Compte rendu

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

 Suite de l’examen pour avis des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du projet de loi de finances pour 2026 (n° 1906) :

. Paysages, eau et biodiversité (Mme Julie Ozenne, rapporteure pour avis) ;

. Politiques de développement durable (M. Vincent Descoeur, rapporteur pour avis) ;

. Protection de l’environnement et prévention des risques (Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis) ;

. Transition énergétique (M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis)...... 2

 

 


Mercredi 29 octobre 2025

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 11

Session ordinaire de 2025-2026

Présidence de

Mme Sandrine Le Feur,

Présidente

 


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La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a poursuivi l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du projet de loi de finances pour 2026 (n° 1906) sur les rapports pour avis de Mme Julie Ozenne sur les crédits relatifs aux paysages, eau et biodiversité, de M. Vincent Descoeur sur les crédits relatifs aux politiques de développement durable, de Mme Danielle Brulebois sur les crédits relatifs à la protection de l’environnement et à la prévention des risques, et de M. Pierre Meurin sur les crédits relatifs à la transition énergétique.

Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous commençons par les crédits relatifs aux paysages, eau et biodiversité ainsi qu’à ceux portant sur les politiques de développement durable.

Mme Julie Ozenne, rapporteure pour avis. En 2026, les crédits du programme 113 Paysages, eau et biodiversité diminueront de 5 % en crédits de paiement (CP) et de 8 % en autorisations d’engagement (AE), ce qui signifie une perte de près de 40 millions d’euros par rapport à 2025. Il ne s’agit pas d’une simple diminution comptable : c’est une régression majeure pour la préservation de la biodiversité, déjà fragilisée par la crise climatique, la pollution et l’artificialisation des sols.

Fin 2022, le gouvernement s’était engagé en faveur de la stratégie nationale pour la biodiversité (SNB) 2030, qui comporte des objectifs précis, mais comment la mener à bien quand les moyens budgétaires diminuent chaque année ? Qu’on en juge : selon le rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) et de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (Igedd), les crédits alloués à la SNB devaient s’élever à 264 millions d’euros en 2024, pour ensuite atteindre 375 millions en 2026, au lieu de quoi seuls 135 millions ont été versés en 2024 et 75 millions en 2025 ; moins de 50 millions seulement le seront l’an prochain. Le différentiel cumulé est proche des 300 millions d’euros.

Cette politique d’austérité frappe également les opérateurs de l’État, pourtant les bras armés de la protection de la nature. C’est le cas de l’Office français de la biodiversité (OFB), qui voit ses effectifs encore diminuer de 16 équivalents temps plein (ETP) alors que ses missions se multiplient, notamment pour appliquer le règlement européen sur la restauration de la nature. Sa subvention pour charges de service public (SCSP) reste gelée à 117,6 millions d’euros quand ses dépenses obligatoires, elles, progressent de 3 millions pour assurer le paiement des pensions. Cette situation se traduit par moins d’agents sur le terrain, moins d’atlas de la biodiversité communale, moins d’aires éducatives, mais aussi moins d’aides aux agriculteurs. Par voie d’amendement, je proposerai de doter l’office des 45 ETP supplémentaires dont il aurait dû bénéficier en vertu d’un engagement pris par le gouvernement il y a trois ans. Dans le cas contraire, comment la France pourra-t-elle, d’ici à la fin 2026, rendre un plan crédible à Bruxelles sur la restauration de la nature – nature dont dépend plus de la moitié du PIB mondial ?

Je me suis également intéressée à la situation de nos onze parcs nationaux, qui sont à la fois nos plus beaux joyaux et nos sentinelles. Leur dotation reste figée à 74,7 millions d’euros alors même que leurs coûts augmentent en raison de l’inflation et de l’entretien des infrastructures endommagées par les tempêtes et les sécheresses, les parcs étant particulièrement vulnérables aux effets du dérèglement climatique. Leur plafond d’emplois est inchangé à 851 ETP, un niveau insuffisant. Dans un rapport rendu en mars dernier, l’Igedd estime qu’il manque trente-trois postes pour que les parcs assurent correctement leurs missions. Dix sur onze consacrent entre 80 et 98 % de leur budget à la masse salariale, ce qui ne leur laisse donc presque rien pour l’entretien des sentiers et des refuges, ou pour investir. Les parcs ultramarins sont particulièrement en difficulté, alors qu’ils concentrent une grande proportion d’espèces endémiques. En Guyane, la lutte contre l’orpaillage illégal, qui atteint des sommets historiques, mobilise 15 % du budget du parc national.

Par ailleurs, les agences de l’eau voient leur plafond de recettes progresser de seulement 50 millions d’euros, alors qu’elles auraient dû être dotées de 175 millions supplémentaires pour respecter la trajectoire fixée par le plan Eau, dont elles sont les piliers
– c’est d’ailleurs ce qu’avait annoncé le gouvernement lors de la précédente discussion budgétaire. Cette insuffisance de moyens empêche le paiement des agriculteurs pour services environnementaux et ralentit les actions en faveur du renouvellement des réseaux et de la protection de la qualité de l’eau. Elle met aussi en péril nos engagements européens pour 2027, pris dans le cadre de la directive-cadre sur l’eau. Je proposerai donc un amendement visant à respecter nos engagements budgétaires, pris au titre du plan Eau.

Le programme 159 Expertise, information géographique et météorologie, dont j’ai aussi la charge, contient les crédits affectés aux opérateurs spécialisés qui nous permettent de modéliser, de cartographier et d’analyser l’évolution du climat, tout en agissant sur l’adaptation des territoires. Les crédits du programme augmentent de 29 %, pour atteindre 670 millions d’euros. Notons toutefois que cette progression est due, d’une part, au transfert des fonds alloués à l’université Gustave-Eiffel et au Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) et, d’autre part, à une dotation exceptionnelle de 60 millions d’euros en faveur de Météo-France, pour le renouvellement de ses supercalculateurs. À périmètre constant, les crédits du programme baissent en réalité de 7 millions d’euros, tandis que les opérateurs qui s’y rattachent perdent encore 42 ETP.

Ainsi en est-il du Cerema, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, pivot de l’adaptation des territoires au changement climatique, qui voit sa subvention limitée à 186 millions d’euros, soit 7 millions de moins que ce que prévoyait le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 et 20 millions en deçà des besoins d’emplois permanents. Son plafond d’emplois baisse en effet de 25 ETP, alors qu’il doit piloter plus de la moitié des actions du plan national d’adaptation pour le changement climatique (Pnacc). La mission d’adaptation, lancée en grande pompe lors de l’adoption du troisième volet du plan, demeure donc une coquille vide, sans aucuns moyens humains ou financiers. C’est pourquoi je proposerai un amendement afin de revenir au moins à la dotation de 2025.

Autre acteur en difficulté, l’IGN – Institut national de l’information géographique et forestière – perd dix-sept postes supplémentaires et voit sa subvention pour charge de service public stagner à 100,5 millions d’euros, alors que ses coûts obligatoires augmentent de 2,5 millions. Sa stabilité financière est par ailleurs mise en danger par une subvention inférieure à sa masse salariale depuis de nombreuses années, malgré les réductions d’effectifs imposées. Il faut donc l’aider à rétablir son équilibre financier.

Météo-France s’en sort légèrement mieux grâce à une dotation exceptionnelle. Son nouveau supercalculateur permettra de multiplier par six sa puissance de calcul ; nous devons nous en féliciter. Cependant, hormis cet investissement, la situation de l’organisme reste fragile. Son infrastructure informatique est obsolète et ses effectifs sont figés à 2 632 ETP alors que les événements extrêmes se multiplient.

Par ailleurs, au-delà de ces deux programmes, je rappelle que le fonds Vert pour l’accélération de la transition écologique dans les territoires continue de s’effondrer. Doté de 2,5 milliards en 2024, puis d’encore 1 milliard l’an dernier, il ne s’élèvera plus qu’à 650 millions d’euros en 2026 en autorisations d’engagement, un montant de 43 % inférieur à ce qui était annoncé. Concrètement, cela signifie moins de projets de renaturation, moins de mesures d’adaptation au changement climatique, moins de rénovations dans nos villages et nos communes. La réduction des crédits du fonds Vert a un impact direct sur les actions conduites dans le cadre des programmes 113 et 159. Les collectivités locales en seront les premières victimes.

En somme, il serait temps de se rendre compte que la biodiversité et la nature ne doivent plus être une variable d’ajustement budgétaire. L’écart se creuse entre les fonds alloués et les engagements pris aux niveaux national et international. Nous ne restaurerons pas la nature avec des crédits en baisse et nous ne préparerons pas les territoires au changement climatique en affaiblissant les organismes qui les accompagnent.

D’après un sondage Harris Interactive publié en octobre 2024 et relayé par le Commissariat général au développement durable (CGDD), 86 % des Français considèrent que leur quotidien et leur avenir dépendent de la biodiversité, et 66 % s’inquiètent de la qualité de vie qu’auront les générations futures. Une proportion comparable se dit optimiste, affirmant qu’il est encore temps de protéger et de restaurer la biodiversité. Enfin, le sondage montre qu’une majorité de Français – 64 % – attendent une plus grande mobilisation de la part du gouvernement.

Nous sommes à un tournant de notre histoire et ce budget est en contradiction avec les engagements pris par la France, en particulier avec la SNB, le troisième volet du Pnacc et lors de la COP15. C’est pourquoi, en l’état, je ne peux qu’émettre un avis défavorable à l’adoption des crédits des programmes 113 et 159.

M. Vincent Descoeur, rapporteur pour avis. Le programme 217 Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables constitue le support de la mise en œuvre des politiques publiques du pôle ministériel, lequel regroupe les ministères chargés de la transition écologique, de l’aménagement du territoire, de la ville et du logement. Il contient l’essentiel de la masse salariale de ces ministères, celle de trois autorités administratives indépendantes, ainsi que le financement du fonctionnement et de l’investissement nécessaires à leurs politiques publiques. Il se trouve au cœur d’injonctions parfois contradictoires entre, d’un côté, les besoins immenses de la transition écologique et, de l’autre, la nécessité d’amplifier les efforts de réduction du déficit public.

Dans un contexte de hausse du coût des dommages environnementaux, plus personne ne remet en cause la nécessité et les bénéfices d’une politique de soutien à la transition écologique. Dans un rapport paru en septembre dernier, la Cour des comptes l’affirme : en cas de statu quo des politiques de lutte contre le dérèglement climatique, la perte de PIB pour la France est estimée à 11,4 points à l’horizon 2050.

Je tiens donc à saluer le travail des agents du pôle ministériel, mobilisés pour répondre aux défis, nombreux et complexes, de la transition écologique et énergétique, mais aussi à ceux de la réindustrialisation de notre pays. L’intensification du dérèglement et des risques climatiques tend à accroître leur charge de travail.

Mais un autre constat s’impose : la situation budgétaire est alarmante et la nécessité de redresser nos comptes publics impose une sélection rigoureuse des dépenses. La contribution de l’État à la transition écologique doit donc reposer sur une définition claire des priorités et sur une évaluation régulière de l’impact et de l’efficacité des dispositifs.

Le programme 217 tente de répondre à cet enjeu, malgré une augmentation limitée des dépenses de personnel, qui représentent 93 % des crédits. Comme en 2025, les effectifs du pôle ministériel sont orientés à la baisse. Le schéma d’emplois se traduit par une suppression de 216 ETP, après une perte de 322 emplois l’an dernier. Il se décline néanmoins de manière à préserver autant que faire se peut certains effectifs jugés prioritaires.

Sont maintenus les effectifs dont les missions comportent des enjeux de sécurité des personnes et des biens, particulièrement dans le domaine de la prévention des risques naturels et industriels ; je pense notamment aux inspecteurs des installations classées. Il en va de même des directions interdépartementales des routes (DIR), qui ont déjà connu d’importantes suppressions d’emplois dans le passé et qui doivent satisfaire aux exigences en matière de sécurité. Enfin, le nombre de personnels œuvrant dans le domaine de l’énergie et du climat se trouve renforcé, notamment afin d’assurer une mobilisation accrue des certificats d’économies d’énergie (CEE) au bénéfice des politiques publiques.

Le schéma d’emplois obéit en outre à deux principes : la contribution accrue des fonctions support et transversales, grâce à la recherche de gains de productivité ; et un taux d’effort plus exigeant en administration centrale que dans les services déconcentrés. Je ne peux que souscrire à cette orientation : dans un contexte où les enjeux d’adaptation au changement climatique et de transition écologique vont croissant, la réduction des effectifs suppose plus que jamais d’établir des priorités, afin de ne sacrifier aucune mission.

Plusieurs points de vigilance méritent toutefois d’être mentionnés.

D’abord, alors que la transition écologique continue de requérir des expertises de pointe et pluridisciplinaires, je regrette que la contraction des effectifs observée ces deux dernières décennies se traduise par une tension accrue sur les compétences techniques disponibles. La compression des personnels ne doit pas non plus aboutir à un désengagement de l’État sur le terrain. C’est à ces conditions que la politique de sérieux budgétaire sera acceptée par nos concitoyens.

Ensuite, certains corps souffrent d’un manque d’attractivité depuis plusieurs années, à l’image des officiers de port, des officiers de port adjoints et des techniciens supérieurs principaux du développement durable. Le ministère doit poursuivre ses efforts en ce domaine, en particulier s’agissant des filières techniques, où les besoins en ingénieurs et techniciens entrent en concurrence avec le secteur privé.

Enfin, le recours aux contractuels s’est fortement accru depuis 2019, une augmentation concomitante avec la baisse du plafond d’emplois du pôle ministériel. Or si les contractuels permettent de pourvoir certains postes, notamment les plus techniques, ils ne doivent pas servir de contrepartie à la diminution du plafond d’emplois, sans quoi la baisse des effectifs aurait lieu en trompe-l’œil. Le temps consacré à la formation des contractuels et le risque de les voir quitter leur poste au bout de quelques mois doivent être pris en compte dans l’évaluation des bénéfices budgétaires attendus de ce statut.

Les dépenses de fonctionnement et d’investissement sont stables, à l’exception des dépenses immobilières, qui augmentent de 34 %. Il y a une explication à cela : le schéma pluriannuel de stratégie immobilière prévoit une opération d’ampleur visant à densifier et à réaménager le bâtiment de la Grande Arche et la tour Séquoia de La Défense. Je souscris pleinement à ces actions de rationalisation et de rénovation du parc immobilier, qui permettront à terme de réduire les coûts de fonctionnement courants du ministère.

J’en viens aux trois autorités administratives indépendantes relevant du pôle ministériel, dont les effectifs sont stables.

Tout d’abord, la Commission de régulation de l’énergie, la CRE, assume une charge de travail croissante qui devrait encore s’accentuer dans les années à venir, avec la mise en œuvre du mécanisme devant succéder à l’Arenh (accès régulé à l’électricité nucléaire historique) et l’exercice d’une nouvelle mission de régulation de l’hydrogène. Si la CRE estime pouvoir remplir ses missions à moyens constants en 2026, elle s’inquiète néanmoins des conséquences qu’aurait l’adoption de l’article 69 du présent projet de loi de finances (PLF), qui prévoit la révision d’anciens contrats de soutien photovoltaïque et des discussions au cas par cas entre la Commission et les producteurs. La CRE estime qu’elle ne dispose pas des moyens suffisants pour réaliser cette mission et demande en conséquence une rallonge budgétaire de 500 000 euros de crédits de titre 2.

Ensuite, la situation de l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires, l’Acnusa, s’est améliorée cette année grâce à la nomination, en janvier, d’un nouveau président après plusieurs mois de vacance. Ainsi, le retard pris dans l’établissement de sanctions contre les compagnies aériennes ne respectant pas la réglementation environnementale a pu être rattrapé.

Enfin, la Commission nationale du débat public, la CNDP, fait l’objet depuis quelques années de débats passionnés, la réduction de son champ de compétences ayant été évoquée lors de l’examen de plusieurs textes. La Commission s’est montrée attentive aux critiques, qui résultent parfois – mais pas toujours – d’une simple méconnaissance de son travail. Cependant, si certaines attaques sont infondées, il n’en demeure pas moins qu’elle se doit de répondre aux questions légitimes qui se posent, en vue d’accroître l’efficacité et la rationalisation de l’ensemble des autorités administratives indépendantes – un sujet d’actualité.

Je termine en abordant la situation de deux écoles publiques d’ingénieurs soutenues par le programme 217 : l’École nationale des ponts et chaussées (ENPC) et l’École nationale des travaux publics de l’État (ENTPE). Plusieurs rapports l’ont montré, le nombre d’ingénieurs formés devra fortement augmenter au cours des prochaines années pour répondre aux défis de la transition écologique, énergétique et numérique, mais aussi à ceux de la réindustrialisation. Pour ce faire, l’ENPC et l’ENTPE sollicitent de manière constante auprès de leur tutelle un renforcement significatif de leurs moyens, afin de développer des formations et des travaux de recherche. Hélas, la subvention pour charges de service public des deux écoles sera quasiment stable en 2026, tandis que leurs effectifs sous plafond devraient diminuer de 2 ETP dans chaque école. À cet égard, le secrétaire général du pôle ministériel a reconnu que leurs projets de développement ne pourraient être engagés dans l’immédiat pour des raisons budgétaires.

