Compte rendu
Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire
– Audition de M. Nacer Meddah, président de la 3e chambre de la Cour des comptes, sur l’enquête demandée en application du 2° de l’article 58 de la LOLF sur les agences de programmes 2
– Présence en réunion................................14
Mercredi
19 novembre 2025
Séance de 11 heures 30
Compte rendu n° 042
session ordinaire de 2025-2026
Présidence de
M. Éric Coquerel,
Président
— 1 —
La commission auditionne M. Nacer Meddah, président de la 3e chambre de la Cour des comptes, sur l’enquête demandée en application du 2° de l’article 58 de la LOLF sur les agences de programmes.
M. le président Éric Coquerel. Nous sommes conduits à examiner une enquête relative aux agences de programmes, que la Cour des comptes a effectuée à la demande de notre commission et dont le président de la 3e chambre, M. Nacer Meddah, va nous présenter les résultats.
M. Nacer Meddah, président de la 3e chambre de la Cour des comptes. Le 13 octobre dernier, la Cour des comptes a remis à votre commission un rapport sur la mise en place des agences de programmes. La récente insertion de ces agences dans l’écosystème de la recherche publique a pour ambition d’améliorer la capacité de notre pays à mieux piloter ses priorités scientifiques, à y allouer des moyens adaptés et à renforcer l’impact de la recherche dans les domaines sociétaux, économiques et environnementaux. Il s’agit d’éviter que se reproduise ce qui s’est passé lors de la crise sanitaire, à savoir l’incapacité de la France à produire un vaccin en dépit des atouts dont elle disposait pour le faire.
La création des agences de programmes a suscité de nombreuses questions – dont les débats dans les commissions parlementaires se sont fait l’écho – sur leur gouvernance, leur financement, leur articulation avec les acteurs existants et, surtout, leur capacité à défendre une vision stratégique. Ces interrogations ont conduit votre commission à demander à la Cour de réaliser une enquête sur leur mise en place.
La particularité du travail de la Cour est qu’il a porté sur un objet en construction. En effet, l’enquête a été lancée quelques mois seulement après la création du dispositif. Les agences de programmes sont issues d’une proposition figurant dans le rapport sur l’organisation de l’écosystème de la recherche remis au gouvernement par le professeur Philippe Gillet en juin 2023. Annoncée par le président de la République en décembre 2023, la création de sept agences de programmes a été lancée par le gouvernement début 2024, avec l’ouverture d’une phase de préfiguration jusqu’à mi-2025. L’enquête de la Cour, menée entre février et juin 2025, est donc intervenue avant la fin de cette phase de préfiguration. Aussi permet-elle de tirer de premières conclusions, mais pas de porter un jugement définitif.
Une lettre de cadrage précisant le champ de l’enquête avait été adressée par le premier président de la Cour des comptes au président de votre commission en février 2025. Conformément à ce courrier, la Cour s’est attachée à répondre à trois questions. Pourquoi a‑t‑il été décidé de constituer des agences de programmes ? Comment ont-elles été conçues et mises en œuvre, dans leur première année et demie d’existence ? Qu’ont-elles réalisé, et quelles leçons peut-on en tirer ?
Je vous présenterai succinctement les principaux enseignements du rapport à la lumière de ces trois questions.
Premièrement, pourquoi a-t-il été décidé de constituer des agences de programmes ?
Le rapport rappelle les constats partagés et documentés par plusieurs autres rapports, dont celui du député Le Déaut, produit en 2013 dans le cadre de la préparation de la loi Fioraso, et celui du professeur Gillet, produit en 2023 et qui a été à l’origine de la création des agences de programmes.
D’abord, la recherche publique française souffre d’un manque de coordination entre les universités et les organismes nationaux de recherche (ONR). Malgré la coopération scientifique et le partage des moyens au sein des unités mixtes de recherche (UMR), chaque entité conserve sa propre stratégie, souvent sans alignement avec une vision nationale.
Ensuite, la stratégie nationale de recherche, censée encadrer ces dynamiques, est expirée depuis cinq ans et n’a pas été renouvelée, contrairement à ce que prévoit la loi.
Enfin, les instruments de financement, principalement orientés vers le soutien de base aux laboratoires et l’organisation d’appels à projets compétitifs non thématisés, peinent à s’articuler avec les priorités de l’action publique.
La Cour estime donc que la création d’agences de programmes ayant pour triple mission d’animer les acteurs de la recherche sur des sujets prioritaires pour la nation, de bâtir des prospectives scientifiques et de proposer à l’État des programmes de recherche, va dans le bon sens pour traiter cette dernière difficulté.
Sept agences de programmes ont été mises en place : l’agence Agralife, dans le domaine de l’agriculture, de l’alimentation durable, de la forêt et des ressources naturelles, confiée à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) ; l’agence CBSD, dans le domaine du climat, de la biodiversité et de la durabilité des sociétés, confiée au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) ; l’agence Aped, dans le domaine des énergies décarbonées, confiée au Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) ; l’agence Asic, dans le domaine des composants, des systèmes et des infrastructures numériques, également confiée au CEA ; l’agence Numérique, dans le domaine du logiciel et des algorithmes numériques, confiée à l’Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria) ; l’agence APRS, dans le domaine de la recherche en santé, confiée à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) ; l’agence de programmes de recherche spatiale, confiée au Centre national d'études spatiales (Cnes). En pratique, le Cnes jouait déjà un rôle d’agences de programmes. Le rapport traite donc cette agence à part.
