Compte rendu

Commission
des affaires étrangères

–  Suite et fin de l’examen, ouvert à la presse, des avis budgétaires sur le projet de loi de finances pour 2026 (n° 1906) :

- Examen pour avis et vote des crédits de la mission Économie – commerce extérieur et diplomatie économique (M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis)              2


Mercredi
5 novembre 2025

Séance de 15 heures

Compte rendu n° 13

session ordinaire 2025-2026

Présidence
de M. Bruno Fuchs, Président


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La commission achève l’examen, ouvert à la presse, de ses avis budgétaires sur le projet de loi de finances pour 2026 (n° 1906).

La séance est ouverte à 15 h 00.

Présidence de M. Bruno Fuchs, président.

M. le président Bruno Fuchs. Mes chers collègues, ce dernier avis budgétaire porte sur la mission Économie – commerce extérieur et diplomatie économique, dont les moyens sont portés par le PLF 2026 à près de 3,5 milliards d’euros de crédits de paiement (CP), en diminution de 5 %. Cette baisse nous invite à accorder une attention particulière à l’efficacité des politiques publiques et à la priorisation des actions de soutien aux filières stratégiques de notre économie. Notre rapporteur pour avis a choisi de consacrer la partie thématique de ses travaux aux effets du commerce international et de la politique douanière sur la filière vitivinicole.

Pour mémoire, la viticulture française représente 15 % des exploitations agricoles françaises, soit 58 310 exploitations. La filière emploie 128 000 équivalents temps plein (ETP) et réalise une production annuelle valorisée à hauteur de 15,5 milliards d’euros, dont 12 milliards d’euros à l’exportation.

Monsieur le rapporteur, vous avez souhaité particulièrement vous intéresser à la fragilisation du commerce international par le retour du protectionnisme, à la situation des producteurs français et à l’œnotourisme, perçu comme un levier de résilience économique. Au-delà de ces chiffres, cette analyse nous rappelle que la viticulture française n’est pas seulement un secteur économique mais également un élément stratégique du rayonnement international de la France et de notre attractivité touristique.

Il est donc essentiel que nos politiques économiques, ainsi que nos actions de diplomatie économique, soient conçues pour préserver ces atouts et soutenir la filière dans un contexte international incertain.

M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Nous examinons aujourd’hui pour avis les crédits du commerce extérieur et de la diplomatie économique. Comme chaque année, cet exercice ne peut se résumer à l’examen des principaux chiffres. Il nous fournit également l’occasion de prendre la mesure des grands équilibres de notre commerce extérieur, de ses progrès, mais également de ses fragilités. Cette année, j’ai choisi de regarder plus attentivement la filière vitivinicole, un secteur situé au cœur de notre identité économique et patrimoniale, plus que jamais confronté à la montée des tensions commerciales et aux défis du changement climatique.

L’année 2024 a confirmé la poursuite du redressement de notre commerce extérieur. Le déficit des biens s’est établi à 81 milliards d’euros contre 100 milliards d’euros en 2023, soit une amélioration de près de 20 milliards d’euros en un an. Cette amélioration a été portée avant tout par la baisse de la facture énergétique, qui est redescendue à hauteur d’environ 60 milliards d’euros, son plus bas niveau depuis dix ans. La France est même redevenue exportatrice nette d’électricité, une première depuis 2019.

Mais cette embellie demeure fragile. Hors énergie, notre déficit demeure supérieur à 44 milliards d’euros, presque le double du niveau précédant la crise sanitaire. Les exportations ont légèrement reculé de 1,6 % à près de 600 milliards d’euros, en raison de la baisse des prix mondiaux. Certaines filières résistent toutefois, comme l’aéronautique – excédent de plus de 35 milliards d’euros –, les parfums et cosmétiques, ou encore la chimie et la pharmacie, qui progressent d’environ 5 %. En revanche, d’autres secteurs souffrent davantage, comme l’automobile, le textile, l’habillement ou les machines agricoles.

Les services compensent partiellement ces déséquilibres. Le tourisme international a rapporté 63,5 milliards d’euros en 2024, avec un solde record de 19 milliards d’euros. Il faut probablement y voir là un effet de l’organisation des Jeux olympiques à Paris. Les services financiers ont dégagé un excédent de 12 milliards d’euros et les services numériques et d’ingénierie ont progressé de 8 %. La France retrouve donc une place sérieuse dans les échanges mondiaux, mais sur la base d’un équilibre nouveau, beaucoup moins industriel et davantage fondé sur la valeur ajoutée et la qualité.

Ce redressement s’inscrit dans un environnement international de plus en plus instable. La croissance mondiale a ralenti à 3,1 % en 2024. Les tensions géopolitiques pèsent sur les flux et les grandes puissances utilisent désormais le commerce comme un instrument de puissance. Nous assistons à un double mouvement : la régionalisation des échanges et le retour du protectionnisme industriel. Les États-Unis subventionnent massivement leurs filières vertes, la Chine réplique par des aides ciblées et l’Europe tente de bâtir une réponse équilibrée fondée sur la réciprocité.