La réduction des dépenses publiques est certes une nécessité absolue, mais l’investissement dans le capital humain, en l’occurrence au travers de la formation d’ingénieurs de haut niveau, répond aussi aux attentes de nos entreprises et aux besoins de notre économie. La réussite de la transition écologique et de la réindustrialisation passe par un réarmement scientifique et technique de notre tissu économique ; l’ENPC comme l’ENTPE peuvent y contribuer. Si des gains d’efficience peuvent toujours être escomptés, il apparaît que le développement des capacités de formation des deux écoles ne pourra faire l’économie d’un accompagnement plus marqué de leur tutelle.

Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

Mme Julie Lechanteux (RN). Nous sommes réunis pour confronter nos approches budgétaires au sujet de la protection de nos paysages, de la conduite de nos politiques de développement durable et, sujet majeur, de la prévention des risques.

Sur le premier point, les députés du groupe Rassemblement national auront à cœur de défendre la feuille de route exposée par Marine Le Pen lors de l’élection présidentielle de 2022, c’est-à-dire la défense de notre patrimoine naturel et de nos territoires contre les absurdités de l’écologie punitive et des directives européennes, qui massacrent nos régions. Sous couvert de transition vertueuse, nous constatons en effet le saccage de nos paysages par l’installation anarchique d’énergies renouvelables non pilotables, la dégradation de nos nappes phréatiques en raison du laxisme d’État face à la cabanisation, et la défiguration de nos littoraux par les objectifs délétères de l’éolien en mer. Alors que le gouvernement prévoit une baisse inédite des crédits alloués à la protection de la biodiversité, nous proposerons des transferts de financement pour revitaliser la politique française des sites, développer l’économie circulaire et soutenir la politique de l’eau.

Le deuxième volet interroge nos capacités de prévision et d’adaptation au changement climatique. Face à la démultiplication et à l’intensification des catastrophes naturelles, le renforcement de notre vigilance collective sera crucial. Nous accueillons favorablement la consolidation budgétaire du programme 181, en particulier en faveur du fonds Barnier et de la protection assurantielle du retrait-gonflement des argiles. Nous sommes néanmoins convaincus que la prévention dépend aussi d’une administration efficace, au sein de laquelle les responsabilités de chaque strate et des agences de l’État sont correctement identifiées et où chaque euro d’argent public investi permet de trouver des solutions pour renforcer la résilience de nos territoires.

C’est en vertu de ces principes que nous proposerons de réduire les crédits alloués à l’Ademe, l’Agence de la transition écologique, dont les missions devraient être réinternalisées afin de mettre fin au gaspillage d’argent public dans une communication décalée, inefficace et culpabilisante. Je le répète, l’efficacité de la dépense publique est une priorité. Or nous constatons depuis plusieurs années une fuite en avant des dépenses de fonctionnement, à tous les niveaux. Comment justifier auprès des Français qu’ils doivent consentir à une année blanche, mais accepter la revalorisation des crédits alloués à des études idéologiques et condescendantes du ministère de la transition écologique ?

Face à ces absurdités, notre groupe défendra des amendements visant à corriger cette dérive de l’action publique, qu’il faut recentrer sur sa mission initiale. Cela vaut aussi pour la CNDP et la CRE : il est grand temps de réexaminer l’organisation de notre service public, pour viser l’efficacité.

Mme Sophie Panonacle (EPR). Je me réjouis des objectifs fixés dans les programmes 113, 159 et 217, qui traduisent un engagement en faveur de la protection de nos ressources naturelles, de la gestion intégrée de la ressource en eau, de la restauration de la biodiversité et de l’extension des aires protégées. Ces priorités répondent à des enjeux essentiels pour l’avenir de nos territoires, même si les moyens alloués doivent être à la hauteur pour que ces ambitions produisent leurs effets.

Or le programme 113 voit ses crédits de nouveaux diminuer en 2026, de 5 % en crédits de paiement et de 8 % en autorisations d’engagement – une trajectoire qui interroge. Certaines baisses s’expliquent, par exemple par la fin du plan triennal Grand Gibier, mais le recentrage des priorités stratégiques ne doit pas masquer un affaiblissement de notre capacité d’action.

La réduction des crédits affecte directement la mise en œuvre de la SNB 2030, laquelle ne pourra atteindre ses objectifs sans l’allocation de moyens à la hauteur de ses ambitions. Nous comprenons que la contrainte du déficit impose une rationalisation de son déploiement, mais c’est au risque d’en atténuer l’impact réel sur le terrain.

Le Conseil national de la mer et des littoraux (CNML), dont je préside le bureau, avait formulé un avis sur cette stratégie il y a plus de deux ans. Nous y soulignions l’insuffisance de la programmation temporelle et financière des actions et suggérions la création de nouveaux leviers de financement. Parmi nos propositions figurait notamment l’affectation d’une partie du produit de la taxe sur l’éolien en mer en zone économique exclusive (ZEE) à la protection de la biodiversité marine. Quel regard portez-vous sur cette piste, madame la rapporteure pour avis ?

S’agissant du Conservatoire du littoral, il figurait sur la liste des organismes condamnés à disparaître. Quelle hérésie quand on sait qu’il assure la protection de 15 % de notre linéaire côtier ! Chaque année, ce sont ainsi entre 2 500 et 3 500 hectares supplémentaires qui sont protégés, par acquisition ou affectation, afin de préserver les zones les plus exposées. Eu égard à l’accélération de l’érosion des littoraux de toutes nos façades maritimes, la mission de cet opérateur est cruciale. Je salue donc la légère revalorisation de sa principale ressource, issue de la taxe sur les engins maritimes à usage personnel, portée à 42,5 millions d’euros en 2026. C’est un signal positif car le plafond de cette taxe n’avait pas été relevé depuis plusieurs années, mais l’évolution demeure modeste au regard des besoins.

Un mot, enfin, sur la politique de l’eau, qui vise à concilier gestion quantitative et amélioration de la qualité des milieux. La poursuite du plan Eau en 2026 s’accompagnera d’un relèvement du plafond des recettes des agences de l’eau, afin de soutenir la modernisation des réseaux d’eau et d’assainissement. Entrée en vigueur cette année, la réforme des redevances doit, elle, renforcer la démarche entreprise concernant la pollution et encourager l’amélioration de la performance des services. Pour avoir conduit les travaux du CNML sur la qualité des eaux côtières, c’est un sujet auquel je suis particulièrement attentive : les épisodes de contamination virale, lors de l’hiver 2023, ont révélé des fragilités dans notre système. Madame la rapporteure pour avis, ne serait-il pas pertinent de renforcer l’évaluation des actions conduites par les agences de l’eau ?

En tout état de cause, les députés du groupe EPR donneront un avis favorable aux crédits de l’ensemble de la mission.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NFP). La semaine dernière, la ministre Monique Barbut s’est dite fière du budget de l’écologie, qui n’est, selon elle, pas sacrifié. Il est pourtant gelé alors même que nous faisons face au plus grand défi que l’humanité ait jamais eu à relever : l’effondrement du seul écosystème dans lequel nous puissions vivre.

En France, plus de deux tiers des zones humides ont disparu et une espèce sur cinq est menacée d’extinction, ce qui correspond, rien que pour l’Hexagone, à 14 % des mammifères, à 24 % des reptiles, à 23 % des amphibiens, à 32 % des oiseaux nicheurs et à 19 % des poissons d’eau douce. Mais cela n’empêche pas le gouvernement Lecornu 2 de baisser le programme 113 de 33 millions d’euros supplémentaires, celui-ci représentant désormais moins de 2 % du budget de la mission, un chiffre complètement dérisoire. Pourtant, l’Igedd et l’IGF estimaient qu’il était vital d’augmenter les moyens, afin de respecter la SNB. Autant dire que celle-ci est maintenant jetée aux orties – pour peu qu’il en reste.

Les opérateurs perdent, eux, quarante-deux postes, dont seize pour l’Office français de la biodiversité, qui était déjà attaqué politiquement et physiquement, et vingt-cinq pour le Cerema, alors qu’il ne disposait déjà pas des moyens suffisants pour remplir sa mission d’accompagnement technique des collectivités dans l’adaptation au changement climatique. Collectivités qui, elles, perdent de toute façon 5,3 milliards d’euros de dotations, dont 1,3 milliard en raison de la suppression de la CVAE – cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Ce sont autant de projets de restauration des rivières, de renaturation urbaine ou de préservation des zones naturelles qui ne verront pas le jour.

La politique écologique du gouvernement garde donc sa ligne, punitive pour les ménages, laxiste pour les pollueurs. Tandis que la taxe sur les déchets augmente de 10 %, celle sur les plastiques, nouvellement créée, ne finance aucune transition et ne sert qu’à compenser les pénalités européennes dues à notre retard colossal en matière de recyclage.

Mais nous distribuons toujours 211 milliards d’euros d’aides publiques aux grandes entreprises, sans aucune contrepartie écologique. Bernard Arnault et ses copains peuvent continuer à polluer tranquillement avec leurs jets privés, leurs yachts et, surtout, leurs investissements massifs dans les industries polluantes – le tout en participant deux fois moins à l’effort fiscal que le reste de la population, qui subit pourtant leur pollution massive. Oxfam nous en informe ce matin : 308 milliardaires polluent autant que 118 pays.

En résumé, ce budget nous envoie dans le mur de la sixième extinction des espèces. Il asphyxie les acteurs de terrain, abandonne la biodiversité et prive les collectivités des moyens d’agir. Face à l’effondrement du vivant, on ne peut se contenter de gérer la pénurie : il faut changer de cap. La dette écologique est mesurable au nombre de catastrophes climatiques, de destructions d’écosystèmes, d’extinctions d’espèces, et elle est bien plus dangereuse que la dette financière. La Cour des comptes le rappelle, l’inaction climatique nous coûtera 300 milliards d’ici à 2050.

En 2023, les économistes Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz estimaient qu’il fallait consacrer entre 25 et 34 milliards d’euros supplémentaires par an pour la transition écologique. Dès que nous serons au pouvoir, nous investirons 50 milliards immédiatement pour remettre la France sur les rails de la bifurcation écologique. En attendant, le gouvernement préfère relancer l’armement, le nucléaire et cajoler les milliardaires, plutôt que de préserver nos conditions de survie collective.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Mes collègues socialistes et moi ne pouvons que déplorer la baisse, pour la deuxième année consécutive, des crédits affectés au programme 113. Déjà en recul de 150 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 50 millions en crédits de paiement en 2025, sa dotation diminue encore de 30 millions en AE et de 20 millions en CP, ce qui équivaut à une réduction de 8 %.

Cette sous-dotation durable a pourtant des conséquences directes sur nos écosystèmes, nos paysages et la qualité de notre eau. Elle altère l’objectif de renaturation, qui s’inscrit dans la logique « éviter, réduire, compenser », laquelle est destinée à reconstituer une chaîne biologique et un équilibre des écosystèmes. Elle compromet les actions de sensibilisation du public, qui sont très importantes pour l’acceptation de la transition écologique. Et elle met à mal les actions d’adaptation au changement climatique.

Face à la crise écologique que nous connaissons, les programmes de la mission devraient voir leur dotation tripler et non stagner, voire diminuer. S’agissant aussi bien des moyens que des effectifs, ce budget n’est pas à la hauteur de l’urgence. Les missions des opérateurs de l’État, tels que l’OFB ou le Cerema, se multiplient, mais sans que leurs enveloppes évoluent. La suppression de 29 ETP fragilise la réalisation des objectifs du programme 113. Ces effectifs contribuent pourtant très largement à la protection de la biodiversité sur tout le territoire français et veillent quotidiennement à la surveillance, à la gestion et à la préservation des milieux naturels. Nous demandons donc le rétablissement des postes.

En définitive, ce budget va à contresens des ambitions écologiques que notre pays devrait avoir, mais nous pouvons l’améliorer. J’espère y parvenir avec vous ce matin.

M. Jean-Yves Bony (DR). Les programmes 113, 159 et 217 font tous, à des degrés divers, les frais de la contraction budgétaire, exigée par la situation de nos finances publiques. Comme cela a été dit, le programme 113 est concerné, entre autres, par la baisse du fonds Vert et la réduction des effectifs de l’OFB. Si le programme 159, à périmètre constant, voit aussi sa dotation diminuer, nous saluons néanmoins l’engagement de crédits en faveur des nouveaux supercalculateurs de Météo-France, lesquels permettront des progrès notables dans des domaines aussi divers que la prévision météorologique, l’optimisation du trafic aérien ou encore la préparation de nos forces armées dans les théâtres extérieurs. Quant au programme 217, financièrement le plus conséquent, il représente un peu plus de 3 milliards d’euros, essentiellement consacrés aux dépenses de personnel de plusieurs ministères, aux administrations et aux opérateurs impliqués dans la transition écologique, la politique du logement et la cohésion territoriale.

Comme vous, monsieur le rapporteur pour avis, nous apprécions les principes avec lesquels la réduction du nombre d’ETP a été pensée. Comme vous, nous estimons qu’une meilleure organisation et un recours accru aux avancées technologiques récentes doivent permettre de réduire la voilure sans grever la qualité des services rendus par les agents.

De même, l’obtention de marges de manœuvre grâce à la réduction des effectifs peut nous conduire à redéployer nos efforts sur les métiers à haute compétence technique et scientifique, qui sont indispensables et qui font l’objet d’une concurrence de plus en plus asymétrique de la part du secteur privé. Je me réfère ici aux constats effectués par la précédente rapporteure pour avis, Lisa Belluco, qui avait pointé le déclassement progressif des agents publics par rapport au privé. Gels successifs des salaires, faibles perspectives d’évolution, aplatissement de la pyramide des rémunérations : les agents qui dépendent de cette mission souffrent de maux partagés par nombre de leurs collègues de la fonction publique, toutes affectations confondues. Le rapport de notre collègue notait qu’en quinze ans, la rémunération des agents du pôle ministériel est devenue 30 % inférieure à celle du privé, à poste équivalent. Cette situation conduit à un recours toujours accru à la contractualisation, un fonctionnement qui n’est pas exempt de défauts. Ce diagnostic ne saurait être ignoré dans notre réflexion collective sur l’évolution de la fonction publique et de ses effectifs.

Enfin, je vous remercie, monsieur le rapporteur pour avis, de vous être intéressé aux écoles publiques d’ingénieurs, qui fournissent nombre des profils techniques dont nous avons plus que jamais besoin pour relever les défis écologiques et de la réindustrialisation. Nous sommes d’accord, nos efforts pour le redressement de nos finances publiques ne doivent pas nous conduire à faire des choix coûteux pour l’avenir.

Mme Marie Pochon (EcoS). Pire que le scénario du pire : « La Terre vient d’enfanter ce qu’elle sait faire de pire. » Ce sont les mots d’un agroclimatologue sur le cyclone Melissa, l’une des pires catastrophes météorologiques, et sans nul doute humanitaires, qui a dévasté cette nuit la Jamaïque à 300 kilomètres par heure. L’ouragan s’est intensifié en stagnant sur l’eau anormalement chaude de l’océan – ouragan dont les vents sont rendus plus rapides et les précipitations plus importantes par le taux d’humidité, lui-même lié à la hausse de la température de l’air. Et nous ne sommes qu’à 1,4 degré de réchauffement ; les 3 degrés sont pour la fin du siècle…

D’ici là, nous aurons beaucoup de choses à vivre. Le taux de disparition des espèces est entre 100 et 1 000 fois supérieur au taux naturel d’extinction. Les trois quarts des vertébrés ont ainsi disparu en cinquante ans : c’est ce que les scientifiques appellent la sixième extinction de masse. À ce jour, 75 % des écosystèmes mondiaux sont altérés par l’activité humaine ; en France, par exemple, deux tiers des zones humides ont disparu. Pire que le scénario du pire !

Face à cela, on peut se dire que d’autres font pire que nous et donc continuer de flécher l’argent public vers les aides à la construction, l’usage des pesticides, les projets routiers, de lever les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et surtout de ne pas toucher au mode de vie de certains privilégiés qui ont votre oreille. Ou bien on peut penser à la protection de la biodiversité, c’est-à-dire à l’atténuation et à l’adaptation face aux défis climatiques et en tenant compte des limites planétaires dans nos politiques publiques, afin de protéger le plus grand nombre. Qu’il s’agisse de l’eau, de la biodiversité, de l’expertise météorologique, de la prévention des risques, de la transition, nous, écologistes, faisons résolument le deuxième choix.

Suite logique de la suppression, en vingt ans, de 8 000 postes relevant du ministère de l’écologie – une orientation qui nous prépare à bien pire que le scénario du pire –, vous prévoyez des coupes budgétaires et de nouvelles destructions de postes au sein du Cerema et de l’OFB. En réponse, nous proposerons de renforcer les crédits alloués à l’Office, afin de renforcer les moyens des polices de l’eau et de l’environnement, et de réaffecter les budgets nécessaires à la réalisation du futur plan national de restauration, notamment en soutenant les parcs nationaux. Nous proposerons aussi d’augmenter les moyens du réseau des conservatoires d’espaces naturels ; du Cerema, pour son rôle dans l’adaptation au changement climatique ; de Météo-France ; de l’IGN. Nous proposerons de stabiliser la masse salariale du ministère de la transition écologique et de revenir sur les douze suppressions de poste que vous prévoyez dans les agences de l’eau. Enfin, nous proposerons l’instauration de zones tampons pour réduire la propagation des produits phytosanitaires.