J’en viens à la deuxième question. Comment les agences de programmes ont-elles été conçues et mises en œuvre, dans leur première année et demie d’existence ?
Le modèle et le statut des agences de programmes appellent deux remarques. D’abord, la création des agences de programmes prolonge l’expérience acquise avec les programmes et équipements prioritaires de recherche (PEPR) lancés en 2021 dans le cadre du plan France 2030. Dotés de 3 milliards, dont 2,45 milliards programmés à la date d’aujourd’hui, les quarante-sept PEPR sont des programmes de recherche pluriannuels portant sur des thèmes particuliers et dont le pilotage est le plus souvent confié à des ONR. Leur objectif est de concentrer des moyens pour des domaines prioritaires dans lesquels la France doit consolider son avance. Ainsi, confier une mission d’agence de programmes à certains de ces ONR revient à systématiser la logique des PEPR, en inscrivant dans l’architecture de la recherche une approche axée sur la recherche dirigée.
L’État ayant choisi de ne pas créer de nouvelles structures juridiques, le rôle d’agence de programmes s’ajoute à celui d’opérateur de recherche exercé par les ONR, sans s’y substituer. Autrement dit – la précision est utile dans le cadre du débat budgétaire –, les agences de programmes jouent un rôle d’agence, c’est-à-dire d’impulsion, de coordination, de mise en réseau et d’orientation, mais ne sont pas des « agences de l’État » au sens où ce ne sont pas des entités autonomes des organismes nationaux de recherche qui les accueillent. Ce souci d’économie de moyens est appréciable. Il est conforme aux préconisations du rapport Gillet, mais il n’est pas totalement cohérent avec l’intention formulée par le président de la République, qui avait présenté les agences de programmes comme un vecteur de transformation des organismes nationaux de recherche. Si telle reste leur vocation, les conséquences devront en être tirées sur la réforme de l’architecture de la recherche publique. En effet, la mise en place de véritables agences de programmes, distinctes des opérateurs de recherche, conduirait à reconsidérer fondamentalement la répartition des rôles entre les ONR et les universités.
La Cour estime que l’efficacité de la gouvernance des agences, structurée autour de comités de liaison avec l’État et de comités des partenaires, peut être améliorée. Le comité de liaison ne s’est réuni qu’une fois en 2024 et est concurrencé par d’autres instances, comme celles de France 2030 dont dépend le financement des programmes. Cette gouvernance est à perfectionner, mais nous comprenons de nos échanges avec le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche que les choses avancent.
Les moyens alloués au fonctionnement des agences de programmes sont modestes, dès lors que celles-ci ont été « greffées » sur des organismes existants. Au total, les sept agences de programmes sont dotées de 75 équivalents temps plein (ETP) et chacune a bénéficié d’une subvention d’un montant annuel inférieur à 1 million. Seule l’agence portée par l’Inria se distingue, puisqu’elle a intégré sous son drapeau les divers programmes que l’Institut s’était déjà vu confier par l’État.
Enfin, quelles sont les premières réalisations des agences de programmes et quelles leçons peut-on en tirer ?
Le premier enseignement du rapport est que le travail de programmation des agences est réel, mais souffre d’incertitudes pour l’avenir.
À la demande du gouvernement, les agences ont su élaborer quinze programmes nationaux de recherche entre le printemps et l’automne 2024, pour un montant de 355 millions. Ces programmes se distinguent par leur approche ciblée sur des priorités de l’action publique – par exemple, les systèmes d’élevages durables ou les troubles neurodégénératifs – et une réduction significative des appels à projets au profit de financements directs sélectionnés par les agences. C’est un point dont la Cour se félicite. En outre, le gouvernement a amendé cet été la convention relative à la gestion des PEPR conclue entre l’Agence nationale de la recherche (ANR) et le secrétariat général pour l’investissement (SGPI) pour simplifier de manière notable la gestion de la nouvelle génération de programmes. Le rapport salue ces simplifications, mais appelle à en tirer pleinement parti en confiant aux agences de programmes des responsabilités élargies.
La mise en œuvre de la première vague de programmation a été ralentie par l’instabilité institutionnelle et par des processus décisionnels lourds, ce qui a retardé les arbitrages jusqu’à l’été. Le rapport souligne que cette lenteur risque de fragiliser la crédibilité des agences, d’autant qu’au-delà d’une enveloppe de 300 millions réservée sur les crédits de France 2030 et désormais engagée, les financements sont incertains.
La Cour estime que l’ancrage des agences de programmes dans le paysage de la recherche passe donc par l’affectation de financements pérennes à la recherche dirigée, sans opposer celle-ci à la recherche guidée par la curiosité des chercheurs, les deux démarches étant complémentaires. Je précise cependant que la question du montant de l’effort à réaliser et celle de l’équilibre à trouver entre les modalités de financement de la recherche ne figuraient pas dans votre commande, et que le rapport n’aborde donc pas ces deux points majeurs.
