ÉTUDE d’impact

 

 

 

Projet de loi

pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable

 

 

 

 

NOR : AGRX1736303L/Bleue-1

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

30 janvier 2018

TABLE DES MATIÈRES

 

 

INTRODUCTION GÉNÉRALE : LES ÉTATS GÉNÉRAUX DE L’ALIMENTATION

TABLEAU SYNOPTIQUE DES CONSULTATIONS

TABLEAU SYNOPTIQUE DES MESURES D’APPLICATION

ARTICLES 1 à 5 – RENFORCER LA CONTRACTUALISATION

ARTICLE 6 – AMELIORER LES DISPOSITIONS DE L’ARTICLE  L. 441-8 RELATIF A LA CLAUSE DE RENEGOCIATION

ARTICLE 7 – APPLICATION A SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON

ARTICLE 8 – HABILITATIONS À MODIFIER LES DISPOSITIONS DU CODE RURAL ET DE LA PÊCHE MARITIME RELATIVES A LA COOPERATION AGRICOLE

Article 9 Habilitation à relever le seuil de revente à perte (SRP) et à encadrer les promotions

ARTICLE 10 – HABILITATIONS À MODIFIER LE CODE DE COMMERCE

ARTICLE 11 – COMPOSITION DES REPAS SERVIS DANS LA RESTAURATION COLLECTIVE

ARTICLE 12 – AIDE ALIMENTAIRE

ARTICLE 13 – BIEN-ÊTRE ANIMAL

ARTICLE 14 – PRATIQUES COMMERCIALES PROHIBÉES À L’OCCASION DES VENTES DE PRODUITS PHYTOPHARMACEUTIQUES

ARTICLE 15 – HABILITATIONS À MODIFIER LE CODE RURAL ET DE LA PÊCHE MARITIME ET LE CODE DE  L’ENVIRONNEMENT

 


INTRODUCTION GÉNÉRALE : LES ÉTATS GÉNÉRAUX DE L’ALIMENTATION

 

Comme le Président de la République s’y était engagé pendant la campagne électorale, des états généraux de l’alimentation réunissant l’ensemble des parties prenantes ont été organisés dès l’été 2017. Deux objectifs, rappelés par le Président de la République dans son discours du 11 octobre à Rungis, en étaient attendus : d’une part « permettre aux agriculteurs de vivre du prix juste payé, permettre à tous dans la chaîne de valeur de vivre dignement », d’autre part « permettre à chacune et chacun d’avoir accès à une alimentation saine, durable, sûre ».

Les états généraux ont réuni l’ensemble des acteurs : monde agricole et de la pêche, industrie agroalimentaire, coopération agricole, distribution, consommateurs, restauration collective, élus, partenaires sociaux, acteurs de l'économie sociale et solidaire, de la santé, organisations non gouvernementales (ONG), associations caritatives et d'aide alimentaire à l'international, banques et assurances.

 

L’État a mis en place une organisation reposant sur :

- la désignation d’un ministère pilote, le ministère de l’agriculture et de l’alimentation ;

- la mise en place d’un comité de pilotage réunissant les services des onze ministères les plus concernés :

- ministère de l’agriculture et de l’alimentation ;

- ministère de la transition écologique et solidaire ;

- ministère de l’Europe et des affaires étrangères ;

- ministère de la cohésion des territoires ;

- ministère des solidarités et de la santé,

- ministère de l’économie et des finances ;

- ministère du travail ;

- ministère de l’éducation nationale ;

- ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation ;

- ministère des outre-mer ;

- ministère des sports.

 

 

 

 

Les travaux ont été structurés en deux chantiers et quatorze ateliers :

- Chantier n° 1 : la création et la répartition de la valeur :

- Comment créer plus de valeur ?

- Atelier 1 : Mieux répondre aux attentes des consommateurs en termes de qualités nutritionnelles et environnementales d'ancrage territorial, de
bien-être animal et d'innovations.

- Atelier 2 : Développer les initiatives locales et créer des synergies.

- Atelier 3 : Développer la bio-économie et l’économie circulaire.

- Atelier 4 : Conquérir de nouvelles parts de marché sur les marchés européens et internationaux et faire rayonner l’excellence du modèle alimentaire et le patrimoine alimentaire français en France et à l'international.

- Comment mieux répartir la valeur ?

- Atelier 5 : Rendre les prix d’achat des produits agricoles plus rémunérateurs pour les agriculteurs.

- Atelier 6 : Adapter la production agricole aux besoins des différents marchés et aux besoins des transformateurs.

- Atelier 7 : Améliorer les relations commerciales et contractuelles entre les producteurs, les transformateurs et les distributeurs.

- Chantier n° 2 : une alimentation saine, sûre, durable et accessible à tous :

- Atelier 8 : Assurer la sécurité sanitaire de l’alimentation française dans une économie agroalimentaire mondialisée et dans un contexte de changement climatique tout en prévenant les contaminations chimiques.

- Atelier 9 : Faciliter l'adoption par tous d'une alimentation favorable à la santé.

- Atelier 10 : Lutter contre le gaspillage alimentaire.

- Atelier 11 : Réussir la transition écologique et solidaire de notre agriculture en promouvant une alimentation durable.

- Atelier 12 : Lutter contre l'insécurité alimentaire, s'assurer que chacun puisse avoir accès à une alimentation suffisante et de qualité en France et dans le monde.

- Atelier 13 : Renforcer l’attractivité des métiers de l’agriculture et des filières alimentaires et développer la formation.

- Atelier transversal :

- Atelier 14 Préparer l’avenir : quels investissements, quel accompagnement technique, quelle recherche pour une plus grande performance environnementale, sanitaire, sociale et économique ?

 

Par ailleurs, une consultation publique en ligne a été ouverte dès le 20 juillet 2017 afin de permettre au plus grand nombre de contribuer aux réflexions à conduire dans le cadre des états généraux de l’alimentation (https://www.egalimentation.gouv.fr). Elle a suscité plus de 163 000 votes et plus de 18 000 contributions.

 

Le Premier ministre a présenté les trois défis auxquels le présent projet de loi a pour ambition de répondre dans son discours de conclusion des états généraux de l’alimentation le 21 décembre 2017.

Le premier axe du projet est de faire en sorte que chacun puisse vivre dignement et sereinement de son travail dans le cadre de relations commerciales entre « égaux » et donc aboutir à une répartition équitable de la valeur. Il se traduit par la réforme des règles de contractualisation entre agriculteurs et transformateurs et par l’encadrement des relations commerciales.

Le deuxième axe vise à restaurer la confiance entre les acteurs au sein des filières en créant ou en améliorant les conditions de leur structuration.

Le troisième axe vise à répondre aux nouvelles attentes des consommateurs, à savoir s’alimenter mieux et sainement. Il se concrétise par la recherche d'une place plus importante pour les produits bio, locaux ou écologiques, notamment dans la restauration collective, par la lutte contre le gaspillage alimentaire, et par la préoccupation pour le bien-être animal.

 

 

 


TABLEAU SYNOPTIQUE DES CONSULTATIONS

 

 

Article

Objet de l’article

Consultations  obligatoires

7

Application de l'article L. 631-24 à Saint-Pierre-et-Miquelon

Collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon

11

Augmentation de la part de produits issus de l'agriculture biologique, bénéficiant d'un signe de qualité ou de mentions valorisantes ou encore prenant en compte le coût du cycle de vie dans la restauration collective.

Conseil national d'évaluation des normes

 

 

 


TABLEAU SYNOPTIQUE DES MESURES D’APPLICATION

 

 

Article

Objet de l’article

Texte d’application

Administration compétente

1

Renforcer la contractualisation

Les dispositions réglementaires d’application de l’article L. 631-24-2 du code rural et de la pêche maritime doivent être adaptées :

- modification des articles R. 631-7 à R. 631-10 ;

- abrogation des articles R. 631-11 à R. 631-14

Ministère de l’agriculture et de l’alimentation

Direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises

2

Liste des agents habilités à constater les infractions aux règles applicables aux contrats et accords-cadre (article L. 631-25 du Code rural et de la pêche maritime)

Décret en Conseil d'État

Ministère de l’agriculture et de l’alimentation

Direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises

11

Augmentation de la part de produits issus de l'agriculture biologique, bénéficiant d'un signe de qualité ou de mentions valorisantes ou encore prenant en compte le coût du cycle de vie dans la restauration collective

Décret en Conseil d'État

Ministère de l’agriculture et de l’alimentation

Direction générale de l’alimentation

 

 

 

 

 


ARTICLES 1 à 5 – RENFORCER LA CONTRACTUALISATION

 

1. État des lieux et diagnostic

1.1. état des lieux

Les états généraux de l’alimentation ont pour genèse les crises récurrentes et profondes que subissent les filières agricoles et alimentaires depuis plusieurs années. Ces crises conduisent à des difficultés majeures pour les entreprises agricoles et agroalimentaires, en particulier les PME-TPE, dont certaines ne peuvent plus tirer une rémunération suffisante de leur travail.

 

Une meilleure rémunération des exploitants agricoles passe à la fois par la relance de la création de valeur dans les filières et par une meilleure répartition de la valeur au sein des filières (production, transformation par l’industrie agroalimentaire, et distribution).

 

Les marchés agricoles s’inscrivent dans un contexte politique et économique européen ayant connu de profonds changements depuis ces vingt dernières années, en lien avec les évolutions progressives de la Politique Agricole Commune (PAC) depuis 1992. L’intervention directe de la puissance publique sur les marchés (stockage public, stockage privé) est réduite aux situations de crise conjoncturelle. Les aides directes à la production ont été transformées en aides découplées, à l’hectare. Les mécanismes de régulation des marchés ont été réduits (suppression des quotas laitiers en 2015 et des quotas sucriers en 2017).

 

La volatilité des marchés agricoles, lesquels ne sauraient être appréhendés autrement que filière par filière, est ancienne et liée aux difficultés d’ajustement de l’offre et de la demande (facteurs climatiques, mais aussi mondialisation des échanges, financiarisation croissante des marchés et volatilité des marchés des matières premières non-agricoles).

 

Les crises agricoles traversées en 2015 et en 2016 ont essentiellement touché le secteur de l’élevage du fait de l'évolution des marchés internationaux du lait et de la concurrence entre pays européens lors de la sortie des quotas laitiers. Les céréales ont également connu une crise de production en 2016 en raison des mauvaises conditions climatiques (inondations du printemps).

 

Dans ce contexte, la compétitivité des filières et des entreprises qui les composent dépend de facteurs liés aux prix et aux coûts de production, mais aussi de facteurs de compétitivité hors coûts. Ces derniers sont notamment liés à la capacité d’organisation collective et à la coopération entre entreprises d’une même filière pour aborder les marchés (cas de l’export), à l’orientation des investissements vers l’innovation et à la création de valeur.

 

 

1.1.1. Un diagnostic préoccupant sur la répartition de la valeur et la place du producteur dans la chaîne d'approvisionnement alimentaire

 

La volatilité des prix et le déséquilibre naturel du rapport des forces durcissent les négociations commerciales entre les différents opérateurs économiques, au détriment en particulier des producteurs dont le poids économique est généralement plus faible que celui de leurs partenaires.

 

Les travaux de l'Observatoire de la formation des prix et des marges (OFPM) des produits alimentaires montrent qu'une part très réduite et en constante diminution (moins de 10 %) des dépenses des ménages en produits alimentaires abonde le revenu des agriculteurs. Les acteurs de la filière agricole ont été particulièrement fragilisés en 2016. La dégradation importante de la marge nette ne permet pas de couvrir les coûts de production dans certains secteurs. Depuis le milieu des années 2000, le revenu des exploitations agricoles connaît une variabilité accrue, avec une contribution importante des subventions d'exploitation, et les agriculteurs font face à un endettement croissant.

 

 

 

 

 

Les travaux de l'OFPM comportent également une analyse de la répartition de la valeur pour un 1 euro de dépenses alimentaires, dit  « euro alimentaire ». Cette analyse de la dépense alimentaire annuelle nationale isole en son sein la valeur de la production agricole nationale incorporée et la décompose entre rémunérations brutes du travail et du capital induites dans toutes les branches de l'économie, importations alimentaires et importations de consommations intermédiaires et taxes.

 

Le rapport 2017 de l'OFPM souligne ainsi la part très réduite de la valeur ajoutée qui revient à l'agriculture. En 2013 sur 64,7 euros de valeur ajoutée induite par 100 euros de consommation alimentaire, l'agriculture a récupéré 6,2 euros, soit à peine 9,6 % de la valeur ajoutée induite totale.

 

 

Euro alimentaire décomposé en production agricole, importations alimentaires, aval et taxes

 

 

Le rapport de l'OFPM fait également état de maillons agricoles fragilisés depuis plusieurs années, avec une stagnation des prix agricoles moyens en 2016 (+0,3 % par rapport à 2015). Plusieurs secteurs ont connu un net recul des prix payés depuis 2014, tels que le lait, la viande bovine, le blé tendre et le blé dur tout en faisant face à des charges qui ont augmenté en moyenne de 27,3 % entre 2010 et 2015.

 

VIANDE DE BOEUF

LAIT

PAIN

 

La situation des maillons intermédiaires et aval reste également fragile : le taux de marge moyen des industries agro-alimentaires est en baisse depuis le début des années 2000 comme par exemple dans les secteurs de la viande porcine, du veau de boucherie, de la volaille ou du blé tendre. On constate une quasi-stabilité des volumes vendus par la grande distribution, qui se voit fragilisée par le développement d'acteurs très présents sur les marchés mondiaux agro-alimentaires et le commerce en ligne.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Plusieurs causes sont identifiées :

 

- la forte atomicité des producteurs : on dénombre 426 200 exploitations agricoles en France métropolitaine, malgré une forte réduction du nombre des exploitations (- 35 % entre 2000 et 2016) ;

- la structuration des filières,  marquée par une dissymétrie entre les maillons de la chaîne alimentaire au détriment des producteurs, une organisation économique plus ou moins structurée dans les filières, une concurrence insuffisante sur les marchés connexes (intrants, outillage agricole, etc.) et une concentration de plus en plus importante de l'aval. En 2014, six grands groupes se partageaient 89,6 % du marché de la grande distribution alimentaire, ce qui plaçait la France en cinquième position en Europe quant au niveau de concentration du secteur des grandes et moyennes surfaces (GMS).

 

Ainsi le rapport du Conseil économique, social et environnemental sur « Les circuits de distribution des produits alimentaires » publié en mai 2016 souligne que les auditions des principaux acteurs de ces circuits ont mis en lumière la complexité du système et les fortes tensions qui le traversent. Dans un environnement mondialisé et très concurrentiel, les grandes enseignes assurent plus de 70 % de l'approvisionnement et poursuivent leur concentration, par le regroupement récent en quatre centrales d'achat, tandis que leurs fournisseurs sont à 98 % des PME - TPE et qu'en amont, la production est fortement atomisée, malgré une progression du regroupement en organisations de producteurs.

 

Le rapport a également constaté que la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie dite « LME », a modifié les relations fournisseurs – distributeurs dans un contexte de « guerre des prix », réduisant les marges à un niveau historiquement faible.

 

Les négociations commerciales, pourtant encadrées par un arsenal juridique conséquent, sont marquées par une forte tension où tous les coups semblent parfois permis.

 

Ce rapport fait aussi état du contexte particulièrement difficile qu'affrontent les agriculteurs, la menace qui pèse sur la survie de l'exploitation et de beaucoup d'entre eux et les conséquences graves en termes d'emplois, d'occupation du territoire et de bien-être social qui l'accompagnent. L'avis adopté en séance plénière du Conseil économique social et environnemental a recommandé en premier lieu de réunir les conditions d'un meilleur équilibre des relations commerciales.

 

Une deuxième série de facteurs saillants est liée aux politiques publiques menées dans le passé ou encore en cours :

 

- la libéralisation des marchés agricoles, avec l'intégration des marchés nationaux au marché européen et la disparition des instruments de régulation et de gestion au fur et à mesure de l'évolution de la PAC depuis 1992 (diminution progressive puis abandon des prix garantis, mise en place des aides directes découplées (2003), abandon des quotas laitiers (2015) et sucriers (2017), encadrement strict des dispositifs de « filets de sécurité ») ;

 

- une politique économique essentiellement centrée sur le pouvoir d'achat du consommateur contraire à la logique de construction du prix depuis les coûts de production, comme le montre le rapport sur l’« Évaluation des effets de la Loi de modernisation de l'économie et des stratégies d'alliances à l'achat des distributeurs » de Marie-Laure ALLAIN, Claire CHAMBOLLE et Stéphane TUROLLA, publié le 16 décembre 2016. Les auteurs y expliquent que les autorités de la concurrence voient plutôt favorablement la constitution d'alliances d'achat dont il est attendu un effet positif sur les prix à la consommation, la grande distribution étant censée répercuter au niveau du prix au consommateur la pression exercée sur les fournisseurs mis en concurrence. Les centrales n'ont ainsi pas fait l'objet de contrôle systématique de la part de ces autorités. L'étude montre que ces alliances génèrent effectivement une puissance d'achat qui se répercute dans les négociations commerciales avec une mise sous tension très forte des fournisseurs qui pousse à la baisse des prix, sans pour autant que la répercussion se fasse au niveau des prix à la consommation qui restent globalement assez stables ;

 

- l'absence ou non adéquation aux besoins des outils de gestion de la volatilité sur les prix : l'agriculture française est plus que jamais ouverte sur le monde et plus fortement soumise à la volatilité des marchés et aux aléas diplomatiques internationaux, tels que l'embargo russe. Les mesures de crise (« filet de sécurité ») prévues par le règlement OCM ne permettent que de gérer les aléas majeurs et la « réserve de crise » pourtant prévue dans la PAC n'a pas encore pu être mobilisée. Ce constat appelle une plus grande mobilisation des dispositions visant une responsabilisation des entreprises et des filières, dans le cadre d'une stratégie d'ensemble pouvant s’appuyer notamment sur :

 

- le règlement (UE) n° 1305/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relatif au soutien au développement rural par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) qui prévoit la possibilité de cofinancer un outil de stabilisation des revenus qui serait mis en place par les acteurs professionnels pour indemniser les pertes de revenu de forte ampleur (supérieures à 20 % depuis l'entrée en vigueur du règlement (UE) 2017/2393 du 13 décembre 2017 dit règlement « omnibus ») ;

 

- l’encadrement du regroupement de l’offre de produits agricoles via les organisations de producteurs qui vise à favoriser le renforcement du pouvoir de négociation des entreprises agricoles et faciliter la contractualisation en permettant d’améliorer la gestion des risques économiques ;

 

- l’encadrement de l’organisation des filières agricoles, via les interprofessions, qui vise à favoriser l’adaptation collective à la demande des consommateurs et aux évolutions des marchés et d’améliorer la gestion des risques économiques par la mise en œuvre de stratégies d’actions collectives.

 

 

1.1.2. Description des filières agricoles et alimentaires en France : un secteur amont atomisé et un secteur aval concentré

 

1.1.2.1. Le secteur de la production agricole est fortement atomisé[1]

 

On estime en 2016, en France métropolitaine, à 426 200 le nombre d’exploitations agricoles avec 701 900 actifs, dont 408 800 chefs d’exploitation.

 

Selon la dernière étude disponible (2013), la répartition de la structure des exploitations est la suivante : 32% de petites exploitations ; 29% de moyennes exploitations et 39% de grandes exploitations. Les grandes structures devancent désormais les petites et les moyennes exploitations.

 

Entre 2000 et 2016, le nombre d’exploitations a été réduit de 35%. Les petites et moyennes structures sont les plus touchées. Les secteurs du lait, de la polyculture et du polyélevage subissent les plus fortes baisses. Les exploitations spécialisées en grandes cultures (près d'une exploitation sur quatre) sont celles qui résistent le mieux. La disparition d'exploitations permet l'agrandissement de celles qui se maintiennent.

 

Les moyennes et grandes exploitations occupent 93 % de la surface agricole utile (SAU) et 87 % du volume de travail en agriculture. Un actif agricole sur deux travaille dans une grande exploitation.

 

La valeur de la production agricole en 2016, hors subventions, est estimée à 69,5 milliards d’euros.

 

Au cours de l’année 2016, le total des subventions de la branche agriculture, tout type d’aides confondues, s’élève à 8,18 milliards d’euros.

 

La production 2016, en valeur, hors subvention, se répartit comme suit :

 

 

Valeur 2016

(en Md€)

Céréales

7,7

Plantes industrielles

(Oléagineux, protéagineux, tabac, betteraves industrielles, autres plantes industrielles)

3,8

Plantes fourragères

(Maïs fourrage, autre fourrage)

5,6

Produits maraichers et horticoles

(Légumes frais, plantes et fleurs)

6

Pomme de terre

2,5

Fruits

3

Vins

11,4

Bétail

(Bovins, veaux, ovin-caprins, porcins, équidés)

11,1

Produits avicoles

(Volaille, œufs)

4,6

Autres produits animaux

(Lait et produits laitiers, autres produits de l’élevage)

9

 

En France, le revenu des agriculteurs ne cesse de diminuer. En 2016, et selon des données de la Mutualité sociale agricole (MSA), 50% des agriculteurs auraient touché moins de 350 euros par mois. Entre 2013 et 2015, le revenu annuel moyen des agriculteurs a chuté de 30% (passant de 14 000 euros à 9 700 euros par an). De plus, les agriculteurs font face à un endettement croissant. D’après Agreste, l’endettement moyen des agriculteurs français s’élevait à 159 700 euros en 2010.

 

Plusieurs éléments contribuent à la définition du revenu des agriculteurs, notamment : le prix des produits sur les marchés, les coûts de production (travail et capital, frais d'exploitation) et l'efficacité des investissements. Le secteur de l’agriculture est marqué par des coûts de production importants : les coûts fonciers, la mécanisation, les semences, les produits intrants (phytosanitaires et alimentation animale), les frais de gestion, etc.

 

Les travaux de l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires démontrent une part très réduite (moins de 10 %) de la valeur ajoutée pour l'agriculture dans « l’euro alimentaire » et des maillons agricoles encore fragilisés en 2016, avec des dégradations importantes des marges nettes, qui ne permettent plus de couvrir les coûts de production dans certains secteurs.

 

Tous produits agricoles confondus (y compris ceux non suivis par l’observatoire), la moyenne des prix à la production agricole stagne avec + 0,3% en 2016 par rapport à 2015.

 

L’analyse du ciseau des prix par filière (page 46 du rapport de l’Observatoire pour l’année 2016) montre que la nouvelle baisse des produits agricoles en 2015 paraît une nouvelle fois n’avoir été répercutée que partiellement par l’aval industriel ou commercial.

 

 

1.1.2.2. Une structuration économique des producteurs encore inaboutie

 

Une structuration en organisations de producteurs qui a pris de l'ampleur …

 

Les organisations de producteurs (OP) sont des organisations (associations, coopératives, etc.) qui regroupent des producteurs aux fins de la poursuite de différentes missions à vocation collective (article 152 du règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles (OCM)), telles que des activités de mise en marché ou de commercialisation de la production de leurs membres dans un objectif de rééquilibrage des relations commerciales au sein des filières agricoles et de meilleur partage de la valeur ajoutée le long de la chaîne alimentaire.

 

Peuvent également être créées des associations d’OP (AOP), à l’initiative des OP qui y adhèrent volontairement. Celles-ci peuvent exercer toute activité d'une OP et apparaissent également comme un instrument de rééquilibrage des relations commerciales entre l’aval et l’amont des filières.

 

On dénombre environ 650 OP reconnues et actives dans les différents secteurs de l'OCM, les trois principaux secteurs se répartissant comme suit : élevage-viande (274 OP), fruits et légumes (226 OP), lait (67 OP). Seuls les secteurs des fruits et légumes (29 AOP) et, depuis 2016, du lait de vache (4 AOP) disposent d'AOP reconnues.

 

Nombre d'OP dans les trois principaux secteurs de l'OCM et leur répartition :

 

Secteurs

Secteurs détaillés

Nombre d’OP actives

Élevage-Viande

Bovins

107

Caprins

7

Équins

5

Cunicole

19

Ovins

48

Porcins

33

Volailles

55

Reproducteurs

38

Total

312

Fruits et Légumes

OP

226

AOP

29

Total

255

Lait

Brebis

6

Vache

60

Vache AOP

4

Chèvre OP

1

Total

71

Houblon

 

2

Chanvre et Lin

 

4

Tabac

 

2

Plants de pommes de terre

 

3

Bananes

 

2

Total

 

651

Source : MAA-DGPE 2017

 

Le rythme de reconnaissance se poursuit, avec en moyenne depuis 2012, 3 nouvelles reconnaissances par an dans le secteur des fruits et légumes, 6 dans le secteur de l'élevage-viande, et encore 8 reconnaissances en moyenne depuis 2015 dans le secteur laitier.

 

Les membres des OP sont tenus de livrer à l'OP à laquelle ils adhèrent tout ou partie de leur production. Ainsi, il convient de distinguer :

 les organisations de producteurs dites avec transfert de propriété de la marchandise entre les membres et l'organisation (dans plus de 85 % des cas, il s'agit de coopératives) ;

 les organisations de producteurs dites sans transfert de propriété qui réalisent la commercialisation via un mandat de commercialisation ou qui mettent en relation producteurs et acheteurs au sein de commissions de mise en marché (sans en assurer la vente).

 

Certaines OP, avec transfert de propriété ou disposant d'un mandat, peuvent en particulier développer une contractualisation avec les industries de l'aval afin de sécuriser leurs débouchés et les conditions de vente de leur production et donner plus de visibilité aux producteurs adhérents.

 

Sur ce point, il convient de rappeler que dans certains secteurs (lait cru, viande bovine, huile d'olive, certaines grandes cultures), le règlement n° 1308/2013 habilite les OP (et leurs associations), par dérogation au droit de la concurrence et sous certaines conditions (notamment de seuils en volume – voir section 5 du règlement), à négocier collectivement des contrats de livraison au nom et pour le compte de leurs membres. Cette habilitation ne concerne pas les coopératives ou autres structures avec transfert de propriété, assimilées juridiquement à des entreprises, et donc habilitées de fait à négocier la totalité des volumes.

 

Cette faculté de négociation des OP a été étendue à l'ensemble des filières agricoles depuis  l'entrée en vigueur du règlement 2017/2393 du 13 décembre 2017 dit règlement « omnibus » (voir infra). Cette évolution de la réglementation européenne vise ainsi à permettre aux OP de recourir à la contractualisation et à progressivement apparaître comme l’une des ressources clés de la structuration des différentes filières.

 

 

… mais dont l'impact économique reste limité y compris dans les secteurs où la contractualisation est obligatoire.

 

En premier lieu, la structuration en OP s'est fortement développée mais ne permet pas, le plus souvent, d'accroître significativement le pouvoir de marché des producteurs.

 

Le taux de pénétration estimé du dispositif OP, désignant le pourcentage de structures par filière ayant fait le choix de solliciter une reconnaissance en OP, reste variable selon les secteurs : 25 % de la production laitière, 50 % pour les fruits et légumes et de 48 % (bovins) à 85 % (porcins) pour les différents secteurs de l'élevage-viande.

 

Ce taux de pénétration global est à rapprocher du taux de pénétration du dispositif OP au sein des coopératives : 100 % des coopératives du secteur volailles sont reconnues OP, 78 % dans les autres secteurs de l'élevage-viande, 88 % en fruits et légumes et moins de 1 % dans le secteur du lait (en lien direct avec l'intérêt principal de la reconnaissance dans ce secteur – la négociation collective – intérêt inexistant pour les coopératives).