La Terre est en train d’enfanter ce qu’elle sait faire de pire. Nous appelons cette assemblée, au travers de nos amendements somme toute raisonnables et de bon sens – même si nous n’avons guère d’espoir –, à faire émerger ce qu’elle peut faire de meilleur pour y faire face.

M. Hubert Ott (Dem). Pour bien situer votre travail et vos rapports, il est nécessaire de rappeler que la France se distingue en Europe pour son impressionnante diversité de paysages et donc de milieux de vie, marqués chacun par des influences climatiques propres et des caractéristiques topographiques distinctes. Ce patrimoine contribue puissamment à notre attractivité, y compris pour nos propres habitants. En lien avec un tel territoire, nous bénéficions d’une biodiversité remarquable, propice à une imbrication impressionnante de milieux et d’écosystèmes variés, qui sont d’ailleurs bien souvent liés à une gestion historique des milieux par l’homme, particulièrement les éleveurs, les agriculteurs et les forestiers.

L’autre dimension réside dans la présence de l’eau, qui accomplit son cycle en traversant cette complexité paysagère et en y ménageant des réservoirs précieux, pouvant prendre de nombreuses formes que l’on qualifie généralement de zones humides. C’est un facteur multiplicateur de la biodiversité.

Ce patrimoine vivant, il est impératif d’en mesurer la valeur et, par conséquent, de s’astreindre aux mesures nécessaires pour en garantir la pérennité, afin de permettre au monde de demain d’en bénéficier également et de pouvoir y puiser la force de nos résiliences. À ce titre, il me paraît absolument vital de consolider la stratégie nationale pour la biodiversité, qui témoigne d’une volonté concrète d’agir. Prenons donc garde à toute baisse, même de 5 %, des crédits consacrés au programme Paysages, eau et biodiversité. Le constat est implacable ; l’effondrement des espèces depuis un demi-siècle nous oblige à cette rigueur.

Je note que les crédits du ministère de la transition écologique seront globalement préservés, ce qui est appréciable dans un contexte budgétaire compliqué, mais aussi que la Cour des comptes souligne la nécessité de mener des investissements, dans un contexte de hausse des coûts des dommages environnementaux.

N’oublions pas davantage que le plan Eau doit, lui aussi, impérativement se poursuivre, cette ressource étant essentielle et certainement l’une des plus menacées par les évolutions climatiques en cours. De la même manière, gardons à l’esprit que l’intégrité de nos réservoirs humides a beaucoup souffert des nombreux aménagements qui ont marqué la fin du siècle dernier, certains étant encore en cours.

Je n’ai pas abordé l’ensemble des enjeux listés dans vos rapports, mais j’en salue la qualité et me félicite de votre souhait de préserver les dispositifs utiles. De même, je vous remercie de l’attention que vous portez à la situation des agents du service public, à leurs compétences et à l’attractivité des emplois. C’est l’occasion pour moi de saluer leur engagement au service des politiques publiques indispensables pour bâtir notre avenir.

Mme Anne-Cécile Violland (HOR). Les avis de nos rapporteurs montrent que la rigueur budgétaire est certes indispensable, mais qu’elle s’impose toujours au détriment de l’écologie. C’est peut-être un raccourci, mais toujours est-il que les crises écologiques et le changement climatique s’accélèrent et s’intensifient alors que les moyens budgétaires pour la protection du vivant diminuent. Les chiffres que présentez, notamment ceux relatifs au programme 113, ne traduisent pas seulement l’impact budgétaire ; ils révèlent également un problème structurel.

Nous voulons avancer dans la lutte contre le dérèglement climatique. Nous élaborons des plans ambitieux sans pour autant donner les moyens aux services publics d’appliquer ces politiques. Je refuse de croire que ces objectifs pluriannuels face à l’enjeu écologique ne relèvent que de l’affichage.

Il est facile de considérer ces politiques comme trop coûteuses et d’en contester la rentabilité, alors que celle-ci s’inscrit dans le temps long, compte tenu des coûts évités, notamment les coûts liés aux retards de nos actions. Chaque plan de prévention en matière de santé environnementale représente, à ce titre, autant d’économies futures. Ainsi, une transition retardée entraînerait près de 1 100 milliards d’actifs échoués cumulés entre 2030 et 2050, soit près de 50 milliards par an ; elle coûterait près de 1,5 point de PIB en 2030 et de 5 points en 2050.

Derrière ces missions environnementales se cache une question de santé publique. La qualité de l’eau, la préservation des sols et de l’air, la protection des écosystèmes et la lutte contre la pollution sont intimement liées à la santé humaine. Les scientifiques parlent désormais d’une seule et même santé, le système One Health. La dégradation des milieux naturels favorise le développement des maladies respiratoires et des zoonoses, les contaminations, les crises alimentaires, le stress hydrique.

C’est pourquoi il est temps de changer de paradigme. Les politiques de l’eau, de la biodiversité et du paysage doivent être intégrées dans une véritable stratégie nationale de santé-environnement, au même titre que la santé publique. Comment améliorer la prise en compte sur le plan politique, humain et financier de ces questions trop souvent laissées de côté ? Quels outils de suivi et d’information pourraient y contribuer ? En somme, comment passer d’une logique de réparation à une logique d’investissement préventif ?

Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous en venons aux questions des autres députés.

Mme Sylvie Ferrer (LFI-NFP). Le président de la République, Emmanuel Macron, s’était engagé, via le plan Eau annoncé en 2023, à augmenter, d’une part, la redevance pour pollutions diffuses (RPD), d’autre part, la redevance pour prélèvement sur la ressource en eau.

Depuis deux ans, les gouvernements successifs ne respectent pas cet engagement. Face à l’augmentation des redevances acquittées par les autres usagers, les agriculteurs ont accepté cette hausse en amont pour ne pas être accusés de moins contribuer à la politique de l’eau.

Ces augmentations auraient permis de rétablir un équilibre alors que l’agriculture est fortement pointée du doigt, en raison de sa faible contribution tant au principe selon lequel l’eau paie l’eau qu’à celui du pollueur-payeur. En ne relevant pas ces redevances, le gouvernement met en difficulté les directeurs des agences de l’eau qui se battent au quotidien pour assurer un équilibre entre les usagers de l’eau. Comment ces agences peuvent-elles continuer à soutenir les agriculteurs alors que leurs moyens budgétaires sont insuffisants ?

M. Vincent Descoeur, rapporteur pour avis. Nombre d’entre vous ont relevé que les crédits du programme 217 diminuaient, notamment en raison de la suppression de 216 ETP. Ce programme se trouve au cœur d’injonctions contradictoires : il faut mettre en œuvre la transition écologique tout en participant à l’effort de réduction du déficit public. Au 31 décembre, le pôle ministériel chargé de la transition écologique comptera 34 216 ETP. Ce programme plus technique qui retrace les effectifs suscite néanmoins des observations quant aux moyens à mobiliser.

Dans le rapport d’information sur l’adaptation de la politique de l’eau au défi climatique, nous avons proposé, de manière consensuelle, de relever les redevances et d’élargir l’assiette de la redevance pour pollutions diffuses aux substances per- ou polyfluoroalkylées (PFAS). Je constate qu’il n’en est rien. Il est également nécessaire de mener des actions préventives.

Mme Julie Ozenne, rapporteur pour avis. Le constat est unanime : la biodiversité s’effondre, les sites et les paysages doivent être protégés.

Madame Ferrer, nous sommes d’accord, il faut augmenter les moyens des agences de l’eau en supprimant leur plafond de recettes, afin qu’elles puissent financer l’ensemble des actions à mettre en œuvre. Il faut également investir massivement pour lutter contre les futures pollutions aux PFAS.

S’agissant des ZEE, il est nécessaire de développer les énergies renouvelables tout en préservant la biodiversité dans les océans. Nous avons dépassé la septième limite planétaire, l’acidification des océans. Or sans plancton ni faune océanique, toute la chaîne alimentaire sera menacée. Il faut agir dès aujourd’hui.

L’écologie est loin d’être punitive, elle vise à nous protéger. Nous devons investir pour protéger les sites et les paysages, notamment les grands sites. Nous devons également renforcer les moyens des agences de l’eau afin d’atteindre les objectifs du plan Eau qui se traduisent concrètement sur le terrain.

 

 

Article 49 et état B : Crédits du budget général

Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous en venons à l’examen des amendements, en commençant par ceux relatifs aux programmes 113 et 159.

Amendement II-CD77 de M. Bérenger Cernon

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NFP). Cet amendement vise à augmenter significativement les crédits alloués à l’action 07, Gestion des milieux et biodiversité, afin de lutter contre les polluants particulièrement persistants comme les PFAS.

La qualité de l’eau est un enjeu vital pour la santé publique, mais aussi pour la biodiversité et la résistance des écosystèmes aquatiques. Or la qualité de l’eau se dégrade : dans de nombreuses communes, elle n’est plus potable.

Les politiques publiques ne sont pas suffisamment efficaces pour lutter contre la contamination persistante par les PFAS. Ce sont des perturbateurs endocriniens, cancérogènes et très résistants – ils persistent dans de nombreux milieux et dans les sources d’eau potable. Selon une étude récente de l’UFC-Que choisir et de Générations futures, ces polluants éternels ont été détectés dans vingt-neuf des trente prélèvements d’eau potable réalisés, y compris dans des grandes villes comme Paris, Lyon et Bordeaux. Il y a urgence à agir.

Par ailleurs, les contrôles réglementaires n’intègrent pas la recherche d’acide trifluoroacétique (TFA), un résidu de pesticide présent partout dont les effets sur la santé pourraient être catastrophiques.

Voilà pourquoi nous voulons absolument agir. Malgré la multiplication des alertes sanitaires et écologiques, les crédits dédiés à la gestion de l’eau et à la lutte contre ces pollutions ne cessent de diminuer. Les AE de l’action 07 ont ainsi baissé de 7,6 % et les CP de 4,1 %, ce qui traduit un désengagement absolument inacceptable de l’État dans ce contexte d’urgence écologique et sanitaire.

Mme Julie Ozenne, rapporteur pour avis. Je partage pleinement votre position. En 2026, la redevance pour pollutions diffuses pourrait rapporter 100 millions. Comme les crédits alloués à la SNB diminuent de 26,7 millions, j’ai déposé un amendement visant à les maintenir à hauteur des crédits de 2025 ; j’espère que cette proposition fera l’unanimité. Par la suite, il faudra dégager de nouveaux moyens. Demande de retrait.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD78 de M. Bérenger Cernon

M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). Cet amendement vise à mettre fin au scandale des fuites d’eau en France. En effet, 20 % de l’eau potable est perdue en raison de réseaux vétustes, soit l’équivalent de la consommation de 18 millions de personnes, un nombre plus important que l’ensemble de la population de l’Île-de-France. En 2024, près de 200 services d’eau affichaient un rendement inférieur à 50 %. En Guadeloupe, il est tombé à 32 %, forçant les habitantes et les habitants à subir des tours d’eau.

Ce n’est pas une fatalité, c’est une faute politique. Depuis des années, on laisse les canalisations vieillir sans les entretenir, alors même que la fonte des tuyaux a une durée de vie limitée. Résultat, alors que la France connaît des sécheresses à répétition, on gaspille un cinquième de notre eau potable.

Notre amendement fixe enfin un rythme minimal de rénovation des réseaux avec une priorité donnée aux territoires ultramarins. Il prévoit une dérogation pour les réseaux performants et un financement immédiat de 200 millions d’euros, premier pas vers un plan de rénovation plus ambitieux.

Mme Julie Ozenne, rapporteur pour avis. L’amendement CD222 que j’ai déposé vise à augmenter les crédits alloués aux agences de l’eau de 125 millions, soit la somme correspondant à l’engagement pris par le gouvernement dans le cadre du plan Eau et répondant aux besoins des agences. Je vous invite à retirer votre amendement au profit du mien.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD222 de Mme Julie Ozenne

Mme Julie Ozenne, rapporteur pour avis. Il s’agit d’un amendement de repli après le rejet en commission des finances de l’amendement qui visait à relever le plafond de recettes. Il tend à assurer la mise en œuvre effective du plan Eau, en augmentant les crédits alloués aux agences de l’eau de 125 millions d’euros, conformément à leur demande.

La commission adopte l’amendement

 

Amendement II-CD49 de Mme Lisa Belluco

Mme Julie Ozenne, rapporteur pour avis. Avis favorable, d’autant que l’augmentation du plafond des recettes des agences de l’eau est moins importante que prévu.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CD57 de M. Sébastien Humbert

M. Sébastien Humbert (RN). L’amendement vise à augmenter de 1 million d’euros le financement des agences de l’eau par un transfert de crédits à partir de l’action 07 du programme 217.

Alors qu’elles mettent en œuvre leur 12ᵉ programme, les agences de l’eau font face à plusieurs défis, parmi lesquels le soutien à la mise en conformité des installations d’assainissement non collectif en milieu rural. Dans ces territoires, caractérisés par un habitat dispersé, les habitants disposent le plus souvent de systèmes d’assainissement individuel. Dans de nombreux cas, l’assainissement non collectif est la seule solution soutenable financièrement. On estime qu’entre 4 et 5 millions d’habitations sont dotées de ce système, ce qui représente environ 20 % de la population française. Compte tenu des coûts considérables liés à l’installation ou à la maintenance d’un tel dispositif – entre 10 000 et 15 000 euros –, le nombre d’amendes délivrées par les services publics d’assainissement non collectif (spanc) est en forte augmentation. Il est donc urgent de mieux soutenir les particuliers en renforçant les aides à la mise aux normes et en veillant à ce qu’elles soient plus largement diffusées et accessibles.

Mme Julie Ozenne, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Nous venons de voter des amendements renforçant les moyens des agences de l’eau ; les Spanc bénéficieront également de cette augmentation.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD162 de M. Charles Fournier

Mme Julie Ozenne, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à créer un fonds d’expérimentation territoriale des droits de la nature et de la gouvernance des fleuves. Il s’agit d’une préconisation que nous formulerons dans le cadre de la mission d’information sur l’état des cours d’eau.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-CD76 de M. Bérenger Cernon et II-CD93 de Mme Julie Ozenne (discussion commune)

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NFP). Par cet amendement, nous proposons un renforcement massif des crédits pour la restauration des espaces naturels. Le vivant est au bord du gouffre. Alors que 86 % des Français savent que leur avenir dépend de la biodiversité, nous la regardons s’effondrer sans rien faire, à un rythme alarmant : 31 % des oiseaux communs ont disparu en trente-quatre ans et seulement 20 % des habitats sont en bon état.

Les causes sont connues : l’agriculture intensive, la pollution, l’urbanisation galopante qui, combinées au dérèglement climatique, mettent en péril la sécurité alimentaire, sanitaire, économique et sociale.

La dégradation des écosystèmes affaiblit nos bassins de vie et réduit leur résilience. L’artificialisation croissante des sols provoque des inondations meurtrières, qui se multiplient, en empêchant ces sols d’absorber les fortes précipitations. .

Selon France nature environnement, 95 % des Françaises et des Français réclament une mobilisation forte pour protéger et restaurer la biodiversité. Pourtant, nous en sommes loin. C’est pourquoi nous proposons de changer de cap en investissant massivement dans la restauration des espaces naturels.

Mme Julie Ozenne, rapporteur pour avis. Je suis tout à fait d’accord : nous devons augmenter massivement les crédits et les investissements en faveur de la défense de la biodiversité et de la nature. Je vous demande néanmoins de retirer votre amendement au profit du mien, qui vise à maintenir les crédits alloués à la SNB à leur niveau de 2025.

La commission rejette l’amendement II-CD76 et adopte l’amendement II-CD93.

 

Amendement II-CD89 de Mme Chantal Jourdan

Mme Chantal Jourdan (SOC). Cet amendement vise à augmenter de 1 million le budget des opérateurs de l’État du programme 113 Paysages, eau et biodiversité, dont le PLF prévoit une réduction drastique des effectifs. En particulier, les dépenses de fonctionnement de l’action 07, Gestion des milieux et biodiversité, diminuent.

Le schéma d’emploi du programme 113 pour l’année 2026 prévoit la suppression de vingt-neuf ETP, pourtant indispensables à la protection et à la restauration de la biodiversité sur l’ensemble du territoire ; la réalisation des objectifs du programme s’en trouve compromise.

Cette augmentation des crédits, essentielle dans un contexte d’effondrement de la biodiversité, vise à garantir la continuité des missions de l’OFB, des agences de l’eau, des parcs nationaux, du Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres (CELRL) et de l’établissement public du Marais poitevin.

