Compte rendu

Commission
des affaires sociales

– Suite de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 (n°s 1907 et 1999) (M. Thibault Bazin, rapporteur général ; M. Hadrien Clouet, Mme Anne Bergantz, Mme Sandrine Runel et M. Gaëtan Dussausaye, rapporteurs)              2

– Présences en réunion.................................26

 

 

 

 

 


Vendredi
31 octobre 2025

Séance de 21 heures 15

Compte rendu n° 16

session ordinaire de 2025-2026

Présidence de
M. Frédéric Valletoux,
président
 

 


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La réunion commence à 21 heures 15.

(Présidence de M. Frédéric Valletoux, président)

 

La commission poursuit l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 (n°s 1907 et 1999) (M. Thibault Bazin, rapporteur général ; M. Hadrien Clouet, Mme Anne Bergantz, Mme Sandrine Runel et M. Gaëtan Dussausaye, rapporteurs)

Article 45 bis : Suspension du report de l’âge légal de départ à la retraite et du relèvement de la durée d’assurance requise pour le bénéfice d’une retraite au taux plein

M. le président Frédéric Valletoux. Sur le vote de l’article, je suis saisi d’une demande de scrutin public par huit députés du groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire.

Amendements de suppression AS1479 de M. Laurent Wauquiez et AS1728 de Mme Nathalie Colin-Oesterlé

Mme Justine Gruet (DR). Notre système de retraite par répartition fait face à un défi démographique d’ampleur. Alors que la France comptait quatre actifs pour un retraité au début des années 1970, il n’y a plus que 1,7 cotisant par retraité, ratio qui tombera à 1,54 en 2045. Cette démographie défavorable entraîne une baisse des recettes issues du produit des cotisations des actifs.

Pour assurer l’avenir de notre système de retraite et les pensions de nos enfants, la question du financement est donc décisive. Or l’article 45 bis, introduit par lettre rectificative au projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour répondre à une forme de chantage, suspend l’application de la réforme des retraites de 2023 et transfère la charge financière de cette suspension sur le reste à charge des patients, par l’augmentation du coût des mutuelles, et sur les retraités, par la baisse des pensions de retraite.

Il est totalement déraisonnable de proposer la suspension de la réforme de 2023 sans dessiner des pistes de financement sérieuses. Au bout du compte, ce sont toujours les mêmes qui paient : la France qui travaille ou qui a travaillé toute sa vie. L’avenir de notre régime par répartition est compromis. Ne faisons pas croire aux Français qu’ils ne devront pas travailler plus.

Mme Nathalie Colin-Oesterlé (HOR). Mon amendement vise à rétablir la clarté, la sincérité et la crédibilité de notre politique des retraites. On ne peut pas bâtir un compromis sans dire la vérité. Annoncer la suspension de la réforme comme s’il s’agissait d’une issue politique, alors que les fondamentaux démographiques n’ont pas changé, crée une illusion dangereuse.

Les faits sont simples : notre système par répartition s’est construit alors qu’il y avait plus de quatre cotisants pour un retraité ; désormais, c’est moins de 1,8. Depuis quarante ans, tous les gouvernements ont ajusté les paramètres pour préserver l’équilibre et la justice entre générations ; la réforme de 2023, qui est loin d’être parfaite, correspond à cette réalité arithmétique. Dans un pays très endetté, promettre une suspension revient à reporter la facture, qu’il faudra bien que quelqu’un paie tôt ou tard.

L’annonce de la suspension de la réforme brouille les règles du jeu, car elle affaiblit la prévisibilité pour les assurés et les employeurs. Elle déstabilise les trajectoires individuelles de départ, crée une loterie de millésimes au sein desquels des cohortes pourtant proches se verront appliquer des règles différentes et brise ainsi la lisibilité nécessaire à un droit social solide. Enfin, faire cette annonce alors que nous demandons à la nation un effort durable d’activité, de formation et d’emploi des seniors rend les signaux économiques contradictoires. Un système de retraite tient par sa prévisibilité et sa crédibilité. Changer de cap au gré des séquences politiques détruit ces fondements.

Mme Sandrine Runel, rapporteure pour la branche vieillesse. Nous voici enfin à l’article relatif à la suspension de la réforme des retraites, intégré au PLFSS dans des conditions rocambolesques, et vous voulez déjà le supprimer !

Dans sa déclaration de politique générale du 14 octobre dernier, le Premier ministre a pris l’engagement solennel, devant la représentation nationale, de suspendre la réforme. Il a précisé : « Aucun relèvement de l’âge n’interviendra à partir de maintenant jusqu’à janvier 2028, comme l’avait précisément demandé la CFDT. En complément, la durée d’assurance sera elle aussi suspendue et restera à 170 trimestres jusqu’à janvier 2028. » Le PLFSS, qui avait pourtant été déposé le matin même, ne comportait pas cette disposition. C’est donc sous la pression politique et syndicale que le Gouvernement a déposé une lettre rectificative, procédure rare s’agissant d’un texte financier, afin d’intégrer l’article dont nous discutons.

Il gèle l’âge de départ à la retraite à son niveau actuel, c’est-à-dire 62 ans et 9 mois, pour la génération née en 1964. Certes, le calendrier reprendrait son cours à partir de la génération née en 1965, à raison de trois mois par génération. Néanmoins, cela permettra de réduire d’un trimestre l’âge de départ de toutes les générations, y compris celle née en 1968 : ce n’est pas rien. L’article gèle également à son niveau actuel, c’est-à-dire 170 trimestres, la durée d’assurance requise pour un départ à taux plein. Cela permettra d’améliorer la pension de retraite des assurés des générations nées en 1964 et en 1965.

C’est une avancée et une première victoire. Toutefois, ce n’est qu’une étape, car l’article ne matérialise pas complètement l’engagement du Premier ministre. D’une part, le gel ne s’appliquerait pas aux carrières longues ni aux assurés de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte ; d’autre part, l’engagement de geler la réforme jusqu’au 1er janvier 2028 imposerait de permettre un départ à 62 ans et 9 mois, y compris pour les assurés nés au premier trimestre de l’année 1965. De nouveaux engagements ont été pris pour corriger ces oublis. Dans sa rédaction actuelle, la suspension induirait des dépenses modestes, de 100 millions d’euros en 2026 et de 1,4 milliard en 2027, estimations qui sont revues à la hausse après la prise en compte des éléments que je viens d’évoquer.

Si nous saluons l’intégration de la suspension de la réforme des retraites dans ce texte, nous n’approuvons pas pour autant les solutions de financement qui ont été avancées par le Gouvernement – taxation des mutuelles et gel durable des pensions de retraite. Nous combattrons donc ces mesures et proposerons en séance, comme nous l’avons fait en commission, des solutions alternatives, telles que la taxation du capital ou des surcotisations pour nos concitoyens les plus aisés. Enfin, cette suspension ne vaut naturellement pas acceptation de la réforme de 2023. Il est important de le rappeler ici solennellement. Elle n’est qu’un statu quo qui permettra aux Français de se prononcer sur l’avenir qu’ils souhaitent donner au système de retraite lors de la prochaine élection présidentielle. C’est un engagement qui a été pris devant la représentation nationale.

Pour toutes ces raisons, et même si nous souhaitons, j’y insiste, voir évoluer le dispositif proposé, je suis bien évidemment défavorable aux amendements de suppression.

M. Thomas Ménagé (RN). Le Rassemblement national sera cohérent et votera contre les amendements de suppression, puisque nous ne souhaitons pas la politique du pire. Nous ne sommes pas là pour faire souffrir davantage les Français. Certes, il ne s’agit que d’un petit report de la réforme et non d’une abrogation ; néanmoins, tout ce que nous pourrons gratter en faveur des Français qui travaillent, qui souffrent, qui en ont plein le dos et qui ont déjà du mal à aller jusqu’à l’âge de la retraite est bon à prendre.

Il y a cependant ici de l’hypocrisie : les partis de gauche auraient pu voter l’abrogation de la réforme des retraites dès le 31 octobre 2024, lorsque nous l’avions mise à l’ordre du jour de notre niche parlementaire ; et le Parti socialiste se réjouit d’avoir obtenu un report de trois mois qui annule pourtant en partie la réforme qu’il avait défendue aux côtés de Marisol Touraine.

Ensuite, nous ne validerons pas ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, car nous refusons de faire les poches des Français en échange d’un petit report.

Telle est la ligne du Rassemblement national ; et c’est celle que nous suivrons ce soir.

Mme Annie Vidal (EPR). Nous ne sommes pas favorables à la suppression de l’article car, même si nous avons toujours ardemment soutenu la réforme des retraites, la proposition de sa suspension est un des grands éléments mis en discussion sur le sujet et nous souhaitons que cette discussion ait lieu, pour trouver un équilibre – même si cela semble difficile.

M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Les Françaises et les Français n’ont jamais avalé la réforme de la retraite à 64 ans, mais après une série de réunions secrètes, vous tentez de nous la faire avaliser en toute discrétion, sous prétexte de changer une virgule au calendrier. Il s’agit d’une arnaque de première catégorie ! Vous reprenez mot pour mot la réforme des retraites de 2023, dont vous avez modifié le rythme d’un an : toute personne de moins de 60 ans partirait à 63 ans ou plus ; toute personne de moins de 57 ans partirait à 64 ans ou plus.