 

Dans le secteur du lait, le taux d'adhésion des producteurs à une OP (% des producteurs livrant à une laiterie adhérents d'une OP) n'est que de 40 % avec des variations importantes d'une entreprise à l'autre (presque 100 % chez Bongrain, 75 % chez Bel,     87 % chez Danone et moins de 30 % chez Lactalis - données du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux, CGAER, 2015).

 

Cette situation a des conséquences sur la taille des OP : 40 % des OP dans le secteur lait représentent moins de 40 millions de litres ; dans le secteur fruits et légumes 60 % des OP représentent moins de 10 millions d'euros ; en viande bovine 79 % des OP représentent moins de 40 % de la production de la viande bovine commercialisée annuellement par les OP ; en viande porcine, 67 % des OP représentent moins de 20 % de la production de viande porcine commercialisée annuellement par les OP ; en viande ovine, 67 % des OP représentent moins de 40 % de la production de viande porcine commercialisée annuellement par les OP.

 

Il est ainsi constaté qu'il y a encore des marges de progrès à réaliser pour renforcer la place du producteur dans la filière alimentaire.

 

Par ailleurs, la négociation collective de contrats notamment dans le secteur du lait cru et des produits laitiers est encadrée par la réglementation européenne qui plafonne le volume de lait cru pouvant faire l’objet d’une négociation collective au regard de la production au niveau de l’Union européenne à 3,5 % de la production totale de l’Union, à 33 % de la production nationale totale de l’État membre ou de l’État membre dans lequel le lait cru est livré.

 

Dans les faits, ces seuils ne sont toutefois pas limitants à ce jour : les structures désireuses d'une reconnaissance en OP ou en AOP restent bien en deçà des seuils fixés. À titre d'exemple aujourd'hui les plus importantes AOP et OP reconnues représentent une production de 1 600 ML lait de vache pour l'AOP Grand Ouest et 60 ML lait de brebis pour l'OP du Bassin de Roquefort) sur une production nationale de 25 ML en 2014.

 

On note ainsi qu'il existe encore une marge importante de croissance pour les OP car leurs parts de marché se situent encore très en-dessous des seuils européens.

 

Par conséquent, la relative faiblesse des OP limite leur capacité à se saisir de l'outil contractuel mis en place par le législateur à partir de la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 relative à la modernisation de l'agriculture et de la pêche (LMAP - article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime).

 

Dans le secteur du lait où la contractualisation sous forme écrite a été rendue obligatoire, alors que 85 % des producteurs ont un contrat signé avec une entreprise privée de collecte (estimation CGAAER 2015), les producteurs interrogés par le CGAAER dressent un bilan essentiellement négatif de leur expérience en OP car la contractualisation obligatoire ne leur évite pas une position d'infériorité et de dépendance vis-à-vis des entreprises et il n'existe toujours aucune procédure de partage de la marge et de la valeur ajoutée. Les présidents d'OP regrettent de n'avoir qu'un rôle restreint et un poids faible dans la négociation.

 

Cette faiblesse des OP résulte en partie du fait que l'obligation pour les acheteurs industriels de proposer un contrat écrit, issue du décret n° 2010-1753 du 30 décembre 2010, est intervenue antérieurement à la possibilité pour les éleveurs de s'organiser en OP pour négocier ces contrats, ouverte par le décret n° 2012-512 du 19 avril 2012 relatif à l'organisation économique dans le secteur du lait de vache, ce qui a conduit les industriels à privilégier une relation contractuelle individuelle avec les producteurs. Cette situation perdure aujourd'hui dans des relations souvent verticales et exclusives entre l'OP et son collecteur, au détriment d'une organisation collective de la production plus territoriale et en capacité de mettre en concurrence plusieurs acheteurs.

 

Enfin, s’agissant de la contractualisation dans le secteur des fruits et légumes (cadre non dérogatoire aux règles de la concurrence), les acteurs n'utilisent que très peu les dispositions prévues par le décret n° 2010-1754 du 30 décembre 2010. Ils font valoir que la durée minimale de 3 ans imposée par ce décret pour les contrats paraît difficile à respecter. En effet, la très grande variabilité des cycles de production pour des produits périssables ne leur permet pas de s'engager sur le long terme. Par ailleurs l'exclusion du périmètre de l'obligation de contractualiser des produits importés a fait craindre aux acteurs une dégradation de leur compétitivité.

 

Des interprofessions insuffisamment représentatives et présentes sur les missions économiques

 

Si 70 interprofessions sont reconnues en France aujourd'hui, 80 % d'entre elles sont qualifiées de « courtes » car elles ne regroupent que deux maillons de la filière, par exemple la production et le négoce dans le secteur des boissons et des vins. D'autres sont qualifiées de « longues » car en plus des maillons de la production et de la transformation, y est représenté le maillon de la distribution : INAPORC, INTERBEV, les deux interprofessions de l'Ile de La Réunion, AIBanane, Interfel pour les fruits et légumes notamment.

 

S'il y a une grande hétérogénéité dans le rôle que jouent ces organisations dans la structuration économique des filières selon le rapport du CGAAER de mars 2017, le manque de coordination au sein de nombreuses filières peut être en partie considéré comme une conséquence de l'absence de certains maillons au sein des interprofessions et pose question au regard des enjeux auxquels sont confrontés les filières.

 

Les interprofessions ont développé beaucoup d'actions pour les filières qu'elles représentent (promotion des produits sur le marché intérieur, prospective des marchés extérieurs), mais si l'article 157 du règlement (UE) n° 1308/2013 précité leur offre la possibilité d'exercer un certain nombre d'activités économiques, elles s'emparent aujourd'hui insuffisamment de ce type de missions notamment en matière de définition de stratégies collectives de filières, de veille économique sur les débouchés, de définition de contrat-type ou d'obligation de contractualisation, ou encore la définition et de suivi d'indicateurs permettant d'objectiver le partage de la valeur de l'amont à l'aval des filières.

 

Ainsi la structuration économique des producteurs, si elle a progressé, reste insuffisante pour leur permettre de peser face à leurs interlocuteurs de plus en plus concentrés et nécessite un renforcement conséquent.

 

 

 

1.1.2.3. Le secteur des industries agroalimentaires (IAA) connaît une concentration relative[2]

 

D’après les dernières données disponibles (2014), on dénombrait 17 647 entreprises agroalimentaires en France. Ce secteur représente un chiffre d’affaires de 171 milliards d’euros.

 

En 2016, l’emploi dans les IAA s’est accru pour la deuxième année consécutive. Au 4ème trimestre 2016, les IAA employaient 554 000 salariés, soit 4 700 emplois de plus qu’en 2015, alors que, sur la même période, l’industrie manufacturière qui comptait 2,74 millions de salariés enregistrait un recul d’environ 10 900 emplois.

 

Dans l’Union européenne, en nombre d’entreprises, la France se situe au deuxième rang derrière l’Italie et en nombre de salariés et de chiffre d’affaires, au second rang derrière l’Allemagne.

 

En 2016, la production totale des IAA a reculé en volume, après deux années de croissance atone, alors que le chiffre d’affaires a légèrement progressé.

 

La transformation de produits de l’élevage occupe une place importante et grandissante dans le secteur : 39% du chiffre d'affaires des IAA et 40% de l’emploi sont apportés par les industries de la viande et du lait.

 

 

1.1.2.4. La distribution alimentaire est, à l’inverse, caractérisée par une forte concentration

 

Selon l’avis de l’Autorité de la concurrence n° 15-A-06 du 31 mars 2015 relatif au rapprochement des centrales d’achat et de référencement dans le secteur de la grande distribution, les parts de marché des principaux acteurs de la distribution à dominante alimentaire sont les suivantes :

 

 

Part de marché (PDM)

Carrefour

21,8%

Leclerc

19,9%

Intermarché

14,5%

Casino

11,5 %

Auchan

11,3 %

Système U

10,3%

Lidl

4,7%

Cora

3,3%

Aldi

2,2%

 

Deux processus de regroupement des achats, s’intensifiant depuis 2014, sont observés dans la grande distribution alimentaire : l’un au niveau national, l’autre au niveau international.

 

En France, trois rapprochements ont été opérés en 2014 :

 

-         Intermarché Alimentaire International et EMC Distribution (Casino) ont conclu, le 7 novembre 2014, un accord de coopération relatif à la négociation des achats d’une partie des produits à marque nationale que leurs enseignes respectives commercialisent. La création de la centrale INCAA, représente 25,9 % de parts de marché ;

-         Carrefour et Provera (Cora) ont conclu une convention de partenariat le 22 décembre 2014, prévoyant l’adhésion de Provera aux centrales de référencement de Carrefour. Le rapprochement à l’achat de ces deux entités représente 25,1 % de parts de marché ;

-         Système U Centrale Nationale a confié un mandat à Eurauchan pour la négociation des achats d’une partie des produits à marque nationale que ses enseignes commercialisent. Le rapprochement à l’achat de ces deux entités représente 21,6% de parts de marché.

 

Les parts de marché résiduelles dans le secteur de la distribution à dominante alimentaire sont constituées par les enseignes LIDL et ALDI, les petits commerces de bouche et les sites internet.

 

À ces regroupements à l’achat, se superposent des centrales créées hors du territoire national, qui ont pour objet de permettre aux coopérateurs de développer leurs activités et services transnationaux (négociation commune de la fourniture des grandes marques internationales ; élargissement de l’offre nationale et diminution des coûts d’approvisionnement ; expérimentation de marchés tests et lancement coordonné de produits nouveaux ; construction d’un référentiel de produits commun).

 

Les centrales internationales ont connu un développement rapide ces trois dernières années, avec des restructurations fréquentes entrainant de multiples changements d’alliances entre les enseignes de la distribution en Europe.

 

Les entreprises de l'aval, et en particulier celles de la distribution ont ainsi acquis un pouvoir de marché considérable qui fait peser sur les maillons d'approvisionnement, notamment la production une pression très forte et réduit leur capacité à négocier à la fois les prix de vente de leurs produits mais aussi les conditions de vente et de valorisation de leurs produits.

 

1.1.3. Le constat d’un déséquilibre des rapports de force sur les marchés agricoles partagé par les institutions européennes qui proposent des évolutions réglementaires

 

Une Task force Marchés agricoles a été créée par la Commission européenne en janvier 2016 pour rassembler un groupe d'experts qui puisse travailler à l'amélioration de la place des producteurs au sein de la chaîne d'approvisionnement alimentaire. Elle a rendu public en novembre 2016 un rapport qui émet un certain nombre de recommandations sur ce sujet[3].

 

Le rapport souligne qu'aujourd'hui, dans une situation de marché beaucoup plus ouverte marquée par la réduction des mesures de marché, les producteurs sont en première ligne au sein de la chaîne pour absorber les chocs en termes de volatilité des prix et de prix bas sur une longue période. Dans le même temps, les partenaires commerciaux des agriculteurs, que ce soit en amont (semenciers, vendeurs d'intrants) ou en aval (transformation, commerce), sont en voie de concentration. Le pouvoir de négociation au sein de la chaîne a évolué et cette évolution ne s'est pas faite en faveur des producteurs agricoles. Leur part dans la valeur ajoutée a subi une pression à la baisse, et les exploitations agricoles, dont le nombre est en diminution, doivent se spécialiser ou s'accroître pour rester viables.

 

Les pratiques déloyales de concurrence sont aussi dénoncées comme la conséquence de ce rapport de force particulièrement défavorable aux producteurs et la Task force a préconisé la création d'une réglementation européenne en la matière qui ne fait pas l'unanimité au sein des États membres. Le Conseil européen a acté la demande majoritaire des États de ne prendre une décision en la matière qu'au vu d'une étude des législations nationales et d'une étude d'impact. La Commission européenne a lancé une consultation publique sur ces pratiques qui s'est achevée le 17 novembre 2017 et a sollicité par ailleurs les États membres pour qu'ils lui communiquent l'état de leur législation en la matière.

 

Le rapport estime que l'absence de contrats écrits représente souvent un désavantage pour les producteurs et que ces derniers devraient pouvoir, conformément aux règles européennes, demander et obtenir des contrats écrits. Cela va par ailleurs dans le sens de la possibilité offerte aux États membres par le règlement (UE) n ° 1308/2013 précité de rendre les contrats écrits obligatoires. Pour la Task force, les contrats, et principalement les contrats de longue durée et les contrats à terme, peuvent aider les producteurs à gérer leurs flux financiers et les risques, à planifier leurs investissements et à offrir aux consommateurs des produits plus innovants et inscrits dans une plus grande durabilité. La contractualisation peut également bénéficier à leurs partenaires commerciaux et aux consommateurs en améliorant la communication et la transmission des informations de marché tout au long de la chaîne.

 

Le rapport pointe aussi l'insécurité juridique liée à un manque de clarté des dérogations au droit de la concurrence pour le secteur agricole que prévoient les textes européens, et qui a conduit au contentieux sur les accords passés au sein du secteur français des endives entre des OP et AOP. Cette insécurité juridique est souvent évoquée par les professionnels pour expliquer leur réticence au sujet des missions économiques qui leur sont confiées malgré leur regroupement en OP et au sein des interprofessions.

 

Par ailleurs, dans le cadre des textes relatifs à la politique agricole commune, la Commission a proposé une série de révisions à mi-parcours (proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union dit règlement « omnibus ») qui visait initialement à clarifier et simplifier les dispositions réglementaires existantes.

 

Les parlementaires de leur côté, forts du diagnostic partagé au niveau européen des difficultés des agriculteurs et de leur faible poids dans la chaîne alimentaire, ont souhaité apporter des modifications plus substantielles[4], et en particulier sur le règlement (UE) n°1308/2013 précité, qui visent notamment à renforcer l'organisation économique et la place du producteur dans la chaîne alimentaire. Les différents trilogues entre la Commission, le Conseil et le Parlement ont conduit à un accord offrant des avancées substantielles (voir infra § 1.2.1).

 

 

1.1.4. Une médiation obligatoire dont l'efficacité doit être renforcée

Pour favoriser la résolution à l'amiable des litiges entre parties relatifs à la conclusion ou l'exécution des contrats, la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 relative à la modernisation de l'agriculture et de la pêche (LMAP) a créé le médiateur des contrats agricoles.

 

La loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt a renforcé les missions de ce médiateur des contrats agricoles devenu médiateur des relations commerciales agricoles (article L. 631-27 du code rural et de la pêche maritime). Il est désormais compétent pour tout litige relatif à la conclusion et à l'exécution d'un contrat ayant pour objet la vente ou la livraison de produits agricoles ou alimentaires destinés à la revente ou à la transformation et il peut émettre des recommandations visant un partage équitable de la valeur ajoutée tout au long de la chaîne de production et de distribution.

Cette loi a rendu obligatoire le recours à la médiation, préalablement à la saisine d’un juge, pour tout conflit portant sur l'exécution d'un contrat ou pour tout différend portant sur la renégociation du prix en cas de fluctuations des prix des matières premières agricoles et alimentaires affectant significativement les prix à la production (article L. 631-28).

Le médiateur des relations commerciales agricoles peut être saisi individuellement ou par les interprofessions, comme cela a par exemple été le cas sur le prix d’équilibre du lait ou la transformation de la filière des poules pondeuses. Il peut émettre des recommandations visant un partage équitable de la valeur ajoutée tout au long de la chaîne de production et de distribution. En revanche, il n’est pas en mesure de s’autosaisir.

Il est constaté que les parties n'ont pas recours au juge de droit commun pour trancher leurs différends. Le coût et la durée de la procédure judiciaire ont été identifiés comme les principaux freins au recours aux tribunaux, tout comme le caractère public de la procédure.

Le médiateur des relations commerciales agricoles est en revanche régulièrement sollicité à propos de la conclusion et de l'exécution des contrats de vente, ce qui a conduit à renforcer son équipe en 2017.

Depuis sa création en 2010, le médiateur a traité plus de 1 500 situations de relations économiques, soit une moyenne annuelle de 214 situations (un même dossier peut renvoyer à plusieurs situations de relations économiques comme dans le cas d'une saisine collective d'une organisation de producteurs relative à un accord cadre sur lequel devraient s'appuyer les contrats individuels entre les producteurs et le metteur en marché). 1 200 situations portaient sur la filière du lait de vache, soumise à contractualisation obligatoire. Les autres situations ont porté sur les filières lait de chèvre, lait de brebis, avicole, porcine, pâtes, mais dans des proportions bien moindres (une seule saisine dans certaines filières).

 

Sur les 1 500 situations litigieuses, 200 avaient pour origine des saisines individuelles, relatives à des litiges portant sur la renégociation du prix, l'application des clauses de pénalités, ou les conditions de sortie d'un contrat lorsque le producteur cessait son activité ou qu'il souhaitait s'engager avec une autre partie (montée en gamme et donc nouvelle valorisation nécessaire par exemple).

60 d’entre elles étaient relatives aux relations entre fournisseurs et distributeurs (15 ont été gérées directement par la médiation des relations commerciales agricoles et 45 ont été traitées par les médiateurs des enseignes mis en place progressivement par le médiateur des relations commerciales et qui exercent la médiation sous son contrôle - à ce jour seules deux enseignes ne disposent pas encore de médiateur interne). 95 % des médiations conduites pour ces saisines individuelles ont abouti à un accord entre les parties.

La majeure partie des dossiers adressés au médiateur des relations commerciales agricoles faisaient suite à des saisines collectives portant principalement sur la conclusion d'accords-cadres dans le secteur du lait de vache renvoyant chacune à une dizaine de dossiers individuels.

Ces litiges ont essentiellement concerné les clauses liées à l'élaboration de la formule prix, la révision ou la renégociation des prix. La médiation n’a pas toujours pu aboutir, notamment dans le secteur du lait de vache car in fine l'acheteur signe un contrat avec le producteur sans être tenu de signer un accord-cadre avec l'OP.

C'est la position de l'acheteur qui finit par l'emporter en raison du déséquilibre du rapport de forces entre les deux acteurs. Le taux de réussite de la médiation est estimé entre 30 et 40 %, selon que l'on raisonne en nombre de dossiers ou en nombre de relations économiques concernées.

Les producteurs déplorent la capacité de certaines entreprises de l'aval à prolonger la médiation, au point de rendre inopérant le dispositif, le délai de médiation devenant incompatible avec le calendrier économique des négociations, qui ont lieu quasiment annuellement du fait des fluctuations de prix.

Quant au Médiateur des entreprises (précédemment Médiateur inter-entreprises), alors qu'il ne traitait que 100 dossiers par an à sa création, il reçoit désormais près de 1 000 saisines par an, tous secteurs économiques confondus. Sur les 1 000 dossiers de médiation traités en 2016, 75% ont trouvé une issue favorable. Les principaux motifs de saisine sont :

-                                              des clauses contractuelles déséquilibrées ;

-                                              une modification unilatérale ou une rupture brutale du contrat ;

-                                              le non-respect d’un accord verbal ;

-                                              le non-respect des conditions de paiement (retards de paiement, retenues injustifiées, pénalités abusives) ;

-                                              l'absence de conformité des services ou des marchandises ;

-                                              le vol ou le détournement de la propriété intellectuelle ;

-                                              le non-versement du crédit impôt recherche (CIR) et du crédit impôt innovation (CII).

Le médiateur des entreprises traite environ une dizaine de cas par an concernant la filière alimentaire et n'a été saisi qu'à une seule reprise d'une clause de renégociation, dans le secteur de la viande, ce qui révèle que les opérateurs se tournent davantage vers le médiateur des relations commerciales agricoles.

Il faut également rappeler que le médiateur des entreprises est particulièrement impliqué dans la charte « Relations fournisseur responsables », le label « Relations fournisseurs responsables » et le soutien à l’innovation, aux côtés de porteurs de projets innovants, particulièrement les plus petits d’entre eux, start-up, TPE ou PME, de manière à valoriser et encourager les bonnes pratiques en matière de relations commerciales agricoles.

Ainsi pour les situations dans lesquelles la médiation n'aboutit pas à un accord, il apparaît nécessaire de proposer des solutions pour rééquilibrer le rapport de force dans la filière.

1.2. État du droit et bilan de son application

1.2.1. Évolution du droit européen

 

Le règlement n° 1308/2013 du 17 décembre 2013 portant organisation commune de marché (OCM) a renouvelé le cadre européen de l'organisation économique des secteurs agricoles, dans le but de renforcer le pouvoir économique des producteurs à travers une meilleure sécurisation juridique des différentes structures.

 

S'agissant des OP, il s’agissait :

 

- d'étendre le dispositif de reconnaissance en OP à l'ensemble des filières couvertes par le règlement OCM (article 152), alors que le règlement antérieur ne concernait que les filières des fruits et légumes, de la viticulture et, depuis 2012, du lait ;

 

- de préciser les critères de reconnaissance des OP (article 154) notamment l'obligation pour celles-ci d'être constituées et contrôlées par des producteurs, et l'obligation de disposer d'une capacité minimale mesurée selon le nombre de producteurs concernés ou selon un volume de produits commercialisables dans la zone géographique d'opération, selon des modalités laissées au choix des États-membres ; par ailleurs, les statuts des OP doivent comprendre des exigences concernant l'application des règles adoptées par l'OP, l'impossibilité de double adhésion à une OP pour un même produit, les règles de contrôle de l'organisation et de ces décisions par ses membres, les sanctions pour violation des obligations statutaires ou des règles établies par l'organisation ;

 

- de faire évoluer la capacité d'extension des accords des OP et AOP à des opérateurs non membres de ces différentes formes d'organisation. Cette capacité repose sur des critères de représentativité, fixés en proportion des producteurs concernés (au moins la moitié). L'article 164 du règlement encadre la procédure d'extension en définissant notamment une liste fermée d'objectifs autorisés et en limitant la durée d'extension des règles ;

 

- de rendre possible pour les OP de certains secteurs (viande bovine, huile d'olive et grandes cultures) de négocier des contrats de livraison pour le compte de leurs membres, cette possibilité étant également reconduite pour le lait en dérogation au droit de la concurrence en matière de fixation du prix ;

 

- en matière de contrôles et sanctions, de confier aux États membres le soin de définir leurs modalités, ces sanctions pouvant aller jusqu'au retrait de reconnaissance s'ils le décident ;

 

- enfin, une évolution majeure du règlement porte sur le droit de la concurrence, puisqu'il mentionne expressément (article 209) que les OP et AOP ne sont pas soumises au paragraphe 1 de l'article 101 du TFUE (prohibition des ententes). Pour autant, les OP et les AOP ne peuvent conclure des accords qui comporteraient une obligation de pratiquer un prix déterminé ou qui auraient pour effet d'exclure la concurrence ou de mettre en péril les objectifs de la PAC.

 

De la même manière s'agissant des organisations interprofessionnelles, il s'agissait notamment :

 

- d'étendre le dispositif de reconnaissance des interprofessions à l'ensemble des filières couvertes par l'OCM (article 157) alors que le règlement antérieur ne concernait que les filières des fruits et légumes, de la viticulture, de l'huile d'olives, des olives et du tabac et, depuis 2012, du lait ;

 

- de préciser les critères de reconnaissance (article 158) et la liste (non exhaustive) des objectifs pouvant être poursuivis par les organisations interprofessionnelles (article 157) étant précisé cependant que s'agissant du secteur laitier, la liste des missions définies en 2012 est restée identique et est exhaustive (article 157 paragraphe 3) ;

 

- de permettre aux États membres de procéder à l'extension des accords interprofessionnels dans le cas où la détermination de la proportion de volume de la production ou du commerce ou de la transformation du produit ou des produits concernés de deux tiers pose des problèmes pratiques, de fixer des règles nationales afin de déterminer le niveau précis de représentativité de ces deux tiers (article 164 paragraphe 3. b) 2ème alinéa) ;

 

- de préciser la liste (exhaustive) des objets des accords pouvant être étendus (article 164 paragraphe 4) ;

 

- lorsque des accords sont étendus de préciser les conditions des contributions financières des non-membres des organisations interprofessionnelles, c'est à dire notamment sous réserve que les activités couvertes par ces accords présentent un intérêt économique général pour les opérateurs économiques dont les activités sont liées aux produits concernés ;

 

- au regard du droit de la concurrence, l'article 210 mentionne expressément pour toutes les filières couvertes par l'OCM que les interprofessions ne sont pas soumises à l'article 101 paragraphe 1 du TFUE (prohibition des ententes). Toutefois, les accords, décisions et pratiques concertées ne peuvent entraîner quelque forme de cloisonnement des marchés que ce soit à l'intérieur de l'Union, ne peuvent pas nuire au bon fonctionnement des marchés, ne peuvent pas créer des distorsions de concurrence, ne peuvent pas comporter la fixation de prix ou de quotas, ne peuvent pas créer des discriminations ou éliminer la concurrence pour une partie substantielle des produits concernés. Comme pour les OP, le règlement prévoit la possibilité pour les interprofessions de notifier leurs accords, décisions et pratiques et de solliciter la Commission européenne pour lui demander son opinion quant à leur compatibilité avec le droit européen de la concurrence.

 

Plus récemment, le règlement (UE) 2017/2393 du 13 décembre 2017, dit règlement « omnibus », a reconnu un droit au contrat écrit dans le secteur du lait pour tout producteur le demandant. Il prévoit cette même possibilité pour les producteurs, en dehors du secteur du lait, d'exiger de l'acheteur un contrat écrit et l'extension à tous les secteurs des possibilités de négociation collective des contrats et une extension des dérogations à l'article 101 du TFUE qui permet aux organisations de producteurs (OP) de planifier la production, d'optimiser les coûts de production et de procéder à des mises en marché. Il inclut également une disposition  permettant aux OP de notifier leurs accords à la Commission européenne pour lui demander son opinion quant à la compatibilité de leurs accords portant sur la production, la vente de produits agricoles, l'utilisation d'installations communes de stockage, de traitement ou de transformation de produits agricoles avec le droit européen de la concurrence. Les interprofessions peuvent également prévoir des clauses types de partage de la valeur qui ne pourront cependant pas être étendues. Elles pourront aussi prévoir des mesures de prévention et de gestion des risques (santé animale, protection des végétaux, environnement), hors secteur lait.

Ces dispositions et leurs évolutions montrent la volonté de renforcer les outils à disposition des OP et des organisations interprofessionnelles pour notamment rééquilibrer les relations contractuelles, sécuriser juridiquement les actions des organisations de producteurs et ainsi renforcer la place du producteur dans la chaîne alimentaire au fur et à mesure que les outils de régulation de la PAC diminuent.

1.2.2. Évolution du droit national

 

Depuis 2010, des dispositions législatives et réglementaires ont été introduites afin d'accroître la compétitivité de l'agriculture française, notamment en développant des outils pour lutter contre la volatilité des prix agricoles, en renforçant la place du producteur dans la chaîne alimentaire et en réduisant le déséquilibre des rapports de force au sein des filières. Ces textes ont complété le cadre législatif et réglementaire existant.

 

La loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 relative à la modernisation de l'agriculture et de la pêche (LMAP) a renforcé la compétitivité de l'agriculture française en améliorant notamment la prévisibilité et la stabilité des prix.

