Compte rendu

Commission
des lois constitutionnelles,
de la législation
et de l’administration
générale de la République

 

 

 

 Audition de M. Laurent Nuñez, ministre de l’Intérieur  2

 

 


Mardi
21 octobre 2025

Séance de 16 heures 30

Compte rendu n° 4

session ordinaire de 2025-2026

Présidence
de M. Florent Boudié, président


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La séance est ouverte à 16 heures 30.

Présidence de M. Florent Boudié, président.

La Commission auditionne M. Laurent Nuñez, ministre de l’Intérieur.

M. le président Florent Boudié. Monsieur le ministre, nous avons le plaisir de vous recevoir pour la première fois en tant que ministre de l’Intérieur, même si vous avez eu l’occasion de vous présenter à de nombreuses reprises devant cette commission dans le cadre de vos différentes fonctions antérieures. Le bureau de la commission a considéré qu’il était important de vous entendre dès votre prise de fonction.

Nous avons tout d’abord besoin d’être éclairés s’agissant du calendrier législatif. Nous attendons quelques précisions au sujet des projets de loi que le gouvernement pourrait déposer dans les prochaines semaines ou les prochains mois. Ainsi, le premier ministre a évoqué à plusieurs reprises une possible évolution du statut de la police municipale ainsi que des mesures visant à lutter contre les incivilités. Il ne faudrait pas non plus oublier la nécessaire transposition, avant le mois de juin 2026, des dix textes – neuf règlements et une directive – constituant le pacte européen sur la migration et l’asile adopté le 14 mai 2024. Il existe, de mémoire, cinquante à soixante may clauses nécessitant une adaptation au droit français.

Par ailleurs, notre commission a eu l’occasion de travailler sur la question très sensible des actes pris par un gouvernement démissionnaire – je salue le rapport d’information que Stéphane Mazars et Léa Balage El Mariky ont consacré à ce sujet. La lecture du Journal officiel de la République française nous a permis de constater qu’un certain nombre d’actes avaient été pris entre le 10 septembre et le 12 octobre dernier. Pourriez-vous en faire état ?

Enfin, cette audition sera l’occasion d’évoquer votre feuille de route budgétaire, puisque le calendrier très particulier de cette année ne nous permettra pas d’entendre chaque ministre nous présenter les crédits dont il est spécifiquement chargé.

M. Laurent Nuñez, ministre de l’Intérieur. En guise de présentation, je rappellerai simplement que je suis un ministre issu de la société civile, puisque je suis haut fonctionnaire. Ma carrière s’est intégralement déroulée au sein du ministère de l’Intérieur, où j’ai également exercé des fonctions gouvernementales entre 2018 et 2020. En tant que ministre, je serai ouvert au dialogue avec l’ensemble des parlementaires.

Parmi les tâches qui m’attendent, je donne la priorité à la lutte contre le terrorisme et la radicalisation violente. La menace, aussi bien endogène qu’exogène, n’a pas disparu. Je compte donc faire vivre le dispositif antiterroriste mis en place depuis 2017, en m’assurant du dialogue constant entre les services de renseignement et de lutte antiterroriste au sein des structures de coordination adéquates.

S’agissant de la politique de sécurité, j’entends en priorité faire vivre le dispositif de lutte contre les trafics de stupéfiants mis en place depuis 2019 avec la création de l’Office français antistupéfiants (Ofast). Ce dernier renforce la coordination au niveau départemental dans la lutte contre le narcotrafic et la criminalité qu’il engendre – vols, séquestrations, règlements de comptes. Je souhaite faire vivre l’état-major interministériel de lutte contre la criminalité organisée, créé par mon prédécesseur Bruno Retailleau. Animé par la direction nationale de la police judiciaire (DNPJ), il regroupe des services de police judiciaire, des services de renseignement et des services financiers. C’est donc une structure qui a vocation à échanger le maximum d’informations en matière de trafics sur l’ensemble du territoire national. Je ferai vivre, enfin, la loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic, promulguée en juin 2025, qui renforce les capacités d’action de la police, de la gendarmerie et des préfets. Ces derniers doivent pouvoir exercer les pouvoirs de police administrative qui leur ont été confiés, en prononçant notamment des fermetures d’établissements, des interdictions de paraître et des expulsions de locataires impliqués dans un trafic.

J’en viens au volet législatif de ma feuille de route.

Un premier projet de loi, dont la préparation a été commencée par mes prédécesseurs, concerne la sécurité du quotidien. J’envisage de renfoncer les sanctions contre certains actes de délinquance ou comportements nuisant fortement à la tranquillité publique – je pense notamment aux rassemblements festifs ou musicaux illégaux, au port d’armes blanches et aux rodéos urbains. Concernant ce dernier point, certaines mesures pourraient être laissées à la main des préfets ou de la justice, telles que la possibilité de prononcer une suspension du permis de conduire voire une interdiction de le passer si les individus en question sont mineurs. Je réfléchis également à des mesures dans le domaine du sport, car il y a beaucoup trop de violence autour du football. Fort de mon expérience dans ce domaine, j’envisage notamment d’allonger la durée des interdictions administratives de stade et de mieux encadrer les déplacements des supporters en visite, même s’il faut être prudent car les mesures de ce type touchent à la liberté d’aller et venir.

S’agissant du continuum de sécurité, le Conseil d’État est en train d’examiner le projet de loi très attendu sur les polices municipales, que mon prédécesseur a préparé en concertation avec des associations d’élus. Les policiers municipaux constituent la troisième force de sécurité intérieure : ils doivent monter en puissance et pouvoir prendre en charge l’intégralité des missions concernant la tranquillité publique afin que les policiers nationaux et les gendarmes puissent se consacrer pleinement à la lutte contre la délinquance. Le texte prévoit ainsi la possibilité de verbaliser sans acte d’enquête et énumère neuf cas de figure dans lesquels des amendes forfaitaires délictuelles (AFD) pourront être prononcées. Il accorde aussi aux polices municipales le droit d’expérimenter l’utilisation de drones et contient bien d’autres mesures touchant notamment à la formation et prévoyant des allègements réglementaires pour accéder au statut de policier municipal.

Concernant la sécurité civile, les cent propositions issues du Beauvau vont être examinées et donneront lieu à un projet de loi.

La transposition, d’ici à juin 2026, du pacte européen sur la migration et l’asile, qui vise à assurer un meilleur contrôle de nos frontières extérieures, est une priorité. De la même façon, il faudra finaliser le projet de règlement « retour », qui facilitera la réadmission, par les pays tiers, de leurs ressortissants en situation irrégulière. En ce qui concerne la politique migratoire, je continuerai d’appliquer avec beaucoup de fermeté les dispositions adoptées en janvier 2024. Je veillerai à poursuivre l’augmentation des reconduites coercitives à la frontière, même si l’obtention d’un laissez-passer n’est pas toujours simple avec certains pays. Cette politique s’appuiera sur la mise en œuvre du « plan centres de rétention administrative (CRA) », qui prévoit la création de 3 000 places dans les centres de rétention administrative d’ici à 2028. Nous continuerons également de faire preuve d’une grande fermeté en ce qui concerne le démantèlement des filières d’immigration illégale, en nous appuyant sur les instruments bâtis ces dernières années sur ce sujet – je pense notamment aux cellules d’échange de renseignements.

S’agissant de l’action territoriale de l’État, des mesures ont été prises, notamment à l’été 2025, pour renforcer le rôle du préfet et faire de lui le patron des services de l’État. Je vais faire vivre cette politique, qui sera suivie d’un certain nombre de propositions législatives visant à achever la déconcentration de l’État, dans le cadre du nouvel acte de décentralisation annoncé par le premier ministre. Il faudra également préparer les élections municipales de mars 2026.

Je poursuivrai par ailleurs la réflexion, engagée en 2017 et relancée en 2019, sur la question sensible de l’islam politique. En 2017, nous avons construit un dispositif qui visait à lutter contre la radicalisation violente, c’est-à-dire pouvant déboucher sur des actes de terrorisme. En 2019, nous nous sommes intéressés au séparatisme, c’est-à-dire à toutes ces doctrines qui considèrent qu’il existe des lois supérieures aux lois de la République, ce qui est absolument inacceptable.Cela a conduit à l’adoption de la loi de 2021 confortant le respect des principes de la République. Ce texte a créé le délit de séparatisme, qui permet de poursuivre des personnes souhaitant imposer à un agent public une application différenciée des règles du service public afin qu’elles n’entrent pas en conflit avec leur religion. On voit bien que cela ne suffit pas et que nous devons conduire une réflexion, d’ailleurs amorcée par Bruno Retailleau, sur ce qu’on appelle l’entrisme. Moins visible que la violence terroriste ou le séparatisme, qui se traduit par une façon très nette de se démarquer de la société, ce comportement soulève des questions complexes. D’après le rapport commandé par Gérald Darmanin et endossé par Bruno Retailleau, l’entrisme est une forme de séparatisme qui ne dit pas son nom et se dissout dans le fonctionnement normal des institutions républicaines – sauf qu’il n’est pas très républicain et vise finalement à imposer une loi religieuse. Il convient de poursuivre la réflexion sur ce sujet très sensible, notamment au niveau interministériel, et de déterminer si ce phénomène doit donner lieu à des dispositions législatives, dans la mesure où il porte atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation.