La seule chose qui est suspendue, c’est le courage politique et le respect des électeurs et des électrices. Écoutez-moi bien : le groupe La France insoumise ne votera jamais aucun texte prévoyant un report à 64 ans de l’âge de départ à la retraite ! Jamais ! Nous ne priverons jamais les gens de deux ans de vie, quelle que soit leur année de naissance.

En plus d’être une arnaque, c’est un mensonge de bout en bout : Lecornu a promis de suspendre la réforme tandis que Macron a parlé d’un simple décalage. Et maintenant, vous nous présentez un décalage qui ne suspend rien ! Ça suffit ! Que les gens partent à la retraite maintenant ! Il y a une majorité, à l’Assemblée nationale, pour abroger la réforme, plutôt que pour faire de la tambouille avec ce texte.

Permettez-moi de conclure en vous confiant un secret : il y a une chose qui n’est ni décalée ni suspendue, c’est notre volonté de dégager tous les macronistes !

Mme Océane Godard (SOC). Ce débat budgétaire est un grand moment démocratique et la suspension de la réforme des retraites en est l’expression directe pour les 3,5 millions de femmes et d’hommes qui pourront partir à la retraite plus tôt. Il témoigne de notre capacité à prendre en considération le sentiment d’injustice ressenti par un grand nombre de Françaises et de Français. C’est le combat que nous menons depuis 2023. Il illustre aussi notre capacité à écrire l’histoire d’une démocratie qui ne repose plus uniquement sur le fait majoritaire. Plutôt que de privilégier les intérêts partisans, montrons aux Français qu’il est possible d’incarner le compromis, c’est-à-dire de reconnaître les intérêts contradictoires qui nous traversent et sur lesquels nous parvenons à dialoguer pour trouver un consensus. Cette suspension est le fruit des négociations engagées par les socialistes. Rejoignez, chers collègues, cet intérêt supérieur et rejetez avec nous les amendements de suppression de l’article ; nous serons, ensemble, du bon côté de l’histoire.

M. Hendrik Davi (EcoS). Nous arrivons à la fameuse suspension – qui n’en est pas une – de la réforme des retraites. Nous ne voterons pas les amendements de suppression de l’article, mais nous ne voterons pas non plus l’article. Pourquoi ?

Nous sommes favorables à toute avancée et cette mesure en est une – nous verrons donc ce que nous déciderons en séance. Néanmoins, au stade de la commission, nous voulons envoyer un signal. Nous refusons ce décalage pour deux raisons. D’abord parce qu’il s’agit d’un décalage et non d’une suspension, contrairement à ce qu’avait promis le premier ministre Lecornu – pour une fois, je suis en accord avec le président Emmanuel Macron. Ce décalage nous pose problème, parce qu’il entérine, d’une certaine manière, le passage à 64 ans. Ensuite se pose la question du financement : si la suspension doit être financée au prix d’une diminution des droits des retraités ou d’une hausse des franchises médicales, nous nous y opposerons. C’est pourquoi nous nous abstiendrons sur l’article.

M. Philippe Vigier (Dem). Nous voterons naturellement contre la suppression de l’article. Le Premier ministre a rappelé tout à l’heure au banc qu’il s’agissait bien d’une suspension de la réforme. Et l’âge légal de départ à la retraite est déjà de 62 ans et 9 mois.

Pourquoi sommes-nous favorables à la suspension alors que nous avons défendu la retraite à 64 ans ? Pour une raison simple : il faut faire un compromis et agir sur certains verrous pour doter le pays d’un budget. Nous acceptons donc le contraire de ce que nous voulions initialement, parce que nous ne pouvons pas demander aux autres de faire un effort si nous n’en faisons pas de notre côté.

Sans vouloir polémiquer, j’ai souvenir que la moitié du groupe Les Républicains n’avait pas voté la réforme, et qu’à l’Assemblée nationale nos collègues étaient favorables à une retraite à 63 ans, tandis qu’au Sénat ils proposaient 65 ans.

Quoi qu’il arrive, la réforme se réglera après l’élection présidentielle de 2027. Il faudra ouvrir de nouveau le débat, car la démographie l’impose. La capitalisation et le système de retraite à points sont des questions que nous devrons traiter le moment venu.

Néanmoins, pour montrer que nous sommes capables de faire des pas afin d’aboutir à un budget, et dans l’esprit d’un compromis qui n’est pas une compromission, nous acceptons de revenir en arrière sur ce point.

M. Paul-André Colombani (LIOT). Le Premier ministre s’est engagé, dans sa déclaration de politique générale du 14 octobre, à ce qu’aucun relèvement de l’âge n’intervienne à partir de maintenant jusqu’à janvier 2028 et à ce que la durée d’assurance reste fixée à 170 trimestres. Cet engagement se concrétise par le gel de l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans et 9 mois et de la durée de cotisation à 170 trimestres, comme c’était prévu pour la génération née en 1963.

Toutefois, notre groupe attend des précisions complémentaires pour la suite. Le Premier ministre a évoqué 2028. Envisage-t-il une reprise du calendrier initial après cette date ou bien un décalage à cette date de l’entrée en vigueur ? Même si cette question devra être tranchée dans le cadre de l’élection présidentielle de 2027, nous devrions prévoir dans la loi, dès à présent, des modalités post-2028 afin de ne pas entraîner un vide juridique. La suspension n’est qu’une première étape, un gage de confiance pour remettre sur la table l’avenir de notre système de retraite, après une réforme injuste, adoptée sans vote à l’Assemblée nationale, et qui porte une grande part de responsabilité dans la crise politique et démocratique que nous traversons.

M. Yannick Monnet (GDR). Je voterai naturellement contre les amendements de suppression de l’article. Je ne referai pas le débat sur la réforme des retraites, puisqu’il a déjà été tranché par l’Assemblée nationale, qui s’est majoritairement exprimée contre en adoptant une résolution visant à l’abroger que le groupe GDR avait déposée dans le cadre de sa niche parlementaire.

Il ne faut jamais renoncer à améliorer la vie des gens et tout recul de la réforme est bon à prendre. Cependant, ce qui me pose problème – et c’est la raison pour laquelle je m’abstiendrai sur l’article 45 bis –, c’est que la lettre rectificative ne correspond en rien aux engagements du Premier ministre. Celui-ci avait promis un blocage à 170 trimestres jusqu’en 2028. Or cette disposition ne concernera que la génération née en 1964, puisque celle née en 1965 devra cotiser 171 trimestres et celle née en 1966, 172 trimestres. Par conséquent, le compte n’y est pas. Je veux bien croire à une erreur et attendre de voir ce qui se passera dans l’hémicycle. Toutefois, comme on dit chez moi, c’est à la fin de la foire qu’on compte les bouses. J’attends donc que la foire finisse pour savoir ce que je voterai.

M. Thibault Bazin, rapporteur général. Je rejoins les derniers propos de Yannick Monnet : la vraie question est de savoir ce sur quoi nous nous prononçons vraiment. Devons‑nous voter ce qui figure dans le texte du PLFSS ou ce qui a été annoncé cet après-midi par le Premier ministre concernant les modalités de financement de la suspension, sachant que nous avons rejeté en commission les articles 7 et 44 ?

Quel est l’impact de la suspension ? Elle coûtera à la branche vieillesse 100 millions d’euros en 2026 et 1,4 milliard en 2027 ; et si l’on tient compte des départs anticipés, le coût s’élèverait respectivement à 400 millions et à 1,8 milliard. Il y a aussi un impact pour les finances sociales – non mesuré – lié à la baisse induite du produit des cotisations, qui pénalisera notamment la branche maladie. Il y a un coût pour les finances publiques, puisque la mesure entraînera une baisse d’impôt sur le revenu. Enfin, j’aimerais disposer d’ici à la séance d’une étude permettant de mesurer les effets de la suspension sur le montant de la retraite des personnes qui partiront plus tôt. Si nous leur permettons de partir trois mois plus tôt mais que leur retraite, une fois liquidée, est plus faible qu’elle ne l’aurait été sans la suspension – et ce jusqu’à la fin de leur vie –, elles doivent le savoir avant.

Enfin, il y a la question des compensations financières. Tout le monde est d’accord pour ne pas augmenter le taux de la taxe sur les organismes complémentaires et ne pas sous‑indexer les pensions de retraite. Sauf que c’est la solution préconisée et que nous n’avons pas d’autre réponse pour l’instant. Nous, nous en avons formulé une : améliorer le taux d’emploi, ce qui permettra de résoudre l’équation, à court et à moyen terme. Nous avons un problème de trajectoire financière : le déficit de demain générera de la dette après-demain. Et qui trinquera, au bout du compte ? Ceux qui bossent et ceux qui ont bossé. Nous ne pouvons pas l’accepter.

Mme la rapporteure. L’engagement a été pris en séance de déposer un amendement gouvernemental qui intégrera ceux de la génération 1965 nés au premier trimestre, les carrières longues et les assurés de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Mayotte. Par conséquent, le coût sera plus élevé que les premières estimations et que ce qui est prévu dans la lettre rectificative. Mais si nous parvenons à changer la vie des gens et à leur permettre de partir trois mois plus tôt, l’impact se mesurera sur leur vie, leur santé et leur bien-être. Cela n’a pas de prix !