Suivant l’avis de la rapporteure pour avis, la commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CD79 de Mme Anne Stambach-Terrenoir

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NFP). Cet amendement vise à augmenter significativement les crédits alloués à l’OFB. Alors que les alertes se multiplient sur l’effondrement du vivant, l’OFB est confronté non seulement à une baisse de ses moyens, mais également à des attaques politiques et physiques d’une gravité inédite. En 2024, son antenne à Brest a été incendiée, les locaux dégradés, des agents menacés – certains ont même été mis en danger.

Pire encore, des responsables politiques de premier plan, comme François Bayrou et Laurent Wauquiez, ont publiquement mis en cause ses missions, contribuant ainsi à légitimer les violences à son encontre.

Cette pression vise à affaiblir la police de l’environnement, pourtant indispensable pour faire respecter le droit de l’environnement, protéger les sols, l’eau, la biodiversité, et répondre aux urgences climatiques et écologiques. Pour notre part, nous refusons que les agents publics confrontés à la haine soient abandonnés par l’État, alors qu’ils ne font qu’appliquer la loi au service de l’intérêt général.

Pour rappel, la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) et le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) ont martelé que les crises du climat et de l’effondrement de la biodiversité s’alimentaient mutuellement et qu’on devait les traiter simultanément.

Afin de faire face à ces défis, nous proposons de créer 80 emplois supplémentaires au sein de l’OFB pour renforcer la surveillance des milieux naturels et la mobilisation citoyenne autour de la préservation de la biodiversité, et assurer la police de l’environnement.

Mme Julie Ozenne, rapporteur pour avis. Avis favorable, d’autant plus que certains de mes amendements relatifs à ce sujet ont été déclarés irrecevables.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD199 de Mme Graziella Melchior

Mme Graziella Melchior (EPR). Cet amendement vise à accroître légèrement les crédits consacrés à l’OFB, afin notamment de renforcer ses moyens dans le domaine de l’éducation à l’environnement. De manière directe, il a sous sa responsabilité la gestion des aires éducatives et, de manière indirecte, il finance, par exemple, la Fabrique des communs pédagogiques qui soutient les initiatives de classe en extérieur, dite dehors.

La classe dehors consiste pour un enseignant à donner son cours au contact de la nature, quelle que soit la discipline. Elle constitue une formidable occasion pour reconnecter les enfants avec la nature et leur territoire, et leur faire prendre conscience des enjeux liés à la protection de la biodiversité. Elle est aussi une réponse à la surexposition aux écrans ainsi qu’aux problèmes de santé mentale des jeunes.

Mme Julie Ozenne, rapporteur pour avis. Avis favorable, mon amendement ayant été déclaré irrecevable.

Mme Sophie Panonacle (EPR). Cet amendement est pertinent : il faut développer les aires éducatives. Néanmoins, l’adoption de l’amendement de Mme Jourdan permettra de financer cette mesure. Je suggère son retrait.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NFP). Nous voterons pour cet amendement. Je déplore le rejet du précédent car les besoins de l’OFB, qui a perdu des effectifs, sont colossaux. Son existence est menacée alors que sa mission est essentielle dans le contexte de la sixième extinction des espèces. Je suis dépitée qu’on se contente de modestes augmentations de crédits – Mme Panonacle vient même de nous dire que c’était encore trop ! Nous ne sommes pas à la hauteur des enjeux.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CD158 de Mme Mélanie Thomin

Mme Mélanie Thomin (SOC). Cet amendement vise à renforcer de 10 millions les moyens budgétaires du Conservatoire du littoral, dont nous saluons l’action, contrairement à d’autres groupes parlementaires qui proposent sa suppression.

Il bénéficie d’une taxe affectée, la Taemup ; nous aurons l’occasion de débattre de sa réforme au cours de la discussion budgétaire.

Le Conservatoire, qui a fêté ses 50 ans, est devenu un opérateur de l’État et un acteur de terrain incontournable, qui œuvre en partenariat avec les collectivités locales et les chambres d’agriculture pour préserver les espaces littoraux sensibles et les sites naturels. Son rôle est crucial dans la préservation des zones littorales et du patrimoine maritime face à l’accélération des aléas climatiques, en particulier la montée du niveau de la mer, l’érosion du trait de côte et la multiplication des tempêtes.

Les crédits supplémentaires proposés lui permettraient de poursuivre ses actions de protection et de restauration, d’acquérir et de sécuriser de nouveaux espaces littoraux, et de garantir la résilience des côtes et des rivages face aux menaces environnementales. En effet, son budget est sous tension permanente car la mission de rachat et de réhabilitation du patrimoine maritime bâti, qui a été sous-évaluée, est très coûteuse.

Mme Julie Ozenne, rapporteur pour avis. Avis favorable. Le Conservatoire du littoral, dont le budget a insuffisamment augmenté, a besoin de ces crédits supplémentaires. La mission d’information sur l’état des cours d’eau formulera elle aussi des propositions en ce sens.

Mme Sophie Panonacle (EPR). Je soutiens cet amendement. Le Comité national du trait de côte est très sensible aux actions menées par le Conservatoire. La situation, déjà catastrophique – environ 500 communes sont affectées par l’érosion –, s’aggraverait s’il ne pouvait plus acquérir des espaces pour renaturer.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Le Conservatoire du littoral mène une action efficace pour préserver les sites naturels sensibles. Nous devons engager une réflexion importante sur la protection des infrastructures du patrimoine maritime bâti dont l’État se désengage – cette mission est sous-évaluée. Leur entretien très coûteux est désormais à la charge soit des collectivités locales, soit du Conservatoire. Il est nécessaire de disposer de moyens financiers importants pour réinventer leurs usages de demain.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendement II-CD19 de M. Nicolas Thierry

Mme Julie Ozenne, rapporteur pour avis. Avis favorable. Cet amendement vise à augmenter de 1,6 million les crédits alloués au réseau des conservatoires d’espaces naturels.

La commission adopte l’amendement.

 

Amendements II-CD96 de Mme Julie Ozenne et II-CD58 de M. Sébastien Humbert (discussion commune)

Mme Julie Ozenne, rapporteur pour avis. Les parcs nationaux contribuent de manière déterminante à atteindre les objectifs de protection forte des milieux terrestres et marins fixés par la stratégie nationale des aires protégées (Snap).

Ils constituent un élément clé des engagements pris par la France lors de l’accord de la COP15 dit Kunming-Montréal, destinés à mettre fin à la perte de biodiversité et à la restaurer. Ils joueront également un rôle majeur dans l’application du futur plan national de restauration de la nature, qui a pour objectif de réduire les pressions sur la biodiversité, de protéger et de restaurer les écosystèmes. Ce plan doit être présenté par la France d’ici la fin de l’année 2026, afin de se conformer aux exigences du règlement européen sur la restauration de la nature.

M. Sébastien Humbert (RN). L’amendement vise à réduire de 1 million les crédits consacrés à la gestion des milieux et de la biodiversité, en particulier le budget des parcs nationaux. Dans le contexte budgétaire actuel, une maîtrise rigoureuse des dépenses publiques s’impose.

La progression significative des crédits alloués aux parcs nationaux, qui passent de 3,6 à 7,6 millions, justifie qu’une partie de ces dépenses soit reprogrammée ou décalée, sans remettre en cause le bon fonctionnement des établissements concernés.

Par ailleurs, la révision des chartes des parcs, annoncée dans le projet annuel de performances, n’est pas particulièrement urgente et ne nécessite pas de moyens supplémentaires importants.

En outre, la gestion financière de certains parcs naturels est pointée du doigt par les autorités comptables locales. Or l’usage des fonds publics doit faire l’objet d’une vigilance accrue.

Il est donc raisonnable, dans un souci de bonne gestion et d’efficacité de la dépense publique, d’ajuster à la marge cette augmentation afin de concentrer les moyens de l’État sur ses priorités essentielles, tout en préservant les missions fondamentales des parcs nationaux. Il est plus que jamais nécessaire de faire mieux et de gagner en efficacité.

Mme Julie Ozenne, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Je n’ai pas compris l’objet de votre amendement qui conduirait à diminuer des crédits également affectés à la SNB. Par ailleurs, cette diminution pourrait compromettre certaines missions des parcs nationaux, comme la lutte contre les espèces invasives.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NFP). Votre délire anti-écologique vous aveugle. Dans un contexte d’effondrement du vivant et malgré un budget de renoncement écologique, vous estimez que c’est encore trop et qu’il faut faire davantage d’économies, notamment sur la préservation des milieux naturels, qui ne serait pas pour vous une mission essentielle de l’État.

Les deux tiers des zones humides ont disparu. Peut-être cela n’a-t-il pas de sens pour vous mais ces milieux sont indispensables non seulement au stockage de l’eau, alors que les sécheresses s’intensifient, mais également à la préservation de nombreuses espèces qui disparaissent à grande vitesse sur l’ensemble du territoire. Vous êtes complètement inconscients !

Mme Julie Lechanteux (RN). Au cas où vous l’auriez oublié, la dette de la France s’élève à 3 400 milliards d’euros. Depuis ce matin, nous avons adopté plus de 165 millions de dépenses supplémentaires.

Vu le contexte budgétaire, ces ressources ne doivent pas servir à financer des dépenses de fonctionnement. Il faut gérer les crédits de manière équilibrée, en réalisant des économies, ce que vous ne savez pas faire. Les Français demandent que des économies soient faites plutôt que d’être sans cesse mis à contribution.

M. Peio Dufau (SOC). Il faut un budget équilibré et juste fiscalement. Or le Rassemblement national propose tout l’inverse, bien loin de faire ce qu’il prétend.

Ne pas agir pour l’environnement aujourd’hui, c’est créer la dette de demain. Le dérèglement climatique que nous subissons est la conséquence d’un manque d’engagement international. Sans les mesures nécessaires, le problème sera repoussé et amplifié. Dépenser 1 euro maintenant peut en faire économiser 10 plus tard.

M. Sébastien Humbert (RN). Le principal rôle des parcs nationaux est de protéger le patrimoine naturel et la biodiversité. Mais il suffit de prendre l’exemple du Parc national de forêts, en Bourgogne, pour se rendre compte que ce n’est pas toujours le cas. Ce parc s’est en effet prononcé en faveur de projets éoliens, totalement contraires à la protection de la faune et de la biodiversité. Nombre d’espèces, comme le milan royal ou la cigogne noire, sont décimées à cause de ces outils de production énergétique inutiles – le facteur de charge atteint 15 % ! Les missions des parcs nationaux sont souvent mal identifiées. À partir du moment où vous autorisez la destruction de la biodiversité par idéologie, pourquoi continuer à mettre autant d’argent, alors que les résultats en matière de protection de la biodiversité sont largement biaisés ? Une baisse de leur budget se justifie donc tout à fait. On ne veut pas d’une politique socialiste qui dépense à tout-va.

M. Hubert Ott (Dem). Monsieur Humbert, vous racontez n’importe quoi. Vous mélangez tout et vous niez la compétence des gens qui travaillent dans ces domaines. Votre vision politique repose sur du rien ; c’est intellectuellement inadmissible. Vous trahissez les gens qui vous font confiance.

Quant à vous, madame Lechanteux, vous proposez, quand un gamin a quarante de fièvre, d’économiser le petit pognon qu’il faut mettre dans l’essence pour le conduire à l’hôpital.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NFP). On vit un grand moment : nos collègues du Rassemblement national sont en train de nous expliquer qu’en raison de leur opposition aux éoliennes, il faut arrêter de mettre de l’argent dans la préservation de la biodiversité et des milieux naturels. Nous sommes tous témoins de votre incompétence ! Vous prétendez faire ainsi des économies pour les Français qui les demandent. Mais la baisse de la biodiversité est la première cause de la baisse du rendement agricole, ce qui fait courir un risque à notre souveraineté alimentaire sur le long terme. Les PFAS rendent l’eau non potable : c’est bien de la santé de tous qu’il s’agit. Vous êtes complètement irresponsables ! En France, un cinquième des espèces sont menacées d’extinction à court terme ; les deux tiers des zones humides ont été détruites. Vous n’êtes pas à la hauteur.

M. Fabrice Barusseau (SOC). Collègues du RN, je voudrais vous mettre face à vos contradictions – ce ne sont ni les premières, ni les dernières. Il ne faudra pas venir faire du populisme à chaque intempérie et déplorer auprès des sinistrés qui auront les pieds dans l’eau ou leur toiture arrachée que l’État ne fait rien. Tout est lié. La préservation de la biodiversité, ce sont les économies de demain. Si nous n’agissons pas avec volontarisme dès maintenant contre le changement climatique, nous n’y arriverons pas.

M. Julien Guibert (RN). Chers collègues de gauche, lorsque vous irez à la rencontre des entreprises faire du populisme et agiter des drapeaux rouges, le poing en l’air, en disant « Camarades, on vous défend », n’oubliez pas que c’est à cause de toutes les taxes et surtaxes sur les industries que vous votez ici que certaines ferment leurs sites en France pour investir ailleurs. Ce sont autant de créations d’emplois en moins dans nos circonscriptions. Les chefs d’entreprise me disent clairement que toutes ces fermetures sont liées aux normes environnementales, qui ne sont plus tenables.

M. Nicolas Bonnet (EcoS). Les parcs naturels nationaux sont des espaces identifiés pour leur importance en matière de préservation de la biodiversité. Nous sommes tous conscients qu’il faudra mieux les gérer, pour les adapter aux risques climatiques – feux, pénurie en eau – et préserver ce qui en fait des puits de biodiversité. Le sujet n’a rien à voir avec les éoliennes. Du reste, ce ne sont pas les éoliennes qui tuent majoritairement les oiseaux, mais les chats et les pesticides. Votre doctrine anti-éolienne vous aveugle. Ouvrez les yeux, d’autant que la majorité des électeurs, les vôtres compris, sont favorables aux éoliennes.

La commission adopte l’amendement II-CD96.

En conséquence, l’amendement II-CD58 tombe.

 

Amendement II-CD173 de Mme Julie Lechanteux

Mme Julie Lechanteux (RN). L’amendement vise à redonner des moyens indispensables à la politique nationale des paysages et du patrimoine naturel. Ces crédits financent la gestion, la protection et la valorisation de nos paysages remarquables, souvent emblématiques de l’identité de nos territoires. Ils permettent notamment d’obtenir le label Grand Site de France, dont nous connaissons tous les effets vertueux : attractivité touristique, revitalisation économique, préservation du cadre de vie et appropriation du patrimoine naturel par les habitants.

J’ai pu mesurer concrètement ces effets dans la cinquième circonscription du Var. Le tourisme évolue, il se détourne des concentrations artificielles pour rechercher l’authenticité, la nature préservée et la qualité paysagère. Soutenir ces politiques, c’est non seulement protéger nos paysages, mais aussi accompagner une transition touristique et économique durable. Je propose ainsi un redéploiement ciblé, en prélevant 3 millions d’euros sur le budget de la direction générale de l’économie et de la consommation durable, des données et de l’innovation, une énième couche administrative du ministère de la transition écologique, dont les missions sont déjà remplies par d’autres entités.

Mme Julie Ozenne, rapporteure pour avis. La politique des grands sites est pilotée par le ministère de la transition écologique. Or vous enlevez des crédits au CGDD. Ce n’est pas cohérent. Avis défavorable.

Mme Julie Lechanteux (RN). Prenez des cours de comptabilité, parce que ce n’est vraiment pas votre fort ! Il faut retirer de l’argent sur certaines lignes pour en renforcer d’autres. Mais, apparemment, préserver notre identité et notre patrimoine naturel ne vous intéresse pas.

M. Peio Dufau (SOC). Il est assez cocasse d’entendre parler de gestion d’argent public par le RN, qui a détourné 4 millions d’euros des caisses de la Commission européenne.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-CD59 de M. Sébastien Humbert, II-CD174 de Mme Julie Lechanteux et II-CD187 de M. Timothée Houssin (discussion commune)

M. Sébastien Humbert (RN). L’amendement II-CD59 vise à supprimer le budget affecté au financement du Cerema, d’un montant de 186 millions d’euros. Le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement est un établissement public de l’État à caractère administratif, dont l’efficacité est contrastée. Il n’est ni utile ni pertinent. Il fait doublon avec d’autres organismes publics et intervient dans des domaines déjà traités par des agences ministérielles, des bureaux d’études privés et des collectivités territoriales disposant de leurs propres services techniques. La suppression du Cerema permettrait d’éviter une dispersion des compétences et une concurrence inutile avec les services locaux. Avec 186 millions de budget, il représente une charge considérable sans que son impact concret sur l’accélération des projets publics ait été pleinement démontré.

Mme Julie Lechanteux (RN). L’amendement II-CD174 vise à diminuer les crédits alloués au Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement. Cet établissement s’arroge de nouvelles missions déjà remplies par le reste du maillage institutionnel. Le projet stratégique 2025-2028 du Cerema le montre bien : il y affirme vouloir renforcer son positionnement sur la gestion de l’eau et le développement des services ferroviaires. Or ces deux champs d’action sont déjà pleinement déjà couverts, respectivement par les comités de bassin et les agences de l’eau et par le ministère des transports et la SNCF.

De même, le Cerema souhaite investir le champ de la participation citoyenne à la transition écologique, une mission relevant du Conseil national de la transition écologique (CNTE), qui en a la légitimité institutionnelle et les outils. Nous sommes confrontés à une superposition des structures, à une dispersion des outils et à une opacité croissante dans l’utilisation des fonds publics. L’audit et l’expertise ne sont pas une excuse pour dilapider l’argent public.