En résumé, plusieurs projets de loi sont sur la table : celui sur les polices municipales, qui devrait être présenté rapidement en Conseil des ministres ; celui sur la sécurité du quotidien, qui comportera notamment des mesures de lutte contre les violences dans le sport, les rodéos urbains et les rassemblements musicaux interdits ; un autre également, dont je n’ai pas encore parlé, sur les Jeux olympiques et paralympiques de 2030. Ce dernier comporte plusieurs dispositions qui intéressent le ministère de l’Intérieur, comme le renouvellement de l’expérimentation de la vidéosurveillance algorithmique (VSA), dite intelligente, mise en place pendant les Jeux de 2024. Nous avons constaté qu’elle était extrêmement utile, et en tant que ministre de l’Intérieur, j’aimerais beaucoup en faire un outil de droit commun. Je rappelle qu’il s’agit d’un système d’alerte, qui permet aux opérateurs de vidéosurveillance de détecter une situation anormale. La VSA pourrait donc trouver sa place, également, dans le projet de loi sur la sécurité du quotidien.

J’aurai par ailleurs l’occasion de regarder d’assez près plusieurs propositions de loi, notamment celle sur l’augmentation de la durée de retenue en CRA des individus dangereux. Nous devons bien sûr tirer les conséquences de la censure de cette disposition par le Conseil constitutionnel, mais il est tout aussi évident que la prolongation de cette durée de rétention est une nécessité. À l’heure actuelle, les CRA n’accueillent que des individus présentant des profils à risque, parce que ces derniers sont placés prioritairement en rétention, dans un contexte où nous rencontrons par ailleurs des difficultés à reconduire un certain nombre de ces individus dans leur pays.

Vous me demandez, monsieur le président, quels actes ont été pris par mon prédécesseur pendant la période où le gouvernement était démissionnaire. Afin d’assurer la continuité de l’État, de nombreuses mesures ont été prises dans le domaine des ressources humaines, notamment pour ouvrir les concours du ministère de l’Intérieur. Je mentionnerai également l’arrêté du 10 octobre 2025 relatif au programme, aux épreuves et aux modalités d’organisation de l’examen civique, pris en application de l’article 20 de la loi pour contrôler l’immigration et améliorer l’intégration. Il était nécessaire de publier ce texte, signalé au Premier ministre en amont, pour que les prestataires soient prêts le 1er janvier 2026. Je vous transmettrai à l’issue de l’audition la liste complète des actes pris pendant cette période.

S’agissant enfin du pacte européen sur la migration et l’asile, qui comporte effectivement neuf règlements et une directive, un projet de loi sera déposé d’ici au début de l’année 2026 non pour transposer ces textes, qui sont d’applicabilité directe, mais pour adapter le droit national en raison des may clauses. Au moment de l’entrée en vigueur du pacte, le 12 juin prochain, nous devrons disposer de frontières extérieures sûres et être assurés du filtrage effectué et de notre maîtrise des mouvements secondaires.

M. le président Florent Boudié. Je ne partage pas tout à fait votre lecture juridique s’agissant du caractère urgent de l’arrêté relatif à l’examen civique organisé dans le cadre des procédures de naturalisation. Il y avait des marges de manœuvre possibles au niveau des catégories d’examen que l’on pouvait activer ou non.

M. Laurent Nuñez, ministre. Vous me permettrez d’examiner ce point plus en détail. Cela ne fait que huit jours que je suis ministre de l’Intérieur !

M. Michaël Taverne (RN). Avant de vous interroger, je souhaite rendre hommage à toutes les femmes et tous les hommes qui assurent la sécurité des Français dans des conditions difficiles et très souvent au péril de leur vie. Ils sont les garants de notre liberté, et nos concitoyens le savent pertinemment. S’ils n’étaient pas là, qui défendrait les plus fragiles ? Qui nous protégerait des terroristes et des criminels ? Qui protégerait nos enfants de la barbarie qui sévit dans le pays ? Certainement pas ceux qui les critiquent et les insultent du matin au soir, et qui n’auraient pas le dixième de leur courage ! Il est donc indispensable de tout faire pour les aider quotidiennement dans l’exercice de leurs missions.

Vous le savez, la filière investigation de la police nationale est en crise. Les organisations syndicales et les policiers eux-mêmes lancent l’alerte depuis des mois. Être enquêteur, en particulier officier de police judiciaire (OPJ), est devenu un repoussoir. Les raisons à cela sont multiples. Ce sont, tout d’abord, la complexité et l’alourdissement de la procédure pénale, que même les magistrats reconnaissent ; mais ce sont aussi les dossiers qui s’empilent jour après jour, les contraintes et les responsabilités croissantes des OPJ, les cycles horaires qui ne sont plus adaptés, la mise en opposition des primes OPJ avec les primes dites de voie publique, le logiciel de rédaction de procédure moyenâgeux, et pour couronner le tout, la réforme de la police judiciaire, qui est un échec, malgré les alertes que nous avions formulées auprès de votre prédécesseur, aujourd’hui garde des sceaux. La mobilisation des « péjistes » à Marseille, en octobre 2022, à l’issue de laquelle le directeur, pourtant apprécié et expérimenté, a été débarqué comme un malpropre, est la preuve de la déconnexion de certains, qui privilégient leur petite carrière au détriment de l’intérêt général.

Au moment de l’examen de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur (Lopmi), notre groupe avait déposé un amendement visant à modifier profondément la formation initiale. Nous avions contesté la qualification d’OPJ ; la situation actuelle montre une nouvelle fois que nous avions raison.

Il n’est jamais trop tard pour bien faire. Nous attendons avec impatience de connaître vos propositions, car l’action de votre prédécesseur, pourtant conscient du problème depuis plus d’un an, pourrait être résumée ainsi : ce sont ceux qui en parlent le plus qui en font le moins.

M. Vincent Caure (EPR). Le premier ministre a exprimé la volonté de changer de méthode en développant davantage de projets de loi et moins de propositions de loi, de manière à renforcer le cadre juridique. Vous avez commencé à évoquer le calendrier législatif de votre ministère dans votre propos liminaire, mais j’aimerais revenir sur deux points.

Le premier concerne les polices municipales. Par le passé, vous avez exprimé votre soutien à ces policiers et souligné leur rôle dans le cadre du continuum de sécurité. Or les événements survenus en janvier 2015 à Montrouge, que nous avons tous en mémoire, ont montré la pertinence de l’armement des policiers municipaux. Comptez-vous aborder cette question dans le cadre de vos travaux ?

Le second point concerne le statut de la police judiciaire, qui a fait l’objet de travaux de la part de plusieurs de nos collègues, dont Thomas Cazenave et Ugo Bernalicis. Quelles mesures envisagez-vous pour renforcer l’attractivité et lutter contre la désaffection de cette filière ?

Mme Élisa Martin (LFI-NFP). La langue et la culture sont des vecteurs d’intégration, et plus encore d’autonomie des personnes dans leur environnement. Dans la droite ligne de la loi « immigration » de 2024 et de tous les textes adoptés dans ce domaine depuis les années 1980, l’objectif du gouvernement est de restreindre l’accès et les possibilités d’installation sur notre territoire. Les conditions à remplir ne cessent d’être durcies. En témoigne la difficulté encore accrue, validée par votre prédécesseur, de l’un des dispositifs – je veux parler de l’examen civique, qui vise à évaluer la maîtrise de la langue et de l’environnement culturel français.

La réussite à cet examen détermine l’obtention d’une carte de séjour pluriannuelle, d’une carte de résident ou de la nationalisation. Il s’agit d’un questionnaire à choix multiples (QCM) dont la validation nécessite 80 % de bonnes réponses. Dans un premier temps, le niveau requis équivalait au niveau B1, déjà élevé puisqu’il correspond au niveau du brevet des collèges. Or votre prédécesseur, M. Retailleau, a décidé d’exiger désormais le niveau B2, qui correspond au niveau nécessaire pour accéder à l’enseignement supérieur. Il est ainsi demandé de connaître l’histoire de la laïcité, l’organisation tripartite des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, leur rôle et leurs principaux acteurs. Il faut également connaître et comprendre le découpage administratif et institutionnel de la France, la typologie des infractions, ainsi que les fondements de l’Union européenne et de ses institutions.

Par comparaison, un quart des Français ont au mieux le niveau du brevet des collèges. Est-ce à dire qu’ils ne pourraient pas prétendre à la nationalité française ou accéder à un séjour long ? Bien sûr que non, évidemment ! Face à un obstacle aussi insensé au séjour ou à la naturalisation, allez-vous revenir sur cette mesure ?

M. Hervé Saulignac (SOC). Vous avez récemment déclaré que la tension actuelle entre la France et l’Algérie, qui empêche toute relation et tout échange sécuritaire entre nos deux pays, était un très gros problème. Cette rupture de coopération avec un partenaire historique et stratégique sur le plan migratoire ou en matière de lutte contre la criminalité organisée constitue en effet un très grave problème, que nous avons tenté de souligner à plusieurs reprises auprès de votre prédécesseur, M. Retailleau, qui n’a eu de cesse de dégrader, par son attitude provocatrice, nos relations avec l’Algérie, et d’exploiter cette situation à des fins tout à fait démagogiques et politiciennes, au mépris, parfois, de la sécurité dont il avait pourtant la charge.

J’aimerais donc connaître l’état de nos relations avec l’Algérie, et plus encore les actions concrètes que vous comptez engager pour rétablir cette coopération absolument essentielle à nos yeux.

M. Patrick Hetzel (DR). Notre groupe voudrait vous interroger sur la lutte contre la menace terroriste et les risques de radicalisation.