Depuis le printemps dernier, les relations commerciales transatlantiques ont été particulièrement tendues. Washington a imposé des droits additionnels de 15 % sur la majorité des exportations européennes, et jusqu’à 50 % pour certains produits stratégiques. Grâce à une négociation engagée par la Commission européenne, un accord politique a été annoncé fin juillet. Il fixe un tarif de référence de 15 % et préserve des exemptions pour des secteurs comme l’aéronautique, la pharmacie et certains produits de luxe. Cependant, les vins et spiritueux restent soumis à ce tarif additionnel, ce qui constitue un signal très négatif. Nos produits d’excellence demeurent fortement exposés aux tensions commerciales.

Dans ce contexte, la France fait preuve d’une résilience certaine. Nos exportations vers les États-Unis n’ont reculé que de 3 %, contre 10 % pour le Royaume-Uni et 11 % pour l’Allemagne. Cette performance s’explique par la qualité de nos produits mais aussi par l’agilité de nos entreprises, qui diversifient leurs marchés et adaptent leurs chaînes logistiques.

C’est dans ce climat incertain que s’inscrit la situation de la filière vitivinicole, que j’ai souhaité examiner. Elle représente à elle seule 16,5 milliards d’euros d’exportations. Elle représente plus de 40 000 emplois et irrigue nos différents territoires. Mais ce modèle, qui repose sur l’ouverture et la réputation, est aujourd’hui fragilisé. Les surtaxes américaines de 15 %, les taxes chinoises sur les spiritueux européens et la multiplication des barrières sanitaires pèsent sur un secteur dont 75 % – jusqu’à 97 % pour le cognac – de la production est exportée.

Les ventes vers les États-Unis et la Chine, qui représentent plus de 4,5 milliards d’euros, ont reculé respectivement de 3 % et 6 % sur le premier semestre 2025. À ces tensions extérieures s’ajoutent des difficultés internes comme les complexités administratives, les coûts de main-d’œuvre élevés, le vieillissement des exploitants et la vulnérabilité croissante face aux effets et aléas climatiques, comme le gel, la sécheresse, les maladies de la vigne.

Le secteur a besoin d’un accompagnement renouvelé, articulé autour de quatre priorités diplomatique, économique, sociale et territoriale.

D’un point de vue diplomatique, la prévisibilité des échanges doit être garantie. Nos appellations doivent être défendues à Bruxelles, à Washington comme à Pékin. Toute escalade tarifaire doit être anticipée et surtout évitée.

Sur le plan économique, il faut simplifier les aides, harmoniser les règles européennes et soutenir l’innovation, la robotique dans nos vignes, l’innovation liée à une irrigation plus intelligente ou encore l’adaptation variétale.

Sur le plan social, il faut encourager la transmission des exploitations, alléger la fiscalité successorale et renforcer la formation commerciale des jeunes vignerons.

Enfin, sur le plan territorial, il faut valoriser un levier stratégique, en l’occurrence l’œnotourisme. Ce secteur encore sous-estimé constitue un relais de croissance considérable. En 2023, 12 millions de visiteurs en France, dont plus de 5 millions d’étrangers, ont parcouru nos vignobles, générant environ 7 milliards d’euros de retombées économiques. Près de 10 000 caves accueillent aujourd’hui le public mais seule une infime minorité dispose d’une offre structurée.

Le label « Vignobles & Découvertes » fédère désormais 74 destinations et rassemble près de 9 000 acteurs mais il reste très inégalement valorisé. Pourtant, l’œnotourisme peut représenter jusqu’à 30 % du chiffre d’affaires des exploitations qui accueillent des visiteurs, stabilisant l’emploi rural, soutenant la restauration et l’artisanat et fidélisant une clientèle internationale qui est souvent prescriptrice à son retour.

Pourtant, Atout France, ne consacre que 430 000 euros par an à cette thématique, un montant assez dérisoire au regard de ses retombées. Le rapport propose donc de renforcer ces moyens en associant davantage les régions et les entreprises du tourisme dans une gouvernance qui pourrait être mieux partagée. Nous proposons également de moderniser le cadre juridique, notamment sur les licences IV et les dégustations, et d’intégrer des modules œnotouristiques dans les formations viticoles et hôtelières.

L’exemple de la Rioja, la plus petite province espagnole, illustre assez bien ce que pourrait donner ce modèle intégré. Là-bas, 460 bodegas réparties sur 118 communes fonctionnent dans une gouvernance locale coordonnée, appuyée sur des fonds européens redistribués directement aux acteurs. Les retombées atteignent près de 200 millions d’euros par an pour un million de nuitées, dans un équilibre assez remarquable entre attractivité, qualité et durabilité. L’expérience de la Rioja montre qu’un œnotourisme bien structuré peut constituer à la fois un amortisseur face aux tensions commerciales, un moteur de cohésion territoriale et un instrument de diplomatie culturelle. De l’autre côté des Pyrénées, le vin n’est pas un produit. Il est un récit, un patrimoine vivant où s’unissent culture, gastronomie et hospitalité.