Enfin, les frais de gestion des programmes, qui représentent 20 à 25 % des crédits – ce qui correspond à la moyenne européenne et présente l’avantage de simplifier considérablement le chiffrage des projets de recherche –, doivent être maîtrisés en recherchant des marges de simplification dans la gestion des programmes.
Le deuxième grand enseignement de l’enquête est que l’État doit clarifier ses attentes vis-à-vis des agences de programmes.
Durant la phase d’expérimentation, les agences de programmes ont été laissées libres de s’organiser comme bon leur semblait. Certaines, comme le CNRS et l’Inserm, ont adopté une posture relativement prudente en insistant sur leur rôle de coordination et d’animation. D’autres ont opté pour une approche plus directive. C’est notamment le cas de l’Inria. Ces divergences dans l’approche s’accompagnent de différences marquées dans les choix d’organisation, lesquelles dessinent une forme de « jardin à l’anglaise » assez inhabituelle. Nous estimons que cette hétérogénéité, qui s’explique en partie par l’inégale préparation des ONR à la mise en place des agences de programmes et par le degré également variable d’enthousiasme de leurs dirigeants face à cette perspective, ne constitue pas en soi une difficulté – sous deux réserves : d’abord, quelques pratiques communes en matière de gouvernance doivent être généralisées, comme l’inscription des missions des agences de programmes de manière distincte dans les contrats d’objectifs, de moyens et de performance (COMP) des ONR qui les accueillent ; ensuite, dans le cadre du dialogue avec les agences de programmes, l’État devra veiller à ce que le point d’équilibre entre rassurer et décider soit trouvé. Il pourrait, pour cela, s’appuyer sur un certain nombre de jalons d’évaluation des agences de programmes que la Cour propose de mettre en place afin de mesurer, par exemple, la part des financements allant vers d’autres acteurs que l’ONR porteur de l’agence de programmes, la production par l’agence de papiers de position dessinant des orientations stratégiques cohérentes avec les politiques publiques définies dans son domaine par l’État, ou encore la présence d’industriels dans les programmes proposés par l’agence.
Le troisième enseignement de l’enquête est que le lien avec les enjeux d’innovation reste un angle mort. Les programmes de recherche financés par France 2030 doivent produire un impact tangible sur la transformation de l’économie française et des politiques publiques. Pour ce faire, il est nécessaire de prendre en compte, dès l’étape de la conception de certains programmes, les enjeux liés à la valorisation. Sur ce point, le rapport met en évidence l’existence d’un angle mort dans la conception des agences de programmes, qui ne peuvent porter que des projets public-public et qui, trop souvent, n’impliquent pas suffisamment de partenaires industriels. Des améliorations sont attendues sur ce point et nécessitent des échanges interministériels entre le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et Bercy.
Sur la base de ces constats, la Cour formule huit recommandations : confirmer l’existence des agences de programmes en inscrivant leur mission dans les statuts des ONR et dans leurs contrats d’objectifs conclus avec l’État ; proposer un socle commun permettant d’assurer un fonctionnement transparent des agences de programmes, sans chercher à homogénéiser les organisations spécifiques actées pour chacune d’entre elles ; simplifier le processus de validation des programmes nationaux de recherche et opérer au profit des agences une délégation de responsabilité ; maîtriser les frais de gestion et de gouvernance associés à la gestion des programmes ; traduire l’importance donnée à la recherche dirigée dans la répartition des moyens de la recherche publique et inscrire ces derniers dans un cadre financier pluriannuel ; renforcer la prise en compte des enjeux d’innovation et de valorisation en confortant le rôle des acteurs économiques dans la conception, la validation, le financement et le suivi des programmes gérés par les agences ; utiliser les prospectives stratégiques fournies par les agences de programmes dans la conception des politiques publiques ; établir un référentiel commun d’évaluation des agences de programmes fondé sur leurs réalisations.
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial sur les crédits de la mission Enseignement supérieur et recherche. Nous vous remercions pour la qualité de ce rapport, qui constitue le premier travail d’analyse consacré aux agences de programmes, dont nous suivons l’évolution.
L’ambition des agences de programmes est importante, puisque le président de la République leur a confié pour mission de rassembler des écosystèmes de recherche et de faire émerger des programmes d’innovation. À terme, ces agences pourraient piloter une partie des investissements d’avenir – ce que nous espérons. Elles pourraient être un atout pour la recherche scientifique française. En confiant leur pilotage aux grands organismes de recherche, le président de la République a souhaité renforcer le poids des scientifiques dans la politique d'innovation. C’est là l’intérêt principal des agences, selon nous. Mais il en existe d’autres. Ainsi, grâce à votre rapport, nous constatons que les agences de programmes permettent aussi de limiter le nombre des appels à projets, ce qui répond à une demande forte des chercheurs.