D’après un récent rapport de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), 70 % des individus radicalisés le seraient par le biais des réseaux sociaux. Comment comptez-vous lutter contre cette radicalisation en ligne ?

Selon le même rapport, seuls 30 % des individus radicalisés sortant de prison font l’objet d’un suivi post-carcéral renforcé. Quelles mesures comptez-vous prendre pour améliorer ce taux et éviter les récidives ?

Enfin, les données semblent indiquer que 40 % des interpellations pour apologie du terrorisme concernent des mineurs âgés de 15 à 18 ans. Envisagez-vous la mise en place d’un programme national de déradicalisation des mineurs, et à quelle échéance ?

Mme Léa Balage El Mariky (EcoS). Mes questions porteront essentiellement sur le volet immigration. Je m’étonne à ce sujet que vous n’ayez mentionné dans votre propos liminaire que les reconduites à la frontière, et non le pilotage du programme 104, dont votre ministère a pourtant la responsabilité.

S’agissant de la politique des titres de séjour, je voudrais souligner tout d’abord un angle mort de votre budget : aucun poste supplémentaire n’est créé en préfecture, alors que les délais de traitement des dossiers explosent. Rien n’est fait non plus pour corriger les dysfonctionnements de l’administration numérique pour les étrangers en France (Anef), dont le coût financier s’est envolé de plus de 200 %. Et ce n’est rien au regard du coût humain : des milliers de personnes perdent leur emploi, leur logement et leurs droits sociaux, simplement parce qu’elles n’arrivent pas à renouveler leur titre de séjour dans les temps. Alors que ces ruptures sont fréquentes, le bleu budgétaire ne contient aucun indicateur visant à mesurer l’efficacité de l’Anef. On ne peut pas piloter une politique migratoire en fermant les yeux sur ses propres défaillances.

Je voudrais ensuite évoquer la hausse des droits de timbre annoncée pour 2026. Cette hausse reviendrait sur le principe de baisse qui avait été proposé de manière transpartisane, à la suite d’un rapport corédigé par deux députés des groupes La République en marche et Les Républicains, et qui avait été intégré dans le projet de loi de finances pour 2020. Il est question de majorer de 100 euros le montant du droit de timbre pour les autorisations provisoires de séjour, et de l’augmenter de plus de 360 % pour les demandes d’accès à la nationalité française. Ce n’est pas là une modernisation, mais une double peine, administrative et financière, qui fait de la nationalité un privilège censitaire alors qu’il s’agit d’un engagement.

En matière d’intégration, les crédits stagnent, en particulier pour les deux leviers essentiels que sont la langue et l’emploi. On ne peut pas faire de la maîtrise du français et de l’insertion professionnelle des critères de régularisation tout en laissant les collectivités et les associations sans moyens. Il s’agit là d’une contradiction très grave, qui représentera sur le terrain une véritable bombe sociale.

J’attends enfin de connaître la position du gouvernement sur la directive « retour ». La France continuera-t-elle de défendre le principe de non-refoulement et le respect du droit international ?

M. Éric Martineau (Dem). J’aimerais évoquer avec vous la progression préoccupante du trafic de cigarettes, qui n’est pas sans lien avec le trafic de stupéfiants et la délinquance juvénile. Quinze tonnes de cigarettes ont été saisies ces dernières semaines, et huit usines clandestines ont été démantelées en trois ans. Le trafic de tabac est une réalité : à l’échelle européenne, il se déroule à 50 % en France. Selon plusieurs rapports des douanes et des forces de sécurité intérieure, ce commerce illicite représente une part significative de l’économie souterraine dans certains territoires urbains et périurbains. Les bénéfices tirés de ces ventes alimentent parfois les mêmes réseaux que ceux impliqués dans le trafic de drogue, favorisant l’émergence de véritables zones grises où les trafiquants diversifient leurs sources de revenus. Je le vois bien dans mon département. Les enquêtes de terrain montrent également qu’un nombre croissant de mineurs sont impliqués dans ces trafics, souvent attirés par des gains rapides, ce qui peut malheureusement les installer dans la délinquance organisée.

Quelles actions entendez-vous mener pour lutter contre le trafic de cigarettes en coordonnant les services de police, de gendarmerie et les douanes ? Quelles mesures spécifiques envisagez-vous pour empêcher l’enrôlement de mineurs dans ces réseaux, notamment à travers des politiques de prévention et de réinsertion adaptées ? Dans la Sarthe, nous sommes confrontés à un vrai problème de délinquance juvénile, qui pousse à s’interroger sur le rôle des services de l’État, notamment de police et de gendarmerie, dans la détection et le suivi des jeunes concernés. Comment améliorer la coordination entre police, gendarmerie, renseignement territorial et acteurs locaux de la sécurité pour mieux combattre ces phénomènes de bandes ?

M. Xavier Albertini (HOR). La loi du 19 mai 2023 relative aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024 a autorisé l’expérimentation de la VSA pour assurer la sécurité des manifestations, notamment sportives, particulièrement exposées à des risques. Ces caméras augmentées, dont l’expérimentation a pris fin le 31 mars dernier, présentaient des garanties suffisantes en matière de protection de la vie privée, grâce à un décret d’application pris après consultation de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil). Les mesures concernées incluaient une information préalable du public, une exigence de contrôle humain ainsi qu’une formation systématique des personnes habilitées à accéder aux signalements. Point important : aucune technique de reconnaissance faciale ni aucun système d’identification biométrique n’étaient autorisés. La loi du 28 avril 2025 relative au renforcement de la sûreté dans les transports prévoyait de prolonger l’expérimentation de la vidéosurveillance algorithmique jusqu’au 1er mars 2027, mais le Conseil constitutionnel a censuré cet article au motif qu’il était un cavalier législatif.

Vous avez affirmé dans votre propos liminaire que vous étiez favorable à une réintroduction de la VSA, voire à son usage comme outil de droit commun. Le recours à cette technologie a effectivement été très utile dans le cas de la sécurisation des Jeux olympiques et paralympiques. Toutefois, le rapport du comité d’évaluation a souligné certaines limites, telles que la performance inégale de la VSA en matière de détection d’objets abandonnés et d’armes à feu, ou encore le fait que l’intérêt de cette technique était subordonné à la mise en œuvre du traitement pendant une durée suffisamment longue. Avez-vous en tête des pistes concrètes pour pallier ces limites ? À quel véhicule législatif envisageriez-vous de recourir ?

Par ailleurs, dans le cadre des prochaines élections municipales, comptez-vous lever le moratoire de 2008 sur les machines à voter, ce qui permettrait aux communes déjà équipées, comme Le Havre ou Épernay, dans mon département, de remplacer leur matériel vieillissant par des modèles de nouvelle génération offrant davantage de fiabilité, d’accessibilité et d’efficacité, et éventuellement à d’autres communes de s’en doter à leur tour ?

Mme Elsa Faucillon (GDR). Je discerne en vous écoutant une volonté de changement sur la forme par rapport à votre prédécesseur. Étant donné les mots blessants, stigmatisants et parfois clairement xénophobes qui étaient les siens, on pourrait s’en contenter. J’ai du mal, en revanche, à percevoir la rupture sur le fond qu’évoquait récemment le premier ministre. Peut-être en serez-vous l’incarnation ; je reste néanmoins lucide sur ce point.

Ma première question porte sur la signature in extremis par Bruno Retailleau, alors ministre démissionnaire, d’un arrêté qui détaille les modalités de l’examen que devront passer les demandeurs de la nationalité française. Cet examen a tous les contours d’une machine à exclure, étant donné la quantité de connaissances exigées et la qualité de questions qui ont parfois peu de rapport avec une insertion ou une inclusion dans la société française. Vous qui avez dit préférer le mot « intégration » au mot « assimilation », allez-vous abroger cet arrêté ?

J’appelle ensuite votre attention sur les délais d’attente en préfecture, au service des étrangers, qui ne sont pas dignes d’un service public. Ces délais entraînent des ruptures de droits : des gens perdent leur travail, leurs prestations sociales, et ne peuvent pas accéder à un logement. Tous les préfets le reconnaissent. Il y a besoin de plus de postes en préfecture : cette augmentation est-elle prévue dans le budget ? Il y a besoin d’une attestation de prolongation d’instruction automatisée : est-ce prévu ? Le Conseil d’État réclame une alternative à la dématérialisation : est-ce prévu ?

Enfin, dans le cadre du budget opérationnel de programme (BOP) 104, allez-vous proposer des mesures visant à faire de la langue française non pas un outil d’exclusion, mais un outil de partage et d’intégration républicaine, en permettant à celles et ceux qui sont déjà dans la société française et ont déjà un titre de séjour de continuer à apprendre notre langue ?

Mme Sophie Ricourt Vaginay (UDR). Les Français attendent avant tout de l’État qu’il les protège. Or, à la lecture du budget 2026, on constate un déséquilibre profond. La mission Immigration, asile et intégration atteint un niveau record de dépenses, avec plus de 153 000 demandes d’asile en 2024, des budgets toujours en hausse pour l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) et l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii), et des moyens accrus pour l’accueil et l’hébergement. Dans le même temps, les crédits de la mission Sécurités n’augmentent que de 2,7 % alors que la délinquance progresse et que seule une minorité d’obligations de quitter le territoire français (OQTF) sont exécutées.

