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N° 2349

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 octobre 2019.

PROPOSITION DE LOI

visant à lutter contre le démarchage téléphonique abusif,

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Fabrice BRUN, Damien ABAD, Emmanuelle ANTHOINE, Nathalie BASSIRE, Valérie BAZINMALGRAS, Émilie BONNIVARD, Valérie BOYER, Gérard CHERPION, Josiane CORNELOUP, MarieChristine DALLOZ, Olivier DASSAULT, Rémi DELATTE, JeanPierre DOOR, Virginie DUBYMULLER, Daniel FASQUELLE, Patrick HETZEL, Brigitte KUSTER, Valérie LACROUTE, Guillaume LARRIVÉ, Sébastien LECLERC, Véronique LOUWAGIE, Olivier MARLEIX, Éric PAUGET, Guillaume PELTIER, Bernard PERRUT, Bérengère POLETTI, Bernard REYNÈS, Martial SADDIER, JeanMarie SERMIER, Michèle TABAROT, Arnaud VIALA,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

« Stop aux pratiques toxiques. » ! Cinq associations de consommateurs ont dénoncé début septembre une explosion des litiges liés au démarchage téléphonique dans le secteur de l’assurance, de la téléphonie et de l’isolation à 1 euro.

D’après le baromètre 2018 des réclamations de consommateurs de la Direction de la répression des fraudes, le nombre des litiges liés au démarchage téléphonique a bondi de 60 % depuis 2012.

Le démarchage téléphonique est en effet vécu comme une intrusion dérangeante dans la vie privée, un véritable harcèlement, par nos contemporains.

Nos compatriotes font même état d’un accroissement sans précédent de ce démarchage avec une recrudescence des appels à répétition, y compris le soir et le week‑end sur les téléphones fixes et portables avec parfois même des relances par messages interpersonnels courts de type SMS.

Selon des études d’opinions 9 français sur 10 se disent « excédés » par ce type de relation commerciale, certains en viennent même à ne plus décrocher leurs téléphones voire à les débrancher excédés par des appels parfois espacés de seulement dix minutes d’intervalle. Ce ras le bol nous le constatons tous les jours sur le terrain.

Il en résulte également que les salariés des entreprises effectuant le démarchage subissent souvent des réponses sèches voir parfois violentes de la part des clients démarchés, cela ajoute au stress au travail et peut dans certains cas contribuer à un mal‑être au travail.

Par ailleurs, à l’heure du développement numérique et de développement des offres commerciales par courrier électronique ces démarchages téléphoniques paraissent en dehors des évolutions technologiques.

La loi n° 2014‑344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a entendu, lutter contre le démarchage téléphonique abusif en créant loi le registre d’opposition au démarchage téléphonique, sur lequel les consommateurs ne souhaitant pas faire l’objet de prospection commerciale par voie téléphonique peuvent s’inscrire. Il est fait interdiction à tout professionnel de démarcher téléphoniquement un consommateur inscrit sur cette liste, sans l’accord de ce dernier.

Ce dispositif, connu sous le nom de Bloctel, est certes une initiative des pouvoirs publics afin de lutter contre le démarchage téléphonique abusif, mais il s’avère insuffisant voie inefficace

Force est de constater que ce dispositif est aujourd’hui dépassé et qu’il convient de le faire évoluer en faisant de l’interdiction du démarchage téléphonique le principe et le démarchage l’exception après acceptation du consommateur afin de lutter efficacement contre le démarchage téléphonique abusif.

Plusieurs voies juridiques peuvent être exploitées, soit dans le cadre de la loi n° 78‑17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, soit dans le cadre du droit de la consommation.

La présente proposition de loi s’inscrit dans le prolongement de la loi  n° 2014‑344 du 17 mars 2014 relative à la consommation et propose de modifier le code de la consommation.

L’article 1er renverse par conséquent le principe applicable en droit de la consommation : l’interdiction du démarchage téléphonique – par appel vocal et par message interpersonnel court (SMS)‑  devient le principe, l’autorisation de démarcher n’étant ouverte qu’aux consommateurs ayant fait la démarche positive d’inscription sur une liste d’acceptation au démarchage téléphonique.

