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N° 1434

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 novembre 2018.

PROPOSITION DE LOI

portant création de l’entraide familiale bénévole
pour les récoltes agricoles,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Bérengère POLETTI,

députée.

 

 

 

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de loi a pour objet de permettre aux exploitants viticoles et agricoles de récolter avec l’aide de proches bénévoles en recourant aux formalités relatives à l’embauche de travailleurs salariés simplifiées et donnant la possibilité d’un travail non‑rémunéré.

Il s’agit des cas où la famille se retrouve pour partager un moment de convivialité à l’occasion des vendanges ou des récoltes agricoles. L’aide apportée n’est ni durable ou régulière, ni accomplie dans le cadre de contraintes qui caractériseraient un état de subordination. Cette aide ne se substitue pas à un poste de travail nécessaire au fonctionnement normal d’une entreprise ou d’une activité professionnelle.

En effet, l’état du droit applicable interdit le recours à des travailleurs non rémunérés à toutes les structures économiques à vocation lucrative, qu’elles soient individuelles ou sous forme de sociétés.

Actuellement, en cas de contrôle d’une exploitation agricole par des agents de l’inspection du travail, de la MSA ou de la gendarmerie, l’employeur ayant recours à des proches bénévoles pour vendanger sans déclaration préalable encourt le risque de se voir condamné à trois ans de prison et 45 000 euros d’amende pour travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié (articles L. 8221‑5 et L. 8224‑1 du code du travail).

En outre, les possibilités actuellement prévues par la loi pour effectuer des travaux agricoles en recourant à des tiers hors d’une relation salariale sont limitées aux cas de figure suivants :

– l’aide non intéressée sur une exploitation agricole dans des cas d’urgence, par exemple pour aider l’exploitant en cas d’accident mécanique rendant indisponible un engin agricole ou pour récupérer des animaux qui se seraient échappés de leur enclos ;

– l’entraide entre agriculteurs par le biais d’échanges de services entre personnes ayant le statut d’agriculteur. Cette entraide implique gratuité, réciprocité et équivalence des échanges de services (article L. 325‑2 du code rural et de la pêche maritime) ;

– le statut d’aide familial permet, pendant une durée maximale de cinq années et après déclaration à la MSA, à un ascendant, un descendant, un frère, une sœur ou un allié au même degré du chef d’exploitation ou d’entreprise ou de son conjoint, âgé de plus de seize ans et vivant sur l’exploitation, de participer à sa mise en valeur sans y avoir la qualité de salarié et être rémunéré. Les dispositions relatives à l’assurance obligatoire maladie, invalidité et maternité des personnes non salariées des professions agricoles leur sont applicables.

Hors du statut d’aide familial, l’entraide familiale fait l’objet d’une simple tolérance, sans encadrement législatif et doit revêtir un caractère exceptionnel, ce qui exclut des tâches régulières telles que participer à une récolte.

C’est la raison pour laquelle la présente proposition de loi autorise la mise en place d’une entraide familiale bénévole pour les récoltes agricoles.

La solution la plus adaptée consiste à inscrire dans la loi, sur le modèle de l’entraide entre agriculteurs, la faculté de recourir à l’entraide familiale bénévole pour procéder aux vendanges ou récoltes maraichères sans versement de rémunération, cotisations et autres impôts (taxe sur valeur ajoutée, contribution économique territoriale, etc.) moyennant une assurance en cas d’accident.

La taille maximale des exploitations concernées serait déterminée par arrêté du représentant de l’État dans le département. Cela permet d’ajuster le plafond effectif aux spécificités des régions viticoles et agricoles.

Contrairement à l’entraide entre agriculteurs, où cette responsabilité pèse sur le prestataire qui offre son aide, l’exploitant bénéficiant de l’aide familiale bénévole serait responsable des dommages survenus en cas d’accident du travail. Il pourrait donc avoir recours à une assurance.

Pour prévenir de tout abus, une déclaration préalable à l’autorité responsable devra être faite par l’agriculteur dans un délai d’un mois.

Ce dispositif n’étant pas sans conséquence sur les cotisations à percevoir par les organismes de sécurité sociale, le gage correspondant est prévu à l’article 2.


proposition de loi

Article 1er

Le chapitre V du titre II du livre III du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° L’intitulé est complété par les mots : « et l’entraide familiale bénévole » ;

2° Après l’article L. 325‑1, il est inséré un article L. 325‑1‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 32511. – L’entraide familiale bénévole se définit par la participation volontaire à des activités agricoles d’ascendant, de descendant ou de collatéraux de l’exploitant, ainsi que de leurs conjoints. Elle n’emporte aucun engagement vis‑à‑vis de l’exploitant des personnes qui prêtent leur concours.

« Elle est occasionnelle et temporaire.

« Elle constitue un contrat à titre gratuit, même lorsque l’exploitant rembourse à ces personnes tout ou partie des frais engagés par elles.

« Dans une exploitation, l’entraide familiale bénévole ne peut être réalisée que dans les exploitations dont la superficie totale maximale est déterminée par arrêté du représentant de l’État dans le département, et qui ont fait l’objet d’une déclaration préalable auprès de l’autorité administrative compétente.

« Préalablement à l’utilisation de l’entraide familiale bénévole, l’exploitant adresse à l’autorité responsable une déclaration comprenant le nom, le prénom, le lien de filiation et la durée du concours des personnes concernées. Cette déclaration est faite par lettre recommandée avec accusé de réception. L’absence de réponse dans un délai d’un mois vaut acceptation de l’application des dispositions du présent article.

« Par dérogation à l’article L. 325‑3, l’exploitant est responsable des accidents du travail survenus à toute personne lui apportant une entraide bénévole ainsi que des dommages occasionnés par elle. Il doit en conséquence contracter l’assurance prévue au dernier alinéa de l’article L. 325‑3. »

Article 2

Les pertes de recettes susceptibles de résulter de la présente loi pour les collectivités territoriales, l’État et les organismes de sécurité sociale sont compensées, respectivement et à due concurrence, par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et la création des taxes additionnelles aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.