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N° 1317

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 octobre 2018.

PROPOSITION DE LOI

visant à lutter contre les délocalisations en annulant les réductions
de charges octroyées à une entreprise en cas de transfert volontaire
de son activité à létranger,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Guillaume PELTIER, JeanPierre DOOR, Didier QUENTIN, Fabrice BRUN, Bernard PERRUT, Patrick HETZEL, Brigitte KUSTER, JeanLuc REITZER, Philippe GOSSELIN, Valérie BAZINMALGRAS, Michel HERBILLON, Alain RAMADIER, Antoine SAVIGNAT, Thibault BAZIN, Emmanuelle ANTHOINE, Laurence TRASTOURISNART, Fabien DI FILIPPO, Michel VIALAY, JeanClaude BOUCHET, Valérie BEAUVAIS, Rémi DELATTE, Arnaud VIALA, Nicolas FORISSIER, Daniel FASQUELLE, Vincent DESCOEUR,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis plusieurs décennies, la France souffre du phénomène des délocalisations volontaires de la part d’entreprises peu scrupuleuses qui, attirées par l’appât du gain, préfèrent installer une partie ou la totalité de leurs activités à l’étranger, y bénéficier de charges, notamment salariales, moins élevées, et ainsi pouvoir réimporter en France leurs produits ou leurs services à moindre coût.

Souvent, ces entreprises ont bénéficié, pendant plusieurs années, des différentes aides publiques ou des réductions de charges et de cotisations mises en place par l’État pour améliorer leur compétitivité.

Cette proposition de loi ne vise pas à remettre en cause la légitimité ou l’efficacité des aides publiques ou des réductions de charges tant celles‑ci, lorsqu’elles sont lisibles et encadrées, peuvent permettre d’améliorer la compétitivité des entreprises et participer à la création de richesse sur notre territoire.

Cependant, il apparaît logique que celles‑ci soient conditionnées à l’engagement de produire en France et de contribuer ainsi au développement économique du territoire d’implantation. C’est une question d’éthique vis‑à‑vis de nos compatriotes qui financent ces aides par leurs impôts et cotisations.

Ces dernières années, plusieurs exemples de délocalisation ont fait la une de l’actualité et démontré, si cela était nécessaire, les dérives du système actuel.

En 2017, l’entreprise Caterpillar a ainsi fermé son usine de Monchy‑le‑Preux dans le Pas‑de‑Calais pour délocaliser sa production en Irlande du Nord et au Brésil.

Le préfet de région avait ainsi demandé, et obtenu, le remboursement des aides publiques reçues par l’entreprise au titre de la prime à l’aménagement du territoire (110 000 euros) et du fonds pour les restructurations de la défense (15 000 euros) au regard des investissements et promesses d’embauche non tenues.

Cette réussite cache de très nombreux autres cas où le remboursement des aides reçues nest pas possible car non prévu par la loi.

Ainsi, en 2018, l’entreprise Carrier, filiale du groupe américain UTC, a décidé de fermer son usine de RomorantinLanthenay pour délocaliser ses activités en Europe de lEst, abandonnant 88 salariés, alors même que l’entreprise avait réalisé un bénéfice net dun million deuros en France en 2017, de 5 milliards deuros à léchelle internationale et avait perçu 438 000 euros au titre du crédit impôt compétitivité emploi (CICE) entre 2014 et 2016, sans même compter l’année 2017.

L’article 9 de la loi n° 2017‑1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018 prévoyant l’arrêt du CICE à partir du 1er janvier 2019 et son remplacement par un allègement pérenne de 6 % des cotisations sociales des entreprises pour les rémunérations n’excédant pas 2,5 fois le SMIC, ces baisses de charges deviendront ainsi de fait la première forme de soutien de l’État en direction des entreprises.

L’article premier de cette proposition de loi vise donc à annuler, sur les trois dernières années, la réduction générale des cotisations patronales sur les bas salaires dont a profité une entreprise lorsque celle‑ci délocalise volontairement son activité à l’étranger, entrainant une baisse du nombre d’emplois en France.

L’article 2 prévoit la même disposition pour l’allègement de 6 points des taux de cotisations pour les salariés dont les rémunérations ou gains n’excèdent pas 2,5 fois le salaire minimum de croissance, mis en place à partir du 1er janvier 2019 pour remplacer le CICE.

L’article 3 prévoit les dates d’applicabilité de la présente loi.


proposition de loi

Article premier

Le VIII de l’article L. 241‑13 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :

« VIII. – En cas de délocalisation ou de transfert volontaire à l’étranger d’une partie ou de la totalité des activités d’une entreprise bénéficiaire du dispositif prévu par le présent article, s’accompagnant d’une diminution du nombre d’emplois en France, l’employeur verse aux organismes de recouvrement, et aux institutions mentionnés au VII, l’équivalent des réductions et exonérations de cotisations et contributions sur les salaires des employés concernés par ce transfert, obtenues durant les trois dernières années. »

« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent VII. »

Article 2

L’article L. 241‑2‑1 du code la sécurité sociale est complété par un II ainsi rédigé :

« II. – En cas de délocalisation ou de transfert volontaire à l’étranger d’une partie ou de la totalité des activités d’une entreprise bénéficiaire du dispositif prévu par le présent article, s’accompagnant d’une diminution du nombre d’emplois en France, l’employeur verse aux organismes de recouvrement, et aux institutions mentionnés au VII de l’article L. 241‑13, l’équivalent des réductions et exonérations de cotisations et contributions sur les salaires des employés concernés par ce transfert, obtenues durant les trois dernières années. »

« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent II »

Article 3

Les dispositions de l’article premier sont applicables aux cotisations et contributions dues à compter de la date de promulgation de la présente loi.

Les dispositions de l’article 2 sont applicables aux cotisations et contributions dues pour les périodes courant à compter du 1er janvier 2019.