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N° 2385

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 novembre 2019.

PROPOSITION DE LOI

relative à la sécurisation des mandats électoraux municipaux,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Éric PAUGET, Véronique LOUWAGIE, Frédérique MEUNIER, Bernard PERRUT, Robin REDA, JeanLuc REITZER, Éric STRAUMANN, Arnaud VIALA,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

De nombreux signaux nous alertent quant aux risques de radicalisation et de subversions diverses venant de ceux qui placent les lois de la religion au‑dessus des lois de la république. L’infiltration de notre système démocratique républicain par des candidats qui se nourrissent du communautarisme et dont la radicalisation pousse aux extrémismes, nous impose de prendre des mesures de prévention et de prudence pour éviter ces dérives.

Lors des prochaines élections municipales se profile ce type de menaces, nous démontrant l’urgence d’adapter nos outils législatifs.

Jamais la France n’acceptera de chantage à la République. Aucune haine d’une communauté à l’égard d’un système qu’il défie ne peut justifier la prise en otage de la République.

Il n’existe pas d’élus hors de la République. C’est parce nos élus respectent les valeurs de la France qu’ils sont dignes de porter les insignes de la République.

Il ne s’agit pas ici de restreindre de manière disproportionnée le droit d’éligibilité, il s’agit de s’assurer que les porteurs des insignes de la République n’en sont pas ses ennemis. Il s’agit donc pour la sécurité de tous, qu’il ait put être démontré qu’aucune candidature ne fasse l’objet d’une dérive radicale.

En reconnaissant que la création d’un critère général d’inéligibilité, individualisé par l’enquête administrative individuelle d’éligibilité d’une candidature, constitue alors un critère individualisé, le législateur ne méconnait pas le principe d’individualisation des sanctions soulevé par la décision QPC n° 2010‑6/7 du 11 juin 2010.

Par ailleurs, la restriction du champ de l’enquête administrative prévue à l’article L. 114‑3 du code de la sécurité intérieure à la menace terroriste, limite à priori la portée du contrôle de proportionnalité.

La préservation du droit de vote concourt, malgré l’inéligibilité issue de l’incompatibilité administrative, au respect du principe d’égalité devant les suffrages en préservant le droit de l’électeur qui ne peut être élu.

Enfin, le contrôle de légalité d’une candidature à l’élection municipale conduit le préfet à apprécier l’opportunité et la proportionnalité des réponses à apporter à l’enquête administrative au vu des enjeux de la candidature à un mandat municipal.

Dans la mesure où les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’intérêt commun, et que la loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société, la présente proposition opère une conciliation proportionnée, entre les exigences constitutionnelles qui garantissent le principe d’égalité devant les suffrages et le risque terroriste qui menace l’État et la nation dans le respect de la décision n° 2011‑628DC.

Cette proposition estime que les garanties apportées par la création d’un critère individualisé d’inéligibilité, par la spécialité et la gravité des menaces poursuivies ainsi que par le contrôle de proportionnalité de la portée de l’enquête administrative, la décision d’incompatibilité individuelle d’une candidature notifiée par le préfet, porte finalement une atteinte mesurée au droit d’éligibilité.

C’est avec le souci de préserver notre intérêt commun, et dans le respect du contrôle de proportionnalité des menaces, que ce texte vise à combattre les dérives des intentions terroristes.

Son article 1er instaure le gage d’une exemplarité de la candidature. Applicable aux communes de moins de 1 000 habitants, il crée l’obligation de communication du bulletin n° 3 du casier judiciaire en l’ajoutant aux pièces à joindre à la candidature de chaque membre de la liste et crée la possibilité de les soumettre à une enquête administrative.

L’article 2 instaure et précise les mêmes dispositions législatives que l’article 1er pour les communes de plus de 1 000 habitants.

L’article 3 définit l’enquête administrative d’éligibilité au sein du code de la sécurité intérieure.

L’article 4 encadre et précise les modalités d’accès et de consultation des traitements automatisés de données personnelles aux fins d’enquêtes administratives prévues à l’article L. 114‑3 du code de la sécurité intérieure.

L’article 5 crée une incompatibilité au sein du code électoral, entre le mandat de conseiller municipal et les résultats de l’enquête administrative individuelle ayant démontré les risques et les menaces avérées du candidat concerné par l’élection municipale.

Enfin, l’article 6 précise les modalités d’accompagnement financières de la présente proposition de loi pour l’État.

Mesdames et Messieurs les députés, il est nécessaire de sécuriser les candidatures des individus se présentant aux élections pour éviter toute dérive de quelque ordre que ce soit ; tel est le sens de la présente proposition de loi visant à sécuriser les mandats électoraux municipaux et à lutter contre la radicalisation.


proposition de loi

Article 1er

L’article L. 255‑4 du code électoral est ainsi modifié :

1° Au septième alinéa, après le mot : « assortie », sont insérés les mots : « , d’un bulletin n° 3 du casier judiciaire délivré depuis moins de trois mois, » ;

2° Après le même alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La déclaration de candidature est soumise à l’enquête administrative d’éligibilité prévue à l’article L. 114‑3 du code de la sécurité intérieure. »

Article 2

L’article L. 265 du code électoral est ainsi modifié :

