Compte rendu

Commission d’enquête sur
les défaillances des
pouvoirs publics face à la multiplication des plans
de licenciements

 

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Muriel Pénicaud, ancienne ministre du travail 2

– Présences en réunion................................19

 


Lundi
19 mai 2025

Séance de 14 heures

Compte rendu n° 37

session ordinaire de 2024-2025

Présidence de
M. Denis Masséglia, président
 

 


  1 

La séance est ouverte à quatorze heures cinq.

Présidence de M. Denis Masséglia, président.

La commission d’enquête auditionne Mme Muriel Pénicaud, ancienne ministre du travail.

M. le président Denis Masséglia. Nous recevons Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail dans le gouvernement de M. Édouard Philippe entre mai 2017 et juillet 2020, accompagnée de M. Antoine Foucher, qui a dirigé son cabinet pendant toute cette période.

Madame la ministre, vous avez porté, à travers une série d’ordonnances publiées au Journal officiel du 23 septembre 2017, une réforme substantielle du droit du travail. Nous avons souhaité vous entendre car les personnes auditionnées par notre commission ont régulièrement évoqué les dispositions de ces ordonnances, notamment celles relatives à la négociation collective dans l’entreprise, à la rupture conventionnelle collective (RCC), à l’organisation des instances représentatives du personnel (IRP) ou encore au licenciement pour motif économique.

Je vous rappelle que l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes auditionnées par une commission d’enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc, Madame la ministre, Monsieur, à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».

(Mme Muriel Pénicaud et M. Antoine Foucher prêtent serment.)

Mme Muriel Pénicaud, ancienne ministre du travail. Tout d’abord, merci de me donner la parole dans le cadre des travaux de cette commission d’enquête. Je souhaite vous répondre avec clarté et franchise, bien sûr, mais aussi vous exprimer ma conviction que le cap choisi en 2017 et conservé depuis lors est le bon pour notre pays. Il serait irresponsable d’ignorer les difficultés que rencontrent certaines entreprises. Il serait tout aussi irresponsable de passer sous silence les résultats tangibles, les signaux forts, les transformations profondes qui placent la France parmi les grandes puissances économiques attractives, résilientes et socialement protectrices.

La vérité est que la France attire, innove et crée de l’emploi. Quelques faits et chiffres le prouvent. Le taux de chômage, structurellement bas, se situe à 7,4 %, contre 9,4 % en 2017, selon le Bureau international du travail (BIT) ; il n’a pas dépassé 7,5 % depuis quatre ans, ce qui n’était jamais arrivé depuis quarante ans. En hausse constante, le taux d’emploi a encore progressé de 0,4 point au dernier trimestre pour atteindre 69,5 %, ce qui résulte de la création de 2 millions d’emplois depuis 2017. Qui plus est, ces emplois sont qualitatifs. Nous avons compté plus de 4 millions d’embauches en contrat à durée indéterminée (CDI) chaque année depuis 2018, sauf en 2020, ce que nous n’avions pas connu auparavant en France.

Tout cela ne tient ni au hasard ni à une conjoncture heureuse. Cela tient à des choix politiques assumés, à des réformes courageuses, à un engagement des partenaires sociaux et à une vision qui conjugue dynamisme économique et progrès social. Le dernier baromètre EY de l’attractivité de la France le prouve : en 2024, pour la sixième année consécutive, la France reste la première destination européenne des investissements étrangers, ce qui est un important facteur de création d’emplois. Dans l’énergie, soixante-dix entreprises étrangères ont choisi notre pays cette année. Dans l’intelligence artificielle (IA), 109 milliards d’euros vont être investis en France. Les entreprises étrangères s’implantent à 75 % hors d’Île-de-France et irriguent tout le territoire. Entre 2017 et 2023, plus de 10 000 projets d’investissements étrangers ont vu le jour et ont conforté ou créé plus de 300 000 emplois sur notre sol. Ajoutons à cela une résilience remarquable face à la pandémie, grâce à la mise en place par les pouvoirs publics de dispositifs de soutien aux entreprises et aux salariés sans équivalent en Europe, notamment le prêt garanti par l’État (PGE), le fonds national de l’emploi (FNE) et l’activité partielle.

Ces résultats sont donc le fruit d’une volonté politique : faire de la France une terre de confiance pour investir, entreprendre et innover. C’est dans cet esprit qu’ont été conçues les ordonnances de 2017. Elles ne sont pas nées dans le secret de bureaux ministériels. Elles sont le fruit, à l’été 2017, de plus de 300 heures de concertation avec les partenaires sociaux, de débats nourris, y compris au Parlement, et d’un dialogue exigeant. Ces ordonnances avaient un objectif ambitieux, assumé, profondément républicain : transformer notre modèle social pour libérer les énergies, donner aux entreprises les moyens d’investir et d’embaucher tout en renforçant la protection des salariés. Nous avons promu cette double exigence, économique et sociale, ce dont je suis fière car je crois en une France qui attire, protège et agit – ces verbes ne sont pas contradictoires.

Qui attire, d’abord. Les ordonnances ont permis de lever un verrou qui contraignait fortement l’emploi dans notre pays. Avec le barème d’indemnités prud’homales, nous avons apporté de la sécurité juridique et de la prévisibilité dans les relations de travail, tant pour les entreprises que pour les salariés. Aucun chef d’entreprise – encore moins dans les très petites entreprises (TPE) et les petites et moyennes entreprises (PME) – n’embauche en pensant à licencier, mais l’incertitude sur le coût d’une rupture pouvait, trop souvent, dissuader de recourir aux CDI. Ce barème a permis de libérer les entrepreneurs de la peur d’embaucher, en particulier dans les petites entreprises.

En outre, il garantit beaucoup plus d’équité entre les salariés, car il met fin à des écarts parfois injustifiables, pouvant aller du simple au quadruple pour un même préjudice d’un conseil de prud’hommes à l’autre. Les plafonds fixés tiennent compte des décisions prises au cours des dernières années ; des planchers sont garantis, y compris pour les salariés ayant moins de deux ans d’ancienneté et ceux des TPE.

Les ordonnances ont aussi corrigé une incohérence majeure de notre droit du travail : le motif économique d’un licenciement est désormais apprécié au niveau national et non plus à l’échelle mondiale d’un groupe. C’était une exigence de bon sens, de cohérence et d’équité. Comment pouvait-on justifier qu’une filiale française, réellement en difficulté, ne puisse engager un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) sous prétexte qu’une autre filiale ou que le groupe réalisait des bénéfices en Chine, aux États-Unis ou ailleurs ? Cette logique n’était ni tenable juridiquement ni soutenable socialement. En alignant notre droit sur ce qui se pratique dans la majorité des pays européens, nous avons renforcé la crédibilité et l’attractivité de la France pour les investisseurs internationaux, sans renoncer à notre exigence de justice sociale.

Les ordonnances comportent de fortes garanties contre les abus, en particulier contre les entreprises qui chercheraient à organiser artificiellement la baisse de leur activité en France pour contourner le droit du travail. Les outils de contrôle et de sanction ont été renforcés. Il ne s’agissait pas de faciliter les licenciements, mais, au contraire, de mieux encadrer ceux qui sont justifiés et de sanctionner les entreprises qui trichent.

