Compte rendu
Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire
– Suite de l’examen pour avis des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du projet de loi de finances pour 2026 (n° 1906) :
Protection de l’environnement et prévention des risques (Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis) ;
Transition énergétique (M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis)......2
Mercredi 29 octobre 2025
Séance de 15 heures
Compte rendu n° 12
Session ordinaire de 2025-2026
Présidence de
Mme Sandrine Le Feur,
Présidente
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La commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a poursuivi l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du projet de loi de finances pour 2026 (n° 1906) sur les rapports pour avis de Mme Danielle Brulebois sur les crédits relatifs à la protection de l’environnement et à la prévention des risques, et de M. Pierre Meurin sur les crédits relatifs à la transition énergétique.
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous reprenons nos travaux avec la suite des interventions des orateurs des groupes.
M. Fabrice Roussel (SOC). Nous ne pouvons une nouvelle fois que dénoncer le manque d’ambition des différents budgets de cette mission, alors même que les besoins de financement de la transition écologique explosent et que l’adaptation au changement climatique devient plus que jamais une priorité nationale. En effet, nous savons désormais qu’il sera impossible de contenir le réchauffement sous le seuil de 1,5 degré d’ici à la fin du siècle.
Depuis trop longtemps, nos investissements sont insuffisants pour relever ce défi, comme en témoigne le plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc). Ce projet, qui peut paraître ambitieux sur le papier, restera sans portée réelle tant que le gouvernement se refusera à mobiliser de nouvelles recettes substantielles. Les faits parlent d’eux-mêmes.
Le fonds de prévention des risques naturels majeurs, le FPRNM, aussi connu sous le nom de fonds Barnier, d’abord, voit ses crédits reculer de 9 % en autorisations d’engagement (AE) et de 20 % en crédits de paiement (CP). Le fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires – fonds Vert –, ensuite, affiche une baisse de 43 % en AE. Quant à l’Agence de la transition écologique (Ademe), dont le budget est censé être en hausse, plus d’un tiers de ses crédits seront absorbés par des engagements antérieurs, ne lui laissant donc que peu de marges pour ses actions futures. Plus inquiétante encore, la baisse de la dotation du fonds Vert envoie un signal particulièrement négatif qui traduit le désengagement budgétaire de l’État et affaiblit la capacité des collectivités à conduire des projets essentiels de rénovation énergétique, de prévention et d’adaptation aux changements climatiques. Je pense à la prévention des incendies et des inondations ou encore au recul du trait de côte. En somme, ce budget paraît une fois de plus déconnecté des réalités du terrain.
Pour autant, les députés socialistes ne sont pas résignés. Nous proposerons des amendements visant à renforcer le fonds Économie circulaire de l’Ademe, à maintenir à son niveau le fonds Vert – soit 1,15 milliard d’euros contre 650 millions actuellement prévus –, à augmenter la dotation du fonds Chaleur, ou encore à rétablir les moyens de l’Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR). Nous aurons des propositions pour accélérer le passage aux véhicules électriques et moins polluants puisque, en contradiction totale avec le rapporteur pour avis, nous croyons à la transition énergétique et sommes particulièrement inquiets des 40 000 décès annuels dus à la pollution atmosphérique. En un mot, nous agirons pour faire en sorte que la transition énergétique soit une vraie priorité pour le pays.
Mme Julie Laernoes (EcoS). Le rapport pour avis de M. Meurin n’est pas un rapport budgétaire, c’est un pamphlet idéologique, un tract d’extrême droite, climato‑sceptique et anti-écologique. Sous couvert de bon sens et de souveraineté, il attaque l’écologie, la science et l’idée même du bien commun. La transition écologique y est décrite comme punitive, les zones à faibles émissions (ZFE) comme liberticides et la décarbonation des transports comme un scandale industriel.
Ce discours est celui des lobbys fossiles et du renoncement. Le Rassemblement national prétend défendre le peuple, mais il soutient surtout les profits des pétroliers et des industriels les plus polluants. C’est un parti du déni scientifique et écologique, pas de la vérité et encore moins de la justice climatique.
Et, pendant que le RN déroule son idéologique meurtrière pour les générations futures, le gouvernement n’est clairement pas à la hauteur. Ce budget pour 2026 cumule les reculs, alors qu’il devrait incarner une véritable ambition pour une transition écologique juste et populaire.
S’agissant des rénovations énergétiques, quand le RN veut carrément supprimer l’Agence nationale de l’habitat (Anah), MaPrimeRénov’, le diagnostic de performance énergétique (DPE), le gouvernement suspend les aides à la rénovation, puis les rabote, les faisant passer de 2 à 1,5 milliard. Résultat : des ménages perdus, des artisans en difficulté, une enveloppe budgétaire floue et en baisse, et une politique du logement qui piétine au lieu d’accélérer la décarbonation.
En matière de mobilité propre, le leasing social pour les véhicules électriques, pourtant plébiscité, disparaît en grande partie du budget au profit des certificats d’économie d’énergie (CEE), ce qui signifie la privatisation des aides. Ce choix est socialement injuste et écologiquement incohérent : on prive les ménages modestes d’un outil facile d’accès à la mobilité décarbonée au moment même où il faudrait l’étendre.
S’agissant du programme 181, madame la rapporteure pour avis, les moyens de l’Ademe stagnent. Je rappelle que le RN souhaite supprimer l’agence et que le gouvernement voulait raboter son budget l’an dernier. Quant au fonds Chaleur, il reste à son niveau de 2025 alors que les projets de décarbonation explosent dans les territoires. Cette orientation est d’autant plus incompréhensible que le dispositif est l’un des plus efficaces en matière de dépense publique. Pour économiser une tonne de CO2, l’Ademe ne dépense que 36 euros, là où d’autres actions en demandent des centaines. Dans un contexte de tension budgétaire, c’est bien ce type d’outil qu’il faudrait soutenir et amplifier.
Je le répète, ce budget est celui des reculs, ce qui est d’autant plus inquiétant dans un contexte de backlash écologique et d’incessante remise en cause de nos engagements environnementaux. À force de reculer sur tout, le gouvernement colle de plus en plus dangereusement au discours climatosceptique du Rassemblement national. Là où il faudrait du courage et de la cohérence, il choisit le renoncement.
M. Xavier Roseren (HOR). Je souhaite d’abord vous remercier, madame la rapporteure pour avis, pour votre travail sur ce volet essentiel du budget de la protection de l’environnement et de la prévention des risques. Du programme 181 dépend la crédibilité de notre action publique en matière de résilience, de sécurité industrielle et de transition écologique. En 2026, les crédits qui lui sont alloués progresseront de près de 10 % en CP et doubleront en AE, afin de désormais inscrire intégralement le budget de l’Ademe dans la comptabilité de l’État. Cette clarification renforce la lisibilité de notre politique ainsi que le contrôle du Parlement.
J’ajoute que, derrière la mécanique budgétaire, il y a un enjeu de fond : la prévention vis-à-vis de la multiplication des risques naturels et technologiques, exacerbés par le changement climatique. Les plans de prévention des risques (PPR) couvrent actuellement 12 700 communes, mais la priorité est désormais à leur actualisation, afin d’y intégrer la trajectoire de réchauffement de référence pour l’adaptation au changement climatique (Tracc). Ce travail requiert une ingénierie locale renforcée, notamment en montagne où les risques se combinent et s’intensifient ; je pense aux mouvements de terrain, aux avalanches, aux éboulements, au retrait-gonflement des argiles.
À cet égard, la création d’une ligne budgétaire consacrée à cet enjeu et le soutien du fonds Barnier vont dans le bon sens. Les collectivités, notamment rurales ou de montagne, doivent être accompagnées face à la hausse des aléas. Ce fonds, pilier de la solidarité, doit s’inscrire dans une trajectoire pérenne.
Je salue aussi le maintien des crédits du fonds Chaleur à son plus haut niveau historique, à 800 millions d’euros. C’est un autre levier majeur de décarbonation, particulièrement adapté aux vallées, où la chaleur renouvelable, la biomasse ou la géothermie réduisent la dépendance aux énergies fossiles.
En revanche, monsieur le rapporteur pour avis, je ne partage pas vos conclusions, qui me paraissent très excessives au sujet du programme 174. Les défis sont réels : complexité des dispositifs, suspension de MaPrimeRénov’, manque de lisibilité des aides. Mais la transition énergétique demande de la constance, de la visibilité et une diversité des solutions – biocarburants, hydrogène, rénovation thermique – afin qu’elle reste juste, soutenable et adaptée à tous les territoires y compris de montagne.