En conclusion, le commerce extérieur français s’améliore mais son équilibre reste très fragile. Il dépend désormais autant de notre politique énergétique que de la capacité de nos filières à innover et à se diversifier. La viticulture illustre bien cette exigence d’une économie ouverte mais résiliente, capable d’allier excellence, durabilité et ancrage territorial. L’œnotourisme, en réconciliant culture, économie et diplomatie, trace sans doute la voie d’un monde dans lequel le rayonnement français pourrait se nourrir de la force et de l’identité de ses terroirs.

C’est dans cet esprit que je vous invite à adopter les crédits de la mission Économie – commerce extérieur et diplomatie économique.

M. le président Bruno Fuchs. Je vous remercie et cède la parole aux orateurs des groupes politiques.

M. Jérôme Buisson (RN). Alors que nous examinons aujourd’hui les crédits alloués à notre diplomatie économique, je veux alerter sur un drame en cours : l’agriculture française est en train d’être sacrifiée par des traités de libre-échange imposés par l’Union européenne (UE), qui organisent méthodiquement notre déclin.

L’accord avec le Mercosur submergera notre marché de viandes sud-américaines, produites dans des conditions que nos éleveurs ne peuvent même pas imaginer. Elles sont marquées par moins de normes sanitaires, moins de contraintes sociales, moins de respect pour l’environnement. Nos agriculteurs, déjà fragilisés, ne résisteront pas à cette concurrence déloyale.

Pendant ce temps, notre balance commerciale agricole s’effondre. Nous importons toujours plus ; nos agriculteurs doivent produire toujours moins et paient le prix de cette politique aveugle. Cette situation est intolérable. La France n’est pas un marché de dupes. Nous ne pouvons plus accepter que nos agriculteurs soient les victimes d’un libre-échange dogmatique qui profite à tous.

Que faire ? En premier lieu, nous devons défendre notre marché par des droits de douane ciblés, des contrôles renforcés et une tolérance zéro face aux pratiques déloyales. Mais il ne suffit pas de se protéger maintenant ; il faut aussi attaquer. La diplomatie économique de la France doit devenir une arme offensive. Il s’agit ainsi d’ouvrir de nouveaux marchés à nos produits, de défendre nos intérêts à l’étranger et de renforcer notre réseau diplomatique dans les régions stratégiques comme l’ont déjà fait l’Italie ou l’Allemagne. Pourquoi la direction générale du Trésor ne serait-elle pas déconcentrée dans les territoires où nos entreprises ont besoin d’être soutenues ?

Enfin, je reviendrai dans mes amendements sur un paradoxe insupportable. Certaines dépenses de ce budget servent à amortir les conséquences des politiques écologiques trop restrictives imposées à nos industriels. La transition écologique est certes nécessaire mais elle ne doit pas étouffer notre économie au point de pousser nos productions à délocaliser.

Ce budget doit être celui de la reconquête, pas de la résignation. La France a les moyens de se défendre et de gagner. Pour tous ces manquements, le groupe Rassemblement national ne votera pas les crédits de la mission Économie – commerce extérieur et diplomatie économique.

M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Je suis d’accord avec vous pour estimer que nous devons nous montrer bien plus offensifs que nous ne l’avons été jusqu’à maintenant. De même, il est exact que l’accord multilatéral avec le Mercosur est profondément déséquilibré. En revanche, je ne partage pas votre constat. Les fragilités de notre agriculture et de notre viticulture ne s’expliquent pas par une seule cause. En réalité, les causes sont multiples, le problème est complexe. Nous devons l’affronter les yeux ouverts, en nous montrant offensifs.

M. Vincent Ledoux (EPR). Je salue la qualité du travail de notre rapporteur pour avis, qui met en lumière les défis immenses de notre commerce extérieur et les leviers de notre diplomatie économique. Le commerce extérieur constitue en effet la colonne vertébrale de notre souveraineté économique. Il fait la force d’un pays, sa capacité à créer de la richesse, à soutenir l’emploi, à faire vivre ses territoires et rayonner dans le monde.

Chaque point de déficit équivaut à des emplois perdus. À l’inverse, chaque entreprise qui exporte, chaque investisseur qui s’installe sont autant de victoires françaises. Notre déficit s’est certes réduit, passant à 81 milliards d’euros contre 164 milliards d’euros en 2022 mais ne nous y trompons pas : cette amélioration est fragile, elle tient plus à la détente énergétique qu’à un véritable redressement de notre compétitivité. C’est pourquoi il nous faut investir durablement dans nos filières, nos savoir-faire et nos opérateurs publics qui nous permettent d’être plus forts à l’international. Tous ensemble, nous sommes plus forts.

Business France aide nos petites et moyennes entreprises (PME) et entreprises de taille intermédiaire (ETI) à franchir le cap de l’international. Bpifrance leur permet d’oser. La direction générale du Trésor, par son réseau mondial, défend chaque jour nos intérêts économiques et anticipe les chocs à venir. Ces opérateurs sont les soldats de notre influence économique.

Dans les Hauts-de-France, les entreprises du textile, de la logistique, de l’agroalimentaire exportent désormais vers la Belgique, grâce à cet accompagnement. Je veux saluer aussi la vigilance du rapporteur à l’égard de la filière vitivinicole, pilier de notre image et victime directe du dérèglement climatique et des désordres du commerce mondial.