Une France qui protège, ensuite. Nous avons voulu renforcer les droits réels, concrets, des salariés. Nous avons encadré juridiquement le télétravail, ce qui a beaucoup servi en 2020 – mais ce n’est pas le sujet qui nous occupe aujourd’hui. Nous avons abaissé le seuil d’ancienneté ouvrant droit à l’indemnité légale de licenciement, le faisant passer d’un an à huit mois. Mieux encore, ces indemnités ont été revalorisées de 25 % pour les dix premières années. Ce n’est pas un symbole, c’est un progrès social tangible répondant à une demande forte des partenaires sociaux.

Pour protéger, il faut aussi faire preuve de réalisme et de respect envers les salariés. C’est pourquoi nous avons clarifié l’obligation de reclassement, prévue dans le cadre d’un licenciement économique, en faisant en sorte qu’elle s’applique désormais dans un périmètre national. Ce que d’aucuns ont présenté comme un recul est, au contraire, une protection renforcée. Proposer un poste à l’autre bout du monde à un salarié français, sans tenir compte de ses attaches et contraintes personnelles, ce n’est pas une solution de reclassement. Cela revenait trop souvent à dissimuler l’absence de réelles propositions. En restreignant cette obligation au territoire français, nous contraignons l’employeur à formuler des offres acceptables, crédibles, compatibles avec la vie du salarié. Cela rétablit une forme d’honnêteté dans le dialogue.

Troisièmement : agir. C’est-à-dire faire confiance aux acteurs de terrain et comprendre que la norme sociale ne peut plus être pensée depuis un lieu, un centre unique, mais doit se construire au plus près des réalités de chaque entreprise, de chaque secteur, de chaque territoire. C’est tout le sens de notre choix en faveur de la négociation collective à tous les niveaux. Je rappelle que, dans son titre, la loi d’habilitation à prendre les ordonnances visait « le renforcement du dialogue social ». Nous avons voulu une négociation plus vivante, plus pertinente et plus stratégique. Les ordonnances de 2017 ont redonné un véritable pouvoir d’action aux syndicats. Elles leur ont permis de créer une représentation des salariés sur mesure, mieux adaptée aux réalités des entreprises actuelles, qui ne sont pas toutes calquées sur le modèle hiérarchique traditionnel et qui se distinguent les unes des autres par des différences sectorielles ou de taille très marquées. Il est désormais possible d’instaurer un dialogue social constructif et réaliste même là où il n’y avait parfois aucune représentation.

Au-delà de cette flexibilité nouvelle, nous avons doté les partenaires sociaux d’outils leur permettant de prendre part aux décisions stratégiques, d’anticiper les transformations, de construire des accords durables et équilibrés. En d’autres termes, nous avons fait des représentants des salariés de véritables coacteurs de la vie de l’entreprise sur le plan social et économique. Le résultat est là : on n’a jamais autant négocié dans notre pays, et le mouvement a commencé dès 2018 ; 84 990 accords collectifs ont été conclus en 2023 – contre 40 000 à 50 000 par an auparavant –, dont près de 30 000 dans des structures de moins de 50 salariés. C’est le signal fort d’un changement culturel profond. La négociation sociale n’est plus réservée aux grandes entreprises et à leurs salariés : elle devient partout un levier du quotidien. Et il ne s’agit pas d’une négociation de façade : la majorité de ces accords portent sur des sujets structurants tels que l’épargne salariale et les salaires, ce qui montre que le dialogue social s’empare des vrais enjeux – pouvoir d’achat, redistribution de la valeur, implication des salariés dans la performance de l’entreprise. On négocie sur ce qui compte, ce qui change concrètement la vie au travail et les revenus.

Dans un monde traversé par des transitions profondes et de plus en plus rapides sur les plans technologique, écologique et économique, nous avons besoin d’un dialogue social agile, réactif et mature. Loin d’avoir affaibli le dialogue social, la réforme l’a responsabilisé et renforcé en faisant le pari de l’intelligence collective. La force du modèle social français, c’est cette capacité à conjuguer la protection des travailleurs et la capacité d’adaptation des entreprises. Tel est le sens des ordonnances : bâtir un droit du travail plus lisible, plus juste et plus efficace. En faire, si j’ose dire, un droit du travail de la confiance.

M. le président Denis Masséglia. Le dialogue au sein des entreprises est renforcé lorsque les entreprises rencontrent des difficultés. Ne serait-il pas judicieux de le renforcer aussi en amont, afin d’anticiper, voire de prévenir les difficultés, par une représentation renforcée des salariés – représentants du personnel ou représentants syndicaux – au sein des conseils d’administration ?

Mme Muriel Pénicaud. Cet aspect n’était pas dans le champ des ordonnances. Cela étant, on constate que le dialogue social instaure un climat de confiance conduisant à une participation des salariés aux instances de direction. Dans toutes les grandes entreprises où le dialogue social est avancé, il y a des salariés au conseil d’administration. Cette pratique, courante dans les pays nordiques, progresse en France. On pourrait y contribuer en faisant avancer la réflexion sur le partage de la valeur ou l’actionnariat salarié, qui n’est pas nécessairement du ressort législatif. Si l’actionnariat salarié se développe, il n’y aura plus de débat sur la place des salariés dans les conseils d’administration : le droit de représentation va de pair avec sa dimension économique. Nous avons des marges de progrès dans ce domaine.

M. le président Denis Masséglia. Ce partage de la richesse grâce à l’actionnariat salarié pourrait-il concerner toutes les entreprises, quelle que soit leur taille ?

Mme Muriel Pénicaud. Pour les TPE, c’est le partage de la valeur sous d’autres formes qui est appelé à se développer. Mais dans le cas d’entreprises au capital diversifié, l’actionnariat salarié a du sens. La tendance se développe dans les groupes européens et français, mais pas forcément ailleurs, dans les groupes américains, par exemple, où la notion de dialogue social est très différente ; les Européens, quelles que soient les différences entre pays, partagent la conviction que le dialogue social est indispensable, qu’il contribue à la performance et à la cohésion de l’entreprise. Quant à savoir à partir de quelle taille d’entreprise ou pour quelle nature de capital, il faut y réfléchir.

J’ai été membre de conseils administration où siégeaient des représentants des salariés. Au début, certains actionnaires étaient un peu surpris de leur présence ; par la suite, ils s’apercevaient tous qu’elle était précieuse, car elle leur offrait une vision de l’intérieur qui fait souvent défaut aux conseils d’administration. Certes, ces derniers n’ont pas vocation à gérer, diriger ou prendre des décisions d’ordre interne, mais on ne peut pas comprendre une entreprise si l’on ne comprend pas son corps social.

Cette représentation des salariés au conseil d’administration, doublée d’une augmentation de l’actionnariat salarié ou de toute autre forme de partage de la valeur – dont une part importante vient des salariés –, contribuera à conforter la vision du dialogue que nous défendions dans les ordonnances de 2017 : le dialogue doit être à la fois social et économique. D’où le nom de l’instance de représentation du personnel dans l’entreprise : comité social et économique (CSE). On ne peut pas dissocier les deux : pour le progrès social, il faut la dynamique économique, et réciproquement. On peut et on doit aller plus loin dans ce domaine.