Vous avez créé des pôles « France asile » pour accélérer les régularisations ; quand créerez-vous des pôles « France sécurité » pour exécuter les éloignements ? L’UDR défend un principe simple : le budget de votre ministère doit être centré sur la sécurité des Français. Chaque euro dépensé doit d’abord et avant tout renforcer la protection, l’ordre public et la souveraineté nationale, car un État juste ne finance pas son impuissance, mais sa souveraineté. Nous demandons que les crédits d’intégration soient désormais conditionnés par des résultats concrets – maîtrise du français, respect des lois, engagement civique – et que les crédits d’éloignement soient sanctuarisés et pleinement exécutés.

Enfin, nous souhaitons exprimer notre grande inquiétude au sujet de la transposition du pacte européen sur la migration et l’asile, qui devra être achevée avant juin 2026. Ce texte, s’il est appliqué sans discernement, risque d’accroître encore la pression migratoire sur notre pays et de diluer la souveraineté française dans la gestion de nos frontières et de notre droit d’asile. À l’heure où nos concitoyens doutent de la capacité de l’État à les protéger, choisirez-vous d’appliquer des normes européennes à la façon d’Ursula von der Leyen ou de défendre la souveraineté et la sécurité de la France ?

M. Philippe Bonnecarrère (NI). Je partage le constat de plusieurs de mes collègues quant à l’engorgement des bureaux des étrangers dans nos préfectures. Les quelques postes existants sont souvent occupés, avec une rotation importante, par des contractuels relativement peu formés, quels que soient leurs mérites, alors qu’ils pratiquent l’une des matières les plus délicates dans le domaine juridique. Ainsi, il y a des blocages, et nous sommes, pour notre part, constamment sollicités pour savoir où en est telle ou telle demande de renouvellement.

La situation est devenue absolument improductive. Plutôt que d’augmenter le nombre de postes, peut-être serait-il plus simple de rationaliser la liste des types de titres de séjour, qui sont, à ma connaissance, au nombre de 108 – je souhaite bon courage aux fonctionnaires de préfecture à qui l’on demande d’instruire « à 360 degrés » ! La direction générale des étrangers en France (DGEF) refuse pour l’instant toute simplification, expliquant que la diversité des pièces et des délais assure le bon verrouillage du dispositif. Je peux comprendre cet objectif, mais je pense que le résultat est exactement inverse et que le système dysfonctionne. Pourriez-vous accepter une rationalisation des titres de séjour, sur le modèle de la rationalisation des dispositions applicables en matière de contentieux des étrangers ?

M. Laurent Nuñez, ministre. Monsieur Taverne, Bruno Retailleau a demandé au directeur général de la police nationale de lui faire des propositions au sujet de la filière investigation, qui m’ont été communiquées et qui doivent désormais être discutées avec les organisations syndicales. De fait, la filière n’est plus attractive. Qui plus est, la procédure est devenue compliquée, ce qui entraîne la constitution d’un important stock de dossiers, y compris pour des cas de délinquance du quotidien qui intéressent directement nos concitoyens. Nous devons mettre le paquet pour résorber ce stock. Nous réfléchissons donc à un plan d’attractivité, qui inclurait un renforcement des moyens humains au sein de la filière ainsi que d’autres mesures, notamment sur la formation et la procédure pénale. Je ne sais pas si nous parviendrons à alléger cette dernière, mais toutes les mesures de simplification et de numérisation sont bonnes à prendre. Quoi qu’il en soit, je vous confirme qu’il y aura bien un plan, qui fait l’objet d’attentes fortes des organisations syndicales.

Je n’ai aucune raison de remettre en cause la réforme de la direction générale de la police nationale (DGPN), d’autant que j’ai moi-même lancé la réflexion à ce sujet à l’époque où j’étais membre du gouvernement. L’idée, je le rappelle, était de créer plusieurs filières homogènes et rationalisées – y compris une filière judiciaire –, avec un chef de file, dans le but de traiter les dossiers de manière uniforme. Un bilan, commandé par M. Retailleau, doit m’être communiqué dans les jours qui viennent. Des ajustements sont envisageables, sans aller jusqu’à une remise en cause de la réforme.

Monsieur Caure, le projet de loi sur les polices municipales est examiné en ce moment même par le Conseil d’État. À l’heure actuelle, 80 % des 4 500 polices municipales sont armées, et 59 % sont dotées d’armes létales. En vertu du principe de libre administration des collectivités locales, auquel les élus sont attachés, le projet de loi ne prévoira pas d’obligation d’armer les polices municipales. À titre personnel, je considère cependant que cela devrait être le cas, dans la mesure où les policiers municipaux peuvent devenir des cibles et être amenés à agir de manière dissuasive – nous avons tous en tête le décès de Clarissa Jean-Philippe, policière municipale à Montrouge tuée par un terroriste en janvier 2015.

Monsieur Saulignac, nous restons évidemment attentifs à la situation de Boualem Sansal et de Christophe Gleizes. Il est vrai que les relations avec l’Algérie sont compliquées en ce moment : nos homologues n’acceptent de reprendre aucun des individus, parfois dangereux, que nous voudrions reconduire à la frontière. Étant donné l’importance, en matière d’antiterrorisme et de lutte contre la criminalité organisée, du canal sécuritaire avec l’Algérie, nous ne pouvons pas continuer à ne pas avoir de relations sécuritaires avec ce pays. En tant qu’ancien directeur général de la sécurité intérieure et ancien coordinateur national du renseignement, je souhaite que nous sortions de ce bras de fer au plus vite et que nous trouvions rapidement, dans le cadre d’une discussion globale, des solutions diplomatiques à ce blocage.

Madame Martin, je ne reviendrai pas sur l’arrêté signé par M. Retailleau au sujet de l’examen civique, qui est un texte d’application de la loi de janvier 2024.

Monsieur Hetzel, la DGSI et les services de renseignement travaillent ardemment à la détection de la radicalisation en ligne. Il est vrai que c’est en grande partie en ligne que se passe la radicalisation des plus jeunes, qu’il s’agisse du terrorisme islamiste ou de mouvements d’ultra-droite ou d’ultra-gauche dont je n’ai, pour ma part, jamais négligé les risques. Ainsi, dans les derniers attentats déjoués par la DGSI, les jeunes terroristes adhérant à la cause défendue par l’État islamique s’étaient radicalisés en échangeant sur les réseaux sociaux. Cela implique une forte présence des services de renseignement dans ces espaces afin d’y détecter les contenus problématiques, de faire déréférencer le plus rapidement possible les sites concernés et d’interpeller les individus qui doivent l’être.

S’agissant du suivi post-carcéral, je ne peux vous confirmer le chiffre d’un tiers des individus sortants que vous évoquez. Je peux vous dire, en revanche, que tous les individus condamnés pour des faits de terrorisme sont systématiquement suivis à l’issue de leur détention, grâce à un processus mis en place en 2018 au sein de l’Unité de coordination de la lutte antiterroriste (Uclat), qui est un organe de la DGSI. Si des individus ne sont plus suivis à l’heure actuelle, c’est qu’ils ne présentent plus de danger de radicalisation : dans un État de droit, il n’y a en effet pas de raison de continuer à les surveiller.

Je n’ai pas parlé, lorsque j’ai évoqué ma feuille de route, de la stratégie nationale de prévention de la délinquance, à laquelle ont travaillé François-Noël Buffet et Bruno Retailleau, et avant eux Sabrina Agresti-Roubache. Cette stratégie, que je rendrai publique avant la fin de l’année, comprendra des mesures relatives à la déradicalisation des mineurs. Des programmes de déradicalisation sont également mis en place au niveau départemental, dans le cadre des cellules de prévention de la radicalisation et d’accompagnement des familles (Cepraf). Le principal enjeu demeure la détection de cette radicalisation, car le passage à l’acte est souvent très rapide – parfois de l’ordre de quelques semaines – chez les jeunes concernés.

Madame Balage El Mariky, vous m’avez interrogé sur le pilotage du programme 104 et sur les perspectives de recrutements en préfecture. Je vous confirme que 50 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires sont prévus pour 2026. Il a été décidé d’aligner les droits de timbre sur le tarif moyen pratiqué par les autres États membres de l’Union européenne. S’agissant enfin des leviers d’intégration que sont la langue et l’emploi, le maintien des crédits versés aux associations, concernant notamment les formations, est garanti dans le projet de budget. J’ai pris note de votre remarque sur l’éventuel besoin de formations supplémentaires que pourrait entraîner le durcissement de l’examen civique.

Monsieur Martineau, je confirme votre constat au sujet du trafic de tabac. Ce dernier prend une certaine ampleur, au point de s’organiser parfois comme le trafic de stupéfiants, avec des guetteurs, des vendeurs et des personnes de plus en plus jeunes impliquées dans les réseaux. Il donne également lieu, depuis quelque temps, à des règlements de comptes extrêmement violents entre trafiquants.

La vente au détail est un monopole d’État. La lutte contre la contrebande relève d’abord des douanes, mais des conventions de partenariat, déclinées dans la quasi-totalité des départements, ont été conclues entre le ministère de l’Intérieur, le ministère de l’Économie et la Confédération nationale des buralistes. Les buralistes sont incités à signaler les trafics, et nous avons mis en place, avec les douanes, des plans de lutte contre le trafic de tabac. Je pense en particulier aux opérations Colbert, qui mobilisent régulièrement tous les services de police et de douane sur l’ensemble du territoire national. Ces opérations « coup de poing » ont également permis de saisir des cigarettes de contrefaçon, particulièrement nocives pour la santé. J’ai sous les yeux le bilan de l’opération Colbert 2, menée en mars 2024 : elle a conduit à la saisie de 27 tonnes de tabac et de 33 millions de cigarettes, ainsi qu’à l’interpellation d’une centaine de personnes en l’espace d’une semaine. Il faut également mentionner le travail effectué par les forces de sécurité intérieure sur la voie publique contre la vente de tabac à la sauvette.