 

Elle a introduit à l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime la possibilité de rendre obligatoire la conclusion de contrats écrits entre producteurs et acheteurs de certains produits agricoles destinés à la revente en l'état ou à la transformation. Elle a défini les clauses obligatoires que ces contrats doivent contenir en recherchant un meilleur équilibre entre les parties prenantes afin de permettre aux producteurs d'obtenir des prix de cession plus rémunérateurs.

 

Pour répondre aux fluctuations importantes des prix dans les secteurs du lait de vache et des fruits et légumes frais destinés à la revente et de leurs répercussions sur les prix payés aux agriculteurs, deux décrets du 30 décembre 2010 ont rendu la contractualisation écrite obligatoire dans ces secteurs afin que les producteurs aient une visibilité sur leur activité :

- le décret n° 2010-1753 pris pour l'application de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime dans le secteur laitier ;

- le décret n° 2010-1754 pris pour l'application de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime dans le secteur des fruits et légumes.

 

Pour favoriser la résolution à l'amiable des litiges entre parties relatifs à la conclusion ou l'exécution des contrats, le médiateur des contrats agricoles a été créé.

 

Enfin, l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, qui a notamment pour missions d'éclairer les acteurs économiques et les pouvoirs publics sur la formation des prix et des marges des produits alimentaires et d'étudier les coûts de la production agricole, de la transformation et de la distribution dans l'ensemble de la chaîne de commercialisation a également été créé (article L. 682-1 du code rural et de la pêche maritime).

 

La loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt (LAAF) a aménagé le cadre contractuel créé par la LMAP, notamment dans la filière laitière, en rendant obligatoire soit une proposition de contrat par l'acheteur, soit la conclusion du contrat (modification de l'article L. 631-24 du CRPM).

 

Cette loi a rendu obligatoire le recours à la médiation, préalablement à la saisine d’un juge, pour tout conflit portant sur l'exécution d'un contrat ou pour tout différend portant sur la renégociation du prix en cas de fluctuations des prix des matières premières agricoles et alimentaires affectant significativement les prix à la production (article L. 631-28 du CRPM).

 

L'article 2 de l'ordonnance n° 2015-1248 du 7 octobre 2015 portant adaptation du code rural et de la pêche maritime au droit de l'Union européenne a ensuite modifié les articles L. 631-24 et L. 631-25 afin de tirer les conséquences de l'entrée en vigueur du règlement (UE) n° 1308/2013 du 17 décembre 2013 portant organisation commune de marché. Ces modifications visaient à assurer la mise en conformité des dispositions nationales avec le règlement (UE) n° 1308/2013.

 

Il a prévu notamment que l'article L. 631-24 n'est pas applicable « aux sociétés mentionnées à l'article L. 521-1 dès lors qu'elles ont remis à leurs associés coopérateurs un exemplaire des statuts ou du règlement intérieur ou les règles ou décisions prévues par ces statuts ou en découlant intégrant les clauses contractuelles mentionnées au I » du même article.

 

Enfin la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique a introduit plusieurs mesures visant à renforcer la transparence des relations commerciales et à favoriser la contractualisation écrite obligatoire.

 

À l'amont, la conclusion d'un accord-cadre entre une organisation de producteurs (OP) ou une association d'organisation de producteurs a été rendue obligatoire préalablement à la négociation des contrats par les producteurs. En outre, les contrats doivent faire référence à des indices publics de marché et de coûts de production et comporter l'indication du prix prévisionnel moyen payé au producteur dans les contrats aval. À l'aval, la possibilité pour les entreprises et les distributeurs de négocier des contrats pluriannuels a été introduite, avec une clause obligatoire de révision des prix.

 

Ces différentes dispositions et leurs évolutions tendent à encadrer davantage les relations contractuelles, à redonner un pouvoir de négociation aux producteurs, à sécuriser leurs débouchés, à tenir compte des coûts de production dans la formation des prix et à réduire le déséquilibre des rapports de force sur le marché.

 

1.2.3 Un bilan mitigé

 

Le bilan contrasté que dressent les acteurs des secteurs où la contractualisation écrite a été rendue obligatoire révèle une réelle insatisfaction.

 

L'encadrement de la contractualisation apparaît préjudiciable tant aux agriculteurs qui manquent de formation et d'appui juridique pour négocier le contenu des contrats qu'aux petites entreprises de l'aval, industriels locaux, grossistes notamment qui dénoncent non seulement la complexité de ces textes mais aussi leur manque de cohérence, notamment entre le code du commerce et le code rural et de la pêche maritime.

 

Ainsi, l'article L. 631-24 du CRPM, dans sa rédaction issue de la loi du 9 décembre 2016 prévoit que « les critères et modalités de détermination du prix font référence à un ou plusieurs indices publics de coûts de production en agriculture qui reflètent la diversité des conditions et des systèmes de production et à un ou plusieurs indices publics des prix des produits agricoles ou alimentaires ».

 

Or, les filières concernées par ces dispositions ont mis en avant la difficulté à traduire la diversité des conditions et des systèmes de production et l'indisponibilité d'indices répondant à ces critères.

 

De même, l'article L. 441-6 du code du commerce dispose que « pendant la durée de leur application, les conditions générales de vente relatives à des produits alimentaires comportant un ou plusieurs produits agricoles non transformés devant faire l'objet d'un contrat écrit, (...) indiquent le prix prévisionnel moyen proposé par le vendeur au producteur de ces produits agricoles », lequel peut faire référence éventuellement à plusieurs indices de coûts de production et « à un ou plusieurs indices publics des prix de vente aux consommateurs des produits alimentaires ».

 

L'application de cette disposition, qui a pour objectif la prise en compte des coûts de production de l'agriculture dans la fixation du prix jusqu'au consommateur, a suscité beaucoup d'interrogations. Les transformateurs ont souligné que pratiquer le prix prévisionnel moyen revenait pour les industriels à dévoiler leurs coûts d'approvisionnement et le niveau de leurs marges ce qui leur a semblé impossible car contraire au droit des affaires.

 

Il est dès lors nécessaire de surmonter les difficultés rencontrées en la matière.

 

Du côté de l'amont, les producteurs regrettent que le formalisme et l'encadrement prévu par cet article ne s'appliquent que dans les secteurs soumis à contractualisation obligatoire. Ils estiment également que la complexité des textes réglementaires ne permet pas de contribuer au rééquilibrage du rapport de force. Ainsi les professionnels de la production laitière posent le constat que si la contractualisation a permis de sécuriser les débouchés de la filière (environ 85 % des producteurs sont sous contrat selon le CGAAER – rapport n°15 053 de décembre 2015 sur la mise en œuvre de la contractualisation dans la filière laitière : enjeux de la filière lait de vache dans le contexte de la fin des quotas), elle n'a pas permis d'assurer des prix plus rémunérateurs et qui couvrent les coûts de production, ni de limiter les risques de crise.

 

Les professionnels de la filière fruits et légumes évoquent également comme causes de la faible application du décret n° 2010-1754 du 30 décembre 2010 cette complexité et une inadaptation du dispositif aux caractéristiques de leur filière.

 

Enfin, la faiblesse du régime des sanctions, voire l'absence de sanctions, notamment en cas de non conclusion de l'accord-cadre prévu par l'article L. 631-24, ou le manque de moyens pour effectuer des contrôles conduisent à un manque d'effectivité de certaines dispositions de la loi, par exemple concernant les clauses de renégociation.

 

Cette insatisfaction des acteurs des filières vis-à-vis des dispositions prévues à l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime rend ainsi nécessaire une évolution.

 

Plus globalement, la contractualisation se développe difficilement, y compris sur une base volontaire, car si un certain nombre d'accords interprofessionnels prévoient déjà des contrats types et des clauses minimales, le recours au contrat écrit demeure à ce jour assez peu fréquent dans beaucoup de filières.

 

État des lieux de la contractualisation en 2017 :

 

Secteur

Filière

Type de contractualisation

Vecteur

Date

Analyse

Laitier

Lait de vache

Proposition de contrat obligatoire pour l'acheteur

Décret

2010

Bilan très mitigé : 85 % des producteurs sont sous contrat pour une durée réglementaire de 5 ans minimum mais peu d'impact sur les prix et beaucoup de litiges portés devant le médiateur

 

Lait de chèvre

Proposition de contrat obligatoire pour l'acheteur

Accord interprofessionnel

2017

Recul insuffisant pour pouvoir dresser un état des lieux

 

Lait de brebis

Proposition de contrat obligatoire pour l'acheteur

Décret

En cours

Trois interprofessions engagées dans la formalisation du futur accord

Fruits et légumes

Destinés à la revente à l'état frais

Proposition de contrat obligatoire pour l'acheteur

Décret

2010

Durée de 3 ans pour les contrats mais les dispositions restent largement non appliquées car considérées par les professionnels comme inadaptées aux réalités de la filière : la durée de 3 ans paraît difficile à respecter, la très grande variabilité des cycles de production pour des produits périssables ne permet pas de s'engager sur le long terme, l'exclusion du périmètre de l'obligation des produits importés fait craindre une plus grande concurrence.

 

Destinés à la transformation

Contractualisation volontaire généralisée

 

 

 

Élevage-viande

Bovins

Contractualisation volontaire

 

 

Contractualisation encore marginale et peu pratiquée

Surtout présente pour la commercialisation des jeunes bovins (10 à 30 % de la production)

Accord interprofessionnel depuis 2013 qui prévoit des clauses minimales pour les contrats

Parallèlement : réel défaut d'adaptation de l'offre à la demande

 

Porcins

Contractualisation volontaire

 

 

Faible entre tous les maillons (en dehors des contrats d'engagement éleveurs coopératives).

Pratiques de prix spot dominante dont variations lissées par fréquence des ventes.

 

Ovins

Contractualisation fortement incitée car liée jusqu'en 2016 à une majoration de l'aide ovine

Accord interprofessionnel jusqu'en 2016

2014

Peu de recul et difficulté à dresser un état des lieux car l'accord n’a pas fonctionné suffisamment longtemps.

 

Volailles

Contractualisation volontaire

 

 

Fortement présente par le biais de différents types de contrats « d'intégration » en amont de la filière et pilotée par les OP

Inexistante entre le maillon OP et ses acheteurs à l'aval de la filière

Source MAA BRESE-DGPE 2017

 

 

Il ressort de cet état des lieux de l'application des textes en vigueur qu'il est indispensable de rechercher des leviers permettant à la fois d'inciter les acteurs à contractualiser dans le cadre prévu par la loi, de sécuriser juridiquement ce type d'engagement et d'en assurer l'effectivité.

 

2. Objectifs poursuivis

Dans son discours du 11 octobre 2017, le Président de la République a fixé des objectifs ambitieux de réforme des modèles agricoles.

 

Le premier d’entre eux est de permettre aux agriculteurs de vivre dignement de leur travail par le paiement de prix justes, ce qui implique en corollaire de relancer la création de la valeur et d’en assurer l’équitable répartition.

 

Un deuxième objectif est d’accompagner la transformation des modèles de production pour mieux répondre aux attentes des consommateurs.

 

Si, comme l’a indiqué le Président de la République, la loi ne peut pas à elle seule mettre en œuvre cette transformation profonde des filières alimentaires, qui nécessite une prise de conscience collective et des efforts individuels pour que les comportements se modifient, le législateur doit pouvoir accompagner cette transformation et la faciliter, en adaptant les règles commerciales pour permettre aux agriculteurs d’obtenir une juste rémunération de leur production, en rééquilibrant les rapports commerciaux dans la chaîne alimentaire et en simplifiant le droit des relations commerciales pour le rendre plus efficient.

 

Le projet de loi a par ailleurs pour objectif de renforcer l'efficacité de la médiation relative aux conflits entre producteurs agricoles et acheteurs liés à la conclusion et à l’exécution des contrats de ventes de leurs produits.

 

3. Nécessité de légiférer

Pour répondre au diagnostic posé, et en s'appuyant sur la consultation menée dans le cadre du chantier 1 des états généraux de l'alimentation, l'objectif des mesures proposées est de rééquilibrer les rapports de force au sein de la chaîne d'approvisionnement alimentaire afin d'assurer :

 

-                                  un partage de la valeur qui redonne de la visibilité à la valeur créée par l'agriculteur et lui permette de vivre du prix payé ;

-                                  un prix rémunérateur à l'ensemble des acteurs de la chaîne qui soit également source d'information du consommateur sur la valeur créée par l'agriculture ;

-                                  l'effectivité des dispositions prévues.

 

La réalisation de cet objectif permettra de maintenir un tissu agricole et industriel à la hauteur des défis qui s'imposent en matière de souveraineté alimentaire et de nouvelles attentes sociétales.

 

Pour l’atteindre, le projet de loi modifie profondément les dispositions relatives aux contrats de ventes de produits agricoles.

 

Ainsi le projet de loi procède à la réécriture complète de l'article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime relatif aux contrats de vente de produits agricoles afin de clarifier les dispositions existantes, en les complétant par des dispositions nouvelles. L'article actuel est remplacé par quatre articles numérotés L. 631-24 à L. 631-24-3. Les articles L. 631-24-1 et L. 631-24-2 en vigueur deviennent L631-24-4 et L631-24-5.

 

Les nouveaux articles ne s'appliqueront plus uniquement aux secteurs soumis à contractualisation obligatoire mais à tout contrat écrit. La possibilité de rendre obligatoire la conclusion d'un contrat par extension d'un accord interprofessionnel ou par un décret en Conseil d’État est maintenue notamment pour couvrir le cas des secteurs soumis à de fortes fluctuations de prix.

 

Afin que la contractualisation puisse s'établir sur la base d'un rapport équilibré entre les parties, le producteur deviendra l’auteur de la proposition initiale de contrat, ce qui permettra d'inverser la construction du prix en début de la négociation afin de mieux tenir compte des coûts de production. Ainsi la conclusion d’un contrat de vente n’aura plus pour origine une proposition de l'acheteur, mais sera précédée d’une proposition du producteur.

 

La possibilité pour une OP ou une AOP de conclure avec l’acheteur un accord-cadre lorsqu’elle agit comme mandataire pour négocier la commercialisation des produits de ses adhérents, sans qu'il y ait de transfert de propriété est maintenue. Selon le même principe que celui qui vient d'être énoncé, il appartient dans ce cas à l'OP ou à l'AOP de proposer à l'acheteur un accord-cadre. Dès lors qu'un accord-cadre aura été conclu, les contrats des producteurs membres de l'OP ou de l'AOP signataire seront tenus d'en respecter les stipulations.

 

Le nouveau principe introduit selon lequel la conclusion d’un contrat écrit est précédée d’une proposition du producteur, est compatible avec les dispositions du règlement (UE) 2017/2393 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 précité dès lors qu'il est tenu compte, dans les secteurs où la contractualisation n'est pas rendue obligatoire, du paragraphe 1 bis des articles 148 et 168 de ce règlement, qui permet au producteur de se borner à demander une offre écrite de contrat au premier acheteur.

 

De même, le droit national peut compléter la liste des éléments qui doivent figurer dans le contrat en application du point c) du paragraphe 2 de l’article 148 et du paragraphe 4 de l’article 168 du règlement du 13 décembre 2017 précité, ou préciser ces éléments, sous réserve que leur contenu soit laissé à la libre négociation des parties.

 

Ainsi, aux termes des dispositions nouvelles, le contenu du contrat ou de l'accord-cadre continue à être encadré par des clauses obligatoires. Le contenu des clauses relatives à la formation du prix est précisé afin de répondre aux difficultés de mise en œuvre identifiées (indicateurs à prendre en compte dans la formule de prix).

 

Le contrat devra prévoir les délais de préavis et les indemnités de résiliation, notamment dans le cas où la résiliation est motivée par une modification du mode de production.

 

Afin d’assurer une plus grande transparence et de responsabiliser les différents acteurs, les contrats de revente des produits agricoles par les acheteurs devront faire référence à des indicateurs prévus dans le contrat entre le producteur et l’acheteur en lieu et place d’indices, à la suite d’une réflexion menée dans le cadre des états généraux de l’alimentation pour fixer les critères et modalités de détermination du prix depuis l’intervention de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016.

 

L'articulation entre les accords-cadres et les contrats individuels passés entre l'acheteur et le producteur est précisé : ce dernier contrat doit respecter strictement les stipulations introduites par l'accord-cadre. Par ailleurs, l’accord-cadre devra désormais fixer les modalités de gestion des écarts. L'OP pourra jouer un rôle clé pour répartir les volumes entre ses membres, par exemple en cas de départ de l'un d’entre eux, ou de négociation de la vente d’un volume supplémentaire auprès de l'acheteur. Cette question n’est pas abordée par le règlement du 17 décembre 2013 précité et ne porte atteinte, ni au bon fonctionnement de l’organisation commune des marchés, ni à celui du marché intérieur.

 

Le projet de loi clarifie le champ d'application du dispositif rénové de contractualisation sur deux aspects :

 

-          afin de se conformer au règlement (UE) n°1308/2013 portant organisation commune de marché (OCM), le projet de loi précise que sont soumis à la contractualisation écrite, les contrats passés entre un agriculteur et son premier acheteur pour la  vente de produits agricoles visés à l'annexe I  de ce règlement, ce qui exclut les produits transformés, notamment les fruits et légumes transformés. Sont en outre soustraits du champ d’application de cet article les contrats de vente de betteraves et de canne à sucre aux entreprises sucrières, le contenu de ces contrats étant entièrement régi par l'article 125 du règlement précité ;

 

-          par ailleurs, le projet de loi étend le régime applicable aux coopératives (qui représentent 85 % de ces OP) à l'ensemble des OP ou AOP qui bénéficient d'un transfert de propriété des produits qu'elles commercialisent. En effet, la relation entre la structure et ses producteurs membres est celle d'un contrat d'apport et non d'un contrat de vente à l'instar des coopératives. Dès lors, ces OP ou AOP n'ont pas à passer un contrat avec leurs membres apporteurs mais doivent prévoir dans leurs documents statutaires des clauses équivalentes au dispositif de contractualisation rénové par la loi.

 

Par conséquent, les contrats passés entre les OP ou AOP avec transfert de propriété et leurs acheteurs ou les coopératives et leurs acheteurs sont hors du champ d’application de la contractualisation rénovée. En outre, ces OP ou AOP, qui assurent généralement la transformation de leurs produits, sont considérées au regard du droit de la concurrence comme une entreprise unique et peuvent contractualiser directement avec leurs acheteurs. Ainsi, comme cela a pu être vérifié les OP de fruits et légumes avec transfert de propriété sont de fait soumises aux dispositions du code de commerce (conditions générales de vente, convention unique).

 

Le projet de loi vise également à renforcer l'effectivité du dispositif proposé.

 

Ainsi le projet de loi procède à la réécriture de l'article L. 631-25 du code rural et de la pêche maritime relatif aux sanctions de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 631-24. Le régime de ces sanctions est aménagé en vue d'assurer une meilleure effectivité du dispositif.

 

Quatre manquements peuvent ainsi donner lieu à sanction pour l'acheteur comme pour le producteur.

 

Dans l'hypothèse où la contractualisation a été rendue obligatoire, l'absence de contractualisation écrite et tout obstacle au principe d'une proposition de contrat ou d'accord-cadre par le producteur, l'OP ou l’AOP pourront être sanctionnés.

 

Pourront également être sanctionnés en dehors de l'hypothèse d'une contractualisation rendue obligatoire le fait de conclure un contrat écrit ou un accord-cadre écrit non conforme aux dispositions qui les encadrent, le fait de conclure un contrat qui ne respecte pas les stipulations d'un accord-cadre, l'absence de transmission par l'acheteur aux organisations de producteurs ou associations d'organisations de producteurs de certaines informations relatives aux indicateurs relatifs au prix du marché ou aux prix des contrats de ventes passés sur le fondement d'un accord-cadre.

 

Le projet de loi prévoit que la liste des agents habilités à constater les infractions aux règles applicables aux contrats et accords-cadre, actuellement fixée par l’article L. 631-26 du code rural et de la pêche maritime, sera fixée par décret en Conseil d’État, ce qui permettra d’ajouter les agents de FranceAgriMer à la liste actuelle. Et il prévoit une procédure contradictoire avec mise en demeure, préalablement au prononcé de sanctions.

 

Il est également apparu nécessaire de renforcer le rôle de la médiation et de raccourcir le délai de celle-ci en la limitant à un mois pour accroître l'effectivité du dispositif. Le médiateur des relations commerciales agricoles pourra dorénavant obtenir des parties la communication de tout document nécessaire à la médiation. La faculté de s’autosaisir lui est reconnue.

 

Il pourra en outre, et de sa propre initiative, recommander la suppression et la modification des projets de contrats ou d'accords-cadres et des contrats et accords-cadres en cours présentant un caractère abusif ou manifestement déséquilibré.

 

Par ailleurs, le projet de loi adapte les missions des organisations interprofessionnelles, qui se voient notamment reconnaître la possibilité de définir des indicateurs de marché et de coûts de production qui pourront être utilisés dans les contrats écrits.

 

4. Options non retenues

Un certain nombre d'options abordées lors des discussions des ateliers 5, 6 et 7 des états généraux de l'alimentation n'ont pas été retenues parmi les solutions en conclusion des ateliers.

4.1. Obligation de contractualisation écrite pour toutes les filières

Compte tenu des atouts que présente l'outil de la contractualisation écrite pour rééquilibrer les relations au sein de la chaîne d'approvisionnement alimentaire, la possibilité de la rendre obligatoire pour toutes les productions a été envisagée. Toutefois, il est apparu que les professionnels de l'amont tout comme les microentreprises n'y étaient pas favorables. Cette solution a donc été écartée.

Le bilan qui peut être tiré de l'expérience de la contractualisation obligatoire dans les secteurs du lait et de fruits et légumes frais destinés à la revente montre effectivement que la mise en œuvre d'une telle disposition est complexe et peut produire des effets contradictoires.

 

Les travaux disponibles pour mesurer les effets de la contractualisation, notamment les rapports n° 15 053 et n° 14 099 de 2015 du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux sur la contractualisation dans les secteurs lait et bovins et le dossier « Contractualisation et coordination des filières animales » paru dans le n° 345 d'Économie rurale en janvier – février 2015, montrent le besoin d'une analyse d'opportunité par produit ou par filière pour appréhender l'intérêt ou non de rendre la contractualisation obligatoire car son efficacité n'est en effet pas acquise et dépend de l'orientation d'un certain nombre de facteurs :

 

- le degré de concentration de l'aval : plus il est élevé, plus la relation et donc la négociation est potentiellement déséquilibrée et ne peut permettre de déboucher sur des contrats équilibrés ;

 

- l'existence de barrières à l'entrée sur le marché : plus elles sont élevées, par exemple coût de l'investissement pour le développement de l'activité de collecte ou de transformation, plus le risque de non ouverture du marché et d'impossibilité de diversification des acheteurs pour les agriculteurs est problématique avec les mêmes risques de contrats déséquilibrés ;

 

- les caractéristiques du marché local avec existence d'alternatives de vente pour le producteur : l'analyse au niveau national peut être favorable en termes de pouvoir de marché des producteurs mais peut ne pas l'être au niveau local ;

 

- la nature des produits : plus ils sont périssables plus la dépendance du producteur à l'acheteur est forte et fait peser de risques sur l'équilibre du contrat ; les professionnels de la filière Fruits et légumes y voient l'une des raisons de l'échec relatif de la contractualisation obligatoire dans leur filière ;

 

- les attributs propres au produit : en termes de qualité, en termes de potentiel de développement lié aux attentes des consommateurs ou à l'existence de débouchés à l'export, plus ces indicateurs sont élevés, plus la contractualisation présente d'intérêt ;

 

- la situation financière des producteurs : le niveau d'endettement favorise le besoin de sécurisation des débouchés et de lissage des aléas que peut offrir la contractualisation.

 

Il a donc été décidé de laisser à l'appréciation des filières la décision de contractualiser par écrit ou non et de préciser un certain nombre de caractéristiques du contrat tout en gardant la possibilité pour l’État de prendre un décret pour rendre celle-ci obligatoire compte tenu de la spécificité de certains secteurs, par exemple.

4.2. Développement d'un formalisme ad hoc de contrats bipartites liés

Un certain nombre d'expériences vertueuses ont souvent été présentées comme des contrats « tripartites », permettant notamment la remontée d'information, comme par exemple le niveau des coûts de production garantissant ainsi une meilleure transparence au sein de la chaîne d'approvisionnement alimentaire ainsi qu'une fixation des prix qui ne lèse aucun maillon.

 

En réalité les dispositifs de ce type prévoient d'une part un contrat de partenariat ou une lettre d'engagement entre producteur, transformateur, distributeur qui souhaitent contractualiser en toute transparence et d'autre part deux contrats bipartites : un contrat producteur-transformateur et un contrat transformateur-distributeur qui reprennent les engagements prévus dans le contrat de partenariat ou la lettre d'engagement. Ainsi, au niveau du contrat de partenariat ou de la lettre d'engagement, l'ensemble des partenaires fixe des objectifs partagés, les moyens d'y parvenir, partage les contraintes et coûts ou les enjeux de volatilité de certains coûts auxquels ils font face. Sur ces bases, cela permet ensuite de finaliser les contrats bipartites, et de déterminer le prix et les conditions de révision ou de renégociations du prix en cohérence avec les engagements fixés. L'ensemble repose sur la volonté des acteurs concernés d'assurer une transparence tout au long de la chaîne.

 

L’introduction de davantage de transparence entre les différents maillons pour responsabiliser les acteurs dans les contrats bipartites a été conservée avec l’idée de « transfert en cascade » des indicateurs utilisés dans la détermination du prix et des clauses de révision et de renégociation.

4.3. Création d'une commission d'arbitrage

Le Gouvernement a étudié l’une des propositions du groupe de travail n° 7 des états généraux de l’alimentation, présidé par M. Guy Canivet, qui consistait à prévoir la saisine d’une commission d’arbitrage en cas d’échec de la procédure de médiation prévue par le code rural et de la pêche maritime.

 

Il est résulté de l’approfondissement de cette option que cette commission d’arbitrage aurait constitué une nouvelle juridiction étatique spécialisée de l’ordre judiciaire. La commission aurait été compétente, en lieu et place des juridictions de droit commun, pour connaître des litiges persistants à l’issue de la médiation sous l’égide du médiateur des relations commerciales agricoles.


Dans son principe, cette option s’écartait de l’orientation générale du chantier de simplification de l'organisation judiciaire et de la procédure civile, en cours d’étude par le Gouvernement. Elle a pour ce motif été écartée, alors d’ailleurs que le nombre relativement faible des contentieux portés devant les juridictions civiles ne justifiait pas la création d’une nouvelle juridiction spécialisée.

 

5. Analyse des impacts des dispositions envisagées

5.1. Impacts juridiques : Articulation du droit national avec le droit européen

Le règlement (UE) n° 1308/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 portant organisation commune des marchés des produits agricoles prévoit, dans ses articles 148, concernant le secteur du lait, et 168, relatif aux secteurs agricoles autres que le lait et le sucre, que lorsqu’un Etat membre a décidé de rendre obligatoire, pour les livraisons de certains produits agricoles sur son territoire, la conclusion d’un contrat écrit entre producteur et acheteur, ou l’offre écrite par l’acheteur d’un tel contrat, celui-ci doit comprendre, en particulier, un certain nombre de clauses énumérées au point c) du paragraphe 2 de l’article 148 et du paragraphe 4 de l’article 168.

 

Ces règles sont applicables aux contrats écrits dont un producteur ou une organisation de producteurs ou association d’organisations de producteurs peut exiger qu’ils soient conclus ou proposés par l’acheteur dans les conditions prévues au paragraphe 1 bis de ces articles, issu du règlement (UE) 2017/2393 du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2017. Le paragraphe 4 de l’article 148 et le paragraphe 6 de l’article 168 précisent que les éléments du contrat, y compris ceux mentionnés au point c) des paragraphes 2 et 4 de ces articles, sont librement négociés par les parties, sous réserve de dérogations prévues par ces paragraphes 4 et 6.

 

Les articles L. 631-24 et suivants du code rural et de la pêche maritime sont pour une part pris pour l’application de ces articles du règlement n° 1308/2013, en tant qu’ils s’appliquent aux contrats dont la conclusion sous forme écrite peut être rendue obligatoire. Ils précisent sur certains points les règles minimales fixées par le règlement, notamment en prévoyant que la proposition de contrat doit émaner du producteur dans les secteurs où la contractualisation écrite est obligatoire.

 

En tant qu’ils prévoient qu’en dehors des secteurs où la contractualisation écrite est rendue obligatoire, les contrats conclus sous forme écrite doivent également en respecter les règles, ils interviennent dans le champ du seul droit national des contrats.

 

 

5.2. Impacts économiques

 

Les dispositions du projet de loi n'auront pas directement d'impact social ou environnemental.

 

Il est attendu des impacts économiques.

 

5.2.1. L'impact direct

 

Si la contractualisation est placée au cœur des propositions issues des états généraux de l'alimentation, c'est qu'elle se conçoit comme un outil permettant de sécuriser les débouchés pour les producteurs et de donner de la visibilité et de la prévisibilité au-delà du court terme sur leurs revenus et en conséquence sur les investissements qu'ils peuvent envisager.

 

Elle permet de donner un cadre construit qui inclut des clauses relatives à la durée du contrat, au volume et caractéristiques des produits à livrer, aux modalités de fixation du prix, aux modalités de paiement, aux règles applicables en cas de force majeure, aux modalités de révision, ou de résiliation du contrat.

 

Elle améliore la transparence dans la relation entre les acteurs économiques, sécurise également les approvisionnements pour les industriels en termes de coût d'approvisionnement, mais aussi de qualité et de traçabilité des produits stipulés dans le cahier des charges. Elle permet ainsi d'apaiser les relations contractuelles.

 

Elle est également un outil important pour permettre l'adaptation de la production à la demande et donc aux attentes des consommateurs et à l'évolution de leurs pratiques d'achat, ce type d'exigences pouvant figurer dans les cahiers des charges des producteurs.

 

Mise en œuvre par les organisations de producteurs et les associations d'organisations de producteurs, elle peut contribuer à un meilleur partage de la valeur ajoutée lorsque celles-ci sont dotées des moyens d'une négociation avec leurs acheteurs et d'une capacité à répercuter le coût du produit agricole tout au long de la chaîne alimentaire et jusqu'au consommateur.

 

Cette contractualisation offre un moyen de coordination au sein des filières alternatives à l'intégration et aux marchés spots et dont on peut mesurer les effets en termes :

 

- de performance des filières : meilleure capacité d'adaptation aux demandes du marché en termes de qualité, traçabilité, différenciation des produits ;

- de capacité à réduire les risques économiques de prix, de volatilité, de contrepartie ou d'aléa moral, le contrat intégrant une dimension assurantielle par un jeu d'incitations réciproques au bon comportement ;

- de pouvoir de marché car la contractualisation, et la négociation qui la précède, peut permettre aux producteurs de réduire l'asymétrie d'information (si l'acheteur est en position de force sur le prix, il n'a pas l'information sur ce que le producteur peut consentir en termes de qualité ou de traçabilité et l'acceptation du contrat permet d'inclure ces éléments dans l'échange), d'exiger des contreparties, de valoriser leur production et les efforts consentis par le respect du cahier des charges.

 

Les exemples de certains opérateurs qui ont mis en place des relations commerciales de long terme montrent qu'ils accordent tous une place importante au prix payé au producteur et à des systèmes de primes qui permettent à la fois d'inciter à la performance et de rémunérer l'effort consenti.

 

Il est ainsi attendu du projet de loi de contribuer à développer ces effets vertueux de la contractualisation et ainsi de permettre à chaque maillon de vivre dignement et à l'agriculteur de tirer une meilleure rémunération de la vente de ses produits. Redonner ainsi aux agriculteurs la capacité à dégager de la valeur devrait permettre d'améliorer leur revenu durablement.

 

En donnant aux producteurs ou aux organisations de producteurs et associations d'organisation de producteurs la possibilité de proposer le contrat, il est attendu un impact sur les modalités de formation des prix et le partage de la valeur ajoutée au sein de la chaîne d'approvisionnement alimentaire et la possibilité pour le consommateur de disposer d'une meilleure information sur la valeur du produit créée par l'agriculteur.

 

Les critères ou modalités de détermination du prix qui devront prendre en compte des indicateurs relatifs aux coûts de production en agriculture et à leur évolution et des indicateurs relatifs aux prix des produits agricoles et alimentaires constatés sur les marchés permettent l'intégration par les producteurs de leurs spécificités telles que leurs itinéraires de production.

 

En invitant les interprofessions à définir des indicateurs de coûts de production et de marché adaptés aux filières, les parties aux contrats disposeront des informations nécessaires pour élaborer les clauses relatives aux prix, à la révision ou à la renégociation du prix.

 

Par ailleurs, disposer d'un prix ou d'une formule de détermination de prix qui résulte de l'initiative du producteur dans le cadre de la proposition de contrat contribue à fournir des informations en cas de suspicion de prix abusivement bas et ainsi à lutter contre de telles pratiques. Cela devrait inciter les entreprises de l'aval à négocier des prix plus en adéquation avec la valeur apportée par les agriculteurs.

 

La technicité et la compétence nécessaire à l'élaboration d'une proposition de contrat ne doivent cependant pas être ignorées. Confier cette responsabilité au producteur, à l'organisation de producteurs (OP) ou à l'association d'organisations de producteurs (AOP) devrait renforcer l'intérêt pour le producteur d'adhérer à une OP, voire aux OP de se regrouper en AOP. D'une part, c'est en leur sein que la compétence nécessaire à l'élaboration du contrat ou de l'accord-cadre peut se développer rapidement en bénéficiant aux producteurs membres. D'autre part, l'OP voire l'AOP, en concentrant l'offre peut davantage peser dans les négociations commerciales.

 

La clarification du régime des sanctions rendra passible d'amendes administratives l'achat de produits agricoles sans qu'ait été signé un contrat ou un accord-cadre écrits dans les secteurs où la contractualisation aura été rendue obligatoire par accord interprofessionnel étendu ou décret en Conseil d’État. Elle affirme la possibilité de sanctionner la conclusion d'un contrat écrit qui méconnaît les prescriptions de l'article L. 631-24 et elle introduit en particulier la possibilité de sanctions pour non-respect des stipulations d'un accord-cadre, qui manquait dans le dispositif en vigueur. Ce nouveau régime de sanctions aura un impact important dans le respect des modalités de fixation des prix qui tiendront compte des indicateurs de coûts de production et de leur évolution et des indicateurs de prix de produits agricoles et alimentaires constatés sur les marchés. Il contribuera aussi à l'amélioration du revenu des agriculteurs.

 

La révision de la liste des agents habilités à effectuer des contrôles sera effectuée par décret en Conseil d’État, ce qui permettra de répondre à une demande consensuelle de renforcement des contrôles du respect des dispositions des articles L. 631-24 et L. 631-25 du code rural et de la pêche maritime. Il est unanimement considéré que ces contrôles sont insuffisants, ce que confirment d'une part les bilans de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) attestant que ses agents n'ont pas effectué de contrôles sur ces sujets, ni saisi les juridictions pour manquement à ces dispositions et d'autre part, le fait que les agents du ministère de l’agriculture et de l’alimentation n'ont pas plus conduit de contrôles en la matière. Développer les capacités de contrôle apparaît donc nécessaire à l'équilibre de la réforme proposée.

 

L'effectivité accrue des modes de règlement des différends qui résultera des dispositions nouvelles devrait permettre de réduire les risques de blocage de la livraison des produits souvent saisonniers ou périssables et le risque de perte de revenu qui y est associé, et de contribuer au rééquilibrage des rapports de force. Jusqu'à présent, l'échec de la médiation entraînait soit un non renouvellement du contrat à échéance ou plus souvent le maintien de la relation économique sur la base du contrat existant ce qui maintient pour la partie entrée en médiation un sentiment de déséquilibre et de non prise en compte de ce déséquilibre.

 

L'ensemble de ces dispositions contribuera à un rééquilibrage des rapports de force au sein de la chaîne d'approvisionnement alimentaire et devrait se traduire par une amélioration des niveaux de prix pratiqués et une amélioration de la situation financière de l'amont.

 

5.2.2. Les impacts indirects

 

L'amélioration des revenus des agriculteurs, le rééquilibrage du partage de la valeur ajoutée et des rapports de force au sein de la chaîne devraient aussi avoir un impact important sur les performances économiques des agriculteurs.

 

Ces acteurs devraient retrouver progressivement une capacité à se désendetter et à consacrer plus de moyens à investir, à innover, à se transformer et à monter en gamme, notamment pour répondre aux demandes des consommateurs en matière de bien-être animal, d'agriculture durable, de traçabilité et de qualité des produits.

 

À terme on peut en attendre une capacité du secteur à renouer avec la croissance, à restaurer une compétitivité – prix et hors prix, à exporter davantage, à créer des emplois et à faire vivre les territoires sur lesquels ils sont implantés.

5.3. Impacts sur les administrations et les finances publiques

La révision de la liste des agents habilités à effectuer des contrôles par décret en Conseil d’État permettra de renforcer les moyens mobilisables pour la constatation des infractions à l’article L. 631-24 du code rural et de la pêche maritime, sur la base de contrôles sur pièces, et en complément des actions menées par les services de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. L'impact sur les finances publiques sera nul.

 

Le renforcement du rôle du médiateur des relations commerciales agricoles devrait entraîner davantage de saisines. Ses moyens devront en conséquence être renforcés.

 

Compte tenu de l’articulation entre les différentes formes possibles de médiations et des attentes fortes des professionnels, il est prévu d’affecter au médiateur deux agents supplémentaires pour un coût salarial annuel de 220 000 euros (hors coûts de fonctionnement des agents – poste de travail, encadrement, etc.)

 

6. Modalités d’application

6.1 Mesures d’application

 

Les dispositions réglementaires d’application de l’article L. 631-24 figurent aux articles R. 631-5 à R. 632-14 du code rural et de la pêche maritime.

 

L’article R. 631-5, introduit par le décret n° 2016-1373 du 12 octobre 2016, définit les produits considérés comme relevant de la même production pour l’application de l’article L. 631-24.

 

Les articles R. 631-7 à R. 631-10, introduits par le décret n° 2010-1753 du 30 décembre 2010 et modifiés en dernier lieu par le décret n° 2017-1282 du 9 août 2017, portent sur la contractualisation écrite dans le secteur du lait de vache.

 

Les articles R. 631-11 à R. 631-14, introduits par le décret n° 2010-1754 du 30 décembre 2010, portent sur les contrats de vente de fruits et légumes frais.

 

La mise en œuvre de la présente loi nécessitera plusieurs adaptations réglementaires.

 

Il est prévu d’abroger les articles R. 631-11 à R. 631-14 qui ont rendu obligatoire la contractualisation écrite dans le secteur des fruits et légumes.

 

Les dispositions réglementaires d’application de l’article L. 631-24 du CRPM doivent être adaptées pour le secteur du lait de vache (articles R. 631-7 à R. 631-10).

 

Des dispositions réglementaires d'application de l'article L. 631-25 du CRPM devront être adoptées pour fixer la liste des agents habilités à constater les infractions aux règles applicables aux contrats et accords-cadres.

 

6.2 Modalités d’application dans le temps

 

La présente réforme entrera en vigueur pour la campagne des négociations commerciales de 2018.

 

Les articles 1 et 2 entrent en vigueur le premier jour du troisième mois suivant la publication de la présente loi.

 

Le texte prévoit que les contrats et accords-cadres en cours à sa date d'entrée en vigueur devront être modifiés par voie d'avenant dans un délai permettant aux acteurs de les mettre en conformité avec les nouvelles dispositions.

 

Ce délai diffère selon que l'on se situe dans un secteur où la contractualisation est actuellement obligatoire ou dans les autres secteurs.

 

Dans les secteurs où les contrats écrits ont déjà été rendus obligatoires, les modifications à apporter à ces contrats sont limitées et une réflexion a eu lieu sur les indicateurs à prendre en compte pour fixer les critères et modalités de détermination du prix depuis l’intervention de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016. Il était donc possible de retenir le 1er septembre 2018 et le 1er octobre 2018 comme date de mise en conformité avec les nouvelles dispositions respectivement des accords-cadre et des contrats. Ainsi, les nouvelles règles qui donnent aux producteurs un pouvoir de négociation plus important et réorientent la construction du prix pourront produire leurs effets dès la prochaine campagne de négociations commerciales.

 

Ces délais sont toutefois différés respectivement d’un et deux mois, dans l’hypothèse où l’entrée en vigueur de la loi serait postérieure à ces dates.

 

En revanche, dans les autres secteurs, pour lesquels le contenu des contrats écrits passés entre les producteurs et leur premier acheteur n’est pas réglementé jusqu’à présent et afin de ne pas porter une atteinte disproportionnée à ces conventions légalement conclues avant l’entrée en vigueur de la loi, le délai de mise en conformité est fixé à un an à compter de la date de publication de la loi. Ce délai permettra aux producteurs et organisations de producteurs de se saisir effectivement des nouvelles responsabilités que leur confère la loi.

 

 

Par ailleurs, les dispositions nouvelles de l'article 4 ne seront pas applicables aux procédures de médiation en cours à la date de publication de la loi.


ARTICLE 6 – AMELIORER LES DISPOSITIONS DE L’ARTICLE
L. 441-8 RELATIF A LA CLAUSE DE RENEGOCIATION

 

1. État des lieux et diagnostic

L’article L. 441-8 du code de commerce prévoit que certains contrats de vente de produits doivent contenir une clause de renégociation.

Dans le cadre des états généraux de l’alimentation, les parties prenantes ont fait part de leur insatisfaction quant au dispositif actuel prévu à l’article L. 441-8 du code de commerce. Les producteurs font état de situations de blocage récurrentes, faute de pouvoir se mettre d’accord sur un prix renégocié, enlisées dans des procédures de médiation trop longues, alors que le dispositif devrait précisément, pour faire sens, permettre de trouver une solution dans des délais très contraints.

 

2. Objectifs poursuivis

La piste envisagée pour remédier à la situation actuelle consiste à prévoir une médiation systématique et dont les délais sont raccourcis[5].

Ainsi, le projet de loi prévoit d’élargir le champ d’application de l’article L. 441-8 du code de commerce en remplaçant au 1er alinéa les termes « matières premières agricoles et alimentaires » par « produits agricoles et alimentaires ou des coûts de l’énergie ». Ainsi, les fluctuations des coûts de l’énergie qui sont susceptibles d’affecter significativement les prix de production des produits visés par l’article L. 441-8 seront prises en compte dans les modalités de renégociation du prix convenu initialement par les parties.

Il est également prévu de permettre de définir par accords interprofessionnels des indicateurs des prix des produits agricoles ou alimentaires qui sont nécessaires aux parties pour déclencher une éventuelle renégociation.

Par ailleurs, dans un souci de célérité de la mesure, la période de renégociation, initialement de deux mois, est abaissée à un mois.

Au terme de ce délai et en cas d’échec de la renégociation entre les parties, la partie la plus diligente doit saisir le médiateur des relations commerciales agricoles, préalablement à toute saisine du juge. Cette procédure de médiation ne peut pas dépasser un mois.

 

3. Nécessité de légiférer

La modification de l'article L. 441-8 du code de commerce est nécessaire pour atteindre les objectifs poursuivis de réduction du délai de la médiation.

 

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

La médiation obligatoire, au surplus limitée à un délai d’un mois, permettra la résolution rapide de litiges entre partenaires commerciaux lors de la mise en œuvre des clauses de renégociation de prix. Cette mesure contribuera ainsi à la continuité des relations commerciales entre acteurs économiques.

 

5. Modalités d’application

5.1 Modalités d’application dans le temps

Les modifications apportées à l'article L. 441-8 du code de commerce ne s'appliqueront pas aux renégociations de prix, procédures de médiation et instances en cours à la date de la publication de la loi.

 

5.2 Modalités d’application dans l’espace

Les modifications apportées à l’article L. 441-8 du code de commerce s’appliqueront à Wallis-et-Futuna.


ARTICLE 7 – APPLICATION A SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON

 

 

  1. État des lieux et diagnostic

 

L'ordonnance n° 2016-391 du 31 mars 2016 recodifiant les dispositions relatives à l'outre-mer du code rural et de la pêche maritime dans le code rural et de la pêche maritime a créé un article L. 694-4 rendant applicable l'article L. 631-24 à Saint-Pierre-et-Miquelon dans une rédaction simplifiée et adaptée.

Il prévoit tout d'abord que la contractualisation peut être rendue obligatoire par arrêté interministériel et non par accord interprofessionnel ou décret en Conseil d'Etat, comme le prévoit l'article L. 631-24. En effet, compte-tenu de l’exiguïté du marché et du nombre de producteurs actuel (une quinzaine), la reconnaissance d'une interprofession n'est pas envisageable pour les opérateurs de Saint-Pierre-et-Miquelon. De même, prévoir l'intervention d'un décret en Conseil d'Etat n'est pas nécessaire.

Par ailleurs il ne rend pas applicables certaines de ses dispositions relatives à la durée des contrats applicables aux nouveaux producteurs, à la négociation d'accords-cadres par les organisations de producteurs ou aux coopératives.

 

2. objectifs poursuivis

 

Les objectifs sont identiques à ceux poursuivis par l'article 1er.

 

3. Nécessité de légiférer 


Pour maintenir l'adaptation prévoyant l’intervention d'un arrêté des ministres chargés de l'agriculture, de la consommation et des outre-mer en lieu et place d'un accord interprofessionnel ou d'un décret en Conseil d’État, il est nécessaire de modifier les dispositions du de l’article L. 694-4 du code rural et de la pêche maritime.

 

 

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées  

 

Les dispositions n'engendrent pas d'impacts différents de ceux présentés dans le cadre général de l'article 1er (mêmes impacts attendus pour les opérateurs de Saint-Pierre-et-Miquelon que pour le cas général).

L'application des nouvelles dispositions relatives aux organisations de producteurs, associations de producteurs et coopératives ne présente pas de difficulté, dans la mesures où il n'en existe pas actuellement à Saint-Pierre-et-Miquelon. Elles sont rendues obligatoires à titre de précaution dans l'hypothèse où une organisation de producteur serait créée.

 

 


ARTICLE 8 – HABILITATIONS À MODIFIER LES DISPOSITIONS DU CODE RURAL ET DE LA PÊCHE MARITIME RELATIVES A LA COOPERATION AGRICOLE

1. État des lieux et diagnostic

1.1. La modernisation des dispositions relatives à la coopération agricole

 

Le constat établi dans la présente étude quant aux difficultés rencontrées par les filières agricoles ne permet pas d'en exclure le modèle coopératif, très présent dans les filières agricoles : 2 600 coopératives agricoles pour un chiffre d'affaires de près de 86 milliards d'euros.

 

Les membres de sociétés coopératives agricoles et de leurs unions disposent d'un double statut : celui d'associé, titulaire d'une fraction du capital social de la société, et celui de coopérateur, souscripteur d'un engagement d'activité vis-à-vis de la société à laquelle il adhère. En application de ce double statut, l'associé coopérateur est intéressé en premier chef par la gestion de la coopérative et par les orientations stratégiques prises par les membres de l'organe d'administration (conseil d'administration, conseil de surveillance ou directoire) de la société qu'il a contribué à élire.

 

Or, il est constaté, dans certains cas, un manque d'information des associés coopérateurs sur les relations économiques qu'ils ont nouées avec la société dont ils sont membres.

 

La loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt avait procédé à une série de modifications législatives tendant au renforcement de la transparence des coopératives : formalisation de l'engagement réciproque entre les coopérateurs et leurs coopératives (durée d'engagement, fraction du capital souscrit, caractéristiques des produits à livrer, modalités de paiement et de détermination du prix), prise en compte, adaptée au statut coopératif, de la volatilité du prix des matières premières agricoles dans le calcul du prix, information dans le rapport aux associés sur le résultat des filiales.

 

Ces dispositions ne sont aujourd'hui que partiellement mises en œuvre, du fait de la période transitoire qui leur était laissée.

 

Dans le cadre des états généraux de l'alimentation, des interrogations complémentaires se sont exprimées sur les modalités de l'engagement coopérateur et sa capacité à apporter des garanties équivalentes à celles prévues par les dispositions précitées qui encadrent les contrats entre producteurs et acheteurs, ainsi que sur la transparence des coopératives dans la rémunération et redistribution de leurs profits aux associés coopérateurs.

 

Le règlement intérieur des coopératives, principal instrument d'information en matière de rémunération des apports et de révision de ce prix, peut présenter un degré d'homogénéité, de mise à jour ou de complexité très variable et son contenu reste insuffisamment connu des associés coopérateurs. Il en va de même du rapport aux associés et de l'explication qui y est donnée s'agissant notamment du résultat des filiales de la coopérative ou encore des décisions de mise en réserve pour investissements ultérieurs.

 

1.2. Le médiateur de la coopération agricole

 

Le médiateur de la coopération a été institué par la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt.

 

Il peut être saisi par les associés et par toute coopérative agricole ou union et, le cas échéant, par le Haut Conseil de la coopération agricole (HCCA), de tout litige relatif à la relation entre :

- un associé et la coopérative agricole à laquelle il adhère,

- entre coopératives agricoles,

- et entre une coopérative agricole ou une union et l'union à laquelle elle adhère.

Il transmet annuellement au HCCA un bilan des médiations réalisées.

 

Les coopératives et leurs membres ne recourent que de façon très anecdotique au médiateur de la coopération agricole. Après trois ans d'existence, six dossiers de médiation lui ont été soumis sur la période 2015-2017.

 

Le nombre limité de saisines du médiateur de la coopération est la conséquence de plusieurs facteurs.

 

Il résulte d'abord de sa mise en place récente et de l'absence de visibilité auprès des coopérateurs, liée à la trop faible promotion de ses travaux tant par les acteurs publics (Haut Conseil de la coopération agricole) que privés (Coop de France). Certains lui reprochent par ailleurs son manque d'indépendance et d'impartialité, ainsi que l'insuffisance des moyens dont il dispose.

 

Ensuite, la mise en place effective de la médiation dans le secteur coopératif nécessite une réelle évolution des pratiques, jusqu'ici tournées vers l'intériorisation par le monde coopératif de ses difficultés.

 

Par ailleurs, l'articulation entre le médiateur de la coopération et le médiateur des relations commerciales agricoles n'est pas aujourd'hui clairement explicitée. La loi précise simplement que, pour l'exercice de ses missions, le premier tient compte des avis et recommandations formulés par le second. En application de l'article L. 631-27 le médiateur des relations commerciales agricoles est compétent pour toute question relative aux relations contractuelles et tout litige opposant un associé-coopérateur et sa coopérative. Il est dans les faits de plus en plus saisi de tels litiges même s'il ne peut appréhender pleinement le contrat coopératif qui relève d'un contrat de société et non d'un contrat de vente classique.

 

1.3. Le Haut Conseil de la coopération agricole

 

Le Haut Conseil de la coopération agricole (HCCA) est un établissement d'utilité publique doté de la personnalité morale. Il a été institué par la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006 d'orientation agricole.

 

Son périmètre d’action est actuellement très large : contribuer à la définition, à la mise en œuvre et à l'évaluation des politiques publiques en matière de coopération agricole, étudier et proposer des orientations stratégiques de développement du secteur coopératif, veiller à son adaptation permanente, selon des critères qui concilient l'efficacité économique, les exigences spécifiques du statut coopératif et le développement territorial, être le garant du respect des textes, règles et principes de la coopération agricole, exercer un rôle permanent d'étude et de proposition dans les domaines juridiques et fiscaux.

 

Le HCCA est administré par un comité directeur composé de sept représentants des sociétés coopératives agricoles et de leurs unions, (élus par un collège de grands électeurs lors de l'assemblée générale du Haut conseil), ainsi que de cinq personnalités choisies en raison de leur compétence par le ministre chargé de l'agriculture. Sa composition ne représente pas la diversité du monde agricole et reste également assez limitée s'agissant de l'expertise à apporter sur les grandes questions économiques qui se posent pour le secteur coopératif.

 

Par ailleurs, l'indépendance du HCCA est amoindrie par la faiblesse de ses moyens. En effet, il ne dispose pas de personnel en propre hormis son délégué général et son responsable administratif mais bénéficie de la mise à disposition d'une partie du personnel de l'Association nationale de révision (ANR) (délégataire du Haut Conseil pour l'organisation, le suivi et le contrôle des opérations de révision). Elle dépend en outre de l'expertise juridique de Coop de France avec laquelle il a conclu une convention. Ses ressources sont constituées des cotisations obligatoires des sociétés coopératives agricoles et leurs unions. Son budget s'élève pour l’exercice 2017 à 1,5 M€, et comprend notamment une dotation de 0,8 M€ au bénéfice de l'ANR pour l'exercice de ses missions relatives à la révision.

 

Onze ans après la création du HCCA, l’évaluation reste très positive. Celle-ci ne peut cependant masquer des interrogations quant au rôle du HCCA sur des missions économiques et politiques qui vont au-delà de ses moyens (la question de la représentation en son sein des syndicats agricoles a été posée) voire des compétences d'un tel établissement (les orientations économiques ne pouvant relever que des acteurs économiques). À contrario, ses missions essentielles que sont délivrer et retirer l'agrément coopératif aux sociétés coopératives agricoles et à leurs unions et définir les principes et élaborer, approuver et publier les normes de la révision, ainsi que suivre et contrôler sa mise en œuvre, sont d'une part insuffisamment connues et promues au sein du secteur coopératif, et d'autre part gagneraient à être renforcées. Il en va par exemple ainsi des suites qui pourraient être données par le HCCA en cas de constatation de non-conformités au sein d'une coopérative lors de la révision. Sauf cas grave, il est généralement considéré que la prise en main par l'organe d'administration de la coopérative, tout comme le caractère quinquennal de la révision, suffisent à assurer une remise en conformité de la coopérative, sans qu'un suivi précis soit effectué quant au calendrier de cette remise en conformité.

2. Objectifs poursuivis

2.1. La modernisation des dispositions relatives à la coopération agricole

L'objectif est de redonner aux coopératives agricoles un rôle exemplaire en matière de contractualisation en mettant l'accent sur un grand principe : favoriser une information claire et simple de l'associé-coopérateur, afin de donner pleinement effet au principe « un homme, une voix » s'agissant des décisions de l'assemblée générale et du conseil d'administration en matière de stratégie économique et de rémunération. Ce constat conduit à revoir la nature voire la périodicité des informations reçues par l'associé coopérateur.

 

Les dispositions prévues devront également permettre de faciliter et de préciser les conditions de départ d’un associé, notamment dans le cas où le producteur change de mode de production et que la coopérative ne peut pas valoriser les produits selon ce nouveau mode, avec l’appui si nécessaire de la médiation. Celle-ci pourrait constater dans un tel cas le caractère perfectible ou non de la transparence de la coopérative en question en matière de rémunération auprès de ses associés-coopérateurs et proposer des pénalités de sortie appropriées.

 

Enfin, veiller à instaurer un mécanisme de contrôle régulier et de sanction, tout comme renforcer et faire mieux connaître le dispositif de médiation de la coopération agricole (cf. point infra) vise à rendre ces dispositions plus efficaces.

 

2.2. Le médiateur de la coopération agricole

 

L'objectif est de renforcer l'indépendance et impartialité du médiateur de la coopération agricole.

 

A cette fin il est envisagé une nomination par le ministre, et une meilleure coordination avec la médiation des relations commerciales agricoles. Il s'agira concrètement de prévoir le renvoi par le médiateur de la coopération au médiateur des relations commerciales agricoles, des litiges relatifs au contrat d'apport passé entre un associé-coopérateur et sa coopérative. Cela supposera une analyse croisée des deux médiateurs pour s'assurer que tant les règles relatives à la contractualisation que celles relatives au droit coopératif sont respectées.

 

2.3. Le Haut Conseil de la coopération agricole

L'objectif est de centrer les missions du HCCA sur la mise en œuvre et le respect des règles coopératives et le suivi et l’évaluation des règles mises en place.

 

Les règles relatives à sa composition et à sa gouvernance seront modifiées pour rendre plus visible son action vis-à-vis de l'ensemble des coopératives et surtout des associés coopérateurs.

3. Nécessité de légiférer

L'encadrement des dispositions relatives au statut coopératif dans le secteur agricole relève de la loi (article L. 521-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime).

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

L’analyse fine des incidences de chacune des mesures envisagées sera effectuée dans la fiche d’impact retraçant les dispositions de l’ordonnance prise dans le cadre de l’habilitation.

 

Les différents impacts – sociaux, économiques et financiers, sur les administrations, en matière d’égalité entre les femmes et les hommes, sur la jeunesse, etc. – seront développés à la lumière des contours définitifs de chacune des dispositions proposées.

5. Justification du délai d'habilitation

Un délai de six mois est nécessaire pour préciser le contenu et la périodicité des informations à transmettre aux associés-coopérateurs, identifier les sanctions et les mécanismes nécessaires à l'accompagnement du renforcement de la transparence (médiation, Haut Conseil de la coopération agricole).

 

La nécessité de s'assurer des équivalences contractuelles au sein des coopératives a fait l'objet de débats dans le cadre des états Généraux de l'Alimentation qui ont acté ce principe au titre des recommandations formulées par l'atelier n°5. Toutefois, les consultations des parties prenantes sur les modalités envisagées restent à conduire.


Article 9 Habilitation à relever le seuil de revente à perte (SRP) et à encadrer les promotions

1. ÉTAT DES LIEUX ET DIAGNOSTIC

 

1.1. RELEVER LE SEUIL DE REVENTE A PERTE (SRP)

Le seuil de revente à perte est défini par l’article L. 442-2 du code de commerce qui interdit la revente d’un produit en l’état à un prix inférieur au prix d’achat effectif.

Le calcul de ce seuil a connu plusieurs évolutions : de 1996 (loi Galland) à 2008, il ne pouvait pas être déduit de ce prix la rémunération des services de coopération commerciale (marges arrière). La loi Chatel a modifié ce calcul en 2008 pour mettre un terme aux effets inflationnistes entraînés par la loi Galland.

Depuis 2008, le prix d’achat effectif est défini comme le prix unitaire net figurant sur la facture d’achat minoré du montant de l’ensemble des avantages financiers consentis par le vendeur (exprimés en pourcentage du prix unitaire net) et majoré des taxes sur le chiffre d’affaires, des taxes spécifiques et des frais de transport.

Plusieurs exceptions à cette interdiction sont prévues à l’article L. 442-4 :

- les ventes motivées par la cessation ou le changement d’une activité commerciale ;

- les produits saisonniers, hors saison ;

- les produits démodés ou obsolètes techniquement ;

- les produits dont le réapprovisionnement du même type de produit s’est fait à la baisse ;

- les produits commercialisés par les petits commerces ;

- les produits périssables menacés d’altération rapide ;

- les produits soldés.

 

La revente à perte est sanctionnée d’une amende pénale de 75 000 euros.

 

1.2 HABILITATION A ENCADRER LES PROMOTIONS

 

Les promotions, notamment celles comportant des annonces de réduction de prix, sont libres, dès lors qu’elles ne constituent pas des pratiques commerciales trompeuses pour les consommateurs et ne conduisent pas à une revente à perte.

 

Le code de commerce a cependant déjà encadré certaines promotions portant sur des produits alimentaires.

 

Le deuxième alinéa du I de l’article L. 441-2 du code de commerce prévoit la possibilité, lorsque des opérations promotionnelles sur des produits alimentaires périssables sont susceptibles par leur ampleur ou leur fréquence de désorganiser les marchés, de prendre un arrêté interministériel pour fixer la périodicité et la durée de telles opérations.

 

En application de ces dispositions, un arrêté a été pris le 10 juin 2015 pour encadrer les opérations promotionnelles pour la vente de viande porcine fraîche, dans un contexte de fortes difficultés économiques pour les éleveurs de porcs français. Cet arrêté, applicable pour une période d’un an, prévoyait qu’en dehors des périodes de début d’année et de fin d’été, des opérations promotionnelles mettant en avant des prix inférieurs à 50 % du prix moyen hors promotion du mois précédant l’opération, ne pouvaient plus être pratiquées.

 

Les infractions aux dispositions de l’arrêté prévu par l’article L. 441-2 précité sont punies d'une amende de 15 000 €.

 

Les avantages promotionnels accordés par les fournisseurs aux consommateurs par le biais de contrats de mandat confiés aux distributeurs ont été également réglementés par la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

 

Ainsi, l’article L. 441-7 du code de commerce prévoit une limitation de ces avantages à 30 % de la valeur du barème des prix unitaires, frais de gestion compris, pour le lait et les produits laitiers, les fruits, les légumes destinés à être vendus à l'état frais au consommateur (à l'exception des pommes de terre de conservation), les viandes fraîches, congelées ou surgelées de volailles et de lapins, les œufs et les miels.

 

En revanche, les offres promotionnelles décidées et accordées par les distributeurs n'entrent pas dans le champ d'application de cette limitation.

 

 

2. OBJECTIFS POURSUIVIS

 

2.1 HABILITATION A RELEVER LE SEUIL DE REVENTE A PERTE (SRP)

 

La majoration du SRP pour une durée de deux ans a pour objectif d’assurer des conditions de négociation plus favorables pour les fournisseurs.

 

Cette majoration est de nature à contribuer à l’amélioration du fonctionnement du marché, en réduisant les distorsions entre, d’une part, des produits dont la rentabilité trop faible est source de tensions permanentes entre industriels et distributeurs (et potentiellement de pratiques illicites) et, d’autre part, des produits dont les niveaux de marge donc de prix pénalisent le développement et l’accès des consommateurs.

 

Cette majoration est justifiée par les acteurs de la grande distribution par la nécessité de contribuer à l’effort généralisé de rétablissement du niveau de marge moyen requis par l’équilibre financier des enseignes, phénomène appelé « péréquation » entre les produits.

 

Le relèvement du SRP vise à renforcer l’équilibre général de la négociation au profit des entreprises de taille petite ou moyenne, grâce à une meilleure péréquation entre produits.

 

Cette révision du SRP doit non seulement être la plus simple possible, mais surtout s’accompagner d’autres mesures que les acteurs du secteur de la grande distribution alimentaire estiment indispensables pour permettre d’assurer une meilleure répartition de la valeur au sein des filières agroalimentaires, telles notamment un encadrement des promotions et un renforcement de la clause de renégociation et de la clause d’interdiction des prix de cession abusivement bas.

 

Le projet de loi habilite le Gouvernement à affecter le prix d’achat effectif prévu à l’article L. 442-2 du code de commerce d’un coefficient égal à 1,1, ce qui correspond à un relèvement du seuil de revente à perte de 10%. La mesure est prise pour une durée de deux ans.

 

Cette mesure doit permettre de mieux prendre en compte les coûts des distributeurs.

 

Elle est limitée au périmètre des produits alimentaires, au sens de denrées alimentaires, c’est-à-dire que ne seront pas concernés par le relèvement du SRP les produits destinés à l’alimentation des animaux domestiques.

 

2.2 HABILITATION A ENCADRER LES PROMOTIONS

 

Les promotions en grandes et moyennes surfaces (GMS) ont pris une ampleur croissante ces dernières années, passant de 14 % en 2000 à 20 % en 2016.

 

La promotion est un levier de mise à disposition de l’offre de produits aux consommateurs, mais en huit ans, le taux de remise moyen est passé de 18 % à près de 34 %. En 2016, 28 % des promotions proposées affichaient un taux de remise supérieur à 40 % (source ILEC).

 

Il ressort des discussions menées dans le cadre des états généraux de l’alimentation que les promotions ne contribuent aujourd’hui que marginalement au développement des marchés : elles induisent des comportements spéculatifs chez les consommateurs et n’ont qu’un faible effet incitatif à l’essai d’une marque chez de potentiels acheteurs.

 

Pour le consommateur, la promotion peut être une source croissante de perplexité, voire de défiance, devant ce qui constitue un prix « juste », particulièrement dans un contexte de crise des revenus agricoles.

 

Économiquement, le bilan que l’on peut tirer des achats promotionnels n’est pas nécessairement favorable : plusieurs études, dont une menée dans le cadre de l’INRA, évaluent l’impact financier du gaspillage alimentaire à un niveau qui dépasse de loin l’effet positif de la baisse des prix (dans un rapport pouvant aller d’un à quatre) et soulignent la responsabilité particulière des opérations promotionnelles à cet égard.

 

Il y a donc bien aujourd’hui besoin d’un outil de régulation des pratiques promotionnelles pour répondre à un double objectif d’intérêt général : rétablir un certain équilibre économique dans les filières alimentaires et lutter contre le gaspillage alimentaire.

 

Le projet de loi habilite le Gouvernement à prévoir un encadrement des promotions à la fois en valeur et en volume.

 

À l’instar du relèvement du SRP, l’encadrement des promotions ne concernera que les denrées alimentaires et la mesure sera prise pour une durée de deux ans.

 

L’habilitation permet au Gouvernement de prévoir les dispositions qui permettront de sanctionner les manquements au dispositif d’encadrement qui sera adopté.

 

 

3. NECESSITE DE LEGIFERER

 

3.1 RELEVER LE SEUIL DE REVENTE A PERTE (SRP)

 

Lors des états généraux de l’alimentation, les parties prenantes ont souhaité la mise en œuvre d’une série de mesures permettant de rééquilibrer les relations commerciales en recréant de la valeur dans la chaîne agroalimentaire. Parmi ces mesures figure le relèvement du seuil de revente à perte, dont les règles sont définies par des dispositions législatives.

 

La majoration du seuil de revente à perte est de nature à contribuer à l’amélioration du fonctionnement du marché, en réduisant les distorsions entre, d’une part, des produits dont la rentabilité trop faible est source de tensions permanentes entre industriels et distributeurs (et potentiellement de pratiques illicites) et, d’autre part, des produits dont les niveaux de marge donc de prix pénalisent le développement et l’accès des consommateurs.

 

Elle est justifiée par les acteurs de la grande distribution par la nécessité de contribuer à l’effort généralisé de rétablissement du niveau de marge moyen requis par l’équilibre financier des enseignes, phénomène appelé « péréquation » entre les produits.

 

Le relèvement à titre expérimental pour une durée limitée du seuil de revente à perte vise à renforcer l’équilibre général de la négociation au profit des entreprises de taille petite ou moyenne, grâce à une meilleure péréquation entre produits.

 

Cette révision du SRP doit non seulement être la plus simple possible, mais surtout s’accompagner d’autres mesures que les acteurs dans le secteur de la grande distribution alimentaire estiment indispensables pour permettre d’assurer une meilleure répartition de la valeur au sein des filières agroalimentaires, telles notamment un encadrement des promotions et un renforcement de la clause de renégociation et de la clause d’interdiction des prix de cession abusivement bas.

 

Le relèvement du SRP pour les produits alimentaires pourrait se traduire par une hausse du prix de ces produits, dans des proportions qu’il est toutefois difficile de chiffrer.

 

Le Président de la République, dans le discours qu’il a prononcé à Rungis le 11 octobre 2017, a conditionné le relèvement du SRP au fait que les acteurs économiques concernés proposent des contrats de filière permettant de fixer des objectifs de restructuration interne efficaces, devant notamment se traduire par une hausse qualitative des produits achetés par les consommateurs.

 

C’est pourquoi, le Gouvernement souhaite que le relèvement du SRP soit effectif pendant une durée de deux ans, pour en mesurer pleinement les effets sur l’ensemble des acteurs de la filière, y compris les consommateurs, avant, le cas échéant, de pérenniser cette mesure dans le code de commerce.

 

Compte tenu du caractère technique de ces mesures, que le Premier ministre a détaillé dans son discours de clôture des états généraux et qui n’ont pas vocation à être codifiées, et du relatif consensus dont elles ont fait l’objet lors des EGA, l’habilitation à légiférer par voie d’ordonnance semble pleinement adaptée et justifiée.

 

3.2 ENCADRER LES PROMOTIONS

 

Lors des états généraux de l’alimentation, les parties prenantes ont souhaité la mise en œuvre d’une série de mesures permettant de rééquilibrer les relations commerciales en recréant de la valeur dans la chaîne agroalimentaire. Parmi ces mesures figure l’encadrement des pratiques promotionnelles, dont les règles doivent être définies au niveau législatif.

 

Les promotions en grandes et moyennes surfaces ont pris une ampleur croissante ces dernières années, passant de 14% en 2000 à 20% en 2016. En 2016, 28 % des promotions proposées affichaient un taux de remise supérieur à 40 % (source ILEC).

 

Il ressort des discussions menées dans le cadre des états généraux que les promotions ne contribuent aujourd’hui que marginalement au développement des marchés : elles induisent des comportements spéculatifs chez les consommateurs et n’ont qu’un faible effet incitatif à l’essai d’une marque chez de potentiels acheteurs.

 

Pour le consommateur, la promotion peut être une source croissante de perplexité, voire de défiance, devant ce qui constitue un prix « juste », particulièrement dans un contexte de crise des revenus agricoles.

 

Économiquement, le bilan que l’on peut tirer des achats promotionnels n’est pas nécessairement favorable : plusieurs études, dont une menée dans le cadre de l’INRA, évaluent l’impact financier du gaspillage alimentaire à un niveau qui dépasse de loin l’effet positif de la baisse des prix (dans un rapport pouvant aller d’un à quatre) et soulignent la responsabilité particulière des opérations promotionnelles à cet égard.

 

Il y a donc bien aujourd’hui besoin d’un outil de régulation des pratiques promotionnelles pour répondre à un double objectif d’intérêt général : rétablir un certain équilibre économique dans les filières alimentaires et lutter contre le gaspillage alimentaire.

 

Toutefois, si les règles principales d’encadrement des pratiques promotionnelles ont pu faire l’objet d’un certain consensus au cours des états généraux, il reste encore à préciser les modalités de mise en œuvre de l’encadrement des promotions, notamment les taux et modalités juridiques d’encadrement en prix et en volume. Sur ce point, la poursuite de la concertation est nécessaire afin que les règles qui seront définies soient efficaces et contrôlables.

 

A l’instar des dispositions relatives au relèvement du SRP, les règles relatives à l’encadrement des promotions seront mises en œuvre pendant une période limitée de deux ans et ne seront codifiées que si le bilan à l’issue de ce délai en démontre leur efficience.

 

En conséquence, compte tenu du caractère technique des mesures envisagées et de la concertation nécessaire, l’habilitation à légiférer par voie d’ordonnance semble pleinement adaptée et justifiée.

 

 

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGEES

 

En principe, le relèvement du SRP devrait entraîner mécaniquement une augmentation des prix de ventes aux consommateurs d’un certain nombre de produits. Cet effet mécanique est admis par l’ensemble des participants aux EGA.

 

La hausse du SRP a été étudiée pour les seuls produits alimentaires vendus par des grandes surfaces d’alimentation (GSA), dont le chiffre d’affaires pour 2016 a été estimé à 124 425 M€.

 

Cette évaluation du chiffre d’affaires a été effectuée sur la base des données de l’INSEE pour 2013 pour les ventes réalisées par les GSA pour les produits alimentaires (hors tabac). L’inflation entre 2013 et 2016 a été approximée à l’inflation annuelle moyenne sur les produits alimentaires entre ces trois années, à savoir 1,7 %.

 

Les produits directement concernés par la hausse du SRP ont été assimilés aux produits promotionnels ; la part de ces produits dans le chiffre d’affaires ayant été estimée à 20 %, suivant les informations transmises par la Fédération du commerce et de la distribution.

 

Avec une hausse du SRP de 10 % qui affecterait un tiers des produits alimentaires promotionnels, on aboutirait à une hausse mécanique moyenne des prix des produits alimentaires vendus en GSA de 0,7 % (2,0 % si la totalité des produits alimentaires promotionnels sont affectés).

 

Cette évaluation peut être mise en perspective avec l’évolution des prix des produits alimentaires (hors produits frais) vendus en grande distribution en France métropolitaine entre 2006 et 2016 (en %), qui fait apparaître au cours des 3 dernières années une déflation pour ces produits-là :

 

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

0,8

0,9

5,5

0,7

-0,2

2,4

2,4

0,5

-0,3

-0,6

-0,3

Source Insee – calculs DGCCRF

Par ailleurs, et à titre de complément d’information, l’évolution des prix des produits alimentaires (hors produits frais) vendus en grande distribution en France métropolitaine par rapport à l’inflation globale (tous biens – toutes formes de vente) démontre qu’il y a eu deux vagues de hausse des prix des produits alimentaires (en 2007/2008 et en 2011/2012) avec un pic en août 2013. Mais depuis, il y a eu une tendance globale à la baisse, et malgré la remontée observée depuis novembre 2016, les prix des produits alimentaires en GSA sont toujours inférieurs à leur niveau d’août 2013.

 

Source Insee

 

Pour autant, l’évaluation précise des effets inflationnistes d’une telle mesure est très complexe à réaliser en raison du nombre de paramètres à prendre en considération et de l’impossibilité de modéliser le comportement des distributeurs et des consommateurs.

 

Ainsi, cette évaluation repose sur des hypothèses fortes, réduisant la précision de l’estimation. En particulier, le comportement des consommateurs a été supposé inchangé et l’évaluation ne peut pas prendre en considération les mécanismes de péréquation des prix de vente au consommateur que les distributeurs mettent en œuvre afin d’atteindre un niveau satisfaisant de rentabilité tout en restant compétitif en prix.

 

Le caractère provisoire du dispositif permettra de vérifier ses effets sur les acteurs de la filière alimentaire, notamment sur les producteurs, et sur les prix à la consommation.

 

L’analyse fine des incidences de chacune des mesures envisagées sera effectuée dans la fiche d’impact retraçant les dispositions des ordonnances prises dans le cadre de l’habilitation.

 

Les différents impacts  sociaux, économiques et financiers, sur les administrations, en matière d’égalité entre les femmes et les hommes, sur la jeunesse, etc.  seront développés à la lumière des contours définitifs de chacune des dispositions proposées.

 

 

5. JUSTIFICATION DU DELAI D'HABILITATION

 

Un délai d’habilitation de six mois est nécessaire afin de préciser le contenu de l’ordonnance, notamment de déterminer les modalités juridiques de l’encadrement des promotions.


ARTICLE 10 – HABILITATIONS À MODIFIER LE CODE DE COMMERCE

 

 

1. ÉTAT DES LIEUX ET DIAGNOSTIC

 

Le droit des pratiques commerciales restreignant la concurrence (PCR) est né de la volonté d’instaurer des relations commerciales transparentes et loyales entre professionnels et de réprimer les pratiques révélatrices d’un rapport de force déséquilibré entre partenaires commerciaux.

 

Le législateur a donné au ministre chargé de l’économie le pouvoir d’agir en justice au titre de la défense de l’ordre public économique, cette action contentieuse s’accompagnant d’un important arsenal de sanctions, récemment renforcé (amende civile de 5 M€ ou 5 % du chiffre d’affaires - et répétition de l’indu). Pour la mise en œuvre de ce pouvoir, le législateur a donné aux services de la DGCCRF des moyens d’enquête étendus.

 

Ainsi, le ministre chargé de l’économie a initié des actions aussi bien à l'encontre du secteur de la grande distribution mais aussi au-delà, par exemple, dans le secteur de la réservation d’hôtels en ligne.

 

Le droit des pratiques restrictives de concurrence s’est stratifié au fil des réformes successives (10 réformes en 30 ans, mais surtout une réforme par an ces 3 dernières années) ; il est devenu complexe et appelle des simplifications.

 

Ce constat du législateur s'est confirmé lors des états généraux de l'alimentation au cours desquels les parties prenantes ont souhaité « améliorer la lisibilité du Titre IV du Livre IV du code de commerce ». Le document conclusif de l'atelier n° 7 consacré à l'amélioration des relations commerciales et contractuelles entre les producteurs, les transformateurs et les distributeurs observe ainsi que « certaines dispositions du Titre IV du Livre IV doivent être réorganisées, rendues plus lisibles, voire supprimées dans une optique de simplification. Il convient également de renforcer l'effectivité de certaines dispositions ».

 

 

2. OBJECTIFS POURSUIVIS

 

Le projet de loi prévoit un article d’habilitation permettant au Gouvernement de modifier, par voie d’ordonnance, les mesures relevant du domaine de la loi prévues dans le code de commerce, notamment le titre IV du livre IV de ce dernier code.

 

Les objectifs poursuivis sont les suivants :

 

1° Réorganiser ce titre et clarifier ses dispositions, notamment en supprimant les dispositions devenues sans objet et en renvoyant le cas échéant à d’autres codes ;

 

2° Clarifier les règles de facturation, en les harmonisant avec les dispositions du code général des impôts et modifier en conséquence les sanctions relatives aux manquements à ces règles ;

 

3° Préciser les dispositions relatives aux conditions générales de vente et mettre en cohérence les dispositions relatives aux produits agricoles et alimentaires, notamment en ce qui concerne les références applicables aux critères et modalités de détermination des prix, avec les dispositions du code rural et de la pêche maritime ;

 

4° Simplifier les dispositions relatives aux conventions conclues entre les fournisseurs et les distributeurs ou les prestataires de service et entre les fournisseurs et les grossistes et préciser le régime des avenants à ces conventions ;

 

5° Simplifier et préciser les définitions des pratiques mentionnées à l'article L. 442-6, notamment en ce qui concerne la rupture brutale des relations commerciales et les voies d'actions en justice ;

 

6° Élargir à l'article L. 442-9 le champ d’application de l’action en responsabilité.

 

 

3. NECESSITE DE LEGIFERER

 

Lors des états généraux de l'alimentation, les parties prenantes ont souhaité « améliorer la lisibilité du Titre IV du Livre IV du code de commerce ».

 

Ce constat d'une nécessité d'améliorer et de clarifier les dispositions du titre IV du livre IV du code de commerce est également partagé par le Gouvernement, qui considère qu'améliorer la lisibilité et la compréhension du droit ne peut qu'avoir un effet positif sur son respect par les acteurs économiques.

 

Cet objectif implique que l'on modifie des règles de niveau législatif.

 

 

 

 

4. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGEES

 

L’analyse fine des incidences de chacune des mesures envisagées sera effectuée dans la fiche d’impact retraçant les dispositions des ordonnances prises dans le cadre de l’habilitation.

 

Les différents impacts – sociaux, économiques et financiers, sur les administrations, en matière d’égalité entre les femmes et les hommes, sur la jeunesse, etc. – seront développés à la lumière des contours définitifs de chacune des dispositions proposées.

 

 

 5. JUSTIFICATION DU DELAI D’HABILITATION

 

Le délai de neuf mois est nécessaire pour préparer le projet d'ordonnance, dont l'entrée en vigueur doit intervenir rapidement après le vote définitif du présent projet de loi.

 

 


ARTICLE 11 – COMPOSITION DES REPAS SERVIS DANS LA RESTAURATION COLLECTIVE

 

 

1. État des lieux et diagnostic

 

Dans son discours aux états généraux de l'alimentation du 22 octobre 2017, le Président de la République a réaffirmé en ces termes l'objectif poursuivi : « l’engagement d’atteindre 50 % de produits bio ou locaux en restauration collective d’ici 2022 est bien confirmé et nous permettra de repenser territorialement notre alimentation et d’accompagner la nécessaire restructuration de certaines filières ».

 

Les états généraux de l'alimentation, qui viennent de s'achever, ont été l'occasion de mettre en exergue les attentes sociétales en faveur d'une alimentation saine, durable et accessible à tous. La restauration collective a été citée à plusieurs reprises comme un levier incontournable en vue de faire évoluer les pratiques alimentaires des Français.

 

Par ailleurs, afin d'accompagner la restructuration des filières agricoles, il importe de conforter l'ancrage territorial de notre alimentation qui permet à la fois d'assurer de nouveaux débouchés commerciaux pour les agriculteurs et de répondre aux attentes des consommateurs. À ce titre, l'approvisionnement de la restauration collective représente un levier essentiel.

 

2. Objectifs poursuivis

Le présent article répond à une demande sociétale d’évolution des produits proposés par la restauration collective publique.

 

L'incorporation de produits biologiques dans les repas servis en restauration collective publique a fait déjà l'objet d'initiatives volontaires (cf. infra point 3.1.). A cet égard, le Grenelle de l'environnement a recommandé, il y a 10 ans, un objectif de 20% de produits issus de l'agriculture biologique dans la restauration collective. Cette recommandation a été très faiblement suivie d'effet malgré la mise en place d'outils d'accompagnement. Si certaines communes se sont fortement engagées dans la conversion à l'agriculture biologique, la part de produits issus de l'agriculture biologique dans l'approvisionnement de la restauration collective reste faible, de l'ordre de 2,9%. Ce constat d'échec justifie désormais d'inscrire dans la loi une obligation afin d'utiliser la commande publique comme un levier.

 

En effet, les actions incitatives ou d'accompagnement, pour utiles qu'elles soient, seront insuffisantes pour garantir que la part des produits concernés inclus dans les repas servis en restauration collective publique atteindront, à brève échéance, un niveau significatif sur l'ensemble du territoire et pour toutes les personnes publiques concernées. L'intervention du législateur est donc nécessaire, afin d'une part de fixer le principe d'une obligation de part minimale de produits répondant aux caractéristiques recherchées et, d'autre part, d'afficher que la démarche répond à un objectif d'intérêt général qui doit engager l'ensemble des acteurs publics.

 

D'une manière générale, cette disposition favorisera la transition du modèle de production agricole vers un système plus respectueux de l'environnement, en assurant un débouché significatif pour les produits de qualité et durables. Il apparaît essentiel d'accompagner et de renforcer cette tendance, qui témoigne d'une forte attente sociétale, confirmée à l'occasion des Etats généraux de l'alimentation, afin de mobiliser les acteurs qui ne sont pas encore engagés dans ce type de dispositif, et de conforter les démarches qui sont déjà mises en œuvre.