Nous sommes nous aussi favorables à l’augmentation du taux d’emploi, mais ce sera un autre combat et cela n’empêche pas de permettre à des personnes de partir plus tôt à la retraite.

La commission rejette les amendements.

Conformément aux dispositions de l’article 44, alinéa 2, du Règlement, il est procédé au vote, par scrutin public et par appel nominal, de l’article.

Votent pour : Mme Anchya Bamana, Mme Béatrice Bellay, M. Christophe Bentz, M. Théo Bernhardt, M. Paul-André Colombani, Mme Josiane Corneloup, Mme Sandra Delannoy, Mme Sandrine Dogor-Such, Mme Fanny Dombre Coste, M. Gaëtan Dussausaye, M. Guillaume Florquin, M. Thierry Frappé, Mme Martine Froger, Mme Océane Godard, M. Jérôme Guedj, M. René Lioret, Mme Christine Loir, Mme Joëlle Mélin, M. Thomas Ménagé, Mme Sandrine Runel, M. Arnaud Simion, M. Philippe Vigier

Votent contre : Mme Ségolène Amiot, Mme Anaïs Belouassa-Cherifi, M. Louis Boyard, M. Paul Christophe, M. Hadrien Clouet, Mme Nathalie Colin-Oesterlé, Mme Elsa Faucillon, Mme Justine Gruet, Mme Zahia Hamdane, Mme Élise Leboucher, M. Damien Maudet, M. Frédéric Valletoux

S’abstiennent : M. Thibault Bazin, Mme Anne Bergantz, M. Hendrik Davi, Mme Camille Galliard-Minier, Mme Julie Laernoes, M. Michel Lauzzana, Mme Joséphine Missoffe, M. Yannick Monnet, Mme Sandrine Rousseau, M. Jean-François Rousset, Mme Sabrina Sebaihi, Mme Danielle Simonnet, Mme Annie Vidal

Les résultats du scrutin sont donc les suivants :

Nombre de votants : 47

Abstentions : 13

Nombre de suffrages exprimés : 34

Pour l’adoption : 22

Contre : 12

En conséquence, la commission adopte l’article 45 bis non modifié.

Après l’article 45 bis

Amendement AS418 de M. Damien Maudet

M. Damien Maudet (LFI-NFP). Il y a une semaine, partout en France, on a vu s’abattre la tempête Benjamin. En Limousin, il y a eu de grandes inondations et 10 000 foyers ont été privés d’électricité. Un restaurant a même été endommagé à Limoges. Pour faire face, nous avons pu compter sur nos sapeurs-pompiers, parmi lesquels 80 % sont volontaires, c’est‑à‑dire qu’ils s’engagent en plus de servir leur pays par leur travail.

En 2023, ils avaient réussi à obtenir la prise en compte de trimestres supplémentaires pour le calcul de leur retraite, mais le décret afférent n’a toujours pas été pris. Par cet amendement, je demande qu’un rapport nous soit remis à ce sujet, afin de rappeler que, deux ans plus tard, cette dette envers les sapeurs-pompiers attend d’être honorée.

M. le rapporteur général. C’est un combat que nous sommes nombreux à mener.

La mesure avait été adoptée dans le cadre de la loi rectificative de financement de la sécurité sociale pour 2023. Nous attendons le décret. Il y a deux jours, le Premier ministre a écrit ceci : « L’engagement pris en 2023 sera bien sûr tenu. Les modalités d’application et d’éligibilité ont fait l’objet d’un travail interministériel et permettent désormais de finaliser sa rédaction. Le décret sera publié dans les prochains jours. »

Pour que les choses se concrétisent, encore faut-il qu’il y ait encore un gouvernement à cette date. Je vous invite donc à retirer cet amendement et à ne pas voter la censure trop vite !

Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Le nombre de décrets que cette commission attend relève presque de la farce ! Je ne doute pas que nous obtiendrons celui-ci, comme tous ceux dont nous avons parlé au cours de la semaine... Vous nous permettrez néanmoins de censurer le Gouvernement avant.

M. Damien Maudet (LFI-NFP). Bruno Retailleau, alors ministre de l’intérieur, assurait déjà devant la commission des finances en juin dernier que le décret serait pris quelques jours plus tard. Comme nous entendons cette promesse depuis 2023, j’insiste pour inscrire cette demande de rapport dans la loi et ainsi envoyer un message au ministère.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AS417 de Mme Ségolène Amiot

Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Cet amendement a exactement le même objet, mais il me semble pertinent d’enfoncer le clou. À mon tour, je demande un rapport sur les effets de cette disposition que nous avions adoptée à la quasi-unanimité lors de l’examen du projet de loi rectificative de financement de la sécurité sociale pour 2023. J’ai personnellement interpellé tous les gouvernements successifs depuis cette date, oralement ou par écrit, mais en vain. Il est grand temps que les pompiers volontaires et les volontaires de la sécurité civile obtiennent justice.

M. le rapporteur général. La commission vient de voter la remise d’un rapport sur ce sujet, mais si vous pensez que leur multiplication fera arriver les décrets plus vite, je m’en remets à votre sagesse !

La commission adopte l’amendement.

Amendement AS448 de Mme Élise Leboucher

M. Louis Boyard (LFI-NFP). Nous demandons un rapport analysant les effets qu’aurait une indexation du minimum vieillesse sur le seuil de pauvreté. Il est inacceptable que l’écart entre ce dernier et l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa) ne soit en moyenne que de 200 euros. Notre amendement vise à remédier à cette injustice.

M. le rapporteur général. C’est un amendement d’appel ; j’entends cet appel et j’espère que le Gouvernement l’entendra aussi. Les seuils sont un vrai problème. On l’a vu plus tôt cette semaine au sujet des franchises médicales. Pour autant, je ne crois pas qu’obtenir un rapport changerait grand-chose.

Demande de retrait ou avis défavorable.

M. Louis Boyard (LFI-NFP). Puisque vous parlez d’appel, avez-vous été informés, monsieur le rapporteur général, monsieur le président, des annonces faites dans l’hémicycle tout à l’heure ? Ce ne sont pas de petites annonces : elles portent sur le coût du décalage de la réforme des retraites, sur le dégel des pensions – qui représenterait 3,6 milliards d’euros –, ou encore sur le milliard d’euros, annoncé par M. Faure, que le Gouvernement consentirait à allouer à l’hôpital public.

M. le rapporteur général. Je n’en étais pas informé. À en croire les annonces, confirmées par Mme Runel, qui a dû avoir des échanges avec le Premier ministre, le décalage de la réforme des retraites ne coûtera pas 100 millions d’euros en 2026, mais 400 millions si l’on intègre les départs anticipés. Nous avions interrogé la Caisse nationale d’assurance vieillesse à ce sujet et calculé que, le cas échéant, la facture serait de 1,8 milliard en 2027 et non de 1,4 milliard, comme l’avait annoncé le Gouvernement. Taxer encore plus les complémentaires santé n’est pas une solution, comme l’a montré notre vote sur l’article 7 ; sous-indexer davantage les retraites pendant plusieurs années non plus. Tout reste donc à faire et à écrire.

D’autres annonces ont porté sur le dégel des pensions et des minima sociaux. De telles mesures ont été votées ici même et j’avais alors donné leur coût, qui n’a pas changé. Si l’on additionne toutes ces dépenses, le déficit global de la sécurité sociale s’aggravera.

Je répète que les choses sont mouvantes ; elles évolueront d’ailleurs encore certainement lors de l’examen du texte en séance. Nous n’en sommes qu’à la première lecture à l’Assemblée nationale. Quelqu’un a parlé de musée des horreurs ; il faudra qu’il y en ait le moins possible à la fin et que nous parvenions à donner à la France un budget de la sécurité sociale. Je m’efforce de trouver des voies de passage. Il faut qu’on finisse par s’entendre sur ce qui est le plus raisonnable pour les Français.

M. le président Frédéric Valletoux. J’ai aussi découvert les annonces au moment où elles ont été faites. C’est le propre des compromis qui se bâtissent en direct ou presque. On ne pourra pas se plaindre que la discussion n’ait pas été ouverte : tous les députés étaient présents et ont pu entendre les échanges.

Par ailleurs, je partage l’inquiétude du rapporteur général au sujet du déficit final de la sécurité sociale. Je vous transmettrai lundi une note de la Cour des comptes contenant les derniers chiffres des comptes sociaux et une analyse de la version initiale du PLFSS. J’aurais préféré que cette étude soit prête avant le début de nos travaux, mais nous l’aurons donc en amont de l’examen du texte en séance. On apprend en marchant !

M. Jean-Philippe Nilor (LFI-NFP). Puisque nous parlons du seuil de pauvreté, je tiens à appeler l’attention de la commission sur l’iniquité dont souffrent les outre-mer, où ce seuil est inférieur à celui de l’Hexagone alors même que les taux de pauvreté y sont beaucoup plus élevés. Si nous appartenons bien à la même République et si nous voulons atteindre l’égalité réelle entre les territoires, c’est une distorsion à laquelle il faudra bien s’attaquer un jour. Cet amendement est donc encore plus pertinent s’agissant des outre-mer.

