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N° 2157

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 juillet 2018.

PROPOSITION DE LOI

visant à permettre une réduction de limpôt sur la fortune immobilière du montant des dépenses des travaux réalisés par les petites et moyennes entreprises,

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

JeanLouis THIÉRIOT, Patrick HETZEL, Frédéric REISS, Philippe GOSSELIN, Alain RAMADIER, Thibault BAZIN, Patrice VERCHÈRE, Valérie BEAUVAIS, Arnaud VIALA, Damien ABAD, Constance LE GRIP, Bernard PERRUT, Brigitte KUSTER, Bernard BROCHAND, Michel VIALAY, Nadia RAMASSAMY, Éric CIOTTI, Laurent FURST, Éric PAUGET, Valérie BAZINMALGRAS, Stéphane VIRY, Bérengère POLETTI, Valérie LACROUTE, Josiane CORNELOUP, Charles de la VERPILLIÈRE, Éric STRAUMANN, Isabelle VALENTIN, Fabien DI FILIPPO, Gérard MENUEL, Gilles LURTON, PierreHenri DUMONT, Julien DIVE, Bernard DEFLESSELLES, Pierre VATIN, Emmanuelle ANTHOINE, David LORION,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

S’il ne fallait retenir qu’un seul enseignement du « Grand débat », ce serait sans doute celui de la question de l’acceptabilité de l’impôt. Les Français ne consentent à l’impôt que si celui‑ci leur parait juste, proportionné et pertinent.

Ainsi que nous le rappelle l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (DDHC), la participation à l’impôt doit être proportionnelle aux possibilités de contribution des citoyens. L’impôt sur la fortune immobilière, comme tout autre impôt, doit être soumis à ce principe constitutionnel. S’il est normal que les plus fortunés de nos concitoyens contribuent plus fortement aux besoins de la Nation, cet impôt ne doit pas devenir confiscatoire au risque de heurter le droit de propriété affirmé à l’article 3 de la DDHC.

Or l’impôt de solidarité, voulu par le Président de la République, assis uniquement sur la fortune immobilière, peut présenter un aspect confiscatoire dès lors que son acquittement prive les propriétaires des ressources financières nécessaires à l’entretien de leurs biens, ce qui conduit de facto à leur dépréciation. L’immobilier étant le premier choix d’investissement des Français (60 %), les cas de foyers possédant exclusivement un patrimoine immobilier et se retrouvant par conséquent dans cette situation ne sont pas anecdotiques.

Par ailleurs, la perspective d’un impôt confiscatoire ne laissant aucune marge de manœuvre financière est de nature à décourager les investissements dans l’immobilier. Il est pourtant collectivement souhaitable d’encourager l’accès des Français à la propriété. On sait en effet que les propriétaires résistent mieux que les locataires aux sinistres de la vie ; une France de propriétaires, ce sont donc autant de dépenses sociales en moins à moyen et long terme. Pourtant, seuls 58 % des Français sont aujourd’hui propriétaires de leur logement contre 70 % en moyenne dans les pays membres de l’Union européenne. Sans remettre en cause le principe d’un impôt de solidarité, il parait cependant nécessaire de prévoir des aménagements en faveur des investissements dans la pierre.

En remplaçant l’ISF par l’IFI, le Président de la république a voulu opposer les Français propriétaires, taxés d’immobilisme, et les Français dynamiques, « en marche », investissant dans les start‑up et les sociétés du CAC 40. L’investissement dans l’immobilier et l’investissement dans l’économie ne sont pourtant pas contradictoires. Une bonne politique fiscale devrait permettre de concilier ces prétendus contraires.

Cest pourquoi la présente proposition de loi entend permettre aux propriétaires assujettis à lIFI de réduire cet impôt du montant des dépenses de travaux quils entreprennent, à la condition que les frais exposés aient été investis au bénéfice des petites et moyennes entreprises qui font vivre les territoires.

Une telle mesure emporterait de nombreuses conséquences vertueuses sur le plan à la fois économique, social, environnemental et culturel.

Premièrement, cette mesure fiscale aurait un impact positif sur l’emploi local des métiers du bâtiment. En effet, les propriétaires auxquels il est laissé une marge de manœuvre financière peuvent procéder à des travaux d’entretien ou d’embellissement de leurs biens, et ainsi, participer à la vie économique du pays en faisant appel à des artisans et en achetant les matériaux à des PME locales.

Ce coup de pouce en faveur des métiers du bâtiment serait le bienvenu puisque selon une étude publiée par le groupe Euler Hermes confirmée par la Fédération française du bâtiment, le secteur devrait poursuivre son ralentissement en France en 2019 après un net coup de frein anticipé en 2018.

Les sommes investies dans les PME du BTP par le biais du dispositif fiscal, objet de la présente proposition de loi, bénéficieront ainsi directement au développement d’un secteur en panne qui, avec 1 400 000 actifs, est pourtant le premier secteur pourvoyeur d’emplois en France.

