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N° 1156

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 juillet 2018.

PROPOSITION DE LOI

visant à réduire la franchise assurantielle en cas
de catastrophe naturelle,

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire,
à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Valérie LACROUTE, JeanFrançois PARIGI, François CORNUTGENTILLE, Jérôme NURY, Laurence TRASTOURISNART, Franck MARLIN, Bérengère POLETTI, Éric STRAUMANN, Maxime MINOT, Julien DIVE, JeanMarie SERMIER, Fabrice BRUN, Annie GENEVARD, Vincent ROLLAND, Pierre VATIN, Gilles LURTON, JeanLouis MASSON, JeanCharles TAUGOURDEAU, Thibault BAZIN, Valérie BEAUVAIS, Véronique LOUWAGIE, Patrice VERCHÈRE, Marc LE FUR, JeanPierre DOOR, Jacques CATTIN, David LORION, Valérie BAZINMALGRAS, Fabien DI FILIPPO, Éric PAUGET, Émilie BONNIVARD, Daniel FASQUELLE, Bernard PERRUT, Ian BOUCARD, Arnaud VIALA, Michel HERBILLON, JeanLuc REITZER, Nicolas FORISSIER, Guillaume PELTIER,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les inondations de la Marne, de la Seine, du Loing, de l’Yonne et de nombreuses rivières en mai et juin 2016 ont touché de plein fouet 1 000 communes réparties sur 16 départements, endommagées ou parfois dévastées 1 350 commerces et entreprises.

Cette catastrophe naturelle a causé 1,3 Md d’€ de dégâts indemnisés (en tenant compte des récoltes agricoles). Il s’agit des inondations les plus chères depuis 1982, date de création du régime des catastrophes naturelles. 

À titre d’exemple, en juin 2016, la ville de Nemours dans le sud Seine‑et‑Marne, a connu une crue exceptionnelle du Loing (un affluent de la Seine) qui a dépassé de plus de 50 centimètres la crue historique de 1910. Les experts en hydrologie ont qualifié cette crue de semi‑millénale dans le rapport de l’Inspection générale des services remis à l’ancienne ministre Ségolène Royal en décembre 2016.

Ces inondations ont fait l’objet de déclaration de catastrophe naturelle par l’État suite aux demandes de classement formulées par les Mairies et relayées par les Préfectures.

Le classement en catastrophe naturelle

Le régime légal des catastrophes naturelles est encadré par la loi du 13 juillet 1982. Aux termes de la loi, sont considérés comme effets des catastrophes naturelles « les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l’intensité anormale d’un agent naturel lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n’ont pu empêcher leur survenance ou n’ont pu être prises ». (Article L. 125‑1 alinéa 3 du code des assurances).

En pratique, les événements les plus souvent constatés sont les inondations, les coulées de boue, la sécheresse et, dans une moindre mesure, les avalanches, les tremblements de terre, l’action mécanique des vagues, les glissements et les affaissements de terrain.

La garantie catastrophe naturelle est automatiquement prévue dans les contrats d’assurance de dommages comportant une garantie incendie, dégât des eaux… sauf dans certains cas expressément prévus par la loi. Par exemple, si une personne a souscrit une assurance multirisque habitation et multirisque commerces ou  entreprises, elle est automatiquement couverte contre les dégâts dus aux catastrophes naturelles.

Cependant, la loi prévoit que l’assureur n’a pas l’obligation d’accorder la garantie catastrophes naturelles dans les contrats d’assurance de dommages pour les biens ou les activités qui ont été implantés dans des zones inconstructibles, postérieurement à la publication d’un  Plan de prévention des risques naturels (PPRN).

Pour les constructions déjà existantes au moment de la publication du PPRN, il doit être procédé à une mise en conformité avec les prescriptions du PPRN dans un délai de 5 ans. Ce délai peut être plus court en cas d’urgence. 

La franchise pour les commerçants et les entreprises

Dans le cas d’un dommage subit lors d’un classement de la zone en catastrophe naturelle, une franchise légale reste toujours à la charge de l’assuré. Pour les biens à usage professionnel, le montant de la franchise est égal à 10 % des dommages matériels directs avec un minimum de 1 140 euros, minimum porté à 3 050 euros pour les dommages imputables à la sécheresse et/ou à la réhydratation des sols.