M. Michel Lauzzana (EPR). Par convention, le seuil de pauvreté correspond à 60 % du niveau de vie médian de la population, qui est, je le reconnais, plus bas dans les outre‑mer.

Et pour répondre à M. Boyard, il me semble que le Premier ministre l’a dit et répété : le Gouvernement propose, puis le Parlement dispose. C’est nous qui avons le pouvoir de voter.

La commission adopte l’amendement.

Amendement AS1138 de M. Laurent Wauquiez

Mme Justine Gruet (DR). Il s’agit là d’un amendement essentiel pour le groupe Droite Républicaine, toujours attaché à valoriser le travail. En effet, les aides sociales doivent être une forme de solidarité en cas d’accident de la vie et non un revenu d’assistanat. Depuis de nombreuses années, nous formulons donc des propositions concrètes pour qu’il y ait une différence tangible entre les aides et les revenus du travail. Pour le dire autrement, l’emploi doit toujours être mieux valorisé et rémunéré que l’inactivité.

Notre système de protection sociale souffre de plusieurs maux : la dérive incontrôlée des dépenses, les fraudes importantes, le mille-feuille administratif. Nous constatons en effet un empilement de prestations sociales aux règles de calcul disparates. Une trentaine d’aides sont soumises à des conditions de ressources, représentant au total près de 120 milliards d’euros par an. L’idée serait donc de simplifier les choses et de réunir l’ensemble des prestations sociales non contributives en une aide sociale unique, dont le montant serait plafonné à 70 % du Smic.

M. le rapporteur général. Cet amendement a le mérite d’ouvrir le débat.

J’apprécie que votre proposition tienne compte des sujétions liées au nombre d’enfants et de personnes à charge, ainsi que de la composition du foyer ; cela me semble très important lorsqu’on envisage un plafonnement. Je me félicite aussi que vous excluiez certaines prestations destinées aux personnes en situation de handicap, de dépendance ou de perte d’autonomie, et que vous défendiez l’universalité de la politique familiale.

Cependant, tous nos travaux et auditions montrent le défi opérationnel absolument considérable que représenterait une telle réforme. De plus, ce serait mettre la charrue avant les bœufs que de fusionner les prestations en une allocation sociale unique et d’instaurer un plafonnement sans avoir préalablement harmonisé les bases ressources pour la définition d’un revenu social de référence.

Je comprends l’idée du point de vue politique, j’y suis même sensible, mais, en tant que rapporteur général, je m’intéresse aux modalités des mesures et à leur faisabilité.

Je suggère donc son retrait, au profit de mon amendement AS1776, qui vise à expérimenter une telle orientation – ce qui pourrait susciter le consensus de tous les groupes.

Mme Justine Gruet (DR). Je vous remercie pour vos explications, mais je vais maintenir l’amendement afin de poser un jalon en vue de l’examen du texte en séance. Notre rôle de parlementaire est de refuser l’impuissance publique, de cesser de considérer que, parce qu’on a toujours fait d’une certaine façon, il serait trop compliqué de changer. Il est nécessaire pour nos concitoyens de vraiment valoriser le travail ; posons cette première pierre. Je suis très sensible à l’idée de revenu social de référence et je crois que nous parviendrons ensemble à apporter quelque chose d’intéressant.

La commission rejette l’amendement.

Amendements identiques AS1776 de M. Thibault Bazin et AS1139 de M. Laurent Wauquiez

M. le rapporteur général. Je rappelle que l’allocation sociale unique a fait l’objet d’une mission « flash » au sein de notre commission.

Mme Justine Gruet (DR). L’amendement AS1139 est défendu.

La commission adopte les amendements.

Amendement AS1771 de M. Thibault Bazin

M. le rapporteur général. Cet amendement, de nature interprétative, vise à réaffirmer une intention du législateur remontant à 2012 et à sécuriser juridiquement les opérations que les régimes de sécurité sociale peuvent utilement réaliser grâce à leurs systèmes d’information conçus pour l’interopérabilité avec les autres opérateurs de la sécurité sociale. Au fond, l’idée est de mieux travailler et échanger avec l’Agirc-Arrco.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS1148 de M. Laurent Wauquiez et sous-amendement AS1785 de M. Thibault Bazin

Mme Justine Gruet (DR). Par cet amendement, nous souhaitons poser une première pierre avant l’examen du projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales. Il s’agit de systématiser les sanctions encourues par les fraudeurs aux prestations sociales et à tripler leur montant pour ceux en état de récidive ou dont la volonté de tromper l’administration est établie.

De fait, 6 milliards d’euros de versements issus de la branche famille n’ont pu être certifiés ces dernières années. Les fraudes détectées se concentrent sur le revenu de solidarité active, la prime d’activité et les aides au logement. Alors que de nombreux Français sont dans une situation très difficile et que notre dette publique représente 112 % du produit intérieur brut, il est insupportable que certains puissent tricher et abuser.

M. le rapporteur général. J’essaye d’être juste et équilibré. Je ne peux donc pas ne pas vous opposer, puisque je l’ai fait précédemment à nos collègues insoumis, le caractère inconstitutionnel de l’automaticité des sanctions. C’est la raison pour laquelle je propose, par mon sous-amendement, de supprimer cet aspect. Seraient conservées la hausse du plafond des pénalités pouvant être prononcées par le directeur de la caisse d’allocations familiales ou de la caisse d’assurance retraite et de santé au travail (Carsat), ainsi que la hausse du montant plancher desdites pénalités.

Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Vous n’êtes pas équitable, monsieur le rapporteur général : lorsque nous avons proposé la hausse automatique des sanctions à l’encontre des employeurs coupables de fraudes successives, vous n’avez pas sous-amendé nos amendements. D’ailleurs, que vous vous soyez opposé à ces derniers montre que l’indignation vis-à-vis de la fraude est à géométrie variable.

M. Michel Lauzzana (EPR). Il est important de lutter contre la fraude, car elle lèse les autres assurés, ceux qui en ont le plus besoin. Celle dont nous parlons est désormais organisée en réseaux. J’aurais donc tendance à approuver toutes les propositions comme celle dont nous discutons.

M. le rapporteur général. Je répète que j’essaie d’être précis et juste. Quand un amendement ne prévoit que l’automaticité, je ne peux pas le sous-amender. L’amendement en discussion prévoit plusieurs dispositions.

Madame Amiot, vous proposiez de doubler les sanctions contre les employeurs récidivistes, si bien que les montants auraient été disproportionnés. En revanche, j’ai soutenu un amendement de Jérôme Guedj qui prévoyait aussi une majoration de ces sanctions. Il n’est donc pas juste de dire que j’ai refusé cette mesure.

La commission rejette successivement le sous-amendement et l’amendement.

Amendement AS408 de Mme Ségolène Amiot

M. Jean-Philippe Nilor (LFI-NFP). Cet amendement vise à rendre obligatoire pour chaque offreur de soins la déclaration auprès de l’assurance maladie de son éventuelle appartenance à un groupe, groupement ou réseau.

En effet, nous assistons depuis plusieurs années à une dérive, avec la multiplication des structures privées à but lucratif, la montée en puissance de fonds d’investissement dans le domaine sanitaire, la concentration de l’offre et la constitution de rentes privées financées par nos cotisations – dérive qui demande un cadre renouvelé de régulation et de transparence.

Or, à ce jour, aucune obligation ne permet aux autorités de régulation et singulièrement à l’assurance maladie de connaître et d’actualiser l’ensemble des affiliations des offreurs de soins. Une telle obligation serait salutaire en ce qu’elle permettrait de lutter contre la concentration de l’offre et surtout d’utiliser l’outil des prix pour éviter le détournement du produit de nos cotisations au profit des acteurs financiers.

M. le rapporteur général. Cela vous surprendra peut-être, mais je trouve cette idée intéressante. S’agissant de la financiarisation, il y a effectivement quelque chose à faire.

Cependant, il y a un problème de méthode : cet amendement tend à créer une sanction avant même d’avoir créé le dispositif dont la méconnaissance serait sanctionnée. Pour ne pas mettre la charrue avant les bœufs, il faudrait faire l’inverse.

Je suggère de rénover les règles relatives à la déontologie et à la transparence des professionnels vis-à-vis de leurs liens avec des groupes financiarisés. Vous pourriez prévoir un amendement en ce sens à l’article 12 du projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes que nous examinerons en décembre prochain, sauf censure entre‑temps – n’y voyez pas une incitation à ne pas censurer le Gouvernement.

M. Michel Lauzzana (EPR). Nous connaissons tous les dérives de la financiarisation, contre lesquelles il faut absolument lutter. Le problème est particulièrement prégnant dans les secteurs de l’imagerie et de la biologie, ainsi que dans certains territoires d’outre-mer. Toutefois, dans les faits, il est souvent compliqué de savoir à qui appartient l’outil de travail, à cause de l’enchevêtrement des structures juridiques. Bien que votre proposition soit intéressante, et même nécessaire, vous n’allez pas au fond des choses.

La commission rejette l’amendement.