Nous tirons deux conclusions sur l’avancée des agences de programme. D’abord, elles ont des modèles très divers. Vous évoquez même un « jardin à l’anglaise ». Selon vous, ce n'est pas un inconvénient, au contraire. Nous partageons cette analyse : la diversité des champs scientifiques ne se prête pas à des formes rigides et il nous semble préférable de donner une grande liberté au pilotage scientifique pour permettre une recherche d’excellence.
M. Mickaël Bouloux, rapporteur spécial sur les crédits de la mission Enseignement supérieur et recherche. La deuxième conclusion est que les agences de programme ont besoin d’un financement. L’échec des alliances thématiques, en 2009, rappelle qu’un soutien pérenne est indispensable pour soutenir les agences. Nous nous inquiétons donc de ne pas savoir si le plan France 2030 aura une suite. Pour l’instant, 300 millions sont consacrés aux premiers programmes de recherche élaborés par les agences, mais qu’en sera‑t‑il à terme ?
Notre rapport du printemps de l’évaluation se penchait précisément sur l’innovation et la valorisation de la recherche. Les agences de programme s’intègrent dans cette dynamique et contribuent à lier la recherche publique et privée. C’est un effort commun que nous devons consentir pour renforcer la dépense de recherche et développement et pour soutenir notre potentiel d’innovation. C’est le sens des questions que nous souhaitons vous poser.
Dans votre rapport, vous dressez des pistes de rationalisation de l’organisation des agences de programmes. Cependant, vous suggérez de préserver la diversité des modèles des agences, qui forment un « jardin à l’anglaise », car elle répond à l’hétérogénéité des champs thématiques. Pouvez-vous nous présenter les forces et les faiblesses de ces différents modèles ?
Par ailleurs, vous soulignez que les agences de programmes pourraient contribuer davantage à l’innovation et qu’elles devraient impliquer plus étroitement les industriels. Avez-vous des préconisations permettant d’aller dans ce sens ? Avec quelle intensité les partenaires économiques, pourraient-ils participer aux agences de programmes ?
Enfin, comment articuler les agences de programme avec les dispositifs existants de valorisation de la recherche – sociétés d’accélération du transfert de technologies (Satt), spin‑off, incubateurs, laboratoires communs ?
M. Nacer Meddah. S’agissant des forces et des faiblesses des différents modèles d’agences de programmes, il est trop tôt pour dresser un bilan définitif et distribuer des bons et des mauvais points, notre contrôle s’étant déroulé dans la phase de préfiguration.
Cependant, notre rapport tire les premières leçons de ce lancement. D’abord, il ne faut pas rechercher l’uniformité. Les présidents des agences de programmes agissent sous l’autorité de leur ministre de tutelle et il est sain de les laisser s’organiser. Ce qui compte, c’est que chaque agence parvienne à la fois à fédérer – ce qui implique une capacité à dialoguer – et à orienter. Il faut donc chercher le point d’équilibre et l’objectiver.
Ensuite, la Cour suggère de bonnes pratiques à généraliser à toutes les agences. Premièrement, la mission de l’agence doit être impérativement inscrite dans les statuts de l’ONR dans lequel elle est hébergée et dans son COMP, comme cela a été fait pour l’Inria et le CNRS. Deuxièmement, il convient d’élaborer un règlement intérieur définissant les responsabilités de chacun. Troisième bonne pratique, l’agence de programmes doit bénéficier de la présence d’un directeur exécutif à temps plein. Il importe aussi de bien calibrer la gouvernance. À cet égard, il faut renforcer le comité de liaison avec l’État – ou le supprimer si on l’estime inutile – et solliciter le comité des partenaires pour les grandes décisions relatives au fonctionnement de l’agence – nomination du directeur exécutif et des directeurs de programmes, par exemple. En outre, la montée en puissance des agences de programmes ne peut se traduire que par un renforcement de leurs effectifs, comme l’a fait l’agence Numérique portée par l’Inria. Cette évolution préfigure celle que devront mettre en place les agences Asic, Aped, APRS, CBSD et Agralife lorsqu’elles seront responsables de nouveaux programmes de recherche.
Voilà pour les forces et faiblesses à ce stade. Nous serons amenés à faire un contrôle in itinere de la mise en œuvre de ces agences de programmes au sein des ONR.
S’agissant de vos autres questions, le rôle des agences de programmes est d’animer l’écosystème public d’innovation et de proposer à l’État des programmes coportés par des acteurs publics, financés sur les crédits du plan France 2030 et correspondant, au moins pour une partie d’entre eux, à des domaines dans lesquels il sera nécessaire d’alimenter les entreprises françaises – énergie, numérique ou santé.
Notre rapport montre que la connexion avec l’industrie se fait grosso modo sur le mode de la consultation au sein du comité des partenaires, mais pas davantage. Nous proposons plusieurs actions pour aller plus loin. La première est une clarification des missions de chacun. L’État confie-t-il le soin de structurer un écosystème d’innovation connecté avec la recherche publique au ministère de l’enseignement supérieur de la recherche, à Bercy, aux agences, aux pôles universitaires d’innovation (PUI) ou au SGPI et à ses satellites comme l’Agence d’innovation en santé ? Chacun sent bien que les attentes de l’État ne sont pas complètement claires. Il existe un sujet de partage des compétences entre Bercy et le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.
La deuxième action consiste à s’assurer de la bonne représentation du monde économique dans les comités des partenaires. Ce n’est pas du tout le cas concernant l’agence CBSD. De manière générale, il faut que le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche sollicite Bercy pour faire un point sur ce sujet et pour assurer la cohérence de l’action gouvernementale.
La troisième action vise à associer les industriels à la conception des prospectives stratégiques. L’enjeu est d’intégrer dès l’amont les besoins d’innovation pour susciter davantage de R&D privée. Le rapport fait un focus sur cette problématique en matière de santé : l’Agence de l’innovation en santé s’occupant de la partie aval, l’agence de programmes de recherche en santé doit être capable de pousser l’écosystème public vers les questions qui ne sont pas encore matures mais pourront être valorisées demain.
La quatrième action est l’intégration des industriels à la gouvernance des programmes de recherche, afin de faciliter le transfert des résultats à l’industrie nationale.
Enfin, la dernière action consiste à permettre aux agences de concevoir et de porter des programmes de recherche directement avec des industriels apportant des cofinancements.
M. le président Éric Coquerel. Dans votre rapport, vous indiquez que les agences de programmes participent à l’équilibre délicat entre la recherche dite guidée par des appels à projets et celle financée par la subvention pour charge de service public que l’État accorde aux organismes de recherche. De mon côté, je m’oppose fermement au financement de la recherche par appels à projets par l’ANR. Ce fonctionnement rend la recherche précaire, l’oriente et demande aux chercheurs des tâches administratives lourdes. Aussi, je défends la suppression de l’ANR et l’apport de financements pérennes pour les laboratoires. La recherche ne doit pas être considérée comme un atout uniquement économique.
Cependant, vous suggérez que les agences de programmes puissent donner lieu à davantage d’appels à projets. Quelle doit être la proportion respective de la recherche dite guidée et de la recherche libre uniquement guidée par la curiosité scientifique ? Quelle part les agences de programmes pourraient-elles prendre dans le rééquilibrage du financement de la recherche ?
Par ailleurs, vous rappelez que les agences de programmes prennent la suite des PEPR. Quel bilan dressez-vous de ces derniers ? Justifie-t-il que soient créées des agences de programmes qui piloteront de futurs programmes de recherche ?
M. Nacer Meddah. On distingue trois modalités de financement de la recherche. Premièrement, le financement de base regroupe notamment les salaires des personnels de recherche et de soutien, les subventions aux laboratoires, les investissements dans les infrastructures. C’est la source de financement majoritaire, avec 23,9 milliards de subventions pour charge de service public versés aux ONR et aux universités sur les crédits de la mission interministérielle Recherche et enseignement supérieur (Mires) en 2024. Ces moyens ne sont pas intégralement destinés à la recherche, mais une partie importante l’est.
Deuxièmement, le financement par appels à projets compétitifs consiste à attribuer des crédits à des projets sélectionnés. Cette modalité est montée en puissance depuis la création de l’ANR en 2005. Son principal instrument, l’appel à projets génériques, a représenté 810 millions en 2024. L’écosystème de la recherche déplore souvent les lourdeurs liées aux appels à projets – nécessité d’une veille, constitution d’un dossier, délais liés au processus de sélection, taux de succès relativement faible, etc. Toutefois, ce système qui existe partout dans le monde permet de susciter des projets intéressants, que des financements dépendant uniquement des décisions des directeurs de laboratoire ne permettraient pas d’accompagner.
La troisième modalité est le financement dit dirigé, qui désigne le fait d’allouer des crédits directement à un programme précis, sans passer par une phase de mise en concurrence. Cette manière de faire est montée en puissance avec les PEPR, dotés de 2,45 milliards depuis 2021, et les agences de programmes, dotées de 300 millions cette année. Le financement dirigé répond à deux préoccupations pour l’État : cibler les sujets qu’il souhaite soutenir et y consacrer des moyens importants. Pour l’écosystème, il permet de réduire le fardeau administratif inhérent aux appels à projets.
Le rapport de la Cour souligne que ces trois modalités de financement sont complémentaires et qu’il ne faut pas les opposer. Les dotations de base permettent de nourrir un terreau de recherche fécond et de qualité. Les appels à projets présentent l’intérêt de tirer le meilleur des chercheurs et de leur donner accès à des financements pluriannuels qu’ils ne trouveraient pas forcément au niveau de leur laboratoire. Les financements dirigés permettent d’accompagner les grandes transformations, sans saupoudrer les moyens entre plusieurs organismes et en réduisant les lourdeurs administratives. La Cour se félicite que le gouvernement ait décidé d’ancrer ce mode de financement dans les réalités administratives en créant des agences auxquelles il peut confier des programmes ou dont il peut exiger des propositions. Elle plaide donc pour qu’il s’inscrive dans la durée. En revanche, le rapport ne se prononce pas sur le point d’équilibre à trouver entre les trois modalités. Les arbitrages de cette question, de nature politique, relèvent de la compétence du Parlement et du gouvernement.
Il faudra aussi voir, dans la durée, comment on arrive à cette complémentarité entre les trois modèles.
S’agissant de votre seconde question, le rapport ne fait pas le bilan des PEPR, ni sur le plan scientifique ni sur celui des moyens – ce n’était pas l’objet de l’enquête. En revanche, il dresse plusieurs constats. Les PEPR répondent à un besoin, celui de traiter des questions scientifiques majeures en faisant coopérer plusieurs organismes sur plusieurs années. Disposer de véhicules budgétaires permettant de financer ce type d’initiatives est essentiel, car elles ne peuvent pas nécessairement être prises en charge sur les budgets des opérateurs et parce que le financement par appels à projets ne permet pas de tracer durablement une ambition.
Autre constat, la création des PEPR a reposé sur des itérations entre l’État – ministère, ANR, SGPI – et le ou les organismes nationaux de recherche chargés de concevoir les programmes qui ont montré que les ONR disposaient de capacités à animer un travail collectif. La création des agences de programmes consacre ce rôle et le systématise.
Le troisième constat est que la gestion des PEPR est trop complexe. La convention sur la gestion des PEPR, conclue en 2021 par l’État et l’ANR, répartit les responsabilités entre un trop grand nombre d’acteurs et induit des complexités à tous les étages. La Cour observe, toutefois, que l’État a pris ce problème en compte en simplifiant, en juillet dernier, le mode opératoire applicable aux agences de programmes.
Enfin, le rapport montre qu’il existe, entre les quarante-sept PEPR déjà lancés et dotés de leur propre gouvernance et les agences de programmes, un certain nombre de chevauchements, d’angles morts et d’incohérences. La Cour plaide donc pour que la supervision des PEPR revienne aux agences de programmes.
M. le président Éric Coquerel. Nous en venons aux questions des orateurs des groupes.
M. Jean-Philippe Tanguy (RN). Depuis 1992, les nations européennes et les gouvernements qui les dirigent promettent de faire passer l’effort de recherche à 3 % du PIB. Or il est toujours à 2 % – en comptant généreusement –, contre 4 à 5 % pour certains de nos compétiteurs comme la Corée du Sud ou Israël. On a beau innover dans la façon de gérer les affaires de l’État et de mener les programmes de recherche, il n’y a pas assez d’argent au regard des enjeux. Que peuvent faire des chercheurs, même très brillants, avec si peu ? À l’impossible, nul n’est tenu. Avec deux fois moins de moyens que d’autres nations développées, ils font déjà beaucoup.
M. Nacer Meddah. L’objectif de ce nouveau dispositif des agences de programmes – qui existe aussi à l’étranger – est de rechercher davantage de cofinancements. C’est indispensable, tant au niveau national et européen, au travers de coopérations avec nos partenaires, qu’au niveau public-public et au niveau public-privé. Il faut donc impliquer davantage les partenaires industriels privés. Il est trop tôt pour se prononcer, mais il faudra voir quelle est la valeur ajoutée des agences de programmes par rapport aux dispositifs existants. Permettront-elles d’aller vers une plus grande complémentarité et vers des financements supplémentaires, et de les orienter vers les domaines dans lesquels notre État doit rester souverain et tenir son rang en matière de recherche, à la fois fondamentale et dans ses développements industriels ? Nous le verrons dans la durée, après la première photographie que j’ai présentée.
Les agences de programmes ne sont pas très consommatrices de crédits et d’emplois, puisqu’elles représentent moins d’une dizaine de millions d’euros et de quatre-vingts ETP. La plupart du temps, qui plus est, ces moyens sont mis à disposition par les ONR.
En tout cas, au regard de son importance, l’effort à consentir pour améliorer les financements de la recherche, ne peut pas simplement reposer sur des moyens publics.
Mme Christine Arrighi (EcoS). Je vous remercie, ainsi que les équipes qui ont travaillé à l’élaboration de ce rapport de grande qualité en raison de sa clarté et de sa profondeur. Vous avez dressé un état des lieux rigoureux, et parfois préoccupant, du fonctionnement des agences de programmes créées dans le sillage de France 2030.
Cette création visait à renforcer le pilotage stratégique de la recherche publique en corrigeant le cloisonnement disciplinaire, la fragmentation entre organismes et le manque de prise en compte des enjeux sociétaux, économiques et environnementaux dans les politiques de recherche. Or le rapport souligne un modèle encore immature, porté par des structures « légères », sans personnalité morale ni gouvernance autonome ou doctrine d’emploi claire. Le constat est assez sévère. Plus encore, vous pointez des zones d’ombre dans la gouvernance de ces agences, dans leur articulation avec des organismes nationaux de recherche et des universités, et dans leur capacité à incarner une transformation structurelle de la recherche publique au service de l’intérêt général, de la bifurcation écologique et de la justice sociale. Nous faisons nôtres ces préoccupations.
Vous évoquez, à juste titre, que la montée en puissance des agences de programmes pourrait conduire à repenser la répartition des rôles entre ONR et universités. Préconisez-vous l’ouverture d’un chantier institutionnel plus vaste pour éviter les redondances, clarifier les missions et construire un vrai pôle public de programmation de la recherche, au service des transitions ?