En fixant ce taux à 10 % le législateur pensait avoir trouvé un point d’équilibre entre la prise en charge de l’assureur et des assurés. Plusieurs exemples encore très récents après les crues de janvier 2018 en région parisienne, ont montré que ce taux pouvait se révéler très contraignant pour les assurés.

Une franchise de 10 % ajoutée à la déduction pour vétusté qui atteint parfois 60 à 80 % des biens, sans oublier le faible remboursement des pertes d’exploitation, conduit des entreprises, des commerçants et des artisans à subir une double, voire une triple peine. Il en est de même pour les collectivités qui s’estiment moins bien couvertes par le régime « cat’nat’ » que par leur assurance dommages habituelle. 

Un reste à charge trop élevé

Fin mai, début juin 2016, la ville de Nemours, a connu des inondations exceptionnelles qualifiées de semi‑millénales par les experts en hydrologie dans le rapport remis par l’Inspection générale de l’administration (IGA) et le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD).

Le centre‑ville historique situé aux bords du Loing et de son Canal a été particulièrement touché, entrainant l’évacuation de 2 000 personnes.

La plupart des commerces et des entreprises situés en cœur de ville ont été envahi par plus d’1m50 d’eau, de déchets divers et d’hydrocarbures. Leur rénovation a parfois coûté plusieurs dizaines de milliers d’euros, laissant un reste à charge très important. Il en a été de même pour les collectivités locales soumises à un régime d’assurance identique et, qui malgré des aides de l’État, de la Région et du Département, ont dû faire face à des dépenses très importantes pour la rénovation notamment des voiries.

À titre d’exemple, une Boulangerie du centre‑ville de Nemours a subi 300 000 euros de dégâts (fours, machines à pétrir, boutique, stockage, pièces réfrigérées), ce qui lui a valu une franchise de 30 000 euros ! Sans l’aide de la Chambre de commerce et d’industrie et d’une organisation caritative comme le Rotary, ce commerce ne se serait pas relevé.

La répétition d’un tel évènement en catastrophe naturelle conduirait très probablement à des fermetures définitives d’entreprises ou commerces.

Il est à noter que cette franchise de 10 % lorsqu’une commune est déclarée en catastrophe naturelle, n’est pas appliquée de la sorte dans une situation classique comme lors d’un dégât des eaux.

Enfin, l’opération « Action Cœur de Ville » lancée récemment par le Gouvernement et à laquelle Nemours a été retenue parmi 222 villes petites et moyennes, sera une opportunité de développer l’attractivité en centre‑ville et de favoriser un développement économique et commercial équilibré.

Pour une meilleure prise en charge des dégâts

Dans l’intérêt des artisans et entreprises, mais aussi dans l’intérêt des villes qui ne peuvent se permettre de voir des commerces fermer, particulièrement après un épisode de catastrophe naturelle, cette proposition de loi a pour objet d’abaisser la franchise en cas de catastrophe naturelle de 10 % à 5 % afin d’assurer une prise en charge maximale des dégâts.

Le but est d’éviter des nuits d’angoisse pour les propriétaires qui souhaitent rouvrir leur commerce aussi vite que possible pour oublier le traumatisme de la catastrophe et reprendre une vie normale.

Tel est, Mesdames, Messieurs, l’objet de la présente proposition de loi que nous vous demandons de bien vouloir adopter.

 


proposition de loi

Article 1er

Après le troisième alinéa de l’article L. 125‑2 du code des assurances, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

Pour les biens à usage professionnel, le montant de la franchise est égal à 5 % du montant des dommages matériels directs non assurables subis par l’assuré, par établissement et par événement, sans pouvoir être inférieur à un minimum de 1 000 euros ; sauf en ce qui concerne les dommages imputables aux mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et/ou à la réhydratation brutale des sols, pour lesquels ce minimum est fixé à 2 500 euros. Toutefois, est appliquée la franchise prévue par le contrat, si celle‑ci est supérieure à ces montants.

Article 2

La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.