téléconsultation nous semble par ailleurs indispensable. C’est pour cela que l’AMF se montre réservée, voire opposée, à l’installation de bornes de téléconsultation dans des lieux tels que les gares. Enfin, le développement de la télémédecine reste étroitement conditionné par le niveau de couverture numérique du territoire.

M. Gilles Noël. Nous souhaitons insister sur la nécessité d’une véritable indépendance des CTS. À l’heure actuelle, leur fonctionnement quotidien repose fréquemment sur un appui administratif fourni par les ARS, ce qui crée une forme de dépendance structurelle dont l’intensité varie selon les territoires.

Aussi longtemps que les CTS demeureront sous la tutelle fonctionnelle des ARS, nous continuerons à observer des situations dans lesquelles les élus locaux sont sollicités pour s’approprier, dans des délais contraints, des PRS dont la volumétrie oscille entre 800 et 1 200 pages.

L’indépendance des CTS est d’autant plus cruciale qu’un nombre important d’acteurs territoriaux est directement redevable de l’ARS, souvent en raison de leur dépendance financière. Cette réalité se manifeste de manière particulièrement visible lorsque l’agence pilote des démarches participatives. L’ARS structure alors le processus et mobilise en priorité des partenaires dont le fonctionnement dépend, pour partie ou en totalité, de ses financements. Tant que nous ne romprons pas ce lien de dépendance, nous resterons enfermés dans des schémas de gouvernance faiblement partagés.

Nous devons impérativement renforcer notre présence, notre visibilité et notre engagement dans les politiques de santé. À ce jour, seuls certains de nos collègues, généralement présidents de centres hospitaliers situés en milieu urbain, bénéficient d’un accès direct et régulier aux directeurs généraux d’ARS. Cette situation crée une inégalité manifeste entre les communes. L’administration privilégie, de fait, des relations bilatérales avec les maires des villes-centres, des préfectures ou des communes accueillant un établissement hospitalier. Nous, maires de petites communes, sommes très largement tenus à l’écart de ce dialogue institutionnel, alors que ce sont nos territoires qui alimentent quotidiennement les centres hospitaliers en patients et en besoins de soins.

Mme Annie Vidal (EPR). En tant que présidente de CTS, j’ai eu l’occasion d’organiser de nombreuses consultations nationales de réflexion et ai pu constater, de manière très nette, une participation plus élevée des élus dans les territoires ruraux que dans les métropoles.

M. Jean-Charles Dron. Dans le cadre du programme e-Meuse Santé, nous avons mis en place une organisation structurée sous la forme d’un consortium, dont le pilotage est assuré par le département de la Meuse. La gouvernance du projet repose sur un comité exécutif articulé autour de cinq collèges, parmi lesquels figure celui des professionnels de santé. Ce collège regroupe les CPTS, les GHT, ainsi qu’une représentation large et diversifiée des acteurs de santé, y compris du secteur médico-social.

Le projet bénéficie d’un financement significatif, à hauteur de 24 millions d’euros, dont 8,4 millions sont apportés par l’État. La région, l’ARS, les départements et deux groupements d’intérêt public (GIP) y contribuent également à hauteur de 1,5 million d’euros.

Il s’agit là d’un modèle innovant pensé comme une plateforme d’expérimentation pour les territoires. Dans ce cadre, nous avons identifié trois modèles économiques distincts. Le premier relève de la santé publique et de ses enjeux fondamentaux. Le deuxième tient compte des intérêts des professionnels de santé, condition indispensable à leur adhésion aux solutions déployées. Le troisième concerne les opérateurs de solutions technologiques, qui doivent proposer des innovations économiquement viables, capables de structurer des filières durables.

Notre modèle économique actuel est encore expérimental et n’a pas vocation à perdurer en l’état. Nous devons évoluer vers un modèle de transition qui favorise l’appropriation de l’innovation par les professionnels de santé, dans une logique de prévention, d’amélioration de l’accès aux soins et de réponse coordonnée aux objectifs de santé publique.

Le financement des équipements découle systématiquement d’un projet médical et organisationnel conçu à l’échelle locale. Les installations sont donc réparties en fonction des besoins identifiés, dans des lieux aussi divers que les pharmacies, les CIAS, les EHPAD ou encore les maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP).

La téléconsultation présente quant à elle un potentiel important d’optimisation. Nous faisons face à deux obstacles majeurs que sont la sous-exploitation des équipements disponibles et les difficultés liées à la rémunération des professionnels de santé engagés dans ces dispositifs. Deux modèles coexistent, avec un système forfaitaire pour les pharmacies et un accompagnement spécifique pour les infirmiers. L’équation économique demeure souvent insatisfaisante, ce qui limite l’ouverture de créneaux réguliers et entrave une communication fluide et une organisation efficace des plages de télémédecine sur les territoires.

Bien que nous plaidions régulièrement pour une implication active des médecins locaux dans ces téléconsultations, la pénurie médicale constitue un frein majeur à cette ambition. À l’échelle d’une CPTS, il conviendrait sans doute d’envisager une répartition plus équilibrée de cette charge, en mutualisant, par exemple, les 20 % de temps consacré à la télémédecine entre plusieurs praticiens.

M. le président Jean-François Rousset. Vous pouvez, au besoin, compléter nos échanges par écrit avec tout sujet ou toute recommandation que vous jugerez utile.

 

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La séance s’achève à dix-huit heures cinquante

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Membres présents ou excusés

 

 

Présents. - M. Laurent Alexandre, Mme Anchya Bamana, Mme Josiane Corneloup, M. Thierry Frappé, Mme Murielle Lepvraud, M. Christophe Naegelen, Mme Stéphanie Rist, M. Jean-François Rousset, Mme Annie Vidal