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N° 2647

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 février 2020.

PROPOSITION DE LOI

visant à surseoir à lexpulsion locative
quand un mineur vit dans le logement,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

MarieGeorge BUFFET, Alain BRUNEEL, André CHASSAIGNE, Pierre DHARRÉVILLE, JeanPaul DUFRÈGNE, Elsa FAUCILLON, Sébastien JUMEL, JeanPaul LECOQ, Stéphane PEU, Fabien ROUSSEL, Hubert WULFRANC,

Député·e·s.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le logement est un droit fondamental. Il est reconnu comme tel par de nombreux textes, notamment internationaux. Ainsi, la Déclaration universelle des droits de l’Homme de 1948 dispose dans son article 25 que : « Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bienêtre et ceux de sa famille, notamment pour lalimentation, lhabillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, dinvalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté. »

De même, Le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, adopté à New York le 16 décembre 1966 par l’Assemblée générale des Nations Unies dont l’effectivité en droit interne a été reconnue par la Cour de cassation par un arrêt du 16 décembre 2008 dispose que « Les États parties au présent Pacte reconnaissent le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour ellemême et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants, ainsi quà une amélioration constante de ses conditions dexistence. Les États parties prendront des mesures appropriées pour assurer la réalisation de ce droit et ils reconnaissent à cet effet limportance essentielle dune coopération internationale librement consentie. »

En 2017, 15 547 ménages ont été expulsés avec le concours de la force publique (source ministère de la justice), soit environ 30 000 personnes et on estime à deux à trois fois plus de personnes parties en amont, se sentant contraintes par la procédure d’expulsion. Parmi ces 15 547 ménages, 6 354 sont en Île‑de‑France, dont 2 040 en Seine‑Saint‑Denis et 1 229 à Paris.

Selon la Fondation Abbé Pierre, le nombre des expulsions a augmenté de 46 % depuis 10 ans en France et de 80 % en en Île‑France.

Dans 95 % des cas, les expulsions sont prononcées au motif d’impayés de loyer. Ces derniers sont globalement stables depuis 2006, représentant 6,5 % des loyers du parc social et 2,9 % du parc privé, contre respectivement 6,4 % et 3,4 % en 2006.

Malgré divers dispositifs législatifs et réglementaires mis en place ces dernières années afin de mieux protéger les locataires, aucune mesure n’a réellement permis d’enrailler la hausse des expulsions locatives. Les expulsions sans solution de relogement, même des ménages prioritaires dans le cadre du DALO, continuent d’avoir lieu, malgré diverses circulaires, notamment du 26 octobre 2012, demandant aux préfets de ne pas concourir à la force publique dans ces cas.

L’axe prioritaire afin d’empêcher les expulsions reste la prévention, dès les premiers impayés. Certains dispositifs existant doivent à ce titre être renforcé, notamment les commissions de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX) créées par la loi du 13 juillet 2006 qui ont vu leurs missions renforcées dans la cadre de la loi ALUR du 24 mars 2014.

Qu’ils s’agissent du renforcement du fonds de solidarité logement, du fonds d’indemnisation pour les propriétaires afin de réduire le concours à la force publique, plusieurs mesures doivent être engagées.

Cependant, l’urgence dès maintenant est de suspendre les expulsions locatives sans solutions de relogement digne.

Les enfants pâtissent particulièrement de ces expulsions, les transférant de logements temporaires en logements temporaires, brisant souvent l’unité de la famille. S’il n’est jamais justifiable de jeter des personnes à la rue, sans solution de relogement, le procédé est encore plus pénible quand des enfants vivent au sein du logement.

Priver un enfant d’un toit c’est le priver d’une scolarité épanouie et d’une vie sociale normale. Cela met en péril toute sa vie future. Aussi, au nom de la protection des droits des enfants, garantis en droit international comme en droit interne, aucune expulsion sans solution de relogement remplissant les conditions suffisantes pour le respect de ces droits doit être exécutée.

Cette PPL s’inscrit dans la démarche portée par plusieurs groupes politiques depuis plusieurs années, notamment pour empêcher les expulsions des ménages relevant du DALO ou encore mettant en place une garantie universelle des loyers.

Ainsi, les cosignataires proposent de suspendre toutes les expulsions locatives lorsqu’un mineur est présent au sein du logement.

proposition de loi

Article unique

Après l’article L. 412‑6 du code des procédures civiles d’exécution, il est inséré un article L. 412‑6‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 41261. – Nonobstant toute décision d’expulsion passée en force de chose jugée et malgré l’expiration des délais accordés en vertu des articles précédents, il est sursis à toute mesure d’expulsion lorsqu’une ou des personnes mineures vivent au sein du logement, à moins que le relogement des intéressés soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l’unité et les besoins de la famille. »