Enfin, j’insisterai sur la dimension humaine de cette politique. La prévention, c’est avant tout une culture du risque à entretenir et à partager dans les écoles, auprès des élus et des habitants. En montagne, cette culture est ancienne : élus et résidents savent ce que signifie vivre au pied d’une pente instable, d’un glacier ou d’un torrent. De plus, les équilibres changent vite et les évolutions exigent une vigilance nouvelle, accrue, ainsi qu’un appui scientifique renforcé pour comprendre, anticiper et s’adapter. Ce budget traduit une continuité utile et responsable. Il consolide nos outils, sécurise nos opérateurs et prépare nos territoires à affronter un risque devenu systémique.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Monsieur Roseren, vous dites ne pas partager mes convictions, mais les vôtres me semblent assez similaires. Vous avez parlé de mobilité adaptée aux territoires de montagne : les voitures électriques y consomment entre 10 et 30 % d’énergie en plus. Je vous rejoins également sur l’importance de la lisibilité et de la diversité des solutions. Vous avez mentionné le bioéthanol : je partage l’idée qu’il faut miser sur la neutralité technologique plutôt que de se concentrer uniquement sur la voiture électrique, qui ne représente qu’une partie de la solution – une autre étant l’entretien du parc automobile existant.
Par exemple, au lieu d’importer 80 % de nos pièces de moteur d’Asie, particulièrement de Chine, nous pourrions soutenir la fabrication de pièces d’occasion en France. Pour m’être rendu au salon Equip Auto, je sais qu’il y a là toute une économie que nous pourrions encourager. De même, l’installation d’un boîtier bioéthanol coûte beaucoup moins cher, entre 700 et 1 000 euros, qu’une voiture électrique. Ce gain de pouvoir d’achat participe de notre trajectoire climatique.
Cela me conduit à rebondir sur l’intervention assez caricaturale de Mme Laernoes, qui me reproche d’être pamphlétaire. Je rappelle que mon rôle n’est pas de rapporter en séance des travaux définitifs de notre commission mais d’apporter un avis sur un budget initial, en me fondant sur mes convictions et sur des auditions. Vous vous êtes livrée à une diatribe peu constructive qui illustre d’ailleurs votre obsession du RN, mais je répète que ce n’est pas moi qui ai présenté ce projet de loi de finances, mais le gouvernement nommé par Emmanuel Macron. Pour le dire autrement, je suis vierge des trajectoires budgétaires qui s’y trouvent.
Mme Julie Laernoes (EcoS). Le rapport pour avis est bien le vôtre ?
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Oui et j’assume tous mes propos.
Par ailleurs, alors que vous êtes obsédée par la voiture électrique, je répète que je suis pour ma part favorable à la neutralité technologique. Je ne suis pas anti-voiture électrique par principe…
Mme Julie Laernoes (EcoS). Vous êtes fossile, fossile, fossile !
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Non. Mais si vous considérez que le parc automobile existant ne fait pas partie de la solution, c’est que vous ne comprenez pas comment il est possible de le renouveler. Vous qui êtes certainement favorable au malus écologique, figurez-vous qu’il empêche ce renouvellement. En effet, comme les gens n’achètent plus de voitures neuves en raison des prix exorbitants, vous favorisez, avec un tel dispositif, le maintien d’un parc vieillissant – ce qui est contreproductif du point de vue climatique, s’agissant notamment des émissions de particules fines.
Ne m’accusez donc pas d’être climatosceptique. J’essaie de réfléchir et suis prêt à engager le dialogue, y compris avec vous, qui êtes venue pour faire une capsule vidéo. Je ne sais pas si vous avez lu mon rapport de trente pages…
Mme Julie Laernoes (EcoS). Oui, c’est un pamphlet idéologique !
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. …mais en trois minutes, je n’ai vu que des effets de manche.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. La dotation du fonds Barnier, outil important, est passée de 131 millions en 2021 à 225 millions en 2024, puis à 300 millions cette année. Sa stabilité prévue pour 2026 s’explique par le fait que tous les crédits n’ont pas été consommés : 56 % du total reste disponible en AE et 43 % en CP
– même si de nombreux projets ont été financés, comme l’opération exceptionnelle du casier pilote de la Bassée et celle faisant suite aux inondations dans le Pas-de-Calais.
S’agissant du fonds Chaleur, je suis d’accord avec madame Laernoes, il faut accélérer car les collectivités ont de nombreux projets de passage aux énergies renouvelables et durables, de nature d’ailleurs à réduire la facture de nos concitoyens. Je proposerai donc un amendement visant à augmenter ces crédits.
Monsieur Roseren, il convient aussi d’accélérer la mise en place de PPR ; le chiffre de 12 720 communes n’est pas suffisant.
Quant au retrait-gonflement des argiles, là aussi je suis d’accord. C’est un enjeu important et il faut absolument pérenniser et abonder la ligne budgétaire créée l’an dernier.
Nous pourrons aborder les autres sujets au fil des amendements.
Article 49 : Crédits du budget général
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous en venons à l’examen des amendements, en commençant par le programme 181 Prévention des risques.
Amendements II-CD186 de M. Timothée Houssin et II-CD75 de M. David Magnier (discussion commune)
M. Timothée Houssin (RN). Vous le savez, nous voulons rationaliser le coût exorbitant du fonctionnement des différentes agences, à commencer par l’Ademe. L’amendement II-CD186 vise ainsi à supprimer 153 millions de crédits, qui correspondent aux coûts de structure. Nous souhaitons en effet que les activités de l’Ademe soient réinternalisées, c’est-à-dire que ses missions soient réintégrées au sein des ministères concernés.
M. David Magnier (RN). Mon amendement a le même objet. Nous défendons une position de clarté, de cohérence et de responsabilité. Depuis des années, l’Ademe a vu ses moyens exploser, atteignant la somme de 1,2 milliard, dont 135 millions pour son seul fonctionnement. Les frais de structure sont donc considérables, l’administration centrale est hypertrophiée, tandis que la communication, les études et les subventions se sont multipliées ; le tout pour des résultats discutables et des doublons innombrables avec les services de l’État.
De fait, nombre des missions de l’Ademe recoupent celles de directions ministérielles – celles de la transition écologique, de l’industrie, de l’économie, de la recherche – ou d’autres opérateurs publics – agences de l’eau, Agence nationale de la recherche (ANR), BPIFrance. En clair, l’Ademe est devenue un maillon de plus dans un millefeuille administratif qui coûte cher, qui ralentit l’action publique et qui dilue les responsabilités.
Il est temps d’en finir avec cette logique d’agences autonomes qui se substituent à l’État, tout en échappant largement à son contrôle. La transition écologique, si elle doit être menée, doit l’être par un État fort, recentré sur ses missions régaliennes et stratégiques, et non par une nébuleuse d’opérateurs parapublics.
Je l’ai dit, les dispositifs de subvention et d’accompagnement de l’Ademe pourraient parfaitement être réinternalisés dans les administrations centrales compétentes. Cela permettrait à la fois d’alléger les dépenses publiques, de simplifier les circuits de décisions et de rendre à l’État la maîtrise directe des politiques de transition énergétique et industrielle. Supprimer l’Ademe, ce n’est pas affaiblir la transition écologique ; au contraire, c’est mettre fin à une bureaucratie coûteuse et redondante, tout en redonnant à la puissance publique sa capacité d’action directe.
Ce sont des amendements de bon sens, d’efficacité et de souveraineté administrative.
Mme la présidente Sandrine Le Feur. En tant que présidente de cette commission, je ne peux vous laisser dire que l’Ademe est hors de contrôle, étant donné qu’il nous revient justement à nous, parlementaires, de surveiller son activité. De plus, nous validons le choix de son président, qui peut être auditionné aussi souvent que nécessaire par cette commission.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Avis défavorable sur les deux amendements. Je confirme que, eu égard à son savoir-faire et à sa présence sur le terrain, l’Ademe est un outil essentiel aussi bien pour l’État que pour les collectivités. De plus, si je ne fais pas erreur, 98 % des fonds affectés à l’agence sont redistribués à ces dernières, aux associations – par exemple de gestion de déchets –, aux entreprises et aux industries. Oui, l’Ademe brasse beaucoup d’argent, mais elle le redonne à bon escient, étant capable d’identifier les projets qui méritent d’être soutenus.
Cela étant, je reconnais aussi que beaucoup de missions lui ont été confiées. Je pense au plan Vélo, à la responsabilité élargie des producteurs (REP) ou encore au plan France relance, dont elle a eu à gérer certains fonds. Certains éléments peuvent donc ne pas apparaître comme prioritaires et peut-être devrions-nous réfléchir à un recentrage de ses missions et arrêter de lui confier tout et n’importe quoi, car cela a tendance à diluer son utilité.
M. Stéphane Delautrette (SOC). Nous avons eu les mêmes débats ce matin au sujet du Cerema – Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement. Au fond, les collègues du Rassemblement national méconnaissent ce qu’est l’Ademe. Sa force est sa présence territoriale, 50 % de ses effectifs étant répartis dans l’ensemble des anciennes régions administratives. Je parle en connaissance de cause et en toute transparence : j’ai été pendant plus de vingt ans ingénieur au sein d’une de ces directions régionales.
Mme la rapporteure pour avis a bien décrit ses missions. L’Ademe accompagne les entreprises, les collectivités et plus largement l’ensemble des acteurs territoriaux en matière de décarbonation, de développement des énergies renouvelables et des réseaux de chaleur, mais aussi d’économie circulaire, en cohérence avec la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (loi Agec), promulguée en 2020.