M. Timothée Houssin (RN). L’amendement de repli II-CD187 vise à économiser 20 % du budget du Cerema. Les organismes publics intervenant dans le champ de l’environnement, de l’aménagement et de la transition écologique se sont multipliés, ce qui rend nécessaire une rationalisation et une clarification des missions. Les compétences du CGDD, de l’IGN, de Météo-France, du CSTB, de l’Ademe et d’autres chevauchent souvent celles du Cerema. Le Cerema a une utilité, mais ses missions se sont diversifiées au-delà de son cœur de métier, les infrastructures et l’ingénierie territoriale. Nous vous proposons donc de recentrer ses missions.

Mme Julie Ozenne, rapporteure pour avis. Avis défavorable, évidemment. Supprimer ou diminuer les crédits du Cerema se ferait au détriment des petites collectivités, qui ont bien besoin de ce centre pour développer leurs projets.

Mme Sophie Panonacle (EPR). Pour accompagner l’aménagement de nos territoires, nous avons besoin d’une expertise particulièrement sérieuse. C’est précisément parce qu’elle est concentrée dans le Cerema qu’elle est devenue indispensable à l’État et aux collectivités locales. Le Cerema a subi une restructuration profonde en 2018 : ses secteurs d’intervention sont passés de 66 à 21 ; il a perdu 350 postes. Pour mieux se financer, il a fait des efforts considérables. Il développe notamment ses ressources propres, en apportant aux collectivités locales une expertise qu’elles financent. Le Cerema doit poursuivre sa mutation pour atteindre un équilibre budgétaire. Nous devons l’encourager en ce sens et non pas le supprimer.

Mme Danielle Brulebois (EPR). Certes, une réflexion sur les organismes satellites gravitant autour de l’État est nécessaire. Mais pour le voir agir dans le Jura et travailler à la réparation des ponts et des routes, je connais l’utilité du Cerema. Il est neutre et impartial, et dispose de connaissances multiples et d’un savoir-faire éprouvé. Son expertise technique accessible directement est précieuse.

M. Stéphane Delautrette (SOC). Ces amendements révèlent la méconnaissance totale qu’ont les collègues du Rassemblement national du rôle des différents opérateurs de l’État, sur lesquels il est très facile de tirer à boulets rouges. Cela révèle également une méconnaissance totale de la gestion locale. Tous les rapports et toutes nos réflexions au sein de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation soulignent la nécessité d’accompagner nos élus locaux en ingénierie, tout particulièrement dans les communes rurales. Le Cerema fait partie des acteurs indispensables à ce titre. Contrairement à ce que croient nos collègues du Rassemblement national, les collectivités ne disposent pas de services d’ingénierie en interne. Pour avoir été maire d’une commune rurale pendant quinze ans, je peux vous assurer que le soutien que nous apportent les opérateurs est indispensable. Tous les élus, même ceux de votre rang, qui siègent à la délégation reconnaissent la nécessité de cet accompagnement. Vos amendements sont en totale incohérence avec les besoins de nos territoires.

M. Nicolas Bonnet (EcoS). Nos collègues du Rassemblement national pourraient commencer par se mettre d’accord entre eux : M. Humbert nous propose de supprimer le Cerema que M. Houssin trouve utile. Avez-vous consulté l’Association des maires de France (AMF) ou l’Association des maires ruraux de France (AMRF), dans la mesure où les communes seraient les premières concernées par la suppression du Cerema ? Elles n’ont pas les moyens de faire appel à des bureaux d’études privés, surtout les plus petites et les plus pauvres d’entre elles. J’ai été élu local et je ne connais aucun maire qui demande la suppression du Cerema ; au contraire, tout le monde en est très satisfait. Grâce à son expérience, le Cerema est d’autant plus apte à conseiller les communes en fonction de ce qui s’est fait dans d’autres.

Mme Anne-Cécile Violland (HOR). Ces amendements sont l’expression ultime de la méconnaissance non seulement du Cerema mais également du fonctionnement des collectivités, particulièrement rurales. C’est aussi l’ancienne maire d’une petite commune rurale qui parle. On comprend la volonté des députés du RN de supprimer le Cerema, étant donné qu’il participe à l’élaboration d’études et de rapports visant à maintenir les ZFE ou l’objectif de zéro artificialisation nette (ZAN). En somme, ils veulent faire taire ceux qui ne sont pas d’accord avec eux.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NFP). Collègues du RN, vous auriez dû lire le rapport de Mme Ozenne : il manque plus de 15 millions au Cerema pour couvrir le budget de ses emplois permanents, dont le plafond a encore été réduit cette année. Il devrait être largement associé au plan national d’adaptation au changement climatique. Le Cerema a un rôle majeur à jouer auprès des collectivités territoriales dans l’accompagnement technique et en ingénierie. Vous prétendez à longueur de temps défendre la ruralité. C’est une vaste blague ! Les petites communes n’ont absolument pas les moyens de faire face seules à la nécessité de s’adapter au changement climatique et d’entrer dans la transition écologique. Si l’on vous suit, ce sont quantité de projets de restauration des rivières, de renaturation urbaine ou de préservation des zones naturelles qui ne verront pas le jour. Ce serait dramatique pour les communes rurales, les communes de montagne ainsi que pour les communes littorales qui sont particulièrement affectées par les changements climatiques. Vous faites une nouvelle fois la preuve de votre incompétence sur ces sujets.

Mme Véronique Riotton (EPR). Nous venons d’assister à un spectacle consternant du RN, qui fait la démonstration d’une double incompétence. Votre narratif tourne en boucle autour de la défense de la ruralité et de la baisse de la dépense publique. En réalité, vous ne travaillez pas et vous vous accrochez à vos seuls effets de communication. Le Cerema est un soutien important des communes rurales. Et vous le confondez avec le Commissariat général au développement durable ! Les mots m’échappent pour dire toute votre incompétence, que chacun ici a constatée. Nous, nous défendons et finançons la transition écologique, dont nos territoires comme nos industries ont besoin.

Mme Constance de Pélichy (LIOT). Le Rassemblement national nous dit avec ces amendements que le monde rural n’existe pas, pas plus que le besoin d’ingénierie des collectivités. Il abandonne, en somme, les communes les plus faibles. Par ailleurs, à vous entendre dire que l’IGN et Météo-France, c’est la même chose, on ne peut que rester coi ! Si pour vous faire de la cartographie et des prévisions météorologiques n’a aucun sens, vous nous direz bientôt que la science n’est qu’une opinion et que la Terre est plate. Merci pour votre contribution au débat !

M. Pierre Meurin (RN). Pourriez-vous cesser vos grandes leçons de morale ? Pour ce qui est des dérives financières, de l’abandon, de l’enclavement et de la dévitalisation de nos territoires ruraux, vous avez à peu près tous le même bilan. Vous devriez faire preuve d’un peu plus de modestie.

Vous nous accusez de ne pas travailler, mais je n’ai entendu personne citer le rapport du Sénat de juillet dernier, qui critique précisément la dérive financière du Cerema, l’existence de doublons et l’illisibilité de son travail. Il appelait à une nécessaire amélioration du système. Vous défendez le Cerema de manière dogmatique, sans envisager la possibilité de le faire fusionner avec l’Ademe et l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), par exemple. Vous défendez avec une forme de paresse intellectuelle une agence qui fait doublon sans aucune perspective d’amélioration. Merci de ne pas nous donner de leçons de crédibilité !

M. Hubert Ott (Dem). La paresse intellectuelle est pour le moins vôtre, en laissant tomber voire en brutalisant la ruralité et les collectivités, qui offrent un ancrage dans des déserts humains. Elles ont besoin d’un soutien et d’une expertise, dont vous voulez les priver. Il est assez cocasse que vous, qui ne cessez de brasser du vent, soyez à ce point opposés aux éoliennes, lesquelles, au moins, produisent de l’énergie.

M. Sébastien Humbert (RN). On entend depuis tout à l’heure que le Cerema serait formidable, son offre exceptionnelle et indispensable et que le supprimer reviendrait à laisser tomber nos communes et la ruralité. Vous écoutez-vous ? Le Cerema n’a pas fait ses preuves. Qui plus est, il fait doublon avec d’autres services techniques et agences d’État. Lisez le rapport de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable publié en juillet 2025 : « 10 % seulement des élus considèrent l’offre d’ingénierie de l’État et ses opérateurs comme disponible, accessible ou pertinente ». Autrement dit, 90 % des maires estiment qu’elle ne l’est pas : arrêtez donc de dire que ça marche ! Beaucoup de maires ne connaissent pas le Cerema ni l’ANCT, parce que ces agences ne sont pas toujours accessibles et qu’elles ne fournissent pas forcément les bons services au bon moment, alors même que les demandes d’ingénierie explosent, parce que l’excès de normes a tout complexifié. Pour faire sortir de terre un projet dans une commune, il faut compter entre cinq et dix ans. Nous sommes la risée du monde ! Cessez donc votre autosatisfaction !

Mme Béatrice Roullaud (RN). Je ne suis pas membre de votre commission mais je suis étonnée de l’agressivité qui y règne. J’entends des attaques contre les personnes et non des réponses aux arguments. Vous avez dit que nous étions incompétents, que nous n’avions jamais géré de communes : allez plutôt voir le taux de réélection des maires RN, qui ont tous baissé les dépenses publiques. Je vais finir par regretter M. Léaument, qui n’est pourtant pas avare d’attaques contre le RN à la commission des lois…

Bref, on nous répète sans cesse que nous sommes incompétents, mais si le RN n’arrête pas de monter, ce n’est pas pour rien.

Mme la présidente Sandrine Le Feur. Bienvenue dans notre commission, madame Roullaud, mais rassurez-vous, les propos tenus ici sont habituellement cordiaux et les échanges apaisés. Le débat sur la suppression du Cerema passionne. J’aimerais d’ailleurs savoir si aucun de vos élus locaux n’y a jamais eu recours, tant il est utile aux collectivités.

Mme Mélanie Thomin (SOC). Je suis heurtée par ces amendements qui visent à supprimer des maillons essentiels entre nos territoires et l’État. On ne peut pas à la fois se présenter comme les chantres de la France industrielle et vouloir la suppression du Cerema, qui incarne le savoir-faire français en matière d’ingénierie. La France rurale est fière de ces savoir-faire partagés, des ouvriers aux ingénieurs, qui veillent sur nos infrastructures après les avoir construites au fil des décennies. À la suite de la catastrophe du pont de Gênes, par exemple, l’État français a fait réaliser une expertise de l’état des ponts. C’est grâce au Cerema qu’il a pu élaborer le programme Ponts. On ne peut pas penser l’aménagement du territoire exclusivement dans des bureaux à Paris.

Mme Olga Givernet (EPR). Vous voulez dévitaliser une agence sans proposer de solution de remplacement. Des réflexions sont en effet en cours pour étudier la possibilité de fusionner des agences et gagner en efficacité. Supprimer des moyens d’ingénierie, c’est dire aux communes, notamment rurales, qu’elles ne pourront plus être aidées. Après la désorganisation nationale, le Rassemblement national s’attaque à la désorganisation territoriale.

Mme Chantal Jourdan (SOC). Nous n’avons pas entendu des leçons de morale mais des faits scientifiques, ainsi que des expériences d’élus qui ont travaillé avec le Cerema. Fusionner des agences qui ne font pas la même chose n’est pas envisageable. Nous avons besoin de points de vue différents et de compétences diverses. Vos propos témoignent d’un refus de comprendre la complexité du monde. Nous faisons face à des défis inimaginables il y a cent ans – le réchauffement climatique, l’effondrement de la biodiversité.

Pour revenir sur le rapport que vous avez cité et sur le fait que 90 % des maires jugent l’offre insuffisante, nous proposons précisément d’augmenter les effectifs. J’ai été maire d’une petite commune. Le Cerema avait du mal à répondre à nos besoins, à cause d’un manque de personnel. Nous en avons absolument besoin partout, particulièrement dans les communes rurales.

M. Sylvain Berrios (HOR). Il faut préserver l’aide en ingénierie qu’on apporte aux petites communes, qu’il s’agisse de celle du Cerema ou du conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE), pour les accompagner dans des missions nouvelles et complexes. Supprimer de telles aides remettrait en cause leur capacité à mener des politiques publiques.

Quant à Mme Roullaud, je m’étonne qu’elle déplore l’absence d’un collègue de LFI…

Mme Sophie Panonacle (EPR). Le Cerema apporte aussi son assistance aux 1 200 communes littorales. Après les avoir accompagnées pendant dix-huit mois, il a remis un rapport sur les enjeux spécifiques à ces communes – biens immobiliers, infrastructures publiques, routes, stations d’épuration et autres bâtiments publics menacés par les effets du changement climatique, l’érosion et la submersion.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements II-CD81 de Mme Anne Stambach-Terrenoir, II-CD166 de M. Fabrice Barusseau et amendements identiques II-CD226 de Mme Julie Ozenne, II-CD35 de M. Marcellin Nadeau et II-CD197 de Mme Graziella Melchior (discussion commune)

Mme Sylvie Ferrer (LFI-NFP). Le 27 octobre, j’ai interpellé la ministre Gatel au sujet de la stabilité des dépenses de fonctionnement de l’ANCT, qui abonde le marché de l’ingénierie. Le rapporteur des crédits soulignait qu’une part importante du budget
– 18 millions – est fléchée vers des cabinets privés, alors que les structures publiques existent et que leurs budgets sont réduits. Le Cerema est l’un de ces opérateurs irremplaçables, qui voit ses moyens humains rabotés dans le PLF 2026, alors même que ses missions s’élargissent face à l’urgence écologique. Le schéma d’emplois prévoit encore 25 suppressions de postes – 429 postes auront été supprimés depuis 2017. C’est un démantèlement progressif inacceptable de notre ingénierie publique au service des collectivités territoriales. Le rapport sénatorial confirme cette situation préoccupante pour l’avenir du Cerema qui subit un déficit structurel de 20 millions d’euros, une conséquence directe de la baisse continue des subventions publiques, de la hausse des charges de personnel et d’un modèle économique à bout de souffle.

Pour stopper cette hémorragie et engager un rééquilibrage, nous proposons de créer 379 postes – c’est-à-dire de rétablir le niveau de 2017 – pour un coût de 18,9 millions. Il est urgent et nécessaire d’assurer un financement stable et suffisant au Cerema.

M. Fabrice Barusseau (SOC). Le rapport que j’ai rédigé avec Philippe Fait sur l’adaptation de l’aménagement des territoires au changement climatique a été adopté à l’unanimité dans cette commission. Nous y saluions le travail du Cerema, son expertise et nous préconisions de renforcer ses effectifs et ses moyens. Chers collègues du Rassemblement national, vous êtes une nouvelle fois en pleine contradiction, puisque vous avez voté notre rapport et que vous le remettez en cause ce matin.

L’amendement vise à augmenter les moyens du Cerema, qui est reconnu pour son expertise dans la gestion intégrée du trait de côte, la prévention des inondations, la recherche et le développement de solutions pour remédier au retrait-gonflement des argiles – un problème majeur –, la résilience des infrastructures, la gestion des mouvements de terrain et la réduction des vulnérabilités, soit beaucoup de missions essentielles. Je vous propose de financer l’augmentation de 25 ETP pour un coût de 1,25 million et de compenser la baisse des subventions à l’ANCT pour permettre au Cerema de renforcer ses moyens dans la recherche et l’expertise, grâce à un abondement de 15 millions.

Mme Julie Ozenne, rapporteure pour avis. Le Cerema a fait beaucoup d’efforts. Il estime qu’il a besoin d’environ 8 millions d’euros supplémentaires. L’amendement II-CD226 vise à les lui allouer.

M. Marcellin Nadeau (GDR). L’amendement II-CD35, identique, vise à transférer 8 089 990 euros du programme 217 au programme 159, Expertise, information géographique et météorologie. Il s’agit de maintenir les crédits du Cerema, qui a réussi à réduire de 11 millions ses frais de fonctionnement en 2025. Nous nous assurerons ainsi qu’il poursuive ses missions au service des territoires, confrontés à l’accélération du changement climatique.

Les climato-négationnistes réfléchissent à court terme. Dans la zone caraïbe sévit un ouragan très puissant, Melissa, qui a touché la Jamaïque ; de tels phénomènes pourraient concerner des territoires auxquels le Rassemblement national se dit attaché, comme la Martinique et la Guadeloupe. Cela justifie de mettre les moyens nécessaires pour aider les collectivités à s’en prémunir.

Mme Graziella Melchior (EPR). J’ajoute que le Cerema contribue notamment à guider les communes dans la rénovation du bâti scolaire et dans la végétalisation des cours de récréation.

Mme Julie Ozenne, rapporteure pour avis. Je suggère le retrait des amendements II-CD81 et II-CD166, au profit des identiques, afin de nous assurer que le Cerema obtiendra les crédits dont il a besoin pour continuer son travail.

La commission rejette successivement les amendements II-CD81 et II-CD166.