Cette « dépense fiscale » permettrait ainsi un investissement de plusieurs centaines de millions d’euros dans l’économie réelle en faveur de l’emploi dans le secteur du bâtiment.

En outre, une telle mesure favoriserait un sursaut de commandes de nature à créer les conditions de création de centres de formations d’apprentis dont la France a tant besoin.

Ensuite, le renoncement ponctuel à ces recettes fiscales pourrait également s’inscrire dans une politique de lutte à la fois contre le réchauffement climatique et le mal‑logement.

On dénombre en France près de 7 millions de passoires thermiques. Ces déperditions d’énergie génèrent 26 % des émissions de gaz à effet de serre du pays et pèsent sur le budget des familles qui, pour certaines, n’ont d’autre choix que de se priver des conditions de chauffage décentes.

Dans un objectif à la fois environnemental et social, il est donc essentiel de favoriser un investissement rapide et sérieux dans ce domaine.

Si de nombreux dispositifs existent en la matière, ils ne sont pas adaptés aux cas des foyers modestes locataires de leur logement. Un crédit d’impôt n’est en effet d’aucune utilité financière pour un ménage qui se situe en dessous des seuils d’imposition. Et de manière générale, un locataire sera peu enclin à faire des aménagements dans un logement qu’il occupe provisoirement.

C’est pourquoi il est proposé d’inciter les contribuables assujettis à l’IFI à améliorer la performance énergétique des biens dont ils sont propriétaires et dont 39 % des Français demeurent locataires. La réduction d’impôt envisagée couvrirait ainsi aussi bien les travaux d’isolation que l’installation de systèmes de chauffage basse consommation.

Enfin, le choix d’une telle politique fiscale permettrait à l’État d’organiser les conditions d’une préservation de l’immobilier culturel national.

La France dispose d’un patrimoine architectural remarquable : monuments historiques, bâtiments classés, mais également les très nombreuses belles demeures qui essaiment dans nos contrées et font la renommée esthétique et touristique du pays.

Pourtant, nombre de ces bâtiments ne sont pas suffisamment entretenus, faute de moyens de la part des propriétaires privés. Il parait regrettable de laisser aux seuls investisseurs étrangers, qui ne sont pas soumis à l’IFI, la possibilité d’entretenir correctement notre patrimoine.

Aussi, la réduction de l’IFI pour les résidents, lorsqu’ils entreprennent des travaux de conservation et de restauration de leurs biens, parait, à ce titre, une mesure équitable au regard de l’objectif d’entretien de notre patrimoine commun.

Développer lactivité des PME du bâtiment, soutenir lemploi local, contribuer à la transition énergétique, améliorer les conditions de logement des Français et favoriser la conservation de notre patrimoine architectural, tel est lobjet de la présente proposition de loi, laquelle prévoit la possibilité de réduire lImpôt sur la Fortune Immobilière du montant des dépenses de travaux entrepris sur les biens immobiliers, assiette de limpôt et confiés aux PME locales.


proposition de loi

Article 1er

Après l’article 978 du code général des impôts, il est inséré un article 978 bis ainsi rédigé :

« Art. 978 bis. – I. – Le redevable peut imputer sur l’impôt sur la fortune immobilière le montant égal aux dépenses réalisées au cours de l’année civile et afférentes à des biens immobiliers imposables à ce titre :

« 1° de réparation et d'entretien effectivement supportées par le propriétaire ou supportées pour le compte du locataire par le propriétaire dont celui-ci n'a pu obtenir le remboursement, au 31 décembre de l'année du départ du locataire ;

« 2° d'amélioration, de construction, de reconstruction ou d'agrandissement ;

« 3° effectivement supportées pour la contribution à la transition énergétique dans les conditions définies par l’article 200 quater dans sa version en vigueur au 1er janvier 2019.

« II. – Le bénéfice de l’avantage fiscal prévu au I est subordonné au respect des conditions suivantes par l’entreprise bénéficiaire des dépenses précitées :

« 1° Elle est une petite et moyenne entreprise au sens de l'annexe I du règlement (UE) n° 651/2014 de la commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité ;

2° Elle a son siège de direction effective dans un État membre de l »'Union européenne ou dans un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales ;

« 3° Elle est soumise à l'impôt sur les bénéfices dans les conditions de droit commun ou y serait soumise dans les mêmes conditions si son activité était exercée en France ;

« III. – Cette réduction d’impôt est exclusive :

« 1° de la déduction de ces mêmes dépenses de la valeur des biens immobiliers pris en compte pour le calcul de l’assiette de l’impôt sur la fortune en application de l’article 974 ;

« 2° du crédit d'impôt sur le revenu au titre de ces mêmes dépenses supportées pour la contribution à la transition énergétique du logement mentionné à l’article 200  quater. »

Article 2

La perte de recettes pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.