M. le président Denis Masséglia. Alors qu’on a tendance à séparer les sujets, je pense en effet qu’un meilleur dialogue permet d’éviter les difficultés, donc les PSE. Plus les salariés sont présents lors des prises de décision, moins les difficultés risquent de survenir.

Mme Muriel Pénicaud. Actuellement, 600 000 salariés sont actionnaires de leur entreprise, sur un total de 21 millions de salariés du secteur privé. Même s’il n’est pas négligeable, l’actionnariat salarié revêt une ampleur limitée.

M. le président Denis Masséglia. Il reste des progrès à faire.

M. Benjamin Lucas-Lundy, rapporteur. Cette audition était indispensable. La parole est à la défense, dirai-je, de façon un peu provocante.

Mme Muriel Pénicaud. Faut-il comprendre que vous m’attaquez, monsieur le rapporteur ?

M. le rapporteur. Non, pas moi, je ne suis que rapporteur ! Je me permettais cette boutade après m’être replongé dans le compte rendu d’auditions précédentes : votre appréciation des effets de ces ordonnances sur le dialogue social a été contestée par d’autres personnes que nous avons reçues. Notre commission d’enquête s’attache à écouter tous les points de vue pour faire la part des choses. Votre audition est donc très précieuse, et je voulais commencer par vous remercier de votre présence.

Le 1er avril 2025, nous avons organisé une table ronde avec des juristes. Le lendemain, nous avons reçu les organisations syndicales lors d’une audition sur laquelle il y aurait aussi beaucoup à dire, mais que je vais me contenter de résumer pour l’instant : de manière assez unanime, elles ont estimé que le dialogue social ne se portait pas bien dans notre pays, pointant du doigt certaines dispositions des ordonnances. Nous y reviendrons ensuite en détail, si vous le voulez bien. S’agissant des juristes, ils nous ont expliqué que le dialogue social était devenu une formalité, que le droit de négociation était un droit d’adhésion, les délais étant trop courts pour instaurer un véritable rapport de force, que le CSE était souvent mis devant le fait accompli, etc.

En 2017, à l’Assemblée nationale, vous avez indiqué que ces ordonnances « bénéfiques à tous » – c’est votre expression – avaient été prises au nom d’une simplification elle aussi « bénéfique à tous ». Pourtant, la fusion des instances représentatives du personnel a souvent conduit à un affaiblissement du dialogue social de proximité – certaines auditions nous l’ont confirmé. Avec le recul, ne pensez-vous pas que cette réforme a déséquilibré le rapport de force au détriment des salariés, notamment dans les PME ?

Mme Muriel Pénicaud. Je le répète, le nombre d’accords collectifs a quasiment doublé et ils n’ont pas porté sur des sujets mineurs. Dans ces conditions, il me paraît difficile de dire que le dialogue social est en panne ; au contraire, cette hausse montre qu’il a bel et bien été renforcé.

Quant à la fusion des instances, elle était en débat depuis très longtemps. En 2010, j’ai rédigé un rapport intitulé « Le bien-être et l’efficacité au travail » avec Henri Lachmann, président du conseil de surveillance de Schneider Electric, et Christian Larose, vice-président du Conseil économique, social et environnemental (Cese) et membre du bureau confédéral de la Confédération générale du travail (CGT). Il nous avait été demandé par le Premier ministre de l’époque, François Fillon. Nous avons été longtemps très en retard en matière de santé au travail, en raison, précisément, de l’émiettement des instances. Dans l’entreprise, les sujets économiques, les cas individuels et la santé étaient abordés dans des instances différentes. Résultat : aucun représentant du personnel n’avait une vue d’ensemble, contrairement au directeur général ou à la direction des ressources humaines (DRH), ce qui créait une dissymétrie.

Nous avons donc décidé de créer une instance unique et de renforcer son pouvoir de négociation, ce qui lui donne beaucoup plus de poids. Je peux vous confirmer que les chefs d’entreprise la prennent très au sérieux parce que ses membres ont accès à tous les dossiers – économiques, sociaux, de santé au travail. Ce dernier aspect, outre la dimension humaine, qui est fondamentale, est souvent un révélateur de dysfonctionnements du management, de l’organisation ; on y remédie en traitant ces derniers. La création d’une instance unique correspond à une vision plus holistique. Dans certaines entreprises où les partenaires sociaux se sont approprié cet outil, des accords très innovants ont été conclus.

Ce changement culturel ne peut se faire en un jour. Il est fondé sur l’idée que la négociation crée de la norme, ce que reconnaissent d’ailleurs le Conseil d’État et la Cour de cassation. La négociation contribue à la norme sociale dans le cadre défini par la loi. Il y a maintenant des commissions sur la santé au travail au sein des CSE, mais elles jouent un rôle très différent des instances antérieures, qui étaient complètement à part et n’avaient quasiment pas de moyens d’action sur les autres représentants du personnel. Dans certaines entreprises où il existait un grand nombre de comités, de sous‑comités et de commissions, la situation a beaucoup changé.

Les ordonnances ont aussi cherché à remédier à un autre souci des organisations syndicales : la relève. Tous les syndicats rencontrent des difficultés pour mobiliser les jeunes générations et font face à une baisse du nombre de candidats pour être représentant des salariés. Si la négociation progresse sur le plan quantitatif, l’évolution est très variable d’une entreprise à l’autre sur le plan qualitatif. Dans certaines entreprises, il y a un vrai dialogue économique et social au sein du CSE et une vision holistique qui permet d’anticiper les difficultés ou les opportunités économiques de l’entreprise, de traiter les sujets de négociation habituels sur le plan social ainsi que la santé au travail, qui était souvent abordée de façon séparée auparavant. Que cela prenne du temps et que cela ne soit pas parfait partout, je vous le concède volontiers. Cependant, les discussions que je peux avoir avec les partenaires sociaux sur le terrain me confortent dans l’idée qu’à long terme, cela permettra un dialogue renforcé, plus stratégique, plus écouté.

M. le rapporteur. Il ne vous paraît donc pas pertinent de dire que les CSE sont noyés sous les compétences alors que les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) disposaient de pouvoirs propres ?

Mme Muriel Pénicaud. Si la réforme a élargi le champ de compétences des instances, cela ne signifie pas une addition de compétences, mais le passage à une vision plus globale : les CSE font le lien entre l’économique et le social. Au début, cela soulève de nombreuses questions, notamment de formation, pour que chacun soit capable d’utiliser pleinement son pouvoir de négociation dans les domaines de l’économie ou de la santé au travail. Dans ce dernier domaine, notre rapport, vieux de quinze ans, est malheureusement encore d’actualité. Nous y écrivions que 80 % des problèmes de santé au travail ou d’accidents de travail étaient liés à l’organisation et au management, domaines qui relèvent de la direction générale. Un CHSCT ne pouvait pas le voir ; un CSE peut désormais s’en saisir. Encore faut-il que, petit à petit, tout le monde puisse intégrer l’ensemble du champ.