La lutte contre le trafic de tabac fait donc bien partie de nos priorités, dans la continuité de la loi du 18 juillet 2023, qui a donné aux douanes les moyens de faire face aux nouvelles menaces et qui a durci les sanctions en la matière.

Monsieur Albertini, nous sommes globalement assez satisfaits de l’expérimentation relative à la VSA, même si elle n’a, du point de vue technique, pas toujours fonctionné comme on le voulait : il y a un certain nombre de réglages ou de paramétrages assez fins à mettre en place, ce qui prend du temps. Concrètement, la vidéo augmentée aide les opérateurs à détecter une présence dans un lieu où il ne devrait pas y en avoir, à repérer un endroit où des flux anormaux se croisent, et à remarquer une densité de foule inattendue. Les événements de ce dimanche doivent nous faire réfléchir à son utilité.

L’expérimentation a été prévue pour de grands événements, c’est-à-dire pour des circonstances dans lesquelles on déploie un dispositif policier important incluant des gendarmes et des militaires de l’opération Sentinelle. Dans ce contexte, les effectifs de terrain repèrent d’eux-mêmes l’événement sur lequel alerte la VSA. C’est la raison pour laquelle j’aimerais, à l’instar de mes deux prédécesseurs, proroger cette expérimentation dans la sécurité du quotidien. Je suis plus prudent pour ce qui concerne la reconnaissance faciale, plus compliquée à mettre en œuvre et avec laquelle, à titre personnel, je ne me sens pas complètement à l’aise.

S’agissant des machines à voter pour les élections municipales, le moratoire décidé en 2008 était indispensable pour répondre aux critiques relatives à la fiabilité du vote électronique. En 2021, le gouvernement a remis au Parlement un rapport qui s’appuyait sur les préoccupations de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi). En mars 2023, un groupe de travail technique a réuni des représentants des services du ministère, de l’Anssi et de la société France Élection. Nous réunirons prochainement un groupe de travail politique, qui rassemblera les élus des communes concernées et les parlementaires intéressés pour examiner les conditions d’une éventuelle levée du moratoire. En tout état de cause, la décision finale devra respecter les préconisations de l’Anssi afin de garantir un degré élevé de confiance et de sincérité du scrutin, dans le contexte actuel marqué par les ingérences étrangères et le complotisme.

Madame Faucillon, je n’emploierai pas les mêmes mots que M. Retailleau, afin de ne pas prendre le risque de blesser une partie de nos concitoyens d’origine étrangère, mais pour avoir travaillé un an avec lui, je peux vous assurer que mon prédécesseur n’est pas xénophobe.

Vous m’avez interpellé au sujet des délais d’attente en préfecture pour le renouvellement des titres de séjour. Nous travaillons à y remédier. Les services ont été renforcés grâce à des redéploiements internes en 2025, en amont de la création d’une cinquantaine d’ETP en 2026. Le fonctionnement de l’Anef a été fluidifié grâce au lancement de l’application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (Agdref). Les dysfonctionnements qui subsistent sont dus à l’ancien système d’information.

Madame Ricourt Vaginay, nous consacrons beaucoup de moyens à l’éloignement. Il faut savoir que le processus repose en grande partie sur des mutualisations : en Île-de-France, par exemple, la préfecture de police procède aux placements en CRA et aux éloignements pour l’ensemble de la région. En raison des difficultés que nous rencontrons pour obtenir certains laissez-passer, nous ne pouvons pas reconduire autant que nous le voudrions les étrangers en situation irrégulière, sous le coup d’une OQTF voire d’un arrêté préfectoral ou ministériel d’expulsion. Nous manquons également de places en CRA ; c’est le sens du projet de création de 3 000 places supplémentaires dans ces centres.

En ce qui concerne le pacte européen sur la migration et l’asile et le règlement « retour », je veillerai bien évidemment, au moment des négociations, à ce que la France conserve son autonomie et une capacité d’éloignement qui lui soit propre.

Monsieur Bonnecarrère, je termine avec votre question, qui portait sur la rationalisation des 108 types de titres de séjour et sur la possibilité de ne pas procéder à l’instruction des demandes « à 360 degrés ». En réalité, il existe cinq grandes catégories de titres de séjour, et la loi de janvier 2024 a simplifié la catégorie des titres « talent ». Il me paraît cependant important que notre droit réponde à chaque catégorie de personnes qui demandent des titres. Nous veillons par ailleurs à augmenter les effectifs des agents chargés de ces missions au sein des préfectures : grâce aux redéploiements déjà réalisés et à la création de 50 ETP prévue en 2026, les services ont ainsi bénéficié de 153 postes supplémentaires depuis 2023.

M. Jonathan Gery (RN). On entendait dernièrement, sur une chaîne de télévision, les propos suivants : « Les chiffres sont ce qu’ils sont. Je vous disais, il y a 10 % des mis en cause qui sont des mineurs. Les étrangers dans l’agglomération parisienne, c’est 36 % : 36 % des mis en cause dans l’agglomération parisienne sont des personnes de nationalité étrangère. On les retrouve aussi dans un cambriolage sur deux, dans un vol violent sur deux, dans 40 % des violences sexuelles. » Il s’agit de vos propos, monsieur le ministre – des propos que vous avez tenus le 7 février 2025 lors d’une interview accordée à CNews.

Nous partageons votre constat : le lien entre immigration et délinquance est évident. Près de 20 000 étrangers sont détenus en France, soit environ 25 % de la population carcérale. Ce chiffre révèle une augmentation certaine, puisqu’il était de 20 % il y a quelques années. Nous pourrions le faire baisser si nous appliquions les mesures d’obligation de quitter le territoire français, car nul n’ignore qu’une part des étrangers qui en font l’objet alimentent directement la délinquance et la criminalité. Or notre taux d’exécution des OQTF est particulièrement faible.

Pourriez-vous nous donner les raisons qui expliquent la faiblesse de ce taux ? Y a-t-il des obstacles juridiques, matériels, ou tout simplement un manque de volonté politique ? Et puisque vous êtes maintenant à la tête du ministère de l’Intérieur, comment entendez-vous traiter cette question ?

M. Stéphane Mazars (EPR). Je tiens tout d’abord à saluer votre arrivée à la tête du ministère de l’Intérieur. Vous êtes reconnu pour votre grande expérience opérationnelle, et en tant que rapporteur pour avis de la commission des lois sur le projet de loi relatif à l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de 2024, je ne peux que saluer le travail remarquable que vous avez réalisé à la tête de la préfecture de police de Paris à l’occasion de cet événement planétaire.

Si je prends la parole dans le cadre de cette audition, c’est pour vous confirmer que des territoires ruraux comme l’Aveyron et des villes moyennes comme Rodez ne sont pas épargnés par la montée de la délinquance, liée notamment au narcotrafic. Je tiens d’ailleurs à saluer le travail accompli au quotidien, dans la ville de Rodez, par la police nationale. Pas plus tard que la semaine dernière, le travail coordonné de tous les services de l’État a permis d’organiser une opération « coup de poing » dans un quartier de la ville. Dans l’idée de ne pas laisser prospérer les trafics, notamment dans nos villes moyennes, je prépare actuellement une proposition de loi visant à renforcer les sanctions contre le trafic organisé de tabac, un phénomène qui alimente un véritable écosystème parallèle.

Pourriez-vous nous confirmer que la priorité du gouvernement, dans ses fonctions régaliennes, demeure le renforcement de la sécurité du quotidien, y compris dans les départements ruraux et les villes moyennes, et que les moyens engagés avec volontarisme depuis plusieurs années seront pérennisés pour que la politique menée reste efficace en tout lieu de la République ?

M. Thomas Portes (LFI-NFP). « Je ne vise pas à diviser la société. Une rupture dans la forme ? Oui, certainement. » Ce sont vos propres mots, monsieur le ministre, mais de quelle rupture parlez-vous ? Seuls les actes révèlent la véritable nature d’un pouvoir, et seule la rupture sur le fond a un sens.

Votre prédécesseur, M. Retailleau, disait qu’il ne fallait jamais critiquer la police. C’est pourtant lui qui a ordonné la poursuite systématique des véhicules en cas de refus d’obtempérer, alors que les policiers devaient jusque-là apprécier au cas par cas la gravité de la situation pour éviter des drames. Depuis l’adoption, en 2017, de l’article L. 435-1 du code de la sécurité intérieure (CSI), le nombre de morts a été multiplié par cinq. La France est aujourd’hui le pays européen où la police tue le plus – au moins vingt-neuf morts en 2024. Je veux ici avoir une pensée pour Nordine, Souheil, Rayanna, Alhoussein, Nahel, Inès et pour toutes les victimes de cette loi. Trois organes de l’ONU ont déjà condamné le flou juridique qui entoure l’article L. 435-1. Le comité pour l’élimination de la discrimination raciale s’est dit profondément préoccupé par le profilage racial persistant qui, associé à un usage disproportionné de la force, conduit à des meurtres récurrents, souvent dans une quasi-impunité.