Son budget s’élève effectivement à 1,2 milliard d’euros, mais un rapport de la Cour des comptes montre bien que 98 % de cette somme est reversée sous la forme de subventions, tandis que seulement 2 % vont à son fonctionnement. Peut-on appeler cela jeter l’argent par les fenêtres ?
Vous l’avez dit, madame la présidente, c’est bien notre commission, ainsi que la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat, qui approuve la nomination du président de l’agence. J’ajoute que la présidente de l’Assemblée nationale désigne aussi un député pour siéger à son conseil d’administration. Enfin, un contrat État-Ademe fixe les règles d’utilisation de son budget.
Vous aurez compris que nous nous opposerons vivement à ces amendements.
Mme Julie Laernoes (EcoS). Ce matin, les députés du groupe RN sont allés jusqu’à défendre un amendement visant à supprimer tous les budgets alloués à l’Ademe. Comme lors de l’examen du projet de loi de simplification de la vie économique, nous voyons transpirer la volonté de ce parti de supprimer de nombreux organismes absolument essentiels à la vie quotidienne de nos concitoyens, particulièrement s’il y a les mots « environnement » ou « maîtrise de l’énergie » dans leur intitulé.
Cette idéologie fermée et court-termiste méconnaît fondamentalement le fonctionnement de l’Ademe. Stéphane Delautrette l’a très bien expliqué : l’agence connaît les différents territoires ainsi que leurs problématiques et manières de fonctionner – sachant qu’il faut bien concrétiser les objectifs de transition écologique que nous inscrivons dans la loi.
Où isole-t-on les logements ? Où passe-t-on d’une mobilité très carbonée à une mobilité décarbonée ? Où change-t-on les systèmes de traitement des déchets ? Dans les territoires ! Avoir un État fort ne suffit donc pas : il faut que les collectivités soient également des moteurs de la transition écologique. Et pour cela l’Ademe est absolument essentielle. Il n’y a d’ailleurs aucun surcoût. Au contraire, son budget est même insuffisant pour accomplir toutes ses missions.
Mme Ersilia Soudais (LFI-NFP). Toutes ces critiques s’inscrivent dans un climat général d’offensive contre les agences environnementales, de l’Ademe à l’Office français de la biodiversité (OFB), en passant par les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) et les agences de l’eau.
Je rappelle également que l’Ademe pilote le programme de décarbonation de l’industrie, indispensable pour atteindre la neutralité carbone.
Une fois de plus, le Rassemblement national fait la preuve de son climato-scepticisme. Ses propositions vont à l’encontre de la réponse que nous devons absolument apporter à l’urgence climatique, donc de l’intérêt de l’ensemble de nos concitoyens.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements II-CD223 et II-CD224 de Mme Danielle Brulebois (discussion commune)
Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Le premier amendement vise à renforcer le fonds Chaleur de 700 millions d’euros, ce qui porterait son budget à 1,5 milliard.
Le second, de repli, prévoit une progression de sa dotation de 200 millions.
Mme Julie Laernoes (EcoS). L’an dernier nous avions empêché la baisse des crédits du fonds Chaleur, qui aurait été délétère et destructrice. Cela étant, les critères d’éligibilité ont été durcis, afin de limiter le nombre de projets. Ne serait-ce donc pas pousser le bouchon un peu loin que d’augmenter le budget du fonds de 700 millions ? Je sais qu’il existe suffisamment de projets dans les tiroirs pour un budget de 1 milliard, mais j’en suis moins sûre pour une dotation de 1,5 milliard, sachant que nous sommes dans une période d’élections municipales peu propice à la réalisation de projets de réseau de chaleur. À moins qu’il ne faille financer des projets qui n’ont pu l’être cette année ?
Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Oui, d’après la direction générale de la prévention des risques (DGPR), le portefeuille théorique des besoins recensés par l’Ademe représente déjà 1,7 milliard d’euros pour 2026.
La commission adopte l’amendement II-CD223.
En conséquence, l’amendement II-CD224 tombe.
Amendements II-CD221 de Mme Danielle Brulebois et II-CD138 de M. Stéphane Delautrette (discussion commune)
Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. L’amendement II-CD221 vise à renforcer le fonds Économie circulaire de l’Ademe à hauteur de 200 millions.
M. Stéphane Delautrette (SOC). Mon amendement a le même objet. En effet, si le fonds Chaleur est maintenu à son niveau de 2025, le fonds Économie circulaire, lui, doit passer de 300 à 100 millions seulement.
Véronique Riotton et moi-même, dans notre rapport d’évaluation de la loi Agec, avons identifié des manquements et des besoins d’accompagnement des territoires en vue d’atteindre les objectifs que nous nous sommes assignés. Il faut donc réévaluer les crédits alloués à l’économie circulaire.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je précise simplement que cette augmentation de crédits pourrait être financée par la hausse, prévue par le PLF, de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) relative à l’enfouissement des déchets.
La commission adopte l’amendement II-CD221.
En conséquence, l’amendement II-CD138 tombe.
Amendements II-CD85 de Mme Alma Dufour, II-CD225 de Mme Danielle Brulebois et II-CD176 de Mme Julie Lechanteux (discussion commune)
M. Sébastien Delogu (LFI-NFP). Les députés Insoumis affirment avec force la nécessité d’un financement ambitieux de la prévention des risques naturels majeurs, à la hauteur des bouleversements climatiques et environnementaux que connaît la France. Nous proposons donc d’abonder le fonds Barnier de 220 millions de plus, afin de renforcer la capacité de prévention, de protection et d’adaptation des territoires.
Cette hausse correspond aux recommandations de l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE), qui préconise de porter la dotation du fonds à 520 millions d’ici à 2026, afin de répondre à l’intensification et à la multiplication des catastrophes climatiques. Nous appelons d’ailleurs le gouvernement à lever la compensation de crédits prévue pour assurer la recevabilité de l’amendement et à faire de la prévention des risques naturels une véritable priorité. Chaque retard se paie en vies humaines et en territoires dévastés.
Dans ma circonscription, les inondations de cette année ont privé 4 500 foyers d’électricité, tandis que chaque épisode orageux donne lieu à d’inédites et inarrêtables coulées de boue. De même, mon territoire a connu des feux que tout le monde a pu voir à la télévision. Cinquante et une maisons ont été détruites, des familles ont tout perdu et ont été volontairement laissées à l’abandon et dans la détresse.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. L’amendement II-CD225 vise, lui, à allouer 30 millions d’euros supplémentaires au fonds Barnier.
Mme Julie Lechanteux (RN). L’amendement II-CD176 tend à redéployer une partie des crédits consacrés à l’éolien terrestre au profit du fonds Barnier. Pourquoi ? Parce que la réalité du terrain nous y oblige. La multiplication des catastrophes naturelles, qu’il s’agisse des crues, des inondations ou des glissements de terrain, met à rude épreuve la sécurité de nos concitoyens et les capacités d’intervention de l’État.
Des départements comme le Var, le Pas-de-Calais ou l’Aude connaissent chaque année des événements climatiques d’une intensité croissante, aux conséquences humaines et matérielles dramatiques. Les travaux d’endiguement, de restauration des cours d’eau ou d’amélioration de l’écoulement des eaux sont des urgences vitales. De même, le rachat partiel d’habitations et la relocalisation d’habitants sinistrés sont indispensables pour garantir la sécurité et la dignité des populations les plus exposées.
De plus, subventionner une énergie intermittente et non pilotable comme l’éolien est mortifère pour notre souveraineté énergétique. C’est aussi un danger pour notre balance commerciale, puisque ce choix crée un appel d’air pour des entreprises étrangères plus compétitives.
Redéployons donc une partie des fonds destinés à l’éolien, afin de faire primer la protection des vies humaines et des territoires plutôt que de contribuer à leur défiguration.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Je suis défavorable à l’amendement II-CD85. Porter la dotation du fonds Barnier à 520 millions d’euros me semble excessif dans la mesure où, au 1er août, 56 % des autorisations d’engagement pour 2025 étaient encore disponibles. De plus, comme je l’expliquais, nous avons connu un pic de paiements pour financer des projets exceptionnels, comme celui qui a fait suite aux inondations dans le Pas-de-Calais ou celui de la vallée de la Bassée. Mon amendement visant à renforcer le fonds à hauteur de 30 millions me semble plus raisonnable et mieux correspondre à la situation.
Quant au II-CD176, son objet est le même que le mien. Je demande donc son retrait.
La commission adopte l’amendement II-CD85.
En conséquence, les autres amendements tombent.
Amendements II-CD84 de Mme Alma Dufour et II-CD73 de M. David Magnier (discussion commune)
M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). Par l’amendement II-CD84, nous réaffirmons avec force la nécessité d’un financement à la hauteur des enjeux de la prévention des risques technologiques et des pollutions industrielles.