 

En outre, elle s'inscrit dans une approche d'ensemble cohérente qui s'appuie sur un développement concomitant de l'offre à travers la révision du plan Ambition Bio au premier semestre 2018 et les engagements de conversion dans le cadre des plans de filière. De ce point de vue, les objectifs envisagés sont réalistes, d'autant que les conversions des exploitations en agriculture biologique sont en augmentation croissante (+15 % d'agriculteurs engagés dans l'agriculture biologique entre 2015 et 2016), élan qu'il importe de consolider.

 

Le dispositif proposé complète les dispositions actuelles du code rural et de la pêche maritime relatives à la qualité nutritionnelle des repas servis en collectivité qui imposent, en application de l'article L. 230-5, aux gestionnaires publics et privés des services de restauration scolaire et universitaire ainsi que des services de restauration des établissements d’accueil des enfants de moins de six ans, des établissements de santé, des établissements sociaux et médico-sociaux et des établissements pénitentiaires, le respect de règles relatives à cette qualité nutritionnelle.

 

 

Il impose, au 1er janvier 2022 que les repas servis en restauration collective dont ont la charge des personnes publiques comportent une part significative de produits issus de l'agriculture biologique (produits conformes au règlement n° 834/2007 du Conseil du 28 juin 2007 y compris les produits issus d’exploitations en conversion au sens de l’article 17 ou conformes aux règles nationales visées à l’article 42 de ce règlement), de produits bénéficiant d'un des autres signes ou mentions prévus à l'article L. 640-2 du code rural et de la pêche maritime (par exemple « label rouge » ou « haute valeur environnementale ») ou qu'ils soient acquis en prenant en compte le coût du cycle de vie du produit au sens du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics.

 

Cette obligation s’appliquera aux restaurants gérés par les personnes publiques, quel que soit le mode d’exploitation.

 

Le point 4 de l'article 42 de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE dispose que : « les spécifications techniques ne font pas référence à une fabrication ou une provenance déterminée ou à un procédé particulier, qui caractérise les produits ou les services fournis par un opérateur économique spécifique, ni à une marque, à un brevet, à un type, à une origine ou à une production déterminée qui auraient pour effet de favoriser ou d’éliminer certaines entreprises ou certains produits ».

 

Par conséquent, il n'est pas possible d'imposer à des pouvoirs adjudicateurs des objectifs qui les conduiraient nécessairement à définir leurs besoins en faisant référence à l'origine des produits.

 

En revanche, le droit de la commande publique admet que les besoins soient définis en tenant compte de préoccupations environnementales et que des critères environnementaux, liés à l'objet des contrats, soient utilisés. Or la notion de coût du cycle de vie telle qu'elle est définie à l'article 63 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics permet de prendre en compte les coûts liés aux externalités environnementales liés au produit, en particulier les impacts de distance. Le I de cet article dispose que :

 

« Le coût du cycle de vie couvre, dans la mesure où ils sont pertinents, tout ou partie des coûts suivants du cycle de vie d'un produit, d'un service ou d'un ouvrage :

1° Les coûts supportés par l'acheteur ou par d'autres utilisateurs, tels que :

a) Les coûts liés à l'acquisition ;

b) Les coûts liés à l'utilisation comme la consommation d'énergie et d'autres ressources ;

c) Les frais de maintenance ;

d) Les coûts liés à la fin de vie comme les coûts de collecte et de recyclage ;

2° Les coûts imputés aux externalités environnementales liés au produit, au service ou à l'ouvrage pendant son cycle de vie, à condition que leur valeur monétaire puisse être déterminée et vérifiée. Ces coûts peuvent inclure le coût des émissions de gaz à effet de serre et d'autres émissions polluantes ainsi que d'autres coûts d'atténuation du changement climatique. »

 

 

La possibilité d’inclure plus largement les modes de valorisation définis à l’article L. 640-2 du code rural et de la pêche maritime (à l'exception des produits relevant de la certification de conformité) n’est pas incompatible avec le droit de la commande publique, dès lors que les critères de sélection établis lors de la passation du marché visent également les dispositifs équivalents de l’Union européenne.

 

Afin d’éviter toute ambiguïté quant à la portée de l’obligation pour les opérateurs publics et écarter un risque de distorsion de concurrence, le texte prévoit explicitement la possibilité pour les opérateurs de remplir également leurs obligations en utilisant des produits équivalents à ceux visés audit article.

 

L'objectif est de parvenir à un taux de 50 % de produits répondant aux conditions posées par l'article 10, avec un sous-objectif de part minimale de produits issus de l'agriculture biologique de l'ordre de 20 %.

La mesure législative envisagée répond à un objectif d'intérêt général qui est de favoriser la diffusion d'une alimentation saine, durable, de qualité et accessible à tous, à travers l'activité de la restauration publique.

L'intérêt des acteurs pour la mise en œuvre d'actions tendant à l'atteinte de cet objectif s'est exprimé à l'occasion de différents ateliers des Etats généraux de l'alimentation.

L'atelier 1, tout d'abord, a permis de constater que les consommateurs ont des attentes multiples : la recherche de naturalité, de sécurité et d'éthique, le renforcement des fonctions nutritives ou encore le développement de nouvelles pratiques d’achat et de consommation.

Face à ces attentes, deux actions préconisées par l'atelier sont en relation avec la proposition législative. Il s'agit, d'une part, d'accompagner la transition environnementale de l'agriculture vers des modèles plus durables, notamment par une amplification des démarches officielles (agriculture biologique, certification « Haute valeur environnementale »). Il s'agit, d'autre part, de mettre en place un véritable plan pour la restauration hors domicile, puissant vecteur de développement et d'ancrage territorial des productions, qui portera sur le développement  de l'approvisionnement de la restauration collective en produits de qualité ou préservant l'environnement. Une meilleure information et formation des acheteurs publics de la restauration collective et des cuisiniers était également souhaitée.

L'atelier 2 a mis en avant la restauration collective comme un levier incontournable pour assurer, avec tous les acteurs locaux, la transition alimentaire et agricole. Les territoires peuvent ainsi accélérer la mise en œuvre d’actions concrètes. Ils ont également un devoir d'exemplarité, de partage et de diffusion de leurs bonnes pratiques afin d’avancer ensemble et mutualiser les moyens pour agir le plus efficacement et rapidement possible. La restauration collective, en raison de son importance économique et de son organisation mais aussi par son rôle éducatif, constitue un fort levier d’action pour engager cette transformation.

L'atelier 9, enfin, a identifié la restauration collective comme un levier majeur d'une alimentation favorable à la santé, définie, en concertation avec le Comité national de l'alimentation, comme réunissant «  les propriétés qui lui permettent de satisfaire les besoins nutritionnels – en quantité et en qualité - et les exigences en matière de sécurité sanitaire, contribuant ainsi à préserver le bien-être physique, mental et social, de chacun, à court et long terme et, plus largement, la santé de la population. Elle résulte d'un engagement responsable de tous les acteurs de la chaîne alimentaire et d’un dialogue permanent au sein de la société ». La restauration collective permet à la fois d’améliorer la qualité des repas, de sensibiliser plus largement les convives aux fondamentaux d’une alimentation saine et de favoriser la structuration de plate-formes régionales ou locales, facilitant l’accès des agriculteurs à ces marchés.

Ainsi, il ressort de ces différents ateliers, auxquels ont participé l'ensemble des parties prenantes, un consensus sur la nécessité de fixer des objectifs quantitatifs d'approvisionnement de la restauration collective par des produits de qualité (produits issus de l'agriculture biologique, produits sous signes de qualité) et durables. Ces propositions font écho à l'évolution des attentes sociétales exprimées en matière d'alimentation, à une volonté de développer les synergies locales et à l'objectif de promouvoir une alimentation favorable à la santé.

Les produits issus de l'agriculture biologique ainsi que ceux bénéficiant d'autres signes ou mentions prévus à l'article L. 640-2 sont de nature, par leurs caractéristiques, à répondre à ces attentes.

Le secteur de la restauration collective publique doit dès lors constituer un des moteurs permettant de répondre aux attentes exprimées en matière de produits de qualité spécifique, laquelle vise non seulement les qualités organoleptiques du produit mais plus largement l’aptitude d’un produit à répondre à une demande explicite ou implicite du consommateur.

Dans ce contexte, les signes d’identification de la qualité et de l’origine visés au 1° de l’article L. 640-2 permettent de satisfaire les différents besoins et attentes que ce soit au regard de la préservation de l’environnement avec les produits issus de l’agriculture biologique, des garanties de la qualité supérieure des produits par rapport aux produits standard avec le label rouge, ou des caractéristiques du produit liées à son origine reconnues au travers des appellations d’origine et des indications géographiques, l’ensemble de ces qualités spécifiques étant définies par le biais de cahier des charges dont le respect est assuré par un système de contrôle officiel.

De même, les mentions valorisantes définies au 2° de l’article L. 640-2 répondent à des objectifs de valorisation d’une provenance d’un produit, du caractère traditionnel de sa production ou encore de la performance environnementale de l’exploitation. Les conditions de leur utilisation font l’objet d’un encadrement par les pouvoirs publics et d’un contrôle.

Enfin, le critère tiré de la prise en compte du coût du cycle de vie du produit doit permettre d'intégrer les coûts correspondant aux externalités environnementales liées au produit, en particulier les impacts de distance, et de participer à l'atteinte de l'objectif recherché.

La disposition législative proposée est enfin proportionnée à l'objectif d'intérêt général poursuivi, en ce qu'elle restreint le champ d'application du dispositif à la seule restauration collective publique, qu'elle fixe une obligation qui ne portera que sur une part des produits acquis, et qu'elle organise les conditions d'une mise en œuvre progressive du dispositif en fixant au 1er janvier 2022 sa date limite d'entrée en vigueur. Elle s'inscrit ainsi dans la continuité des mesures prévues par la loi n° 2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche (article L. 230-5 du code rural et de la pêche maritime) soumettant les gestionnaires des services de restauration scolaire et universitaire ainsi que des services de restauration des établissements d'accueil des enfants de moins de six ans, des établissements de santé, des établissements sociaux et médico-sociaux et des établissements pénitentiaires au respect de règles relatives à la qualité nutritionnelle des repas qu'ils proposent et de privilégier, lors du choix des produits entrant dans la composition de ces repas, les produits de saison.

 

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

3.1. Impacts économiques et financiers

La restauration collective représente 68 % des repas servis hors domicile chaque année en France, soit plus de 3 milliards de repas (données 2013 – UNILET / FranceAgriMer). Son chiffre d'affaires annuel s'élève à 17 milliards d'euros, et le montant de ses achats alimentaires représente un marché d'environ 7 milliards d'euros (données Agence BIO – rapport 2009 : produits biologiques en restauration collective). Elle concerne environ 72 000 établissements, dont 74% relève du secteur public. La gestion de la restauration collective, qui implique les achats, l’élaboration, la livraison des repas et le service en salle, peut prendre de multiples formes. Elle peut être directe, c'est-à-dire par l’établissement, ou concédée à un prestataire.

 

 

 

 

Le tableau ci-dessous (Source : Agence Bio) indique la part des différents secteurs de la restauration collective en fonction du nombre de restaurants et du nombre de repas :

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

S'agissant des produits issus de l'agriculture biologique, la valeur du marché en restauration hors foyer, tous circuits confondus, est estimée à 411 millions d’euros en 2016, en croissance de 6,8 % par rapport à 2015. Il se répartit en 229 millions d’euros en restauration collective et 182 millions en restauration commerciale.

 

En restauration collective, la part des produits biologiques est estimée à 2,9 % de la valeur d’achat des denrées. En 2016, la croissance a été moindre dans le secteur concédé (à des sociétés de restauration) que dans le secteur autogéré (en gestion directe).

 

Début 2017, 57 % des établissements de restauration collective (soit plus de 40 000 à l’échelle nationale) déclaraient proposer des produits biologiques à leurs convives, résultat stable depuis 2012, contre seulement 4% avant 2006. Le secteur public (avec 74 % des établissements) en propose plus largement que le secteur privé (34% des établissements). De même, les établissements en gestion directe en proposent davantage que ceux en gestion concédée (60 % contre 47 %) ainsi que les grosses et moyennes structures (73 % de celles de plus de 500 repas par jour en proposent).

 

Le secteur scolaire est le plus concerné, avec 79 % d’établissements proposant des produits « bio », suivi du secteur du travail avec 47 % d’établissements, puis du secteur de la santé et du social avec 30 % d’établissements.

 

En restauration hospitalière, le recours à des denrées biologiques reste très limité essentiellement du fait du surcoût financier induit (cf. infra).

 

Concernant le surcoût d'approvisionnement induit par cette mesure, il peut être évalué par les éléments suivants.

 

De prime abord, le coût matière, c'est-à-dire le coût d'approvisionnement des denrées, représente moins de la moitié du coût total en restauration collective (49 %) selon l'INSEE (base ESANE).

 

Concernant les produits issus de l’agriculture biologique, ceux-ci sont généralement plus chers à l’achat que les produits conventionnels, du fait notamment de méthodes de production de type extensif, du recours à une main d’œuvre plus importante et des frais de certification des fournisseurs.

 

Ainsi, selon l'Agence Bio (données 2017), 77 % des établissements ayant introduit des produits « bio » font état d’un surcoût de 18 % en moyenne pour les matières premières (contre 24 % en 2012) et de 16 % au global, tenant compte des coûts hors coût matière (formations, changement de procédures, etc.). Dans 2 restaurants sur 3 cependant, il n’y a pas de surcoût pour les convives, celui-ci étant lissé sur l’ensemble des repas (52 % des établissements) ou pris en charge par le donneur d’ordre (16 % des établissements). En complément, plus de la moitié (54 %) des établissements mettent en place des mesures visant à limiter le surcoût à travers des démarches de lutte contre le gaspillage alimentaire et la construction d'un approvisionnement plus efficient (mise en concurrence des fournisseurs, choix des produits, respect de la saisonnalité).

 

Dans le secteur hospitalier, suite à un sondage auprès d’experts de cette famille d’achat, il s’avère que l’écart de prix sur les denrées issues de l’agriculture biologique par rapport à celles issue de l’agriculture conventionnelle est actuellement de l’ordre de 25 % (Produits laitiers : +20/25 %, Épicerie : +20/25 %, Viande : +25/30 %). Dans le secteur des particuliers, les études montrent un écart de l’ordre de 60 % entre produits biologiques et conventionnels (Lait : +37 %, Bœuf/veau : +14 %, Porc : +79 %, Blé : +106 %). Le potentiel « théorique » de denrées issues de l’agriculture biologique se situe aujourd’hui entre 40 et 50 % (environ 400M€) sur un périmètre d’achat total de 930M€/an. Cela représenterait un surcoût de l’ordre de 80 à 100 M€/an (avec les niveaux de prix actuels).

 

Dans le secteur scolaire, sont produits 7,4 millions de repas par jour avec un prix de repas de 4,90€ (HT). Le coût matière dans ce prix oscille entre 1,80€ et 2.20€. Pour un repas « en mairie », les principales composantes du coût sont : 20 % pour les denrées, 10 % pour les fluides, 25 % pour les infrastructures et les matériels, 40 % pour les personnels et 5 % de divers.

 

Le coût des repas est couvert, à des degrés variables selon les collectivités, par la participation des usagers. La prise en compte, pour établir le coût facturé aux familles, des revenus, est généralisée ce qui génère une déconnexion entre le tarif pratiqué et le coût réel.

 

De nombreuses collectivités sont engagées dans des actions visant à développer la part de produits issus de l’agriculture biologique choisis en fonction de leur faible impact environnemental dans les repas servis. Actuellement, 58 % des établissements proposent des produits bio et 33 % des produits achetés sont régionaux. À titre d'exemples, la caisse des écoles du 5ème arrondissement de Paris (14 cuisines ; 600 000 repas / an) a des approvisionnements à 70 % par des circuits courts (un seul intermédiaire) en produits biologiques ou de qualité en ayant les mêmes critères d’affectation de moyens par la mairie de Paris que les autres arrondissements. La mairie de Mouans-Sartoux (Alpes-Maritimes) (9 544 habitants) assure en régie 1 000 repas/jours, soit 152 000 repas /an en bio avec une maîtrise du coût des denrées alimentaire (2,04€/repas en 2016), soit un tarif dans la moyenne nationale de la restauration collective.

 

Il n’existe pas de données sur les coûts nets représentés par cette restauration collective dans les budgets des collectivités.

 

Il ressort des échanges avec Agores, l'association nationale des directeurs de la restauration collective, qu'il est permis d'estimer que l'introduction de 50% de produits bio ou répondant à une démarche de développement durable conduirait à un surcoût estimé à 20% en moyenne du coût d'un repas, soit 30 à 40 centimes. Cette évaluation est cependant difficilement généralisable car les situations sont très variables, dépendant notamment de la taille des établissements de restauration collective et de l'existence d'un bassin de production agricole diversifié et engagé dans la conversion en agriculture biologique. Comme dans l'analyse de l'Agence Bio, le surcoût peut être compensé par des économies à travers des efforts de lutte contre le gaspillage, une meilleure définition des besoins pour les achats et la gestion plus fine des inscriptions à la cantine, etc. Ces efforts peuvent couvrir jusqu'à 20 à 30 % de surcoût selon les configurations. Au-delà, ces leviers ne permettent pas d'absorber le surcoût qui doit donc être pris en charge par les collectivités, dans un contexte de baisse des dotations, ou par les convives (augmentation de la tarification).

 

En revanche, l’extension significative du recours aux achats alimentaires de nature biologique aurait certainement un effet positif sur les prix.

 

Pour le secteur hospitalier par exemple, on pourrait estimer cet effet à environ -10 % sur 5 ans (échéance 2022), ce qui représenterait un surcoût de l’ordre de 15% par rapport aux produits issus de l’agriculture conventionnelle. Au final, cette baisse des prix se traduirait sur l’ensemble de la famille « restauration hospitalière » par un surcoût global de l’ordre de 65 à 85 M€/an (évaluation secteur hospitalier).

 

L’Association des Maires de France a par ailleurs conduit un travail de recensement d’initiatives de communes et intercommunalités pour une alimentation de qualité, dont les résultats montrent également un surcoût de l’ordre de 15%, mais qui est compensé par  une réduction de 80% du gaspillage alimentaire (de 180 grammes/repas à 40 grammes/repas), une intégration de la « cuisine de marché » (produits bruts, en vrac, frais et de saison), une meilleure adéquation entre les volumes achetés et les besoins (surtout pour les petites communes) et une réduction de la part de la viande.

 

S'agissant des produits acquis en prenant en compte le coût du cycle de vie du produit, il n'existe pas d'étude permettant d'évaluer l'impact financier de l'achat. Néanmoins, sachant que ce critère conduit à prioriser dans les offres, notamment l'approvisionnement en circuit court, ces produits ne devraient pas créer de surcoût par eux-mêmes et pourraient même induire un prix inférieur du fait de la réduction du nombre d'intermédiaires.

 

S’agissant de produits bénéficiant d’un signe d’identification de l’origine et de la qualité (hors agriculture biologique) ou de mentions valorisantes telles que définies à l’article L. 640-2 du code rural et de la pêche maritime, il n’existe pas non plus d’étude permettant d’évaluer l’impact financier de l’achat. On peut cependant raisonnablement estimer que le surcoût engendré par ces produits serait légèrement inférieur à celui engendré par les produits biologiques.

 

3.2. Impacts environnementaux

L'impact environnemental attendu serait positif puisque l'agriculture biologique implique une réduction significative de pesticides et d'intrants chimiques et, corrélativement, une pression moins forte sur les écosystèmes (sols, eau et biodiversité).

 

Pour aller plus en détail, l'Institut technique de l'agriculture biologique, en lien avec l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), a publié fin 2016 un rapport intitulé « Quantifier et chiffrer économiquement les externalités de l'agriculture biologique ? », étude commandée en juin 2015 par le ministère chargé de l'agriculture. Ce document, qui passe en revue quelques 280 études scientifiques, conclut à des impacts globalement positifs sur l’environnement, comparé à l'agriculture conventionnelle. En particulier, il relève les externalités positives que l'agriculture biologique tend à favoriser ainsi que les externalités négatives qui sont susceptibles d'être réduites par cette pratique agricole. Pour les externalités environnementales, l'agriculture biologique contribue notamment au maintien de la biodiversité, à la qualité de l'eau, à la préservation des sols ou encore à la séquestration du carbone dans les sols. A titre d'exemple, s'agissant de l'eau, la réduction des sources de pollutions agricoles est moins onéreuse que le traitement des eaux avant distribution. Grâce à l'agriculture biologique, il est ainsi possible d'éviter des coûts significatifs. D'après le rapport cité plus haut, « ces économies rapportées à l'hectare de grandes cultures se situent entre 20 et 46€ par hectare et par an à part égales entre pesticides et nitrate ».

 

En outre l'agriculture biologique induit des externalités concernant la santé humaine, par une moindre exposition aux pesticides de synthèse et, par extension, aux perturbateurs endocriniens, par la réduction des émissions agricoles polluantes dans l'atmosphère et par un plus faible usage des antibiotiques dans l'élevage, ce qui limite l'impact sur la santé en luttant contre l'antibiorésistance.

 

3.3. Impacts sur les collectivités territoriales

L'impact principal renvoie au surcoût d'approvisionnement des denrées dans les établissements dont les collectivités territoriales ont la charge, quel que soit le mode de gestion de la restauration collective par les personnes morales de droit public, et principalement dans les établissements scolaires. Ce surcoût s'appliquera aux budgets des collectivités territoriales, que ce soit dans le cas où la restauration collective est gérée en régie directe ou dans celui d'une restauration concédée à un prestataire privé. Si l'estimation du surcoût de l'approvisionnement est de l'ordre de 15 à 18 % selon les différentes études (voir plus haut), la mise en place combinée de plusieurs démarches lutte contre le gaspillage alimentaire, meilleure gestion des achats, adéquation fine entre les volumes et les besoins – peut compenser le renchérissement de l'approvisionnement, ainsi que le constate l'Association des Maires de France (voir plus haut).

 

Outre l'attente sociétale par rapport à cette mesure et les effets potentiellement positifs sur la santé des consommateurs, à travers notamment une moindre exposition aux résidus de pesticides, l'approvisionnement en produits acquis en prenant en compte le coût du cycle de vie du produit devrait structurer de nouvelles formes de relations commerciales, à même de dynamiser les territoires et d'ancrer localement l'alimentation et l'agriculture, ce qui rejaillira favorablement sur le développement économique des collectivités.

 

3.4. Impacts social et sur l’emploi

L'agriculture biologique connaît actuellement un fort développement, générant de nombreux emplois. Cette dynamique sera confortée et renforcée par la disposition législative proposée. Selon l'Agence Bio (données de septembre 2017), l'agriculture biologique représente au total près de 118 000 emplois directs de l'amont (production agricole) à l'aval (transformation et distribution) de la filière. La croissance forte de ce secteur rejaillit sur l'emploi avec 32 500 emplois directs (équivalents temps pleins) créés au cours des 4 dernières années. La structure de l'emploi dans l'agriculture biologique est la suivante :

 

- 77 700 emplois directs dans les fermes ;

- 38 200 emplois dans la transformation et la distribution ;

- 2 000 emplois dans les activités de conseil, de contrôle et de formation.

 

La mesure proposée répond à une forte attente sociétale. En particulier, 77 % des Français attendent des produits « bio » dans les hôpitaux, 72 % dans les maisons de retraite, 89 % des parents sont intéressés par une offre de produits biologiques à l'école, 78 % des actifs souhaitent des repas avec des produits bio sur leur lieu de travail ou dans leur restaurant d'entreprise (données Agence Bio – observatoire 2017 des produits biologiques en restauration collective).

 

L'augmentation de la part de produits issus de l'agriculture biologique est aussi l'occasion de proposer une communication adaptée aux convives et de les sensibiliser aux questions d'alimentation, ce qui peut en retour favoriser une évolution des comportements alimentaires.

 

L'approvisionnement en restauration collective est un des vecteurs pouvant contribuer à l'amélioration de la situation économique des entreprises de l'agriculture et de l'agroalimentaire, notamment par l'établissement de relations commerciales structurelles à l'échelle des territoires.

 

Pour rappel, 78 % des produits bio achetés en restauration collective sont d’origine française et 59 % d’origine régionale (données Agence Bio 2017). L'approvisionnement de proximité est de plus en plus encouragé : 65 % des établissements encouragent l’approvisionnement « bio » de proximité dans leurs appels d’offre, essentiellement en utilisant le critère « circuits courts » (77 %) et le critère « fraîcheur » (75 %).

 

3.5. Impacts administratifs

La mise en œuvre de cette disposition nécessitera un suivi par les services de l’État.

 

Les dispositions nouvelles ne mettent pas les acheteurs publics responsables de restaurants collectifs et qui ont fait le choix d'en externaliser la gestion, en situation de méconnaître leurs obligations au regard des règles relatives aux marchés publics. En effet, les textes nationaux (ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 et décret n° 2016-360) qui transposent la directive n° 2014/24/UE sur la passation des marchés publics favorisent le recours à des spécifications techniques et à des critères de sélections qui permettent de poursuivre les objectifs du présent texte, notamment les conditions d'exécution et critères environnementaux ou liés au coût du cycle de vie du service objet du marché.

 

Cette évolution législative impliquera en outre un changement des pratiques de la part des acheteurs publics qui devront adapter leurs cahiers des charges pour la restauration collective. Cette surcharge administrative sera cependant ponctuelle.

 

3.6. Impacts outre-mer

En l'absence d'études spécifiques pour l'outre-mer, il n'est pas possible d'évaluer précisément l'impact pour la restauration collective dans ces territoires. Néanmoins, il semble difficile, compte tenu du développement encore modeste de l'agriculture biologique dans ces territoires et de leur caractère insulaire ou de leur éloignement avec la métropole, de leur imposer cette disposition.

 

Afin de tenir compte des particularités dans les territoires d'outre-mer, il conviendra de prendre des dispositions spécifiques qui seront fixées dans le décret en Conseil d’État.

 

4. Consultations menées

La mesure a été examinée par le Conseil national d'évaluation des normes lors de sa séance du 11 janvier 2018. 

 

5. Modalités d’application

Les modalités d’application de ce dispositif, en particulier la fixation du pourcentage de produits acquis devant entrer dans la composition des repas au 1er janvier 2022, la détermination d'un objectif intermédiaire en 2020 ou encore la mise en œuvre outre-mer, seront fixées par un décret en Conseil d’État.

 

Il est envisagé d'atteindre l'objectif de 50 % de produits issus de l'agriculture biologique, ou bénéficiant d'un autre signe ou mention prévus par l'article L. 640-2 du code rural et de la pêche maritime ou acquis en prenant en compte le coût du cycle de vie du produit, au 1er janvier 2022. La fixation de ces taux sera effectuée par un décret en Conseil d’État qui fixera un objectif intermédiaire en 2020.

 

La définition de cet objectif intermédiaire apparaît nécessaire, en particulier pour les produits issus de l'agriculture biologique servis dans la restauration collective qui ne représentent, aujourd'hui, que 2,9 % de la valeur d'achat des denrées alimentaires, pour permettre aux opérateurs de s'organiser.

 

 

 

 


ARTICLE 12 – AIDE ALIMENTAIRE

 

1. État des lieux et diagnostic

 

Les états généraux de l’alimentation, notamment leur atelier 12 relatif à la lutte contre l’insécurité alimentaire, ont mis en exergue la nécessité de considérer l'aide alimentaire comme une des composantes de la lutte contre la précarité alimentaire, qui recouvre de multiples dimensions : au-delà de la couverture des besoins nutritionnels, elle relève de questions d’identité, de lien social et familial, de culture, de plaisir, de santé. La réponse à la précarité alimentaire doit prendre en compte l’ensemble de ses dimensions, et doit s’inscrire dans un objectif de durabilité.