Les chiffres sont accablants. Les personnes racisées négativement courent six fois plus de risques d’être tuées par la police. En mars dernier, à la suite des réquisitions du parquet dans l’affaire Nahel Merzouk, ce sont les syndicats policiers eux-mêmes qui ont réclamé un cadre légal clair, net et précis. La France insoumise a déjà déposé deux propositions de loi pour abroger ce dispositif et en déposera une troisième dans les prochaines semaines.

Les alertes se multiplient : vos propres policiers, les avertissements des parlementaires, les condamnations internationales, les morts… Allez-vous enfin rompre avec votre prédécesseur sur la question des violences policières ? Allez-vous enfin reconnaître l’échec et la dangerosité de ce cadre légal et demander l’abrogation de l’article L. 435-1 du CSI ou, du moins, publier une circulaire de clarification pour mettre un terme à ces morts qui s’accumulent ?

M. Roger Vicot (SOC). Dans votre propos liminaire, vous avez évoqué la nécessité de vous concentrer sur la sécurité du quotidien. Ne voyez pas de provocation dans mon propos, mais ce sujet est censé être une priorité depuis huit ans : le président de la République avait ainsi porté la police de sécurité du quotidien sur les fonts baptismaux dès son élection. Or, si cette sécurité du quotidien est établie, pourquoi la redéfinir comme un impératif huit ans plus tard ?

J’ai entendu le détail du travail que vous comptiez mener, notamment en ce qui concerne la lutte contre les rodéos urbains et la violence autour du sport, ainsi que votre volonté, bien légitime, de respecter la libre administration des collectivités territoriales en matière d’armement des polices municipales. Quelles nouvelles mesures souhaitez-vous toutefois mettre en place pour que la sécurité du quotidien soit définitivement établie ? Quel type de coopération envisagez-vous par ailleurs avec les polices municipales, et sous quelle forme ? Quelle place, enfin, comptez-vous accorder à la prévention de la délinquance, qui a été jusqu’ici le parent pauvre des politiques du ministère de l’Intérieur ?

M. Éric Pauget (DR). Je vous parlerai moi aussi du projet de loi sur les polices municipales, lesquelles comptent actuellement près de 28 000 agents tandis que quelque 10 000 nouvelles embauches sont prévues au cours des prochaines années. Bien qu’ils soient pleinement intégrés au continuum de sécurité et considérés comme la troisième force de sécurité intérieure du pays, les policiers municipaux ont cependant des pouvoirs très limités en raison de leur statut d’agents territoriaux. Le groupe d’étude « Polices municipales », que j’ai l’honneur de présider à l’Assemblée nationale, avait formulé des propositions à ce sujet à vos prédécesseurs Gérald Darmanin et François-Noël Buffet.

Le projet de loi actuel intègre-t-il bien le principe d’une extension des pouvoirs judiciaires aux policiers municipaux ? Lesquels seraient concernés ? Pourriez-vous nous indiquer de manière très précise le calendrier que vous envisagez pour la présentation de ce texte à l’Assemblée nationale et au Sénat ?

M. Pouria Amirshahi (EcoS). Je veux bien être le premier à défendre les moyens d’une police qui accueille en commissariat et qui enquête sur le terrain contre les réseaux mafieux, contre le terrorisme islamiste ou contre le terrorisme d’extrême droite. Je veux cependant vous parler aujourd’hui d’une police tout aussi réelle, dont certaines pratiques violentes, à l’égard des individus comme des manifestants, alimentent la défiance d’une partie de la population. À plusieurs reprises, alors que vous étiez préfet de police de Paris, nous avons pu échanger à ce sujet. De nombreux témoignages attestent d’actes et de comportements inadmissibles, illégitimes et illégaux. Sauf à supposer qu’elles ont été générées par une intelligence artificielle, les images qui ont été diffusées traduisent une réalité documentée et persistante.

Depuis plus de vingt ans, c’est-à-dire depuis l’époque où un certain M. Sarkozy exerçait vos fonctions, nous assistons à une surenchère répressive qui s’exerce au détriment de libertés individuelles parfois fondamentales. Je me souviens pourtant d’un code de déontologie qui, sous l’autorité d’un autre de vos prédécesseurs, M. Pierre Joxe, énonçait en son article 1er : « La police nationale concourt à la garantie des libertés individuelles. » Cette référence a disparu, sous la pression de M. Sarkozy avant qu’il quitte ses fonctions en 2012, puis sous celle de M. Valls au moment de l’entrée en vigueur du nouveau code en 2014, ce qui n’est pas anodin.

De nombreux chercheurs décrivent aujourd’hui une doctrine policière française marquée par la valorisation organisationnelle de tactiques agressives. Le maintien de l’ordre tend à se fonder sur une confrontation plutôt que sur une désescalade : en témoignent la mobilité des unités, le suréquipement démesuré, l’usage croissant des armes dites à létalité réduite, le recours à la nasse et les interpellations massives. Ce modèle, que les chercheurs qualifient d’exception française, s’éloigne des principes de désescalade adoptés dans la plupart des démocraties européennes. Autrement dit, alors que d’autres cherchent à pacifier la gestion des foules, la France s’enferme dans cette doctrine.

En tant que préfet de police, vous avez été chargé de la gestion directe des opérations de police. Votre prédécesseur Maurice Grimaud, en plein Mai 68, disait ceci : « Je m’adresse aujourd’hui à toute la maison, aux gradés comme aux gardiens. Je veux leur parler de l’excès dans l’emploi de la force, qui nous permettra certes de gagner des batailles dans la rue, mais qui nous fera perdre quelque chose de plus précieux encore : notre réputation. » Vous qui vous dites plus serviteur de l’État qu’idéologue, croyez-vous qu’on serve l’État en acceptant qu’on sape à ce point sa réputation, et même l’honneur d’une démocratie moderne ?

Mme Hanane Mansouri (UDR). Ce week-end, la France a découvert avec stupéfaction le cambriolage du musée du Louvre, le plus grand musée du monde, symbole universel de notre patrimoine, de notre histoire et du génie français. Un lieu censé être parmi les mieux protégés du pays a été la cible de délinquants, qui ont agi avec une facilité déconcertante. Cet événement, au-delà de sa portée symbolique, suscite de graves interrogations quant à l’efficacité de notre dispositif national de sécurité, notamment dans les sites classés sensibles. Comment un tel acte a-t-il pu se produire dans un établissement sous surveillance permanente, en plein cœur de Paris, à quelques mètres du ministère de la culture et de la préfecture de police ? Les premières informations révèlent des dysfonctionnements dans la vidéosurveillance, un manque d’effectifs sur site et un retard d’intervention des forces de l’ordre : autant de failles qui témoignent d’un affaissement global de la sécurité publique, que ni les effets d’annonce ni les plans ministériels successifs n’ont permis d’enrayer.

Vous ne pouvez pas vous réfugier derrière la complexité technique du dispositif. Ce cambriolage est le symptôme d’un État qui n’assure plus la protection de ses lieux les plus précieux, et par extension de ses citoyens. Après les émeutes, les agressions du quotidien et la montée de l’insécurité, voilà que notre patrimoine national devient à son tour une cible, à commencer par nos églises qui font de plus en plus l’objet de dégradations.

Reste-t-il des endroits où les Français sont encore en sécurité ? Quelles mesures immédiates comptez-vous prendre pour renforcer la sécurité des grands musées et des sites culturels nationaux ? Surtout, quand les Français pourront-ils à nouveau avoir confiance dans un ministère de l’Intérieur qui protège, prévient et agit au lieu de simplement commenter l’échec de ses propres dispositifs ?

Mme Sophie Blanc (RN). En 2024, à Perpignan, l’hôtel de police a été évacué d’urgence à la suite de l’apparition de fissures sur les murs et le sol. L’événement a révélé une situation de grande vétusté, qui met directement en péril la sécurité des policiers. Les syndicats, les personnels de la police nationale ainsi que les usagers réclament un nouveau commissariat digne de ce nom, car l’insalubrité des locaux actuels ne permet plus de garantir ni la confidentialité ni la sécurité des personnels, des victimes et des prévenus.

J’alerte au sujet de cette situation depuis 2023, et on me répond inlassablement que les contraintes budgétaires nationales ne sont pas favorables au lancement d’un nouveau projet. Depuis 2020, la ville de Perpignan a pourtant mis à disposition un terrain qui fait l’unanimité. La direction de l’immobilier de la police nationale a, de son côté, confirmé son intérêt après une visite du site. Pourtant, jusqu’à présent, aucun acte concret n’a été réalisé.

Puisque votre ministère prétend faire de la sécurité une priorité, j’attends de connaître le montant que vous allez dédier à ce projet dans votre budget, de manière à rassurer le personnel qui craint à tout instant un effondrement.

Mme Colette Capdevielle (SOC). J’ai été sollicitée par de nombreux étudiants, notamment du Pays basque, qui attendent depuis des mois une réponse à leur demande de renouvellement de titre de séjour. Faute de réponse dans les délais impartis, ces étudiants se retrouvent en situation irrégulière, ce qui compromet l’obtention de leurs diplômes, la poursuite de leur contrat de travail étudiant voire la possibilité d’effectuer du tutorat auprès d’étudiants plus jeunes. Il s’agit là d’une vraie rupture d’égalité devant la loi entre les étudiants étrangers et les étudiants français, qui entraîne par ailleurs beaucoup de stress.

Quelles mesures concrètes entendez-vous donc prendre pour réduire ces délais et éviter que ces étudiants se retrouvent pénalisés ou en difficulté administrative ? Ne serait-il pas possible d’envisager, tout simplement, un renouvellement automatique sur présentation du certificat d’inscription à l’université ou dans un établissement d’enseignement supérieur ?