1° Au cinquième alinéa, après la référence : « article L. 228 », sont insérés les mots : « , d’un bulletin n° 3 du casier judiciaire délivré depuis moins de trois mois, » ;

2° Après le même alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La déclaration de candidature est soumise à l’enquête administrative d’éligibilité prévue à l’article L. 114‑3 du code de la sécurité intérieure. »

Article 3

Le chapitre IV du titre Ier du livre Ier du code de la sécurité intérieure est complété par un article L. 114‑3 ainsi rédigé :

« Art. L.1143. – I. – Aux seules fins de prévenir la commission d’actes de terrorisme, la candidature à un mandat électif municipal, est précédée d’une enquête administrative d’éligibilité destinée à vérifier que le comportement, les agissements ou la moralité des personnes physiques intéressées n’est pas incompatible avec l’exercice de ce mandat.

« Le représentant de l’État dans le département diligente une enquête administrative pour toutes les candidatures aux élections municipales. Dans le respect d’un contrôle de proportionnalité, elle vise à s’assurer, que les candidats à une élection municipale, ne présentent aucuns risques ou menaces pour la sûreté, la sécurité, et l’ordre public eu égard aux responsabilités et aux exigences politiques et de police administrative qui leur incombent. En complément des exigences morales, éthiques et déontologiques, cette enquête administrative, vise à prévenir la commission d’acte de terrorisme et les atteintes contre les intérêts fondamentaux de la nation.

« À réception du dépôt des candidatures de liste accompagnées des déclarations de candidature de chaque membres de la liste, le préfet diligente l’enquête administrative pour chaque candidat. Les déclarations de candidature des personnes concernées sont soumises à l’enquête administrative. Chaque candidat est informé qu’il est susceptible dans ce cadre, de faire l’objet d’une enquête administrative d’éligibilité dans les conditions du présent article.

« L’enquête administrative mentionnée au présent article peuvent donner lieu à la consultation des bulletins n° 3 du casier judiciaire remis volontairement par les candidats et aux traitements automatisés de données à caractère personnel  mentionné à l’article 230‑19 du code de procédure pénale y compris pour les données portant sur des procédures judiciaires en cours, dans la stricte mesure exigée par la prévention du terrorisme, la sûreté de l’État et la défense des intérêts fondamentaux de la nation. Un décret détermine les conditions dans lesquelles les personnes intéressées sont informées de cette consultation.

« Lorsque l’enquête administrative ne démontre aucune menace ou risque résultant du dépôt de la candidature à l’élection municipale, et par l’absence de notification d’un avis d’incompatibilité de la part du représentant de l’État dans le département, celui‑ci est alors réputé compatible. »

Article 4

Le chapitre IV du titre III du livre II du code de la sécurité intérieure est complété par un article L. 234‑5 ainsi rédigé :

«Art. L. 2345. – Un décret en Conseil d’État pris aux seules fins de prévenir la commission d’actes de terrorisme, fixe la liste des enquêtes administratives mentionnées à l’article L. 114‑3 qui donnent lieu à la consultation des traitements automatisés de données à caractère personnel mentionnés à l’article 230‑19 du code de procédure pénale, y compris pour les données portant sur des procédures judiciaires en cours, dans la stricte mesure exigée par la prévention du terrorisme, la sûreté de l’État et la défense des intérêts fondamentaux de la nation. Il détermine les conditions dans lesquelles les personnes intéressées sont informées de cette consultation.

« Un décret en Conseil d’État détermine les services concernés ainsi que les modalités et les finalités de l’accès aux traitements automatisés mentionnés au présent article. »

Article 5

Après l’article L. 237‑1 du code électoral, sont insérés deux articles L. 237‑2 et L. 237‑3 ainsi rédigés :

« Art. L.2372. – Le mandat de conseiller municipal est incompatible avec les résultats de l’enquête administrative individuelle d’éligibilité prévue par l’article L. 114‑3 du code de la sécurité intérieure, déclenchée volontairement par l’acte de candidature d’un membre d’une liste, dont les résultats issus du contrôle de légalité et de proportionnalité du préfet, ont démontré que le comportement, les agissements ou la moralité du candidat, présentent un risque ou une menace d’ordre terroriste pour la sureté de l’État ou les intérêts fondamentaux de la Nation.

« Art. L.2373. – Lorsque le résultat de l’enquête administrative déclenchée volontairement par la candidature à un mandat électif municipal d’un candidat, démontre à l’issue du contrôle de légalité et de proportionnalité du préfet, que le comportement, les agissements ou la moralité des personnes physiques intéressées, est incompatible avec l’exercice de ce mandat électif municipal, le représentant de l’État dans le département notifie à la personne concernée, un avis d’incompatibilité motivé portant sur la candidature à l’élection du candidat concerné conformément aux dispositions de l’article L. 237‑2 du code électoral. Le recours éventuel contre l’acte de notification du préfet n’est pas suspensif.

« La candidature du destinataire qui a fait l’objet d’un avis d’incompatibilité motivé du représentant de l’État dans le département, est alors rejetée, par notification du représentant de l’État. Cette notification résultant de l’enquête administrative est transmise au candidat concerné et le cas échéant au responsable de liste par le représentant de l’État dans le département. »

Article 6

La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575A du code général des impôts.