Conviendrait-il d’ouvrir une réflexion sur la création d’un statut juridique pour ces agences, par exemple sous forme de groupements d’intérêt public ou d’établissements publics, afin de renforcer leur légitimité, leur transparence ou leur efficacité ? Ou considérez-vous qu’en définitive, au regard de leur fragilité et de l’absence de financements suffisants, il conviendrait de revenir à une organisation sans tenir compte de ces agences – qui n’ont pas démontré toute leur efficacité ?
Enfin, faut-il renforcer la place des collectivités territoriales, des acteurs de terrain et de la société civile dans la gouvernance et l’élaboration des programmes ?
M. Nacer Meddah. Envisager une réforme d’ensemble de l’écosystème de la recherche est une question qui taraude la Cour. En 2021, celle-ci a publié une note structurelle intitulée « Les universités à l’horizon 2030 : plus de libertés, plus de responsabilités », qui évoquait la perspective dans laquelle les universités monteraient en puissance dans la recherche scientifique et exerceraient davantage des responsabilités dans les structures de recherche, y compris en matière de ressources humaines. Une telle réorganisation impliquerait de redéfinir le rôle des organismes de recherche, de l’ANR et des agences de programmes. Force est de constater que ce scénario n’est pas à l’ordre du jour. Une partie des universités montent en puissance dans la recherche à travers le rôle d’animation qu’elles exercent par le canal des PUI, mais aussi avec des financements exceptionnels de type Initiatives d’excellence (Idex), Initiatives-science-innovation-territoires-économie (I-Site) ou bioclusters.
De leur côté, les organismes de recherche sortent renforcés de la mise en place des agences de programmes, sans renoncer à leur rôle d’opérateur de recherche – par ailleurs conforté par les moyens nouveaux qui leur sont attribués en application de la loi de programmation de la recherche.
La recherche publique est duale et il faut désormais y intégrer la recherche privée. Je ne réponds pas directement à votre question, mais nous y travaillons au travers de différentes enquêtes, par exemple sur le bilan des établissements publics expérimentaux (EPE) ou sur le fonctionnement des unités mixtes de recherche (UMR). La Cour prévoit aussi de publier, à l’automne 2026, une note structurelle qui examinera l’efficience des moyens consacrés à la recherche.
L’organisation telle qu’elle existe soulève de nombreuses questions. À ce stade, je ne suis pas capable de dire si l’arrivée des agences de programmes est source de simplification ou de complexification. Si les agences de programmes permettent de dynamiser et d’orienter la recherche de financements, et de trouver de meilleures complémentarités et des synergies entre les ONR, le monde universitaire national et européen, et les partenaires industriels, elles seront utiles et auront une valeur ajoutée. Il est trop tôt pour le dire, mais nous allons approfondir ce sujet.
La question de la pérennité des financements est également posée. S’il faut encore investir des centaines de millions d’euros, il faudra déterminer des secteurs et des priorités stratégiques, ainsi que des montants et des modalités de financement. Vu l’état de nos finances publiques, cette pérennité ne pourra pas reposer uniquement sur des moyens publics.
M. Pierre Henriet, rapporteur spécial. Je voudrais souligner quelques ambiguïtés difficiles à ignorer pour notre politique scientifique nationale. D’un côté, les agences de programmes reprennent presque à l’identique les défis sociétaux de la stratégie nationale de la recherche et sont toutes orientées vers des objectifs d’action publique. Mais, de l’autre, certaines disciplines fondamentales n’apparaissent pas. Elles sont pourtant le socle de toute recherche. La Cour note que les sciences mathématiques ne correspondent pas à une thématique homogène et qu’elles n’ont donc pas d’agence de programmes dédiée. Elle fait le même constat pour les sciences humaines et sociales, reléguées au statut de « ressources transversales ». Les chercheurs dans ces domaines apprécieront !
La situation est paradoxale. Les thématiques finalisées sont pilotées par des agences. Les sciences fondamentales sont renvoyées vers un pilotage disciplinaire assuré par les ONR – un pilotage que la Cour qualifie de « déficient ». La stratégie nationale qui devait articuler l’ensemble n’a pas été actualisée depuis 2020. Autrement dit, la France dispose d’un pilotage efficace, sauf pour les domaines qui fondent la science elle-même. Ce n’est pas une critique contre les agences, qui répondent à un besoin réel, mais un appel à ne pas opposer par construction ce qui est finalisé et ce qui est fondamental.
Par ailleurs, la Cour note que l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) n’a évalué la stratégie nationale de recherche qu’une fois et que le pilotage des ONR reste défaillant alors que le pilotage local des UMR fonctionne plutôt bien. La réponse concernant cette non-évaluation par l’Opecst est que, depuis la dernière évaluation, la stratégie nationale de recherche n’a été que peu modifiée. Une nouvelle évaluation a donc été jugée inutile à ce stade. Il pourra, toutefois, y en avoir une à l’avenir.
