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N° 2769

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 mars 2020.

PROPOSITION DE LOI

visant à garantir un service minimum
dans les transports en cas de grève,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Laurence TRASTOURISNART, Émilie BONNIVARD, JeanYves BONY, Ian BOUCARD, JeanClaude BOUCHET, Josiane CORNELOUP, Claude de GANAY, Charles de la VERPILLIÈRE, Nicolas FORISSIER, Laurent FURST, Mansour KAMARDINE, Brigitte KUSTER, Marc LE FUR, Constance LE GRIP, Véronique LOUWAGIE, Éric PAUGET, Guillaume PELTIER, Bernard PERRUT, Robin REDA, Frédéric REISS, JeanLuc REITZER, Bernard REYNÈS, Raphaël SCHELLENBERGER, JeanMarie SERMIER, Isabelle VALENTIN, Pierre VATIN, Arnaud VIALA, Michel VIALAY,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Mesdames, Messieurs,

La France est le deuxième pays de l’Union européenne à capitaliser le nombre le plus élevé de journée de grève entre 2010 et 2017 ([1]). Les évènements de ces dernières années ont confirmé cette tendance, surtout dans le secteur des transports. Le printemps 2018 a été troublé par la plus longue grève de la SNCF depuis 30 ans. Quant à l’hiver 2019, il a été marqué par la grève massive de la SNCF, de la RATP et des transports en commun.

Les grèves des transports ont toujours des impacts pernicieux pour notre pays sur le plan social, écologique et économique.

En effet, les services publics de transport occupent pour des millions de Français, une place primordiale dans leur vie quotidienne et plus particulièrement pour les plus modestes qui n’ont pas d’autres alternatives pour se déplacer et se rendre sur leur lieu de travail. À chaque grève dans les transports, nous assistons à une prise d’otage des usagers du service public.

Les transports collectifs constituent en outre une alternative positive à la voiture individuelle : c’est moins de gaz à effet de serre et c’est moins de polluant atmosphérique. Ils sont un outil indispensable à la réussite de la transition écologique et énergétique. Or, lors des grèves, les usagers des services publics de transport vivant dans les territoires éloignés de leur lieu d’activité professionnelle sont obligés de prendre la voiture, ce qui va à rebours de l’objectif de transition. Quant aux usagers qui font le choix des modes doux de déplacement dans les grandes villes, ils doivent subir le taux de pollution qui peut nuire à leur santé.

Enfin, les grèves mettent en péril de nombreuses activités économiques : sur la croissance, sur les TPE, sur les PME et sur les commerçants. Le prix d’une journée de grève engendrerait 400 millions d’euros de pertes ([2]).

Cela ne peut plus durer.

Le droit de grève est légitime. Mais, il est devenu illimité, absolu. Il est devenu le droit de bloquer.

Pourtant, le septième alinéa du préambule de la Constitution de 1946 dispose que : « Le droit de grève sexerce dans le cadre des lois qui le règlementent ».

Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 79‑105 DC du 25 juillet 1979, précise que « notamment en ce qui concerne les services publics, la reconnaissance du droit de grève ne saurait avoir pour effet de faire obstacle au pouvoir du législateur dapporter à ce droit les limitations nécessaires en vue dassurer la continuité du service public qui, tout comme le droit de grève, a le caractère dun principe de valeur constitutionnelle. »

Si le droit de grève est nécessaire dans une démocratie, il ne doit pas empiéter sur le principe de continuité du service public mais aussi sur la liberté d’aller et venir, sur la liberté du commerce et de l’industrie et sur la liberté du travail.

La loi du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports a été une avancée concrète mais elle ne s’avère pas pleinement efficace lors des grèves massives et des blocages.

Pour toutes ces raisons, il apparaît indispensable de prévoir un véritable service minimum obligatoire durant les heures de pointe. Chez nos voisins, comme l’Italie ou le Portugal, le service minimum est devenu une réalité.

Nous proposons donc d’autoriser la cessation concertée du travail des personnels des entreprises, organismes et établissements publics ou privés chargés de la gestion d’un service public de transports en commun et/ou ferroviaire uniquement entre 10 heures et 17 heures et entre 21 heures et 5 heures.

Un tel renforcement de la loi serait tout à fait compatible avec le droit de grève tel qu’il est reconnu par la Constitution. Il permettrait ainsi de protéger les usagers du service public qui pourraient se déplacer sans entraves aux heures de pointes et plus largement entre 5 et 10 heures et entre 17 et 21 heures.


proposition de loi

Article unique

Après l’article L. 2512‑5 du code du travail, il est inséré un article L. 2512‑6 ainsi rédigé :

« Art. L. 25126. – La cessation concertée du travail des personnels des entreprises, organismes et établissements publics ou privés chargés de la gestion d’un service public de transports en commun ou de transports ferroviaires ne peut avoir lieu qu’entre 10 heures et 17 heures et qu’entre 21 heures et 5 heures. Les modalités de mise en œuvre du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État. »


([1])  Données de l’Institut syndical européen (ISE).

([2])  Donnée de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME).