Compte rendu
Commission
des affaires économiques
– Examen pour avis des crédits budgétaires « Outre-mer » du projet de loi de finances pour 2026 (n° 1906) (M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis). 2
Lundi 3 novembre 2025
Séance de 17 heures
Compte rendu n° 17
session ordinaire de 2025-2026
Présidence de M. Pascal Lecamp, Vice-président,
puis de
M. Stéphane Travert, Président
— 1 —
La commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur le rapport de M. Jospeh Rivière, les crédits budgétaires « Outre-mer » du projet de loi de finances pour 2026 (n° 1906).
M. Pascal Lecamp, président. Chers collègues, notre commission est réunie pour achever l’examen des crédits du projet de loi de finances (PLF) pour 2026, dont elle est saisie pour avis, par l’examen des crédits de la mission « Outre-mer ». Pour nous présenter ces crédits, notre commission a désigné comme rapporteur pour avis M. Joseph Rivière, qui a choisi d’étudier plus particulièrement la question de l’agriculture outre-mer dans le cadre de cet avis budgétaire. Je rappelle que ces crédits concernent les programmes 138 Emploi outre-mer et 123 Conditions de vie outre-mer. Après la discussion générale, nous passerons à l’examen des amendements, au nombre de cinquante-deux.
Je donne maintenant la parole à notre rapporteur pour avis afin d’entamer la discussion générale selon les modalités habituelles.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner la mission « Outre-mer » dans le cadre du projet de loi de finances pour 2026. Cet exercice nous permet d’évaluer les moyens alloués aux territoires d’outre-mer et d’en mesurer la cohérence avec les besoins réels et les attentes légitimes de nos concitoyens ultramarins.
Comme il est d’usage, je présenterai d’abord les évolutions de crédits relatives à cette mission, avant d’aborder dans un second temps la question cruciale de l’agriculture dans les départements et régions d’outre-mer, sujet auquel j’ai tenu à accorder une attention toute particulière, étant moi-même descendant d’agriculteur.
Les outre-mer sont évidemment la France, mais une France singulière, forte de près de 2,8 millions de Français répartis sur treize territoires, chacun avec ses contraintes, ses atouts uniques et ses besoins spécifiques. En conséquence, il est impératif que le « réflexe » outre-mer soit systématiquement intégré dans l’élaboration de nos politiques publiques et de nos décisions budgétaires.
Pourtant, le PLF pour 2026 qui nous est présenté prévoit une véritable chute des moyens consacrés à ces territoires, avec une baisse de près de 18 % en autorisations d’engagement (AE), soit 628 millions d’euros en moins par rapport à la loi de finances initiale (LFI) de 2025.
Les deux programmes qui composent la mission outre-mer sont directement concernés par ces coupes budgétaires. Le programme 123, consacré aux conditions de vie en outre-mer, recule de 21 % en autorisations d’engagement, soit 285 millions en moins par rapport à la loi de finances initiale de 2025. Derrière ces chiffres, les crédits pour le logement diminuent de 10 %, les moyens pour l’aménagement du territoire sont réduits de près de 15 %, le fonds exceptionnel d’investissement est quasiment divisé par deux, les aides à l’accès au financement bancaire sont en recul de 21 %. Même les dotations aux collectivités ultramarines subissent de plein fouet ces coupes budgétaires, avec 167 millions d’euros en moins pour le PLF 2026, soit une baisse de 25 % par rapport à 2025.
Quant au programme 138, Emploi outre-mer, les crédits qui y sont consacrés affichent un recul de 16 % en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement (CP), soit un rabot de plus de 343 millions d’euros. Cette baisse traduit la volonté du Gouvernement de détricoter le dispositif issu de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer (Lodeom), qui se trouve amputé de près de 350 millions d’euros.
Or, la Lodeom, qui allège les charges patronales pour soutenir nos petites entreprises, existe pour compenser les difficultés structurelles qui pèsent sur nos économies ultramarines. Réformer ainsi la Lodeom serait un coup terrible porté à l’emploi local, à la compétitivité de nos territoires, à nos TPE, à nos artisans, à nos agriculteurs, à tous ceux qui font vivre nos territoires.
Avec ce budget, le Gouvernement tourne le dos aux outre-mer. Nous refusons cette politique de désengagement. L’État doit cesser de considérer les outre-mer comme une charge budgétaire, alors que nos territoires constituent une richesse inestimable pour la France, un levier économique, un atout de poids pour la dissuasion militaire, un pilier du rayonnement géopolitique. Nous plaidons donc pour un rehaussement des crédits sur la mission outre-mer et la sanctuarisation du dispositif de la Lodeom. Ce budget, tel qu’il est présenté par le Gouvernement, n’est à la hauteur ni des besoins, ni des urgences de nos territoires ultramarins.
En conséquence, par cohérence et par fidélité à mon engagement constant envers nos outre-mer, j’ai mis un avis défavorable sur ces crédits de la mission tels que présentés par le Gouvernement dans le cadre du PLF 2026.
S’agissant de la seconde partie de cet avis budgétaire, j’ai fait le choix de consacrer mes travaux à une question essentielle, l’agriculture dans les départements et régions d’outre-mer. Après avoir échangé avec plus d’une trentaine d’acteurs du monde agricole lors de visites de terrain dédiées à La Réunion, et avoir mené une dizaine d’auditions et de tables rondes pour appréhender les enjeux spécifiques de la Martinique, de la Guadeloupe, de la Guyane et de Mayotte, j’ai pu prendre le pouls de la situation agricole dans les départements et régions d’outre-mer (Drom) en interrogeant les syndicats agricoles, les chambres d’agriculture, les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer), l’Office de développement de l’économie agricole d’outre-mer (Odeadom), le ministère des outre-mer, mais aussi des agriculteurs ultramarins indépendants.
L’agriculture ultramarine recèle ainsi un potentiel considérable, grâce à des terres fertiles, des climats diversifiés et des productions endémiques. La culture de la canne à sucre, par exemple, reste un pilier historique et économique dans les outre-mer, structurant les paysages et permettant de faire vivre des milliers d’ultramarins. De même, la banane, le rhum, la vanille ou encore les fruits tropicaux illustrent le savoir-faire agricole ultramarin et constituent autant de produits d’excellence qui font rayonner ces territoires.
Cependant, ce potentiel s’érode aujourd’hui dangereusement : dans la plupart des Drom, le nombre d’exploitations diminue, la surface agricole utilisée se réduit et les nouvelles générations se détournent de ces métiers qu’ils jugent incertains, contraignants et insuffisamment rémunérateurs. Avec moins de 500 euros de retraite pour la majorité d’entre eux, il faut les comprendre.
Faute de repreneurs, faute de moyens pour moderniser les outils ou simplement pour maintenir leur activité, des exploitations ferment, des terres sont laissées en friche, tandis que de jeunes agriculteurs peinent à trouver des terrains à cultiver. Les taux de chômage restent particulièrement élevés, notamment chez les jeunes, avec 50 % de chômage chez les moins de 25 ans à La Réunion – où je suis élu –, tandis que les agriculteurs manquent cruellement de bras. L’installation agricole reste trop difficile, l’accès aux frontières est limité, les démarches administratives sont lourdes et complexes, tandis que les aides existantes (POSEI, FEADER, aides nationales spécifiques) ne compensent pas les difficultés structurelles sur nos territoires.
Les retards de versement sont chroniques, les agriculteurs indépendants n’en bénéficient que rarement et les disparités entre territoires nourrissent un profond sentiment d’injustice.
L’avis conforme de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) est source de multiples contraintes et d’inégalités juridiques avec l’Hexagone. Pendant ce temps, les difficultés s’accumulent, les exploitants agricoles s’endettent, peinent à investir et voient de plus en plus souvent le fruit de leur travail anéanti par des aléas climatiques dévastateurs, comme l’illustrent le cyclone Belal, la tempête Candice ou le cyclone Garance qui ont récemment frappé La Réunion.
Pourtant, cette situation n’est pas une fatalité. C’est le résultat d’une politique dictée depuis Bruxelles ou Paris, sans réelle compréhension des réalités locales, ni – j’ose le dire – de réelle volonté de compréhension. Outre les difficultés économiques spécifiques de notre territoire, ils doivent faire face à des défis sanitaires et environnementaux considérables. Trop souvent, les ultramarins évoluent dans un paradoxe : ils sont « trop loin » pour bénéficier pleinement de l’espace phytosanitaire européen continental, mais « assez proches » pour se voir appliquer des règles européennes inadaptées à leurs réalités, alors même que leurs voisins ne rencontrent pas les mêmes difficultés.
Par exemple, alors que l’île Maurice, située dans le bassin océanique de La Réunion, est aujourd’hui quasiment autosuffisante en pommes de terre grâce à des semences importées de l’hémisphère Sud, La Réunion reste contrainte par la réglementation européenne à utiliser des semences de provenance européenne, ce qui freine le développement de sa production locale. Il apparaît donc indispensable d’adapter ces réglementations aux spécificités ultramarines, en levant par exemple les obstacles à l’importation de semences ou de plants mieux adaptés aux sols et aux climats de nos territoires. Nos spécificités doivent être entendues.
Elles constituent des singularités dans l’unité et dans l’indivisibilité de la nation.
Les agriculteurs ultramarins ne demandent pas la charité, ils réclament la possibilité de vivre dignement de leur travail. Ils ont besoin de soutien, de visibilité et d’accompagnement, mais également de reconnaissance.
Il convient donc de simplifier l’accès aux aides, de raccourcir les délais de versements, d’encourager la diversification des productions, et de garantir une juste rémunération des producteurs.
Enfin, mon ambition est claire : la souveraineté alimentaire dans les DROM. Nous devons nous donner les moyens d’y arriver. Pour cela, il importe de développer les productions locales, de valoriser les produits ultramarins par rapport aux importations qui concurrencent nos filières de façon déloyale, et de sensibiliser le consommateur à l’importance de privilégier cette production locale.
Redonner à nos territoires ultramarins les moyens de produire, c’est défendre notre souveraineté, notre indépendance et notre dignité nationale.
Il est essentiel d’encourager les exploitants agricoles à développer leur activité et à recruter de la main-d’œuvre agricole déclarée, plutôt que de fragiliser et démanteler le tissu économique existant.
Chaque hectare cultivé en outre-mer représente une victoire pour l’emploi et pour la souveraineté alimentaire. La souveraineté alimentaire, ce n’est pas un slogan, c’est une exigence de tous les jours. Elle ne se décrète pas à Bruxelles ou à Paris, elle se construit sur le terrain, dans les exploitations, avec nos agriculteurs, avec nos concitoyens.
Ne laissons pas les outre-mer à la périphérie, écoutons-les, accompagnons-les et valorisons leur agriculture comme un pilier de prospérité, de développement et de fierté de la nation.
M. Pascal Lecamp, président. Je cède la parole aux représentants des groupes.
M. Julien Gabarron (RN). M. le rapporteur, je vous remercie pour votre présentation et votre engagement. Nous partageons le même constat. Chaque année, la même histoire se répète : de grandes déclarations sur le soutien à l’outre-mer sont affichées, mais dans les chiffres, la réalité est tout autre.
Je souhaite attirer plus particulièrement votre attention sur l’emploi. Dans le PLF pour 2026, le programme 138, Emploi outre-mer, est une nouvelle fois amputé de près de 350 millions d’euros. Cette coupe brutale frappe en plein cœur le dispositif de la Lodeom, soutien essentiel à l’investissement en outre-mer, par des entreprises françaises d’outre-mer. La Lodeom n’est pas un privilège fiscal, elle n’est même pas une aide, mais un levier de compétitivité de nos entreprises face à la concurrence exacerbée des pays limitrophes. Il s’agit d’une compensation vitale pour des entreprises confrontées à des surcoûts structurels – le fret, l’énergie, les matières premières.
Dans les territoires d’outre-mer, produire coûte plus cher, car les ultramarins subissent la concurrence étrangère ; transporter coûte plus cher, car ils subissent l’envolée des prix du carburant ; embaucher coûte plus cher, car ils respectent la loi qui impose un coût du travail européen dans des zones géographiques non européennes à bas salaire. Malgré cela, le Gouvernement décide de réduire l’un des rares leviers qui permettent encore de créer de l’emploi. Le résultat est bien connu de tous : un chômage parmi les plus élevés de France, car les outils qui devraient soutenir l’activité sont méthodiquement affaiblis par Paris.
Les dirigeants de TPE et PME subissent chaque jour la dure réalité. Dans ce contexte, les défaillances d’entreprises explosent ; plus de 10,8 % sur un an dans les outre-mer, particulièrement dans l’hébergement, la restauration et le BTP. Au nom de la rationalisation budgétaire macroniste, on étouffe ces entreprises. On décourage les jeunes d’entreprendre ; on exclut du marché du travail des pères et des mères de famille ; on condamne des territoires entiers à la dépendance de la métropole.
Pour l’ensemble de ces raisons, le RN propose une augmentation budgétée des crédits alloués à l’outre-mer, à hauteur de 700 millions d’euros, pour leur redonner les moyens d’une croissance autonome, pour construire une économie réelle enracinée dans leur territoire, pour permettre à nos jeunes ultramarins de croire encore en l’avenir.
Monsieur le rapporteur, vous qui connaissez parfaitement la réalité de ces territoires, ne pensez-vous pas que cette baisse de 350 millions d’euros risque de mettre en péril des milliers d’emplois et de fragiliser encore un peu plus le tissu économique local ?
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Nos territoires ultramarins sont effectivement fragilisés par de nombreuses injustices, par l’insularité, par des coûts de la vie et du travail plus élevés. Cette coupe budgétaire dans la Lodeom fragilise un peu plus le tissu économique. Lorsque les entreprises fermeront, les salariés seront au chômage et le climat social se dégradera.
Il faut retrouver le bon sens en action, près de chez nous. En replaçant l’activité agricole et l’activité industrielle au cœur du jeu, nous pourrons offrir des avancées à la population de La Réunion qui ne demande qu’une chose : retrouver du travail, pouvoir payer ses factures et demeurer digne au sein de la nation.
Mme Annaïg Le Meur (EPR). L’examen des crédits de la mission pour 2026 met en évidence une baisse globale des crédits, qui s’élèvent à 2,91 milliards d’euros en AE, en baisse de 17,7 %, et 2,83 milliards de CP, en baisse de 5 %. Cette diminution s’inscrit dans un cadre plus large du redressement des comptes publics, mais reflète également une adaptation des dispositifs aux besoins les plus prioritaires.
Le programme 138, Emploi outre-mer, concentre la principale évolution. Ses crédits diminuent d’environ 16 %, passant de 2,16 à 1,82 milliard d’euros. Cette baisse tient principalement à la réforme du dispositif de la Lodeom qui recentre les exonérations de cotisations sociales. Dans le même temps, les dispositifs d’insertion sont maintenus, notamment le service militaire adapté qui continuera d’accompagner plus de 4 000 jeunes ultramarins ; ainsi que les actions de mobilité gérées par l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité (Ladom), dont les moyens évoluent dans le cadre de sa modernisation.
S’agissant du programme 123 Conditions de vie outre-mer, la situation est plus contrastée. Les autorisations d’engagement baissent de 20,8 %, mais les crédits de paiement progressent de plus de 22 %. Cette évolution traduit une volonté de rattraper les engagements déjà pris, notamment dans les domaines du logement, des infrastructures et du soutien aux collectivités locales. Les crédits destinés à la ligne budgétaire unique du logement sont reconduits, tandis que ceux du fonds exceptionnel d’investissement diminuent de moitié, traduisant un recentrage sur les projets prioritaires. Parallèlement, les dispositifs de continuité territoriale et de reconstruction post-crise sont maintenus ou renforcés, en particulier à Mayotte, à La Réunion et en Nouvelle-Calédonie.
Enfin, il convient de rappeler que les crédits de cette mission ne retracent qu’une partie de l’effort global de l’État en faveur des outre-mer, estimé à près de 25 milliards d’euros en autorisations d’engagement dans le document de politique transversale. Notre groupe est néanmoins sceptique quant à la baisse des crédits du dispositif de la Lodeom, qui risque de fragiliser les petites et moyennes entreprises. C’est pourquoi nous défendrons des amendements visant à rétablir ces crédits au niveau de la loi de finances de 2025.
Enfin, je tiens à remercier M. le rapporteur pour l’attention qu’il a portée sur les problématiques de l’agriculture en outre-mer.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. L’agriculture est essentielle, et je reste engagé à rapprocher citoyens et nature. Les territoires ultramarins ne doivent plus être perçus comme une variable d’ajustement de la République. Les chiffres montrent une baisse des autorisations d’engagements pour le logement (de 10 %) et pour les collectivités (de 25 %), révélant un désintérêt de l’État. Nous ne réclamons pas davantage que ce qui nous revient de droit : nous voulons simplement fonctionner normalement, soutenir l’économie locale et offrir des emplois.
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Les territoires ultramarins, déjà dévastés par les politiques néolibérales successives, sont devenus la cible prioritaire du coup d’État social. Le Conseil économique, social et environnemental (Cese), dans une étude de 2023, révèle qu’une grande partie de la population des outre-mer vit à la merci d’une hausse des prix de l’alimentation, des carburants ou du logement. Nous nous souvenons des mobilisations populaires massives dans les outre-mer, notamment en Guadeloupe et à la Martinique en 2024, pour dénoncer ces écarts de prix indécents avec l’Hexagone et exiger des conditions de vie dignes. Mais rien n’en a résulté.
Cela suffit, cette logique coloniale doit cesser. Les outre-mer doivent devenir les avant-postes de la bifurcation écologique, de la souveraineté alimentaire, de la transition énergétique, du progrès humain. Il faut accorder des moyens, évalués à 11 milliards d’euros d’après un contre-budget élaboré par la délégation des outre-mer en 2024.
Ce budget 2026 est très loin du compte. Surtout, il met en lumière le mépris du Gouvernement : diminution de 623 millions d’euros en AE et de 151 millions d’euros en CP, baisse de 25 % sur le dispositif d’aide aux entreprises ultramarines.
Ce coup de rabot de 750 millions d’euros constitue une véritable mise à mort de l’économie dans les outre-mer.
Ce décrochage budgétaire concerne le programme 138 en raison de coupes importantes dans le dispositif d’exonération de cotisations sociales, sans redistribution de ces crédits, mais aussi par le programme 123, qui finance pourtant le quotidien, les logements, la continuité territoriale, les actions sociales et la culture. Dans nos outre-mer, il faudrait construire 110 000 logements. Plusieurs collectivités sont plongées dans un chaos économique et social. La grande pauvreté est de cinq à quinze fois plus élevée que dans l’Hexagone ; le chômage deux fois plus important.
Ce budget, comme les précédents, traduit malheureusement le triptyque bien connu en outre-mer : indifférence, relégation, répression. En réalité, ce gouvernement, comme les précédents, n’a aucune volonté d’investir concrètement dans les outre-mer, ni aujourd’hui, ni demain. Mon groupe La France Insoumise proposera évidemment d’amender ce budget catastrophique, notamment pour augmenter fortement les crédits pour le logement, pour redéployer les crédits destinés au soutien aux entreprises vers l’insertion et la qualification professionnelle, pour renforcer la dotation de continuité territoriale, pour aligner sur le droit commun le niveau des prestations sociales à Mayotte, et pour demander des moyens financiers pour les associations des outre-mer. Nous serons toujours en première ligne pour défendre les outre-mer.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. J’accorde également une importance particulière à la problématique du coût de la vie et à celle de la souveraineté alimentaire dans ces territoires. Toutefois, il me semble essentiel d’éviter les mesures fragmentées, les « saupoudrages » présentés dans certains amendements, afin d’adopter une approche globale permettant de doter durablement les outre-mer des leviers et moyens financiers nécessaires pour progresser. Par ailleurs, la question du logement demeure une préoccupation majeure pour nos régions.
Je souhaite également exprimer ma solidarité envers nos compatriotes de Mayotte, qui doivent pouvoir bénéficier d’une égalité sociale comparable à celle de La Réunion et de l’Hexagone. Il convient donc de privilégier une vision d’ensemble et de soutenir une meilleure mobilisation des crédits en faveur des outre-mer, pour en faire non pas des paradis fiscaux comme M. Valls le prétend, mais de véritables leviers économiques au service de nos territoires.
M. Philippe Naillet (SOC). Je souhaite commencer mon intervention en évoquant la grande inquiétude, voire la colère, des députés de mon groupe, mais aussi des populations ultramarines – la population réunionnaise en particulier. En effet, les missions se suivent et se ressemblent. Elles sous-estiment les inégalités dans nos territoires, alors que les indicateurs socioéconomiques y sont plus dégradés que dans l’Hexagone. Il est même possible de parler d’invisibilisation des inégalités de la part de l’État et de ceux qui sont aux affaires maintenant depuis huit ans.
Ce budget est frappé par une diminution de 628 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 153 millions d’euros en crédits de paiement. Aujourd’hui, le péril est grand, comme en témoigne le coup de rabot sur la Lodeom. Ce dispositif n’est pourtant pas un cadeau, ni une facilité. Il s’agit simplement de permettre le développement économique sur des territoires qui ne bénéficient pas des mêmes atouts qu’une région de l’Hexagone, en raison de l’insularité, de la distance et de la taille des marchés.
Ces singularités sont d’ailleurs reconnues par l’article 349 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE), qui reconnaît les disparités de nos territoires.
L’économie ultramarine menace désormais de s’effondrer. Il est impossible d’investir dans les outre-mer en l’absence de ces dispositifs.
Ensuite, la crise du logement est sans précédent dans nos territoires ultramarins. Plus de 110 000 demandes de logement sont dénombrées, dont 50 000 à La Réunion. Comment espérer avoir un projet de vie lorsqu’on n’a pas de logement ? C’est impossible. Enfin, les collectivités sont aujourd’hui au front, face à la crise sociale, face aux attentes de la population ; mais elles voient leurs crédits diminuer. Pourtant, elles constituent les premiers donneurs d’ordre, aujourd’hui.
En conclusion, la mission outre-mer qui nous est présentée est inquiétante et suscite notre colère. Nous attendrons la suite du débat sur les amendements pour nous prononcer.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Face à ces dangers, face au mépris du Gouvernement, je vous invite à faire barrage à la pauvreté. Il nous faut un gouvernement fort, un gouvernement qui aime les outre-mer. Marine Le Pen est dévouée aux outre-mer et le Rassemblement national est patriote ; il veut aider ces territoires et leur donner les moyens d’avancer. Je vous invite à aller dans le bon sens, à nous donner les leviers fiscaux pour progresser sur les problématiques de logement, d’emploi, d’agriculture, de sécurité.
M. le président Stéphane Travert. Je vous prie d’excuser mon retard et cède la parole à Pascal Lecamp, que je remercie de m’avoir brillamment suppléé cet après-midi.
M. Pascal Lecamp (Dem). À Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, partout dans les territoires ultramarins, les chantiers sont immenses. Nous devons, comme nous en avons pris l’engagement collectif, notamment avec la dernière loi de refondation pour Mayotte, les accompagner.
Je relève ainsi le doublement du fonds de solidarité outre-mer, qui constitue une avancée significative pour l’indemnisation des particuliers et des entreprises touchées par des catastrophes naturelles. De même, la réforme de la dotation de solidarité en faveur de l’équipement des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des événements climatiques ou géologiques (DSEC) ouvre la voie à une inclusion des collectivités ultramarines. Cependant, le dispositif reste peu réactif. Il nécessite un arrêté ministériel et non préfectoral, ce qui limite la rapidité d’intervention en cas d’urgence climatique. Ainsi, pour Saint-Martin et Saint-Barthélemy, territoires fortement exposés aux risques cycloniques, cette lenteur administrative demeure problématique. L’absence d’un mécanisme de déclenchement automatique ou préfectoral réduit l’efficacité de la réforme.
La simplification du dispositif de la Lodeom est donc bienvenue. Elle s’accompagne d’un recentrage sur les bas salaires, excluant une partie des secteurs à valeur ajoutée, notamment le tourisme et les services spécialisés. Ce choix pourrait fragiliser la compétitivité des entreprises implantées à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, où les coûts de main-d’œuvre sont naturellement plus élevés.
Monsieur le rapporteur, vous avez choisi de consacrer la partie thématique de votre rapport à l’agriculture, un sujet qui m’est très cher. J’avais eu la chance d’accompagner Élisabeth Borne, alors Première ministre, à La Réunion en 2023, pour rencontrer ces secteurs agricoles, qui regorgent de potentialités, mais se heurtent à des difficultés structurelles persistantes : coût du foncier, accès au financement, dépendance logistique, vieillissement des agriculteurs, manque de main-d’œuvre et vulnérabilité climatique, coût du transport, concurrence, pollution, défis sanitaires.
Il est essentiel que ces enjeux soient pleinement intégrés dans nos discussions pour mieux adapter les aides européennes, qui restent la grande part des investissements dans l’agriculture de demain, en particulier pour la spécificité ultramarine dont vous avez parlé lors de vos propos liminaires.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Tous les territoires ultramarins subissent les mêmes effets néfastes des cyclones, des tempêtes, mais à chaque fois, il faut quémander auprès de l’État, afin qu’il accélère les remboursements. En cette fin d’année, un grand nombre d’agriculteurs n’ont pas été remboursés des dégâts causés par les catastrophes naturelles. À ce titre, il faut permettre aux préfets de pouvoir prendre des décisions beaucoup plus rapidement, alléger le millefeuille administratif. Enfin, la politique agricole commune (PAC) 2028-2034 doit conserver les moyens alloués aux outre-mer.
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Il existe en France des territoires dans lesquels deux à quatre fois plus de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, où le chômage est au moins deux fois plus important, où les prix alimentaires sont jusqu’à 40 % fois plus élevés que sur le reste du territoire français.
Dans ces territoires, la santé globale est plus fragile, l’accès aux soins est moins bien assuré, les maladies chroniques, notamment l’obésité, sont beaucoup plus fréquentes et le taux de mortalité infantile est en moyenne deux fois plus élevé. Dans ces territoires, la promesse républicaine d’égalité des chances n’est pas totalement garantie par l’école, puisque les niveaux de difficulté en lecture chez les jeunes de 18 ans y sont deux à trois fois plus élevés qu’en Hexagone, engendrant 20 % à 25 % de chances en moins d’obtenir un diplôme supérieur, et de 35 % à 45 % de chances en moins d’accéder à un poste de cadre.
Dans certains de ces territoires, jusqu’à 90 % de la population est exposée à des pesticides particulièrement dangereux, et les taux d’incidence figurent parmi les plus élevés au monde pour le cancer du sein et le cancer de la prostate. Dans ces territoires, la question de la souveraineté et de l’autonomie alimentaire et énergétique n’est pas posée ; ils importent 80 % à 98 % des aliments consommés et jusqu’à 90 % des besoins énergétiques sont couverts par des énergies fossiles importées. Dans ces territoires, il n’existe plus le moindre kilomètre de rail alors que les routes sont embouteillées ; une part conséquente de la population n’a pas accès à l’eau potable.
À chaque budget, nous entendons des promesses, adoptons des amendements ; mais peu adviennent en réalité. Le groupe Écologiste et Social propose de nombreux amendements dans ce budget, mais appelle surtout de manière solennelle le Gouvernement à tenir compte de la gravité de la situation dans ces territoires dits d’outre-mer et à adopter les politiques structurelles nécessaires.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Je vous remercie pour l’attention que vous portez à ces territoires. En outre-mer, le coût de la vie et l’accès aux soins sont plus difficiles que dans l’ Hexagone, et l’échec scolaire y demeure un problème important. Il est essentiel de renforcer l’enseignement des matières classiques : le français, l’histoire, les mathématiques, la géographie.
Nous subissons effectivement trop d’importations. Le Rassemblement National entend favoriser les circuits courts et la production locale pour créer de l’emploi, proposer des produits de qualité et accroître nos exportations, comme la vanille, les sucres ou les fruits tropicaux. L’État doit nous apporter un soutien financier et fiscal pour réaliser ces objectifs.
M. Max Mathiasin (LIOT). La faible affluence dans cette salle illustre à elle seule la problématique des outre-mer : tout le monde y va de son discours, mais lorsqu’il s’agit réellement de discuter des problèmes qui affectent nos territoires, nos collègues ne sont pas là.
Mercredi dernier, nous avons tenu une réunion surréaliste avec la ministre des outre-mer et la ministre du budget, qui n’avaient pas l’air de comprendre de quoi nous parlions lorsque nous évoquions les coupes budgétaires drastiques de la mission.
Nos ministres s’intéressent-ils ou même connaissent-ils les outre-mer ? Neuf ministres des outre-mer se sont succédé depuis le premier quinquennat de M. Macron.
La situation des outre-mer et la diminution des crédits ont largement été rappelées par les précédents orateurs. Je me contenterai de rappeler que le soutien aux entreprises est en baisse de 19 %, que le fonds exceptionnel d’investissement (FFI) passe de 102 à 50 millions d’euros, soit une diminution de 50 %. Le FFI soutient pourtant les investisseurs, les équipements publics et les collectivités locales. Il en va de même pour l’aide à l’insertion et à la qualification professionnelle.
Nous continuerons à nous battre, nous ne baisserons pas les bras. Je présenterai un certain nombre d’amendements.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Nous, députés et élus d’outre-mer partageons un point commun : notre volonté farouche de défendre nos territoires et de montrer à l’Hexagone, à la mère patrie, que nous sommes capables. J’invite les élus et ministres de l’Hexagone à traduire leurs intentions en politiques effectives pour soutenir nos territoires.
M. le président Stéphane Travert. Il est essentiel d’intégrer le réflexe ultramarin dans chacun de nos textes, dans chacune de nos décisions, afin de valoriser l’économie locale et l’attractivité des outre-mer. Je propose d’inviter la ministre des outre-mer devant la commission des affaires économiques pour discuter spécifiquement des enjeux économiques des territoires ultramarins, lors d’une audition dédiée.
Nous passons à présent à l’examen des amendements.
Article 49 et État B
Amendements II-CE301 de M. Joseph Rivière et II- CE290- de M. Philippe Naillet (discussion commune)
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. L’amendement II-CE301 prévoit de rétablir dans le projet de loi de finances pour 2026 les crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2025 sur l’action « Soutien aux entreprises », qui assure notamment le financement du dispositif d’exonération de cotisations patronales en faveur des entreprises ultramarines dites Lodeom. Le budget présenté par le Gouvernement prévoit une baisse drastique et préoccupante de près de 19 % dans l’action soutien aux entreprises, en AE et CP.
Cette diminution significative des moyens met en péril le dispositif Lodeom, levier pourtant indispensable favorisant la compétitivité et l’emploi au sein de nos territoires ultramarins. Réduire ce soutien serait une erreur économique et sociale.
Cet amendement propose donc de majorer de 343 715 628 euros en AE et en CP et les crédits de l’action 1 « Soutien aux entreprises » du programme 138 et, afin d’assurer la recevabilité financière de cet amendement conformément aux exigences de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), de minorer à due concurrence l’action 6 « Collectivités territoriales » du programme 123.
Cet amendement n’ayant absolument pas pour vocation de restreindre les moyens des collectivités territoriales ultramarines, il conviendrait que le Gouvernement procède à la levée de ce gage.
M. Philippe Naillet (SOC). Avant de présenter mon amendement, je signale à M. le rapporteur qu’il s’est égaré dans un moment politique lors de l’une de ses interventions, en indiquant que le bon choix consisterait à disposer d’un gouvernement relevant du groupe auquel il appartient.
J’espère qu’il adoptera une plus grande hauteur de vue lors de la suite de nos débats, qui sont essentiels pour les territoires ultramarins.
Ensuite, l’amendement II- CE290 prévoit une reprise des crédits ouverts en loi de finances initiale 2025 sur l’action « Soutien aux entreprises » qui finance le dispositif de la Lodeom dans le PLF pour 2026. Chacun a bien compris que la Lodeom constitue un dispositif majeur pour le développement économique et les emplois de nos territoires.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Mon amendement étant mieux-disant, je vous demande de retirer le vôtre.
M. Philippe Naillet (SOC). Je le maintiens.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Avis défavorable.
La commission adopte l’amendement II-CE301. En conséquence, l’amendement II-CE290 de M. Philippe Naillet tombe.
Amendement II-CE 262 de Mme Sandrine Nosbé
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous souhaitons contester les coupes budgétaires brutales qui sont prévues pour la mission outre-mer et l’absence de mesures en faveur de l’emploi.
Nous déplorons de telles coupes budgétaires soudaines et brusques à l’encontre des entreprises ultramarines, par réduction drastique du premier levier d’intervention de l’État, en matière de soutien à l’emploi dans les outre-mer. Nous estimons également qu’il n’est pas acceptable que ces crédits ne soient même pas redéployés dans d’autres dispositifs de lutte contre le chômage.
En effet, le taux de chômage dans les outre-mer demeure particulièrement élevé en 2024 : 28,6 % à Mayotte, 17,3 % à La Réunion, 16,9 % en Guyane contre 7,3 % en moyenne nationale.
Par cet amendement et étant limités par la faiblesse des crédits de la mission, nous proposons a minima de redéployer la moitié des crédits supprimés et auparavant dédiés aux exonérations de cotisations vers l’action 2, qui est dédiée à l’insertion et à la qualification professionnelles, afin de développer de nouvelles politiques en faveur de l’emploi dans les outre-mer.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Je partage votre constat. La persistance de taux de chômage très élevés dans nos territoires ultramarins, surtout chez les jeunes, est intolérable, particulièrement dans un contexte où les agriculteurs et les entreprises manquent cruellement de bras. La situation économique et sociale est très difficile et très tendue.
Toutefois, votre amendement ne semble pas être précisément chiffré puisque son exposé sommaire indique que les 171 millions d’euros correspondent au redéploiement de « la moitié des crédits supprimés auparavant dédiés aux exonérations de cotisations ».
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE287 de M. Max Mathiasin
M. Max Mathiasin (LIOT). Le présent amendement vise à augmenter les crédits permettant l’insertion économique des territoires d’outre-mer dans leur environnement, en augmentant l’aide au fret aux produits importés dans des territoires ultramarins.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Il est exact que le coût du transport constitue l’un des facteurs majeurs de la vie chère en outre-mer. Néanmoins, il convient de faire preuve d’une vigilance particulière. L’aide au fret doit contribuer à faire baisser le prix payé par les consommateurs et non à rehausser les marges des importateurs. Il risque également de désavantager la production locale par rapport aux importations, alors qu’il est crucial d’encourager le développement de la production locale et des circuits courts.
J’émets donc un avis de sagesse.
M. Max Mathiasin (LIOT). Je comprends votre point de vue. Cependant, la question de la continuité territoriale est essentielle, et la problématique de l’aide au fret se posera de toute manière au moment de la discussion du projet de loi de lutte contre la vie chère dans les outre-mer.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Je comprends et je partage votre inquiétude sur le fret. Néanmoins, je m’interroge. Les importateurs et distributeurs présents dans nos territoires d’outre-mer répercuteront-ils forcément cette baisse sur le prix final ? Ne vont-ils pas plutôt en profiter pour accroître leurs marges ?
Je réitère mon avis de sagesse.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE288 de M. Philippe Naillet
M. Philippe Naillet (SOC). Je le retire.
Amendements II-CE242 de M. Perceval Gaillard, II-CE302 de M. Joseph Rivière, II-CE289 de M. Philippe Naillet, II-CE275 de M. Max Mathiasin (discussion commune)
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). À travers l’amendement II-CE242, nous proposons de renforcer la ligne budgétaire unique (LBU) consacrée au logement dans les outre-mer. La problématique du logement n’est pas nouvelle. Il est temps de passer à un véritable plan de logement dans les outre-mer et de sortir d’une logique de saupoudrage de crédits qui ne change malheureusement rien à la situation dramatique à laquelle sont confrontés nos concitoyens et concitoyennes des outre-mer. L’action dédiée au logement voit ses crédits diminuer pour 2026, menaçant les projets d’investissement dans le logement sur le long terme.
Selon les chiffres de 2025 de l’Union sociale pour l’habitat, le besoin est de 110 000 logements dans l’ensemble des outre-mer. Selon le rapport sur mal-logement 2025 de la Fondation pour le logement des défavorisés, les plans de logement d’outre-mer n’arrivent jamais à atteindre leur cible. Nous proposons donc d’augmenter fortement les crédits de la LBU.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Je demande le retrait, au profit de mon amendement II-CE302, qui propose de rétablir le montant des crédits ouverts dans la LFI pour 2025 concernant le logement et intègre les effets de l’inflation moyenne.
M. Philippe Naillet (SOC). L’amendement II-CE289 a pour objet de mettre en œuvre une reprise des crédits ouverts dans la LFI pour 2025.
Le PLF pour 2026 prévoit que les crédits destinés aux aides au logement du programme 123 diminuent de près de 26 millions d’euros en AE pour atteindre 236 millions d’euros, contre 262 millions d’euros en AE dans la LFI pour 2025.
Or, les coûts de construction et d’entretien des logements sont particulièrement élevés dans les outre-mer du fait de caractéristiques structurelles reconnues tels que l’insularité – à l’exception de la Guyane –, l’éloignement, la rareté du foncier, les difficultés de recrutement dans des secteurs en tension, ou encore les normes d’aménagement et de construction relatives aux risques sismiques et cycloniques.
L’État ne parvenant pas à résorber le nombre important d’habitats insalubres, de personnes en situation de mal-logement ou encore de demandes en attente d’un logement social au sein des outre-mer, il apparaît inacceptable d’approuver une telle chute à terme de crédits sur le logement ultramarin.
M. Max Mathiasin (LIOT). Cet amendement a pour objet d’abonder de 10 millions d’euros les crédits consacrés au logement et, plus précisément, à trois des six activités principales de la LBU : le logement social, l’amélioration de la sécurité du parc social antillais à l’égard du risque sismique, et l’accession sociale à la propriété et amélioration du parc privé.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Je demande le retrait des amendements de MM. Mathiasin et Naillet, puisque mon amendement est mieux-disant et prend mieux en compte l’inflation.
Avis défavorable sur l’amendement II-CE242 de Mme Nosbé.
M. Philippe Naillet (SOC). Mon amendement est maintenu.
M. Max Mathiasin (LIOT). Le mien aussi.
Successivement, la commission rejette les amendements II-CE242 et II-CE302, puis, contre l’avis du rapporteur pour avis, adopte l’amendement II-CE289, En conséquence, l’amendement II-CE275 de M. Max Mathiasin tombe.
Amendements II-CE303 de M. Joseph Rivière, amendements identiques II-CE245 de M. Perceval Gaillard et II-CE293 de M. Philippe Naillet (discussion commune)
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. L’amendement II-CE303 vise à consacrer les moyens budgétaires nécessaires au fonctionnement des Observatoires des prix, des marges et des revenus (OPMR), vigies des phénomènes de vie chère dans les outre-mer. Le coût de la vie dans les territoires ultramarins demeure beaucoup trop élevé, et les OPMR jouent un rôle indispensable pour analyser, contrôler et alerter sur les dérives de prix. Cet amendement prévoit donc d’abonder de 5 millions d’euros l’enveloppe dédiée aux cinq OPMR.
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). L’amendement II-CE245 propose de renforcer le budget des OPMR.
M. Philippe Naillet (SOC). L’amendement II-CE293 vise également à renforcer les moyens budgétaires des OPMR.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Les deux derniers amendements sont identiques. Je demande leur retrait au profit du mien, qui est mieux-disant.
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Mon amendement est maintenu.
M. Philippe Naillet (SOC). Le mien aussi.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CE296 de M. Max Mathiasin
M. Max Mathiasin (LIOT). Cet amendement vise à renforcer les contrats de convergence et de transformation afin de mieux accompagner les collectivités locales dans leurs projets.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Fréquemment, les contrats de convergence et de transformation ne sont pas menés à leur terme et conduisent à gaspiller de l’argent public.
J’émets donc un avis de sagesse.
M. Max Mathiasin (LIOT). Je ne partage pas ce point de vue : certains contrats de convergence fonctionnent très bien. L’argent public n’est pas gaspillé, il aide les collectivités dans la réalisation de leurs missions.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Dans un rapport publié en juillet 2025, la Cour des comptes souligne les limites aux contrats de convergence et de transformation. Je suis prudent en matière de deniers publics, raison pour laquelle j’ai émis un avis de sagesse.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE248 de Mme Sandrine Nosbé
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons de renforcer la dotation de continuité territoriale a minima à hauteur de la dotation de continuité territoriale attribuée à la Corse.
Le dispositif de continuité territoriale a été créé en 1976 en Corse pour répondre au problème de desserte aérienne, et consiste aujourd’hui en une dotation annuelle de l’État qui s’élève à 187 millions d’euros pour 2026. Or, cette dotation de continuité territoriale pour les outre-mer s’élève pour 2026 à seulement 76,9 millions d’euros, alors que ces territoires sont sept fois plus peuplés que la Corse. L’État débourse 187 millions par an pour environ 360 000 Corses et 76 millions d’euros pour quelque 2,8 millions d’ultramarins. Pourtant, les vols entre les outre-mer et l’Hexagone continuent d’être extrêmement chers.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. La continuité territoriale constitue effectivement un sujet sensible dans nos territoires ultramarins. Le différentiel de dotation entre la Corse et les outre-mer est difficilement justifiable au regard de l’unité nationale. Toutefois, un renforcement aussi massif des crédits nécessiterait une réflexion globale sur le ciblage des bénéficiaires et sur les modalités d’application du dispositif, afin que les aides profitent d’abord à ceux qui en ont le plus besoin, par exemple aux étudiants qui partent vers l’Hexagone, ou aux jeunes actifs et aux familles contraintes de se déplacer pour des raisons professionnelles.
J’émets donc un avis de sagesse.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE274 de M. Max Mathiasin
M. Max Mathiasin (LIOT). Cet amendement vise à augmenter les crédits alloués à l’opérateur Ladom, l’agence de l’outre-mer pour la mobilité, afin de favoriser les dispositifs de continuité territoriale pour les outre-mer.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. J’émets un avis de sagesse.
Le soutien à la continuité territoriale est indispensable, car elle permet de compenser l’éloignement géographique en facilitant les déplacements des personnes et des biens, l’accès aux services publics, contribuant ainsi à l’égalité réelle entre les ultramarins et les habitants de l’Hexagone.
Il convient toutefois de garder à l’esprit que la mission doit préserver un équilibre fragile entre ces différents programmes.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE260 de M. Jean-Hugues Ratenon
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons une aide au désamiantage outre-mer. De nombreux chantiers de rénovation et de démolition sont retardés du fait de la présence d’amiante, ce qui engendre des conséquences sociales importantes, dans la mesure où 80 % de la population ultramarine est éligible aux logements sociaux. Cet amendement, corédigé avec l’Union sociale pour l’habitat, vise à favoriser la création d’une aide au désamiantage – de type prime forfaitaire par logement, par exemple plafonnée à 5 000 euros – qui serait essentielle pour accompagner la rénovation de 1 000 logements dans les départements et les régions d’outre-mer.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. La problématique du désamiantage est réelle dans les territoires ultramarins. Toutefois, ce projet de désamiantage doit s’inscrire dans une stratégie globale pluriannuelle réfléchie. Ce n’est pas par le saupoudrage d’argent public que nous réglerons cette problématique de fond.
Avis défavorable.
M. Max Mathiasin (LIOT). Si nous sommes trop sages en la matière, comme nous l’avons été dans d’autres situations – par exemple le chlordécone –, nous n’avancerons pas. Je demande à mes collègues de voter cet amendement. Nous sommes confrontés à des conditions environnementales extrêmement difficiles, notamment à la présence d’algues toxiques telles que les sargasses, qui menacent la santé publique, ainsi qu’aux effets du chlordécone sur l’incidence des cancers.
Je comprends l’importance du contrôle et de la gestion rigoureuse des finances publiques, sujet régulièrement abordé. Toutefois, nos régions défavorisées supportent une charge disproportionnée, alors qu’elles devraient bénéficier d’efforts particuliers, compte tenu de leur situation depuis 1946 et des revendications constantes pour une équité budgétaire. Il serait donc nécessaire que le Gouvernement reconsidère l’allocation budgétaire qui leur est destinée. Lors d’une récente réunion en présence de Mme de Montchalin, un rapport de type « ENA » a été présenté, suggérant que des fraudes existent dans les dispositifs d’aides et d’exonérations fiscales dans les Antilles, l’outre-mer, La Réunion et Mayotte. C’était insultant.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Nous, députés élus des DROM, nous devons cibler l’action publique ; mais, avec cet amendement, on ignore le type de catégories socioprofessionnelles concernées. Une étude précise préalable est nécessaire, pour être plus crédibles.
Avis défavorable.
Mme Annaïg Le Meur (EPR). Je voterai cet amendement. Nous attendons naturellement un plan de long terme, mais cet amendement permet de franchir une première étape.
M. Max Mathiasin (LIOT). Cher collègue Rivière, je vous invite à aller à Pointe-à-Pitre, pour rendre visite au Centre des arts, la salle la plus importante en Guadeloupe dont la rénovation est bloquée depuis une dizaine d’années par des problèmes de désamiantage. Nous avons besoin d’un peu d’argent pour aider de tels projets, dans tous nos outre-mer.
M. Philippe Naillet (SOC). Je soutiens naturellement l’amendement de Mme Nosbé. Aujourd’hui, sur le territoire de La Réunion, le coût du désamiantage est estimé entre 200 et 500 euros par mètre carré.
Contre l’avis du rapporteur pour avis, la commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE261 de M. Jean-Hugues Ratenon
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous proposons par cet amendement de mettre en place un plan de lutte contre les termites pour l’habitat privé dans les outre-mer. Si un diagnostic termites est désormais obligatoire lors des ventes immobilières sur l’île par arrêté préfectoral, cette mesure ne protège en rien les propriétaires occupants modestes qui n’ont pas les moyens de financer les traitements.
Cette aide directe, ciblée sur des ménages modestes et très modestes sous plafond de ressources, permettra de financer les traitements curatifs essentiels. Il s’agit d’une mesure de salubrité publique, de prévention de la précarité et de protection du patrimoine ultramarin.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Je m’oppose au saupoudrage d’argent public. Comme pour le précédent amendement, il faut inscrire cette problématique dans une stratégie globale pour que les deniers publics soient employés efficacement.
Avis défavorable.
M. Max Mathiasin (LIOT). Nous travaillons sur les outre-mer depuis bien longtemps et avons rédigé des rapports avant vous ; mais face à l’urgence, il faut intervenir quand nous le pouvons. Comme disait l’économiste Keynes, « À long terme, nous serons tous morts ».
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Monsieur le rapporteur, nous agissons pour essayer de corriger ce budget catastrophique pour nos territoires des outre-mer. En l’espèce, il s’agit d’un plan de lutte contre les termites. Si nous restons les bras croisés, rien ne sera fait pour nos citoyens des outre-mer.
Mme Annaïg Le Meur (EPR). Madame Nosbé, des mesures identiques existent-elles dans l’Hexagone, contre d’autres nuisibles des bâtis, par exemple la mérule en Bretagne ?
M. Pascal Lecamp (Dem). S’agissant des termites, l’Agence nationale de l’habitat (Anah) peut couvrir jusqu’à 50 % du coût des travaux pour les ménages modestes. Il existe également un crédit d’impôt pour la transition énergétique, qui peut concerner les travaux de traitement contre les termites. Ce crédit d’impôt s’applique naturellement dans l’Hexagone et en outre-mer. Il faut plutôt orienter les ménages concernés vers ces sources de financement.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE276 de M. Max Mathiasin
M. Max Mathiasin (LIOT). Cet amendement vise à soutenir les associations du secteur sanitaire et social dans les territoires ultramarins.
Les populations ultramarines sont bien plus frappées que celles de l’Hexagone par la pauvreté et la grande pauvreté, le chômage, les maladies chroniques, les difficultés d’accès aux soins, l’illettrisme et le décrochage scolaire.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Les associations du secteur sanitaire et social jouent effectivement un rôle essentiel dans nos territoires. Toutefois, il importe de préciser le type d’action ou les associations visées, ainsi que le public ciblé et la part de l’emploi local qui pourra être générée. Sans ces éléments, il n’est pas possible d’évaluer la pertinence de cet amendement.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE279 de Mme Sandrine Rousseau
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Cet amendement vise à renforcer la recherche scientifique, la prise en charge médicale, la reconnaissance et l’indemnisation des victimes, en intégrant une approche spécifique aux femmes dans la politique de réparation et de santé environnementale menée par l’État sur le chlordécone. Le montant s’élève à 2 millions d’euros.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. La problématique du chlordécone est très importante, et les moyens doivent être mobilisés par les pouvoirs publics pour réparer les préjudices subis par les ultramarins qui en ont été victimes. Toutefois, ces crédits doivent s’inscrire dans une stratégie globale d’indemnisation des victimes, en continuité avec les fonds déjà débloqués, notamment dans le cadre du fonds d’indemnisation des victimes de pesticides (FIVP).
J’émets donc un avis de sagesse sur cet amendement.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE281 de Mme Sandrine Rousseau
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Cet amendement augmente les crédits du programme Conditions de vie outre-mer au profit du renforcement du plan « écophyto DOM ». Nous proposons que 2 millions d’euros soient orientés vers un accompagnement véritable d’une activité agricole moins polluante sur ces territoires.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Je ne suis pas opposé au fait de favoriser la recherche de nouveaux produits moins toxiques pour éviter une exposition dangereuse des agriculteurs. En revanche, on ne sait pas ce que finance exactement cet argent, et on continue à saupoudrer l’argent public.
Dans ce contexte, j’émets un avis défavorable.
M. le président Stéphane Travert. Il me semble que le plan « écophyto » national est toujours suspendu. Peut-être conviendrait-il de revoir une configuration de ce plan qui tienne compte des problématiques que vous soulevez, madame la députée, concernant l’utilisation des pesticides.
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Le plan a été suspendu, mais n’a pas été annulé. En conséquence, cet amendement pourrait permettre de le relancer sur les territoires ultramarins.
M. Max Mathiasin (LIOT). L’un des problèmes concernant les produits phytosanitaires porte précisément sur la formation de ceux qui sont appelés à les utiliser, mais également sur le manque de recherche sur les plantes tropicales.
M. Pascal Lecamp (Dem). Je souscris à la pertinence de cet amendement. Concernant le précédent, je précise qu’il existe un plan chlordécone IV qui court jusqu’en 2027. Il propose des analyses gratuites de sang à tous les habitants de la Guadeloupe et de la Martinique, un parcours d’accompagnement et des contrôles renforcés.
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Le cancer du sein a été largement sous-estimé dans le plan chlordécone. Face à l’explosion du nombre de cancers du sein, on suspecte un « effet cocktail » lorsque le chlordécone est associé à d’autres substances.
M. Max Mathiasin (LIOT). J’ajoute que la prévalence des cancers de la prostate est particulièrement élevée en Guadeloupe et en Martinique. Une étude est en cours à ce sujet.
Contre l’avis du rapporteur pour avis, la commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE282 de Mme Sandrine Rousseau
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Cet amendement concerne les sargasses. Des recherches sont menées actuellement sur ces sargasses, pour les utiliser dans l’isolation des bâtiments, voire pour dépolluer les sols infestés par le chlordécone. L’idée consiste à développer ces recherches, afin de transformer ce fléau en quelque chose d’utile pour le territoire.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Je partage pleinement le constat d’urgence formulé par les auteurs de cet amendement face à la prolifération des sargasses. Toutefois, la révision des équilibres budgétaires au sein de la mission appelle une évaluation plus approfondie des besoins réels et de la soutenabilité de cette mesure dans la durée.
Dans ces conditions, j’émets un avis de sagesse.
M. le président Stéphane Travert. Il semble que même lorsque les sargasses sont retraitées, des résidus très polluants demeurent et rendent difficile l’utilisation de ces algues. Cependant, un « plan sargasses » se met en place, pour les repousser un peu plus au large et les envoyer par le fond.
La commission adopte l’amendement.
La séance est suspendue, puis reprise.
Amendements II-CE304 de M. Joseph Rivière, II-CE295 M. Philippe Naillet (discussion commune)
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à abonder en autorisations d’engagement l’action 6 « Collectivité territoriale » du programme 123 Conditions de vie outre-mer d’un montant de 173 423 854 euros, correspondant à un rétablissement du montant des crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2025, rehaussé d’un montant tenant compte d’une inflation moyenne de 1 %.
Afin d’assurer la recevabilité financière de cet amendement, il est donc proposé de majorer de 173 423 854 euros les autorisations d’engagement de l’action 6 du programme et de minorer en due concurrence les crédits de l’action 01 « Soutien aux entreprises » du programme 138 Emploi outre-mer.
Cet amendement n’ayant absolument pas pour objet de restreindre le soutien aux entreprises, il conviendrait que le Gouvernement procède à une levée du gage.
M. Philippe Naillet (SOC). Je retire l’amendement II-CE295.
La commission adopte l’amendement II-CE304.
Amendement II-CE277 de M. Max Mathiasin
M. Max Mathiasin (LIOT). Cet amendement a pour objet d’abonder de 5 millions d’euros en AE et de 2 millions d’euros en CP les crédits consacrés aux collectivités territoriales, et plus précisément aux fonds de secours ou de commerce (FSOM).
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Lors des auditions que j'ai menées, les chambres d’agriculture des outre-mer nous ont assuré que les dispositifs actuels du FSOM et des aides d’urgence nationales sont insatisfaisants, tant dans leurs délais d’application que dans les montants des enveloppes dédiées.
Certes, le FSOM est indispensable dans des territoires de plus en plus exposés à des aléas climatiques dévastateurs. Néanmoins, rien ne garantit que ce montant soit bien calibré, faute d’évaluation chiffrée.
J’émets donc un avis de sagesse sur cet amendement.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE291 de M. Philippe Naillet
M. Philippe Naillet (SOC). Cet amendement prévoit une reprise des crédits ouverts dans la loi de finances initiale pour 2025, sur l’action « Fonds exceptionnels d’investissement » (FEI). Ce sont des fonds de « rattrapage » d’équipements publics collectifs en outre-mer. En l’occurrence, il s’agit de rattraper 30,9 millions d’euros de CP. Cet amendement est raisonnable.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Le FEI est essentiel. Il sert à financer les projets structurants dans les collectivités ultramarines, comme la modernisation des infrastructures. Ses crédits permettent aussi l’émergence de projets innovants, structurants, susceptibles d’avoir un fort impact sur l’emploi et le développement économique de notre territoire. Toutefois, dans ce contexte budgétaire contraint, il convient que chacun prenne sa part dans l’effort national.
M. Philippe Naillet (SOC). Lors de la discussion générale, nous avons tous souligné le véritable retard de nos territoires ultramarins, notamment en termes d’équipements. Encore une fois, cet amendement est modeste, puisqu’il s’agit de remonter les crédits au niveau de la loi de finances initiale pour 2025. Monsieur le rapporteur, je ne comprendrai pas que sur ce sujet-là, vous demeuriez dans une forme d’austérité budgétaire.
M. Max Mathiasin (LIOT). Ces arguments austéritaires sont effectivement en totale contradiction avec les discours initiaux. M. le rapporteur, vous connaissez la situation que nous vivons. Nous essayons simplement de parvenir, année après année, à l’égalité.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Je partage votre inquiétude et votre désarroi face aux mesures présentées par le Gouvernement et aux coupes budgétaires. En revanche, il faut être pragmatique et adopter une vision globale. Au préalable, il faut reprendre les rapports déjà établis et surtout procéder à un chiffrage, réaliser des arbitrages.
C’est la raison pour laquelle j’ai émis un avis de sagesse.
M. Pascal Lecamp (Dem). Vous parlez de vision globale, mais je ne comprends pas celle que vous promouvez. Vous faites passer un premier amendement de 350 millions d’euros pour le soutien aux entreprises, en soustrayant le même montant au programme 123 Conditions de vie outre-mer. Plus tard, vous proposez un amendement de 173 millions d’euros pour réinscrire des financements sur le 123, en déshabillant le programme 138 Emploi outre-mer.
Nous travaillons sur un avis budgétaire, qui devrait suivre une logique budgétaire. Toutefois, en l’espèce, il n’y en a aucune.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Vous savez qu’il est nécessaire de formaliser ces compensations pour permettre aux amendements d’être recevables. J’ai demandé des levées de gage à chaque reprise pour éviter de déshabiller Pierre pour habiller Paul.
La commission adopte l’amendement.
Amendements II-CE247 de Mme Sandrine Nosbé, II-CE292 de M. Philippe Naillet (discussion commune)
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement II-CE247, nous souhaitons alerter sur les phénomènes de concentration des marchés dans les outre-mer et proposer la création d’une autorité de la concurrence spécifique aux outre-mer, dotée de moyens suffisants pour coordonner les travaux des OPMR et agir au plus près sur les situations de concentration en outre-mer, afin de les limiter et ainsi de lutter contre la vie chère.
M. Philippe Naillet (SOC). L’amendement II-CE292 est défendu.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. J’émets un avis défavorable sur les deux amendements.
Le « réflexe outre-mer » ne consiste pas à transposer une autorité parisienne sur un territoire ultramarin. S’il existe en effet un problème de concentration dans les outre-mer, la création d’une nouvelle autorité administrative indépendante ne me paraît pas constituer la bonne solution. Il convient en priorité de renforcer les moyens de l’Autorité de la concurrence existante plutôt que de multiplier les structures coûteuses.
M. Max Mathiasin (LIOT). L’instant ne me semble pas approprié pour la mise en place d’une telle autorité. Nous discuterons bientôt la loi Valls sur la lutte contre la vie chère. Peut-être serait-il plus approprié de défendre ensemble cet amendement ce jour-là.
M. Philippe Naillet (SOC). Je comprends cet argument. Cependant, nous avons porté ce débat dans le cadre de notre discussion. Monsieur le rapporteur, il ne s’agit pas là d’une mesure déconnectée qui coûtera de l’argent.
Si nous voulons bâtir une véritable stratégie économique et commerciale dans nos territoires, il faut que l’autorité de la concurrence soit en prise avec les réalités locales. Or, nous connaissons tous les conséquences de la décision prise à Paris au moment du rachat de Vindémia.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CE250 de Mme Sandrine Nosbé
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Cet amendement propose de créer un nouveau programme pour l’investissement dans l’autonomie énergétique 100 % énergies renouvelables des collectivités dites d’outre-mer.
Selon l’Agence de la transition écologique (Ademe), l’environnement des collectivités d’outre-mer leur permettrait d’atteindre une autonomie avec 100 % d’énergies renouvelables. Pourtant, elles importent encore largement une énergie très carbonée.
Pour cet amendement, nous proposons la création de ce nouveau programme autonome énergétique des territoires ultramarins, auquel nous proposons d’allouer 300 millions d’euros. Pour assurer sa recevabilité financière, cet amendement prélève donc 300 millions d’euros en AE et en CP sur l’action 1 « Soutien aux entreprises » du programme 139 Emploi outre-mer et abonde d’autant le nouveau programme Autonomie énergétique des territoires ultramarins. Nous appelons aussi le Gouvernement à lever le gage.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Avis défavorable.
Il faut mener une réflexion approfondie sur le sujet, dans le cadre d’une politique de programmation pluriannuelle de l’énergie. Il n’est pas réaliste de débuter avec une ouverture de crédits à hauteur de 300 millions d’euros sans plan énergétique pluriannuel concerté.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE257 de M. Perceval Gaillard
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous proposons de renforcer les capacités de stockage des ports dans les collectivités dites d’outre-mer. Afin d’assurer la recevabilité financière de cet amendement, nous prélevons 5 millions d’euros en AE et CP sur l’action 9. Nous abondons d’autant le nouveau programme Stockage des ports ultramarins. Nous appelons également le Gouvernement à lever le gage.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Les territoires ultramarins et insulaires sont les premières victimes de l’augmentation des prix, dès lors que survient une crise du transport maritime. La création de mégastocks pourrait permettre de mieux sécuriser les chaînes d’approvisionnement, mais elle risque de favoriser les importateurs au détriment du développement de la production locale et des circuits courts.
Pour ces raisons, j’émets mets un avis de sagesse sur cet amendement.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE249 de M. Jean-Hugues Ratenon
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons d’instaurer à titre expérimental dans les collectivités d’outre-mer volontaires des bornes de comparateurs de prix. Ces bornes ont le potentiel d’apporter une transparence qui manque dans la fixation des prix, pour soutenir le pouvoir d’achat des consommateurs réunionnais.
Au-delà de la simple comparaison des prix, ces bornes peuvent également fournir des informations complémentaires sur les produits et permettre ainsi aux clients de prendre des décisions d’achat éclairées.
Toutefois, la mise en place de bornes comparatrices de prix relève davantage de la responsabilité du secteur privé, en particulier les enseignes de distribution, qui disposent déjà de données nécessaires et des moyens techniques pour communiquer sur leurs prix.
Je pense donc qu’il leur revient de financer la mise en place ces bornes à partir de leurs propres lignes budgétaires.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE280 de Mme Sandrine Rousseau
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Il est retiré.
Amendement II-CE251 de M. Jean-Hugues Ratenon
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous demandons un accompagnement financier pour les associations ultramarines. Les collectivités dites outre-mer sont touchées de plein fouet par la cherté de la vie et la précarité. Les personnes les plus démunies font de plus en plus appel aux associations pour avoir accès aux produits de première nécessité. Cependant, ces dernières éprouvent de grandes difficultés à répondre aux demandes et nombre d’entre elles dénoncent la baisse des aides publiques, qui leur empêchent de maintenir l’ensemble de leurs actions.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Les associations jouent évidemment un rôle essentiel dans le tissu social ultramarin, par exemple en matière d’aide alimentaire ou d’accompagnement social. Toutefois, le dispositif proposé manque de précisions sur les structures bénéficiaires, les critères d’éligibilité et l’évaluation de l’impact attendu. Encore une fois, il s’agit de saupoudrage.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE259 de M. Jean-Hugues Ratenon
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons un soutien financier supplémentaire à destination des étudiants ultramarins. Pour permettre la réussite de tous les étudiants, il est impératif de mettre en place des mécanismes de soutien spécifiques. L’adoption de cet amendement marquerait notre engagement envers l’accessibilité équitable à l’enseignement supérieur pour tous les étudiants, quels que soient leurs lieux de résidence. Il refléterait notre reconnaissance de la nécessité de soutenir nos jeunes ultramarins, contribuant ainsi à renforcer leur avenir, ainsi que celui de nos territoires d’outre-mer.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Encore un exemple de saupoudrage. Les 8 millions d’euros envisagés représenteraient moins de 134 euros pour chacun des 60 000 étudiants. Ce n’est pas ce qui parviendra à les soutenir durablement sur le plan financier.
J’émets un avis de sagesse.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE244 de M. Perceval Gaillard
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Il est défendu.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Avis de sagesse.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE263 de M. Jean-Hugues Ratenon
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous souhaitons garantir aux étudiants ultramarins la possibilité de se présenter à l’intégralité des épreuves des concours de la fonction publique sur leur territoire de résidence. A l’heure actuelle, la situation est effectivement paradoxale. Si les épreuves écrites sont fréquemment délocalisées dans les Drom-Com pour les concours à grand volume, le blocage principal concerne les épreuves orales. La majorité des épreuves restent centralisées à Paris ou en France hexagonale, obligeant les candidats ultramarins déclarés admissibles à un déplacement coûteux.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Il me semble évidemment important de favoriser une meilleure égalité d’accès aux concours de la fonction publique pour les candidats ultramarins.
Toutefois, la création de centres d’examen permanents dans chaque territoire d’outre-mer serait-elle vraiment plus efficace qu’un soutien aux frais de déplacement des candidats ? Il faut rappeler que les centres d’examen se sont adaptés à la technologie : les oraux s’effectuent généralement en visioconférence. Il serait nécessaire de disposer d’éléments chiffrés comparant ces coûts à ceux d’une prise en charge ponctuelle des frais de déplacement des candidats. Il me semblerait plus pertinent d’accompagner les lauréats de ces concours, qui doivent quitter leur territoire pour l’Hexagone et dont la plupart reçoivent peu d’aides de l’État.
Avis défavorable.
Contre l’avis du rapporteur pour avis, la commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE283 de Mme Sandrine Rousseau
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Les territoires ultramarins souffrent d’un sous-équipement structurel en termes de centres de tri, de collecte des déchets. Par cet amendement, le groupe Écologiste et Social souhaite lancer les investissements massifs et urgents nécessaires, estimés à 250 millions d’euros, répartis sur cinq ans. Je rappelle par exemple que le nombre de déchets triés par habitant est deux à neuf fois plus faible dans les territoires ultramarins que dans l’Hexagone. La quantité de déchets triés est de 14 kilogrammes, contre 50 kilogrammes dans l’Hexagone.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Le meilleur déchet est celui que l’on ne crée pas. Réinjecter encore de l’argent public n'est pas la solution : il importe d’abord d’améliorer l’ingénierie de la gestion de déchets sur nos territoires.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CE243 de M. Jean-Hugues Ratenon, II-CE284 et II-CE285 de Mme Sandrine Rousseau (discussion commune)
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par cet amendement, nous souhaitons alerter sur la nécessité de mettre en place un véritable plan d’urgence pour rendre effectif le droit d’accès à l’eau dans les collectivités ultramarines.
Cette problématique ancienne et constante pèse quotidiennement sur nos concitoyens ultramarins privés d’eau. De la Guadeloupe à Mayotte, rien n’est fait à la hauteur des besoins pour en finir avec ce fléau.
Le droit d’accéder à l’eau potable est un droit reconnu dans de nombreux pays et par les organisations internationales dont la France est membre. Sur la base des estimations réalisées par les citoyens et les collectivités, l’investissement nécessaire atteint les 2,5 milliards d’euros sur cinq ans. Nous proposons donc de renforcer les financements actuels en 2026 à hauteur de 500 millions d’euros, à travers un plan pluriannuel pour le droit d’accès à l’eau dans les outre-mer.
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Ces amendements visent à défendre les infrastructures de distribution d’eau potable, à les sécuriser.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. L’accès à l’eau dans nos territoires ultramarins constitue un enjeu majeur de santé publique ; mais, encore une fois, les financements doivent répondre à un programme défini, cadré, ciblé. Débuter par une ouverture de crédits à hauteur de 500 millions d’euros, sans plan pluriannuel concerté et piloté, engendrerait un gâchis d’argent public.
J’émets un avis défavorable aux trois amendements.
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Je ne peux pas laisser M. le rapporteur déclarer que la sécurisation de l’approvisionnement en eau, son filtrage et son nettoyage constituent un gâchis. Le manque crucial d’eau participe de la vie chère, puisqu’une partie des habitants de ces territoires doit acheter des bouteilles, multipliant de fait les déchets. Je ne comprends absolument pas votre positionnement.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Ma position est claire. L’eau, c’est la vie ; pour les agriculteurs, pour l’ensemble de nos concitoyens. Pour autant, on ne doit pas faire n’importe quoi. Faute de chiffrage pertinent, j’ai émis un avis défavorable.
Successivement, la commission rejette l’amendement II-CE243, puis, contre l’avis du rapporteur pour avis, adopte l’amendement II-CE284. En conséquence, l’amendement II-CE285 de Mme Sandrine Rousseau tombe.
Amendement II-CE286 de Mme Sandrine Rousseau
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Il est défendu.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Des études ont déjà montré que le ferroviaire n’était pas viable à La Réunion, notamment en raison de la rareté du foncier et de la topographie accidentée. À La Réunion, la population s’est exprimée contre la relance du ferroviaire.
Avis défavorable.
Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Je précise que les études préalables envisagées ne concernent pas seulement La Réunion, mais également la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane et la Nouvelle-Calédonie. En Guadeloupe, un tramway fonctionne très bien.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE294 de M. Philippe Naillet
M. Philippe Naillet (SOC). Les territoires ultramarins concentrent aujourd’hui 80 % de la biodiversité française, mais celle-ci est sous pression.
L’amendement que je porte vise à préserver ces sanctuaires de biodiversité, en renforçant concrètement le financement de l’Office français de la biodiversité (OFB) en outre-mer. Je précise par avance à M. le rapporteur qu’il ne s’agit pas de saupoudrage.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. J’entends vos arguments et je fais moi-même partie de l’OFB. Cependant, le montant d’un million d’euros ne me semblant pas résulter d’un chiffrage précis, j’émets un avis de sagesse.