Amendement AS1147 de M. Laurent Wauquiez

Mme Justine Gruet (DR). En 2024, le Haut Conseil du financement de la protection sociale a montré que la fraude sociale représentait un manque à gagner d’au moins 13 milliards d’euros. En 2020, la commission d’enquête relative à la lutte contre les fraudes aux prestations sociales, présidée par Patrick Hetzel, avait notamment souligné le défaut de sécurisation des cartes Vitale.

Lors de la première lecture du PLFSS 2025, le Sénat avait donc conditionné la délivrance d’une carte Vitale à la présentation obligatoire d’une preuve d’identité. Cette disposition, inscrite à l’article 50 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS), a toutefois été censurée par le Conseil constitutionnel. Pour tirer les enseignements de cette censure, nous proposons de réintroduire cette obligation dans une nouvelle rédaction, en ciblant les versements indus de prestations de l’assurance maladie et en renvoyant ses modalités d’application au champ réglementaire. Une telle mesure se substituera avantageusement à la généralisation de la carte Vitale biométrique, car elle plus efficiente et moins coûteuse.

Nous avons bon espoir de réduire les fraudes, alors que le Sénat examinera en novembre le projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales.

M. le rapporteur général. Le Conseil constitutionnel a jugé que cette disposition constituait un cavalier social. Nous pouvons faire une nouvelle tentative, d’autant que votre rédaction articule mieux cette mesure avec l’objectif de réduction des dépenses de l’assurance maladie, mais cela reste risqué. Je vous invite à retirer votre amendement et à faire en sorte que cette disposition figure dans la future loi sur la lutte contre la fraude.

L’amendement est retiré.

Amendements AS1597 de Mme Justine Gruet et AS771 de M. Pascal Jenft (discussion commune)

Mme Justine Gruet (DR). L’Aspa doit bénéficier à ceux de nos concitoyens qui ne peuvent prétendre à une retraite complète, notamment parce que leur carrière est hachée. Je propose de restreindre les conditions d’attribution de cette allocation en la réservant à ceux qui justifient à la fois d’au moins cinq ans de cotisation et de dix ans de résidence continue sur notre territoire. Nous ferions ainsi œuvre de justice, alors que notre système de protection sociale est l’un des plus généreux de l’Union européenne.

M. Christophe Bentz (RN). L’amendement AS771 est défendu.

M. le rapporteur général. Vous essayez de limiter les dommages collatéraux que causerait votre amendement, en ménageant une exception pour les parents au foyer mentionnés à l’article L. 351-4 du code de la sécurité sociale. C’est tout à votre honneur, mais il reste des trous dans la raquette. Votre proposition pourrait priver les fonctionnaires et les exploitants agricoles retraités du bénéfice de l’allocation, ce qui n’est pas votre intention. Par ailleurs, si vous proposez un abaissement de l’âge minimal en cas d’inaptitude au travail, vous ne prévoyez pas d’exonérer les personnes en situation de handicap de la condition de durée de cotisation, alors que certaines d’entre elles n’ont pas pu cotiser.

Je vous invite donc à retirer votre amendement et à le retravailler d’ici à la séance.

Les amendements sont retirés.

Amendement AS874 de M. Théo Bernhardt

M. Théo Bernhardt (RN). La Cour des comptes relève qu’un quart des fraudes au sein de la branche vieillesse concernent le non-respect de la condition de résidence en France. Actuellement, les contrôles en la matière reposent sur un simple questionnaire. Nous proposons plutôt de créer, comme le recommande la Cour elle-même, un mécanisme automatisé de détection des départs reposant sur une analyse des données relatives aux dépenses de santé. Ainsi, il serait possible de vérifier chaque année que les bénéficiaires des pensions résident bien en France.

M. le rapporteur général. Le Conseil constitutionnel estimera sans doute qu’une telle disposition n’a rien à faire dans le budget de la sécurité sociale. Vous pourrez creuser ces propositions intéressantes à la faveur de l’examen du projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes. Le croisement automatisé des fichiers nécessitera toutefois une coordination interministérielle complexe, ainsi que des garanties techniques et juridiques solides.

L’amendement est retiré.

Amendement AS261 de Mme Justine Gruet

Mme Justine Gruet (DR). L’arsenal de contrôle et de sanction des professionnels de santé libéraux n’a jamais été aussi important. La sécurité sociale peut désormais les déconventionner en urgence et exiger des indus par extrapolation. La LFSS 2024 prévoyait même, dans certains cas, la suspension automatique de la participation de l’assurance maladie à la prise en charge des cotisations de praticiens. Ainsi, les professionnels de santé libéraux n’ont pas le droit à l’erreur, ce qui induit une charge mentale considérable, alors que les agents qui les contrôlent ne risquent, eux, aucune sanction. Or la volonté affichée de réduire le déficit risque de conduire à des dérives administratives. Nous proposons donc que les contrôleurs soient financièrement sanctionnés, en cas d’erreur avérée.

Les professionnels de santé libéraux pâtissent de la complexité administrative. Il faut leur donner le droit à l’erreur, quand ils sont de bonne foi.

M. le rapporteur général. Si nous adoptions votre amendement, plus personne n’oserait effectuer de contrôle. Demande de retrait.

L’amendement est retiré.

Amendement AS967 de Mme Mereana Reid Arbelot

M. Yannick Monnet (GDR). L’amendement est défendu.

Suivant l’avis du rapporteur général, la commission rejette l’amendement.

Amendement AS1145 de M. Laurent Wauquiez et sous-amendement AS1787 de M. Thibault Bazin, amendements AS1156 de M. Laurent Wauquiez et AS1770 de M. Thibault Bazin (discussion commune)

Mme Justine Gruet (DR). Dans son rapport de mai 2025 sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, la Cour des comptes demande un contrôle accru des justificatifs d’existence des retraités percevant une pension française mais vivant à l’étranger. Ceux-ci habitent, pour les trois quarts d’entre eux, dans six pays : le Portugal, le Maroc, l’Espagne, l’Italie, la Belgique et l’Algérie. Les dépenses les concernant s’élèvent chaque année à plus de 3 milliards d’euros, pour la retraite de base, et à plus de 1 milliard, pour les retraites complémentaires. La Cour des comptes note en outre que la moyenne d’âge des retraités du régime général résidant à l’étranger est de 78,6 ans, alors que celle des retraités résidant en France n’est que de 74,5 ans. Proportionnellement, les retraités âgés de 80 à 89 ans sont également plus nombreux à l’étranger qu’en France. Enfin, le taux de centenaires parmi les retraités résidant à l’étranger s’élève à 0,23 %, alors qu’il n’est que de 0,19 % en France.

De tels écarts invitent à renforcer les contrôles. Il convient notamment d’organiser un contrôle annuel systématique de l’existence des retraités vivant hors de France, comme le prévoit l’article 88 de la LFSS 2025 – mais avec une date d’application trop tardive. Par les amendements AS1145 et AS1156, nous proposons d’avancer cette date au 1er janvier 2026. L’amendement AS1145 prévoit en outre qu’en l’absence de solutions techniques efficaces, ce contrôle annuel pourra être réalisé par les services consulaires.

M. le rapporteur général. Nous sommes un certain nombre à souhaiter renforcer ces contrôles, comme le rapport de la Cour des comptes nous y invite.

L’article 88 de la LFSS 2025 prévoit une mise en œuvre des nouveaux contrôles le 1er janvier 2028. Les amendements AS1145 et AS1156 visent à avancer cette date au 1er janvier 2026. Je n’y suis pas favorable, car il faut laisser aux administrations le temps nécessaire pour s’organiser. Par l’amendement AS1770, je propose la date du 1er janvier 2027, qui constituerait un compromis.

L’amendement AS1145 prévoit en outre qu’en l’absence de moyens techniques satisfaisants pour procéder aux contrôles électroniques prévus dans la LFSS 2025, les retraités concernés devront se présenter physiquement devant les autorités consulaires. C’est une idée intéressante, mais qu’il serait compliqué d’appliquer au 1er janvier 2026. J’ai donc déposé un sous-amendement AS1787 visant à reporter cette date au 1er janvier 2027. Si ce sous‑amendement était adopté, je pourrais donner un avis favorable à votre amendement AS1145.

Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Quand les étrangers sont en France et travaillent, cela ne va pas. Quand ils retournent à l’étranger, cela ne va pas non plus.

Certaines personnes retournent dans leur pays d’origine à leur retraite, ce qui leur permet de renouer des liens familiaux. Bien souvent, ces retraités ont été exploités en France, où ils n’ont pas toujours pu déclarer leur travail. J’ai vraiment du mal à comprendre cette aversion à l’égard des étrangers, cette xénophobie.

Mme Justine Gruet (DR). Je suis intimement convaincue que, sur le fond, nous sommes d’accord. Il faut valoriser le travail, valoriser ceux qui ont travaillé toute leur vie, mais pourquoi verser une retraite à une personne décédée ? Nous proposons simplement de vérifier que les bénéficiaires des pensions sont vivants. Et le fait que nos relations avec certains pays manquent de réciprocité n’est pas l’enjeu. Les retraités vivants n’ont rien à craindre de cette mesure, car ils continueront à percevoir leur pension.