M. le rapporteur. Considérez-vous que les CSE ont assez de moyens et d’élus pour fonctionner et jouer leur rôle avec le plus d’efficience possible ?

Mme Muriel Pénicaud. Nous avons essayé d’être logiques : les moyens font aussi l’objet d’une négociation. Dans certaines entreprises, tout se passe très bien. Dans d’autres, c’est plus difficile. Mais si vous ne faites pas confiance aux acteurs de terrain, vous êtes sûr de ne pas progresser. En leur faisant confiance, vous constatez que certains vont plus vite que d’autres. Il existe certainement des entreprises où des problèmes de moyens existent – ce qui doit donner lieu à négociation. Dans d’autres entreprises, le dialogue social a évolué et s’est renforcé.

M. le rapporteur. Au cours de précédentes auditions, nous avons aussi abordé la question du barème d’indemnités prud’homales, visant à sécuriser les employeurs sur le plan juridique. Il ressort de beaucoup d’auditions – et c’est aussi ma conviction personnelle – que la réforme a eu pour effet de banaliser les licenciements abusifs, en les rendant prévisibles et non dissuasifs et en permettant aux employeurs de les intégrer comme un coût susceptible d’être anticipé. Avec le recul, ne considérez-vous pas que les opposants à la réforme avaient raison sur ce point, que cet encadrement est un outil de prévision favorisant les licenciements plus que les embauches ?

Mme Muriel Pénicaud. Les ordonnances ont été publiées le 23 septembre 2017. Durant les mois suivants, j’ai sillonné la France avec mon équipe pour rencontrer des chefs d’entreprise – en particulier de PME –, des salariés et des syndicats. Nous voulions leur expliquer ce que nous avions fait et pourquoi nous l’avions fait, après – je le rappelle –300 heures de concertation avec les partenaires sociaux et de longs débats à l’Assemblée nationale et au Sénat. Les chefs d’entreprise de TPE-PME, entreprises qui représentent plus de 50 % de l’emploi en France, s’exclamaient tous : « On n’a plus peur d’embaucher ! » L’insécurité juridique est un frein à la création d’emplois. Certains entrepreneurs préféraient renoncer à des marchés potentiels plutôt que d’embaucher de nouveaux salariés pour y faire face. Ils se disaient que s’ils perdaient des marchés, ils resteraient pendant des années dans une situation ingérable, dans une incertitude susceptible de faire couler leur structure. Côté entreprises, cette réforme a eu un effet libérateur. J’ai cité les chiffres : il n’y a jamais eu autant de CDI que depuis les ordonnances. Si une réforme qui permet de créer plus de CDI ne protège pas…

Quant aux salariés, beaucoup ne saisissaient pas les prud’hommes en raison des délais et parce qu’ils n’avaient aucune certitude au sujet de l’indemnité qu’ils étaient susceptibles d’obtenir. Lorsque son montant peut varier du simple au quadruple d’un conseil de prud’hommes à l’autre pour le même préjudice, on réfléchit avant de se lancer dans une procédure judiciaire. Saisir la justice est éprouvant et, quelle que soit la nature de la procédure, cela n’est jamais une partie de plaisir. L’insécurité juridique est l’élément le plus paralysant.

Les planchers que nous avons instaurés n’ont pas été sortis du chapeau. Ils ont été calculés à partir des montants effectivement décidés par les prud’hommes. En même temps, nous avons augmenté de 25 % le montant de l’indemnité légale pour les dix premières années d’ancienneté, ce qui a abouti à un dispositif plus sécurisant pour le salarié et augmentant ses chances d’être mieux indemnisé.

On me dira qu’il y aura toujours quelques entreprises pour détourner un dispositif – quel qu’il soit – et pour aller à l’encontre de la volonté de la puissance publique. À ma connaissance, cette attitude est très minoritaire s’agissant du sujet dont nous discutons. Un chef d’entreprise ne passe pas sa journée à se demander comment il va licencier. Il se préoccupe surtout de savoir comment recruter et réussir. S’il licencie, c’est qu’il a un problème. Les instances de contrôle et le droit du travail sont destinés à traiter le cas des entreprises qui ne se comporteraient pas comme elles le devraient.

Faute de repères, il n’était pas non plus facile pour les conseillers prud’hommes – qui sont des juges non professionnels issus du monde du travail – de déterminer le montant des indemnités.

La réforme visait pour l’essentiel à passer d’une espèce de loterie, l’indemnisation variant d’un département à l’autre, à un dispositif reposant sur beaucoup plus de négociation et de médiation. Je considère que c’est un progrès pour le système social.

M. le rapporteur. Vous avez estimé que les abus étaient très minoritaires. Avez-vous pu les quantifier, tant avant la publication des ordonnances que par la suite, lors du suivi de leur application ?

Mme Muriel Pénicaud. Connaissez-vous un seul dispositif public qui ne fait pas l’objet d’abus, quel que soit le domaine concerné – économique, fiscal, social, écologique ou industriel ?

Nous avons bâti le système en renforçant le rôle des acteurs. Les conseillers prud’hommes sont des acteurs patronaux et syndicaux qui assurent une grande partie de la régulation en analysant les dossiers dont ils sont saisis. Si une entreprise fait n’importe quoi, ils vont s’en apercevoir. Quelques entreprises qui abusent peuvent certes passer entre les gouttes, mais faire confiance aux acteurs constitue le fondement essentiel de cette régulation. J’ajoute que l’inspection du travail joue un rôle de contrôle a posteriori.

Je crois vraiment à la régulation par les acteurs et ce dispositif confie un rôle souverain au dialogue social, afin de permettre aux points de vue patronaux et syndicaux de se compléter. Il ne faut d’ailleurs pas croire que le patronat défend toujours les patrons et les organisations syndicales défendent toujours les salariés au sein des conseils de prud’hommes. Tous ces conseillers sont des juges et ils essaient de se faire une opinion de manière indépendante. Il faut leur faire confiance.

M. le rapporteur. Beaucoup de dispositifs publics donnent en effet lieu à des abus. Mais je relève une différence de perspective : lorsque l’on discute dans cette assemblée des aides sociales, et notamment du revenu de solidarité active (RSA), les débats se focalisent en général sur quelques abus plutôt que sur les mesures elles-mêmes.

En me replongeant dans les débats parlementaires, politiques et médiatiques, j’ai pu constater que la crainte d’abus occupait une place centrale dans l’argumentation de ceux qui contestaient la réforme instaurant un barème de dommages et intérêts pour les conseils de prud’hommes. Il est donc particulièrement nécessaire de disposer d’une évaluation des abus liés à cette dernière.

Mme Muriel Pénicaud. Croyez-vous qu’il n’y avait pas d’abus dans le système précédent, qui ne comportait ni plancher ni plafond ? Il en permettait beaucoup, car il n’y avait pas de points de repère.

Le nouveau système apporte une double sécurité parce qu’il repose, d’une part, sur un barème d’indemnisation basé sur l’expérience et, d’autre part, sur une régulation assurée par des acteurs patronaux et syndicaux responsables – ce qui, même si on ne peut pas complètement les éliminer, limite mécaniquement bien mieux les abus que le système précédent, qui entretenait l’incertitude.