Elle adopte les amendements identiques II-CD226, II-CD35 et II-CD197.

 

Amendements II-CD83 de Mme Anne Stambach-Terrenoir et II-CD44 de Mme Lisa Belluco (discussion commune)

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NFP). L’amendement II-CD83 vise à augmenter les moyens alloués à Météo-France, qui fournit des données essentielles pour la sécurité des personnes et des biens, pour l’organisation des activités économiques et pour anticiper les impacts du changement climatique en général. Cet établissement essentiel contribue aussi à l’élaboration des politiques publiques relatives au climat et à la présence internationale de la France, notamment grâce à sa participation aux travaux du Giec.

La hausse des crédits de Météo-France est notable, mais le gouvernement ne prévoit aucune création nette de postes : tout va au renouvellement des supercalculateurs, or nous avons aussi besoin d’intelligence humaine. Depuis 2017, 383 postes ont été supprimés – on est passé de 3 020 emplois à 2 637. Cela affaiblit l’opérateur et dégrade les conditions de travail. Les agents, qui ont fait grève début 2024, sont unanimes : leurs capacités à relever les défis climatiques en sont amoindries.

L’urgence écologique exige au contraire de renforcer les moyens de Météo-France. Nous appelons à rétablir les emplois supprimés et à investir massivement dans cet opérateur essentiel.

Mme Marie Pochon (EcoS). Avec le changement climatique, les événements extrêmes se multiplient, comme Chido et Melissa, qui se dirige vers Cuba. Pour prévenir les catastrophes, nous avons besoin d’un système météorologique opérationnel – il y va de la sécurité de nos concitoyens.

D’année en année, sous l’effet de la politique austéritaire d’Emmanuel Macron, le nombre de postes a fondu. Il faut revenir à la situation antérieure.

Mme Julie Ozenne, rapporteure pour avis. Le changement climatique impose des adaptations : Météo-France a besoin de ses ETP. Je demande le retrait de l’amendement II‑CD83 au profit du II-CD44, afin d’encadrer la mesure.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements II-CD82 de Mme Anne Stambach-Terrenoir et II-CD92 de Mme Julie Ozenne (discussion commune)

M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). L’amendement II-CD82 tend à augmenter significativement le montant des crédits alloués à l’IGN.

Alors que les risques climatiques s’aggravent chaque jour, le gouvernement persiste dans sa politique de coupes budgétaires. Depuis 2017, 154 emplois ont été supprimés à l’IGN ; il prévoit d’en retirer encore 17. Cette saignée est inacceptable car elle affaiblit un opérateur stratégique, indispensable pour protéger et comprendre le territoire. En effet, il cartographie les risques, suit l’érosion côtière, accompagne les agriculteurs et mesure les impacts du dérèglement climatique.

En établissant des observations plus régulières et plus précises de l’état de l’environnement, il est devenu un véritable cartographe de l’anthropocène.

Cette politique de coupe budgétaire est une impasse. Nous dénonçons le démantèlement progressif de l’ingénierie publique et demandons l’arrêt des suppressions de postes et le rétablissement immédiat de ceux supprimés depuis 2017.

Mme Julie Ozenne, rapporteure pour avis. L’amendement II-CD92 vise aussi à augmenter, dans une moindre mesure, les crédits de l’IGN, pour lui donner les moyens de bien travailler. Il a fait beaucoup d’efforts et se trouve dans une situation difficile.

J’émets également un avis favorable sur l’amendement II-CD82, en espérant que l’un des deux sera adopté.

La commission adopte l’amendement II-CD82.

En conséquence, l’amendement II-CD92 tombe.

 

Amendement II-CD188 de M. Timothée Houssin

M. Timothée Houssin (RN). Cet amendement vise à économiser les 14,8 millions alloués au Centre scientifique et technique du bâtiment. J’arrête tout de suite nos collègues de gauche : nous ne remettons pas en cause son bien-fondé, mais son activité marchande lui fournit la majeure partie de ses ressources. En 2024, ses produits d’exploitation atteignaient 135 millions et, depuis plusieurs exercices, ses résultats d’exploitation sont positifs : il subvient seul à ses besoins.

Mme Julie Ozenne, rapporteure pour avis. Avis défavorable. Le CSTB est un établissement public industriel et commercial : les fonds publics sont indispensables pour qu’il puisse mener les activités de recherche demandées par son ministère de tutelle et payer les frais, de structure notamment.

Adopter votre amendement reviendrait à privatiser complètement le CSTB, également chargé de la certification publique : ce serait une grave erreur.

La commission rejette l’amendement.

 

 

Après l’article 69

 

Contre l’avis de la rapporteure pour avis, la commission rejette l’amendement IICD55 de Mme Lisa Belluco.

 

Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous en venons à l’examen des amendements relatifs au programme 217.

 

 

Amendement II-CD185 de M. Timothée Houssin

M. Timothée Houssin (RN). Les crédits de paiement de l’action Pilotage, support, audit et évaluations augmentent de 30 millions, soit 11 %. Le présent amendement vise à en rester au montant de 2025, afin de contenir les dépenses de l’État et de concentrer la ressource publique sur les actions prioritaires pour la transition écologique et énergétique.

M. Vincent Descoeur, rapporteur pour avis. Cette hausse vise à investir dans les locaux de La Défense afin de mener une rénovation thermique et de rationaliser leur utilisation, en libérant des niveaux. Cela se traduira par une baisse des coûts de fonctionnement. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-CD61 de M. Sébastien Humbert et II-CD86 de Mme Alma Dufour (discussion commune)

M. Sébastien Humbert (RN). L’amendement II-CD61 vise à réduire de 4,2 millions les dépenses de personnel de la politique de prévention des risques. Le contexte économique impose des choix : la hausse prévue, incohérente avec la volonté affichée de redressement, relève du parti pris politique. Il faut certes sanctuariser le budget 2025 pour préserver les agents en poste, mais on ne doit pas systématiquement culpabiliser les Français et donner la priorité à l’écologie punitive. Le dispositif Services publics écoresponsables, par exemple, n’est pas à la hauteur d’une grande nation comme la France.

M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). Il faut d’urgence renforcer les effectifs d’inspecteurs des établissements classés. Après l’accident de Lubrizol, le gouvernement avait promis d’augmenter de 50 % le nombre des inspections d’ici à 2022 mais à peine une cinquantaine d’inspecteurs supplémentaires ont été recrutés – au regard des annonces, c’est insignifiant. Le PLF pour 2026 confirme cette inertie : la progression de 1,46 % des crédits consacrés aux personnels œuvrant pour la prévention des risques, purement mécanique, ne permet aucunement de renforcer les moyens humains.

Pourtant, les chiffres récents du bureau d’analyse des risques et pollutions industriels (Barpi) sont sans appel : en 2024, on a recensé 1 800 événements technologiques, dont 237 sur des sites Seveso et près de 1 000 dans les autres installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). Plus d’un quart ont eu des conséquences humaines ; plus de la moitié ont entraîné une pollution de l’air ou de l’eau ; 70 % ont eu des répercussions économiques lourdes.

Les inspecteurs des installations classées, en première ligne pour protéger la population et l’environnement, subissent les dégradations liées au manque d’effectifs : surcharge administrative, baisse du temps consacré à chaque contrôle, extension des missions sans renforts suffisants.

L’amendement II-CD86 vise donc à créer 600 postes supplémentaires.

M. Vincent Descoeur, rapporteur pour avis. Monsieur Humbert, on ne peut pas faire des économies sur la sécurité. D’ailleurs, si le texte prévoit d’abaisser le plafond d’emploi du ministère de 316 ETP, 15 sont créés pour la prévention des risques et la sécurité.

Monsieur Cernon, nous avons l’obligation de réduire le déficit ; je ne saurais me montrer favorable à la création de 600 emplois.

Avis défavorable sur les deux amendements.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement II-CD60 de M. Sébastien Humbert

M. Sébastien Humbert (RN). L’amendement II-CD60 vise à réduire de 2,6 millions les dépenses de personnel pour la politique de l’énergie et du climat.

L’augmentation prévue pourrait sembler de bon aloi mais les priorités listées dans le projet annuel de performances relèvent davantage de l’idéologie écologiste que d’une ambition de puissance et de souveraineté.

Responsable de moins de 1 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, la France est vertueuse. S’il convient de maintenir les sommes consacrées en 2025 aux agents des structures publiques, afin de préserver leurs droits sociaux, il faut réorienter les priorités et les moyens vers des politiques qui ne soient pas systématiquement culpabilisantes et punitives. L’obtention du label Employeur pro-vélo niveau or, par exemple, ou encore la mobilisation des agents comme « ambassadeurs » du développement durable ne constituent pas des objectifs prioritaires.

M. Vincent Descoeur, rapporteur pour avis. Les 22 ETP supplémentaires concernent la place accrue donnée aux certificats d’économie d’énergie dans le financement des politiques publiques : à terme, cette dépense se traduira par des ressources supplémentaires. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendement II-CD135 de M. Denis Fégné

M. Denis Fégné (SOC). L’amendement II-CD135 vise à rétablir les effectifs des agents qui œuvrent pour les politiques du programme Urbanisme, territoires et aménagement de l’habitat. Les suppressions de postes et les coupes budgétaires fragilisent le pôle ministériel, dégradent les conditions de travail et compromettent le déploiement des politiques environnementales, dont notre avenir dépend. Les effets du changement climatique ne cessent de s’intensifier : la charge de travail de ce personnel augmente considérablement. Il est urgent de conforter ses moyens humains et financiers.

Cet amendement vise donc à augmenter les crédits de personnel de 1,93 million d’euros, afin que l’État soit en mesure de piloter efficacement la transition écologique et d’honorer nos engagements climatiques.

M. Vincent Descoeur, rapporteur pour avis. Nous avons une obligation de rigueur budgétaire, or les crédits du programme augmentent déjà de 1,57 %. Avis défavorable.

La commission rejette l’amendement.

 

Amendements II-CD46 de M. Pierre Meurin, II-CD190 et II-CD189 de M. Timothée Houssin, et II-CD50 de M. Emmanuel Blairy (discussion commune)

M. Pierre Meurin (RN). L’amendement II-CD46 vise à supprimer la Commission nationale du débat public – je le défends chaque fois que l’occasion s’en présente.

La CNDP représente 4 millions d’euros de dépenses ; depuis 2019, son budget a augmenté de 40 %. À l’heure où l’exemplarité des politiques est de mise, il est indécent de payer son président quelque 13 000 euros par mois.

Sur le fond, elle ne sert à rien. Elle est censée favoriser l’acceptabilité des projets grâce au débat. Dans les cas de l’A69 et de Sainte-Soline, elle a été incapable de désamorcer les conflits – alimentés par des milices écologistes violentes.

Enfin, elle ne sert en rien le débat public. Personne ne la connaît : sa seule fonction est d’incuber les idées écolo pour en faire le lobbying aux frais du contribuable – et ainsi défendre les éoliennes et les ZFE, mais attaquer les routes et le nucléaire.

Bruno Le Maire a proposé l’an dernier de la supprimer. La droite a fait de même lors de l’examen du projet de loi de simplification de la vie économique. Cela a également été évoqué sur les bancs macronistes. En effet, elle provoque des lourdeurs administratives – les normes environnementales sont telles que plus aucun projet n’aboutit.

Les Français cherchent la simplification, la simplification, encore la simplification. Un consensus est possible.

M. Timothée Houssin (RN). L’amendement II-CD190 tend également à supprimer la CNDP. Le II-CD189, de repli, vise seulement à ne pas augmenter son budget.

M. Pierre Meurin (RN). L’amendement II-CD50 vise à réorienter les crédits de la CNDP vers la sécurisation du réseau routier. Dans le classement mondial de la qualité des infrastructures routières, la France est passée du premier au dix-huitième rang : nous sommes en voie de tiers-mondisation. L’idéologie anti-route y a sans doute contribué, aggravant l’enclavement de nos territoires ruraux. Qu’il s’agisse de désenclavement ou de transition écologique, la route fait partie de la solution. Il faut rendre à notre réseau sa splendeur.

Lors du débat sur l’expertise du Cerema, nous avons évoqué le pont de Gênes. En 2019, un rapport du Sénat estimait qu’il faudrait investir 200 millions par an pendant dix ans pour rénover la totalité de nos ouvrages d’art. C’est indispensable, mais rien n’a été fait. Ainsi, l’adoption du présent amendement permettrait de flécher un argent qui ne sert à rien vers une cause impérative.

M. Vincent Descoeur, rapporteur pour avis. Le rôle de la CNDP et les avis rendus font l’objet de débats récurrents, aussi certains soutiennent-ils sa suppression. Cependant, cela ne se fera pas en adoptant un amendement de crédits : il faudrait réécrire tout le chapitre du code de l’environnement relatif à l’information et à la participation du public.

De plus, sur le plan budgétaire, des actions sont engagées qui s’opposent à une décision de suppression à effet immédiat.

Avis défavorable.

Mme Sophie Panonacle (EPR). En vertu de l’article 7 de la Charte de l’environnement, le public a le droit d’être informé et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement. La CNDP est indispensable pour faire respecter ce droit et pour que les élus puissent bâtir des politiques publiques en la matière.

Mme Anne Stambach-Terrenoir (LFI-NFP). Après les éoliennes, la destruction de la CNDP est l’autre obsession du Rassemblement national. Rappelons qu’elle garantit le droit à l’information et à la participation des citoyens à tous les projets affectant l’environnement, en application du code de l’environnement – que vous voulez détruire aussi, il est vrai. La Commission réunit des scientifiques, des associations et des habitants pour débattre des conséquences écologiques des projets qui les concernent. À l’heure où l’on continue à faire passer en force des projets écocidaires et anachroniques, comme l’A69, les mégabassines et certains nouveaux réacteurs nucléaires, qui risquent d’être submergés, il est primordial d’améliorer la transparence. Quand la discussion aboutit à adapter des projets susceptibles de chambouler le quotidien, ceux-ci n’en sont que mieux acceptés.

Collègue Meurin, vous hurlez que les citoyens réclament de la simplification, de la simplification, encore de la simplification. Dans ma circonscription, personne, jamais, n’est venu me demander de faire quelque chose pour la simplification. En revanche, on me demande tous les jours d’intervenir pour éviter de subir les effets d’une usine à goudron, de la pollution de l’air ou du traitement défectueux des déchets. Ça suffit ! Vous êtes viscéralement opposés à la protection de l’environnement comme à la démocratie.

Mme Chantal Jourdan (SOC). La CNDP n’est pas contre tout. Comme le code de l’environnement le prévoit, elle sert la consultation citoyenne. Elle informe les citoyens des projets sur lesquels ils devront donner leur avis. C’est essentiel.

Dans l’Orne, la CNDP participe aussi à la vie démocratique grâce au travail qu’elle effectue auprès des jeunes publics : en leur transmettant des connaissances scientifiques et en leur montrant comment analyser les situations avant de prendre des décisions, elle leur apprend à être des citoyens.

Nous voterons contre ces amendements.

M. Peio Dufau (SOC). Les routes aussi obsèdent le Rassemblement national. Les collectivités territoriales sont obligées d’y investir largement parce qu’un seul camion les use autant que 100 000 véhicules légers. Pourtant, les camions ne paient pas leur part des réparations.

M. Timothée Houssin (RN). On est d’accord.

M. Peio Dufau (SOC). Vous ne l’étiez pas tant hier, lorsqu’il était question d’investir dans le fret.

Si nous voulons dépenser moins dans les routes tout en les gardant en bon état, il faut promouvoir les modes de transport alternatifs lorsque c’est possible.

Mme Marie Pochon (EcoS). Nos collègues du Rassemblement national se disent choqués du mépris qu’afficheraient les orateurs qui répondent à leurs interventions. Or celles-ci sont précisément très méprisantes pour les deux tiers des Français qui attendent plus de l’État en matière de transition écologique, même si cela augmente les contraintes – tous les sondages le disent.

Vous cherchez à détruire un outil démocratique, qui permet d’informer les citoyens des projets décidés dans des salles obscures et imposés verticalement. Ils ont le droit de connaître ces décisions et le montant de l’argent public dépensé pour la réalisation des projets, comme de donner leur avis sur les projets qui concernent leur territoire. C’est le rôle de la CNDP.

Vous êtes maladivement opposé aux énergies renouvelables, or la Commission peut servir à consulter les citoyens sur l’implantation d’éoliennes dans votre circonscription. N’hésitez pas à y recourir.

M. Pierre Meurin (RN). Je vous mets au défi de trouver dans vos circonscriptions des gens qui connaissent la CNDP. En matière d’information du public, on est proche de zéro. C’est vraiment un truc d’initiés. Vous la connaissez par cœur parce que, pour vous, c’est un outil politique. Elle ne sert à rien d’autre qu’à incuber les idées des lobbys écolo et à augmenter la complexité administrative – plus aucun projet ne sort dans ce pays. Supprimons-la ; je suis sûr que nous finirons par y arriver.

En attendant, monsieur le rapporteur pour avis, pourriez-vous détailler votre avis sur l’amendement de repli II-CD50 ?