Accessoirement, je ne suis pas xénophobe, et la xénophobie est un délit.

Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Vous soupçonnez en permanence les étrangers d’être des fraudeurs !

M. le rapporteur général. Sur 17 millions de retraités, 1 million vivent hors de France. Tous ne sont pas étrangers. Parmi eux, les Français sont même nombreux.

Pour être tout à fait clair, je précise que l’amendement AS1770, contrairement à l’amendement AS1145, ne prévoit pas de contrôle physique par les autorités consulaires lorsque les moyens techniques ne sont pas satisfaisants.

M. Philippe Vigier (Dem). Les retraités vivant à l’étranger peuvent être français ou étrangers. En tout cas, ils ont travaillé en France toute leur vie et méritent leur retraite. Est‑ce un drame de vérifier qu’ils sont encore vivants ?

Mme Sandrine Rousseau (EcoS). Cela se fait déjà !

M. Philippe Vigier (Dem). Non, car les moyens informatiques ne sont pas forcément les mêmes qu’en France. C’est, du reste, ce que recommande la Cour des comptes, dans un rapport très intéressant.

Contrôler, ce n’est pas pointer du doigt. D’ailleurs, en tant que parlementaires, nous avons une mission importante de contrôle et d’évaluation. Enfin, en nous donnant les moyens de vérifier, nous pourrons tordre le cou aux rumeurs qui circulent sur les réseaux sociaux.

La commission rejette successivement le sous-amendement et les amendements.

 


TITRE II

DOTATIONS ET OBJECTIFS DE DÉPENSES DES BRANCHES ET DES ORGANISMES CONCOURANT AU FINANCEMENT DES RÉGIMES OBLIGATOIRES

 

Article 46 : Dotations de l’assurance maladie au fonds pour la modernisation et l’investissement en santé et de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie aux agences régionales de santé

Contre l’avis du rapporteur général, la commission adopte l’amendement AS1002 de M. Hendrik Davi.

Puis elle adopte l’article 46 modifié.

Article 47 : Dotations aux opérateurs financés par le sixième sous-objectif

Amendement AS1786 de M. Thibault Bazin

M. le rapporteur général. Depuis cette année, le PLFSS précise le montant des dotations versées par l’assurance maladie aux opérateurs. Or je suis surpris par l’évolution de certaines dotations, qui est peu voire pas du tout justifiée à l’annexe 2. Ainsi, alors qu’on demande des efforts à tous les Français et que certaines prestations sont gelées, la dotation de l’Agence nationale du développement professionnel continu passerait de 215 à 225 millions d’euros, et celle de Santé publique France de 328 à 395 millions. Une augmentation de 68 millions, ce n’est pas négligeable !

Nous en discuterons en séance publique avec le Gouvernement. En attendant, je propose d’appliquer le principe de l’année blanche, mais avec discernement. Nous gèlerions donc toutes les dotations, à l’exception de celle de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, car nous ne pouvons bloquer l’indemnisation des victimes concernées, dont le nombre est croissant.

M. Yannick Monnet (GDR). Monsieur le rapporteur général, vous nous avez habitués à mieux. C’est à nous, et non au Gouvernement, qu’il revient de décider du montant des dotations.

Vous proposez d’annuler ces augmentations, car elles vous semblent bizarres. C’est un peu léger ! Ces hausses doivent bien avoir une raison. Je vois d’ailleurs d’un bon œil l’évolution du montant des dotations des organismes que vous avez cités, car ils sont importants.

M. Michel Lauzzana (EPR). Quand j’étais commissaire aux finances, je m’étais penché sur les annexes budgétaires relatives aux agences de l’État, notamment celles concernant les organismes divers d’administration centrale. Eh bien, c’est extraordinaire ! Certains opérateurs continuent d’être financés alors qu’ils sont inactifs depuis deux ou trois ans. D’autres organismes exercent des missions très proches, si bien qu’il faudrait les regrouper. M. Philippe, quand il était Premier ministre, avait supprimé quelques-unes de ces structures. Nous devons regarder tout cela de près et poursuivre ce travail de tri car, au bout du compte, ces opérateurs coûtent très cher à l’État. Je suis donc favorable à l’amendement du rapporteur général.

M. le rapporteur général. Vous avez raison, monsieur Monnet, c’est à nous de décider.

Outre les augmentations que j’ai mentionnées, j’ai également été surpris par certaines baisses, comme celle de la dotation de l’Établissement français du sang. J’ai demandé au Gouvernement des explications sur ces évolutions, mais à ce jour, je n’en ai pas reçu. Si j’en obtiens d’ici à la séance publique, je déposerai un amendement totalement différent. Il n’est pas normal de ne pas justifier et de ne pas documenter de telles évolutions.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 47 modifié.

Article 48 : Objectif de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès

Amendement de suppression AS1089 de M. Yannick Monnet

M. Yannick Monnet (GDR). Alors que l’augmentation naturelle des dépenses est estimée à 10 milliards d’euros pour l’an prochain, soit une hausse 4,5 %, l’article 48 n’augmentera l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (Ondam) que de 4,5 milliards, soit une hausse de 1,6 %. Les cinq fédérations hospitalières estiment la perte pour l’hôpital public à 1 milliard d’euros – c’est l’équivalent de 20 000 postes d’infirmiers, alors que les recrutements s’amélioraient plutôt jusqu’à présent. Elles dénoncent également des chiffres en trompe-l’œil côté médico-social, puisque ce texte laissera un déficit de 500 millions d’euros pour les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), le handicap et les services à domicile. Ce n’est pas acceptable.

La Constitution nous interdisant de déposer des amendements qui créeraient des dépenses nouvelles, nous proposons de supprimer cet article.

M. le rapporteur général. Je reviens dans mon rapport sur les périmètres respectifs des articles 48 et 49. L’Ondam est fixé à l’article 49 ; l’article 48, lui, concerne d’autres dépenses.

Demande de retrait. À défaut, avis défavorable.

Mme Sabrina Sebaihi (EcoS). L’Ondam prévu, dont la progression est inférieure à l’inflation, ne répond absolument pas aux besoins. La feuille de route du Gouvernement est de détruire ce joyau qu’est l’hôpital public : assumez-le ! Mieux vaut supprimer cet article que de se moquer du personnel soignant, qui travaille matin, midi et soir pour nos concitoyens.

M. Michel Lauzzana (EPR). Arrêtez de dire que nous voulons tuer l’hôpital public ! Quel est ce fantasme ? Espérez-vous qu’à force de répéter ces éléments de langage, nos concitoyens vous croiront ?

Au cours des dernières années, nous avons beaucoup augmenté l’Ondam, à un rythme plus rapide que l’inflation. Rappelons en outre qu’il s’agit d’un simple objectif, qui est dépassé chaque année – souvent à raison.

Il n’est pas utile d’ajouter des couches supplémentaires de moyens. Il faut plutôt réfléchir à des manières de travailler plus efficientes. Cette réflexion a lieu partout ; elle doit aussi avoir lieu à l’hôpital.

M. Yannick Monnet (GDR). L’article 48 fixe à 267,5 milliards d’euros l’objectif de dépenses de la branche maladie, maternité, invalidité et décès pour 2026. C’est bien le sujet qui me préoccupe.

La commission adopte l’amendement.

En conséquence, l’article 48 est supprimé.

Article 49 : Fixation de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie de l’ensemble des régimes obligatoires de base ainsi que de ses sous‑objectifs pour 2026

Amendements de suppression AS84 de Mme Sandrine Runel et AS412 de M. Damien Maudet

M. Jérôme Guedj (SOC). L’Ondam qui nous est proposé pour 2026 augmenterait de 1,6 %. Plusieurs de ses composantes sont problématiques. Le sous-objectif « Dépenses de soins de ville » ne progresse que de 0,88 %, parce qu’il intègre les 2,3 milliards de recettes liées au doublement des franchises médicales, auquel nous sommes opposés. L’augmentation de 2,1 % du sous-objectif « Dépenses des établissements de santé » est notoirement insuffisante ; elle comporte un risque de tarification négative pour un grand nombre d’établissements et ne permet pas de résorber la dette cumulée des hôpitaux publics, qui atteint 2 milliards d’euros. Quant à l’objectif global de dépenses pour les personnes âgées et les personnes handicapées (OGD PA-PH), il est également insuffisant, en particulier pour accompagner les Ehpad en difficulté.

Notre amendement de suppression AS84 est un coup de semonce. Le Premier ministre a déclaré cet après-midi dans l’hémicycle que l’Ondam hospitalier devait être augmenté ; nous attendons donc qu’il amende son texte pour prendre en compte nos objections.