Par ailleurs cet article précise que le démarchage téléphonique ou par voie de message interpersonnel court reste autorisé par principe en cas de relations contractuelles préexistantes. En effet par nature, un client est celui ayant déjà reçu un devis ou une facture du professionnel et qu’il convient des préserver la liberté de la relation et de permettre aux entreprises, et aux artisans d’appeler leurs clients.

Cet article circonscrit en outre le démarchage à des plages horaires ne pouvant déranger nos concitoyens et exclut par conséquent les temps de repas, les temps de sieste afin de préserver le bien‑être des enfants gardés à leur domicile, ainsi que les soirées et week‑end afin de préserver le droit à une vie privée et familiale normale.

L’article 2 prévoit pour sa part que lorsqu’un professionnel est amené à recueillir des données téléphoniques à l’occasion d’un contrat, le contrat mentionne le droit pour le consommateur de ne pas faire l’objet de démarchage.

Cet article prévoit également que lorsqu’un professionnel contacte un consommateur par téléphone, l’utilisation d’un numéro masqué est interdite et le numéro affiché avant l’établissement de l’appel doit être affecté au professionnel pour le compte duquel l’appel est effectué.

L’article 3 précise que la location ou la vente de fichiers contenant des données téléphoniques et comportant les coordonnées d’un ou plusieurs consommateurs ne figurant pas sur la liste d’acceptation au démarchage téléphonique est interdite.

Les articles 4 et 5 sont des articles rédactionnels de cohérence avec le nouveau dispositif proposé.

L’objectif du présent texte qui modifie le code de la consommation est ainsi de remplacer le principe d’autorisation par un principe d’autorisation, les personnes pouvant être appelées étant celles qui ont expressément donnes leur autorisation

Tels sont mesdames Messieurs, les objectifs de la présente proposition de loi.


proposition de loi

Article 1er

L’article L. 221‑16 du code de la consommation est ainsi rédigé

« La prospection commerciale par téléphone et par voie de message interpersonnel court est interdite sauf acceptation du consommateur.

Le consommateur qui souhaite faire l’objet de prospection commerciale par voie téléphonique ou voie de message interpersonnel court doit avoir donné son accord au préalable et peut gratuitement s’inscrire sur une liste d’acceptation au démarchage téléphonique.

Le professionnel, directement ou par l’intermédiaire d’un tiers agissant sur son compte ne peut démarcher téléphoniquement ou par voie de message interpersonnel court que les consommateurs inscrits sur cette liste, sauf en cas de relations contractuelles préexistantes.

L’entreprise prenant contact avec un consommateur potentiel par voie téléphonique inscrit sur la liste d’acceptation en vue de la conclusion d’un contrat de vente d’un bien ou de la fourniture d’un service ne peut effectuer cette démarche que du lundi au vendredi de 9 heures à 12 heures et de 15 heures à 18 heures. Aucun appel ne peut être effectué un jour férié. 

Article 2

Les deux premiers alinéas de l’article L. 223‑3 du code de la consommation sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :

« Lorsqu’un professionnel est amené à recueillir des données téléphoniques à l’occasion d’un contrat, le contrat mentionne le droit pour le consommateur de ne pas faire l’objet de démarchage téléphonique et de conserver le bénéfice de l’interdiction de principe de l’article L. 221‑16 du présent code.

« Lorsqu’un professionnel contacte un consommateur par téléphone dans les conditions prévues à l’article L. 221‑16, l’utilisation d’un numéro masqué est interdite.

« Le numéro affiché avant l’établissement de l’appel en application du deuxième alinéa est affecté au professionnel pour le compte duquel l’appel est effectué. En cas de rappel du consommateur à ce numéro, ce professionnel s’identifie avant la facturation de toute prestation de services autre que le prix de la communication.

Article 3

Après le mot : « consommateurs », la fin de l’article L. 223‑3 du code de la consommation est ainsi rédigée : « ne figurant pas sur la liste d’acceptation au démarchage téléphonique. »

Article 4

Au premier alinéa de l’article L. 223‑4 du code de la consommation, les mots : « de la liste d’opposition » sont remplacés par les mots : « d’acceptation ».

Article 5

L’article L. 223‑5 du code de la consommation est abrogé.