M. Philippe Naillet (SOC). Si vous faites partie de l’OFB, je vous invite à modifier cet avis de sagesse en avis favorable. Il n’y a rien de théorique dans cet amendement. À La Réunion, les différents acteurs, sous l’autorité de l’OFB, ont réalisé un travail sur la baleine à bosse, qui était en voie d’extinction. Aujourd’hui, l’espèce se repeuple. En matière de préservation de la biodiversité, l’heure est à l’urgence.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Je n’en disconviens pas. Simplement, il faudrait mieux préciser l’affectation des montants envisagés. Je maintiens mon avis de sagesse.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE246 de M. Jean-Hugues Ratenon
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous souhaitons alerter sur la situation à Mayotte, une situation qui résulte d’un manque d’investissement de la part de l’État depuis des années, et qui entretient les inégalités croissantes dans le département le plus pauvre de France. La pauvreté touche 77 % de la population à Mayotte, soit cinq fois plus que dans l’Hexagone. En 2018, la moitié de la population vivait avec moins de 260 euros par mois. Le taux de chômage y est de 37 %.
Nous proposons par le présent amendement d’aligner dès 2026 sur le droit commun les prestations sociales à Mayotte, où le Smic est inférieur.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. La situation sociale et économique de Mayotte est alarmante. L’île connaît des niveaux de vie et des minima sociaux bien inférieurs à ceux de l’Hexagone, ce qui creuse les inégalités territoriales et contredit l’exigence d’égalité républicaine. Il est nécessaire de procéder rapidement à un alignement des prestations sociales entre La Réunion et Mayotte.
Cet alignement constituerait un signal fort de reconnaissance et de solidarité à l’égard de Mayotte, sous réserve que cela bénéficie aux Mahorais français et non aux « Mahorais de papier ».
Pour cette raison, j’émets un avis de sagesse.
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Je rappelle à M. le rapporteur qu’il n’existe pas de « Mahorais de papier ».
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Ils existent.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE256 de M. Perceval Gaillard et II-CE300 de M. Steevy Gustave (discussion commune)
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous proposons par cet amendement II-CE256 de renforcer les moyens de prévention et de sensibilisation au sujet de la santé mentale des jeunes dans les collectivités ultramarines.
Une étude récente de la Mutualité française, de l’Institut Montaigne et de l’Institut Terram sur la santé mentale des 15-29 ans fait apparaître un mal-être psychique généralisé chez ces jeunes. Ils sont dans l’Hexagone entre 9 % et 19 % à estimer avoir une mauvaise santé mentale ; ce chiffre atteint 26 % en Martinique et 32 % à La Réunion.
M. le président Stéphane Travert. Madame Rousseau, vous ne pouvez pas défendre l’amendement II-CE300, n’étant pas signataire.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Notre jeunesse a avant tout besoin de formation, de mobilité, de travail, d’égalité d’accès à la fonction publique, d’opportunités et de débouchés. Si ces difficultés de base sont surmontées, la santé mentale devrait déjà pouvoir s’améliorer. Ces sujets sont trop graves et importants pour être traités au détour d’un amendement de crédit. Il existe le besoin d’un véritable projet pour la santé mentale dans les outre-mer.
Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE258 de M. Jean-Hugues Ratenon
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Il est défendu.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Avis défavorable.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CE255 de M. Perceval Gaillard
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Nous proposons de renforcer les moyens de lutte contre le trafic de stupéfiants dans les outre-mer. La France fait face à un déferlement de drogues et de stupéfiants sur son territoire. En 2024, la douane a saisi près de 21 tonnes de cocaïne, une saisie historique. Les territoires ultramarins ne sont pas épargnés par ce phénomène.
À La Réunion, les campagnes de prévention aux addictions liées aux drogues et aux stupéfiants témoignent d’une volonté de lutter contre ce fléau. Il convient donc de renforcer les dispositifs de prévention, mais aussi les moyens de détection, notamment aux axes de pénétration des substances, lesquels sont identifiés : les aéroports, les colis postaux et les ports.
Nous appelons également le Gouvernement à lever le gage pour assurer les moyens confiés à l’action 9, « Appui à l’accès au financement bancaire » du programme 123 Conditions de vie outre-mer.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Le développement du trafic de stupéfiants dans plusieurs territoires ultramarins constitue une menace pour la santé publique, la sécurité et la cohésion sociale dans nos territoires. Renforcer les moyens de contrôle dans les ports, aéroports et services douaniers est une priorité nationale. Toutefois, 5 millions d’euros peuvent paraître insuffisants face à l’ampleur du phénomène. Il faudrait que cette action soit coordonnée avec les programmes pilotés par le ministère de l’intérieur.
J’émets un avis de sagesse.
La commission adopte l’amendement.
Article 52 et État G - Liste des objectifs et des indicateurs de performance
Amendement II-CE297 de Mme Anchya Bamana
Mme Anchya Bamana (RN). Mayotte connaît une pénurie d’eau depuis une dizaine d’années. Je souhaite par cet amendement connaître le nombre de jours de disponibilité en eau potable par commune, par rapport au nombre de jours dans le mois, pour caractériser cette crise qui asphyxie la population. En effet, dans un communiqué de presse du 23 octobre 2025, le représentant de l’État à Mayotte a pris la décision de vendre des bouteilles d’eau qui étaient destinées à la population après le cyclone Chido, estimant que la situation est redevenue normale alors que nous vivons à Mayotte des coupures d’eau allant jusqu’à quatre jours d’affilée par semaine.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE299 de Mme Anchya Bamana
Mme Anchya Bamana (RN). À la suite du cyclone Chido, une loi d’urgence promulguée en février dernier met en place un prêt à taux zéro pour aider les habitants à reconstruire leurs maisons. Par cet amendement, je souhaite connaître, par établissement bancaire à Mayotte, le nombre de dossiers de prêts instruits et octroyés dans les délais normaux, par mesure de transparence de l’action de l’État à Mayotte.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CE298 de Mme Anchya Bamana
Mme Anchya Bamana (RN). Par cet amendement, je souhaite connaître l’avancement du déblocage des crédits au profit des collectivités de Mayotte, crédits votés dans le cadre de la loi de refondation d’août dernier. Lorsque nous demandons ces éléments à la représentation du Gouvernement à Mayotte, nous n’arrivons pas à les obtenir.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Il faut aider Mayotte. Avis favorable.
La commission adopte l’amendement.
Après l’article 71
Amendements II-CE252 et II-CE253 de M. Jean-Hugues Ratenon et II-254 de Mme Sandrine Nosbé
Mme Sandrine Nosbé (LFI-NFP). Par l’amendement II-CE252, nous sollicitons la rédaction d'un rapport exhaustif sur la pénurie de logements étudiants dans les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous) des collectivités dites d’outre-mer.
Les amendements II-CE253 et II-CE254 portent sur des demandes de rapport. Ils sont défendus.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Je suis défavorable au amendements de demande de rapports, puisque de nombreux rapports existent déjà et que cela mobilise des ressources administratives en interne.
Au-delà, il me paraît important de relancer l’activité de fret à La Réunion, notamment à Pierrefonds, afin de rééquilibrer la desserte du sud de l’île et de fluidifier les chaînes logistiques.
Avis défavorable pour les trois amendements.
La commission rejette successivement les amendements.
M. le président Stéphane Travert. Nous en avons terminé avec l’examen des amendements. J’invite M. le rapporteur à nous donner son avis sur les crédits qui entrent dans le champ de l’avis budgétaire relatif à l’outre-mer, sur les programmes 123 et 138 au sein de la mission Outre-mer.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Je suis défavorable aux crédits qui sont prévus par le Gouvernement sur la mission « Outre-mer », car ils matérialisent des coupes budgétaires inacceptables. Chacun d’entre nous a apporté des solutions, même si nous ne nous accordons pas tous sur celles-ci. Pour certains des amendements, j’ai émis un avis de sagesse, faute d’éléments probants.
Mes amendements expriment un refus de baisse des crédits, tout en ne proposant pas de nouvelles dépenses. Le groupe Rassemblement national promeut de véritables investissements, des planifications et non un saupoudrage des moyens. Les outre-mer constituent la force, la fierté de la nation.
En résumé, je suis défavorable à ces baisses de crédits pour l’ensemble des outre-mer.
M. le président Stéphane Travert. Je rappelle que si les crédits de la mission « Outre-mer » qui ont été examinés durant cette séance ne sont pas adoptés, ce rejet aura pour effet de faire tomber l’ensemble des amendements que nous venons d’adopter au cours de la discussion.
M. Pascal Lecamp (Dem). Les amendements votés aujourd’hui représentent entre 700 millions d’euros et 800 millions d’euros supplémentaires, pour un budget de l’ordre de 2,5 milliards d’euros. Je serais surpris que M. le rapporteur s’oppose au budget ainsi amendé. Voter contre reviendrait à supprimer ces 800 millions d’euros.
M. le président Stéphane Travert. Plus précisément, ces amendements ont prévu de mobiliser 725 311 891 euros supplémentaires sur le programme 123 conditions de vie outre-mer.
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Je précise que je suis évidemment favorable à l’adoption des crédits de la mission une fois inclus les amendements que nous avons votés. Je suis contre la baisse des crédits.
M. le président Stéphane Travert. Monsieur le rapporteur, quel est votre avis sur cette mission budgétaire et ses crédits, tels qu’ils se présentent après le vote des amendements ?
M. Joseph Rivière, rapporteur pour avis. Je suis en faveur de la mission, après le vote des amendements.
M. le président Stéphane Travert. Il nous faut désormais nous prononcer sur les crédits examinés dans le cadre de cet avis budgétaire.
La commission émet un avis favorable sur les crédits de la mission Outre-mer modifiés.
M. le président Stéphane Travert. La commission des affaires économiques émet donc un avis favorable sur les crédits de la mission Outre-mer ainsi modifiés dont elle est saisie dans le cadre du projet de loi de finances pour 2026.
Membres présents ou excusés
Commission des affaires économiques
Réunion du lundi 3 novembre 2025 à 17 heures
Présents. - M. Julien Gabarron, Mme Annaïg Le Meur, M. Pascal Lecamp, M. Hervé de Lépinau, M. Max Mathiasin, M. Philippe Naillet, Mme Sandrine Nosbé, M. Joseph Rivière, Mme Anne-Sophie Ronceret, Mme Mélanie Thomin, M. Stéphane Travert
Excusé. - M. Harold Huwart
Assistaient également à la réunion. - Mme Anchya Bamana, Mme Sandrine Rousseau