M. Damien Maudet (LFI-NFP). Clarisse, infirmière en Île-de-France, explique : « Avec les heures supplémentaires à répétition, nous ne pouvons plus rien prévoir. Nos proches ne peuvent jamais compter sur nous. À tout moment, on décale les plans. Il est très compliqué d’articuler vie personnelle et vie professionnelle. À 28 ans, il va falloir que je choisisse : est-ce que je dois sacrifier ma vie de famille ou continuer le travail que j’aime ? Les deux sont devenus incompatibles. »

Qu’a déclaré Sébastien Lecornu lorsqu’il s’est rendu pour la première fois dans un hôpital public en tant que Premier ministre ? « Il y a des problèmes de finances publiques parce qu’on a décidé de remettre beaucoup d’argent dans l’hôpital. » Autrement dit, les soignants, qui tiennent l’hôpital à bout de bras, seraient responsables de la dette ! Non seulement ses propos sont honteux, mais en plus, ils sont faux. Sous Macron, l’hôpital public a été constamment sous-financé, sauf lors de la crise du covid. Depuis 2017, 30 000 lits ont été supprimés. Pour 2026, la Fédération hospitalière de France (FHF) estime qu’il manque 1 milliard d’euros, ce qui empêchera l’ouverture de 20 000 postes d’infirmières. Nous proposons donc de supprimer cet Ondam, parce qu’il est dangereux pour l’hôpital et la santé des Français.

M. le rapporteur général. L’article 49 est obligatoire. La commission peut le supprimer pour envoyer un message au Gouvernement, mais il devra être maintenu lors de la discussion en séance publique.

L’Ondam n’est qu’un objectif, qui est, du reste, souvent dépassé. Qui plus est, en 2026, il progresse encore, puisqu’il atteint un niveau inédit – 270 milliards d’euros, à comparer aux 185 milliards de 2017. Mais sans budget, pas d’augmentation ! Or mieux vaut un OGD PA-PH dont le montant est insuffisant qu’un objectif égal à zéro : toutes les aides à l’investissement seraient bloquées. Qu’il y ait besoin de moyens supplémentaires, c’est évident. Mais on ne peut pas dire que l’Ondam ne croît pas.

J’ai hâte de savoir par quelles mesures se traduiront les annonces du Premier ministre – peut-être en savez-vous plus que moi à ce sujet, monsieur Guedj –, car le diable se cache dans les détails. Je vous propose donc de ne pas adopter ces amendements de suppression et d’attendre la séance publique pour vous exprimer.

M. Hendrik Davi (EcoS). Un Français sur quatre renonce à se soigner, un sur trois vit dans un désert médical, 9 millions de nos concitoyens n’ont pas de médecin traitant, les délais moyens pour obtenir un rendez-vous chez un cardiologue ou un dermatologue sont respectivement de quarante-deux jours et d’un mois, et près d’un tiers des établissements hospitaliers déclarent des incidents graves liés à la surcharge d’activité. Or l’augmentation de 1,6 % de l’Ondam est très insuffisante pour remédier à cette situation.

Il faut réinvestir massivement dans l’hôpital public pour revaloriser les carrières, recruter des personnels et réduire la dette hospitalière, qui s’élève à 30 milliards d’euros. Le déficit des hôpitaux publics atteindra en 2025 un niveau historique, à 2,7 milliards. Selon la FHF, il manquera au moins 1 milliard en 2026. C’est pourquoi notre amendement AS1079 tend à porter l’Ondam à 3,5 %. Pour financer cette augmentation, nous avons proposé des solutions : gel des exonérations de cotisations sociales, hausse de la contribution sociale généralisée (CSG), etc. Nous sommes prêts à en rediscuter. En attendant, nous voterons pour la suppression de l’article.

Mme Annie Vidal (EPR). Depuis 2017, l’Ondam a augmenté de 79,7 milliards d’euros. Or force est de constater que le système de santé ne fonctionne pas mieux pour autant. Personne ne veut des mesures d’efficience que nous avons proposées pour lutter contre le gaspillage de médicaments ou les 20 % à 30 % de surprescriptions, par exemple. Pourtant, la réduction de ces dépenses, qui ne contribuent pas à améliorer la prise en charge des patients, permettrait de contenir l’Ondam.

On dit que celui-ci n’est pas une mesure pertinente. En 2018, une collègue de La France insoumise avait proposé à la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale de réfléchir à un autre système, avant d’y renoncer face à la complexité de la tâche. Si quelqu’un souhaite reprendre ce travail, je suis disponible !

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 49 est supprimé et les amendements AS416 de Mme Ségolène Amiot, les amendements identiques AS793 de Mme Céline Thiébault-Martinez, AS1193 de Mme Océane Godard et AS1571 de M. Arthur Delaporte, ainsi que les amendements AS1079 et AS1136 de M. Hendrik Davi, AS804 de Mme Élise Leboucher, AS1083 de Mme Karine Lebon, AS226 de M. Boris Tavernier, AS446 de M. Damien Maudet, AS116 de Mme Sandrine Runel, AS1073 de M. Yannick Monnet, AS444 de Mme Élise Leboucher, AS200 de Mme Sandrine Runel, AS450 de Mme Ségolène Amiot, AS419 et AS437 de Mme Élise Leboucher, AS802 de M. Hadrien Clouet, AS706 et AS878 de Mme Élise Leboucher, AS400 de Mme Sandrine DogorSuch, AS425 de M. Hadrien Clouet, AS107 de Mme Sandrine Runel, AS430 de M. Damien Maudet, AS615 et AS605 de Mme Ségolène Amiot tombent.

Article 50 : Dotations au fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante et au fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, transfert de la compensation de sousdéclaration des accidents du travail et maladies professionnelles et dépenses liées aux dispositifs de prise en compte de la pénibilité

Amendement AS1092 de Mme Karine Lebon

M. Yannick Monnet (GDR). Le texte que nous examinerons en séance publique sera, je le rappelle, le même que celui qui nous a été soumis par le Gouvernement, quels que soient les amendements que la commission aura adoptés.

Nous nous adaptons aux moyens dont nous disposons. En l’espèce, nous sommes opposés à la baisse du fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (Fiva), mais dès lors que nous ne pouvons pas proposer d’augmenter ses crédits, le seul moyen que nous avons de contester cette mesure est de supprimer l’alinéa 1 de l’article.

Enfin, depuis combien de temps réclamons-nous un débat sur la pertinence de l’Ondam ? Cette question est désormais dépassée, comme celle du projet de loi de financement de la sécurité sociale d’ailleurs. Mais nous n’avons jamais ces débats de fond.

M. Gaëtan Dussausaye, rapporteur pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles. Il s’agit d’un amendement d’appel, à l’instar de ceux déposés sur l’article 49 relatif à l’Ondam. J’ai moi-même indiqué dans le rapport ne pas bien comprendre pourquoi les crédits du Fiva baissent alors que les demandes d’indemnisation augmentent.

Je m’en remets à la sagesse de la commission.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 50 modifié.

Article 51 : Objectif de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles

Amendements de suppression AS460 de M. Damien Maudet et AS1345 de M. Yannick Monnet

Mme Ségolène Amiot (LFI-NFP). Je défends l’amendement AS460. Les objectifs de dépenses de la branche sont fondés sur une sous-déclaration chronique et organisée des accidents du travail et des maladies professionnelles – il est même possible à un employeur de se faire aider par un professionnel pour que les accidents du travail ne soient pas déclarés comme tels. L’article 51 n’est donc pas du tout à la hauteur des besoins réels de la branche.

M. le rapporteur. Je partage les préoccupations exprimées par les auteurs des amendements dans leurs exposés sommaires. La France détient le record du nombre de morts au travail – on en compte en moyenne deux par jour. Quant au taux de sinistralité, il est très élevé – plus de 900 000 accidents du travail et maladies professionnelles chaque année – et a, du reste, un lien évident avec le report de l’âge légal de départ à la retraite. Il convient donc de développer la prévention. Or la part de celle-ci dans les crédits affectés à la branche n’est que de 2 %, alors qu’elle est de 7 % en Allemagne.

Là encore, je m’en remets à la sagesse de la commission.

Mme Justine Gruet (DR). Je comprends le message politique que nos collègues souhaitent envoyer en déposant ces amendements de suppression, mais j’espère qu’ils n’adopteront pas la même démarche en séance publique car, si nous supprimons l’Ondam, ce sont les Françaises et les Français qui devront payer.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 51 est supprimé.

Article 52 : Objectif de dépenses de la branche vieillesse pour 2026

Amendements de suppression AS1529 de Mme Karine Lebon et AS1619 de Mme Ségolène Amiot

Mme Elsa Faucillon (GDR). Nous continuons sur notre lancée. Plutôt que de ne raisonner qu’en termes de dépenses, donc de réduction des droits des pensionnés, nous proposons par l’amendement AS1529 de provoquer une discussion sur les recettes de la branche vieillesse.

M. Hadrien Clouet (LFI-NFP). Cette soirée d’Halloween est parfaitement indiquée pour évoquer la branche vieillesse, car les régimes d’assurance retraite sont un véritable cauchemar pour les Français. Ce soir, les enfants qui iront frapper aux portes dans ma circonscription porteront un masque d’Emmanuel Macron !

Lorsqu’on laisse les recettes augmenter trois fois moins vite que les dépenses, on crée volontairement un déficit. Les engagements pris par le Premier ministre, notamment à propos des carrières longues, n’ont aucun sens, puisque les gens de la génération 1964 ayant eu une carrière longue partiront à la retraite au 1er janvier 2026, de sorte que la Carsat n’aura pas eu le temps de traiter leur dossier. Quant à l’augmentation de la CSG sur le patrimoine, elle n’est pas une concession : notre commission l’a adoptée. Cette pantalonnade justifie la suppression de l’article par notre amendement AS1619.