Par ailleurs, allons-nous désormais devoir conseiller aux personnes étrangères d’apprendre par cœur le Trivial Pursuit pour pouvoir devenir françaises ? Votre prédécesseur s’est félicité d’avoir fait baisser de 28 % les naturalisations entre octobre 2024 et 2025. Partagez-vous l’avis formulé en 2012 par Manuel Valls, à savoir qu’on ne devient pas français en répondant à un QCM ? De fait, ce sont d’abord les liens familiaux, la volonté de participer pleinement à la société française et l’adhésion aux principes républicains qui fondent les motivations pour devenir français, et non une érudition parfois un peu idiote.

Mme Sandra Regol (EcoS). Vos deux prédécesseurs nous ont annoncé que le Beauvau de la sécurité civile serait prochainement suivi d’un texte législatif. Hélas, sa présentation ne cesse d’être repoussée du fait de l’instabilité politique provoquée par les choix obsessionnels du président de la République. Le financement de la sécurité civile par la TSCA (taxe spéciale sur les conventions d’assurance) fait l’objet d’amendements transpartisans au projet de loi de finances pour 2026. Quel est votre avis sur une telle mesure ? Il faut que nous avancions !

Quelle est votre définition de la notion de sécurité du quotidien ? Vous avez évoqué la lutte contre les rodéos, les fêtes et les concerts sauvages. Pour moi, elle doit plutôt avoir pour objet de combler le fossé qui s’est creusé entre les forces de police et nos concitoyens et de permettre, en particulier à ceux d’entre eux qui ont le plus besoin de sécurité, d’avoir facilement accès à des agents de police qu’ils connaissent.

M. Marc Pena (SOC). Lorsqu’une demande de renouvellement d’un titre de séjour est déposée, l’administration délivre au demandeur une attestation de prolongation d’instruction (API), dans l’attente de la décision du préfet. Toutefois, quand l’instruction se prolonge, l’agent doit effectuer ce renouvellement manuellement. Aucune alerte automatique de l’Anef ne signale la fin de validité de ces attestations, de sorte que les agents préfectoraux se retrouvent noyés sous des tâches répétitives et que les usagers perdent parfois leurs droits parce qu’une API n’a pas été renouvelée à temps. La situation à la sous-préfecture d’Aix-en-Provence illustre parfaitement ce dysfonctionnement : les délais sont interminables et le personnel est à bout, faute d’une dématérialisation vraiment efficace.

Le Défenseur des droits a proposé, dans son rapport intitulé « L’administration numérique pour les étrangers en France », le renouvellement automatique des attestations de prolongation d’instruction, assorti de la création d’une attestation dématérialisée créatrice de droits qui serait délivrée dès lors que le dossier est complet. Cette mesure, qui ne remettrait pas en cause le pouvoir d’appréciation du préfet, permettrait de désengorger nos préfectures, de sécuriser le parcours des usagers et, surtout, de rationaliser l’action publique en cette période de contrainte budgétaire.

Pourquoi ne pas mettre en œuvre le renouvellement automatique des attestations ? Quelles économies cette automatisation permettrait-elle de réaliser ?

M. Laurent Nuñez, ministre. Monsieur Gery, lorsque j’ai indiqué que 36 % des mis en cause dans l’agglomération parisienne étaient de nationalité étrangère – ce taux est moindre dans le reste du territoire –, je l’ai fait pour corriger les chiffres qui étaient évoqués : on parlait de 50 %. Vous concluez de cette statistique qu’il existe un lien entre immigration et délinquance. Le ministre de l’Intérieur que je suis ne prononcera jamais une telle assertion. Mon job est de poursuivre des délinquants.

Quant aux OQTF, nous ferons le nécessaire pour les exécuter – je m’y engage. Du reste, le nombre des éloignements contraints augmente significativement chaque année. Dans l’agglomération parisienne, par exemple, ils ont crû de 35 % entre 2023 et 2024. Nous continuerons dans cette voie. Pour cela, nous devons appliquer le plan CRA 2030 prévu dans le projet de loi de finances et obtenir des laissez-passer pour fluidifier les parcours. J’ajoute que je reprendrai la mesure, retoquée par le Conseil constitutionnel, visant à maintenir plus longtemps dans les CRA les retenus les plus dangereux.

Je n’ai pas de tabou concernant les étrangers mis en cause ; c’est la conclusion que vous en tirez qui me pose problème. Il y a, dites-vous, une différence entre Français et étrangers. Non, il y a des délinquants, et en tant que ministre de l’Intérieur, je lutte contre la délinquance. J’ai suffisamment fait montre de fermeté au cours des dix-huit dernières années pour ne pas avoir à prouver ma détermination.

Monsieur Mazars, vous avez raison, le trafic de stupéfiants s’étend à l’ensemble du territoire national, si bien que nous appliquons désormais en zone rurale les techniques employées dans les zones plus urbaines : renforcement de la coopération, opérations coup de poing visant à démanteler un point de deal et occupation du terrain pour éviter sa réimplantation. Le projet de loi de finances pour 2026 comporte une mesure forte qui nous permettra de poursuivre la mise en œuvre du plan d’implantation des brigades territoriales de gendarmerie : cinquante-huit d’entre elles seront déployées l’an prochain, notamment dans les zones rurales. C’est, pour nous, un important sujet de préoccupation.

Monsieur Portes, vous ne serez pas étonné que je ne souscrive pas à vos propos. L’instruction de M. Retailleau relative aux refus d’obtempérer a une histoire. En 2020, je me suis rendu, en tant que secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur, à Saint-Denis, où j’ai découvert que les fonctionnaires de police avaient pour instruction d’analyser les refus d’obtempérer au cas par cas. Ce n’est pas acceptable : dans une telle situation, il faut engager une poursuite, avec précaution, en prévenant la salle de commandement. J’ai donc demandé à Didier Lallement, qui était alors préfet de police, de prendre une instruction qui systématise les poursuites en cas de refus d’obtempérer – instruction que, par la suite, Bruno Retailleau a généralisée, à raison, à l’ensemble du territoire national. La seule limite, en la matière, c’est la mise en danger de la vie d’autrui, qui impose un arrêt de la poursuite. Céder sur les refus d’obtempérer, ce serait céder sur beaucoup de choses en matière d’autorité.

Je ne peux pas accepter que vous considériez que la police tue.

M. Thomas Portes (LFI-NFP). C’est juste factuel.

M. Laurent Nuñez, ministre. Non, ce n’est pas factuel. Vous oubliez toujours le contexte – la plupart du temps, la légitime défense – qui contraint les policiers à utiliser une arme létale. On a le sentiment, lorsqu’on vous écoute, que l’action de la police consiste à tuer des gens. Non ! En cas de blessures graves, a fortiori en cas de décès, les agents doivent rendre des comptes et démontrer que leur réponse a été proportionnée. Dans la plupart des cas, elle l’est. Il n’y aura donc pas de rupture dans ce domaine. Mes pensées vont d’abord aux milliers de policiers et de gendarmes qui, chaque année, sont agressés et blessés sévèrement.

Comment pouvez-vous affirmer que les personnes racisées sont ciblées ? Je ne peux pas accepter davantage cette assertion que le lien établi tout à l’heure entre immigration et délinquance. Là non plus, il n’y aura pas de rupture. Partout sur le territoire national, gendarmes et policiers luttent contre les délinquants ; ils agissent dans un cadre républicain. Ils doivent en permanence justifier de la proportionnalité de leurs actes et sont très souvent confrontés à l’inspection générale de la police nationale (IGPN) et à l’inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN), et c’est très bien ainsi.

Enfin, il y a un fantasme autour de la loi de 2017, qui a d’ailleurs été adoptée pendant le quinquennat de M. Hollande. À cette époque – celle des attentats –, il s’agissait d’empêcher les périples meurtriers. On lit partout que cette loi aurait désinhibé les policiers qui, depuis, utiliseraient leurs armes à tout-va. C’est n’importe quoi ! L’engagement des armes administratives doit se faire dans le cadre de la légitime défense, et c’était déjà le cas avant 2017. Les policiers et les gendarmes agissent de manière proportionnée, et si tel n’est pas le cas, ils en répondent devant un juge pénal.

Monsieur Vicot, nous travaillons à la sécurité du quotidien depuis 2017. Chaque ministre de l’Intérieur a porté sa pierre à l’édifice, et je compte bien porter la mienne, dans la continuité de l’action de mes prédécesseurs. Cette notion recouvre des éléments concrets. Il s’agit de renforcer la présence sur le terrain – le budget du ministère de l’Intérieur a augmenté de 40 % en presque dix ans, offrant des moyens supplémentaires aux policiers et aux gendarmes –, en particulier dans les territoires définis comme prioritaires, les QRR (quartiers de reconquête républicaine).

Les opérations « place nette », lancées par Gérald Darmanin, consistaient à identifier des territoires gangrenés par les trafics, à y démanteler les réseaux et à y renforcer la présence des forces de l’ordre. Bruno Retailleau a opté, quant à lui, pour une forme de déconcentration dans le cadre du plan d’action départementale de restauration de la sécurité du quotidien, en confiant à chaque préfet le soin d’identifier des zones marquées par la délinquance et d’y renforcer la présence des forces de sécurité afin de démanteler les trafics et d’éviter qu’ils ne se réimplantent. La sécurité du quotidien se traduit par la présence d’un plus grand nombre de policiers et de gendarmes sur la voie publique, grâce au renfort d’effectifs et à la création des nouvelles brigades territoriales.