Mme Sylvie Ferrer (LFI-NFP). Je partage les propos de Marie Pochon. La CNDP est un outil démocratique. La démocratie n’est pas un simple concept, il faut la faire vivre. L’affluence est forte dans les réunions publiques organisées par la CNDP, parce que les gens sont directement concernés par les projets discutés. Leur avis doit être entendu, car il contribue au déploiement d’une intelligence collective et efficace. Les animateurs de ces réunions dressent des bilans et proposent des compromis sur certaines décisions. En revanche, ces compromis ne sont pas toujours pris en compte. Il y a donc lieu d’améliorer le fonctionnement de la CNDP, mais sûrement pas de supprimer cette instance.

M. Vincent Descoeur, rapporteur pour avis. Un débat traverse l’Assemblée sur la CNDP et nous ne ferons pas l’économie d’une discussion sur les autorités publiques indépendantes et les moyens dont elles ont besoin.

Monsieur Meurin, j’ai émis un avis défavorable sur les amendements, y compris sur celui de repli. Les effectifs de la CNDP sont stables et la hausse de crédits ne découle que du glissement vieillesse technicité (GVT), mécanisme automatique que chaque gestionnaire de collectivité connaît. Même s’il n’y a pas d’augmentation du nombre d’emplois, il faut honorer les dépenses de personnel. Voilà pourquoi l’avis est défavorable sur la réduction, même minime, des crédits.

M. Timothée Houssin (RN). La dette se monte à 3 300 milliards et nous avons adopté, depuis hier, des amendements augmentant les dépenses de plus de 6 milliards : dans ce contexte, vous soutenez qu’il est impossible de réaliser 56 000 euros d’économies dans une agence dont le budget se monte à 4 millions ! Peut-être ne faut-il pas prélever cette faible enveloppe sur les dépenses de personnel car le salaire des agents doit évoluer, mais il ne me semble pas impossible de trouver 56 000 euros ailleurs.

Comment allez-vous désendetter le pays ou, à tout le moins, combler le déficit si vous refusez la moindre économie de 56 000 euros ?

M. Vincent Descoeur, rapporteur pour avis. En l’espèce, ce montant de 56 000 euros correspond à l’augmentation du salaire des personnels. Par ailleurs, le budget reste stable. J’ai un avis personnel sur la CNDP, mais il ne m’autorise pas à valider n’importe quelle mesure budgétaire. Le GVT augmente dans le cas présent : je ne connais pas un seul élu qui refuserait de reconduire la hausse de la rémunération des personnels qui en découle. Puisque vous parlez du déficit, colossal et inquiétant en effet, ce n’est pas la somme de 56 000 euros qui y changera quoi que ce soit : mettons-la en perspective et épargnons-nous ce type de débat.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendements II-CD52 de M. Emmanuel Blairy et II-CD177 de M. Timothée Houssin (discussion commune)

M. Sébastien Humbert (RN). L’amendement II-CD52 vise à supprimer les crédits de l’action 27, Commission de régulation de l’énergie (CRE), du programme 217. Créée pour encadrer la libéralisation du marché de l’électricité et du gaz, la CRE agit comme un intermédiaire technocratique entre Bruxelles et les opérateurs, au détriment de la souveraineté nationale et du pouvoir d’achat des Français.

Son existence entretient des doublons administratifs coûteux et prive l’État du contrôle direct de la politique énergétique, notamment de la fixation des tarifs réglementés et de la gestion d’EDF. La suppression de la CRE rendrait à l’État la pleine maîtrise de la politique énergétique, simplifierait la gouvernance du secteur et restaurerait un véritable service public de l’électricité, garant de la sécurité d’approvisionnement et de la stabilité des prix.

M. Timothée Houssin (RN). Dans un contexte de recherche d’économies, l’amendement II-CD177 vise à maintenir le budget de la CRE, donc à refuser son augmentation de 740 000 euros en 2026.

Le rapport de Cour des comptes de 2023 sur les autorités administratives indépendantes (AAI) soulignait la hausse continue des dépenses de fonctionnement et d’effectifs de la CRE sans que des indicateurs de performance tangibles justifient ces évolutions. Il apparaît légitime, dans un moment de forte contrainte budgétaire, de geler les crédits de la CRE.

Le budget annuel de la CRE atteint 25 millions, dont 4 millions d’euros de loyer pour un immeuble de près de 5 000 mètres carrés, soit 30 mètres carrés de bureau par salarié, dans le très chic 8e arrondissement de Paris. Afin d’économiser plusieurs millions d’euros par an, on pourrait mettre un terme au bail de location et trouver des locaux moins luxueux.

M. Vincent Descoeur, rapporteur pour avis. Nous devons en effet nous pencher sur la question immobilière. Les locaux peuvent sembler décalés par rapport aux besoins. La CRE est liée par un bail, mais elle a pris l’engagement, ce qui est la moindre des choses, d’adopter une solution moins coûteuse. Nous veillerons à ce que soit respecté l’engagement pris lors de l’audition de la Commission de procéder à une relocalisation porteuse d’économies.

Quant à la proposition de supprimer la CRE, les mots me manquent. Au cours des dernières années, c’est la CRE qui a déployé le bouclier tarifaire. On peut contester les réponses qu’elle apporte, mais on ne peut pas employer l’adjectif « technocratique » pour qualifier ses personnels. En effet, ceux-ci sont principalement des ingénieurs très qualifiés possédant une compétence scientifique élevée. Enfin, nous confions, au fil des textes de loi, de plus en plus de missions à la CRE ; nous allons d’ailleurs lui demander de se pencher prochainement sur la question de l’hydrogène et sur celle de la révision des contrats photovoltaïques – elle pourrait même procéder à un examen au cas par cas de ces contrats, rendez-vous compte de ce que cela représente.

La CRE est utile, donc j’émets un avis défavorable sur les deux amendements.

Mme Sophie Panonacle (EPR). La suppression de la CRE reviendrait à sortir du marché européen de l’électricité, donc de l’Union européenne, position certes cohérente avec la ligne du Rassemblement national.

Supprimer la CRE est impossible car, sans elle, il n’y a plus de fixation des tarifs d’achat, ni d’organisation des appels d’offres pour les énergies renouvelables, ni de gestion des litiges entre les entreprises et les gestionnaires de réseaux, ni de régulation du marché du gaz.

La commission rejette successivement les amendements.

 

Amendement CD 144 de M. Romain Eskenazi

M. Romain Eskenazi (SOC). Gendarme du ciel créé en 2014, l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires sanctionne par des amendes les compagnies qui ne respectent pas les couvre-feux totaux ou partiels. Les effectifs, initialement fixés à douze agents, ont été réduits à onze pendant la crise sanitaire : cette contraction était logique compte tenu de la forte diminution des mouvements aériens induite par l’épidémie de covid. En 2025, le volume de vols dans le ciel national retrouvera son niveau de 2019. Un nouveau président vient d’être nommé, mais le siège est resté vacant pendant un temps et un retard dans le traitement des dossiers s’est accumulé.

Face à l’augmentation de l’activité, nous proposons de rétablir les effectifs de l’Acnusa à 12 ETP. Dans les faits, les effectifs sont déjà remontés à ce niveau ; seulement, le douzième poste n’est pas financé par le budget de l’Acnusa mais par la réserve du secrétariat général du ministère. Il serait logique de revenir à une situation normale et de pérenniser officiellement le retour à 12 ETP dans cette structure indépendante de l’État.

M. Vincent Descoeur, rapporteur pour avis. L’effectif mobilisable s’établit à 12 ETP. Avec douze éléments, l’Acnusa a rattrapé son retard dû à la vacance du poste de président et au risque juridique qu’elle impliquait. Or, si elle a pu rattraper son retard avec 12 personnes, elle peut fonctionner en rythme de croisière avec 11 ETP. La proposition visant à créer un douzième ETP revient néanmoins à régulariser la situation actuelle et à entériner le retour à celle d’avant le covid. Comme ce choix n’a pas d’incidence budgétaire, je m’en remets à la sagesse de la commission.

La commission adopte l’amendement.

 

La réunion, suspendue à douze heures trente, est reprise à douze heures trente-cinq.

 

Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous abordons l’examen pour avis des programmes 181 Prévention des risques, 235 Sûreté nucléaire et radioprotection et 174 Énergie, climat et après-mines.

 

Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. J’ai le plaisir de vous présenter ce matin le bilan de mes travaux en tant que rapporteure pour avis sur les crédits consacrés à la prévention des risques, programme 181, et à la sûreté nucléaire et à la radioprotection, programme 235, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2026.

Ces programmes poursuivent un objectif central : réduire l’exposition de la population et de l’environnement à l’ensemble des risques majeurs, qu’ils soient naturels, technologiques, chroniques, miniers ou nucléaires. Les accidents industriels, comme ceux d’AZF ou plus récemment de Lubrizol, ainsi que les catastrophes naturelles, nous rappellent que la prévention n’est pas une option mais une nécessité pour protéger nos concitoyens et nos infrastructures. Il est essentiel de maintenir un niveau de financement adéquat, garant de la pérennité et de l’efficacité de l’action publique, afin que nos territoires disposent des moyens nécessaires pour anticiper, réduire et gérer les risques auxquels ils sont confrontés.

J’aborderai tout d’abord les crédits relatifs au programme 181, qui contient sept actions relatives à la prévention des risques technologiques, des risques naturels et hydrauliques, y compris le fonds de prévention des risques naturels – ou fonds Barnier – et le retrait-gonflement des argiles, ainsi qu’à la gestion de l’après-mines et au financement de deux opérateurs de l’État, l’Agence de la transition écologique (Ademe) et l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris). Ces crédits enregistrent une hausse significative par rapport à 2025, passant de 1,4 milliard à 2,6 milliards en autorisations d’engagement, soit une augmentation de 87 %, et de 1,35 milliard à 1,48 milliard en crédits de paiement, en hausse de 10 %.

Cette progression masque en réalité une stabilité globale des dotations des actions. Elle résulte avant tout d’évolutions comptables – budgétisation de l’Ademe – et de périmètre – transferts de crédits en provenance du programme 190, Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables. En effet, jusqu’à présent, l’Ademe était financée par une subvention pour charges de service public. La nouvelle présentation comptable distingue les autorisations d’engagement des crédits de paiement et s’accompagne d’un rattrapage technique de plus de 800 millions correspondant à des engagements pris avant 2026. Selon le Gouvernement, cette évolution vise à mieux retracer dans la comptabilité de l’État le niveau des engagements pris par l’Ademe et à renforcer l’information du Parlement.

Le financement de l’Ademe représente près de 80 % des crédits du programme 181. Il soutient notamment deux leviers essentiels de la transition écologique que sont le fonds Chaleur et le fonds Économie circulaire. Le fonds Chaleur, consacré au développement de la chaleur et du froid renouvelables, constitue l’un des dispositifs de décarbonation les plus performants puisqu’il génère 3 euros d’investissement privé pour chaque euro de soutien public. Le fonds Économie circulaire accompagne les projets de prévention et de réduction des déchets, de recyclage, de valorisation, de réemploi ou de réutilisation des produits en fin de vie.

Je souhaite également souligner l’importance de l’innovation industrielle dans le domaine du recyclage, en particulier pour la récupération des métaux rares. Ces technologies doivent être pleinement soutenues car elles sont indispensables pour réduire notre dépendance aux ressources primaires et sécuriser nos approvisionnements tout en limitant l’impact environnemental de nos modes de production. Le fonds Économie circulaire accompagne en outre des projets structurants, notamment dans le développement des combustibles solides de récupération (CSR). Si un soutien public de près de 200 millions avait été accordé entre 2020 et 2024, aucun nouvel appel à projets n’a été lancé en 2025. Je le regrette car cela risque de freiner la dynamique d’investissement nécessaire à la valorisation énergétique des refus de tri, voués autrement à être enfouis donc à polluer les sols.

La répartition du budget de l’Ademe entre les différents programmes sera arrêtée en décembre lors de la réunion de son conseil d’administration. À ce stade, le fonds Chaleur devrait être maintenu à 847 millions, tandis que le fonds Économie circulaire connaîtrait une diminution pour atteindre 100 millions. En tant que rapporteure pour avis, j’insiste sur la nécessité de préserver les moyens budgétaires de l’Ademe. Comme je l’ai toujours affirmé, l’Agence est un acteur essentiel et reconnu de la transition énergétique et écologique, dont la qualité du travail dans la gestion des fonds a été soulignée lors des auditions que j’ai menées. J’ai déposé des amendements visant à accroître le financement des fonds Chaleur et Économie circulaire.

L’Ineris développe depuis plus de trente ans une expertise essentielle en matière de risques technologiques. Ses crédits sont stables à périmètre constant, après les transferts du programme 190.

Nous le savons, la politique publique de prévention des risques technologiques se conduit sur le terrain, au plus près des sites industriels et des populations concernées. L’action des services de contrôle demeure indispensable pour protéger la santé humaine et l’environnement, qu’il s’agisse de réduire l’exposition aux pollutions d’origine industrielle ou agricole, de lutter contre les substances émergentes comme les substances per- ou polyfluoroalkylées ou de promouvoir l’économie circulaire. Je salue l’engagement des inspectrices et des inspecteurs qui œuvrent quotidiennement dans nos territoires. Le renforcement chaque année du nombre d’inspections témoigne d’une vigilance accrue dont nous pouvons collectivement nous réjouir. Au-delà de l’inspection, les attentes sont très fortes pour le conseil et l’accompagnement en amont des entreprises. Il est indispensable de garantir les effectifs consacrés à la prévention, afin de maintenir une présence sur le terrain à la hauteur des enjeux. Les crédits consacrés aux risques technologiques demeurent stables, à périmètre constant après les transferts en provenance du programme 190.

L’action pour la gestion de l’après-mines, quant à elle, voit son budget augmenter d’environ 15 millions, afin d’appliquer le règlement européen relatif à la réduction des émissions de méthane.

En matière de risques naturels, le budget pour 2026 reste stable. Dans le cadre de mes travaux, j’ai souhaité examiner la thématique des risques naturels liés au réchauffement climatique et aux mouvements de terrain. Éboulements, glissements de terrain ou encore retrait-gonflement des argiles, ces phénomènes constituent une menace significative pour la sécurité des populations comme pour la résilience de nos infrastructures. Le cas récent, dans le Jura, du barrage hydraulique de Coiselet, menacé par un risque de chute de blocs rocheux, a rappelé avec force la nécessité d’une prévention rigoureuse et d’une coopération efficace entre les acteurs du territoire. En effet, si les acteurs du terrain se sont rapidement mobilisés pour neutraliser le risque de rupture du barrage, mes échanges avec les élus locaux ont mis en lumière le besoin de renforcer la communication et la pédagogie en cas de mesures urgentes, par exemple dans des tables rondes réunissant les experts du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) ou des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) pour clarifier les risques et les mesures déployées.

Le développement de la culture du risque vise à assurer une compréhension par tous les acteurs, citoyens comme élus, des risques majeurs et de la vulnérabilité de leur territoire. À ce titre, la Journée nationale de la résilience, instaurée par le gouvernement en 2022, constitue un exemple d’outil de sensibilisation efficace. Il est essentiel de poursuivre et de multiplier ces initiatives en déployant des supports adaptés à chaque public. Sur le volet prévention, trop peu de communes sont abonnées aux dispositifs d’alerte Apic (avertissement pluies intenses à l’échelle des communes) pour les fortes précipitations ou Vigicrues Flash pour les crues soudaines. Je vous invite à promouvoir ces services dans vos circonscriptions, afin que toutes les communes concernées puissent en bénéficier : la démarche est simple et gratuite.

La prévention des risques naturels, notamment des mouvements de terrain, est soutenue par le fonds de prévention des risques naturels. Ce dispositif intervient en amont des catastrophes naturelles en finançant des actions visant à renforcer la sécurité des personnes et à réduire les dommages aux biens. Le fonds Barnier constitue un levier essentiel pour l’adaptation des territoires au changement climatique. Son efficacité est démontrée, puisque chaque euro investi évite en moyenne 3 euros de dommages voire 11 euros pour des actions intégrées aux plans de prévention des risques d’inondation (PPRI).

Le projet de loi de finances pour 2026 prévoit la création d’une ligne budgétaire spécifique dédiée au retrait-gonflement des argiles. Ce phénomène, qui est un mouvement de terrain lent et progressif, touche près de 48 % du territoire français, 10,4 millions de maisons individuelles étant exposées à ce risque.

Enfin, les crédits du programme 235, Sûreté nucléaire et radioprotection, accusent une légère baisse et atteignent 345,6 millions en autorisations d’engagement et 350,3 millions en crédits de paiement.

Les deux tiers du programme sont dévolus à la masse salariale de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR), laquelle emploie des profils divers. La hausse de 2,3 % des crédits de l’Autorité résulte uniquement des revalorisations salariales habituelles et ne s’accompagne d’aucun renfort d’effectifs. Si les crédits consacrés à la masse salariale de l’ASNR progressent, ceux qui soutiennent directement ses missions opérationnelles enregistrent pour leur part une baisse. Je salue le travail accompli par l’ASNR au cours de ses premiers mois d’existence. Elle est prête sur le plan opérationnel, mais de nombreux axes restent à consolider, qu’il s’agisse de la convergence des systèmes d’information, de la réorganisation interne des directions métiers ou du développement d’une culture commune et de la cohésion des équipes.