En 2024, plus de 1 800 événements technologiques ont été recensés, parmi lesquels 237 ont concerné les sites Seveso : 57 accidents et 180 incidents, dont 7 considérés comme majeurs. L’industrie agroalimentaire est la plus accidentogène, avec 18 % des accidents recensés. Les risques humains, sanitaires, environnementaux et économiques liés à ces accidents sont considérables.
Toujours en 2024, plus d’un accident industriel sur quatre a eu des conséquences humaines, incluant deux décès tragiques. Plus de la moitié des accidents a eu une incidence environnementale, sur l’air ou l’eau par exemple, et 70 % ont emporté des conséquences économiques majeures, incluant des ruptures d’exploitation et des cessations d’activité.
Tous ces chiffres illustrent l’urgence absolue d’une action publique renforcée. Or l’action 01 Prévention des risques technologiques et des pollutions, du programme 181 ne bénéficie que d’une augmentation marginale de 2,54 % de ses crédits, un niveau dérisoire au regard des menaces. Le changement climatique, par les sécheresses, les canicules et les inondations qu’il induit, fragilise les infrastructures industrielles et démultiplie les risques d’accident technologique, rendant encore plus impératif un renforcement massif des moyens publics. Nous proposons donc d’abonder cette action de 100 millions supplémentaires.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. La surveillance et le contrôle des installations industrielles sont essentiels pour assurer la sécurité des populations et des personnels mais le gouvernement a déjà renforcé les effectifs de façon significative en 2024, avec 100 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires. Ces effectifs ont été préservés en 2025 et le seront en 2026. J’émets donc un avis défavorable à l’amendement II-CD84.
Quant à la hausse de 1,5 million d’euros au profit de l’action 01, que l’amendement II-CD73 vise à supprimer, elle ne résulte pas d’une augmentation des dépenses de l’État mais du transfert d’une subvention de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) depuis le programme 190 Recherche dans les domaines de l’énergie, du développement et de la mobilité durables, vers le programme 181. Le montant alloué à la prévention est donc stable. L’amendement étant satisfait, je vous invite à le retirer.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendement II-CD139 de M. Romain Eskenazi
M. Fabrice Roussel (SOC). Cet amendement d’appel vise à instaurer un fonds de gestion des risques des procédures de péril d’urgence, destiné à prendre en charge le relogement d’urgence des propriétaires occupants au-delà de six mois après la notification d’un arrêté de mise en sécurité. Alors que les locataires bénéficient d’une protection explicite en cas d’interdiction d’habiter, les propriétaires occupants se trouvent sans solution ni prise en charge financière lorsqu’ils sont victimes d’aléas naturels ou structurels. Cette lacune a été révélée lors d’épisodes récents à Montmorency, Bordeaux, Sarcelles ou Toulouse, et de telles situations sont susceptibles de se multiplier sous l’effet du changement climatique et de la dégradation du bâti ancien.
Le projet de loi de simplification de la vie économique adopté en première lecture prévoit l’obligation pour les entreprises d’assurance de garantir le relogement d’urgence des propriétaires occupants lorsque leur résidence principale fait l’objet d’un arrêté de mise en sécurité. Cependant, cette nouvelle obligation soulève la question de la mutualisation du risque entre assureurs. Pour éviter la surcharge de certains, nous proposons la création d’un fonds inspiré du modèle éprouvé des catastrophes naturelles, qui serait abondé par une fraction de prime ou de cotisation additionnelle.
Mme Danielle Brulebois, rapporteure pour avis. Votre amendement pointe des difficultés de plus en plus fréquentes. Les situations de relogement, qui durent parfois très longtemps, soulèvent le problème de l’assurabilité des risques, notamment naturels, et de leur financement par les assurances.
Ce problème ne peut être résolu à la faveur d’un amendement. Il pourrait être traité dans le cadre d’une mission d’information ou d’une mission flash. Les compagnies d’assurance et de réassurance sont prêtes à travailler avec nous sur ce sujet. Je vous propose donc de retirer votre amendement.
La commission rejette l’amendement.
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous en venons à l’examen des crédits alloués au programme 174, Énergie, climat et après-mines.
Amendement II-CD67 de M. Maxime Laisney
M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). Dans un souci de justice sociale et d’accès équitable à la mobilité, nous souhaitons annuler les coupes budgétaires prévues dans les crédits consacrés à l’électrification des véhicules. S’établissant à 93,75 millions dans le PLF pour 2026, le budget alloué à l’action 03 Aides à l’acquisition de véhicules propres, est en baisse vertigineuse de 81 %. Le gouvernement le justifie par la diminution supposée du coût des véhicules électriques mais, en réalité, les prix restent très élevés.
Dans ce contexte, le leasing social et la prime au rétrofit sont des outils utiles pour accompagner les changements de mobilité, à condition qu’ils ciblent réellement les foyers les plus précaires, dans les zones où l’usage de la voiture reste contraint.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Comme vous, je regrette le transfert des aides à l’électrification des véhicules vers les dispositifs de CEE par nature moins maîtrisables. Mais votre amendement présente l’inconvénient d’être général. Je vous invite à le retirer ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable Il me semble préférable de discuter aide par aide, ce que nous pourrons faire lors de l’examen des amendements à venir. J’ajoute qu’à titre personnel, je suis opposé à ce que l’on consacre 400 millions à l’électrification du parc automobile.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CD153 de M. Gérard Leseul et II-CD126 de M. Nicolas Bonnet (discussion commune)
M. Fabrice Roussel (SOC). Cet amendement reprend l’une de nos propositions : la massification du leasing social pour l’acquisition d’une voiture électrique neuve, à hauteur de 100 euros par mois. La filière automobile française emploie environ 400 000 salariés, compte pour plus de 10 % des exportations de biens et réalise plus de 20 milliards d’euros de valeur ajoutée. Un soutien économique durable apparaît indispensable à sa survie et sera nécessaire pour atteindre nos objectifs climatiques. Les émissions de gaz à effet de serre des voitures particulières des ménages ont représenté 53 % des émissions du secteur des transports en 2023.
Nous proposons d’accompagner dans ce cadre le financement de 120 000 véhicules, à hauteur de 13 000 euros par dossier – sachant que, dans la mesure où l’État percevra un peu plus de 4 600 euros de TVA sur chacun d’entre eux, le coût de cette aide publique serait ramené à 8 300 euros.
M. Nicolas Bonnet (EcoS). Le leasing social est un dispositif essentiel pour accompagner l’ensemble de la population dans la décarbonation de ses modes de transport
– en particulier les personnes les plus dépendantes de la voiture au quotidien et les plus modestes. Rappelons en effet que c’est lorsqu’elle roule beaucoup que la voiture électrique atteint sa performance maximale en termes de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Il est important que l’État et le Parlement suivent de près l’utilisation du leasing social, qui a eu du succès, et puissent en faire un bilan annuel : le présent amendement propose donc qu’il ne soit pas financé dans le cadre des CEE mais réintégré en propre dans le budget.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. J’émets un avis défavorable à ces deux amendements. Un milliard d’euros, ou même 370 millions, c’est beaucoup d’argent – d’autant plus lorsque l’on doit réduire le déficit et maîtriser les dépenses publiques.
Je demeure très sceptique face à l’idée que le contribuable finance nos concurrents internationaux, c’est-à-dire la Chine. J’ai eu un peu mal au cœur en voyant la succession de véhicules chinois dans la vidéo de présentation du leasing social diffusée par le président de République française.
Si l’on considère le cycle de vie total d’un véhicule, le fléchage unique vers l’électrique est une impasse financière et écologique. Rappelons que le coût d’un tel véhicule atteint 160 % de celui d’un véhicule thermique, ce qui soulève des difficultés pour le pouvoir d’achat. Le ralentissement des ventes montre que la voiture électrique ne trouve pas ses clients. Or si des fonds publics peuvent être utilisés pour amorcer le lancement d’un marché, ils ne peuvent pas le nourrir durablement et artificiellement. Ces fonds doivent servir à la réduction du déficit et financer des politiques publiques plus stratégiques.
Des aides aussi importantes que celles que vous proposez risquent enfin de provoquer des distorsions de marché et des effets d’aubaine, ainsi que de favoriser la fraude.
La commission rejette successivement les amendements.
Amendements II-CD142 de M. Gérard Leseul et II-CD107 de Mme Marie Pochon (discussion commune)
M. Fabrice Roussel (SOC). Notre amendement vise à réinstaurer une prime à la conversion en compensant la baisse vertigineuse de 400 millions du budget consacré aux aides à l’acquisition de véhicules propres. Le dispositif des certificats d’économie d’énergie est censé prendre le relais mais rien ne garantit que les crédits soient maintenus.
M. Nicolas Bonnet (EcoS). Nous proposons nous aussi d’accompagner les ménages les plus défavorisés dans l’acquisition d’un véhicule électrique grâce à la prime à la conversion. Compte tenu des écarts de coûts entre les types de véhicules, nombre de ménages ne pourraient en effet contribuer, sans cette aide, à la décarbonation des mobilités – lesquelles représentent un tiers des émissions de gaz à effet de serre dans notre pays. On ne peut pas confier au marché la transition énergétique : il faut que l’État intervienne pour réduire nos émissions.