Entre les polices municipales et la police nationale, la coordination est permanente. Le chef de la police municipale et celui de la police nationale se réunissent régulièrement et échangent des informations presque quotidiennement. Quant aux missions, elles sont réparties dans le cadre de conventions, qui sont obligatoires : les polices municipales sont plutôt chargées de la tranquillité publique et la police nationale de la lutte contre la délinquance.

Enfin, il est vrai que, depuis la loi de 2007, on entend un peu moins parler de prévention de la délinquance. Je confierai notamment à Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée, le suivi de la stratégie nationale de prévention de la délinquance telle qu’elle m’a été léguée par Sabrina Agresti-Roubache, François-Noël Buffet et Bruno Retailleau. C’est un élément très important.

Monsieur Pauget, l’Association des maires de France (AMF) craignait, et on peut le comprendre, que, mettant un pied dans le judiciaire, les policiers municipaux se retrouvent sous l’autorité des parquets. C’est pourquoi, dans le scénario retenu – dont nous aurons l’occasion de débattre –, ils pourraient être chargés de constater les délits sanctionnés par des amendes forfaitaires délictuelles, donc sans actes d’enquête. Ces délits sont ceux qui affectent le plus la vie des gens : ventes à la sauvette, occupations de halls d’immeuble, ventes interdites aux mineurs, etc. Pour ce qui est du projet de loi, je pense que, conformément à la grande tradition républicaine, il sera déposé au Sénat – mais cela n’a pas encore été arrêté. Quoi qu’il en soit, je dois le présenter au conseil des ministres – la copie que m’a laissée Bruno Retailleau est achevée.

Monsieur Amirshahi, en tant que préfet de police, j’ai, pendant trois ans et demi, géré des manifestations importantes, comme celles contre la réforme des retraites, en veillant à ce que les forces de l’ordre se tiennent éloignées des cortèges, précisément pour éviter d’être accusé de faire dégénérer les manifestations. Si cela, ce n’est pas de la désescalade, je n’y comprends rien ! Bien entendu, lorsque des individus commencent à casser des vitrines et à s’en prendre aux forces de l’ordre, la police intervient, comme partout ailleurs. Beaucoup de chercheurs, de sociologues, affirment qu’en France, à la différence d’autres pays, la police ne pratique pas la désescalade. Je conteste cette affirmation : nous restons à distance, nous laissons les manifestants déambuler et, lorsque des incidents surviennent – et uniquement dans ce cadre –, nous intervenons.

On m’a reproché d’avoir pratiqué des nasses mais, lorsque vous interpellez des fauteurs de troubles, vous êtes bien obligés de les maintenir sur place ; ce n’est pas ce que l’on appelle une nasse. Celle-ci consiste à retenir un groupe de personnes. Le Conseil d’État a rendu un avis très précis sur cette pratique. Du reste, les préfets qui se laisseraient aller à ordonner des nasses sont susceptibles d’engager leur responsabilité pénale.

Madame Mansouri, ce qui s’est passé au Louvre est dramatique. La ministre de la culture l’a dit tout à l’heure, tous les dispositifs de sécurité ont fonctionné : l’alarme a été déclenchée, le poste de commandement a été alerté et les policiers sont arrivés sur place trois minutes après. Il se trouve que les malfaiteurs ont agi très rapidement.

Ce cambriolage soulève trois questions.

Premièrement, des travaux de sécurisation doivent être effectués au sein des musées, partout en France. Ce n’est pas nouveau – en témoignent d’ailleurs les cambriolages survenus récemment à Limoges et au Museum national d’histoire naturelle. Nous y remédions progressivement, notamment en réalisant des audits de sécurité. Ainsi, le renforcement de la sécurité du Louvre a été planifié : des caméras pouvant être connectées à la salle de commandement des forces de l’ordre doivent être installées dans chaque salle.

Deuxièmement, nous avons demandé, la ministre de la culture et moi-même, que les préfets veillent, dans chaque département, à ce que les responsables des services de police et de gendarmerie soient bien en contact avec les responsables de musée.

Troisièmement, les environs des musées doivent être équipés de caméras extérieures. Or, autour du Louvre, qui est l’un des sites les plus fréquentés de la capitale, la couverture est de très haut niveau et la présence policière très importante. Néanmoins, il est arrivé ce qui est arrivé. C’est un drame qui n’aurait pas dû se produire, mais on ne peut pas affirmer pour autant que rien n’est sécurisé.

Vous avez parlé d’émeutes. Il y a eu des violences urbaines en 2023, et il arrive que certaines manifestations dégénèrent, mais la réponse des forces de sécurité intérieure est systématique. Bien entendu, lorsqu’elles interviennent, elles rétablissent l’ordre en menant des actions de vive force dont les images tournent en boucle sur les chaînes d’information en continu. Je resterai l’homme d’autorité et de fermeté qui intervient à chaque fois que des débordements se produisent. Certains parleront d’émeutes, de chienlit, d’une situation non maîtrisée ; en réalité, à ce moment-là, nous sommes en train de la maîtriser.

Certes, ce qui s’est passé au Louvre n’est pas terrible pour l’image de notre pays. Mais je vous rassure : la fréquentation touristique, à Paris et en France, n’a jamais été aussi importante. Dans beaucoup d’endroits de notre pays, les Français sont en sécurité. La capitale n’est pas le coupe-gorge dont on entend trop souvent parler. En tout état de cause, tant que je serai ministre de l’Intérieur, nous continuerons à riposter systématiquement lorsque des incidents se produisent et à lutter avec beaucoup de fermeté contre la délinquance.

Madame Blanc, en l’absence de crédits, nous cherchons plutôt à conclure des partenariats avec les communes. Compte tenu de l’état du commissariat de Perpignan, nous prendrons une initiative locale pour étudier ce qu’il est possible de faire dans ce cadre.

Madame Capdevielle, sur le plan informatique, le renouvellement du titre étudiant est le moins problématique de tous. Les délais que vous évoquez sont liés au fait que nous sommes tout de même obligés de vérifier un certain nombre d’éléments, notamment l’assiduité.

Madame Regol, je dois, dans le cadre de ma feuille de route, tirer les conséquences du Beauvau de la sécurité civile, dont je rappelle qu’il a abouti à cent propositions. Nous allons donc nous atteler, avec le directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises, à traduire certaines d’entre elles en propositions législatives que je viendrai vous présenter. Par ailleurs, le projet de loi de finances pour 2026 comporte certaines mesures de sécurité civile, parmi lesquelles la poursuite de divers plans et l’achat de deux Canadair.

Mme Sandra Regol (EcoS). Vous ne répondez pas à ma question sur la TSCA !

M. Laurent Nuñez, ministre. Cela fait partie des pistes sur lesquelles nous devons travailler. Je ne peux pas vous en dire plus – cela ne fait que huit jours que j’ai pris mes fonctions !

Par ailleurs, j’ai cité dans mon propos introductif trois exemples de mesures législatives, mais la sécurité du quotidien ne se limite évidemment pas à lutter contre les rassemblements musicaux illégaux, les rodéos ou les violences dans le sport. Elle consiste, je l’ai dit, à intensifier la présence des forces de police sur la voie publique et à lutter contre les trafics.

Enfin, monsieur Pena, les attestations de prolongation de l’instruction permettent d’éviter une rupture des droits, le temps que la préfecture achève l’examen du dossier. Notre objectif, avant de proposer le renouvellement automatique, est d’accélérer l’instruction. C’est pourquoi nous dotons les préfectures de moyens supplémentaires et allons perfectionner l’Anef.

M. le président Florent Boudié. Merci, monsieur le ministre, d’être venu vous exprimer devant notre commission si peu de temps après votre nomination.

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La séance est levée à 18 heures 30.

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Membres présents ou excusés

 

Présents. - M. Xavier Albertini, Mme Marie-José Allemand, M. Pouria Amirshahi, Mme Léa Balage El Mariky, M. Romain Baubry, Mme Sophie Blanc, M. Philippe Bonnecarrère, Mme Pascale Bordes, M. Florent Boudié, Mme Colette Capdevielle, Mme Gabrielle Cathala, M. Vincent Caure, M. Thomas Cazenave, M. Paul Christophle, M. Jean-François Coulomme, M. Olivier Falorni, Mme Elsa Faucillon, M. Jonathan Gery, M. Guillaume Gouffier Valente, Mme Monique Griseti, M. Jordan Guitton, M. Patrick Hetzel, M. Sébastien Huyghe, M. Jérémie Iordanoff, Mme Sylvie Josserand, M. Andy Kerbrat, M. Philippe Latombe, Mme Marie-France Lorho, Mme Élisabeth de Maistre, Mme Hanane Mansouri, M. Éric Martineau, Mme Élisa Martin, M. Stéphane Mazars, Mme Laure Miller, M. Jean Moulliere, M. Éric Pauget, M. Marc Pena, Mme Lisette Pollet, M. Thomas Portes, M. Julien Rancoule, Mme Sandra Regol, Mme Sophie Ricourt Vaginay, M. Hervé Saulignac, M. Michaël Taverne, M. Jean Terlier, M. Roger Vicot

Excusés. - Mme Émilie Bonnivard, Mme Marietta Karamanli, Mme Émeline K/Bidi, M. Roland Lescure, Mme Naïma Moutchou, M. Jiovanny William