 

2. Objectifs poursuivis

L'aide alimentaire a été mise en place en 1987 dans le cadre de la politique agricole commune (PAC), afin d'assurer l'écoulement des surplus agricoles, et bénéficiait à cet effet d'une aide européenne dans le cadre du Programme européen d'aide aux plus démunis (PEAD). Avec la diminution, puis la quasi disparition des stocks d'intervention, le programme a financé des achats de produits alimentaires, jusqu'à ce que le tribunal de première instance de l'Union européenne, saisi par l'Allemagne, juge que ce type d'action, à but purement social, ne pouvait être financé dans le cadre de la PAC et annule partiellement le règlement PEAD 983/2008. L'Allemagne ayant accepté le maintien du PEAD pendant deux années de plus, c'est par le règlement (UE) n° 223/2014 du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2014 qu'a été mis en place le Fonds européen d'aide aux plus démunis, qui relève désormais clairement d'une logique de lutte contre la pauvreté et d'inclusion sociale.

 

L’article 12 du projet de loi propose en conséquence, afin d’asseoir le rôle de pilotage du ministère chargés de l’action sociale dans la politique de lutte contre l'insécurité alimentaire, d'insérer les dispositions relatives à l'aide alimentaire, qui figurent actuellement dans le code rural et de la pêche maritime, dans le code de l'action sociale et des familles.

 

Afin de prendre en compte les orientations de l'atelier 12 des Etats généraux de l'alimentation, l'objet de l'aide alimentaire est étendu à la proposition d'un accompagnement aux personnes en situation de vulnérabilité économique ou sociale. Ce principe de l'accompagnement des personnes est d'ailleurs prévu par l'article 2 du règlement (UE) n° 223/2014 du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2014 relatif au Fonds européen d'aide aux plus démunis.

3. ANALYSE DES IMPACTS DES DISPOSITIONS ENVISAGEES

 

3.1. IMPACTS JURIDIQUES

 

Ces propositions législatives répondent à l'évolution de la compétence du ministère chargé de l'action sociale en matière d'aide alimentaire, elle-même induite par celle du cadre européen.

 

Ce ministère s'est vu confier la gestion de l'intégralité de l'aide alimentaire depuis la mise en place en 2011 du Fonds européen d'aide aux plus démunis (FEAD), qui a succédé au Programme européen d'aide aux plus démunis (PEAD). Si le PEAD avait un objectif d'écoulement des surplus agricoles et a été adossé à la Politique agricole commune, le FEAD relève d'une logique de lutte contre la pauvreté et d'inclusion sociale. Dans ce contexte, il est logique d'opérer le transfert des dispositions relatives aux associations habilitées en matière d'aide alimentaire du code rural et de la pêche maritime dans le code de l'action sociale et des familles.

 

A l'occasion du transfert de l'article L. 230-6 du code rural et de la pêche maritime à l'article L. 266-1 du code de l'action sociale et des familles, un alinéa sans portée utile est supprimé. Il s’agit de l’alinéa qui précise que les associations peuvent mettre en place des dispositifs de stockage pour acheter des produits agricoles quand les cours sont bas et les distribuer ultérieurement. Or les associations disposent de solutions de stockage pour toutes les denrées qu'elles distribuent quelles que soient les conditions dans lesquelles elles les acquièrent.

 

Enfin, la modification portée à l'article L. 541-15-5 du code de l'environnement vise à tirer les conséquences des évolutions législatives citées plus haut en remplaçant la référence à l'article L. 230-6 du code rural et de la pêche maritime par celle de l'article L. 266-1 du code de l'action sociale et des familles.

 

3.2. IMPACTS ECONOMIQUES ET FINANCIERS

 

Sur un plan économique, ces modifications sont sans incidence. Le changement de code porteur n'a pas d'incidence pour les associations habilitées pour l'aide alimentaire qui proposent déjà un accompagnement aux personnes, selon des modalités variées, mais au moins sous forme d'écoute et d'information sur les dispositifs existants. L'introduction de la mention de la lutte contre la précarité alimentaire dans l'intitulé du chapitre concerné n'ajoute pas d'obligations pour les opérateurs économiques.

 

3.3. IMPACT SOCIAL ET SUR L'EMPLOI

 

L’intégration de la définition de l'aide alimentaire au code de l’action sociale et des familles vise à élargir l’approche d’accompagnement des personnes en situation de vulnérabilité sociale et économique afin de mieux lutter contre leur exclusion en considérant l’alimentation au-delà de la seule couverture des besoins nutritionnels.

 

3.4. IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX

 

Ces modifications sont par elles-mêmes, sans incidence sur l'environnement. Le changement de code porteur ne remet pas en cause le fait que la lutte contre la précarité alimentaire concourt pleinement à la politique de protection de l’environnement en ce qu’elle est, pour partie, basée sur la lutte contre le gaspillage alimentaire.

 

3.5. IMPACTS OUTRE-MER

 

Ces dispositions concernent l’ensemble du territoire national, y compris l’outre-mer.

 


ARTICLE 13 – BIEN-ÊTRE ANIMAL

 

1. État des lieux et diagnostic

 

Des sanctions pénales en matière de maltraitance animale figurent tant dans le code pénal que dans le code rural et de la pêche maritime.

 

Les sanctions pénales prévues par le code pénal

En premier lieu, l’article 521-1 du code pénal sanctionne les sévices graves ou de nature sexuelle et les actes de cruauté commis sur les animaux domestiques, apprivoisés ou tenus en captivité par une peine d’emprisonnement de 2 ans et une peine d’amende de 30.000 euros.

Ce même article sanctionne également des mêmes peines la création d’un nouveau gallodrome et l’abandon d’un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité, à l’exception des animaux destinés au repeuplement.

Les personnes physiques commettant ces délits peuvent se voir, à titre de peine complémentaire, interdire temporairement ou définitivement de détenir un animal. Elles peuvent en outre se voir interdire d’exercer, pour une durée de cinq ans au plus, une activité professionnelle ou sociale dès lors que les facilités que procure cette activité ont été sciemment utilisées pour préparer ou commettre l'infraction.

Les personnes morales reconnues coupables de ces infractions encourent une peine d’amende de 150.000 euros en application de l’article 131-38 du code pénal et peuvent se voir condamner à certaines des peines complémentaires prévues par l’article 131-39 de ce code : l'interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer directement ou indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales ; la fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus des établissements ou de l'un ou de plusieurs des établissements de l'entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ; l'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'émettre des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés ou d'utiliser des cartes de paiement ; la peine de confiscation, dans les conditions et selon les modalités prévues à l'article 131-21 du code pénal ; l’affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication au public par voie électronique.

En deuxième lieu, l’article R. 654-1 du code pénal sanctionne le fait d'exercer volontairement et sans nécessité des mauvais traitements envers un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité de l'amende prévue pour les contraventions de la 4ème classe.

Si la loi ne définit pas les notions de « sévices » et de « mauvais traitements », la jurisprudence a permis d’en dessiner les contours, ces deux notions se distinguant en fonction du degré de gravité des atteintes portées aux animaux.

En dernier lieu, l’article R. 655-1 du code pénal réprime l’atteinte volontaire à la vie d’un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité de l’amende prévue pour les contraventions de la 5e classe et l’article  R. 653-1 de ce même code l’atteinte involontaire à la vie d’un tel animal de l’amende prévue pour les contraventions de la 3e classe.

 Ces dispositions pénales figurant dans le code pénal ont donné lieu à :

- 259 condamnations en 2015 et 331 en 2016 en matière délictuelle (sévices graves, sévices sexuels, abandon d’animal, création d’un nouveau gallodrome) ;

- 47 condamnations en 2015 et 51 en 2016 s’agissant de la contravention de 5e classe (atteinte volontaire à la vie d’un animal) ;

- 417 condamnations en 2015 et 373 en 2016 s’agissant de la contravention de 4e classe (mauvais traitements infligés sans nécessité à un animal).

 

Les sanctions pénales prévues par le code rural et de la pêche maritime

L’article L. 215-11 du code rural et de la pêche maritime sanctionne de six mois d’emprisonnement et de 7500 euros d’amende le fait pour toute personne exploitant un établissement de vente, de toilettage, de transit, de garde, d'éducation, de dressage ou de présentation au public d'animaux de compagnie, une fourrière, un refuge ou un élevage d'exercer ou de laisser exercer sans nécessité des mauvais traitements envers les animaux placés sous sa garde.

Les personnes physiques et morales coupables de ces infractions encourent les mêmes peines complémentaires que celles présentées supra (cf. article 521-1 du code pénal).

Par ailleurs, l’article L. 215-13 de ce même code réprime d'une peine de six mois d'emprisonnement et de 7.500 euros d'amende le fait de transporter des animaux sans être titulaire de l’autorisation prévue à l'article 6 du règlement (CE) n° 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 sur la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes, pour l'espèce transportée et pour la durée du voyage.

Outre ces deux délits, de nombreuses contraventions de 3e, 4e et 5e classes existent dans le code rural et de la pêche maritime pour sanctionner les gardiens, éleveurs ou détenteurs d’animaux domestiques, apprivoisés ou captifs, qui priveraient ces animaux de soins, de nourriture, d’abreuvement, ou qui les placeraient dans un habitat ou une installation leur causant des souffrances (article R. 215-4) ou qui transporteraient ces animaux dans des conditions non conformes à la législation en vigueur (article R. 215-6). Des contraventions des 3ème, 4ème et 5ème classes sont également prévues si l’abattage ou la mise à mort de ces animaux sont réalisés dans des conditions non conformes à la législation (article R. 215-8).

Ces dispositions pénales figurant dans le code rural et de la pêche maritime ont donné lieu à :

- 28 condamnations en 2015 et 22 en 2016 en matière délictuelle (mauvais traitements envers un animal placé sous sa garde par l’exploitant d’un établissement détenant des animaux et transport commercial d’animaux sans autorisation) ;

- 486 condamnations en 2015 et 461 en 2016 en matière contraventionnelle.

 

Les dispositions de l'article L. 215-11 du code rural et de la pêche maritime, en visant spécifiquement les mauvais traitements exercés « dans un établissement de vente, de toilettage, de transit, de garde, d'éducation, de dressage ou de présentation au public d'animaux de compagnie, une fourrière, un refuge ou un élevage », ne prennent pas en compte les étapes incontournables de la vie d'un animal de rente que sont le transport et l'abattage.

 

Par ailleurs, le code de procédure pénale prévoit à son article 2-13 que toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits et dont l'objet statutaire est la défense et la protection des animaux peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions réprimant les sévices graves ou actes de cruauté et les mauvais traitements envers les animaux ainsi que les atteintes volontaires à la vie d'un animal prévus par le code pénal.

 

Les diffusions successives en 2016 d’images inacceptables de mauvais traitements sur animaux dans les abattoirs d’Alès, du Vigan et de Mauléon ont choqué l’ensemble des acteurs du secteur et les pouvoirs publics, ainsi que les citoyens. Elles ont renforcé la volonté d’une mobilisation collective pour assurer une meilleure protection des animaux lors de leur mise à mort.

 

En juin 2016, le Gouvernement, dans le cadre de l’examen du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, a déposé un amendement tendant à créer un délit de mauvais traitements exercés sur les animaux en abattoirs. Cette disposition répondait alors à l’engagement pris la même année par le Gouvernement devant la commission d’enquête relative aux abattoirs, d’étendre le délit de mauvais traitement aux abattoirs et aux transports d’animaux qui reste jusqu’à présent limité aux animaux de compagnie, aux fourrières et refuges et aux élevages. Le Conseil constitutionnel a toutefois censuré cette disposition par décision du 8 décembre 2016, estimant qu'elle ne présentait pas de lien, même indirect, avec le projet de loi initial.

 

Cette disposition reprise dans le projet de loi intègre également l'alourdissement des peines proposé dans le cadre de la proposition de loi n° 4203 déposée par M. Falorni le 9 novembre 2016, sous réserve d'une adaptation du montant de l'amende prévue à l'article L. 215-11.

 

 

2. Objectifs poursuivis

 

Le présent article répond à une attente sociétale, exprimée à plusieurs reprises à l'occasion des états généraux de l'alimentation, d'une meilleure prise en compte du bien-être animal, y compris en cours de transport ou au moment de la mise à mort.

 

L’objectif poursuivi est de répondre à cette attente en renforçant les outils qui permettent de poursuivre et de sanctionner les mauvais traitements aux animaux.

 

En premier lieu, il prévu à cet effet d'étendre le délit de mauvais traitement exercé sur les animaux prévu par le 3° du II de l'article L. 215-11 du code rural et de la pêche maritime aux activités de transport et d'abattage.

 

Parallèlement, un renforcement des sanctions est proposé pour ce délit de mauvais traitement : actuellement, l'article L. 521-1 du code pénal sanctionne de 2 ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende le fait de commettre des actes de cruauté ou sévices graves sur des animaux (caractère intentionnel du délit). L'article L. 215-11 du code rural et de la pêche maritime ne prévoit qu’une sanction de 6 mois d'emprisonnement et de 7 500 € d'amende pour les mauvais traitements exercés par des professionnels. La proposition vise à rendre plus dissuasive la peine encourue pour les mauvais traitements en renforçant la sanction prévue à l'article L. 215-11, pour la fixer à 1 an d'emprisonnement et 15 000 € d'amende.

 

En second lieu, il est proposé d’étendre le droit de se constituer partie civile reconnu à certaines associations de défense et de protection des animaux par l'article 2-13 du code de procédure pénale aux infractions de maltraitance animale prévues et réprimées par le code rural et de la pêche maritime et notamment par l'article L. 215-11 tel qu'il sera complété par le 3° du II de l'article 13 du projet de loi (création du délit de mauvais traitement en cours de transport et pendant l'abattage).

 

Il est rappelé que la plainte avec constitution de partie civile devant le juge d’instruction ne confère pas aux associations le pouvoir de rechercher et de constater des infractions. En revanche, elle confère au plaignant la possibilité de demander au juge d’instruction d’instruire sur des faits délictueux de maltraitance animale qui ont précédemment fait l’objet d’une décision de classement sans suite par le procureur de la République.

 

L’article 723-15 du code de procédure pénale permet néanmoins aux personnes non incarcérées condamnées à une peine inférieure ou égale à deux ans de bénéficier d’un aménagement de peine (exemple : semi-liberté ou placement sous surveillance électronique). En cas de récidive, la durée de deux ans est ramenée à un an.

 

3. Analyse des impacts des dispositions envisagées

3.1. Impacts juridiques

 

La disposition proposée aura pour conséquence de permettre aux salariés qui signaleraient un manquement grave à la loi de bénéficier du statut de « lanceur d'alerte », en application des dispositions introduites dans la loi du 6 décembre 2013 et complétées par la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

 

3.2. Impacts social et sur l’emploi

 

Cette proposition aura pour effet de protéger les salariés par les dispositions relatives au statut de lanceurs d'alerte dès lors qu'ils signalent la commission de ce délit de maltraitance.

 

3.3. Impacts SUR LES ADMINISTRATIONS

L'extension du délit de mauvais traitement exercé sur les animaux prévu par le 3° du II de l'article L. 215-11 du code rural et de la pêche maritime aux activités de transport et d'abattage est susceptible d'engendrer une augmentation des informations (dénonciations) transmises aux services de contrôles, grâce à la protection accordée aux salariés par les dispositions relatives au statut de lanceurs d'alerte, et donc des contrôles à réaliser par les services en réaction à ces informations. Les services de l’État pourront également engager des opérations de contrôles visant à la recherche spécifique de ce type d'infractions.

L'impact dissuasif de ces mesures laisse cependant espérer à terme une réduction de la fréquence de ces constats.

La mesure permettra, par ailleurs, de systématiser les suites données par le parquet grâce à l'extension de la possibilité pour les associations de protection animale de se porter partie civile.


ARTICLE 14 – PRATIQUES COMMERCIALES PROHIBÉES À L’OCCASION DES VENTES DE PRODUITS PHYTOPHARMACEUTIQUES

 

1. État des lieux et diagnostic

Le secteur des produits phytopharmaceutiques est très concentré, à l'instar de nombreux secteurs à fort contenu en innovation nécessitant d'importants investissements de recherche et développement (10 % du chiffre d'affaires des metteurs en marché et réinvesti en recherche et développement). Ainsi, la fédération UIPP regroupe 22 adhérents et indique représenter 95 % de parts de marché pour un chiffre d'affaires d'environ 2,2 milliards d'euros. Ces entreprises mettent sur le marché environ 2 000 produits phytopharmaceutiques autorisés en France, correspondant à 400 substances actives distinctes. Ces produits représentent environ 17 000 usages autorisés différents.

La vente à l'utilisateur final (professionnel ou amateur) passe par une des plus de 3 600 entreprises agréées pour la distribution de produits à usages professionnels ou non professionnels (soit plus de 10 000 points de vente). Les quantités vendues en France représentent aujourd'hui plus de 60 000 tonnes. Les utilisateurs professionnels sont plusieurs centaines de milliers (575 000 titulaires d'un certiphyto correspondant à cette catégorie).

Il s'agit également d'un marché fortement évolutif. Compte tenu des innovations techniques mais aussi des évolutions réglementaires ou de lignes directrices en matière d'évaluation, l'ANSES est amenée à délivrer chaque année près de 1 900 décisions concernant les AMM de ces produits dont plus de 170 sont des décisions dites « majeures » (nouvelles AMM, réexamen, etc.). Les gammes de produits sont ainsi fréquemment appelées à se renouveler, ce qui pose la question de la gestion des flux et du portage des stocks de ces produits.

Les pratiques commerciales se retrouvant dans l'ensemble de la chaîne de valeur des produits phytopharmaceutiques, depuis le fabricant jusqu'au distributeur final (opérateur qui vend à l'utilisateur final), sont peu connues.

A l'instar de ce qui existe ou a pu exister sur d'autres marchés (notamment les médicaments vétérinaires), les cédants peuvent être tentés d'associer à la vente de leurs produits des clauses commerciales visant à fidéliser les clients, à récompenser les ventes effectuées en aval par les clients ou encore à réduire les coûts de stockage du primovendeur.

Ces différentes pratiques (rabais, ristournes, marges arrières, etc.) peuvent conduire à la vente de produits dont l'usage ne répond ni aux besoins réels des utilisateurs, ni aux principes de la protection intégrée des cultures tels que rappelés dans la directive 2009/128/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 instaurant un cadre d’action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable.

 

2. Objectifs poursuivis

Cet article a pour but d'éviter toute incitation commerciale, de quelque nature que ce soit, à utiliser des produits phytopharmaceutiques de façon inappropriée, de telles incitations seraient de nature à favoriser les ventes de ces produits et par conséquent leur utilisation alors que pour des raisons de santé publique et de qualité de l'environnement, il est essentiel d'en diminuer l'utilisation.

Il prévoit qu'à l'occasion de la vente de produits phytopharmaceutiques définis à l'article L. 253-1, les remises, rabais et ristournes, la différenciation des conditions générales et particulières de vente au sens du I de l'article L. 441-6 du code de commerce ou la remise d'unités gratuites et toutes pratiques équivalentes sont interdits.

Les dispositions de l'article ne s'appliquent pas aux produits de biocontrôle définis à l'article L. 253-6, non plus qu'aux substances de base au sens de l'article 23 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques.

Tout manquement à ces dispositions est passible d'amendes administratives à l'instar des dispositions adoptées pour la vente des médicaments vétérinaires adoptées par la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt. 

Cet article est analogue à l'article L. 5141-14-2 introduit dans le code de la santé publique par l’article 48 de la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt qui a interdit les remises, rabais, ristournes à l'occasion de la vente de médicaments vétérinaires contenant une ou plusieurs substances antibiotiques.

 

L'interdiction des remises, rabais et ristournes s'appliquera à tous les établissements, c'est-à-dire à tout fabricant et vendeur situé sur le territoire national et à tout importateur.

 

3. necessite de legiférer

L'encadrement de ces pratiques commerciales relève du domaine de la loi et trouve sa place au chapitre III du titre V du livre II du code rural et de la pêche maritime.

 

 4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

L'utilisation importante de produits phytopharmaceutiques présente un risque pour la santé humaine et animale. Le rapport des inspections générales des ministères chargés de l'agriculture, de la santé et de l'environnement de décembre 2017 souligne que : « Les différentes études publiées, et notamment l’expertise collective de l’Inserm de 2013, mettent en évidence des augmentations de risque significatives pour plusieurs pathologies en lien avec l’exposition des travailleurs et de leurs familles (cancer de la prostate, maladie de Parkinson, lymphome non hodgkinien, myélome multiple, atteinte du système nerveux central) ainsi que pour le développement du fœtus et la petite enfance lors d’expositions au cours de la période prénatale et périnatale. »

Tous les leviers doivent être mobilisés pour accélérer le changement vers une moindre dépendance aux produits phytopharmaceutiques et l'encadrement des pratiques commerciales est une mesure pertinente pouvant y concourir. En effet, les pratiques commerciales dans le secteur sont relativement mal connues, mais les pratiques dont l'interdiction est envisagée existent bien et poussent à l'utilisation de produits dans des cas où celle-ci n'est pourtant pas nécessaire.

L'atteinte portée à la liberté d'entreprendre par le dispositif n'est pas disproportionnée puisque la loi intervient seulement pour déterminer les modalités de calcul des prix, ceci sans même les encadrer. Cette atteinte est donc limitée.

Pour les exploitations agricoles, la suppression de toutes les formes de marge arrière entraînera une baisse des quantités achetées.

Cette interdiction contribuera à la diminution des usages, risques et impacts des produits phytopharmaceutiques sur la santé et l'environnement. Elle aura donc un impact positif sur ce point.

Pour mémoire, l'introduction d'une disposition semblable pour les médicaments vétérinaires a concouru au succès du plan Ecoantibio visant à réduire l’utilisation des médicaments vétérinaires en élevage afin de limiter les risques d’antibiorésistance, qui a entraîné une baisse de 37 % de la consommation de médicaments vétérinaires en 5 ans alors que l'objectif était de 25 %.

Pour les produits phytopharmaceutiques, cette disposition devrait de la même façon contribuer au succès du plan Ecopyto 2 qui s'est donné pour objectif une baisse de 25 % à l'horizon 2020 et de 50 % à l'horizon 2025.

 

5. modalités d’application et entree en vigueur

Les dispositions du chapitre III du titre V du livre II ne sont pas applicables à Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon en application des articles L. 272-3 et L. 274-3 du code rural et de la pêche maritime.

Les dispositions nouvelles ne s'appliquent pas aux contrats en cours.


 

ARTICLE 15 – HABILITATIONS À MODIFIER LE CODE RURAL ET DE LA PÊCHE MARITIME ET LE CODE DE  L’ENVIRONNEMENT

 

Séparation de l’exercice des activités mentionnées au 1° du II de l’article L. 254-1 du code rural et de la pêche maritime et de l’activité de conseil à l’utilisation de produits phytopharmaceutiques

1. État des lieux et diagnostic

1.1. Sur la séparation de la vente et du conseil

L'encadrement des activités de vente et de conseil à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques est fixé au niveau de l'Union européenne par la directive 2009/128/CE du Parlement européen et du conseil du 21 octobre 2009 instaurant un cadre d’action pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable. Cette directive fixe des exigences notamment en termes de formation des acteurs (utilisateurs professionnels, distributeurs, conseillers) et d'information des utilisateurs.

 

La loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite « Grenelle 2 », puis la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, ont mis en place puis renforcé au niveau national les mesures relatives au conseil spécifique à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques.

 

L’exercice des professions de distributeur de produits phytopharmaceutiques, d’applicateur de ces produits et de conseil indépendant pour leur utilisation est soumis à un agrément d'entreprise qui repose sur une certification externe préalable par un organisme certificateur accrédité.

 

Le personnel des entreprises de distribution doit par ailleurs justifier d'une certification individuelle de capacité (« Certiphyto ») pour la vente ou le conseil selon les fonctions occupées.

 

Les distributeurs doivent tenir un registre des ventes afin de permettre la traçabilité complète des produits vendus. Ce registre est déclaré annuellement auprès de l’agence de l’eau Artois Picardie, pour permettre la perception de la redevance pour pollutions diffuses (RPD), dont la collecte est assurée par les distributeurs (134,7 M€ en 2015).

 

Les distributeurs sont également les « obligés » du dispositif expérimental des certificats d’économie des produits phytopharmaceutiques (CEPP - cf. infra point 2).

 

Lors de la vente par une entreprise agréée, une personne titulaire d'un Certiphyto « vente de produits professionnels » ou « conseil à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques »  doit être disponible pour fournir à l'acquéreur les informations appropriées concernant la sécurité d’utilisation des produits phytopharmaceutiques, les risques pour la santé et l’environnement et les consignes de sécurité afin de gérer ces risques.

 

En complément de ces informations sur la sécurité d'utilisation des produits, la loi du 13 octobre 2014 a imposé aux distributeurs de dispenser au moins une fois par an un conseil individualisé à l'attention de leurs clients utilisateurs professionnels, sauf si le client peut justifier l'avoir reçu d'un autre distributeur ou d'un conseiller indépendant agréé (article L. 254-7 du code rural et de la pêche maritime) ; ainsi, cette obligation ne pèse pas directement sur l'utilisateur professionnel, mais sur le distributeur qui ne peut vendre un produit que si un conseil annuel a été délivré au client, et le cas échéant délivrer ce conseil annuel préalablement à la vente si le client n'en dispose pas.

 

Plusieurs dispositions permettent de garantir que le conseil délivré par le distributeur n'est pas directement rattaché à la vente : il doit notamment être délivré par un agent certifié en la matière (Certiphyto « conseil »), selon les mêmes modalités que lorsqu'il est délivré par un conseiller indépendant (le référentiel d'agrément de l'activité de distributeur reprend intégralement les exigences de l'agrément de « conseiller indépendant »), et les personnes délivrant le conseil ne peuvent percevoir de rémunération indexée directement ou indirectement à la vente de produits.

 

En fin de campagne, le distributeur doit faire un bilan annuel quantitatif et qualitatif des préconisations réalisées.

 

Enfin, les utilisateurs professionnels doivent disposer d'un certificat individuel « utilisation des produits phytopharmaceutiques » dans les catégories « décideur en entreprise » ou « utilisation des produits phytopharmaceutiques » dans la catégorie « opérateur ».

 

Les dispositions législatives introduites par la loi du 13 octobre 2014 pour renforcer la séparation entre vente et conseil, puis celles relatives au dispositif des CEPP créé en octobre 2015 et confirmé en avril 2017 sont encore récentes et n'ont pas encore produit tous leurs effets.

 

Les règles et procédures en vigueur prévoient des obligations importantes reposant sur les distributeurs et visant à déconnecter le conseil de la vente. Elles établissent une distinction claire entre le conseil de sécurité et le conseil annuel et définissent le contenu du conseil annuel, en imposant une formalisation de sa préconisation à partir d'un diagnostic d'exploitation.

 

En pratique, le conseil est essentiellement délivré par les distributeurs, sous la forme d'un conseil à l'achat, en fonction des variétés cultivées et des produits recommandés par les firmes ou les instituts techniques. Cette activité est étroitement liée à l'acquisition de références locales à partir d'observations et de résultats d'essais, dont le coût est intégré dans celui des produits vendus.