Mais au-delà des chiffres, ce rapport nous confirme que le commerce mondial est devenu un champ de bataille. Comme dans la guerre informationnelle, la concurrence économique est totale, permanente, sans répit. La France tient bon parce qu’elle s’appuie sur la qualité de ses produits, sur la créativité de ses ingénieurs et sur l’agilité de ses entreprises.

C’est pourquoi, au nom du groupe EPR, nous voterons en faveur des crédits du commerce extérieur et de la diplomatie économique. Ils ne sont pas une charge mais un pari sur la confiance, l’emploi et la puissance de la France.

M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Vous avez raison de mentionner l’amélioration de notre déficit commercial, puisque nous sommes passés de 164 milliards d’euros en 2022 à 100 milliards d’euros en 2023 et à 81 milliards d’euros en 2024. De même, vous avez à juste titre souligné que la principale explication réside dans la réduction de la facture énergétique, qui atteint désormais son niveau de 2019.

Autrement dit, il nous faudra trouver de nouveaux leviers pour poursuivre un retour à la situation de notre balance commerciale d’il y a cinq ou six ans.

Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Votre rapport pour avis commence par présenter un redressement du déficit commercial, qui est passé de 164 milliards d’euros à 81 milliards d’euros entre 2022 et 2024 mais, comme vous l’avez vous-même rappelé, cette réduction est l’effet de la baisse de la facture énergétique, et non d’un sursaut industriel. En effet, hors énergie et matériels militaires, notre balance reste largement déficitaire, de plus de 44 milliards d’euros, soit un niveau bien plus dégradé que celui que nous avons connu avant la crise sanitaire, signe de fragilité structurelle béante.

Tel est aussi le bilan de la stratégie d’attractivité à tout prix promue par Emmanuel Macron. Depuis 2017, au nom de cette attractivité, 60 milliards d’euros de baisses d’impôts et 80 milliards d’aides aux entreprises ont été consentis chaque année. Simultanément, on nous inflige des « effets vitrine » comme ceux annoncés au sommet annuel Chose France, où notre pays fait des courbettes au monde entier.

Mais quelle en est réellement l’efficacité ? C’est ici que le bât blesse. On nous répète à l’envi que la France est championne d’Europe pour attirer les investissements directs étrangers (IDE) mais ce trophée n’est pas réel. Ces IDE arrivent à grand renfort de cadeaux fiscaux et d’aides publiques ; ils sont très peu porteurs d’emplois. Chaque projet étranger ne génère, en moyenne, que 33 emplois en France contre 180 en Espagne, par exemple.

Nous voilà premiers de cordée pour attirer les financiers mais derniers en ce qui concerne l’emploi durable. Dans le même temps, on démantèle absolument tous nos garde-fous. Au sommet Choose France 2025, le président de la République s’est targué d’avoir contribué à supprimer le devoir de vigilance des multinationales, c’est-à-dire à abandonner les rares avancées sociales et écologiques européennes pour mieux séduire les investisseurs. Je vous citerai juste un exemple, celui d’IBM – International Business Machines –, qui annonce 1 800 embauches avant d’en supprimer 1 400 après avoir empoché les crédits publics. Comme toujours avec le capitalisme, on privatise les gains mais on socialise les pertes.

Votre rapport souligne aussi la bonne santé des vins et spiritueux mais soyons clairs : pendant que nos grands crus coulent à flots à l’étranger, nous importons massivement des produits de base que nous ne produisons plus. Notre balance agricole n’est positive que grâce aux boissons et au luxe. Pour les fruits et légumes, le déficit se creuse chaque année. En réalité, nous sommes vulnérables.

Dans un rapport que j’avais présenté en 2023, je proposais de mettre en place des contrats d’implantation pour les investisseurs étrangers, afin d’établir véritablement un rapport gagnant-gagnant et de cesser d’attirer des fonds qui se destinent, par exemple, à la spéculation immobilière, comme 20 % des IDE, à l’heure où nous connaissons tant de problèmes de logement.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous voterons contre ces crédits.

M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Nous assistons à une inversion assez étonnante dans notre balance commerciale : les biens et équipements chutent et les services, notamment les services financiers, nous permettent de nous redresser. Mais cet effet est illusoire, nous peinons à exporter nos biens industriels.

Mme Pascale Got (SOC). Les crédits examinés pour avis traduisent une certaine forme de continuité dans l’effort public en faveur du commerce extérieur et de la diplomatie économique. En revanche, il faut noter la baisse de 8 % de la subvention à Atout France, alors même que l’attractivité touristique constitue un pilier majeur de notre balance des services. Je salue d’ailleurs votre choix, monsieur le rapporteur, d’avoir consacré votre focus thématique à la filière viticole et à l’œnotourisme. Il s’agit en effet d’une ressource stratégique, économique, territoriale mais aussi culturelle et diplomatique.

Comme vous le décrivez, ce pilier du commerce extérieur français est confronté à une crise profonde multifactorielle : recul de la consommation, tensions sur les marchés, aléas climatiques. En conséquence, des adaptations sont nécessaires et l’œnotourisme constitue l’un des leviers à consolider : levier de diversification pour les exploitants ; levier de dynamisation des territoires ; levier d’influence et de rayonnement de la France à l’international ; enfin, amortisseur local des fluctuations du commerce extérieur international.