J’ajoute que la prime à la conversion favorisait aussi la réparation et le réemploi de véhicules d’occasion, au bénéfice des ménages modestes ayant absolument besoin d’acquérir un véhicule individuel.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Je ne comprends pas l’intérêt de remplacer une dépendance aux énergies fossiles par une dépendance à 80 % à la Chine pour l’achat de véhicules électriques. Du point de vue de notre souveraineté, ça n’a pas de sens. Habilement, vous n’évoquez pas le sujet – pas plus que vous ne répondez s’agissant du non‑respect des droits humains, notamment des enfants, dans l’extraction du cobalt indispensable aux batteries. C’est pourtant un sujet auquel je vous imagine sensibles ! Notre débat est un dialogue de sourds.
Mon avis sur ces amendements est plus nuancé que mes avis précédents. La prime à la conversation avait l’avantage de ne pas flécher uniquement les véhicules électriques, mais tous les véhicules Crit’Air 1 – ce qui signifie que, vous qui détestez les SUV, vous soutenez le financement de Range Rover Crit’Air 1 !
Étant logique, je suis favorable à la diversité technologique. Je préfère donc la prime à la conversion à un bonus fléché vers les véhicules électriques, à condition que cette petite incitation puisse financer plusieurs choses : éventuellement un véhicule électrique s’il est écologiquement vertueux – ce dont je doute –, un boîtier de conversion à l’éthanol ou même un véhicule d’occasion un peu plus propre. Il faut envisager le sujet dans sa globalité. Il serait intéressant que vous retravailliez vos amendements en ce sens d’ici l’examen en séance, en conservant à l’esprit l’enjeu de la souveraineté. Si l’on va à fond vers l’électrique chinois, il n’y aura plus d’emplois dans la filière automobile en France ! Soyez conscients des effets de bord de vos amendements et de votre obsession pour la voiture électrique.
Je vous invite donc à retirer vos amendements.
M. Nicolas Bonnet (EcoS). Vous n’avez pas le monopole du cœur, monsieur Meurin ! Les questions soulevées par l’extraction du cobalt ne sont pas nouvelles et se posent aussi pour d’autres biens de consommation. Comme vous, je refuse que l’on utilise du cobalt extrait dans des conditions inacceptables. Heureusement, ce n’est pas toujours le cas, et l’on pourrait exiger le respect de certains critères, comme le font déjà des fabricants de matériel électronique.
Mon obsession ne porte pas sur la voiture électrique mais sur la décarbonation : si vous me proposez autre chose pour décarboner la mobilité individuelle, j’y suis ouvert ! Je vous invite toutefois à considérer le bilan écologique des biocarburants : la production du E85 ou du B100 nécessite tellement d’énergie et d’intrants qu’elle émet davantage de gaz à effet de serre que leur utilisation ne permet d’en économiser. Il n’existe pas de solution magique.
Le véhicule électrique est intéressant pour peu que sa taille soit la plus réduite possible par rapport aux besoins – ce qui exclut les SUV – et que, dans l’idéal, sa production soit relocalisée. C’est possible car notre industrie automobile en est capable. Aujourd’hui, ce sont surtout les batteries qui viennent de Chine, mais il existe des projets pour en produire en Europe ; j’espère qu’ils pourront aboutir rapidement.
Notre obsession, néanmoins, doit être de limiter le plus vite possible nos émissions de gaz à effet de serre pour ne pas laisser aux générations futures une planète dans laquelle il sera de plus en plus difficile de vivre.
M. Fabrice Roussel (SOC). Nous ne vous avons pas attendu, monsieur Meurin, pour défendre les droits humains, sociaux et environnementaux, qui sont particulièrement attaqués. On peut tout à fait envisager la mise en place de scores environnementaux pour conditionner ces dispositifs budgétaires. Mais vous ne proposez rien, à part mettre de l’éthanol dans tous les véhicules, tandis que nos propositions visent aussi à soutenir la filière automobile française et européenne.
La commission adopte l’amendement II-CD142. En conséquence, l’amendement II‑CD107 tombe.
Amendement II-CD108 de M. Pierre Meurin
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à supprimer la prime au rétrofit. Après plusieurs années de travail sur le sujet, je suis arrivé à la conclusion que la filière, pour sympathique qu’elle soit, ne mérite pas de subventions publiques. Le rétrofit coûte entre 7 000 et 10 000 euros pour un véhicule individuel et jusqu’à 32 000 euros pour un véhicule utilitaire léger, comme j’ai pu le constater. Il est plus raisonnable d’acheter un véhicule d’occasion plus récent et moins cher. Le rétrofit est donc voué à rester un marché de niche, destiné aux gens qui y prennent plaisir. Dans une logique de décarbonation et dans une perspective industrielle, il ne peut pas être subventionné par de l’argent public.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CD17 de Mme Lisa Belluco
Mme Julie Ozenne (EcoS). Cet amendement a pour objet de renforcer les aides à l’achat de vélos électriques, qui sont très performants sur le plan budgétaire comme économique. Moins lourds qu’une voiture, ils consomment moins d’énergie et de matériaux, tout en permettant de se déplacer rapidement, en ville et bien au-delà. Dans le contexte de déploiement des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m), les vélos doivent prendre une place plus centrale dans nos politiques de mobilité. Cependant, leur coût les rend difficilement abordables, en particulier pour les personnes les plus défavorisées et pour les classes moyennes : ce sont elles qui ont besoin d’aides massives et de restes à charge réduits pour une mobilité propre.
Il existe une industrie du vélo électrique en France, qui ne demande qu’à se développer. Vous serez donc certainement favorable, monsieur le rapporteur pour avis, à cet amendement.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Je ne fais preuve d’aucun dogmatisme, et ne suis pas hostile à l’industrie du vélo électrique ! Vous évoquez le contexte de déploiement des ZFE-m. Il me semble plutôt qu’elles vont être supprimées par le projet de loi de simplification de la vie économique. Même si, à la fin de la navette parlementaire, elles ne l’étaient pas, ou si le Conseil constitutionnel censurait cette disposition, on n’en remettrait jamais en place de similaires à celles qui avaient été prévues dans la loi « climat et résilience ».
En toute logique, je ne souhaite pas que l’argent public soit utilisé pour aider à l’achat de vélos électriques. On ne peut pas financer tout et n’importe ; nous ne sommes pas dans une économie communiste ! J’émets donc un avis défavorable, même si je considère que l’industrie du vélo électrique peut être encouragée
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CD130 de M. Fabrice Roussel
M. Fabrice Roussel (SOC). Cet amendement propose un véritable prêt à taux zéro (PTZ) pour l’achat d’un véhicule moins émetteur, en finançant la garantie de l’État. Il est issu des travaux de la mission flash sur les mesures d’accompagnement à la mise en œuvre des ZFE, ainsi que d’une proposition de loi déposée notamment par mon collègue Gérard Leseul.
Nous proposons d’y allouer un montant de 150 millions, sachant qu’il s’agira davantage pour l’État d’une immobilisation de trésorerie que d’une véritable dépense.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Il y a d’abord un sujet de fond : le programme 174 est une usine à gaz, dans lequel on trouve une multitude d’aides. L’ensemble est très peu lisible. La prime à la conversion était finalement plus compréhensible.
Ensuite, qu’entendez par « un véhicule moins émetteur » ? Cela peut-il être autre chose qu’un véhicule électrique ? Sans doute pourrions-nous au moins nous rejoindre autour de l’idée que de très nombreuses solutions pourraient être financées pour atteindre nos objectifs climatiques. Avis défavorable.
M. Fabrice Roussel (SOC). La proposition de loi de M. Leseul concernait aussi les véhicules autres qu’électriques – ainsi que les vélos électriques.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CD175 de Mme Julie Lechanteux
Mme Julie Lechanteux (RN). Je propose de réaliser 16 millions d’économies sur le millefeuille administratif en charge de mesurer la qualité de l’air. Il s’agit de restaurer une cohérence budgétaire là où les crédits sont aujourd’hui dispersés entre une multitude de plans d’action, de structures et d’opérateurs. La dilution des moyens nuit à la lisibilité et à l’efficacité de la politique en matière de qualité de l’air.
Le soutien de l’État aux associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (Aasqa) est suffisant pour assurer la collecte, le traitement et la diffusion des données. Ce dispositif qui associe les collectivités, les industriels et les services de l’État fonctionne correctement et remplit pleinement sa mission.
Par conséquent, le financement du Laboratoire central de surveillance de la qualité de l’air, des plans de protection de l’atmosphère (PPA) ou encore des études liées au plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques – le Prepa – est obsolète.
Cet amendement ne remet pas en cause nos objectifs environnementaux : il les sert mieux en privilégiant la clarté, l’efficacité et la responsabilité budgétaires.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Il est très probable que cet amendement fasse réagir ! J’ai auditionné les Aasqa et leur fédération, Atmo France. Je ne propose pas de réduire leurs budgets car, si je m’oppose aux ZFE, je ne suis pas opposé à la surveillance de la qualité de l’air et les Aasqua ont une pertinence dans la lutte contre la pollution atmosphérique.