Mme Sandrine Runel, rapporteure. Je suis défavorable à ces amendements tendant à supprimer un article obligatoire de la loi de financement de la sécurité sociale – article qui devra, en tout état de cause, être modifié car, en l’état, il ne prend pas en compte l’ensemble des dépenses qui incomberont à la branche vieillesse, lesquelles devraient être supérieures d’environ 400 millions d’euros.

M. Philippe Vigier (Dem). Arrêtons de réclamer toujours plus sans savoir comment on dépense ! Il est temps que nous débattions d’une véritable refonte de notre système de santé.

M. Clouet reconnaîtra certainement, par honnêteté intellectuelle, que la situation des salariés qui ont commencé à travailler avant 20 ans a été améliorée par la réforme des retraites.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 52 est supprimé.

Article 53 : Objectif de dépenses de la branche famille

Amendements de suppression AS468 de M. Hadrien Clouet et AS1353 de Mme Karine Lebon

M. Louis Boyard (LFI-NFP). Je défends l’amendement AS468.

Si nous avons eu le plaisir de supprimer plusieurs des horreurs contenues dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous regrettons que les exonérations de cotisations, inutiles, aient été maintenues, grâce à l’alliance entre le Rassemblement national et la Macronie.

J’aurais souhaité que nous travaillions davantage sur la branche famille. Mais on peut se demander si, en définitive, le véritable travail n’est pas effectué à Matignon, à l’heure du déjeuner, par le Parti socialiste et Lecornu. Si je remercie notre président et notre rapporteur général pour la qualité du travail réalisé par la commission, je ne remercie donc pas le Parti socialiste car, au bout du compte, nous nous retrouvons avec des milliards de déficit, des exonérations de cotisations sociales non compensées et une branche famille qui n’a pas progressé ! (Exclamations.)

M. Yannick Monnet (GDR). Je défends l’amendement AS1353.

Mme Anne Bergantz, rapporteure pour la branche famille. Je serais très déçue que notre commission vote contre l’objectif de dépenses de la branche famille. Sur la forme, un tel vote n’aurait aucun effet. Sur le fond, on peut considérer que cet objectif est insuffisant, mais n’oublions pas que ce texte comporte une belle mesure concernant la branche famille : le congé de naissance supplémentaire.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 53 est supprimé.

Article 54 : Objectif de dépenses de la branche autonomie

Amendements de suppression AS471 de Mme Élise Leboucher et AS1360 de M. Yannick Monnet

Mme Élise Leboucher (LFI-NFP). La hausse de 3,5 % des dépenses de la branche autonomie ne trompe personne : elle est près de deux fois inférieure à celle prévue initialement entre 2024 et 2025. Un tel freinage traduit le manque de volonté politique de traiter le problème de l’autonomie, du grand âge et du handicap. Pire : il témoigne des sacrifices imposés par le gouvernement Lecornu aux personnes en perte d’autonomie.

Aucune solution structurelle n’est apportée aux problèmes de la transition démographique et du vieillissement de la population. La loi « grand âge », maintes fois promise, n’a jamais vu le jour. Quant à la petite loi sur le bien‑vieillir, dont le manque d’ambition est souligné par l’ensemble des acteurs, son examen a été sans cesse repoussé. Enfin, les mesures annoncées ne couvrent pas les besoins réels, et le déficit de 500 millions d’euros compromet la création des emplois et des places indispensables.

M. Yannick Monnet (GDR). Je profite de cette dernière intervention pour vous remercier, monsieur le président, d’avoir dirigé nos travaux avec intelligence. (Applaudissements.) Nous avons eu de bons débats, même si je regrette que nous n’ayons parfois pas pu aller plus loin. Mes remerciements vont également au rapporteur général. (Nouveaux applaudissements.)

M. Hadrien Clouet, rapporteur pour la branche autonomie. Je suis favorable à ces amendements de suppression, pour trois raisons.

D’abord, les dépenses de la branche sont manifestement sous-évaluées au regard des besoins. Certes, ceux-ci sont illimités, mais la politique a précisément pour objet de déterminer ceux auxquels il convient de répondre collectivement. En l’espèce, c’est l’adéquation de l’environnement extérieur aux besoins d’une personne qui lui permet d’être autonome. Si elle ne l’est pas, c’est parce que le choix politique a été fait de la maintenir dans la sujétion.

Ensuite, le PLFSS 2026 n’alloue même pas à la branche les recettes nécessaires à la couverture des dépenses dont nous avions fixé ensemble l’objectif l’an dernier.

Enfin, les politiques actuelles ne favorisent ni l’autonomie, ni l’émancipation des personnes concernées, ni la démarchandisation du secteur.

M. Philippe Vigier (Dem). Je tiens à remercier notre président, notre rapporteur général et l’ensemble des membres de la commission, car nous sommes parvenus à examiner quelque 1 500 amendements dans un climat apaisé. C’est de bon augure pour la séance publique !

M. Jérôme Guedj (SOC). Je remercie à mon tour, au nom du groupe Socialistes et apparentés, le président de notre commission, le rapporteur général et les rapporteurs thématiques. L’examen du texte en séance publique sera très suivi, car il comporte des mesures essentielles, qu’il s’agisse de recettes, d’économies, d’économies évitées ou de la suspension de la réforme des retraites.

Compte tenu de la suppression des mesures irritantes que comportait la troisième partie du texte – je pense notamment à l’année blanche et à la trajectoire problématique de l’Ondam – et de la suspension de la réforme des retraites, nous voterons pour cette partie et pour l’ensemble du PLFSS.

Mme Joëlle Mélin (RN). Je remercie notre président, qui a permis que nos débats se déroulent dans un climat apaisé, propice aux discussions de fond, et notre rapporteur général, dont les réponses nous ont bluffés, d’autant que le texte, conçu dans la précipitation, comportait des chiffres imprécis et était dépourvu d’axes stratégiques, au point de donner le sentiment que les services avaient pour seul objectif de trouver le moindre centime d’euro.

Mme Camille Galliard-Minier (EPR). Je remercie à mon tour le président et le rapporteur général. Puisque nous nous inscrivons dans une démarche constructive de compromis, nous voterons pour le texte, quoique nous ayons perdu quelques batailles, car nous souhaitons à tout prix que la France soit dotée d’un budget de la sécurité sociale.

M. le président Frédéric Valletoux. Je vous remercie tous pour votre implication dans les travaux de notre commission. La discussion a parfois été vive – et c’est normal, car les sujets sont sensibles, techniques, et la copie n’était pas terrible –, mais nous avons su nous écouter.

Je remercie également les services de la commission qui nous accompagnent, les rédacteurs des comptes rendus, nos collaborateurs et les journalistes qui nous ont suivis jusqu’au bout (Applaudissements). Après ses travaux sur la fin de vie, notre commission a confirmé sa réputation de sérieux, celui d’une commission où les débats sont intéressants, même si parfois vifs. Je n’oublie pas le rapporteur général et les rapporteurs thématiques qui, grâce au travail intense qu’ils ont fourni en peu de jours, nous ont apporté des réponses sérieuses, étayées et intéressantes.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l’article 54 est supprimé.

La commission rejette la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026.

L’article liminaire et les trois parties du projet de loi ayant été supprimés ou rejetés, l’ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2026 est rejeté.

 

La réunion s’achève à vingt-trois heures vingt.


Présences en réunion

Présents.  Mme Ségolène Amiot, M. Joël Aviragnet, Mme Anchya Bamana, M. Thibault Bazin, Mme Béatrice Bellay, Mme Anaïs Belouassa-Cherifi, M. Christophe Bentz, Mme Anne Bergantz, M. Théo Bernhardt, M. Louis Boyard, M. Bruno Clavet, M. Hadrien Clouet, Mme Nathalie Colin-Oesterlé, M. Paul-André Colombani, Mme Josiane Corneloup, M. Hendrik Davi, Mme Sandra Delannoy, Mme Sandrine Dogor-Such, Mme Fanny Dombre Coste, M. Gaëtan Dussausaye, Mme Elsa Faucillon, M. Guillaume Florquin, M. Thierry Frappé, Mme Martine Froger, Mme Camille Galliard-Minier, Mme Océane Godard, Mme Justine Gruet, M. Jérôme Guedj, Mme Zahia Hamdane, Mme Julie Laernoes, M. Michel Lauzzana, Mme Christine Le Nabour, Mme Élise Leboucher, M. René Lioret, Mme Christine Loir, M. Damien Maudet, Mme Joëlle Mélin, M. Thomas Ménagé, Mme Joséphine Missoffe, M. Yannick Monnet, M. Jean-Philippe Nilor, Mme Sandrine Rousseau, M. Jean-François Rousset, Mme Sandrine Runel, Mme Sabrina Sebaihi, M. Arnaud Simion, Mme Danielle Simonnet, M. Frédéric Valletoux, Mme Annie Vidal, M. Philippe Vigier

Excusés.  Mme Sylvie Bonnet, M. Elie Califer, M. Paul Christophe, Mme Sylvie Dezarnaud, Mme Stella Dupont, M. Laurent Panifous, M. Stéphane Viry