Le 22 octobre dernier, lors d’une table ronde organisée par le groupe d’études Vigne, vin et œnologie, Hervé Novelli, président du Conseil supérieur de l’œnotourisme et le représentant du pôle œnotourisme d’Atout France l’ont dit très clairement : il faut pour l’œnotourisme un cadre lisible, structuré et des règles simplifiées pour libérer les projets dans les territoires.

Tous deux ont apporté un soutien franc à la proposition de loi (PPL) que j’ai déposée sur le sujet. Elle vise à reconnaître l’œnotourisme dans la loi – comme en Italie – pour lui donner une existence stable, stratégique, mieux piloter le secteur grâce à un baromètre national confié à Atout France et, enfin, simplifier et sécuriser les démarches en urbanisme pour les exploitants qui veulent développer des activités d’accueil et de valorisation sur leurs domaines. J’invite donc celles et ceux qui ne l’ont pas encore fait à signer cette PPL, afin de l’inscrire dans une semaine transpartisane.

Je remercie donc monsieur le rapporteur pour son travail et rappelle notre pleine mobilisation pour une diplomatie économique qui soutient également nos filières d’excellence. Nous voterons donc pour ces crédits.

M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Je partage vos propos et ai cosigné votre PPL, qui porte sur un sujet que vous connaissez bien. Vous êtes élue de Gironde, un département qui a connu un plan d’arrachage des vignes impressionnant et dramatique.

Mme Clémentine Autain (EcoS). J’ai apprécié les propos de notre collègue macroniste, lorsqu’il a relevé que le commerce international est devenu un champ de bataille. Mais dans ce champ de bataille, quel est notre « but de guerre » ?

Depuis trop d’années, trop de décennies, les accords de libre-échange ont organisé le grand « déménagement du monde » et ont ainsi détruit nos industries, notre économie, notre agriculture. Pour moi, le problème majeur se situe ici et je déplore à la fois le revirement du pouvoir en place sur le Mercosur, mais également la position de l’Union européenne face aux agressions trumpistes, notamment sur les droits de douane.

J’ai le sentiment que nous demeurons sidérés devant les États-Unis et la Chine, qui mènent des politiques protectionnistes très offensives et accaparent des marchés, nous poussant à suivre la course de la compétitivité. Mais selon les normes capitalistes actuelles, cette course folle ne nous mène absolument nulle part. Elle ne conduit qu’à détruire de l’emploi, sans nous préparer à faire face aux dérèglements climatiques et aux défis écologiques.

De la même manière, je pense que raisonner en termes de balance commerciale ne nous apporte pas grand-chose. Y gagnons-nous véritablement au change si nos seules exportations sont les ventes d’armes ou les cosmétiques de L’Oréal, qui engraissent une multinationale ? Il est vraiment temps d’en revenir à l’essence de ce que devrait être l’économie : satisfaire les besoins de la population. Pour y parvenir, nous devons investir dans notre propre appareil productif, être capables de nous protéger et de relocaliser l’économie. Malheureusement, ce n’est pas le chemin qui est aujourd’hui emprunté. Il est important de sauver nos viticulteurs. Ne pas s’attaquer au réchauffement climatique ne pourra qu’être préjudiciable à nos producteurs.

Comment être moins dépendants, réindustrialiser, protéger, fabriquer notre propre alimentation nous-mêmes et éviter ce grand déménagement du monde ?

M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Je suis convaincu que les relations commerciales sont devenues aujourd’hui des instruments de puissance. Il faut faire preuve de lucidité, cesser d’être naïfs face aux Chinois ou aux Américains et nous montrer bien plus offensifs si nous voulons préserver nos positions agricoles et viticoles.

Mme Maud Petit (Dem). Il nous est donc demandé aujourd’hui d’examiner les crédits de la mission Économie du PLF pour 2026, et plus particulièrement le financement et le soutien du commerce extérieur.

Votre rapport pour avis témoigne d’un léger mieux de notre commerce extérieur en 2024. Notre déficit commercial a enregistré une amélioration sensible, avec un solde déficitaire de 81 milliards d’euros, contre 100 milliards en 2023 et 164 milliards en 2022. Vous estimez cependant que cette embellie reste fragile et masque des fragilités structurelles. Les chiffres du commerce extérieur pour le premier semestre 2025 vous donnent d’ailleurs raison : notre pays a connu une dégradation très prononcée de son commerce extérieur, avec un déficit de 43 milliards d’euros, soit une aggravation de 4,4 milliards d’euros, qui correspond à une hausse de plus de 10 % par rapport à fin 2024. Cette hausse intervient après quatre semestres consécutifs d’amélioration.

Les causes de cette dégradation sont multiples : un contexte international tendu, marqué par les nouveaux droits de douane décidés par le président américain, qui ravivent la compétition mondiale et accentuent la vulnérabilité de l’économie française ; une dépendance énergétique persistante et une baisse des exportations, notamment d’électricité ; un déficit industriel structurel qui s’est accru de 12 % au premier semestre pour atteindre 27,6 milliards d’euros hors énergie et matériel militaire ; des importations en hausse de 1,9 %, alors que nos exportations n’ont progressé que de 0,7 %.