En revanche, les 16 millions alloués au Laboratoire central de surveillance de la qualité de l’air, aux PPA et aux travaux en lien avec le Prepa sont discutables et pourraient être économisés.
J’ajoute que je n’ai pas obtenu, lorsque j’ai auditionné les représentants des Aasqa, de justification précise du montant substantiel – 30 millions d’euros par an – qui leur est alloué : ils rendent peu de comptes précis à ce sujet. Je pense que l’on pourrait leur donner moins, d’autant qu’ils viennent de renouveler leur matériel.
J’émets un avis favorable à l’amendement.
M. Nicolas Bonnet (EcoS). D’abord, le matériel s’amortit dans le temps. Ensuite, les Aasqa sont un outil essentiel car la qualité de l’air est, par définition, quelque chose que l’on ne voit pas. Nous avons donc besoin que les Aasqa soient financées à la hauteur des enjeux et qu’elles puissent élargir leurs mesures à de nouvelles substances comme les polluants émergents et les particules ultrafines.
Le financement des Aasqa a été longtemps assis sur la TGAP mais le produit de la taxe a diminué car nombre d’entreprises ont réduit leurs émissions polluantes. Pour autant, cela ne justifie pas une diminution de l’investissement. On ne va pas moins mesurer la qualité de l’air parce que certaines entreprises polluent moins : elles ne constituent pas la seule source de pollution et, en tout état de cause, ces mesures demeurent indispensables. Il faut donc continuer à financer les Aasqa, tout comme le laboratoire central, qui coordonne la surveillance réalisée dans chaque région et s’assure de la qualité des mesures. Les PPA, quant à eux, permettent à tous les acteurs d’une agglomération de discuter des actions pouvant être menées pour diminuer la pollution atmosphérique. Tous ces dispositifs ont donc leur utilité. Si vous avez besoin d’informations sur la manière dont est dépensé l’argent, vous pouvez les demander au laboratoire central. Si vous le souhaitez, étant aux commandes d’une Aasqa, je pourrais m’assurer que toutes les informations vous sont communiquées. La transparence est totale sur ces questions financières.
M. Xavier Roseren (HOR). On ne mesure pas encore la présence dans l’air de polluants comme les substances per- ou polyfluoroalkylées (PFAS). Par ailleurs, les Aasqa sont confrontées à un problème de financement car d’un côté on réduit leurs recettes, de l’autre on leur demande de faire de plus en plus de choses. On est en train de casser notre thermomètre de la qualité de l’air. On ne peut donc pas accepter ce type d’amendements.
Mme Ersilia Soudais (LFI-NFP). Monsieur le rapporteur, ne vous en déplaise, il faut beaucoup d’argent pour répondre à l’urgence écologique. Vos propos sur la pollution de l’air sont emblématiques de votre climatoscepticisme. Vous contestez le fait qu’elle puisse avoir des conséquences graves : pourtant, en 2023, 40 000 décès étaient liés à l’exposition aux particules fines. La pollution de l’air touche particulièrement des zones urbaines populaires, de grandes agglomérations, des vallées encaissées et les outre-mer. Suggérer que les laboratoires nous cachent des choses quant à l’usage de notre argent est à la limite du complotisme. Je m’oppose fermement à votre demande de baisse de crédits.
Mme Julie Lechanteux (RN). Il n’est pas question de supprimer l’Aasqa mais de réduire son budget. Les PPA et les actions menées au titre du Prepa jouent déjà un rôle en la matière. Par ailleurs, je rappelle que nous avons besoin de faire des économies. Ce n’est pas parce que l’on versera ces 16 millions qu’il y aura moins de personnes touchées par ces maladies, malheureusement. Le petit geste demandé n’empêchera nullement de mesurer la qualité de l’air.
M. Nicolas Bonnet (EcoS). Je comprends que l’on puisse être désorienté par le grand nombre de structures existantes, qui peuvent paraître redondantes. Toutefois, si on creuse un peu, on s’aperçoit qu’elles sont complémentaires. Un PPA permet la concertation entre tous les acteurs locaux – parmi lesquels, les collectivités et les Aasqa – afin d’identifier les actions pertinentes, les institutions qui devront les conduire – il s’agit, dans la grande majorité des cas, des collectivités – et les financements associés. Les crédits des PPA seront donc, la plupart du temps, versés aux collectivités car les Aasqa ne mèneront pas les actions à leur place. Si on réduisait ces crédits, on ne pourrait pas améliorer la qualité de l’air.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. En une heure et quart, nous avons voté pas moins de 1,7 milliard de dépenses supplémentaires, illustration d’une certaine légèreté qui est pour tout dire choquante : on n’est pas ici pour se faire plaisir ! Madame Soudais, il me paraît normal que l’on prête attention à cet aspect des choses car, pour rappel, il ne s’agit pas de notre argent mais de celui des Français. Alors, oui, cela fait beaucoup d’argent que l’on pique aux Français ! L’argent magique n’existe pas. La transition écologique est un objectif important mais, si les Français n’ont plus d’argent pour en bénéficier, cela n’a aucun intérêt. On en revient toujours au dogmatisme de l’écologie punitive contre nos modes de vie et le pouvoir d’achat de nos compatriotes.
Je ne mésestime pas le travail des Aasqa mais, lorsque j’ai auditionné leurs représentants, j’ai été frappé par leur côté militant. La seule solution qu’ils semblaient préconiser pour lutter contre la pollution atmosphérique était d’agir sur les mobilités, en particulier au moyen des ZFE-m. Rappelons que la voiture particulière représente près de 30 % des émissions polluantes dans l’atmosphère et que les ZFE n’agissent potentiellement que sur 5 % de ces 30 %. C’est pourquoi j’ai toujours défendu l’idée que les ZFE étaient disproportionnées par rapport à l’objectif recherché. Cela étant, l’idée n’est pas de supprimer les Aasqa, qui mènent un travail pertinent.
La commission rejette l’amendement.
Amendements II-CD34 de M. Charles Fournier et II-CD69 de M. Maxime Laisney (discussion commune)
Mme Julie Ozenne (EcoS). L’amendement II-CD34 vise à transférer des crédits d’un programme à un autre : il ne s’agit donc pas, monsieur le rapporteur, de prendre de l’argent aux Français. Nous proposons de renforcer l’action 05 du programme 174 Lutte contre le changement climatique et pour la qualité de l’air, afin de soutenir les collectivités locales dans l’application des plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET), d’accélérer le déploiement des mobilités propres et intermodales, de moderniser le réseau de surveillance atmosphérique et le système d’alerte sanitaire, ainsi que de financer des campagnes d’information et d’accompagnement des ménages et des entreprises vers des pratiques moins polluantes. Chaque année, la pollution atmosphérique provoque près de 40 000 décès prématurés, selon Santé publique France.
Mme Ersilia Soudais (LFI-NFP). L’amendement II-CD69 vise, de la même façon, à lutter contre la pollution de l’air. Monsieur le rapporteur, vous estimez que vouloir sauver les gens des conséquences de cette pollution constitue une forme d’écologie punitive, ce qui est pour le moins choquant. On parle, rappelons-le, de 40 000 décès en 2023 !
Madame Lechanteux, nous ne sommes pas là pour faire des économies sur le dos des Français mais, au contraire, pour améliorer leur quotidien, ce qui passe d’abord par la préservation de leur santé. Quant au financement, il vous suffit de voter nos propositions tendant à récupérer des sommes considérables dans les poches des ultrariches.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Je connais par cœur le couplet selon lequel, en s’opposant aux ZFE, on se rend coupable de la mort de 40 000 personnes par an. Ces propos très radicaux vous appartiennent. En réalité, il règne sur ce sujet un dialogue de sourds. Je ne cesse d’expliquer que les ZFE n’améliorent pas la qualité de l’air – ou dans le meilleur des cas de manière très résiduelle – et que d’autres actions seraient beaucoup plus efficaces. Ainsi, le décalaminage à hydrogène permet de réduire de 60 % les émissions de particules fines d’un véhicule : pourtant, vous n’en parlez jamais, alors qu’il y aurait là une filière à développer. Seul compte, à vos yeux, le totem de la ZFE, que vous évoquez toujours en parlant des 40 000 morts par an. Précisons qu’il s’agit de 40 000 morts prématurées, dues à des maladies respiratoires liées à la pollution. Il n’est évidemment pas question de ne pas lutter contre la pollution atmosphérique, mais nous nous honorerions à être moins caricaturaux dans nos débats.
Madame Ozenne, lors de leur audition, les Aasqa ne m’ont pas dit qu’elles avaient particulièrement besoin de crédits supplémentaires. Leur budget connaît déjà une légère augmentation – de l’ordre de 3 %.