M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Le programme 174 Énergie, climat et après-mines correspond peu ou prou au périmètre d’intervention de la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC). Il s’agit d’un programme important, doté de 1,244 milliard en autorisations d’engagement et 1,232 milliard en crédits de paiement. Ces dotations accusent une baisse d’environ 700 millions, puisqu’elles s’élevaient à 1,9 milliard l’année dernière. Cette diminution s’explique principalement par le transfert des aides budgétaires à l’acquisition de véhicules électriques vers le dispositif des certificats d’économie d’énergie (CEE). Le programme finance également le chèque énergie à hauteur de 674 millions, le légitime chantier de l’après-mines, essentiellement le budget de l’Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs (ANGDM), et une politique de l’énergie de 126 millions, dont 80 millions sont destinés au financement des études de développement de l’éolien en mer. Je proposerai, par amendement, de supprimer cette dernière dotation, tout comme l’enveloppe de 5,5 millions allouée au financement du Médiateur national de l’énergie, institution inutile faisant doublon. J’estime que mon rôle de rapporteur pour avis ne se limite pas à faire la pédagogie des crédits du programme : je souhaite faire la critique des orientations retenues et vous proposer certains choix forts.

Le programme 174 ressemble bien plus à une regrettable usine à gaz pour sortir des énergies fossiles qu’à une politique de long terme visionnaire et intellectuellement rationnelle. Les choix budgétaires opérés ainsi que les changements de pied permanents dans les politiques publiques de la transition écologique, mâtinés de complexités technocratiques, pourraient avoir comme devise inversée : « ce qui se conçoit mal s’énonce avec peine ».

Jusqu’à cette année, le programme 174 rassemblait toutes les aides à l’acquisition de véhicules électriques, celles-ci s’apparentant à une véritable subvention d’investissement de la concurrence internationale, notamment chinoise. Il est choquant et scandaleux, à l’heure où des choix budgétaires responsables sont nécessaires, de financer nos concurrents directs avec l’argent du contribuable.

Les crédits budgétaires du programme 174 disparaissent au profit des CEE. Le problème est que le législateur ne pourra plus exercer de contrôle budgétaire sur les aides versées pour l’achat de voitures électriques. Les CEE risquent de concurrencer ce financement, qui profite à notre économie, notamment aux secteurs du bâtiment et du logement. Cette évolution est tout à fait critiquable.

Je souhaite que nous changions de stratégie en matière de transition écologique dans le secteur automobile. Ce programme finance la lutte contre le changement climatique et pour la qualité de l’air : dans ce cadre, il soutient l’Atmo, la fédération des associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (Aasqa). Or ces structures promeuvent les fameuses ZFE, que je conteste depuis plusieurs années. Les ZFE sont contre-productives pour la qualité de l’air et la transition écologique. Au-delà de la ségrégation sociale qu’elles imposent à des millions de Français, ces zones manquent leur cible. Ainsi, une Clio citadine légère dont la vignette est Crit’Air 4 pollue moins qu’un SUV de la marque Range Rover dont la vignette est Crit’Air 1, qui émet 70 % de particules fines de plus à cause de ses pneus, du poids de sa batterie et de ses suspensions. La vignette Crit’Air est mal conçue.

Actuellement, 80 % des véhicules électriques sont produits par la Chine. Ils sont en train de détruire notre filière industrielle automobile – je pèse mes mots. Or les politiques publiques et le fléchage budgétaire du programme 174 ne sont rien d’autre que des subventions déguisées de nos concurrents industriels. Ils ont pour conséquence de détruire notre filière automobile et de pénaliser les Français les plus modestes en compliquant leur accès aux services publics, aux commerces de proximité dans les grandes villes, aux bassins d’emplois et à l’offre de santé – tout cela a d’ailleurs largement disparu des zones rurales.

Il est tout à fait contestable que la voiture électrique chinoise soit mieux-disante en matière de pollution que nos citadines, même si celles-ci roulent aux énergies fossiles. En effet, la production d’une voiture électrique chinoise utilise des terres rares, des minerais comme le cobalt extrait en république démocratique du Congo par des enfants de moins de 15 ans dans des mines artisanales. Que la voiture électrique soit produite au mépris des droits humains avant d’être importée sur notre sol devrait tous nous interpeller. Il n’est pas écologique de refuser de miser sur la filière industrielle et souveraine française.

Je plaide pour que les aides à la conversion soient fléchées sur fond de neutralité technologique. J’ai auditionné énormément d’acteurs de la filière automobile qui trouveraient leur place dans des politiques tendant à la neutralité carbone. Je pense au décalaminage à hydrogène du parc automobile existant, qui ferait baisser le taux d’émission de particules fines d’environ 60 % à 70 %, et à l’installation de boîtiers éthanol pour réduire les émissions de CO2 dans les mêmes proportions. Des choix ont été effectués dans la première partie du PLF pour contrecarrer la filière du bioéthanol, laquelle a pourtant un rôle à jouer dans la décarbonation de la filière automobile. Il est temps de faire des choix inédits et de miser sur la diversification des aides plutôt que de privilégier la seule voiture électrique, laquelle présente de nombreux inconvénients pour notre souveraineté et pour la transition écologique.

Le programme vise à améliorer la qualité de l’air, mais c’est le renouvellement naturel du parc automobile qui réduit les émissions de particules fines et de dioxyde d’azote dans nos grandes métropoles. En vingt ans, avant le déploiement des ZFE, ces émissions et la pollution au dioxyde d’azote ont diminué respectivement de 40 % et de 25 % dans les villes. C’est donc bien le renouvellement du parc automobile qui, grâce aux améliorations technologiques – vannes EGR, filtres à particules, fluide AdBlue dans les voitures diesel –, fait reculer la pollution.

Le taux de renouvellement du parc automobile est de 2 % par an en moyenne ; cette proportion est la même dans les ZFE comme en dehors. Ces zones sont un scandale social, puisqu’elles excluent une partie de la population, et elles se révèlent inutiles pour améliorer la qualité de l’air. Pour préparer mon rapport, j’ai auditionné des représentants des Aasqa et de la DGEC, lesquels maintiennent leur soutien aux ZFE. Il me paraissait intéressant d’éclairer mon opposition aux ZFE en décrivant le contexte budgétaire, car nous choisissons de soutenir financièrement des dispositifs socialement scandaleux et écologiquement inefficaces. Je vous propose de rompre avec cette orientation et de prendre des décisions stratégiques qui soient profitables au pays, au pouvoir d’achat des Français et à la réduction de la dépense publique.

Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous en venons aux interventions des orateurs des groupes.

M. Julien Guibert (RN). Le programme 174, censé accompagner la transition énergétique, se révèle inefficace et il dilapide l’argent des Français. Les choix budgétaires apparaissent fluctuants, technocratiques et déconnectés du terrain. Pendant que les crédits reculent, aucune trajectoire claire ne se dessine.

Ce programme décline une écologie punitive : malus automobile modifié dix‑sept fois en trois ans, interdictions successives, contraintes toujours plus lourdes et inintelligibles pour nos concitoyens. On ne convainc plus, on contraint.

Pourtant, les Français ne sont pas opposés à l’écologie, ils veulent protéger les paysages, leurs territoires et leur environnement. Ils refusent en revanche d’être stigmatisés et infantilisés par une avalanche de normes et de surnormes. L’exemple le plus criant de cette dérive, ce sont les ZFE, que nous qualifions pour notre part de zones à forte exclusion. En effet, elles frappent d’abord les plus modestes, qui n’ont pas les moyens de changer de véhicule : près de 9 millions de véhicules, soit plus de 20 % du parc, ont une vignette Crit’Air 3 et seront bientôt bannis des métropoles. Pour quel résultat ? Le rapport le dit, l’impact des ZFE sur la pollution atmosphérique est faible, de l’ordre de seulement 1 % de réduction de particules dans le Grand Paris. L’écologie qui exclut et qui ruine n’est pas une bonne écologie.

Autre dérive, l’obsession éolienne, symbole d’une transition coûteuse et non maîtrisée. Ce budget consacre 73 millions à de simples études et débats publics sur l’éolien en mer, lesquels ne produisent aucun effet si ce n’est d’alimenter la dépense publique. Dans ma circonscription, dans la Nièvre, nous vivons cette pression en direct : à Maux, au cœur du Morvan, à Surgy, à Saint-Germain-des-Bois ou dans les Amognes, des projets menacent les paysages, le patrimoine, la valeur de nos maisons et fracturent la paix dans nos villages. Dans certains cas, les projets prévoient de raser des hectares de forêt pour y implanter des éoliennes, comme ceux de Tannay, Talon ou Saint-Germain-des-Bois. L’éolien industriel détruit les paysages, désorganise les territoires ruraux et bénéficie à des promoteurs privés et non à la souveraineté énergétique de la France. Il faut aussi s’interroger sur les raisons qui poussent les promoteurs éoliens à louer plutôt qu’à acheter des terrains dont l’hectare coûte en moyenne entre 3 000 et 5 000 euros : sans doute veulent-ils se dédouaner de leurs obligations.

Le Rassemblement national défend une autre voie, celle d’une écologie populaire qui respecte nos modes de vie, qui défend la neutralité technologique pour ne pas enfermer les Français dans le tout-électrique importé massivement depuis la Chine, qui compte sur le renouvellement naturel du parc automobile plutôt que sur la culpabilisation sociale symbolisée par l’interdiction du thermique, qui préfère la confiance à la défiance permanente et qui promeut une écologie économiquement réaliste et socialement juste.

L’écologie ne doit jamais devenir l’ennemie du peuple. Elle doit protéger la France, ses travailleurs, ses territoires et non les punir. Le Rassemblement national mène le combat d’une transition écologique patriote, souveraine et au service des Français.

Mme Ersilia Soudais (LFI-NFP). Dans nos débats, il faut faire preuve d’humilité : voilà ce que m’a dit le sous-préfet de Torcy cette semaine. Malheureusement, nos collègues de droite et d’extrême droite manquent d’humilité et campent sur leurs certitudes. Cela les empêche de se confronter à la réalité concrète du terrain pour répondre à l’urgence climatique. Il faut dire que les membres du Rassemblement national sont persuadés qu’il n’y a pas d’urgence climatique ; quant aux représentants du bloc macroniste, ils font preuve, au mieux, d’immobilisme. Pourtant, l’urgence climatique est réelle. Plusieurs risques majeurs nous guettent, à commencer par celui de l’impossibilité d’habiter la planète.

Pour illustrer la situation, j’aimerais évoquer le syndicat mixte pour l’enlèvement et le traitement des résidus ménagers (Siétrem), centre de tri situé dans ma circonscription. Le tri et la valorisation des déchets, de même que la création d’énergies renouvelables qui l’accompagne, sont des actions positives accomplies par ce centre. Mon territoire cumule les décharges, au point que l’on peut le surnommer « la poubelle de l’Île-de-France ». Le Siétrem nous aide à respirer et réduit les risques associés à l’accumulation de déchets, mais il abîme dans le même temps nos territoires et la santé de leurs habitants. En effet, l’incinération de déchets produit des PFAS ; en outre, comme elle n’est jamais totale, elle crée de petits résidus, que l’on nomme les mâchefers. Ces derniers contiennent des PFAS, qui finissent dans la Marne.

Il ne faut pas se contenter des solutions existantes comme si elles étaient miraculeuses, car elles ont toujours des effets secondaires délétères ; il convient de diversifier les réponses à l’urgence de la situation. Nous aimerions parfois que vous vous contentiez de l’immobilisme, hélas il vous arrive de prendre des mesures rétrogrades, comme la loi Duplomb.

On peut s’inspirer de méthodes du passé, d’ailleurs j’ai déposé une proposition de loi visant à accélérer le développement de la construction et de la rénovation en bois-terre-paille. L’objectif du texte est la limitation des déchets, car le meilleur déchet est celui qu’on ne produit pas. Je vous invite à lire la proposition de loi.

M. Mickaël Cosson (Dem). Le programme 174 subit une baisse globale de ses crédits, de près de 17 %, mais un effort louable est consenti pour l’accompagnement social de la transition énergétique. Je salue l’augmentation significative, supérieure à 40 %, de l’action 02, Accompagnement transition énergétique, dont la dotation atteint 654 millions. Cet effort consolide un outil essentiel pour nos concitoyens, le chèque énergie, qui aide près de 4 millions de ménages à payer leurs dépenses d’énergie : il s’agit d’une mesure concrète d’équité territoriale et sociale.

Je note le retrait des aides à l’acquisition de véhicules propres du budget de l’État pour les remplacer par les CEE dès 2026. De même, les fonds pour l’éolien en mer restent significatifs, afin de soutenir la poursuite du développement de cette source d’énergie.

J’alerte mes collègues sur l’urgence de l’action 05, Lutte contre le changement climatique et pour la qualité de l’air. Le maintien de la politique en faveur de la qualité de l’air est un enjeu sanitaire majeur, puisque la pollution atmosphérique est responsable de 40 000 décès prématurés par an, selon les chiffres de Santé publique France (SPF).

S’agissant de la prévention des risques, l’avis budgétaire présenté par notre collègue Danielle Brulebois rappelle l’urgence d’agir face à l’accélération des défis. Je souligne l’importance des actions de prévention des risques, majeurs comme les inondations et les incendies, ou pesant sur la sécurité des activités industrielles : l’enjeu est capital pour la résilience de nos territoires. Ces derniers jouent un rôle primordial, mais une épée de Damoclès pèse sur leur budget, puisqu’ils sont contraints à l’équilibre. On continue à établir des ratios rapportant le montant des investissements au nombre d’habitants : si on retenait une telle méthode pour les ménages – diviser par deux le prix d’un bien coûteux sans lissage mensuel –, ceux-ci seraient tous surendettés. Il est regrettable de conserver des méthodes de calcul archaïques pour les collectivités, alors que les budgets des communes sont équilibrés.

Nous saluons la reconnaissance du retrait-gonflement des argiles, responsables de 36 % de la sinistralité. L’action 15 du programme 181 est dotée de 30 millions en autorisations d’engagement et de 15 millions en crédits de paiement. Je partage toutefois l’inquiétude soulevée par le rapport : la baisse des crédits de paiement du fonds Barnier nous semble contradictoire avec l’augmentation des sinistres climatiques, d’autant que le coût des catastrophes a dépassé, pour la première fois cette année, l’investissement consenti pour accompagner les collectivités.

La hausse des crédits de l’Ineris est essentielle pour renforcer son expertise des nouveaux polluants comme les PFAS. S’agissant de l’Ademe, nous devons garantir le financement des outils de la transition, notamment celui du fonds Chaleur dont les besoins dépassent largement la dotation prévue.

Suivant les recommandations du rapport, nous devons nous assurer que les crédits du PLF pour 2026 sont à la hauteur de nos ambitions d’une politique de prévention forte, lucide et protectrice des territoires. Si la transition doit être encouragée, elle doit avant tout être lisible.

 

 

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Membres présents ou excusés

 

Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

 

Réunion du mercredi 29 octobre 2025 à 9 h 35

 

Présents. - M. Gabriel Amard, M. Fabrice Barusseau, M. Sylvain Berrios, M. Nicolas Bonnet, M. Jean-Yves Bony, M. Jean-Michel Brard, Mme Danielle Brulebois, M. Pierre-Henri Carbonnel, M. Sylvain Carrière, M. François-Xavier Ceccoli, M. Bérenger Cernon, Mme Nathalie Coggia, M. Mickaël Cosson, M. Stéphane Delautrette, M. Sébastien Delogu, M. Vincent Descoeur, M. Peio Dufau, M. Aurélien Dutremble, M. Romain Eskenazi, M. Denis Fégné, Mme Sylvie Ferrer, Mme Olga Givernet, M. Julien Guibert, M. Timothée Houssin, M. Sébastien Humbert, Mme Sandrine Josso, Mme Chantal Jourdan, Mme Sandrine Le Feur, Mme Julie Lechanteux, Mme Murielle Lepvraud, M. David Magnier, M. Matthieu Marchio, M. Pascal Markowsky, Mme Yaël Ménaché, M. Pierre Meurin, M. Marcellin Nadeau, M. Hubert Ott, Mme Julie Ozenne, M. Jimmy Pahun, Mme Sophie Panonacle, Mme Constance de Pélichy, Mme Marie Pochon, Mme Véronique Riotton, M. Xavier Roseren, Mme Béatrice Roullaud, M. Fabrice Roussel, Mme Anaïs Sabatini, M. Raphaël Schellenberger, Mme Ersilia Soudais, Mme Anne Stambach-Terrenoir, M. Jean-Pierre Taite, M. Nicolas Thierry, M. Antoine Vermorel-Marques, Mme Anne-Cécile Violland

 

Excusés. - Mme Lisa Belluco, M. Anthony Brosse, M. Jean-Victor Castor, M. Jean-Marie Fiévet, M. Stéphane Lenormand, Mme Christelle Petex, M. Freddy Sertin, M. Olivier Serva

 

Assistaient également à la réunion. - Mme Graziella Melchior, Mme Mélanie Thomin, M. Jean-Luc Warsmann