Seuls les services affichent un excédent de 32,3 milliards d’euros, soit une hausse de 2,8 milliards par rapport au dernier semestre 2024. Ces bons chiffres sont en grande partie dus à la bonne santé de notre tourisme. La France demeure une destination qui attire.

Cependant, le commerce extérieur constitue, avec le déficit budgétaire, l’un des deux principaux points noirs de notre économie. Il faut en effet remonter à 2002 pour retrouver trace d’un excédent de notre commerce extérieur. Dans ce contexte, comment la France peut-elle enrayer cette spirale déficitaire ? Vous disiez à l’instant qu’il fallait se montrer beaucoup plus offensif : comment ?

M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Comment se montrer offensifs ? Tout d’abord, en étant lucides. Le solde positif des services est essentiellement lié à l’activité de nos banques françaises et d’un certain nombre de sociétés de conseil. Est-il durable ? Peut-être pas, dans la mesure où il est pour partie lié au transfert d’activités financières survenu après le Brexit.

M. Jean-Paul Lecoq (GDR). La France est nettement exportatrice de produits de luxe. Pourtant, dans la région havraise, l’entreprise Saverglass, spécialisée notamment dans le flaconnage de verre, a vendu, pour des raisons boursières, sa production de flaconnage à l’allemand Heinz Glass en 2018. Cette filière fonctionnait bien grâce aux investissements en matière de recherche et développement (R&D). Pourtant, des licenciements interviennent aujourd’hui.

Toujours dans la région havraise, le site racheté par le groupe sud-africain Sibanye Stillwater, est actuellement en phase de reconversion, également grâce à la recherche et développement française. L’entreprise a réussi à trouver une solution pour faire évoluer cette raffinerie de nickel polluante en unité de production de précurseurs de matériaux actifs de cathode (PCAM), composants indispensables des batteries électriques. Ainsi, 140 millions d’euros d’argent public sont investis par l’Europe et l’État dans ce projet industriel mais dans le même temps, 100 des 190 emplois sont supprimés.

Un autre exemple concerne l’entreprise américaine Chevron, spécialisée dans les lubrifiants. Sa production était basée sur de l’acide fluorhydrique et nécessitait un périmètre Seveso. La direction française et européenne du groupe a décidé d’investir dans la R&D pour créer un produit de substitution à cet acide, non dangereux, entraînant une réduction conséquente du périmètre Seveso. Cette innovation française a révolutionné la filière et a été exportée à l’international. Pour y parvenir, l’entreprise a pris des risques : une baisse d’activité est intervenue pendant deux ans, affectant les emplois.

En conclusion, il faut financer la R&D. En revanche, les entreprises françaises ou étrangères qui produisent en France et bénéficient de fonds d’aide français ou européens doivent être soumises, en contrepartie, à une obligation de préservation des emplois.

M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Il n’y a pas encore de vigne au Havre mais je suis évidemment d’accord avec vous : il faut préserver et renforcer l’excellence française.

M. le président Bruno Fuchs. Nous en venons maintenant aux questions ou interventions formulées à titre individuel.

M. Michel Guiniot (RN). Monsieur le rapporteur, vous avez choisi d’axer la partie thématique de votre rapport sur l’œnotourisme et particulièrement dans la vallée de la Rioja en Espagne. Je vous rejoins entièrement sur votre analyse de notre potentiel, encore insuffisamment exploité. Personne ne peut contester que la France dispose d’un des patrimoines viticoles les plus prestigieux au monde. Pourtant, Atout France ne consacre aujourd’hui que 430 000 euros à secteur un secteur générant 7 milliards d’euros de retombées économiques chaque année.

Le modèle que vous décrivez fait majoritairement appel à un organisme régional, tandis que l’opérateur Atout France est un organisme national. Vous suggérez donc une réforme d’Atout France. Estimez-vous que son fonctionnement devrait être décentralisé pour correspondre à une échelle géographique peut-être plus cohérente ?

M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. J’y suis effectivement favorable. Je siège au Conseil supérieur de l’œnotourisme (CSO), qui dépend d’Atout France. Atout France aurait beaucoup à gagner à devenir une véritable agence indépendante et non une annexe de certains ministères. De même, elle aurait tout intérêt à adopter une gouvernance partagée, probablement avec l’Assemblée des régions de France.

Je souscris donc à l’idée d’intégrer les territoires – et parmi les territoires, les régions, qui disposent de la compétence sur le tourisme –, mais également les entreprises du tourisme, à la gouvernance de cet opérateur.

M. Frédéric Petit (Dem). La LOLF a imposé de travailler par missions bugétaires mais nous sentons que l’administration conserve des réflexes de « pré carré », une erreur à laquelle nous devons résister. Les agences ont leur utilité lorsqu’elles sont bien conçues, lorsqu’elles offrent des effets multiplicateurs – comme l’Agence française de développement (AFD) – que l’administration ne peut produire de manière prolongée et efficace.

Nous devons préciser notre analyse de ces opérateurs, en soutenant ceux qui ont une valeur ajoutée de gouvernance partagée ; une interface entre l’action publique et les autres partenaires.