Mme Julie Ozenne (EcoS). L’amendement vise à abonder les collectivités locales en vue de la conduite des plans climat-air-énergie.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Il s’agit encore d’un « machin » qui à mon sens n’est pas prioritaire. Les collectivités territoriales ont pour l’heure d’autres préoccupations et ces plans territoriaux, qui constituent un facteur de complexité administrative de plus, ne justifient pas qu’on leur verse 10 millions supplémentaires. Avis défavorable sur les deux amendements.
Mme Ersilia Soudais (LFI-NFP). Vous mentez complètement sur les ZFE, à moins que vous ignoriez tout de ce qui se passe à l’Assemblée : nous avons déposé une proposition de loi visant à suspendre ce dispositif pour éviter une impasse sociale et garantir le droit à la mobilité.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Les exécutifs de gauche, au sein des agglomérations, ont longtemps soutenu les ZFE. Je rappelle que c’est mon amendement – et, plus largement, celui du Rassemblement national – que nous avons adopté pour supprimer ce dispositif lors de l’examen du projet de loi de simplification de la vie économique – un texte, madame Soudais, auquel votre groupe s’est opposé. Soyons factuels.
La commission adopte l’amendement II-CD34.
En conséquence, l’amendement II-CD69 tombe.
Amendement II-CD63 de M. Maxime Laisney
M. Bérenger Cernon (LFI-NFP). Nous demandons la revalorisation du chèque énergie afin de mieux répondre à la précarité énergétique croissante – qui touche 12 millions de personnes – et d’assurer une protection renforcée des ménages modestes, 5 millions d’entre eux bénéficiant de cette aide. Le PLF marque une diminution préoccupante – de plus de 25 % – des AE dans ce programme, qui passent de 900 à 674,2 millions. Le montant moyen du chèque énergie – environ 150 euros – n’a pas été revalorisé à la hauteur de l’inflation énergétique. En outre, la réforme du mode d’attribution intervenue cette année complique l’accès à cette aide essentielle. Nous proposons de la revaloriser et de garantir son accessibilité.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Avis défavorable. Un des enjeux est que le chèque énergie soit versé rapidement à tous ceux qui y ont droit, ce qui n’est pas si simple d’après ce qu’il est ressorti de l’audition de l’Agence de services et de paiement. Par ailleurs, on n’anticipe pas d’inflation des produits énergétiques pour 2026. Enfin, les CP consacrés au chèque énergie augmentent de 200 millions ; la baisse des AE, elle, est en trompe-l’œil, car il s’agit d’un lissage par rapport à l’année précédente.
La commission adopte l’amendement.
Amendement II-CD109 de M. Pierre Meurin
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à supprimer le financement des études relatives à l’éolien en mer. Nous avons à peu près tout dit, de notre côté, sur les éoliennes en mer, qui sont une source d’énergie intermittente, non pilotable, qui défigure nos paysages, abîme notre biodiversité marine – elles tuent des oiseaux – et complique la vie de nos pêcheurs. J’ai d’ailleurs appris que des promoteurs d’éoliennes rémunéraient des pêcheurs pour surveiller ces installations, ce qui leur procure un revenu supérieur à celui de la pêche. En outre, les subventions aux énergies intermittentes dites renouvelables alourdissent considérablement la facture des Français.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CD110 de M. Pierre Meurin
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Je vous propose d’économiser 5,5 millions grâce à la suppression du Médiateur de l’énergie, énième structure Théodule qui fait largement doublon avec les services de médiation des opérateurs de production d’énergie.
La commission rejette l’amendement.
Amendement II-CD163 de M. Emmanuel Fernandes
M. Emmanuel Fernandes (LFI-NFP). Le site de StocaMine, situé dans le Sud de l’Alsace, est une ancienne mine de potasse, reconvertie à la fin des années 1990 en centre de stockage de déchets ultimes toxiques. Depuis qu’un incendie s’y est déclaré, en 2002, aucun nouveau déchet n’a été descendu mais la dangerosité de ceux qui s’y trouvent est unanimement reconnue. Toutes les expertises scientifiques concluent au fait que, tôt ou tard, la saumure polluée entrera en contact avec la nappe phréatique située 500 mètres plus haut par effet seringue. Or cette nappe, la plus vaste d’Europe, approvisionne près de 8 millions d’habitants du bassin rhénan en eau potable. Il est donc nécessaire d’engager le retrait des 42 000 tonnes de déchets enfouis. Cet amendement vise à créer un fonds destiné à financer le déstockage le plus complet possible du site en réallouant les fonds qui ont été prévus pour financer l’enfouissement des déchets : il ne créerait donc aucune charge nouvelle. Cette initiative transpartisane est soutenue localement par, entre autres, Frédéric Bierry, président de la collectivité européenne d’Alsace, et la sénatrice LR Sabine Drexler.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. J’ai pris connaissance de ce dossier, que je ne connaissais pas. J’ai vu que, par une décision du 17 juin, le tribunal administratif de Strasbourg a estimé que le déstockage des déchets n’était pas réalisable en toute sécurité. La question est de savoir où l’on mettrait ces déchets, car il faut bien en faire quelque chose. Par ailleurs, je suis gêné par le fait que votre amendement crée une ligne budgétaire pour un fonds ad hoc. Si l’on ouvrait une ligne budgétaire, au cas par cas, pour des questions territoriales, le budget de l’État risquerait de devenir quelque peu illisible. J’entends l’enjeu local mais, pour les raisons exposées, mon avis sera plutôt défavorable.
M. Hubert Ott (Dem). Nous venons de voter une proposition de résolution européenne relative au droit fondamental à l’eau. On parle ici d’un territoire de 30 kilomètres de large et de 200 kilomètres de long, qui s’étend de Bâle à Francfort, qui est irrigué par la même eau. Si une source de pollution est avérée, on s’expose à un risque significatif de contamination généralisée, d’autant plus que le site en question se situe au sud et que la nappe se déplace en direction du nord. Le sous-sol alsacien est un gruyère minier qui peut bouger sous l’effet de la compaction des couches géologiques. Les déchets risquent de remonter et de toucher la nappe. En outre, le site se trouve sur une faille sismique majeure ; un séisme d’ampleur peut toujours survenir. Quelques dizaines de millions ne sont rien au regard d’un tel risque. Nos élus de tout bord ont pris conscience du danger. Nous vous demandons, de manière transpartisane, de nous accompagner dans cet effort, car l’État n’a pas honoré l’engagement qu’il avait pris en 1997 de permettre la réversibilité de l’opération. La deuxième étape sera, en effet, de savoir quoi faire des déchets, mais nous en déciderons tous ensemble, le moment venu.
Mme Sandra Regol (EcoS). J’abonde dans le sens de mes collègues. La seule question qui se pose est de savoir quand la plus grande nappe phréatique d’Europe sera polluée et donc inutilisable. Les 7 à 8 millions de personnes qui dépendent de cette eau sont français, en grande majorité, mais aussi allemands et suisses : ce n’est donc pas un sujet local. Non seulement l’amendement ne créerait aucune charge pour l’État mais il permettrait de réaliser des économies à long terme. La valeur de ce qui sera préservé est, en l’occurrence, inestimable : il faut imaginer le coût que représenterait la pollution de la nappe pour l’État français. Enfin, on connaît la réponse à votre dernière question : il ne faut pas enfouir les déchets aussi profondément mais les rendre accessibles, pour assurer la réversibilité de l’opération. L’État a failli sur ce dossier. Il faut voter cet amendement comme il l’a été dans le précédent budget et, cette fois, prendre des actes forts.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Puisque ce problème pourrait, à terme, devenir une préoccupation nationale et coûter très cher à l’État, je m’en remets à la sagesse de la commission.
La commission adopte l’amendement.
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Je me dois de vous indiquer que, si l’on appliquait l’article 40, on ne pourrait plus examiner que l’amendement II-CD143 de M. Barusseau, car les gages ont été épuisés. Après décompte, nous en sommes à + 6,3 milliards sur Infrastructures et services de transports, + 100 millions sur Affaires maritimes, pêche et aquaculture, + 160 millions sur Paysages, eau et biodiversité, + 25 millions sur Expertise, information géographique et météorologie, + 1,1 milliard sur Prévention des risques, + 500 millions sur Énergie, climat et après-mines et - 8,3 milliards sur Service public de l’énergie. Les autres programmes restent stables. Nous allons quand même poursuivre l’examen des amendements.
Article 52 et état G : Liste des objectifs et des indicateurs de performance
Amendement II-CD112 de M. Pierre Meurin
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Il s’agit d’introduire un indicateur de performance pour améliorer l’information du Parlement sur le financement extrabudgétaire – par les CEE – d’une politique publique qui touche les Français dans leur quotidien : je veux parler de l’électrification à marche forcée des véhicules.
La commission rejette l’amendement.
Mme la présidente Sandrine Le Feur. Nous en venons au programme 380, Fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires.
