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N° 1644

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 février 2019.

PROPOSITION DE LOI

visant à revenir au régime initial de lexit tax,

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut
de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Fabrice BRUN, Émilie BONNIVARD, JeanClaude BOUCHET, MarieChristine DALLOZ, Vincent DESCOEUR, Fabien DI FILIPPO, Daniel FASQUELLE, Michel HERBILLON, Valérie LACROUTE, Marc LE FUR, Véronique LOUWAGIE, Éric PAUGET, Guillaume PELTIER, Bernard PERRUT, Raphaël SCHELLENBERGER,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis le début du quinquennat, le Gouvernement et la majorité ont pris de nombreuses mesures favorables aux contribuables les plus aisés : suppression de l’ISF, instauration de la flat tax ‑ qui bénéficie aux 5 % des Français les plus riches. Il résulte de ces deux mesures qu’en moyenne depuis 2017, les 5 034 Français les plus riches ont chacun économisé 253 800 euros.

Selon le dernier rapport du Laboratoire sur les inégalités mondiales au terme des réformes principalement de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et de l’impôt sur les revenus mobiliers, les 0,0 1% les plus riches ont vu leurs contributions totales passer de 52 % en 2016 à 46,6 % en 2018.

L’exit tax consiste à taxer un contribuable domicilié fiscalement en France et détenant des actions lorsqu’il transfère son domicile fiscal hors de France. Il est imposé sur la plus‑value latente qui résulterait de la vente de ses actions. La plus‑value latente est constituée par la différence entre le coût d’acquisition d’un bien et sa valeur réelle. L’idée est ainsi de lutter contre les personnes transférant leur domicile hors de France simplement pour éviter l’imposition sur la plus‑value résultant de la cession de leurs actions.

Voulant lutter contre cette forme d’évasion fiscale, le Président de la République Nicolas Sarkozy avait décidé de taxer ces plus‑values dites latentes.

Il en résulte que le contribuable qui partant à l’étranger paye un impôt sur cette plus‑value latente au moment de son départ même s’il ne vend effectivement pas ses actions. Il ne sera remboursé ou définitivement non‑imposé que s’il conserve ses actions pendant 15 ans.

Le contribuable concerné doit donc procéder annuellement à une déclaration au fisc français pendant 15 ans pour montrer que, même s’il n’est plus résident fiscal français, il n’a pas quitté la France à des seules fins fiscales et il est encore bien propriétaire de ses actions.

Au bout de 15 ans, ce contribuable, s’il remplit les conditions légales de conservation de ses actions, récupère l’imposition qu’il a éventuellement payée à son départ ou est définitivement exonéré d’imposition s’il faisait l’objet d’un sursis de paiement.

Ministre de l’économie, Emmanuel Macron affirmait pour sa part dès 2016, que l’exit tax était selon lui inadaptée au monde dans lequel nous vivons : il affirmait que cela « conduit maintenant les jeunes à créer leur entreprise à l’étranger dès l’origine ».

Dans un entretien au magazine Forbes, début mai 2018, le Président de la République annonçait qu’il comptait « mettre un terme à l’exit tax » qui selon lui envoyait un « message négatif aux entrepreneurs, plus qu’aux investisseurs ».

Le ministre de l’économie et des finances allait dans le même sens puisqu’il estimait, en mai 2018, que la suppression de l’exit tax s’imposait, puisque selon lui cet impôt ne rapportait pas grande chose.

Devant les réactions hostiles à cette proposition, l’exécutif a dans le cadre de la loi de finances présenté un nouveau « dispositif anti‑abus ».

La loi de finances pour 2019 réduit ainsi le délai de détention des actions après le départ, le faisant passer de 15 ans à 2 ans. Ainsi, un contribuable transférant son domicile fiscal hors de France doit conserver ses actions pendant deux ans (et non plus 15) pour échapper à l’exit tax.

Cette mesure n’est en réalité qu’un faux semblant, car réduire ce délai à deux ans revient tout simplement à supprimer la taxe.