M. le président Denis Masséglia. Quand Mme la ministre m’a fait l’honneur de venir à Cholet pour visiter l’entreprise CAIB, qui fabrique des portes et fenêtres, le taux de chômage était de 9,4 %. Il est désormais de 7,4 %. Cette diminution de deux points représente pratiquement 25 % de chômeurs en moins.

Je suis extrêmement fier de cette réforme. À l’époque, on pouvait s’interroger sur l’efficacité des différents dispositifs proposés. Mais les résultats sont là. Faut-il tout détruire et revenir à 9,4 % de chômage ? Il faut savoir se réjouir des résultats positifs. Notre rôle d’élus est de recenser les petits défauts pour apporter des améliorations.

En politique, trop souvent, on fait et on défait, ce qui empêche notre pays d’avancer. Cherchons plutôt à améliorer le dispositif pour le rendre plus efficace et, espérons-le, ramener le taux de chômage à 7 %, puis à 6,5 %.

M. le rapporteur. Nul ne peut prétendre que la situation précédente était parfaite. Il y a tout de même une différence entre un plancher et un plafond, notamment lorsque l’enjeu est la prévisibilité. Quoi qu’il en soit, je perçois une forme de contradiction entre un discours dont la philosophie repose sur la confiance accordée aux acteurs de terrain, pour libérer les énergies, et un dispositif qui, au moyen d’un barème contraignant, corsète les décisions des conseillers prud’hommes – auxquels je rends également hommage.

Mme Muriel Pénicaud. C’est un débat politique, au sens noble du terme. Il n’y a pas de démocratie sans règles – j’imagine que tout le monde en est convaincu à l’Assemblée. Mais il existe une différence entre, d’une part, une règle qui décrit dans le menu détail ce qui doit être fait – ce qui est la définition de la bureaucratie, à l’opposé de la démocratie vivante – et, d’autre part, le fait de fixer un cadre à l’intérieur duquel les acteurs disposent d’une marge de manœuvre importante, afin de pouvoir innover et s’adapter. Cela vaut de manière générale, qu’il s’agisse de la sphère sociale, des territoires, des entreprises ou des branches professionnelles. Nous avons d’ailleurs dynamisé la négociation collective au sein de ces dernières. Je ne vois donc pas où est la contradiction que vous mentionnez.

Les prud’hommes se plaignaient de ne pas avoir de points de repère et constataient eux-mêmes que leurs pratiques étaient très différentes d’un conseil à l’autre. Encore une fois, donner de la visibilité et de la prévisibilité permet de créer un climat de confiance, donc des emplois. Les acteurs économiques et sociaux gardent le pied sur la pédale de frein s’ils ne peuvent pas compter sur la prévisibilité juridique. Ils prennent déjà tous les risques liés au marché et à leur activité ; ils ne peuvent pas supporter en plus le risque juridique. Il appartient donc à la puissance publique d’établir un cadre qui offre une marge de manœuvre et de négociation importante. Je le répète : c’est ce que nous avons fait en renforçant les négociations au sein des entreprises.

Le cadre que j’évoquais doit aussi garantir l’équité, laquelle fait partie de l’égalité mentionnée par la devise de la République. Or ceux qui saisissaient le conseil des prud’hommes trouvaient injuste qu’un préjudice identique ne soit pas indemnisé de la même manière.

La règle que nous avons fixée donne des marges de manœuvre aux acteurs tout en apportant de l’équité. Elle est lisible, transparente et elle permet d’anticiper les décisions. C’est ce que nous essayons de faire dans tous les domaines juridiques et il n’y a pas de raison que cette approche ne vaille pas pour les prud’hommes.

M. le rapporteur. La jurisprudence permettait quand même à l’employeur de ne pas avancer complètement à l’aveugle. On pouvait s’y référer pour anticiper. Je ne dis pas que la situation antérieure était parfaite, mais l’insécurité juridique n’était pas totale.

Mme Muriel Pénicaud. La jurisprudence peut être normative dans certains domaines. S’agissant des prud’hommes, elle était seulement indicative avant les ordonnances de 2017. Elle relevait de l’information et n’offrait aucune prévisibilité.

M. le rapporteur. La réforme du périmètre d’appréciation des difficultés économiques a permis à des filiales françaises d’entreprises ayant une activité florissante au niveau international de licencier plus facilement. Pensez-vous que la logique de cette réforme est compatible avec la protection effective de l’emploi sur notre territoire, priorité absolue pour l’ensemble des acteurs publics ?

Mme Muriel Pénicaud. J’avoue avoir du mal à comprendre lorsque l’on dit que les entreprises en ont profité pour licencier. Encore une fois, ce n’est pas le but des entreprises. Elles cherchent à obtenir des marchés, à réussir, à embaucher, à engendrer plus de revenus et à se développer. Lorsqu’une entreprise gérée normalement licencie, c’est parce qu’elle fait face à une difficulté économique.

Avant la réforme, il y avait un flou, notamment parce que le périmètre du reclassement et celui de l’appréciation du motif économique étaient différents. On demandait un reclassement urbi et orbi. C’était parfois honteux. On proposait à des salariés des postes en Asie du Sud-Est, avec des rémunérations dérisoires, mais l’entreprise avait respecté la loi, car elle avait fait des propositions. On prenait en effet en compte l’ensemble de l’entité juridique. Or beaucoup de grands groupes français – et on peut se réjouir qu’ils existent – réalisent environ 10 % de leur activité en France, mais font l’essentiel de leurs profits grâce à leurs filiales internationales – et pourtant, ils restent en France.

Dans ces groupes, si une filiale était en difficulté – qu’elle soit située en Pologne, en Chine ou en France –, le motif économique était apprécié au niveau du périmètre juridique et économique de l’ensemble de l’entité. Mais en quoi le fait que des filiales florissantes soient installées à Djakarta ou ailleurs dans le monde aide-t-il les salariés de l’entreprise de Cholet ? Cela ne va pas sauver leur emploi si ce que fabrique leur entreprise n’a plus de débouchés. L’emploi repose sur une activité rentable. Que le groupe fasse des bénéfices ailleurs ne résout pas le problème des salariés et de l’entreprise en difficulté.

Par les ordonnances, nous avons voulu renforcer l’obligation de reclassement. C’est la raison pour laquelle nous avons harmonisé le périmètre du motif économique et celui du reclassement, pour que l’on fasse aux salariés des propositions réelles et concrètes en France. Comme je l’ai dit, on faisait auparavant, pour la forme, des listes d’emplois à l’autre bout du monde, alors que l’on savait qu’elles ne pouvaient convenir à aucun salarié. C’était très humiliant pour les personnes concernées, car on faisait comme si elles n’avaient ni qualification ni famille. Avec la réforme, l’obligation de reclassement devient beaucoup plus forte, surtout si le groupe se porte bien par ailleurs et peut avoir d’autres filiales sur place.

Dans la pratique, 99,99 % des personnes souhaitent retrouver un emploi dans leur pays. Pour celles qui veulent s’expatrier, on trouve toujours des solutions. Obliger les entreprises à faire des propositions de reclassement en France est plus respectueux vis-à-vis des salariés.