 

Le conseil annuel, dont l'objectif n'est pas défini précisément par la loi, est essentiellement orienté vers l'adaptation technico-économique des produits phytopharmaceutiques à la situation phytosanitaire prévisionnelle, plutôt que vers la promotion des solutions alternatives, lorsqu'elles existent, l'économie en produits ou la priorité donnée à des produits moins risqués. Il vise principalement à l'amélioration des performances et l'efficience phytosanitaire (les traitements les plus efficaces au moindre coût) et ne prend pas nécessairement en compte les principes de la protection intégrée des cultures.

 

1.2. Sur le dispositif des certificats d'économie des produits phytopharmaceutiques

La réduction de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques, ainsi que celle des risques et des impacts qui y sont liés, est une évolution nécessaire, au regard de l’évolution des connaissances récentes concernant les effets de ces produits sur la santé humaine, mais également sur l’environnement, la biodiversité et les services écosystémiques qui en dépendent, par exemple les agents pollinisateurs.

 

Dans ce cadre, notre agriculture doit sortir de l’impasse que constitue une trop forte dépendance aux produits phytopharmaceutiques pour assurer sa compétitivité future.

 

Il est donc essentiel de valoriser et de déployer auprès du plus grand nombre d’agriculteurs les techniques et les systèmes économes en produits phytopharmaceutiques et performants. La loi n° 2017-348 du 20 mars 2017 relative à la lutte contre l'accaparement des terres agricoles et au développement du biocontrôle a redonné un fondement légal au dispositif expérimental des certificats d’économie des produits phytopharmaceutiques (CEPP), inspiré des certificats d'économie d'énergie. Ce dispositif était initialement prévu par l'ordonnance n° 2015-1244 du 7 octobre 2015 prise sur le fondement d'une habilitation prévue par la loi du 13 octobre 2014, mais annulée en décembre 2016 par le Conseil d’État pour un motif de procédure.

L’expérimentation concerne uniquement le territoire de la métropole et sa durée est fixée à six ans et demi, à compter du 1er juillet 2016.

Les distributeurs sont, au sens de la loi, les « obligés » du dispositif expérimental : à ce titre, ils doivent acquérir pour l'année 2021 (qui correspond à la dernière année de l'expérimentation) un nombre de CEPP déterminé en fonction de leurs ventes antérieures de produits phytopharmaceutiques, hors produits de biocontrôle.

Les certificats sont obtenus par la mise en œuvre d'actions concourant à la réduction de l'utilisation et des impacts de produits phytopharmaceutiques. Ces actions sont reconnues par le ministre chargé de l'agriculture après évaluation par un comité indépendant animé par l'Institut national de la recherche agronomique. Les obligés seront soumis à une pénalité de 5 euros par certificat manquant au regard de l'objectif assigné pour 2021. Aucune obligation n'est prévue au-delà de 2021 et en 2022, seule une évaluation du dispositif est prévue.

Par ailleurs, toute autre personne morale qui exerce des activités de conseil agricole indépendant et qui met en œuvre des actions concourant à des économies de produits phytopharmaceutiques (« éligibles » au sens de la loi) peut également obtenir des certificats d’économie de produits phytopharmaceutiques, lesquels peuvent être en outre acquis ou cédés par les obligés ou les éligibles.

Le dispositif est opérationnel et tous les obligés du dispositif ont reçu notification des obligations qui leur incombent.

Le choix de reporter la fixation d'un objectif à 2021 visait à assurer un déploiement progressif du dispositif, afin de laisser aux obligés le temps de se l'approprier. Cependant, il est constaté qu'une proportion importante des distributeurs de produits phytopharmaceutiques ne se sont pas encore engagés dans la démarche et n'ont pas notifié d'actions ouvrant droit à des certificats.

A ce stade, les entreprises de conseil agréées ne s'engagent pas dans le dispositif, aucune entreprise concernée n'ayant demandé à participer à celui-ci en qualité d'éligible. D'autres opérateurs, par exemple les vendeurs de matériel référencé au titre des CEPP, ne trouvent pas d’intérêt suffisant à obtenir un agrément et à devenir éligible du dispositif pour valoriser les CEPP liés à leurs ventes, compte tenu de son caractère non pérenne.

L’intérêt des actions pluriannuelles qui permettent l’obtention de CEPP sur plusieurs années est limité du fait que seule l'année 2021 sert à l'évaluation de l'atteinte de l'objectif de CEPP.  A titre d'exemple, les actions réalisées en 2021 ne seront valorisées qu'une seule année alors qu'elles donnent des CEPP pour cinq ans.

L'élaboration d'actions standardisées est également freinée en raison du caractère expérimental du dispositif actuel et du contexte lié au projet de séparation du conseil et de la vente de produits phytopharmaceutiques, certains acteurs anticipant que cette séparation pourrait remettre en cause le dispositif des CEPP.

Ce constat a conduit à proposer de mettre fin de manière anticipée à l'expérimentation pour rendre le dispositif permanent, tout en l'adaptant pour en renforcer l'efficacité (cf. point 2 infra).

2. Objectifs poursuivis

L'objectif poursuivi est de prévenir tout risque de conflit d'intérêts qui pourrait résulter de la coexistence chez un même opérateur des activités de conseil et de vente de produits phytopharmaceutiques, et de garantir aux utilisateurs professionnels un conseil annuel individualisé qui concoure effectivement à la réduction de l'utilisation, des risques et des impacts des produits phytopharmaceutiques, conformément aux objectifs de la directive 2009/128 précitée qui a introduit dans le droit de l’Union européenne les principes de la protection intégrée des cultures (article 3 et annexe III), et de définir à cette fin les conditions dans lesquelles l'exercice des activités de vente et de conseil de ces produits sont rendues incompatibles. [6]

La protection intégrée des cultures consiste en la prise en considération attentive de toutes les méthodes de protection des plantes disponibles et, par conséquent, se traduit par l’intégration de mesures appropriées qui découragent le développement des populations d’organismes nuisibles et maintiennent le recours aux produits phytopharmaceutiques et à d’autres types d’interventions à des niveaux justifiés du point de vue économique et environnemental, et réduisent ou limitent au maximum les risques pour la santé humaine et l’environnement. Son objectif est de privilégier la croissance de cultures saines en veillant à perturber le moins possible des agro-écosystèmes en encourageant les mécanismes naturels de lutte contre les ennemis des cultures.

Le conseil annuel individualisé, dont devra bénéficier tout utilisateur professionnel, s'inscrira dans cet objectif de réduction de l'usage et des impacts des produits phytopharmaceutiques. À cet effet, il devra concerner toutes les utilisations de produits, y compris en zone non agricole et, pour les utilisations en zone agricole, respecter les principes de la protection intégrée des cultures. Ainsi, ce conseil devra prendre en compte les caractéristiques et contraintes de l'exploitation concernée susceptibles d'influencer le recours aux traitements ou le choix des produits, et reposer sur un diagnostic des contraintes de l'exploitation réalisé à intervalles réguliers. Il devra comporter des préconisations sur les méthodes alternatives disponibles et les produits utilisables, et proposer des actions standardisées ouvrant droit à CEPP. Lorsqu'ils font partie des préconisations, les produits présentant des niveaux de risque plus importants pour la santé ou l'environnement devraient être mis en évidence, ainsi que les mesures pour limiter ces risques.

Le conseil annuel individualisé sera une condition posée à l'achat de produits phytopharmaceutiques à usage professionnel (des dérogations pour les produits de biocontrôle, et à faible risque seront cependant prévues). Il devra être délivré par un organisme indépendant de l'activité de vente, ce qui justifie de séparer l'exercice des activités de vente et de conseil. Le choix de recourir ou non à des produits phytopharmaceutiques restera de la responsabilité de l'exploitant agricole.

 

Sera parallèlement maintenu, comme l'exige le droit de l'Union, le conseil que le distributeur délivre à l'utilisateur lors de l'achat d'un produit phytopharmaceutique en vue de donner à celui-ci la nécessaire information quant aux conditions d'emploi et aux risques associés à son utilisation.

 

S’agissant du dispositif des certificats d'économie des produits phytopharmaceutiques, l'habilitation a pour objet de renforcer la montée en charge du dispositif, en fixant un objectif intermédiaire de réalisation d'actions avant 2021, objectif qui fixera des exigences inférieures à celles qui sont fixées pour 2021, et qui imposera à tous les obligés de prendre part au dispositif dans des délais plus courts, sous peine de sanctions.

 

Par ailleurs, rendre permanent le dispositif, qui fixera des obligations définies par périodes successives, permettra d'accroître l'implication et l'engagement des différents acteurs, qu'il s'agisse des distributeurs ou des entreprises de conseil.

 

Le dispositif expérimental actuel ne prévoit aucune obligation après 2021 pour les distributeurs, et en l'absence de lisibilité quant à sa pérennisation à l'issue de l'expérimentation, il existe un fort risque de démobilisation des acteurs, alors même que l'objectif est de renforcer et accélérer la montée en puissance du dispositif.

 

Enfin, la réforme du conseil annuel individualisé décrite ci-dessus s'appuiera d'autant mieux sur le dispositif des CEPP si celui-ci est permanent.

 

Dans le cadre de cette pérennisation, le dispositif sera élargi aux Outre-mer, qui sont actuellement exclus de l'expérimentation. Des mesures d’adaptation seront prévues pour les territoires concernés.

 

3. Nécessité de légiférer

L'encadrement des activités de distribution et de conseil à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques relève de la loi (article L. 254-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime).

 

La décision de rendre incompatible les activités de distribution et de conseil à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques porte atteinte à la liberté d'entreprendre dès lors qu'il s'agit d'interdire l'exercice, pour certaines catégories d'entreprises (les distributeurs et les applicateurs), d'une activité professionnelle (le conseil annuel à la conduite des cultures et l'utilisation des produits phytopharmaceutiques).

 

Il en va de même pour les dispositions qui visent à encadrer l'activité de conseil à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques et pour celles régissant le dispositif de certificats d'économie des produits phytopharmaceutiques.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

L’analyse fine des incidences de chacune des mesures envisagées sera effectuée dans la fiche d’impact retraçant les dispositions de l’ordonnance prise dans le cadre de l’habilitation.

 

Les différents impacts – sociaux, économiques et financiers, sur les administrations, en matière d’égalité entre les femmes et les hommes, sur la jeunesse, etc. – seront développés à la lumière des contours définitifs de chacune des dispositions proposées.

5. Justification du délai d'habilitation

Le délai de six mois est nécessaire pour préparer le projet d'ordonnance et préciser le contenu du conseil annuel individualisé, les conditions dans lesquelles il pourra constituer une condition préalable à la vente, celles dans lesquelles seront distinguées les activités de vente et de conseil, les modalités de montée en charge et les aménagements à apporter au dispositif des CEPP.

 

Le principe de la séparation de la vente et du conseil, ainsi que celui consistant à renforcer la montée en charge du dispositif des certificats d'économie de produits phytopharmaceutiques et de le rendre permanent ont fait l'objet de débats dans le cadre des états généraux de l'alimentation, et ont été actés au titre des recommandations formulées par l'atelier n°11. Toutefois, les consultations des parties prenantes sur les modalités envisagées et les calendriers restent à conduire.

 

 


Mettre en cohérence les pouvoirs de police judiciaire des agents chargés des contrôles relevant de l'alimentation, de la santé publique vétérinaire et de la protection des végétaux avec ceux d'autres corps de contrôle

1. État des lieux et diagnostic

Les agents chargés des contrôles relevant de l'alimentation, de la santé publique vétérinaire et de la protection des végétaux (Programme 206 – Sécurité et qualité sanitaire des aliments) habilités par le code rural et de la pêche maritime et les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) habilités par le code de la consommation (Programme 134 – Développement des entreprises et du tourisme) exercent des missions de sécurité sanitaire de l'alimentation sous l'autorité des préfets au sein de directions départementales de la protection des populations ou de directions départementales de la cohésion sociale et de la protection des populations. Ils sont amenés à exercer des contrôles officiels dans des établissements agroalimentaires relevant de leurs compétences respectives.

 

À ce titre, l’article L. 512-60 du code de la consommation permet aux agents de la DGCCRF de procéder à des auditions libres au titre de leurs pouvoirs d’enquête. Ils disposent également du droit de ne pas décliner leur identité prévu à l'article L. 512-7, du droit de convoquer les personnes pour recueillir tout renseignement prévu à l'article L. 512-10 et du droit de faire usage d'une identité d'emprunt dans les conditions prévues à l'article L. 512-16 du même code.

 

Or, les agents mentionnés à l’article L. 205-1 du code rural et de la pêche maritime, chargés de rechercher et constater les infractions dans les domaines de l'alimentation, de la santé publique vétérinaire et de la protection des végétaux, ne disposent pas de tels pouvoirs d'enquête, ce qui crée une distorsion entre des agents qui exercent des missions régaliennes de protection de la santé publique au sein des mêmes structures.

2. Objectifs poursuivis

Cette habilitation vise à permettre la mise en cohérence des pouvoirs des agents chargés des contrôles relevant de l'alimentation, de la santé publique vétérinaire et de la protection des végétaux avec ceux d'autres corps de contrôle, en particulier les agents relevant de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).

 

S'agissant de missions de protection de la santé publique, il est important d'assurer l'effectivité de l'application des règles destinées à assurer la protection du consommateur.

 

Par ailleurs, certaines des mesures envisagées visent à moderniser les pouvoirs dont disposent les agents pour réaliser leurs contrôles. Il s’agit par exemple de faciliter le relevé de l’infraction, en permettant à l’enquêteur de se faire passer pour un consommateur.

 

Afin de procéder à cette mise en cohérence, l'habilitation permettra d'accorder aux agents mentionnés à l'article L. 205-1 du code rural et de la pêche maritime chargés des contrôles dans les domaines de l'alimentation, de la santé publique vétérinaire et de la protection des végétaux les quatre pouvoirs d'enquête suivants :

 

-          droit de procéder à des auditions libres ;

 

-          droit de ne décliner leur qualité d’inspecteur qu'au moment où ils informent la personne contrôlée de la constatation d'une infraction ou d'un manquement, lorsque la preuve ne peut être obtenue autrement : certaines inspections nécessitent pour rechercher et constater une infraction, que l'inspecteur se fasse passer pour un consommateur et ne décline sa qualité qu'une fois le constat établi. À titre d'exemple, en matière de commerce de produits illicites (produits phytosanitaires, médicaments vétérinaires, etc.), il peut être nécessaire que l'inspecteur simule une opération de commande ou d'achat pour constater l'infraction commise ;

 

-          droit de convoquer les personnes pour recueillir tout renseignement, toute justification ou tout document nécessaire à l’enquête lorsqu'elles n’ont pas pu être entendues sur le lieu de leurs activités professionnelles ;

 

-          droit de faire usage d'une identité d'emprunt pour rechercher et constater des infractions sur le réseau internet dans les conditions prévues à l’article L. 512-16 du code de la consommation. La jurisprudence considère que cette pratique n’est pas déloyale dès lors que la preuve de l’infraction ou du manquement ne peut être recueillie autrement. À titre d’illustration, en matière de commerce électronique, il est souvent nécessaire que l’enquêteur procède à une simulation de commande et qu'il la mène jusqu’à son terme pour vérifier le respect des obligations des professionnels.

 

Le fait de conférer ces pouvoirs d'enquête aux agents concernés optimisera l'efficience de la lutte contre les infractions et permettra d'éviter de solliciter les forces de l'ordre pour effectuer ces actes, mobilisateurs en temps et en ressources dans le cadre de leurs opérations de police judiciaire.

3. Nécessité de légiférer

L’article 34 de la Constitution réserve au législateur le soin de fixer les règles concernant la procédure pénale. Figurent au nombre des règles concernant la procédure pénale, la détermination des agents ou catégories d’agents habilités à constater des infractions pénales ainsi que l’étendue des pouvoirs d’enquête de ces agents.

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

L’analyse fine des incidences de chacune des mesures envisagées sera effectuée dans la fiche d’impact retraçant les dispositions de l’ordonnance prise dans le cadre de l’habilitation.

 

Les différents impacts – sociaux, économiques et financiers, sur les administrations, en matière d’égalité entre les femmes et les hommes, sur la jeunesse, etc. – seront développés à la lumière des contours définitifs de chacune des dispositions proposées.

 

 

5. Justification du délai d'habilitation

 

Le délai de six mois est nécessaire pour préparer le projet d'ordonnance dont l'entrée en vigueur doit intervenir rapidement après le vote définitif du présent projet de loi.

 

 


Obligations en matière de lutte contre le gaspillage alimentaire

1. État des lieux et diagnostic

Chaque année en France, près de 10 millions de tonnes de nourriture sont perdues tout au long de la chaîne alimentaire, soit près d’un cinquième de la production totale d’aliments. Rapportés au nombre d’habitants, ces pertes et gaspillages représentent 150 kg par personne et par an.

 

Outre la perte de nourriture et l’impact économique négatif pour les producteurs et les ménages, le gaspillage alimentaire entraîne une consommation inutile de matières premières et d’énergie, devenue incompatible avec les objectifs de développement durable, fixés tant au niveau local qu’à l’échelle internationale.

 

Ce sujet étant désormais au cœur des préoccupations alimentaires et de développement durable, les pouvoirs publics ont pris récemment une série de mesures pour lutter contre le gaspillage alimentaire. Ainsi, la lutte contre le gaspillage alimentaire est devenue l’une des quatre priorités du Programme national pour l’alimentation (PNA) et l’un des treize axes stratégiques du Programme national de prévention des déchets (PNPD) 2014-2020. Par ailleurs, la problématique du gaspillage alimentaire a été prise en compte au niveau législatif par la loi n° 2016-138 du 11 février 2016 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire.

 

La lutte contre le gaspillage alimentaire est par ailleurs en lien avec la précarité alimentaire qui affecte une partie importante de la population française. Selon l'étude de l'ANSES intitulée « INCA 3, 2014-2015 » qui porte sur les comportements alimentaires, 12% des familles de l’échantillon « enfants » se déclarent en situation d’insécurité alimentaire, c'est-à-dire qu'elles n'ont pas assez d’argent pour acheter de la nourriture et préparer des repas équilibrés. Par ailleurs, d'après l'étude de l'INSEE « Pauvreté en conditions de vie de 2004 à 2014 », publiée le 19 janvier 2017, 9,3% des ménages les plus modestes déclaraient ne pas avoir pris de repas complet par manque d’argent lors d’une journée entière au cours des 2 dernières semaines en 2014 (contre 5,8%  en 2006). Au total, en France, il y a 4,8 millions d'inscriptions à l'aide alimentaire, dont un tiers des bénéficiaires ont moins de 15 ans.

2. Objectifs poursuivis

L'atelier n° 10 des états généraux de l'alimentation, présidé par M. Guillaume Garot, député de la Mayenne et président du Conseil national de l'alimentation, a acté la nécessité de poursuivre et de renforcer les efforts de lutte contre le gaspillage alimentaire. Pour ce faire, les secteurs de l'agroalimentaire et de la restauration collective sont apparus comme des acteurs essentiels à mobiliser à travers deux mesures à caractère législatif.

 

Au plan social, cette mesure devrait permettre d'augmenter et de diversifier les volumes de denrées données aux associations d’aide alimentaire.

 

- La première disposition vise à étendre à l'ensemble de la restauration collective l'obligation de mettre en place une démarche de lutte contre le gaspillage alimentaire, prévue à l'article L. 541-15-3 du code de l'environnement, et à créer une obligation de diagnostic préalable à cette démarche. Cette obligation ne concernera pas uniquement la restauration publique comme le prévoit actuellement cet article, mais également la restauration collective privée, de manière à couvrir tous les établissements du secteur.

 

Il existe d'ores et déjà, pour la réalisation des diagnostics, des méthodologies et des outils en accès libre, proposés notamment par l'ADEME. Pour la réalisation d'un diagnostic interne, le surcoût estimé correspondrait à la mobilisation d'une personne durant environ trois jours, correspondant au temps consacré à la pesée avant et après repas pendant trois jours afin de mesurer le gaspillage sur le site.

 

Ce diagnostic pourra également être réalisé en recourant à un prestataire extérieur, ce qui induira, dans cette hypothèse, au-delà des dépenses du diagnostic proprement dit, celles relatives à la mise en place d'un plan d'action. Une prestation de consultance est évaluée à près de 10 000 €, correspondant à 10 à 15 jours pour la réalisation du diagnostic et l'accompagnement à la mise en place du plan d’action.

 

Les bénéfices attendus de la mesure sont cependant potentiellement importants. Une étude réalisée en région Rhône-Alpes par les cabinets Verdicité et Climatmundi pour l’ADEME, de février 2015 à mai 2016, a ainsi mis en lumière les économies financières pouvant être obtenues par la mise en place d'une réduction du gaspillage alimentaire dans la restauration collective. Sur les 12 établissements étudiés, le coût direct moyen des pertes et gaspillage de matières premières (aliments achetés) s’élève à 0,27 €/ repas. Si on y ajoute les coûts indirects (notamment le temps passé par les personnels de cuisine, l’énergie consommée pour préparer les plats, facture de déchets…) le montant s’élève à 0,68 €/ repas. À titre d'exemples :

 - pour un hôpital qui sert 1 700 repas par jour, tous les jours de l’année, la facture des seuls coûts directs se monte à près de 193 000 € par an ;

  - pour un collège qui sert 300 repas pendant 145 jours, la facture se monte à près de 13 000 € par an.

 

- La seconde disposition a trait à l'obligation de proposer aux associations caritatives habilitées la signature d'une convention de don alimentaire, qui est prévue par la loi n° 2016-138 du 11 février 2016 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire, mais qui ne concerne actuellement que les distributeurs dont la surface de vente est supérieure à 400 m². Il est envisagé d'étendre le champ d'application de cette obligation en soumettant également certains opérateurs du secteur de l'agroalimentaire et de la restauration collective à cette obligation, en fonction de seuils qui seront fixés par voie réglementaire.

 

Cette mesure n'aura aucun surcoût pour les opérateurs concernés, sauf s'ils font appel à des intermédiaires du don, dont les prestations peuvent être financées par les allègements fiscaux prévus en application de l’article 238 bis du code général des impôts.

 

Un impact financier est possible pour les associations bénéficiaires, si celles-ci doivent investir dans des équipements spécifiques pour recevoir les excédents alimentaires de la restauration collective et en assurer la distribution. En effet, le respect des règles de conservation et de distribution des excédents, et notamment des repas préparés en restauration collective, nécessite des équipements spécifiques, notamment en termes de respect des températures, afin de préserver la sécurité sanitaire des produits (cellules de refroidissement rapide, bain marie) Ce coût est cependant difficile à estimer à ce stade car variable selon les configurations locales. Les conditions sanitaires à respecter pour encadrer ce don alimentaire seront précisées par décret.

 

Il importe de relever que des cuisines centrales ont d'ores et déjà mis en place avec succès des conventions avec des associations habilitées afin de leur confier leurs excédents de production. L'objectif des dispositions envisagées est de généraliser ces initiatives.

 

- La troisième disposition vise à soumettre les opérateurs mentionnés au point 2.2. à l'obligation de rendre publics leurs engagements en faveur de la lutte contre le gaspillage alimentaire. Un tel dispositif est déjà prévu pour les très grandes entreprises en application de l'article L. 225-102-1 du code du commerce dans le cadre de leur obligation de communication d'informations extra-financières.

3. Nécessité de légiférer et options

L'encadrement des mesures de lutte contre le gaspillage alimentaire relève de la loi (article L. 541-15-3 et suivants du code de l'environnement).

 

Le fait d'étendre les obligations en matière de lutte contre le gaspillage alimentaire aux opérateurs de la restauration collective publique et privée, qui s'inscrit dans le cadre de ces dispositions, porte atteinte à la liberté d'entreprendre dès lorsqu'il s'agit d'ajouter la réalisation d'un diagnostic préalable à la démarche de lutte contre le gaspillage alimentaire.

 

Il en va de même pour les dispositions qui visent à soumettre certains opérateurs à une obligation de proposer de conclure une convention à une ou plusieurs associations mentionnées au III de l'article L. 541-15-5 du même code précisant les modalités selon lesquelles les denrées alimentaires leur sont cédées à titre gratuit.

 

4. Analyse des impacts des dispositions envisagées

L’analyse fine des incidences de chacune des mesures envisagées sera effectuée dans la fiche d’impact retraçant les dispositions de l’ordonnance prise dans le cadre de l’habilitation.

 

Les différents impacts – sociaux, économiques et financiers, sur les administrations, en matière d’égalité entre les femmes et les hommes, sur la jeunesse, etc. – seront développés à la lumière des contours définitifs de chacune des dispositions proposées.

 

 

5. Justification du délai d’habilitation

 

L'extension des mesures de lutte contre le gaspillage alimentaire au secteur de la restauration collective a fait l'objet de débats dans le cadre des états généraux de l'alimentation, qui ont acté ce principe au titre des recommandations formulées par l'atelier n°10. Toutefois, les consultations des parties prenantes sur les modalités envisagées ainsi que sur le calendrier restent à conduire.

 

Le délai de douze mois est nécessaire pour préparer le projet d'ordonnance et préciser les modalités de mise en œuvre du diagnostic comme préalable à la démarche de lutte contre le gaspillage alimentaire, pour déterminer après consultation des parties prenantes les seuils à partir desquels les établissements sont soumis à l'obligation de don alimentaire.

 

 

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[1] Sources : site internet Agreste, Insee.

[2] Source : Panorama des industries agroalimentaires 2016 du Ministère chargé de l’Agriculture.

[3] Lien : https://ec.europa.eu/agriculture/agri-markets-task-force_en

[4] Avis du 12-05-2017 sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union et modifiant le règlement (CE) nº 2012/2002, les règlements (UE) nº 1296/2013, (UE) nº 1301/2013, (UE) nº 1303/2013, (UE) nº 1304/2013, (UE) nº 1305/2013, (UE) nº 1306/2013, (UE) nº 1307/2013, (UE) nº 1308/2013, (UE) nº 1309/2013, (UE) nº 1316/2013, (UE) nº 223/2014, (UE) nº 283/2014, (UE) nº 652/2014 du Parlement européen et du Conseil et la décision nº 541/2014/UE du Parlement européen et du Conseil. Référence : GRI_AD(2017)599808 PE 599.808v02-00. Albert DESS

[5] Cf. article L. 631-28 du code rural et de la pêche maritime

[6] L'article 14 de la directive prévoit que « 1. Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour promouvoir une lutte contre les ennemis des cultures à faible apport en pesticides (...) en privilégiant chaque fois que possible les méthodes non chimiques de sorte que les utilisateurs professionnels de pesticides se reportent sur les pratiques et produits présentant le risque le plus faible pour la santé humaine et l’environnement (…). La lutte contre les ennemis des cultures à faible apport en pesticides comprend la lutte intégrée contre les ennemis des cultures ainsi que l’agriculture biologique (...) / 2. Les États membres établissent ou soutiennent la création des conditions nécessaires à la mise en œuvre de la lutte intégrée contre les ennemis des cultures. Ils s’assurent en particulier que les utilisateurs professionnels aient à leur disposition l’information et les outils de surveillance des ennemis des cultures et de prise de décision, ainsi que des services de conseil sur la lutte intégrée contre les ennemis des cultures. »