Amendements II-CD127 et II-CD128 de Mme Marie Pochon, II-CD195 de Mme Graziella Melchior, II-CD87 de M. Bérenger Cernon et II-CD149 de M. Stéphane Delautrette (discussion commune)
M. Nicolas Bonnet (EcoS). Le fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires, ou fonds Vert, doit être mieux financé. Doté de 2,5 milliards en 2024, il a été plébiscité par les collectivités locales, qui s’en sont emparées pour financer de nombreux projets : transition énergétique, valorisation des biodéchets, adaptation au changement climatique, mobilité durable, etc. Sa dotation a malheureusement été divisée par deux en 2025, et le PLF pour 2026 prévoit encore de la réduire de moitié, ce qui la porterait à 650 millions. Nous proposons d’augmenter les crédits de ce fonds de 1,85 milliard pour leur faire retrouver leur niveau de 2024, ou à défaut de les abonder de 500 millions.
Mme Graziella Melchior (EPR). Nous souhaitons augmenter de 500 millions d’euros la dotation du fonds Vert afin qu’il retrouve son niveau de 2025. Créé en 2023, il est particulièrement apprécié par les maires des petites comme des grandes communes, dont il accompagne très concrètement les projets d’adaptation aux enjeux climatiques : rénovation énergétique des bâtiments, solutions de traitement des déchets... Pour les seules années 2023 et 2024, près de 19 000 projets ont été ainsi aidés. Il est fondamental que le budget du fonds Vert soit maintenu au niveau de 2025, comme celui du fonds Économie circulaire que finance l’Ademe. L’amendement que j’avais déposé au sujet de ce dernier a été jugé irrecevable pour des raisons techniques, mais j’aurai l’occasion de le redéposer.
Mme Sylvie Ferrer (LFI-NFP). Alors que la crise écologique s’aggrave un peu chaque jour, que nos terres agricoles disparaissent sous la pression d’une artificialisation galopante et que la pollution atmosphérique continue de tuer silencieusement, le gouvernement persiste dans sa politique de coupes budgétaires au détriment de nos habitats naturels et du vivant. J’en veux pour preuve la baisse continue des crédits du fonds Vert, qui sont passés de 2,5 à 1,1 milliard entre 2024 et 2025 et devraient tomber à 650 millions en 2026. Cette diminution drastique menace directement les collectivités territoriales, qui agissent en première ligne pour favoriser la sobriété foncière, combattre la pollution de l’air, développer des mobilités douces, notamment en zones rurales, assurer la rénovation énergétique des bâtiments publics…
Pour financer cette mesure urgente, nous proposons de prélever 0,4 milliard d’euros sur le programme Service public de l’énergie.
M. Stéphane Delautrette (SOC). Il faut saluer l’efficience du fonds Vert. Depuis hier soir, les reportages se succèdent dans lesquels des maires témoignent de leurs difficultés à engager des programmes de rénovation des bâtiments, des écoles ou des mairies, mais aussi de renaturation des centres-bourgs ou des cours d’école – autant d’actions concrètes qui touchent à la vie quotidienne de nos concitoyens. Ils ignorent en effet dans quelles proportions ils auront droit au fonds Vert en 2026, dès lors que ses crédits baisseront de moitié. Vous ne trouverez aucun préfet qui ait eu des difficultés à consommer l’enveloppe qui lui a été allouée au titre du fonds Vert. Comme mes collègues, je propose d’abonder ses crédits de 500 millions d’euros pour les ramener à leur niveau de 2025 – cela restera insuffisant, mais vu le contexte, nous avançons avec prudence.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Le fonds Vert est un outil plutôt lisible, souple et bien pensé – c’est suffisamment rare pour être souligné. Alors que l’État invente souvent des trucs compliqués, inaccessibles et technocratiques, ce fonds est pertinent et fortement sollicité par les élus locaux. Il est donc opportun de le défendre.
Vos amendements appellent toutefois quelques nuances – au-delà du fait que nous soyons déjà largement passés à la caisse cet après-midi. Vous dénoncez une baisse drastique de l’enveloppe du fonds Vert, mais elle est à peu près stable puisqu’elle passe de 1,12 à 1,08 milliard d’euros. Par ailleurs, quand des élections municipales se profilent, les élus locaux font davantage d’inaugurations qu’ils n’engagent de projets sur plusieurs années. Ils recourront probablement un peu moins au fonds Vert cette année, d’autant que le nouveau fonds d’investissement pour les territoires, doté de 1,4 milliard en autorisations d’engagement, soutiendra l’investissement local – ce sont là des réflexions à brûle-pourpoint, car je n’ai pas travaillé spécifiquement la question. Je donne donc un avis défavorable.
M. Stéphane Delautrette (SOC). Nous n’avons pas les mêmes chiffres, monsieur le rapporteur : la dotation du fonds Vert passe de 1,1 milliard à 650 millions, ce qui constitue bien une diminution drastique. Cessons aussi de croire qu’il ne se passe rien dans les communes les années d’élections municipales. Bon nombre de maires réfléchissent à des projets de longue date et sont prêts à les engager dès le début de l’année, indépendamment du calendrier électoral. Rassurez-vous, le fonds Vert sera consommé.
M. Nicolas Bonnet (EcoS). Il est important d’avoir une visibilité sur le fonds Vert. Sa dotation a baissé drastiquement en très peu de temps, passant de 2,5 milliards en 2024 à 650 millions prévus pour 2026, alors que les collectivités ont besoin de temps pour mettre au point des programmes éligibles. Elles ont été nombreuses à élaborer des projets très intéressants dès 2024, voyant qu’une dynamique favorable était impulsée, mais voilà qu’on leur coupe l’herbe sous le pied et que leurs plans sont mis à bas. La moindre des choses serait de maintenir l’enveloppe de 2025, voire de rattraper le niveau de 2024.
M. Stéphane Delautrette (SOC). Le fonds d’investissement territorial n’est pas un nouveau dispositif, monsieur le rapporteur. Il naîtra simplement de la fusion de trois dotations, la dotation d’équipement des territoires ruraux, la dotation de soutien à l’investissement local et la dotation politique de la ville – l’État en profitant pour raboter le tout de 200 millions d’euros, qui manqueront aux collectivités pour boucler le financement de leurs projets. Ce débat appartient à la commission des finances, mais il faudra s’opposer à ce dispositif.
M. Pierre Meurin, rapporteur pour avis. Les autorisations d’engagement du fonds Vert diminuent, il est vrai, mais ses crédits de paiement sont stables : ils passent de 1,12 à 1,08 milliard. Le principe est qu’on dépense les autorisations d’engagement des années précédentes. À mon avis, ce sera indolore pour l’accès au fonds Vert.
La commission adopte l’amendement II-CD127.
En conséquence, les amendements II-CD128, II-CD195, II-CD87 et II-CD149 tombent.
La commission émet un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission Écologie, développement et mobilités durables modifiés.
Article 55 : Plafond des emplois des autorités publiques indépendantes
Amendements II-CD90 de Mme Julie Ozenne, II-CD48 et II-CD45 de Mme Lisa Belluco (discussion commune)
Mme Julie Ozenne, rapporteure pour avis. Mon amendement vise à transférer 45 équivalents temps plein (ETP) de la Société des grands projets vers l’Office français de la biodiversité (OFB). Quant à ceux de Mme Belluco, auxquels je suis favorable, ils ont pour objet d’annuler la suppression de 12 ETP dans les agences de l’eau et d’accorder des ETP supplémentaires au Cerema. Les opérateurs ont besoin de ces moyens pour travailler en toute sérénité.
La commission adopte l’amendement II-CD90.
En conséquence, les amendements II-CD48 et II-CD45 tombent.
Amendement II-CD143 de M. Fabrice Barusseau
M. Fabrice Roussel (SOC). Nous souhaitons augmenter le plafond des emplois du Cerema de 25 ETP, pour annuler la baisse prévue par le PLF pour 2026.
Suivant l’avis de la rapporteure pour avis, la commission adopte l’amendement.
Elle émet un avis favorable à l’adoption de l’article 55 modifié.
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Membres présents ou excusés
Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire
Réunion du mercredi 29 octobre 2025 à 15 heures
Présents. - M. Nicolas Bonnet, Mme Danielle Brulebois, M. Sylvain Carrière, M. François‑Xavier Ceccoli, M. Bérenger Cernon, M. Stéphane Delautrette, M. Sébastien Delogu, M. Auguste Evrard, Mme Sylvie Ferrer, M. Timothée Houssin, M. Sébastien Humbert, Mme Sandrine Le Feur, Mme Julie Lechanteux, Mme Murielle Lepvraud, M. David Magnier, Mme Yaël Ménaché, M. Pierre Meurin, M. Hubert Ott, Mme Julie Ozenne, M. Xavier Roseren, M. Fabrice Roussel, Mme Anaïs Sabatini, Mme Ersilia Soudais, Mme Anne Stambach-Terrenoir
Excusés. - Mme Lisa Belluco, M. Anthony Brosse, M. Jean-Victor Castor, M. Jean‑Marie Fiévet, M. Stéphane Lenormand, Mme Christelle Petex, M. Freddy Sertin, M. Olivier Serva
Assistaient également à la réunion. - M. Emmanuel Fernandes, Mme Julie Laernoes, Mme Graziella Melchior, Mme Sandra Regol