M. le rapporteur. Vous décrivez ces propositions de reclassement indécentes comme quelque chose de courant avant la publication des ordonnances. Disposez-vous de données chiffrées sur l’ampleur de cette pratique ?

Mme Muriel Pénicaud. Je n’ai plus tous les chiffres en tête – c’était il y a huit ans. Mais c’était lié à l’obligation légale, et c’est bien ce qui était troublant : ce n’était pas indécent dans la mesure où il s’agissait de respecter la loi ; une entreprise qui n’aurait pas fait des propositions dans le monde entier aurait été dans l’illégalité.

Quand la loi est absurde, il faut la changer. Désormais, les entreprises n’ont plus d’excuses. Elles doivent aider les salariés à se reclasser.

M. le rapporteur. Vous avez dit que les licenciements ne constituaient pas un objectif pour les entreprises. Pour vous, il n’existe que des licenciements résultant d’un impératif économique, et aucun n’est motivé par le désir de distribuer plus de dividendes aux actionnaires ou par des raisons boursières ? Les entreprises licencieraient seulement lorsqu’elles y sont vraiment contraintes et seraient toutes mues par une volonté absolue d’embaucher ?

Mme Muriel Pénicaud. Nous parlons des licenciements collectifs et non des licenciements individuels.

Plusieurs raisons peuvent amener une entreprise à faire un plan de licenciements. Dans le cas où elle fait face à des difficultés économiques, le plan de licenciements peut malheureusement arriver de manière brutale, car elle n’a pas beaucoup de temps devant elle – ni d’ailleurs de moyens.

Il y a ensuite des raisons liées à la productivité, aux changements technologiques et à l’évolution du marché. Par exemple, comme le parc automobile va être complètement transformé avec le passage au moteur électrique, on ne fabriquera plus de pots d’échappement. Dans le même temps, l’arrivée de l’intelligence artificielle apporte des changements technologiques. Emploiera-t-on demain autant de salariés dans certains secteurs ? En tout cas, les compétences recherchées seront différentes.

On en revient au sujet de l’anticipation, car celle-ci peut changer beaucoup de choses. Il faut en débattre dans le cadre du CSE, car plus l’entreprise anticipe en amont les évolutions technologiques et du marché, plus il sera possible de prévoir des reconversions internes et de faire évoluer les compétences.

Nous avons fait deux voyages d’étude avec les partenaires sociaux avant d’élaborer la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, l’un en Suisse, pour aborder le sujet de l’apprentissage, et l’autre au Danemark, à propos de la question dont nous discutons.

Dans les pays nordiques, on a coutume de dire qu’on ne protège pas les emplois, mais les personnes. Nul ne doit se retrouver sans solution. Pourquoi ? Parce que les emplois évoluent sans cesse. La transition écologique et l’intelligence artificielle transforment toutes les chaînes de valeur ; la population vieillit ; il faut faire évoluer les emplois pour tenir compte des aspirations des jeunes générations. Pour toutes ces raisons, on peut encore moins qu’auparavant imaginer qu’il serait possible de figer l’emploi dans son état actuel. Les bouleversements à venir vont être beaucoup plus importants. D’où la nécessité de bâtir des dispositifs permettant d’accompagner en cas de difficultés, mais aussi d’anticiper.

La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel est le pendant des ordonnances. Elle met l’accent sur la formation, ce qui est indispensable : on va exercer en moyenne une dizaine de métiers au cours de sa vie et 65 % des emplois qu’occuperont nos enfants n’existent pas encore.

Notre responsabilité consiste à faire en sorte que personne ne soit laissé au bord du chemin. L’intention qui guide les dispositifs doit être ferme, mais ils doivent être agiles pour pouvoir bien accompagner et anticiper des évolutions qui vont concerner toutes les entreprises, quel que soit leur secteur d’activité. L’intelligence artificielle va avoir beaucoup de conséquences pour les cols blancs, aussi bien dans le domaine juridique que dans la finance, les ressources humaines et même les ventes et le marketing. C’est nouveau pour eux.

Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de créations d’emplois. On compte autant d’emplois créés que d’emplois détruits, mais il y en a aussi beaucoup qui se transforment. Dans les années qui viennent, les entreprises vont devoir anticiper pour éviter d’en arriver à des plans de licenciements collectifs et, si elles sont contraintes d’en faire, pour prévoir la reconversion des salariés.

M. le rapporteur. Lors de sa création, la rupture conventionnelle collective avait été saluée par vous-même et votre majorité comme une alternative négociée au licenciement. Mais n’a-t-elle pas également permis à certaines entreprises de contourner les obligations sociales associées à un PSE en réduisant les droits des salariés concernés ?

Mme Muriel Pénicaud. C’est toujours la même philosophie : le premier verrou de sécurité – qui est fort – réside dans le fait qu’une RCC est subordonnée à l’existence d’un accord collectif approuvé par la majorité des représentants du personnel.

La RCC a été peu utilisée et reste relativement confidentielle : on en compte quelques dizaines par an, soit beaucoup moins que des PSE – je ne sais pas s’il s’agit d’une bonne ou d’une mauvaise nouvelle de votre point de vue. En tout état de cause, ce dispositif constitue un progrès par rapport au fameux plan de départ volontaire, qui était très peu encadré. Les obligations sont désormais beaucoup plus précises.

Deuxième verrou de sécurité : l’accord doit être validé par l’administration.

Enfin, il y a un troisième verrou : lorsqu’une RCC a été négociée, on ne peut pas imposer à un salarié de quitter l’entreprise. Il doit être volontaire.

Cette triple sécurité, prévue à la suite de nombreuses discussions avec les partenaires sociaux, explique d’ailleurs peut-être pourquoi on n’a pas eu beaucoup recours à ce dispositif.

M. le rapporteur. Une entreprise peut recourir à un accord de performance collective (APC) pour baisser les salaires ou augmenter le temps de travail même si elle ne fait pas face à des difficultés économiques avérées. Cela conduit à s’interroger sur le sens donné à la négociation collective, dont le renforcement était l’un des objectifs des ordonnances.

Avec cette libéralisation, n’avez-vous pas affaibli la protection offerte par le droit du travail ? Alors que la négociation était jusqu’alors associée au progrès, n’est-elle pas parfois devenue synonyme de régression ?

Mme Muriel Pénicaud. Je vais vous donner la même réponse : il faut un accord majoritaire.

Pourquoi avoir prévu plusieurs dispositifs ? C’est parfois nécessaire face à des situations différentes. La RCC et l’APC n’ont pas vocation à remplacer le PSE. Une entreprise peut avoir à prendre des décisions structurantes lorsqu’elle est en difficulté, mais aussi lorsque son activité croît. Des entreprises qui sont dans ce dernier cas utilisent l’APC car elles ont besoin de beaucoup se transformer. Cela peut entraîner des bouleversements pour les salariés et susciter chez eux des interrogations sur la pérennité de leur emploi et sur la nécessité de se former. La négociation d’un APC est l’occasion de discuter de tous ces sujets.

