N° 2768
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
QUINZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le.24 mars 2020.
PROPOSITION DE LOI
visant à prévoir l’accompagnement des sorties scolaires uniquement
par du personnel placé sous l’autorité de l’Éducation nationale,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par Mesdames et Messieurs
Patrick HETZEL, Aurélien PRADIÉ, Emmanuelle ANTHOINE, Valérie BEAUVAIS, Émilie BONNIVARD, Jean‑Yves BONY, Jean‑Claude BOUCHET, Jacques CATTIN, Dino CINIERI, Pierre CORDIER, Olivier DASSAULT, Éric DIARD, Jean‑Pierre DOOR, Jean‑Jacques FERRARA, Laurent FURST, Annie GENEVARD, Claude GOASGUEN, Éric PAUGET, Bernard PERRUT, Didier QUENTIN, Frédéric REISS, Jean‑Luc REITZER, Bernard REYNÈS, Jean‑Charles TAUGOURDEAU, Jean‑Louis THIÉRIOT, Laurence TRASTOUR‑ISNART, Stéphane VIRY,
députés.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Depuis quelques semaines, une nouvelle polémique agite la France : une maman portant un voile peut‑elle accompagner des élèves lors de sorties scolaires ?
Interrogé à ce sujet, Jean‑Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, déclarait : « la loi n’interdit pas aux femmes voilées d’accompagner les enfants, mais nous ne souhaitons pas encourager le phénomène ».
La loi ne peut pas être dans le « en même temps », il semble important de reprendre les différents textes juridiques encadrant les sorties scolaires.
La loi de 2004 sur l’interdiction du port de signes et tenues à caractère religieux à l’école, au collège et au lycée, précise dans son champ d’application que la loi ne concerne pas les parents d’élèves et par conséquence pas les parents accompagnateurs. Elle interdit le port de signes ostensibles aux seuls élèves – parce que mineurs en phase d’acquisition des bases du savoir.
La circulaire Chatel organisant la rentrée 2012 et publiée le 27 mars 2012 au Bulletin officiel demande à ce que les parents d’élèves accompagnant les sorties scolaires ne portent pas de signes religieux ostentatoires :
« Il est recommandé de rappeler dans le règlement intérieur que les principes de laïcité de l’enseignement et de neutralité du service public sont pleinement applicables au sein des établissements scolaires publics. Ces principes permettent notamment d’empêcher que les parents d’élèves ou tout autre intervenant manifestent, par leur tenue ou leurs propos, leurs convictions religieuses, politiques ou philosophiques lorsqu’ils accompagnent les élèves lors des sorties et voyages scolaires ».
Sans avoir été officiellement abrogée, cette circulaire n’est plus de mise depuis une étude du Conseil d’État de 2013 qui confirme que les parents accompagnateurs ne sont pas soumis au principe de neutralité. Ils n’exercent pas la mission de service public de l’éducation comme le font les enseignants.
Dans le vade‑mecum sur la laïcité du ministère de l’éducation nationale, il est clairement précisé que les parents ne sont pas soumis à la neutralité religieuse, ils ont le droit de s’habiller comme bon leur semble : « Les parents d’élèves peuvent, lorsqu’ils participent à l’encadrement d’une classe en sortie scolaire, porter un signe ou une tenue par lequel ils manifestent une appartenance religieuse. »
Cette application de la laïcité « à géométrie variable et à la carte » n’est pas satisfaisante. Elle contribue à maintenir une insécurité juridique qui pèse sur les directeurs d’école, les chefs d’établissement et sur toute la communauté éducative.
Aussi, pourquoi ne pas considérer les sorties scolaires comme faisant partie intégrante du temps scolaire et s’inscrivant dans le cadre du service public de l’éducation ?
Dans ce cas, les accompagnants des sorties scolaires seraient obligatoirement du personnel de l’éducation nationale titulaires ou contractuels, permanents ou temporaires.
Cela éviterait de se placer sous l’angle des signes ostentatoires qui divisent.
Aussi, cette proposition de loi prévoit, par une modification du code de l’éducation, l’accompagnement des sorties scolaires uniquement par du personnel placé sous l’autorité de l’éducation nationale.
Pour mettre en œuvre cette disposition, trois solutions non exclusives l’une de l’autre sont susceptibles d’être mobilisées par l’éducation nationale. D’une part, on peut imaginer que le vivier des étudiants apprenti professeur puisse être mis à contribution pour effectuer les sorties scolaires. D’autre part, on peut aussi envisager que dans les endroits où les collectivités territoriales ont mis en place des dispositifs périscolaires, l’éducation nationale contractualise et indemnise financièrement les collectivités afin que celles‑ci mettent ponctuellement à disposition des personnels pour assurer les sorties scolaires. Et enfin, on peut évidemment prévoir des recrutements ponctuels de personnels contractuels de l’éducation nationale pour accompagner les sorties scolaires.
D’un point de vue financier, on peut estimer qu’une telle disposition représenterait de l’ordre de 100 millions d’euros par an pour le budget de l’éducation nationale, soit moins de 0,2 % du budget de l’éducation en France. Il convient d’ajouter à cela que le budget de l’État prend en charge un fonds de soutien aux activités périscolaires qui est reversé aux collectivités territoriales. L’abondement de ce fonds serait de nature à traiter, sinon en intégralité, tout du moins en partie la question. Ce fonds représentait un montant de 373 millions d’euros en 2017 et 237 millions d’euros en 2018.
proposition de loi
Article unique
I. – À l’article L. 141‑5 du code de l’éducation, après le mot : « enseignement », sont insérés les mots : « et les sorties scolaires ».
II. – La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.