M. le président Bruno Fuchs. Il convient à présent d’examiner les amendements.

*

Article 49 et état B : Crédits du budget général

Amendement II-AE160 de M. Jérôme Buisson

M. Jérôme Buisson (RN). L’amendement que je vous propose aujourd’hui vise à supprimer 1 million d’euros alloués aux chambres régionales de l’économie sociale et solidaire (CRESS). Dans un contexte de contraintes financières sans précédent, où chaque euro public doit être utilisé avec la plus grande efficacité, cette mesure s’impose.

Ces chambres, bien que porteuses de valeurs louables, constituent une structure supplémentaire apportant son lot de bureaucratie. Trop souvent, dans le cas de ces structures, les fonds sont utilisés pour des frais de fonctionnement ou des actions redondantes avec d’autres dispositifs publics ou associatifs. Plutôt que de multiplier les couches administratives, nous devons recentrer nos ressources sur des actions directes et ciblées, comme un soutien aux entreprises sociales, locales, les coopératives ou les associations de terrain, qui agissent au quotidien pour l’emploi et la cohésion sociale.

Mes chers collègues, cet amendement ne constitue pas un désengagement envers l’économie sociale et solidaire (ESS).

M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Les CRESS exercent des missions de service public, déléguées par l’État, et très souvent d’ailleurs par les régions. Si je soutiens la recherche d’efficacité de la dépense publique, celle-ci doit s’appuyer sur des résultats mesurables et non pas sur des coupes symboliques.

M. Frédéric Petit (Dem). Si vous défendez l’économie sociale et solidaire, il faut dans ce cas défendre également les CRESS. Si l’on appliquait votre raisonnement au sport, cela reviendrait à faire financer les clubs de football par l’État, au lieu de la Fédération française de football. Or, il faut faire l’inverse. Ces CRESS sont composées de connaisseurs du terrain. L’État aide la structure et, ensuite, chacun effectue son travail. En réalité, vous vous trompez de cible.

Mme Sophia Chikirou (LFI-NFP). Notre groupe votera naturellement contre cet amendement : un amendement purement idéologique, voire obscurantiste.

Les chambres régionales de l’économie sociale et solidaire jouent un rôle fondamental dans les territoires, les régions et les départements. Elles sont aujourd’hui indispensables à plusieurs titres : sur les plans économique, social et écologique. Pourtant, vous proposez de leur retirer encore des crédits, à l’heure où les acteurs de l’économie sociale et solidaire meurent du manque de soutien public. En 2014, lors de sa création, la Banque publique d’investissement avait pour objectif de financer l’économie sociale et solidaire. Malheureusement, l’expérience a été de courte durée, puisque dès son arrivée au ministère de l’économie, Emmanuel Macron a complètement effacé la mission de financement de l’économie sociale et solidaire par la Banque publique d’investissement.

Aujourd’hui, l’économie sociale et solidaire, qui représente pourtant 14 % de l’emploi en France, est le secteur le moins soutenu de notre économie.

M. Vincent Ledoux (EPR). Dans les Hauts-de-France, la CRESS est plutôt bien structurée. Elle est capable d’animer son réseau, de proposer des outils d’accompagnement, aussi bien en formation qu’en financement ou en labellisation. Elle crée des partenariats locaux, est bien identifiée dans le territoire et développe une approche transversale sociale, environnementale, économique. Elle est capable de fédérer les acteurs et de dialoguer avec les collectivités. N’allons pas affaiblir un échelon intermédiaire parfaitement utile pour nos entreprises sociales et solidaires.

Mme Clémentine Autain (EcoS). J’insiste à mon tour sur la nécessité de ne pas retirer de moyens aux CRESS. Lors du Covid, nous nous sommes rendu compte que les entreprises les plus résilientes étaient celles de l’économie sociale et solidaire. La puissance publique devrait davantage accompagner l’ESS, lui permettre de se développer. Elle constitue en effet l’économie la plus juste et mène une série de missions sociales et écologistes, bien plus que nombre de multinationales que vous soutenez.

M. Jean-Paul Lecoq (GDR). Je suis à mon tour surpris par cet amendement. Souhaitez-vous également supprimer, à terme, les chambres de commerce et d’industrie ? Les CRESS participent à la dynamique économique des territoires, qui a besoin de tous les supports, toutes les compétences.

M. Jérôme Buisson (RN). Encore une fois, il ne s’agit pas d’un désengagement vis-à-vis de l’économie sociale et solidaire – nous ne demandons pas la suppression des CRESS – mais d’une mesure d’économie dans un contexte global où nous recherchons des économies.

M. Vincent Ledoux (EPR). Durant toute cette journée, vous avez pratiqué la même tactique lors de l’étude des crédits des différentes missions budgétaires. Vous feignez de ne pas vouloir fragiliser ces missions mais souhaitez en réalité amputer leurs moyens. Je ne comprends pas votre posture.

M. Michel Guiniot (RN). Les circonstances ne sont pas les plus appropriées pour en discuter mais il conviendra de revoir le fonctionnement d’un certain nombre de chambres.

La commission rejette l’amendement.