Je fais confiance aux partenaires sociaux, donc à la négociation. Lorsqu’ils élaborent un accord, ils pensent à l’intérêt à court, moyen et long terme pour l’entreprise, l’emploi et les salariés. C’est ce qui est intéressant avec l’APC.

M. le rapporteur. Nous avons eu tout à l’heure un débat passionnant sur votre bilan en matière d’emploi, et celui du Président de la République et de la précédente majorité. L’un des objectifs de vos ordonnances était d’améliorer la situation de l’emploi en facilitant les embauches – c’est du moins ce qui était annoncé. Sans rouvrir le débat, toujours long et pénible, sur la réalité des chiffres du chômage, compte tenu des effets des radiations, notamment, on peut s’interroger sur l’augmentation du nombre de contrats courts et de temps partiels subis. N’est-ce pas de nature à nuancer un peu le satisfecit que vous donnez, avec d’autres, à la politique menée en matière d’emploi ?

Mme Muriel Pénicaud. Quelques mots, quand même, au sujet des chiffres. J’ai évoqué le taux d’emploi : c’est un chiffre de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) que personne, à ma connaissance, ne conteste. S’agissant du chômage, je n’ai pas cité les chiffres de France Travail, qui est certes très honorable mais a une responsabilité en matière de gestion et donc une approche différente. Pour les comparaisons internationales, je cite toujours les chiffres du Bureau international du travail, qui est un organisme associant les gouvernements et les partenaires sociaux – patronat et syndicats. Les chiffres du BIT, utilisés par le Fonds monétaire international (FMI), l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ou encore l’Organisation des Nations unies (ONU) et que personne ne conteste, traduisent une approche différente ; ils ne reposent pas sur les inscriptions. Les taux de 7,4 % et 9,4 % que j’ai cités sont des chiffres du BIT. Ils permettent de sortir du débat, légitime, sur les questions consistant à savoir qui est demandeur d’emploi et comment il faut compter les demandeurs – ce sont des questions fines, auxquelles il n’y a pas de réponse unique. Je pense qu’il est bon de se référer, pour les débats généraux, à une définition qui n’est pas contestée sur le plan international.

Le nombre de CDI augmente et les emplois courts se développent à certaines périodes. Il y a, je l’ai dit, plus de 4 millions d’embauches en CDI chaque année, ce qu’on n’avait jamais vu auparavant, et 86 % des salariés sont en CDI. Mon inquiétude est plutôt sectorielle. Le CDI est le modèle principal, de façon massive, et il se développe, notamment depuis les ordonnances, mais pas seulement – même si on ne peut pas tout mettre à leur crédit, il est sûr qu’elles ont contribué à ce mouvement. Néanmoins, certains secteurs ont tendance à fonctionner avec une majorité de salariés précaires. Ce qui est compliqué, c’est qu’il s’agit parfois de secteurs dans lesquels des jeunes trouvent un premier emploi et que certains d’entre eux ne veulent pas de CDI, ce qui correspond à une évolution sociologique. En effet, ils auraient l’impression de s’engager à trop long terme – en fait, on peut démissionner quand on est en CDI, mais leur perception est différente. Il faut donc faire attention dans certains secteurs ; c’est une question de proportion.

L’emploi précaire permet fréquemment de mettre le pied à l’étrier. Nous avons ainsi créé les CDI intérimaires, qui aident souvent à entrer progressivement dans l’emploi, et les CDI d’insertion, afin d’essayer de mixer les approches. Par ailleurs, des gens cherchent un emploi pour quelques mois, parce qu’ils ne veulent pas travailler toute l’année. Dans une certaine proportion, les emplois à court terme répondent à une demande sociale et à un besoin des entreprises. Mais quand un secteur en fait un système, je partage votre inquiétude : l’emploi à court terme est dès lors subi et non pas choisi. Il faut être vigilant dans certains secteurs d’activité.

M. le rapporteur. Vous reconnaîtrez tout de même que les CDI sont désormais moins protecteurs qu’avant les ordonnances, notamment du fait de l’encadrement des indemnités en cas de licenciement abusif.

Le contrôle économique des licenciements reste du ressort du juge – il en a beaucoup été question lors d’auditions précédentes – alors que certaines décisions sociales relèvent clairement d’arbitrages et de stratégies de nature financière. Pourquoi ne pas avoir renforcé le rôle de l’administration dans la validation des PSE afin de prévenir les licenciements d’opportunité et d’aborder les licenciements économiques en amont, plutôt qu’une fois que tout est déjà bien avancé ?

Mme Muriel Pénicaud. Il faut toujours faire un choix. On ne peut pas à la fois dire que c’est le juge qui a le dernier mot, comme c’est le cas dans notre droit – nous n’avons pas introduit de changement en la matière car nous trouvions que c’était tout à fait légitime –, et donner à l’administration plus de responsabilité. Tout dépend des sujets : pour certains d’entre eux, c’est plutôt l’administration qui peut contrôler, arbitrer, et pour d’autres c’est plutôt le juge. Mais pour le même sujet, vous ne pouvez pas donner plus de responsabilité à l’administration et au juge ; autrement, leurs compétences vont se recouper.

M. le président Denis Masséglia. Je viens d’un territoire très industriel – il l’est trois ou quatre fois plus que la moyenne nationale. Ceux qui se plaignent de l’absence de signatures de CDI, ce sont plutôt les employeurs : ils me disent qu’ils voudraient en conclure, mais que les salariés veulent travailler simplement six mois, puis faire une petite pause ou aller exercer un autre métier. Vous dites, monsieur le rapporteur, que le CDI est moins protecteur qu’avant, mais on voit sur le terrain, du moins dans certains territoires – j’imagine que la réalité peut être différente là où le taux de chômage est de 15 % ou 18 % –, que les agences d’intérim ne manquent pas de salariés. Des jeunes, principalement, se tournent vers elles pour faire quelques missions et découvrir les métiers avant de s’installer, plus tard, dans un emploi en CDI. Celui‑ci, d’après ce qu’on me dit, n’est plus l’alpha et l’oméga pour une partie de nos concitoyens. D’ailleurs, de plus en plus de banques accompagnent dans leur recherche d’emploi des jeunes qui ne connaissent plus de CDI ; elles ont bien vu dans quel sens évoluait la société.

Mme Muriel Pénicaud. Je ne peux qu’aller dans votre sens : c’est une véritable évolution sociologique, un peu déroutante pour les générations qui voyaient le CDI comme le Graal en matière d’emploi.

Le CDI est toujours autant protégé. Je suis vraiment en désaccord avec vous sur ce point, monsieur le rapporteur. En revanche, il existe maintenant une demande de flexibilité. Pendant des décennies, on a vu, en synthèse, la flexibilité comme quelque chose que l’entreprise imposait aux salariés. Cela existe encore, mais il y a maintenant une flexibilité qui n’est plus subie, on le voit partout dans le monde – je voyage beaucoup –, chez les jeunes générations mais aussi, depuis la crise sanitaire, chez les quadragénaires, par exemple, qui n’ont pas forcément envie de travailler de façon continue toute l’année, mais souhaitent plutôt travailler à temps partiel, notamment. C’est aussi vrai chez les hommes, y compris pour s’occuper des enfants, ce dont je me réjouis.