Ma première question porte sur votre recommandation concernant la délégation de responsabilités. Vous indiquez que la délégation accordée aux agences implique un renforcement du contrôle interne des ONR, faute de quoi la responsabilité ne serait que théorique, sans simplification réelle. Cette délégation sera-t-elle effective, alors que les ONR sont déjà saturés ?
Vous notez que le SGPI ne laissera pas la délégation de gestion, car France 2030 est un dispositif déjà très contrôlé. La Cour rappelle que les PEPR et les nouveaux programmes restent articulés autour de France 2030. Estime-t-elle que le SGPI acceptera réellement de déléguer une partie du pilotage et du contrôle, ou faut-il considérer que les agences n’auront en pratique qu’un rôle consultatif dans un système toujours centralisé par France 2030 ou son futur programme ?
Enfin, je félicite la Cour des comptes pour la signature récente d’une convention avec l’Inrae pour rapprocher le monde de la recherche et celui du contrôle et de l’évaluation des politiques publiques, car « charité bien ordonnée commence par soi-même ».
M. Charles de Courson (LIOT). La Cour des comptes n’a pas eu la tâche facile, dans cette affaire, puisqu’on lui a demandé d’évaluer un dispositif qui n’était pas encore complètement en place.
Les agences de programmes sont localisées auprès d’instituts de recherche, pour essayer de réduire les frais et les coûts de fonctionnement. Mais ne risquent-elles pas de devenir les « porte-flingue » des institutions qui les hébergent ? Le système ne risque-t-il pas de s’inverser ?
M. Nacer Meddah. Monsieur le rapporteur, il est en effet nécessaire de couvrir tous les champs. On peut penser que l’agence CBSD au CNRS pourra couvrir celui des océans, ou que le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), qui est déjà un PEPR, pourra couvrir la question des sous-sols. Par ailleurs, il existe déjà une agence nationale d’innovation de défense. Créée en 2018, elle joue un double rôle d’agence de moyens et d’office de transferts technologiques. Il n’empêche qu’il faudra une mise en cohérence et une véritable complémentarité. C’est la raison pour laquelle nous parlons de « jardin à l’anglaise ». Peut-être pourrons-nous revenir à un « jardin à la française », avec des dispositifs plus rationalisés et cartésiens, couvrant tous les champs. Cela permettrait une évaluation plus pertinente. Aujourd’hui, celle-ci reste « impressionniste ».
Par ailleurs, il est vrai que l’ANR n’a pas été évaluée par l’Opecst depuis 2017. Dans la note structurelle que j’évoquais, nous nous pencherons sur l’ANR. Ce travail est indispensable.
Nous devrons nous assurer dans la durée que la délégation de responsabilités, que nous recommandons, est effective et qu’il n’y a pas de crispation du SGPI, lequel devra de toute façon évoluer, si elles montent en puissance, a fortiori si elles obtiennent un statut. Pour répondre à M. de Courson, il ne faut pas que les agences de programmes soient une simple courroie de transmission avec les ministères, la direction générale de la recherche et de l’innovation du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et le SGPI, et ne veillent qu’aux intérêts de chaque ONR. D’où l’importance du développement progressif d’une forme d’autonomie. Il faudra avancer par étapes, en commençant par s’assurer qu’elles remplissent leur rôle d’orientation et de mise en réseau, car c’est ce qui permettra de couvrir tous les champs. S’il s’agit seulement de servir et de protéger les intérêts des ONR hébergeurs, il faudra s’interroger sur la valeur ajoutée des agences de programmes.
Ce matin, le premier président de la Cour a présenté un rapport stratégique sur l’intelligence artificielle et toutes les politiques publiques, qui supposent aussi des développements en termes de formation. La question de la coordination des politiques stratégiques est essentielle. Les agences de programmes ne doivent pas devenir les outils de leurs hébergeurs. Elles doivent viser à apporter un plus grand rayonnement et des financements, et surtout faire le pont entre la recherche universitaire et la recherche dans les ONR. Ce caractère intégré doit être renforcé. Restons vigilants. Nous serons amenés à suivre la façon dont nos recommandations sont mises en œuvre. Ce suivi est systématique pour les rapports commandés par les commissions parlementaires.
Enfin, je remercie M. le député Henriet d’avoir salué la signature de la convention avec l’Inrae.
M. le président Éric Coquerel. Merci, monsieur le président, pour la qualité de ce travail.
La commission autorise la publication du rapport.
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mercredi 19 novembre 2025 à 11 heures 30
Présents. - Mme Christine Arrighi, M. Karim Ben Cheikh, M. Arnaud Bonnet, M. Éric Coquerel, M. Charles de Courson, M. Emmanuel Fouquart, M. David Guiraud, M. Pierre Henriet, M. François Jolivet, Mme Marie Lebec, M. Jérôme Legavre, Mme Sophie Mette, M. Jacques Oberti, M. Nicolas Sansu, M. Jean-Philippe Tanguy, Mme Andrée Taurinya
Excusés. - M. Christian Baptiste, M. Philippe Juvin, Mme Christine Pirès Beaune, M. Emmanuel Tjibaou
Assistaient également à la réunion. - M. Mickaël Bouloux, M. François Ruffin