C’est pourquoi, la présente proposition de loi vise à abroger l’article 112 de la loi n° 2018‑1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 et à revenir au régime initial de l’exit tax.


proposition de loi

Article 1er

L’article 167 bis du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le IV est ainsi rédigé :

« IV. – Lorsque le contribuable transfère son domicile fiscal hors de France dans un État membre de l’Union européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ainsi qu’une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement ayant une portée similaire à celle prévue par la directive 2010/24/UE du Conseil, du 16 mars 2010, concernant l’assistance mutuelle en matière de recouvrement des créances relatives aux taxes, impôts, droits et autres mesures, il est sursis au paiement de l’impôt afférent aux plus‑values et créances constatées dans les conditions prévues au I du présent article et aux plus‑values imposables en application du II. »

2° Le V est ainsi rédigé :

« V. – 1. Sur demande expresse du contribuable, il peut également être sursis au paiement de l’impôt afférent aux plus‑values et créances constatées dans les conditions prévues au I et aux plus‑values imposables en application du II lorsque le contribuable :

« a) Transfère son domicile fiscal hors de France dans un État autre que ceux visés au IV ;

« b) Après avoir transféré son domicile fiscal hors de France dans un État membre de l’Union européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ainsi qu’une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement ayant une portée similaire à celle prévue par la directive 2010/24/UE du Conseil, du 16 mars 2010, précitée, le transfère à nouveau dans un État autre que ceux mentionnés précédemment.

« Dans les cas mentionnés aux a et b du présent V, le sursis de paiement est subordonné à la condition que le contribuable déclare le montant des plus‑values et créances constatées dans les conditions du I ou imposables en application du II, désigne un représentant établi en France autorisé à recevoir les communications relatives à l’assiette, au recouvrement et au contentieux de l’impôt et constitue auprès du comptable public compétent, préalablement à son départ, des garanties propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor.

« Le montant des garanties que le contribuable est tenu de constituer préalablement à son transfert de domicile fiscal hors de France pour bénéficier du sursis de paiement prévu au présent 1 est égal à 12,8 % du montant total des plus‑values et créances mentionnées aux I et II, retenues pour leur montant brut sans qu’il soit fait application, le cas échéant, des abattements mentionnés aux 2 bis et 3 du I. Toutefois, le montant des garanties afférentes à l’impôt sur les plus‑values mentionnées au 1 bis du II bis est déterminé par application du taux mentionné au même 1 bis à ces mêmes plus‑values.

« Dans le mois suivant la réception de l’avis d’imposition émis au titre de l’impôt afférent aux plus‑values et créances mentionnées aux I et II, le contribuable constitue, le cas échéant, un complément de garanties pour assurer le recouvrement de l’impôt calculé dans les conditions du II bis à hauteur de la différence entre ce montant d’impôt et le montant de la garantie constituée préalablement au transfert du domicile fiscal hors de France.

« Lorsque le montant d’impôt calculé dans les conditions du II bis est inférieur au montant des garanties constituées préalablement au transfert de domicile fiscal hors de France, le contribuable peut demander au comptable chargé du recouvrement la levée de ces garanties à hauteur de la différence entre le montant de ces garanties et le montant d’impôt précité.

« 2. Lorsque le contribuable justifie que son transfert de domicile fiscal dans un État ou territoire qui n’est pas partie à l’accord sur l’Espace économique européen, mais qui a conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ainsi qu’une convention d’assistance mutuelle en matière de recouvrement ayant une portée similaire à celle prévue par la directive 2010/24/UE du Conseil, du 16 mars 2010, précitée, obéit à des raisons professionnelles, aucune garantie n’est exigée pour l’application du sursis de paiement prévu au 1 du présent V. »

3° Le premier alinéa du 2 du VII est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « quinze » ;

b) La seconde phrase est supprimée ;

4° Le VIII est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du 1, les mots : « l’opération d’échange ou d’apport répondant aux conditions d’application des articles 150‑0 B ou 150‑0 B ter intervenue » sont remplacés par les mots : « l’échange entrant dans le champ d’application de l’article 150‑0 B intervenu » ;

b) Au 4, les mots : « des articles 244 bis A ou » sont remplacés par les mots : « de l’article » ;

c) Au premier alinéa du 4 bis et au premier alinéa du 5, les mots : « ou territoire » sont supprimés ;

5° Le premier alinéa du 2 du IX est ainsi modifié :

a) Les mots : « au titre d’une créance mentionnée au second alinéa du 1 du I ou d’une plus‑value imposable en application du II » sont supprimés ;

b) Après la deuxième occurrence du mot : « paiement », les mots : « à ce titre » sont supprimés ;

c) Les références : « au second alinéa du 1 du I et au II » sont remplacées par les références : « aux I et II » ;

d) Le second alinéa est supprimé.

Article 2

Au f du I de l’article L. 136‑6 du code de la sécurité sociale, les mots : « , lorsque la plus‑value est imposée conformément aux dispositions de l’article 244 bis B du code général des impôts, » sont supprimés et les mots : « même code » sont remplacés par les mots : « code général des impôts ».

Article 3

Le III de l’article 112 de la loi n° 2018‑1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 est abrogé.