Il s’agit d’une demande sociale de souplesse beaucoup plus grande en ce qui concerne les formes d’emploi. On inventera peut-être un jour une solution pour combiner le CDI et la souplesse, comme nous l’avons fait, un peu, pour l’intérim et l’insertion – cela reste des dispositifs marginaux. Ce qu’on attend, c’est un cadre sécurisant mais qui ne contraint pas à aller au travail toute l’année, de façon régulière, 35 heures par semaine au même endroit, avec les mêmes collègues et le même chef. On souhaite aussi découvrir des choses, continuer à apprendre. Il faudra répondre à cette demande dans les années qui viennent.

M. le rapporteur. J’en viens à un sujet qui a souvent été évoqué durant nos travaux : les aides publiques aux entreprises. C’était vrai lorsque vous étiez au Gouvernement, cela le reste et c’était déjà le cas avant que vous preniez vos fonctions : de nombreuses aides publiques sont versées à des entreprises qui procèdent ensuite à des licenciements massifs. Bien des exemples ont été cités lors de nos auditions. Ne croyez-vous pas que l’absence de conditionnalité des aides publiques constitue une faille dans les dispositifs mis en place par l’État pour favoriser ou protéger l’emploi ?

Mme Muriel Pénicaud. Il me semble qu’il faut distinguer deux types d’aides publiques.

S’agissant de celles destinées à l’investissement, aux infrastructures, à la recherche, à des plans de développement, la puissance publique peut légitimement chercher à s’assurer, en contrepartie de leur versement, qu’un certain volume d’emploi soit créé dans les années qui suivent et à faire en sorte que l’entreprise en soit comptable. C’est une sorte de co‑investissement : la puissance publique contribue, en apportant des moyens, au développement de l’entreprise. Cela peut faire partie des négociations. Cela me fait penser à ce qui s’est passé lors des Jeux olympiques : on a prévu une conditionnalité pour toutes les entreprises qui obtenaient des marchés, à savoir 15 % d’emplois relevant de l’insertion.

Par ailleurs, la conditionnalité fonctionne mieux si l’on s’y prend en amont. La décréter après coup n’est pas très efficace. Il vaut mieux la négocier au moment où l’aide est attribuée, que ce soit par l’État ou par les collectivités territoriales, qui investissent beaucoup dans les territoires pour aider les entreprises à se développer.

Les allégements de charges sociales constituent une autre question. La France est le pays où leur taux est le plus élevé au monde, ce qui pèse beaucoup sur le travail – je parle des charges patronales et salariales. Les allégements ne sont pas des cadeaux faits aux entreprises : il s’agit de soutenir l’emploi, et les charges grèvent beaucoup les salaires. C’est également vrai pour les charges patronales, qui sont incluses dans le coût du travail. Celui-ci est apprécié par l’entreprise en fonction de la valeur qu’elle reconnaît à ce que fait le salarié. Et il faut prendre en compte le salaire net, le salaire brut et le salaire superbrut payé par l’entreprise. Je ne considère pas que les allégements de charges soient, au sens strict, des aides aux entreprises : ils résultent d’une forme de régulation entre l’impôt et la fiscalité du travail, qui relève d’un débat de société que l’on est amené à remettre sur le tapis, car on a beaucoup alourdi les charges depuis vingt ou trente ans.

S’agissant du premier type d’aides, je pense qu’il faut parfois négocier en amont. Si une entreprise fait un très gros investissement en bénéficiant d’une aide publique et, six mois ou un an après, décide finalement de laisser tomber, il y a un problème. Elle devrait rembourser.

M. le rapporteur. Je ne m’engagerai pas, compte tenu de l’heure, dans un débat sur les exonérations de cotisations sociales. Je préfère essayer de terminer cette audition sur un point d’accord entre nous. Vous avez évoqué l’idée que s’il devait y avoir une conditionnalité, ce qui correspond plutôt à mon penchant, il serait plus efficace qu’elle soit prévue avant le versement de l’aide publique. Dans le cas où les obligations ne seraient pas respectées, trouveriez-vous légitime que la puissance publique demande un remboursement de certaines aides à des entreprises qui auraient distribué des dividendes à leurs actionnaires et, dans le même temps, licencié massivement ?

Mme Muriel Pénicaud. Il faudrait entrer davantage dans les détails. Il conviendrait d’abord que ce soit légal : une fois qu’elle a été versée à l’entreprise, l’aide publique lui appartient. Un dispositif juridique est donc nécessaire. Par ailleurs, si l’entreprise licencie dans une entité qui n’a rien à voir avec l’aide versée, on en revient à la discussion que nous avons eue tout à l’heure.

Quand on aide une entreprise qui fait de gros investissements, notamment dans des infrastructures, il existe une vision de moyen ou long terme. On peut donc envisager une rétrocession, une compensation ou une mise à disposition des infrastructures à d’autres entreprises – de multiples formes sont possibles, et la question mérite d’être explorée. Lorsque la puissance publique et une entreprise co-investissent dans des projets importants pour développer des territoires et des emplois, elles ont un intérêt commun et sont donc solidairement responsables.

M. le président Denis Masséglia. Monsieur le rapporteur, j’aimerais bien que vous me donniez la liste des aides qui ne sont pas conditionnées. Elles le sont toutes : le crédit d’impôt recherche, par exemple, n’est pas attribué sans lien avec une dépense en France.

M. le rapporteur. Je me fonde sur ce que nous ont dit, ici même, des membres de la Cour des comptes. Dans notre pays, les aides publiques ne sont ni conditionnées, ni contrôlées, ni plafonnées. La condition posée est de façade : sans contrôle, elle n’est pas réelle. Nous avons reçu des entreprises qui ont bénéficié du crédit d’impôt recherche mais ont délocalisé une part de leur recherche et développement. On pourrait aussi parler du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) : il n’était pas conditionné et c’était d’ailleurs l’objet des débats lors de sa transformation.

J’aurai plaisir à vous démontrer, aide par aide, l’absence de conditionnalité soulignée par la Cour des comptes. Celle-ci nous a invités, avec le vocabulaire et la réserve qui lui sont propres, à être plus rigoureux à l’égard de l’argent public versé dans le cadre des aides – c’est ainsi, en tout cas, que j’ai perçu ce qui nous était dit.

M. le président Denis Masséglia. Je crois que nous serons tous d’accord sur le fait que le crédit d’impôt recherche est une aide liée aux dépenses en matière de recherche : si un crédit d’impôt est accordé, c’est par principe sur la base d’une dépense engagée. En cas de licenciements, la dépense baissera et le crédit d’impôt aussi, de façon proportionnelle. Mais nous ne sommes pas là pour débattre entre nous – nous le ferons peut-être une fois que les auditions seront terminées.

Madame la ministre, je vous remercie. Vous pourrez adresser au rapporteur tout document ou toute information que vous jugeriez utile pour les travaux de notre commission.

La séance s’achève à quinze heures quinze.


Présences en réunion

Présents. – M. Benjamin Lucas-Lundy, M. Denis Masséglia