Amendement II-AE161 de M. Jérôme Buisson

M. Jérôme Buisson (RN). L’amendement d’appel que je vous présente réduit de 1 euro symbolique les fonds alloués à la compensation des coûts indirects du carbone pour les activités électro-intensives. Il vise à dénoncer une aberration économique et politique. L’Union européenne impose un prix du carbone pour inciter à la transition écologique, puis l’État utilise l’argent public pour en atténuer les effets. Alors, comment justifier que de la main droite, il prenne ce qu’il lui rend de la main gauche ?

Le prix du carbone est une mesure inefficace et injuste. Il pénalise nos entreprises, déjà soumises à une concurrence internationale féroce, sans garantir une réelle réduction des émissions. En taxant notre industrie, nous affaiblissons notre économie et délocalisons simplement la pollution, sans aucun bénéfice pour le climat. Pourquoi sacrifier nos emplois et notre compétitivité sur l’autel d’un dogme écologique, qui ne produit pas de résultats escomptés ? L’État impose une taxe, puis doit en atténuer les effets pour éviter de tuer nos industries.

C’est une gabegie. On prend aux entreprises pour leur rendre une partie, affectée par des frais de gestion et une bureaucratie inutile. Plutôt que de jouer à ce jeu comptable, supprimons purement et simplement cette taxe contre-productive, qui ne fait qu’alourdir la charge administrative et financière de nos entreprises.

Au lieu de taxer notre industrie, investissons dans l’innovation, la modernisation des outils de production, le soutien à des filières vertes compétitives. La transition écologique ne se décrète pas par des taxes mais se construit par des solutions concrètes et un accompagnement des acteurs économiques.

M. Jean-François Portarrieu, rapporteur pour avis. Ma lecture est différente. Le mécanisme de la taxe carbone est valable pour toute l’industrie et la compensation des coûts indirects du carbone ne doit surtout pas être appréhendée comme une subvention de confort. Il s’agit d’un mécanisme de survie pour les entreprises industrielles électro-intensives, celles qui consomment beaucoup d’énergie.

Ce secteur est confronté à une concurrence mondiale effrénée, où tous les acteurs ne paient pas le même prix du carbone. En l’absence de ce dispositif, que vous voulez raboter de 1 euro, le risque de délocalisation de nos entreprises vers des pays bien plus émetteurs que le nôtre s’intensifie. Le résultat serait un double échec, à la fois économique et environnemental.

J’émets donc un avis défavorable.

M. Jean-Paul Lecoq (GDR). Député du port du Havre, je rencontre régulièrement des armateurs qui payent cette taxe et s’interrogent sur la manière dont elle pourrait, en partie, être employée dans des investissements de décarbonation. Je pense notamment à l’opportunité de l’industrie vélique, dont la France pourrait être leader mondial. Faisons du temps d’avance dont nous disposons un atout de croissance et d’exportation.

M. Vincent Ledoux (EPR). Je rappelle que cette taxe a pour objet de réduire la consommation d’énergies polluantes mais aussi d’investir dans les solutions plus propres, de financer la recherche de solutions innovantes. Jean-Paul Lecoq a entièrement raison de relever les potentialités du transport vélique pour la France, au même titre que la gestion des déchets.

M. Frédéric Petit (Dem). Ce dispositif remplit un objectif de redistribution, pour ceux qui sont en manque de solutions immédiates. La démarche est extrêmement vertueuse.

M. Jérôme Buisson (RN). Je précise que les activités électro-intensives seront de plus en plus nombreuses. Vous parlez de redistribution mais des infrastructures telles que les data centers ne cesseront de se multiplier. En conséquence, une telle redistribution peut poser problème, à terme.

M. Frédéric Petit (Dem). La recherche permise par cette taxe permet d’envisager des solutions, y compris pour les data centers, dont l’implantation à proximité des villes pourrait permettre d’en récupérer l’énergie pour l’acheminer dans les réseaux de chaleur.

La commission rejette l’amendement.

Puis, la commission émet un avis défavorable à l’adoption des crédits de la mission Économie - commerce extérieur et diplomatie économique.

 

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La séance est levée à 16 h 05.

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Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Nadège Abomangoli, Mme Clémentine Autain, M. Bertrand Bouyx, M. Jérôme Buisson, M. Bruno Fuchs, Mme Pascale Got, M. Michel Guiniot, M. Jean-Paul Lecoq, M. Vincent Ledoux, M. Frédéric Petit, Mme Maud Petit, M. Jean-François Portarrieu, M. Pierre Pribetich, M. Stéphane Rambaud, Mme Marie-Ange Rousselot, Mme Liliana Tanguy, M. Lionel Vuibert

Excusés. - M. Sébastien Chenu, M. Olivier Faure, M. Marc Fesneau, Mme Clémence Guetté, M. Alexis Jolly, Mme Brigitte Klinkert, Mme Amélia Lakrafi, M. Arnaud Le Gall, Mme Marine Le Pen, M. Christophe Naegelen, Mme Mathilde Panot, Mme Sabrina Sebaihi, Mme Michèle Tabarot, M. Vincent Trébuchet, M. Laurent Wauquiez, Mme Caroline Yadan, Mme Estelle Youssouffa

Assistait également à la réunion. - Mme Sophia Chikirou